N° 1651 - Rapport de M. Dominique Tian déposé en application de l'article 86 alinéa 8 du règlement, par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur la mise en application de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi



N° 1651

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 mai 2009.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 86, alinéa 8, du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES

sur la mise en application de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008
relative à la
réforme de l’organisation du service public de l’emploi,

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Dominique TIAN,

Député.

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INTRODUCTION 5

I.- DE NOMBREUSES MESURES D’APPLICATION RÉGLEMENTAIRES DE LA LOI DU 13 FÉVRIER 2008 ONT ÉTÉ PRISES 7

A. LES DISPOSITIONS N’IMPLIQUANT PAS DE MESURES RÉGLEMENTAIRES D’APPLICATION 7

B. LES NOMBREUSES MESURES D’APPLICATION RÉGLEMENTAIRES PRISES 8

1. Les conseils national et régionaux de l’emploi 9

2. La nouvelle institution nationale Pôle emploi 9

3. Le recouvrement des cotisations d’assurance chômage par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) 11

C. LES MESURES D’APPLICATION RÉGLEMENTAIRES RESTANT À PRENDRE 11

1. Les garanties particulières s’appliquant aux agents contractuels de droit public de Pôle emploi 11

2. Les modalités du contrôle de la recherche d’emploi 12

3. Le recouvrement des cotisations d’assurance chômage par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) 13

II.- CERTAINES QUESTIONS RELATIVES À LA MISE EN œUVRE PRATIQUE DE LA RÉFORME RESTENT OUVERTES 15

A. L’OBJECTIF D’UNE AMÉLIORATION DU SERVICE RENDU AUX USAGERS 15

1. La conclusion d’une convention tripartite pluriannuelle 16

2. Le suivi des demandeurs d’emploi 16

3. La création d’un réseau 17

B. LES ACTEURS DE LA RÉFORME, LES PERSONNELS 18

1. Les personnels de Pôle emploi 18

2. Le transfert de personnels de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) 19

C. LES MOYENS DE LA RÉFORME 20

1. Les moyens budgétaires 20

2. Les autres moyens matériels 21

D. LA MISE EN œUVRE DES COORDINATIONS AU SEIN DU SERVICE PUBLIC DE L’EMPLOI 22

1. Les régions 22

2. Les maisons de l’emploi 23

3. Les réseaux spécialisés d’accueil et d’accompagnement des demandeurs d’emploi 23

TRAVAUX DE LA COMMISSION 25

I.- AUDITION DE M. CHRISTIAN CHARPY, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE PÔLE EMPLOI 25

II.- EXAMEN DU RAPPORT D’INFORMATION 47

ANNEXE : Tableau de suivi de l’application de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi 49

INTRODUCTION

La loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi a pour objectif de favoriser la mise en œuvre d’un service public de l’emploi plus efficace au profit de ses usagers, mettant ainsi « le demandeur d’emploi au cœur du système », pour reprendre l’expression employée par le président de la République (1).

Il s’agit aussi bien sûr, ainsi que le rappelle la convention pluriannuelle conclue entre l’État, l’Unédic et Pôle emploi le 2 avril 2009, de s’inscrire « dans un objectif politique global qui est celui de la mobilisation pour l’emploi » et ce, « que ce soit à court terme dans un contexte conjoncturel difficile sur le front de l’emploi ou pour faire face à moyen terme aux évolutions structurelles du marché du travail ».

Aux termes de la loi du 13 février 2008 est créé un opérateur unique, Pôle emploi, nouvelle institution nationale qui reprend les missions et les moyens de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) et du réseau opérationnel de l’assurance chômage, à savoir principalement les Assédic ; la création de cette nouvelle institution préserve l’existence du régime paritaire d’assurance chômage.

Quinze mois ont passé depuis l’adoption de la loi et il semble important et légitime aujourd’hui que la représentation nationale puisse procéder à un premier état des lieux de l’application de la réforme.

Des voix nombreuses, au reste, ont largement détaillé les conditions de mise en œuvre de ce qu’on appelle plus simplement « la fusion ». Cela aurait peut-être été moins le cas sans la brutale et considérable augmentation du nombre des demandeurs d’emploi constatée ces derniers mois, sous l’effet d’une crise financière et économique mondiale d’une ampleur sans précédent : depuis le mois de janvier 2009, on dénombre 243 400 demandeurs d’emploi supplémentaires. Probablement n’aurait-on, sans cette évolution, jamais autant évoqué les débuts de Pôle emploi, brutalement confronté à un véritable défi et soudain placé sous le feu des projecteurs. On peut aussi se demander si les difficultés constatées aujourd’hui n’auraient pas, dans une certaine mesure, été les mêmes avec l’organisation administrative préexistante.

