N° 1094 - Proposition de résolution de M. Didier Mathus tendant à la création d'une commission d'enquête sur les liens existant entre les acteurs du pouvoir exécutif et des pouvoirs économiques et sur les restructurations au sein des organes de presse et des services de communication audiovisuelle, ainsi que sur leurs conséquences au regard du respect du pluralisme et de l'indépendance de la presse et des médias et sur toutes les dispositions susceptibles d'être prises afin de garantir ce pluralisme et cette indépendance



Document

mis en distribution

le 1er août 2008


N° 1094

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 juillet 2008.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête sur les liens existant entre les acteurs du pouvoir exécutif et des pouvoirs économiques et sur les restructurations au sein des organes de presse et des services de communication audiovisuelle, ainsi que sur leurs conséquences au regard du respect du pluralisme et de l'indépendance de la presse et des médias et sur toutes les dispositions susceptibles d'être prises afin de garantir ce pluralisme et cette indépendance,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Didier MATHUS, Patrick BLOCHE, Michel FRANÇAIX,
Jean-Marc AYRAULT,
François HOLLANDE, et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (1) et apparentés (2),

députés.

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(1)  Ce groupe est composé de : Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux, MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Mme Delphine Batho, M. Jean-Louis Bianco, Mme Gisèle Biemouret, MM. Serge Blisko, Patrick Bloche, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Jean-Michel Boucheron, Mme Marie-Odile Bouillé,

M. Christophe Bouillon, Mme Monique Boulestin, M. Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Alain Cacheux, Jérôme Cahuzac, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Bernard Cazeneuve, Jean-Paul Chanteguet, Alain Claeys, Jean-Michel Clément, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mmes Catherine Coutelle, Pascale Crozon, M. Frédéric Cuvillier, Mme Claude Darciaux, M. Pascal Deguilhem, Mme Michèle Delaunay, MM. Guy Delcourt, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, Julien Dray, Tony Dreyfus, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Mme Odette Duriez, MM. Philippe Duron, Olivier Dussopt, Christian Eckert, Henri Emmanuelli, Mme Corinne Erhel, MM. Laurent Fabius, Albert Facon, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, Mmes Aurélie Filippetti, Geneviève Fioraso, M. Pierre Forgues, Mme Valérie Fourneyron, MM. Michel Françaix, Jean-Claude Fruteau, Jean-Louis Gagnaire, Mme Geneviève Gaillard, MM. Guillaume Garot, Jean Gaubert, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Patrick Gille, Jean Glavany, Daniel Goldberg, Gaëtan Gorce, Mme Pascale Got, MM. Marc Goua, Jean Grellier, Mme Élisabeth Guigou, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. François Hollande, Mmes Sandrine Hurel, Monique Iborra, M. Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Michel Issindou, Éric Jalton, Serge Janquin, Henri Jibrayel, Régis Juanico, Armand Jung, Mme Marietta Karamanli, M. Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Mme Colette Langlade, MM. Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Patrick Lebreton, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Michel Lefait, Jean-Marie Le Guen, Mme Annick Le Loch, M. Patrick Lemasle, Mmes Catherine Lemorton, Annick Lepetit, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Bernard Lesterlin, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Jean Mallot, Louis-Joseph Manscour, Mmes Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, MM. Jean-René Marsac, Philippe Martin, Mmes Martine Martinel, Frédérique Massat, MM. Gilbert Mathon, Didier Mathus, Mme Sandrine Mazetier, MM. Michel Ménard, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Arnaud Montebourg, Pierre Moscovici, Pierre-Alain Muet, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Mmes Marie-Renée Oget, Françoise Olivier-Coupeau, M. Michel Pajon, Mme George Pau-Langevin, MM. Christian Paul, Germinal Peiro, Jean-Luc Pérat, Jean-Claude Perez, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, MM. Philippe Plisson, François Pupponi, Mme Catherine Quéré, MM. Jean-Jack Queyranne,

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Dominique Raimbourg, Mme Marie-Line Reynaud, MM. Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Alain Rousset, Patrick Roy, Michel Sainte-Marie, Michel Sapin, Mme Odile Saugues, MM. Christophe Sirugue, Pascal Terrasse, Jean-Louis Touraine, Mme Marisol Touraine, MM. Philippe Tourtelier, Jean-Jacques Urvoas, Daniel Vaillant, Jacques Valax, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vauzelle, Michel Vergnier, André Vézinhet, Alain Vidalies, Jean-Michel Villaumé, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.

