N° 2020 - Proposition de loi de M. Daniel Mach visant à créer un statut de la mère



N° 2020

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 novembre 2009.

PROPOSITION DE LOI

visant à créer un statut de la mère,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Daniel MACH,

député.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’évolution de nos sociétés modernes a profondément modifié les rapports familiaux : développement du travail salarié féminin, exigence de mobilité professionnelle, multiplication des divorces, familles recomposées ; le cadre familial actuel est différent de celui que nous connaissions il y a encore trente ans. Pourtant, au-delà de ces évolutions, un constat demeure. La mère joue un rôle essentiel, voire primordial, dans l’éducation des enfants.

Les mères sont les piliers de notre société !

Leur action est structurante pour la famille. Elle permet une véritable continuité du lien affectif et un suivi personnel de l’éducation des enfants. Leur présence et leur dévouement permettent de reconstruire une cellule familiale aujourd’hui affaiblie par les exigences de mobilité professionnelle, le manque de temps consacré aux enfants et la double activité parentale.

Notre pays compte aujourd’hui 8,6 millions de mères, dont 1,5 million de mères isolées. 3,3 millions de mères ont des enfants âgés de 0 à 6 ans, dont 360 000 mères isolées.

Sur les 11 millions de femmes en activité, 1,1 million exerce des responsabilités en tant que cadres ou professions intellectuelles, 500 000 dirigent un commerce, une exploitation agricole ou une entreprise, 2,6 millions appartiennent à la catégorie des professions intermédiaires (institutrices, cadres intermédiaires de la fonction publique et du secteur privé), 5,4 millions travaillent en tant qu’ouvrières ou employées.

Donner aux mères une liberté de choix, supprimer toute dépendance économique vis-à-vis du conjoint, permettre à la mère d’exercer une présence structurante pour la famille et les responsabiliser : tels sont les objectifs que devraient poursuivre une politique familiale ambitieuse. Ces dernières années, de nombreuses avancées ont été réalisées, notamment avec l’instauration du congé parental, de la prestation d’accueil du jeune enfant et du complément de libre choix d’activité.

Cependant, de nombreuses associations familiales et de défense de la condition des femmes se mobilisent pour la reconnaissance du statut de la mère. L’Allemagne, l’Autriche et le Luxembourg ont notamment développé des mécanismes spécifiquement destinés aux mères.

C’est pourquoi nous vous soumettons aujourd’hui une proposition de loi visant à créer un véritable statut de la mère.

Il convient en premier lieu de garantir les droits financiers des mères dans le cadre de notre système de prestation en leur attribuant de manière prioritaire les allocations et prestations liées à la présence d’un ou plusieurs enfants. Afin de préserver leur droit à la retraite, les bénéficiaires de ces prestations seront assujettis aux cotisations sociales de l’assurance vieillesse.

En outre, afin de permettre à ces femmes d’exercer un libre choix réel entre activité et présence au foyer, ce statut comporte un important volet d’insertion professionnelle et de formation continue pour préparer les femmes qui décident de consacrer un temps de leur vie à l’éducation des enfants et à la structuration de la famille de pouvoir retrouver le marché de l’emploi dans de bonnes conditions.

Le statut de la mère prend en compte la problématique de l’employabilité des femmes choisissant d’élever leur(s) enfant(s) à temps plein en prévoyant un dispositif de formation continue des mères au foyer et d’accompagnement professionnel afin de permettre, à celles qui le désirent, de reprendre une activité. Le statut de la mère s’accompagne en effet d’un passeport formation destiné à favoriser le retour à l’emploi à l’issue du congé parental ou à l’issue du bénéfice de la prestation d’accueil du jeune enfant et du complément de libre choix d’activité.

Contrairement aux dispositifs actuels qui n’ouvrent le droit à la formation que lors du retour dans le système d’indemnisation chômage, la présente proposition vise à permettre la formation concomitamment au versement des prestations liées au congé parental ou à l’accueil du jeune enfant et à la cessation d’activité.

La réalisation, avec le concours de Pôle emploi, de bilans de compétences, de validation des acquis de l’expérience, de modules d’actualisation des formations initiales, voire d’acquisitions de nouvelles compétences, d’ateliers adaptés à la recherche d’emploi, voire de stages qualifiants sont des mesures d’accompagnement qui doivent permettre une véritable réinsertion professionnelle. Il pourrait même être envisagé de contractualiser avec des structures telles que l’éducation nationale ou le Centre national d’enseignement à distance.