Il reste que la presse s’est amplement fait l’écho de multiples dysfonctionnements, évoquant les difficultés rencontrées dans l’accueil et l’accompagnement des demandeurs d’emploi, les retards et les engorgements, les contradictions du système, etc. Parfois, c’est presque à des « campagnes de presse » qu’on assiste : l’organisation administrative de Pôle emploi et la création d’une direction du marketing a fait couler beaucoup d’encre ; il en a été de même de la question du prix exact de la création d’un logo spécifique pour la nouvelle institution ; les modalités de paiement pour l’accès au numéro unique de Pôle emploi, le 39 49, ont été aussi sur la sellette ; il n’est pas jusqu’au montant de la rémunération du directeur général de Pôle emploi qui n’ait été mis en question…

Ces interrogations correspondent à de réelles préoccupations et il est vrai qu’on ne peut les passer sous silence. Le présent rapport n’entend pourtant pas en rester à cette première approche. Plus fondamentalement, il poursuit un double  objectif :

– d’une part, il vise à établir, en application de l’article 86, huitième alinéa, du Règlement de l’Assemblée nationale, un bilan de la mise en œuvre réglementaire du dispositif proposé. De ce point de vue, conformément aux engagements gouvernementaux, la plupart des mesures d’application réglementaires ont été prises et ce dans des délais tout à fait satisfaisants qu’il convient de saluer. Pôle emploi a ainsi pu voir le jour le 19 décembre 2008. Le rapporteur se félicite de ce résultat rapide et conforme aux objectifs de la réforme ;

– d’autre part, ce rapport a pour objet d’énumérer, quelques mois seulement après la création de Pôle emploi, certaines des interrogations fréquentes relatives aux modalités de mise en œuvre de la réforme.

L’audition par la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l’Assemblée nationale du directeur général de Pôle emploi, M. Christian Charpy, est l’occasion de recueillir des éléments de réponse à ces questions qui restent ouvertes, ce qui est bien normal quelques mois seulement après la création de Pôle emploi et compte tenu de l’évolution de la conjoncture : comment parvenir à réaliser dans les faits l’amélioration du service rendu aux usager ? Comment s’assurer d’un nombre suffisant de personnels, auxquels sont conférés des garanties statutaires satisfaisantes ? Comment attribuer les moyens nécessaires, budgétaires mais aussi immobiliers et mobiliers, à Pôle emploi ? Comment coordonner l’action de Pôle emploi et celle des autres acteurs du service public de l’emploi, au premier rang desquels les maisons de l’emploi ?

Que l’on ne se méprenne pas. Poser les questions, ce n’est ni s’interroger sur le bien-fondé d’une réforme à laquelle le rapporteur n’a jamais hésité à apporter son entier soutien, ni même émettre des doutes quant à la faisabilité de cette réforme. C’est au contraire adopter une démarche pragmatique pour aller plus loin, plus vite, pour identifier au mieux les objectifs et les moyens.

L’envergure de cette loi essentielle pour l’avenir du service public de l’emploi explique aussi que les résultats ne puissent être immédiats. Les propos introductifs du rapporteur, dans son rapport préalable à la discussion du projet de loi qui allait devenir la loi du 13 février 2008, sont plus que jamais d’actualité : « Clairement, l’objectif n’est pas d’imposer une fusion brutale, mais d’engager une réforme profonde de nos politiques de l’emploi, dont le présent projet de loi n’est que la première pierre, en ménageant des transitions et des adaptations progressives ».

I.- DE NOMBREUSES MESURES D’APPLICATION RÉGLEMENTAIRES
DE LA LOI DU 13 FÉVRIER 2008 ONT ÉTÉ PRISES

A. LES DISPOSITIONS N’IMPLIQUANT PAS DE MESURES RÉGLEMENTAIRES D’APPLICATION

Un certain nombre des dispositions de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi sont d’application directe : elles ne requièrent pour entrer en application aucune mesure de nature réglementaire.

Les dispositions de la loi du 13 février 2008 d’application directe sont les suivantes :

– la définition des maisons de l’emploi comme institutions concourant à la coordination des politiques publiques et du partenariat local des acteurs publics et privés qui agissent en faveur de l’emploi, de la formation, de l’insertion et du développement économique, prévue à l’article L. 311-10 devenu article L. 5313-1 du code du travail (article 3 de la loi) ;

– les modalités du transfert des personnels issus de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) et des Assédic (les organismes gestionnaires du régime d’assurance chômage) à la nouvelle institution mentionnée à l’article L. 311-7, devenu article L. 5312-1 du code du travail, autrement dit Pôle emploi (article 7 de la loi) ;

– le patrimoine de la nouvelle institution, et notamment les modalités du transfert à celle-ci de l’ensemble des biens, droits et obligations, créances et dettes de l’ANPE (article 8 de la loi) ;