(2)  Mme Chantal Berthelot, MM. Guy Chambefort, Gérard Charasse, René Dosière, Paul Giacobbi, Mme Annick Girardin, MM. Joël Giraud, Christian Hutin, Serge Letchimy, Albert Likuvalu, Mmes Jeanny Marc, Dominique Orliac, Sylvia Pinel, Martine Pinville, M. Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Marcel Rogemont et Mme Christiane Taubira.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’indépendance de la presse et des médias audiovisuels constitue l’un des fondements de la République.

Pour remplir leur fonction au service de la démocratie, les médias doivent être soustraits à l’emprise directe des pouvoirs économiques et politiques. Or ce n’est manifestement pas le cas aujourd’hui dans le secteur privé et dans le service public audiovisuel.

Il n’est pas de jour où l’on n’apprenne la mise en cause de cette nécessaire indépendance.

L’emprise des forces économiques sur la presse et les médias est indiscutable. Elle pousse à une course à la rentabilisation au détriment de la diversité et de l’indépendance de l’information, de la qualité des programmes.

Nombre d’entreprises de presse et du secteur de l’audiovisuel sont possédées par des groupes dont les ressources proviennent, pour une part souvent importante, de commandes publiques. Cet état de choses est de nature à mettre en cause l’indépendance de ces entreprises.

Le dispositif anti-concentration mis en place par la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication a été, au fur et à mesure des modifications législatives intervenues dans la dernière décennie, très largement remis en cause.

Le démantèlement des règles anti-concentration entamé sous le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin est en voie d’achèvement. Avec la loi du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, le gouvernement de l’époque a fait table rase des principales dispositions anti-concentration dont notre pays s’était doté et a fait adopter les dispositions les plus favorables et les moins contraignantes possibles pour les opérateurs privés.

De plus, les dispositions récemment adoptées dans le cadre du projet de loi de modernisation de l’économie vont autoriser une OPA de quelques opérateurs de chaînes privées sur la TNT.

Dans le même temps, les liens entre certains acteurs politiques, y compris au plus haut niveau de l’État, et les acteurs économiques propriétaires d’organes de presse ou de médias audiovisuels, sont manifestes.

Des journalistes révèlent eux-mêmes dans des livres ou dans d’autres publications les pressions dont ils sont l’objet.

Les projets récents du Président de la République de suppression de la publicité sur les chaînes de télévision publique, sans que les mesures compensatoires annoncées ne garantissent la pérennité de leurs ressources, et selon lesquels les chaînes privées verraient leur capacité de recueillir de la publicité accrue, vont porter lourdement préjudice aux chaînes publiques au bénéfice des chaînes privées.

La décision du chef de l’État de nommer le futur président de France Télévisions rappelle les pires heures de l’époque du ministère de l’information. Cette annonce témoigne d’une claire volonté d’instaurer un lien de subordination entre le pouvoir exécutif et les organes de direction des télévisions publiques. Ainsi assujetti à la majorité, l’audiovisuel public subira encore plus directement les pressions et les reprises en main politiques. On est donc en droit de s’interroger sur la façon dont il pourra encore tenir son rôle de service public au service de tous ?

L’information est un bien collectif. Il est important de garantir les droits d’informer et les droits à l’information contre toutes tentatives politiques et économiques de confiscation.

Compte tenu de l’importance des dérives institutionnelles, législatives et factuelles constatées, il apparaît nécessaire que l’Assemblée nationale puisse enquêter sur les liens existant entre les pouvoirs économiques et le pouvoir exécutif, d’une part, et sur les restructurations au sein des entreprises de presse et des services de communication audiovisuelle, d’autre part, et sur leurs conséquences quant à l’indépendance et au pluralisme de la presse et des médias.

C’est pourquoi nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir accepter la présente résolution.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

Conformément aux articles 140 et suivants du Règlement, il est créé une commission d’enquête de trente membres chargée d’enquêter sur les liens existant entre les acteurs du pouvoir exécutif et des pouvoirs économiques et sur les restructurations au sein des organes de presse et des services de communication audiovisuelle, ainsi que sur leurs conséquences au regard du respect du pluralisme et de l’indépendance de la presse et des médias et sur toutes les dispositions susceptibles d’être prises afin de garantir ce pluralisme et cette indépendance.


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