N° 4012 - Proposition de résolution européenne de M. Hervé Gaymard sur les négociations du cycle de Doha et l'avenir de l'Organisation mondiale du commerce



No 4012

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 novembre 2011.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION
EUROPÉENNE

sur les négociations du cycle de Doha et l’avenir de
l’Organisation mondiale du commerce
,

(Renvoyée à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement)

PRÉSENTÉE,

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPEENNES,


par M. Herv
É GAYMARD et Mme Marietta KARAMANLI,

Rapporteurs,

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

Article unique

L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu l’accord de Marrakech du 15 avril 1994 instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC),

Vu la déclaration de la Conférence ministérielle de l’OMC adoptée à Doha le 14 novembre 2001,

Vu les objectifs du Millénaire pour le développement des Nations unies adoptés en septembre 2000 dans le cadre de l’Organisation des Nations unies,

Considérant que le Programme de Doha pour le développement s’est donné pour objectif, d’ouvrir de nouvelles perspectives commerciales, de renforcer les règles multilatérales et de remédier aux asymétries des échanges internationaux afin d’y intégrer les pays en développement, notamment les pays les moins avancés (PMA),

Considérant que, depuis la Conférence ministérielle de juillet 2008, aucune avancée dans les négociations n’a été possible et qu’aucun accord sur les questions en suspens ne sera vraisemblablement conclu lors de la huitième conférence ministérielle qui se tiendra du 15 au 17 décembre 2011,

Considérant que les Etats membres du G20 ont, dans leur communiqué final du 4 novembre 2011, renoncé à appeler une nouvelle fois à la conclusion réussie du cycle de Doha,

Considérant que l’enlisement des négociations et le recours accru aux accords commerciaux bilatéraux et régionaux porte atteinte à la crédibilité de l’OMC et au système multilatéral, favorise l’unilatéralisme et crée des rapports de force défavorables aux pays en développement,

Considérant, d’une part, l’interférence accrue entre les enjeux commerciaux et les défis environnementaux, sociaux, monétaires, d’accès aux matières premières, de souveraineté et de sécurité alimentaire et, d’autre part, la spécificité institutionnelle de l’OMC consistant en un système de règles et de procédures encadrées par un mécanisme de règlement des différends,

1. Est convaincue de l’avantage que représente l’OMC en tant qu’institution centrale chargée de relever les défis de la gouvernance commerciale mondiale, en liaison avec les autres institutions internationales et considère fondamentale l’organisation, sous son égide, de négociations multilatérales ne laissant pas en tête à tête des pays ayant des pouvoirs de négociation asymétriques, ce qui dans une négociation bilatérale est de nature à causer des dommages aux pays les plus faibles ;

2. Souligne que, plus que la libéralisation des échanges sur lesquels ont buté et échoué les négociations, l’enjeu pour le système commercial multilatéral est désormais leur régulation ; la création de règles de droit par l’OMC constitue un levier pour avancer dans le sens d’un développement d’échanges plus équitables et plus durables ;

3. Rappelle son attachement au « consensus de Genève » qui place le développement au cœur des préoccupations du cycle de Doha ainsi que la nécessité de mettre en place un traitement spécial et différencié pertinent, de renforcer les programmes d’aide au commerce et d’engager une réflexion sur une différenciation entre pays en développement ;

4. Considère indispensable une mise en œuvre immédiate de mesures en faveur des pays les moins avancés sur les points suivants : un accès au marché en exemption de droits et quotas pour au moins 97 % des lignes tarifaires , conformément à ce qui avait été décidé lors de la conférence de Hong Kong en 2005 ainsi que la poursuite de l’effort des pays développés pour suivre le modèle européen de l’initiative « Tout sauf les armes » , la suppression des subventions au coton, un traitement spécial et différencié et l’amélioration du système de règles d’origine dans le sens d’une plus grande transparence et d’une simplicité accrue ;

5. Estime que des progrès rapides pourraient être réalisés dans l’agenda de Doha, d’une part, sur les négociations relatives à la facilitation des échanges qui ont un impact positif sur la baisse des coûts de transaction et la prévention des abus et d’autre part, sur des sujets d’accès aux marchés non agricoles (NAMA) dans certains secteurs, comme les biens et services environnementaux ;

6. Juge qu’aucune avancée ne peut être envisagée si les Etats membres de l’OMC n’engagent une réflexion sur l’évolution de leurs situations économiques respectives depuis le lancement du cycle de Doha et demande aux pays émergents d’assumer une partie du coût de la négociation, en fonction de leur poids effectif dans l’économie mondiale ;

7. Soutient que les préoccupations relatives à la protection de l’environnement et du climat, ainsi que celles relatives aux normes sociales minimales inscrites dans la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux du travail de l’Organisation internationale du travail de 1998, doivent être articulées avec les règles du commerce international, dans la mesure où le préambule de l’OMC fait expressément mention d’un objectif de développement durable ;

8. Tout en se félicitant de la création du système d’information sur les marchés agricoles dans le cadre du G20 agricole, regrette que les questions de sécurité alimentaire et de lutte contre la volatilité de prix agricoles fassent défaut dans l’agenda de Doha , demande que les règles limitent le droit des pays exportateurs de restreindre leurs exportations, sauf pour ce qui est nécessaire pour permettre un approvisionnement suffisant et juge nécessaire que l’OMC participe à l’élaboration d’un code de bonne conduite pour les cessions d’actifs agricoles ;

9. Estime que les restrictions à l’exportation de ressources naturelles stratégiques dont la disponibilité est limitée et pour lesquelles il n’existe aucune source d’approvisionnement alternative doivent être soumises aux règles du commerce international ;

10. Souligne les risques de protectionnisme déguisé que constituent des politiques de change ne correspondant pas aux fondamentaux des économies et invite l’OMC et le Fonds monétaire international à coopérer pour mettre en place un instrument opérationnel sur les changes ;

11. Rappelle que l’Union européenne a, en matière agricole, établi ses lignes rouges sur la base du « paquet » de juillet 2008 mais estime prématuré de conclure un accord séparé sur les questions agricoles dans la mesure où cela priverait l’Union européenne de marges de manœuvre dans des domaines offensifs comme les services et des indications géographiques ;

12. Estime indispensable d’engager des réformes sur le fonctionnement et la gouvernance de l’OMC, en préférant aux négociations par cycle, un processus régulier d’élaboration et d’actualisation de la règle de droit respectueux de l’équilibre des concessions réciproques, en mettant en place un comité exécutif, en examinant les possibilités d’alternative à l’engagement unique ( accords plurilatéraux et accords de masse critique), en assurant plus de cohérence entre engagements multilatéraux et accords commerciaux régionaux et en perfectionnant le mécanisme de règlement des différends pour plus de transparence et une meilleure prise en compte des spécificités des pays en développement ;

13. Demande aux Etats membres de l’OMC de favoriser la mise en place de liens institutionnels avec les autres institutions internationales : l’Organisation internationale du travail (OIT), l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED), la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CNUCC) ainsi que le Fonds monétaire international (FMI) ;

14. Invite le G20 à demander au Fonds monétaire international (FMI), en liaison avec l'OMC et la Banque mondiale, d'engager une réflexion sur la mise en place d'un mécanisme de compensation multilatérale entre Etats excédentaires et Etats déficitaires, en liant les problématiques du commerce, de la dette et des finances.


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