– la date de création de la nouvelle institution, fixée à celle de la première réunion de son conseil d’administration (article 9 de la loi) ; cette réunion a eu lieu le 19 décembre 2008 ;

– la prolongation de l’expérimentation du dispositif du contrat de transition professionnelle (CTP) jusqu’à la fin de l’année 2008 (article 10 de la loi) ; le CTP a depuis été à la fois prolongé et étendu par la loi de finances pour 2009 ;

– l’attribution de la mission de recouvrement des contributions dues par l’employeur au titre du contrat de transition professionnelle (2) à la nouvelle institution dans un premier temps puis, à terme, aux Unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et des allocations familiales (URSSAF) (article 11 de la loi) ; ce dispositif est complémentaire de celui prévu aux articles 4 et 5 de la loi, relatifs de manière plus générale aux modalités du transfert du recouvrement des cotisations d’assurance chômage aux URSSAF ;

– la présentation par le gouvernement, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport au Parlement sur les modalités de transfert éventuel à la nouvelle institution de personnels de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) chargés de l’orientation professionnelle des demandeurs d’emploi (article 12 de la loi) ;

– l’applicabilité aux organisateurs des fraudes à l’assurance chômage des peines déjà applicables avant la loi aux bénéficiaires de ces fraudes, de façon à permettre la sanction du fait de faire obtenir frauduleusement des revenus de remplacement ou de tenter de le faire (article 13 de la loi) ;

– les dispositions de coordination dans l’ensemble du code du travail, qui sont pour une part d’application immédiate (3) (article 14 de la loi) ;

– l’ensemble des dispositions procédant à la transcription dans le nouveau code du travail de celles introduites par le projet de loi dans l’ancien code du travail et qui ne requièrent pas d’autres mesures d’application que celles déjà prévues s’agissant des articles de l’ancien code du travail (articles 16 et 17 de la loi).

B. LES NOMBREUSES MESURES D’APPLICATION RÉGLEMENTAIRES PRISES

Pour l’essentiel, les dispositions d’application réglementaires qui étaient requises par la loi du 13 février 2008 figurent dans le décret n° 2008-1010 du 29 septembre 2008 relatif à l’organisation du service public de l’emploi.

Un peu moins de neuf mois après l’entrée en vigueur de la loi, l’essentiel du dispositif réglementaire nécessaire était donc en place. Le rapporteur juge ce résultat satisfaisant compte tenu de l’importance de la réforme engagée et des nombreuses consultations préalables à la publication du décret effectuées : outre le Conseil d’État, ont été recueillis les avis du conseil d’administration de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), du conseil d’administration de l’ANPE, du comité consultatif paritaire national de l’ANPE, du conseil national de l’emploi ainsi que des conseils territoriaux de Saint-Barthélémy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

Ce résultat s’explique aussi par le fait qu’un certain nombre des dispositions d’application ont été établies très tôt par le gouvernement, dès la discussion du projet de loi au Parlement.

1. Les conseils national et régionaux de l’emploi

L’article 1er de la loi institue un Conseil national de l’emploi (CNE) ayant vocation à se substituer à l’actuel comité supérieur de l’emploi, dont la mission est notamment de concourir à la définition des orientations stratégiques des politiques de l’emploi. Il crée également des structures parallèles au niveau régional. Il prévoit enfin la conclusion d’une convention pluriannuelle entre l’État, l’organisme chargé de la gestion de l’assurance chômage et la nouvelle institution pour définir les objectifs assignés à la nouvelle institution au regard de la situation de l’emploi et au vu des moyens prévisionnels qui lui sont alloués par l’organisme chargé de la gestion de l’assurance chômage et l’État.

Pour l’application de cet article, le décret du 29 septembre 2008 comporte les mesures suivantes :

– des dispositions relatives au Conseil national de l’emploi (articles R. 5112-1 à R. 5112-5 du code du travail) : l’ajout d’une mission, à savoir l’adoption d’un programme d’évaluation annuelle des politiques d’emploi ; la fixation de la composition du Conseil national de l’emploi ainsi que des modalités de désignation de ses membres et de sa convocation (article 1er du décret) ;

– les dispositions correspondantes s’agissant des conseils régionaux de l’emploi (articles R. 5112-19 à R. 5112-22 du code du travail) (article 2 du décret) ;

– des précisions concernant la convention pluriannuelle instituée par la loi : le décret précise l’objet de la convention (article R. 5311-1 du code du travail) ainsi que la composition et les missions du comité de suivi de la convention prévu par la loi (articles R. 5311-2 et R. 5311-3 du code du travail) (article 3 du décret). Cette convention a été conclue le jeudi 2 avril 2009 (voir infra).