Enfin, afin que le temps consacré aux enfants ne soit pas synonyme d’isolement, le statut de la mère prévoit, selon le mode de la collaboration bénévole au Service Public, un accès prioritaire pour les mères aux activités associatives ou municipales.

Tels sont, Mesdames, Messieurs, les objectifs de la présente proposition de loi.


PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L’article L. 513-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 513-1. – Les prestations familiales sont, sous réserve des règles particulières à chaque prestation, dues à la mère dès lors qu’elle assume la charge effective et permanente de l’enfant.

« Ces prestations donnent lieu, au titre de l’article L. 381-1, à affiliation au régime général de sécurité sociale. Elles sont assujetties aux cotisations de sécurité sociale, d’assurance chômage et de retraite complémentaire. »

Article 2

Les bénéficiaires du congé parental ou de la prestation d’accueil du jeune enfant et du complément de libre choix d’activité peuvent participer bénévolement, au titre de collaborateur bénévole du service public, aux activités des bibliothèques municipales, des haltes garderies et des services périscolaires locaux. Les délibérations des conseils municipaux fixent les modalités de participation des mères au foyer aux services publics locaux. La juridiction administrative est compétente pour connaître des litiges afférents à cette activité.

Les communes peuvent contractualiser avec les établissements d’enseignement primaire pour permettre aux mères au foyer d’assister les équipes pédagogiques à l’occasion d’activité extrascolaire d’éveil.

Ces activités peuvent faire l’objet d’une validation au titre des acquis de l’expérience.

Article 3

Les bénéficiaires du congé parental ou de la prestation d’accueil du jeune enfant et du complément de libre choix d’activité bénéficient du droit à la formation professionnelle tout au long de la vie défini à l’article L. 6111-1 du code du travail.

Cette formation professionnelle s’effectue dans le cadre d’un passeport contractuel pour l’emploi élaboré par Pôle emploi. Dans le cadre de ce passeport, la personne titulaire des prestations familiales ayant renoncé à une activité professionnelle pour élever ses enfants dispose d’un droit de tirage de journées de formation. Le nombre de journées affectées au passeport pour l’emploi est de seize jours par an.

Cette formation professionnelle ouvre droit à des régimes aménagés de poursuite d’études. Les caisses d’allocations familiales peuvent contractualiser avec l’éducation nationale, le Centre national d’éducation à distance et Pôle emploi pour fournir une offre de formation adaptée aux mères de famille.

Cette formation est complétée par la mise en œuvre de bilans réguliers de compétences destinés à préparer le retour sur le marché du travail. La validation des acquis de l’expérience est partie intégrante du bilan définitif de compétence.

Article 4

À l’article L. 6325-1 du code du travail, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° Aux bénéficiaires du congé parental ou de la prestation d’accueil du jeune enfant et du complément de libre choix d’activité qui peuvent bénéficier du contrat de professionnalisation après le troisième anniversaire de l’enfant ouvrant droit à l’allocation, ou s’il s’agit d’une adoption, trois ans après son arrivée au foyer. »

Article 5

Le 4° de l’article L. 6324-2 est complété par les mots : « ou aux femmes ayant bénéficié de la prestation d’accueil du jeune enfant et du complément de libre choix d’activité ».

Article 6

Pendant l’année précédant la fin du congé parental ou de la prestation d’accueil du jeune enfant et du complément de libre choix d’activité, la bénéficiaire de la prestation bénéficie d’un suivi personnalisé au retour à l’emploi. Ce suivi est effectué par Pôle emploi, sur la base d’une convention passée avec les caisses d’allocations familiales.

Article 7

L’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’emploi d’une personne ayant bénéficié d’un congé parental ou de la prestation d’accueil du jeune enfant et du complément de libre choix d’activité ouvre droit, pendant trois ans, à une réduction des cotisations à la charge de l’employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. »

Article 8

Les collectivités publiques employant des personnes ayant bénéficié d’un congé parental ou de la prestation d’accueil du jeune enfant et du complément de libre choix d’activité bénéficient d’une majoration de leur dotation globale de fonctionnement dans les conditions déterminées par la loi de finances de l’année.

Article 9

L’État et les caisses d’allocations familiales établissent par convention les modalités de financement du présent statut.

Article 10

I. – Les charges et pertes de recettes qui pourraient résulter pour les organismes sociaux de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 402 bis et 403 du code général des impôts.

II. – Les charges et pertes de recettes qui pourraient résulter pour l’État de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus par les articles 402 bis et 403 du code général des impôts.

III. – Les charges qui pourraient résulter pour Pôle emploi de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 402 bis et 403 du code général des impôts.

Article 11

Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de la présente loi.


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