N° 1691 - Proposition de résolution de M. Philippe Houillon tendant à la création d'une commission d'enquête sur les contrats d'assurance-vie en déshérence



Document
mis en distribution

le 2 juin 2009


N° 1691

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 mai 2009.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête
sur les
contrats d’assurance-vie en déshérence,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Philippe HOUILLON,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En dépit de la crise économique et financière sans précédent que nous traversons, l’assurance-vie reste le produit d’épargne le plus plébiscité des Français. En effet, avec un encours s’élevant à plus de 1 000 milliards d’euros et 22 millions de contrats souscrits, l’assurance-vie apparaît, au moment même où les Français sont de plus en plus méfiants à l’égard du système financier, comme le meilleur compromis en termes de rendement et de risque pour conjuguer prévoyance et épargne et ainsi assurer sa retraite ou ses enfants en cas de décès.

Or, lorsque les souscripteurs d’assurance-vie décèdent, leur volonté est loin d’être toujours respectée et ceux qu’ils entendaient protéger se trouvent parfois lésés. En effet, une partie importante des encours d’assurance-vie n’est pas redistribuée à leurs bénéficiaires. Il s’agit des contrats non réclamés, dits en déshérence. L’enjeu est colossal, puisque, chaque année, ce sont entre 150 000 à 170 000 contrats d’assurance-vie non réclamés. Les sommes en jeu sont estimées à un montant d’1 à 2 milliards d’euros par le gouvernement et de 950 millions d’euros par la Fédération française des sociétés d’assurances, qui restent ainsi captés par les compagnies d’assurances alors qu’ils auraient dû être, conformément à la volonté des défunts, reversés à leurs bénéficiaires. Dans son rapport annuel 2006, le Médiateur de la République jugeait cette « situation inacceptable sur le plan de l’éthique ».

De responsabilité, le Parlement en a fait preuve pour apporter des réponses législatives adaptées à la question de ces contrats d’assurance-vie non réclamés. Depuis la loi du 1er août 2003 de sécurité financière, le souscripteur d’un contrat d’assurance vie reçoit chaque année une information relative à son contrat, qu’il ait payé ou non des primes au cours de l’année. De la même manière, la loi du 15 décembre 2005 a mis en place un dispositif de recherche des bénéficiaires en cas de décès.

Toutefois, jusqu’au 1er janvier 2007, les sommes non réclamées restaient acquises à la mutualité des assurés. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 a cherché à remédier à cette situation, puisque désormais les avoirs des contrats d’assurance-vie, non réclamés après 30 ans, sont affectés au fonds de réserve des retraites. Moins d’un an après, la loi du 17 décembre 2007 permettant la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance sur la vie non réclamés et garantissant les droits des assurés a sensiblement renforcé les obligations à la charge des assureurs : recherche des bénéficiaires même si leur adresse n’est pas mentionnée et délai maximum d’un mois, après réception des pièces requises, pour le versement du capital.

Si ces dispositions législatives ont toutes répondu à une même exigence – celle de mettre fin aux dysfonctionnements qui perdurent depuis trop longtemps – le voile est loin d’être pleinement levé sur une situation par trop nébuleuse.

Si les assureurs se sont de leur côté engagés à rechercher prioritairement au sein de leur portefeuille les contrats d’assurance-vie répondant à certains critères, force est aujourd’hui de constater qu’aucun bilan de cette action n’a encore été mené. Alors que la loi du 17 décembre 2007 faisait obligation au Gouvernement de remettre au Parlement, avant le 1er janvier 2009, un rapport en vue de faire la lumière sur cette question du traitement des contrats d’assurance-vie non réclamés, la remise et la publication de ce dernier ne sont toujours pas intervenues.

À défaut d’entreprendre une réflexion constructive sur la situation des contrats d’assurance-vie non réclamés et sur le sort qui doit leur être réservé au bénéfice de la collectivité, le nombre de bénéficiaires retrouvés restera limité et le sentiment d’être lésés ira croissant parmi les millions de bénéficiaires potentiels de contrats d’assurance-vie. Alors que la crise a provoqué une profonde réaction de défiance des Français à l’égard du système bancaire et financier, l’enjeu est plus que jamais de renforcer la confiance que doit inspirer l’assurance vie, qui représente aujourd’hui 38 % du patrimoine financier privé des Français.

Nous savons par expérience que les commissions d’enquête sont un lieu privilégié de dialogue et de collaboration entre majorité et opposition. Elles sont le lieu où peut naître le consensus, notamment à propos d’enjeux qui dépassent les clivages partisans.

C’est donc dans un double souci d’éthique et de transparence, qu’est déposée la présente proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur la situation et les perspectives des contrats d’assurance-vie en déshérence.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

En application des articles 140 et suivants du Règlement, est créée une commission d’enquête de trente membres sur la situation et les perspectives des contrats d’assurance-vie en déshérence.


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