L’article 15 de la loi du 13 février 2008, par coordination, a abrogé les deux premiers alinéas de l’article L. 322-2 du code du travail, relatifs aux compétences du comité supérieur de l’emploi, supprimé par la loi. On peut donc considérer que les dispositions précitées du décret du 29 septembre 2008 sont aussi relatives à l’application de cet article 15.

2. La nouvelle institution nationale Pôle emploi

L’article 2 de la loi du 13 février 2008 a créé la nouvelle institution chargée d’assurer la gestion du réseau unique, issu de la fusion de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) et du réseau opérationnel de l’assurance chômage. Il s’agit d’une institution de droit public à compétence nationale, dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière. Pour l’application de cet article, l’article 5 du décret du 29 septembre 2008 prévoit l’ensemble des modalités d’organisation et de fonctionnement de la nouvelle institution, notamment :

– les attributions, la composition et le fonctionnement de son conseil d’administration (articles R. 5312-6 à R. 5312-17 du code du travail) ;

– les dispositions relatives à la nomination et aux attributions du directeur général (articles R. 5312-18 et R. 5312-19) et des directeurs régionaux de la nouvelle institution (articles R. 5312-25 à R. 5312-27) ;

– les dispositions économiques et financières régissant la nouvelle institution (articles R. 5312-20 à R. 5312-24 du code du travail) ;

– les dispositions relatives à l’organisation et au fonctionnement de l’instance paritaire régionale créée au sein de chaque direction régionale : il s’agit d’une instance paritaire composée de représentants des employeurs et des salariés, chargée de veiller à l’application de l’accord d’assurance chômage et consultée sur la programmation des interventions au niveau territorial (articles R. 5312-28 à R. 5312-30).

En outre, s’agissant de la compétence de la nouvelle institution en matière de suivi de la recherche d’emploi, telle qu’elle résulte aussi de l’article 2 de la loi, le décret n° 2008-1056 du 13 octobre 2008 relatif aux droits et aux devoirs des demandeurs d’emploi et au suivi de la recherche d’emploi précise les modalités de mise en œuvre de ce suivi. Il s’agit du décret qui précise, notamment, les conditions d’élaboration du projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE).

Le décret n° 2009-270 du 9 mars 2009 relatif à la dénomination de l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du code du travail – non explicitement prévu par la loi – a aussi entériné la décision prise par le conseil d’administration le 19 décembre 2008 relative au choix du nom de « Pôle emploi ».

Enfin, deux décrets ont précisé, sans lien direct avec une disposition expresse de la loi, certaines modalités du statut des agents contractuels de droit public de Pôle emploi (voir aussi sur cette question infra les mesures d’application réglementaires restant à prendre concernant les garanties collectives générales de ces agents) :

– le décret n° 2008-1435 du 22 décembre 2008 relatif à la protection sociale complémentaire des agents contractuels de droit public de l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du code du travail, qui instaure une mutuelle obligatoire pour les agents publics ;

– le décret n° 2009-241 du 2 mars 2009 relatif à diverses mesures en faveur des agents contractuels de droit public de l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du code du travail, qui établit un dispositif de primes et de réductions d’ancienneté au profit de ces mêmes agents.

L’article 6 de la loi concerne les modalités d’organisation et de fonctionnement de l’instance provisoire qui était chargée de préparer la mise en place de la nouvelle institution, notamment par l’élaboration d’un projet d’organisation des services de cette institution.

Cette instance (dénommée France emploi) n’existe plus depuis la création de Pôle emploi le 19 décembre 2008. Par un arrêté du 24 avril 2008 (4) et un décret du 9 mai 2008 (5) avaient respectivement été nommés les membres du Conseil et le délégué général de l’instance nationale provisoire.

3. Le recouvrement des cotisations d’assurance chômage par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF)

Les articles 4 et 5 de la loi du 13 février 2008 prévoient qu’au plus tard le 1er janvier 2012, le recouvrement et le contrôle des cotisations d’assurance chômage et des cotisations AGS (les cotisations dues au titre de l’assurance pour la garantie des salaires) pour le compte de l’Unédic, jusqu’à présent assurées par les Assédic, seront transférées aux URSSAF (ou aux caisses générales de sécurité sociale pour les départements d’outre-mer), sauf dérogations.

La loi dispose qu’à titre transitoire, à compter de la création de la nouvelle institution, le recouvrement sera assuré par celle-ci pour le compte de l’assurance chômage.

L’article 7 du décret du 29 septembre 2008 prévoit les ajustements et coordinations requis dans les différents textes réglementaires aujourd’hui en vigueur, à savoir dans le code du travail, le code de la sécurité sociale, le code de l’action sociale et des familles et le code de commerce.

