N° 2038 - Proposition de loi de M. Jean-Michel Ferrand visant à compenser les distorsions de concurrence subies par les agriculteurs en raison du coût du travail



N° 2038

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 novembre 2009.

PROPOSITION DE LOI

visant à compenser les distorsions de concurrence
subies par les agriculteurs en raison du coût du travail,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Michel FERRAND, Jean AUCLAIR, Brigitte BARÈGES, Jacques Alain BÉNISTI, Gabriel BIANCHERI, Jean-Claude BOUCHET, Loïc BOUVARD, Françoise BRANGET, François CALVET, Jean-Louis CHRIST, Dino CINIERI, Louis COSYNS, Jean-Michel COUVE, Patrice DEBRAY, Stéphane DEMILLY, Dominique DORD, Jean-Pierre DUPONT, Raymond DURAND, Jean-Claude FLORY, Nicolas FORISSIER, Yves FROMION, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, François-Michel GONNOT, Arlette GROSSKOST, Michel HEINRICH, Antoine HERTH, Françoise HOSTALIER, Olivier JARDÉ, Paul JEANNETEAU, Marc JOULAUD, Patrick LABAUNE, Yvan LACHAUD, Thierry LAZARO, Michel LEJEUNE, Jacques LE NAY, Lionnel LUCA, Daniel MACH, Richard MALLIÉ, Alain MARC, Thierry MARIANI, Henriette MARTINEZ, Christian MÉNARD, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Jean-Marie MORISSET, Étienne MOURRUT, Jean-Marc NESME, Christian PATRIA, Serge POIGNANT, Josette PONS, Frédéric REISS, Jacques REMILLER, Bernard REYNÈS, Franck REYNIER, Jean ROATTA, Francis SAINT-LÉGER, Daniel SPAGNOU, Éric STRAUMANN, Alain SUGUENOT, Jean UEBERSCHLAG et Michel VOISIN,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les entreprises agricoles dont les besoins en main d’œuvre sont importants et dont les charges de personnel représentent souvent entre 20 et 30 % des charges d’exploitation, subissent d’importantes distorsions de concurrence liées au coût du travail, ce qui est aujourd’hui officiellement reconnu par les pouvoirs publics, qui ont validé les résultats de l’étude conduite par « Légumes de France », le 3 juin 2009.

En effet, leurs concurrents étrangers, y compris dans les États membres de l’Union Européenne, emploient une main d’œuvre très bon marché et paient des charges sociales très inférieures.

Ainsi, par exemple, le coût horaire minimal du travail saisonnier est de 6 € en Allemagne et 7,80 € en Espagne, alors qu’il s’élève à 10,20 € en France, toutes exonérations actuelles comprises.

Dans ces conditions, les agriculteurs français ne peuvent pas lutter à armes égales sur le marché et les entreprises agricoles françaises souffrent d’une crise structurelle de compétitivité.

Dans les filières employant peu de main d’œuvre et fortement mécanisées, les agriculteurs récupèrent la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) payée sur les achats, notamment de matériel de production.

Au contraire, les producteurs appartenant aux filières dont les besoins en main d’œuvre sont importants ne bénéficient, en cas de crise, d’aucun retour sur les dépenses de personnel.

Il convient donc d’instaurer, en période de crise, en fonction du bilan comptable, une compensation des charges sociales, part patronale et part salariale, sous forme de crédit de TVA aux entreprises agricoles, qu’il s’agisse d’entreprises individuelles ou de sociétés : au moment de la déclaration de TVA, la Mutualité Sociale Agricole (MSA) fournira à l’entreprise un relevé des cotisations, part patronale et part salariale, qu’elle a payées pour la période concernée. Après avoir calculé le montant de TVA à payer, l’entreprise en déduira le montant de cotisations sociales communiqué par la MSA.

Si le montant de TVA à payer devient alors négatif, ce montant sera reversé à l’entreprise agricole, comme c’est le cas lorsque la TVA payée sur les achats dépasse le montant de la TVA collectée par l’entreprise.

L’instauration d’un tel dispositif dérogatoire est justifiée par le fait que les entreprises agricoles sont soumises à deux types d’aléas qui peuvent les mettre en difficulté : l’aléa climatique, mais aussi l’aléa des prix, puisque les prix de vente des produits agricoles ne sont jamais connus à l’avance et que leur niveau peut même se révéler inférieur au prix de revient.

L’intérêt de ce dispositif est de pouvoir s’adapter avec souplesse à toutes les situations : il sera déclenché en période de crise seulement et en cas de déclenchement, la compensation dont bénéficieront les entreprises agricoles sera proportionnelle au niveau de charges sociales qu’elles auront acquittées, ce qui signifie que les exploitations employant de nombreux salariés seront davantage aidées.

En attendant l’harmonisation des charges et des réglementations sociales au niveau européen, les distorsions de concurrence sur le coût du travail doivent absolument être compensées, afin que les agriculteurs français ne soient plus victimes d’un dumping social qui conduit la distribution à recourir massivement à l’importation.

Telles sont les raisons pour lesquelles il vous est proposé, Mesdames, Messieurs, d’adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

En période de crise, en fonction du bilan comptable, les entreprises agricoles bénéficient d’une compensation de leurs charges sociales, part patronale et part salariale, sous forme de crédit de taxe sur la valeur ajoutée.

Article 2

Les pertes de recettes et charges éventuelles qui résulteraient pour l’État de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Article 3

Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de la présente loi.


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