N° 1942 - Proposition de loi de M. Christian Vanneste visant à interdire l'ensemble des vêtements ou accessoires permettant de masquer l'identité d'une personne



N° 1942

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 septembre 2009.

PROPOSITION DE LOI

visant à interdire l’ensemble des vêtements ou accessoires
permettant de
masquer l’identité d’une personne,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Christian VANNESTE,

député.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Déposée devant l’Assemblée nationale en juin 2009, la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur la pratique du port de la burqa (voile intégral) ou du niqab (voile intégral laissant apparaître uniquement les yeux) sur le territoire national a fait l’objet d’une grande médiatisation. Devant le Congrès,  réuni le 22 juin, à Versailles, le président de la République, Nicolas Sarkozy, a déclaré que la burqa n’était « pas la bienvenue » en France.

Il s’agit ici de ne pas se limiter au seul problème de la burqa et de l’entrevoir à travers le prisme de la sécurité. Il est en effet étonnant de constater que le problème de la Burqa revient périodiquement sur la scène politique et n’est évoqué que sous l’angle de la religion, ou de la discrimination sexiste. Contrairement au voile, qui peut être une pratique liée à des impératifs de pudeur, la burqa n’est en rien exigée par les textes qui régissent l’Islam. L’interdiction de ce vêtement ne doit donc pas être évoquée à travers la religion, mais uniquement du point de vue de la sécurité. Celle-ci constitue, selon Montesquieu, la première des libertés publiques. Pour que les systèmes de vidéosurveillance soient efficaces, tout vêtement qui empêche l’identification en cachant le visage doit être proscrit sur la voie publique, sauf lorsqu’il correspond à une exigence médicale. C’est d’ailleurs ce que proposait Bertrand Mathieu, professeur de droit constitutionnel à l’Université de Paris I, dans La Croix du 26 juin dernier : « on doit pouvoir, dans la sphère publique, identifier les personnes auxquelles on a affaire ».

L’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme autorise les restrictions à la liberté de manifester sa religion et ses convictions quand elles constituent des mesures nécessaires dans une société démocratique à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé, de la morale publique, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Plusieurs de ces fondements peuvent ici être invoqués pour fonder une loi.

La sécurité publique justifie l’interdiction du port du turban par un sikh motocycliste (décision du 13 novembre 2008, Mann Singh c. France) ou l’obligation de retirer le voile pour des contrôles de sécurité (décision du 11 janvier 2005, Phull c. France). Les raisons de sécurité et d’hygiène justifient également l’interdiction du port du voile ou d’une cagoule pour la pratique du sport à l’école et l’exclusion de l’élève qui refuse de s’y soumettre (CEDH : 4 décembre 2008, Kervanci c. France).

Ces mêmes raisons pourraient être évoquées pour interdire la dissimulation du visage sur la voie publique.

L’ordre public, au sens sécurité publique du terme, permet d’interdire, comme l’ont déjà fait d’autres pays européens à des degrés divers, de se masquer le visage et de dissimuler ses mains sous une robe noire. Dans la mesure où la Cour européenne reconnait expressément la notion d’espace public, différente de celle de sphère publique qu’institue la loi de 1905, cette interdiction pourrait viser l’espace public dans son ensemble. D’autre part, la notion d’ordre public peut également être invoquée à propos des bonnes mœurs. Il n’est pas licite en France de se promener nu ou en monokini sur la voie publique.

C’est ainsi que le port de certains signes religieux pose le problème de la non-identification de la personne.

Concernant l’identité de la personne, une question pratique a été posée à la direction des affaires juridiques du ministère de l’éducation nationale concernant la remise d’un enfant à sa mère portant une burqa. Pour des raisons de sécurité et de responsabilité, un directeur d’école est tenu de s’assurer de l’identité des personnes venant chercher leurs enfants. Ainsi, il ne peut confier un enfant à une personne non identifiable. Par ailleurs, l’accès à une formation nécessite l’identification des personnes et la protection des droits et libertés d’autrui.

Une députée belge, chef de file des libéraux MR, Christine Defraigne, vient de déposer une proposition de loi visant à interdire à toute personne de circuler sur la voie publique et/ou dans les lieux publics le visage masqué, déguisé ou dissimulé.

La présente proposition de loi se permet de la reprendre pour l’inscrire dans notre droit. Ainsi, cette proposition a pour objectif de permettre à tout moment l’identification des personnes dans les espaces publics pour une question de sécurité publique pour répondre à l’exigence de sécurité à laquelle doivent se soumettre toutes les personnes sans discrimination et dans une parfaite égalité des droits.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Toute personne allant et venant dans l’espace public doit avoir le visage découvert et porter des vêtements ou accessoires permettant aisément sa reconnaissance ou son identification.

Le principe mentionné à l’alinéa précédent ne s’applique ni aux services publics en mission spéciale, ni aux activités culturelles telles que le carnaval ou le tournage d’un film.

Article 2

Est puni de deux mois d’emprisonnement et 15 000 € d’amende la violation du principe mentionné à l’article 1er. Est puni de la même peine l’incitation à violer ledit principe.

En cas de récidive, ces peines seront portées à un an de prison et 30 000 € d’amende.


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