C. LES MESURES D’APPLICATION RÉGLEMENTAIRES RESTANT À PRENDRE

1. Les garanties particulières s’appliquant aux agents contractuels de droit public de Pôle emploi

L’article 2 évoque le fait que les règles relatives aux relations collectives de travail s’appliquent à tous les agents de la nouvelle institution, sous réserve des garanties justifiées par la situation particulière de ceux qui restent contractuels de droit public, ces garanties étant définies par décret en Conseil d’État (article L. 311-7-7 du code du travail, devenu article L. 5312-9).

Le gouvernement indique dans son rapport relatif à la mise en application de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi, transmis au Parlement le 2 décembre 2008, que ces dispositions relatives « aux garanties particulières s’appliquant aux agents de l’institution qui restent contractuels de droit public, pourrai[en]t être précisée[s] par décret en fonction des dispositions de la future convention collective prévue par la loi ». En effet, le texte de ce même article prévoit aussi que « les agents de l’institution nationale, qui sont chargés d’une mission de service public, sont régis par le présent code [du travail] dans les conditions particulières prévues par une convention collective étendue agréée par les ministres chargés de l’emploi et du budget ».

Selon les toutes dernières informations transmises au rapporteur par les services du secrétariat d’État chargé de l’emploi, « un projet de décret a été transmis par le gouvernement au Conseil d’État. Il a pour objet d’adapter le statut des ex-agents de l’ANPE, relevant du décret du 31 décembre 2003, à leur nouvelle situation au sein de l’établissement public Pôle emploi, dans l’attente de la conclusion de la convention collective en cours de négociation. En effet, compte tenu du cadre posé par la loi et des délais de négociation de la convention collective (qui ont démarré au début de l’année 2009 et qui pourraient s’étendre sur 18 mois), il est apparu nécessaire, pour les agents eux-mêmes mais également le bon fonctionnement de l’établissement, de clarifier et sécuriser juridiquement la situation des agents contractuels de droit public de l’ex-ANPE au cours de la période transitoire ouverte jusqu’à l’entrée en vigueur de la convention collective. Ce projet de décret prévoit ainsi le maintien des dispositions règlementaires en vigueur relatives aux garanties individuelles dont bénéficient les agents relevant du décret du 31 décembre 2003, en matière notamment d’emploi, de carrière, de formation professionnelle, de protection sociale et de cessation des fonctions ».

2. Les modalités du contrôle de la recherche d’emploi

Aux termes des deux derniers alinéas de l’article 2 de la loi du 13 février 2008, le contrôle de la recherche d’emploi est confié aux agents de la nouvelle institution, un décret en Conseil d’État devant déterminer les modalités d’application de cette disposition, notamment les conditions dans lesquelles les agents chargés du contrôle ont accès, pour l’exercice de leur mission, aux renseignements détenus par les administrations sociales et fiscales (article L. 351-18 du code du travail, devenu articles L. 5426-1 et L. 5426-9 du même code).

Selon le gouvernement dans le rapport précité, un décret « pourrait prévoir » ces conditions. Cependant, « le recensement des échanges existants et l’identification de ceux qui seront utiles aux agents de la nouvelle institution nécessitent un important travail, ainsi que des consultations préalables à l’élaboration du décret ».

Plus précisément, interrogés sur ce point par le rapporteur, les services du secrétariat d’État chargé de l’emploi ont indiqué que « le projet de décret relatif au répertoire national commun de la protection sociale, en cours de préparation, pourrait couvrir les conditions d’accès des agents chargés du contrôle de la recherche d’emploi aux informations des administrations sociales et fiscales. La nécessité d’un décret spécifique doit être étudiée en fonction du contenu du projet de décret encadrant ce répertoire national ».

3. Le recouvrement des cotisations d’assurance chômage par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF)

Le premier alinéa du III de l’article 5 de la loi, relatif au transfert aux URSSAF du recouvrement et du contrôle des cotisations d’assurance chômage, prévoit que ces nouvelles dispositions « entrent en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2012 ». Le même principe de l’intervention d’un décret et, à défaut, d’une entrée en application au 1er janvier 2012, est retenu par l’article 11 s’agissant du transfert du recouvrement des contributions au titre du contrat de transition professionnelle (CTP).

Concernant ces deux questions, le gouvernement, dans le rapport précité, évoque un « décret ultérieur », tout en rappelant la date butoir du 1er janvier 2012. Interrogés par le rapporteur, les services du secrétariat d’État en charge de l’emploi ont indiqué qu’« il convient de préciser que la convention tripartite signée le 2 avril entre l’État, l’Unédic et Pôle emploi prévoit que les travaux préparatoires nécessaires au transfert du recouvrement seront engagés en 2009 en vue de réaliser ce transfert au 1er janvier 2011. C’est donc cette date qui devrait être fixée dans le décret prévu au III de l’article 5 de la loi du 13 février 2008 ».

II.- CERTAINES QUESTIONS RELATIVES À LA MISE EN œUVRE PRATIQUE DE LA RÉFORME RESTENT OUVERTES

Si l’application réglementaire de la réforme du service public de l’emploi apparaît satisfaisante, un certain nombre de questions pratiques restent ouvertes aujourd’hui, compte tenu notamment de l’accroissement important et rapide du nombre de demandeurs d’emploi. Elles ont trait aux points suivants : l’objectif principal de la réforme, à savoir le service rendu aux demandeurs d’emploi ; les acteurs de la réforme, les personnels du service public de l’emploi ; les moyens de la réforme, autrement dit notamment les moyens matériels, budgétaires, immobiliers et mobiliers ; l’action coordonnée des différents acteurs du service public de l’emploi.

A. L’OBJECTIF D’UNE AMÉLIORATION DU SERVICE RENDU AUX USAGERS

Comme le souligne dans son introduction le rapport du gouvernement au Parlement sur la mise en application de la loi du 13 février 2008, « la loi du 13 février 2008 a réformé l’organisation du service public de l’emploi, afin d’améliorer le marché du travail par la qualité du service rendu aux usagers ».

Après la publication du décret du 29 septembre 2008, conformément aux dispositions de l’article 9 de la loi du 13 février 2008, la nouvelle institution prévue à l’article L. 5312-1 du code du travail a été créée le 19 décembre 2008, date de la première réunion du conseil d’administration, sous la dénomination de Pôle emploi.

Lors de cette première réunion ont été nommés les principaux cadres dirigeants de Pôle emploi. Le conseil d’administration a élu M. Dominique-Jean Chertier à la présidence et donné un avis favorable à la nomination de M. Christian Charpy comme directeur général. Le premier budget de l’institution a été adopté. Le régime des aides attribuées par l’institution (aides à la mobilité géographique, à la formation, etc.) a été précisé, de manière à pouvoir être mis en œuvre dès le 1er janvier 2009.

Au début de l’année 2009, le constat d’un accroissement massif et rapide du nombre des demandeurs d’emploi s’est précisé. Les derniers chiffres disponibles confirment cette tendance : le nombre de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi de catégorie A (les demandeurs d’emploi sans emploi tenus d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi) s’établit à 2 448 200 fin mars 2009. Ce nombre est en augmentation par rapport à la fin février 2009 de + 2,7 %, ce qui représente une hausse de 63 400, il est vrai légèrement inférieure à celle de janvier et de février (6).

Au total, mois après mois, on approche le demi-million de demandeurs d’emploi supplémentaires depuis le retournement brutal du marché du travail au mois d’août 2008 (l’augmentation de août 2008 à mars 2009 est de + 429 900, de janvier à mars de + 243 400).

Dès lors, en dépit de la conclusion d’une convention entre l’État, l’Unédic et Pôle emploi définissant les objectifs du service public de l’emploi ainsi redéfini, la question de la mise en œuvre pratique de la réforme et de la possibilité d’un service public de l’emploi plus efficace se pose avec une acuité nouvelle, pour ce qui concerne notamment la mise en œuvre effective du suivi des demandeurs d’emploi et la constitution d’un réseau au plan local.

1. La conclusion d’une convention tripartite pluriannuelle

Conformément aux dispositions du nouvel article L. 5312-3 du code du travail dans sa rédaction résultant de l’article 16 de la loi du 13 février 2008, une convention triennale pour les années 2009 à 2011 a été conclue entre l’État, l’Unédic et Pôle emploi le 2 avril 2009.

Ce document d’une cinquantaine de pages définit, conformément à la loi, les objectifs assignés à Pôle emploi au regard de la situation de l’emploi et au vu des moyens prévisionnels qui lui sont alloués par l’Unédic et par l’État. La convention précise de manière très générale l’ensemble des objectifs et des moyens de la nouvelle institution. Elle contient à cet effet 33 indicateurs de performance. Elle prévoit deux « paliers de transformation » : le premier en 2009, centré sur la réussite de la fusion et les premières étapes d’amélioration de l’offre de service ; le second à horizon 2011, qui vise à améliorer durablement l’offre de service et le fonctionnement du marché du travail. Elle comporte aussi des dispositions sur son propre suivi en établissant notamment un comité de suivi de la convention, qui se réunit au moins deux fois par an (7).

Les présents développements n’ont pas pour objet de revenir sur l’intégralité de ces points – il convient pour cela de se référer au texte même de la convention (8) – mais d’évoquer un certain nombre des questions qui se posent en pratique aujourd’hui.

2. Le suivi des demandeurs d’emploi

De fait, il existe des interrogations, liées à l’augmentation du nombre de demandeurs d’emplois, sur un certain nombre de points concernant le suivi effectif des demandeurs d’emploi :

– qu’en est-il du nombre réel des demandeurs d’emploi pris en charge par un même conseiller ? Sur cette question, les chiffres évoqués vont du simple au triple, de moins d’une centaine à plus de 200 ; dès lors, il est possible de s’interroger sur le niveau que Pôle emploi peut se donner d’atteindre dans les prochains mois, et à partir de quel public il sera comptabilisé ; la convention tripartite pluriannuelle pose comme objectif pour 2011 le nombre de 60 demandeurs d’emploi par conseiller, « en premier lieu pour les parcours renforcés » ;

– s’agissant de la généralisation d’un conseiller personnel et la mise en œuvre d’un suivi mensuel personnalisé (SMP) pour chaque demandeur d’emploi, il semble peu réaliste de considérer que ne subsisteront pas des conseillers spécialisés dans certains cas d’indemnisation, pour les publics les plus éloignés de l’emploi, pour la prospection en entreprise, etc. L’objectif qui figure dans la convention tripartite est-il tenable (taux de réalisation des entretiens de suivi mensuel personnalisé de 65 % en 2011, quand il serait de 52 % aujourd’hui) et suffisant ?

– dans quelle mesure Pôle emploi pourra-t-il faire face à l’afflux des demandes, quand on sait que les dossiers en instance de traitement ont connu un pic à près de 80 000 en novembre 2008 alors qu’ils avoisinent 40 000 à 50 000 en temps « normal » ? Cette question est d’autant plus importante que la convention pluriannuelle tripartite pose comme objectifs pour 2011 que 95 % de la part des inscriptions devront être réalisées moins de 5 jours après le premier contact avec Pôle emploi  et que 95 % des décisions sur les dossiers d’indemnisation devront être prises dans les quinze jours, ce taux étant de 88 % fin 2008 ;

– corollaire du service de suivi des demandeurs d’emploi, la question de la prospection du marché du travail se pose avec acuité compte tenu de la conjoncture actuelle : on peut noter par exemple que le nombre des offres déposées par les entreprises est en chute de - 29 % en janvier 2009 par rapport à janvier 2008 (ce taux étant même de - 35 % pour les contrats de plus de six mois). La convention tripartite fixe l’objectif, à horizon 2011, d’un nombre d’offres d’emploi recueillies de 4,5 millions, dont 1,935 millions d’offres d’emploi de six mois ou plus. Cet objectif peut-il être considéré comme réaliste ?

3. La création d’un réseau

La mise en œuvre pratique de la fusion sur le terrain a également suscité, ces derniers mois et ces dernières semaines, des questions. La convention pluriannuelle pose comme objectifs que 80 % des demandeurs d’emploi devront pouvoir accéder en moins de trente minutes par des moyens de transport usuels à leur agence et que les unités constituant le réseau auront une taille minimale de 15 agents et une taille maximale de 70 agents.

Dans les faits, il semble qu’aujourd’hui encore trop peu d’agences (de l’ordre d’une centaine) réaliseraient l’ensemble des opérations de placement et d’indemnisation sur un même lieu. On dénombrait jusqu’ici quelque 650 agences Assédic et 850 agences locales de l’ANPE ; l’objectif est de parvenir à mettre en place 956 sites mixtes d’ici la fin septembre 2009. D’aucuns dénoncent ce calendrier comme impraticable. Par ailleurs, un certain nombre de difficultés d’ordre pratique semblent, sur le terrain, compliquer les rapprochements :

– des problèmes liés aux raccordements des réseaux informatiques seraient recensés et des difficultés d’harmonisation en termes d’horaires de travail et, plus encore, d’horaires d’ouverture semblent se poser assez fréquemment ; qu’en est-il dans les faits ?

– les agents des ex-Assédic notamment redouteraient pour certains le changement de culture imposé (passer d’une profession dont l’objectif est de calculer des droits à l’exercice d’un métier de conseil, voire d’assistance) ; de plus, en tout état de cause, les agents doivent suivre des formations pour s’initier à un nouveau métier, ce qui ne serait pas toujours aisé en pratique ;

– l’accès à Pôle emploi par le numéro de téléphone unique 39 49 a pu poser certaines difficultés (question de la tarification pour l’accès à ce numéro à partir d’un téléphone portable, temps d’attente jugé excessif par certains usagers, etc.), même si celles-ci semblent en grande partie résolues ;

– la mise en place de l’entretien unique d’inscription, de manière à éviter la redondance entre le premier entretien, qui permet de s’inscrire et connaître ses droits, et le second, centré sur l’élaboration du projet personnalisé d’accès à l’emploi, pourra-t-elle être effective pour tous les demandeurs d’emploi en 2009 ?

B. LES ACTEURS DE LA RÉFORME, LES PERSONNELS

La question des personnels est plurielle : elle renvoie à celle du nombre des agents travaillant à Pôle emploi mais aussi à celle de leurs garanties statutaires ; elle recouvre également le sujet spécifique du transfert à Pôle emploi de certains personnels de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA).

1. Les personnels de Pôle emploi

Une première question est relative au nombre de personnes travaillant à Pôle emploi. Fin février, Pôle emploi comptait 44 675 employés (29 838 anciens agents de l’ANPE et 14 837 anciens salariés des Assédic). Ce nombre est souvent, dans la conjoncture actuelle, considéré comme insuffisant :

– à la fin du mois de mars 2009, le président de la République a annoncé le recrutement de 1840 agents supplémentaires, pour faire face à la surcharge de travail liée à l’augmentation du nombre de demandeurs d’emploi ; comme l’a souligné le secrétaire d’État chargé de l’emploi le jeudi 23 avril 2009, « après ce renfort, si nécessaire, il y aura une autre vague » ;

– la question du redéploiement de conseillers reste posée, dans le but de renforcer l’accompagnement des demandeurs d’emploi. La convention tripartite pluriannuelle prévoit de réorganiser les fonctions support et d’optimiser le réseau et les processus opérationnels pour redéployer progressivement 4 600 équivalents temps plein (ETP) de 2009 à 2011 (9).

Une autre interrogation est relative à la conclusion de la nouvelle convention collective applicable aux personnels de Pôle emploi. Le nouvel article L. 5312-9 du code du travail prévoit que les agents de Pôle emploi sont soumis à une convention collective étendue agréée par les ministres chargés de l’emploi et du budget.

L’article 7 de la loi du 13 février 2008 dispose qu’à la date de création de Pôle emploi :

– les anciens agents de l’ANPE restent régis par leur statut avec, dans le délai d’une année à compter de son agrément, la possibilité d’opter pour la convention collective applicable aux agents de Pôle emploi ;

– les anciens salariés des Assédic restent, même après création de la nouvelle institution, régis par leur convention collective, jusqu’à l’entrée en vigueur de la nouvelle convention collective ou, à défaut, jusqu’à la date prévue par l’accord préalable qui doit être conclu par les partenaires sociaux.

En effet, en application de l’article 6 de la loi, durant la période transitoire préalable à la création de la nouvelle institution, le délégué général de l’instance provisoire reçoit mandat du conseil de cette instance pour conclure « un accord préalable à la négociation de [la] convention collective qui en fixe le cadre ». Cet accord a été conclu le 28 octobre 2008 et organise les conditions de la négociation collective, notamment en fixant les thèmes à traiter.

Ces négociations sur la future convention collective ont effectivement commencé en janvier 2009 et ont dix-huit mois pour aboutir. On peut cependant déjà s’interroger sur l’état de cette négociation aujourd’hui.

2. Le transfert de personnels de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA)

L’article 2 de la loi du 13 février 2008 a conféré à la nouvelle institution le soin d’« orienter » les personnes, qu’elles disposent ou non d’un emploi. En outre, l’article 12 de la loi prévoit que dans un délai de douze mois après la promulgation de la loi, le gouvernement présente au Parlement un rapport sur les modalités du transfert éventuel à la nouvelle institution des personnels de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) chargés de l’orientation professionnelle des demandeurs d’emploi.

Aux termes d’un rapport réalisé par les directeurs généraux de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), M. Philippe Caïla, et de Pôle emploi, M. Christian Charpy, début avril 2009, il serait envisagé que 920 personnes, pour l’essentiel des psychologues, quittent l’AFPA pour rejoindre Pôle emploi et assurer une mission d’orientation des personnes prises en charge. Ces 920 personnels représentent environ les trois quarts des effectifs de psychologues de l’AFPA (on en dénombre 1200 et 300 resteraient salariés de l’AFPA ; l’AFPA compte au total près de 12 000 salariés). Le rapport proposerait de retenir la date du 1er avril 2010 pour le transfert effectif.

Les modalités de mise en œuvre de ce transfert sont détaillées dans l’article 19 du projet de loi relatif à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie. Le conseil d’administration de Pôle emploi a émis mercredi 8 avril un avis favorable sur ce projet d’article de loi. La discussion parlementaire de cet article du projet de loi sera l’occasion de préciser les modalités pratiques de ce transfert.

C. LES MOYENS DE LA RÉFORME

Par-delà la question des personnels, Pôle emploi, pour pouvoir mener à bien ses missions, doit être dotée des moyens budgétaires et matériels (mobiliers et immobiliers) suffisants.

1. Les moyens budgétaires

La question des moyens de la nouvelle institution est d’abord d’ordre budgétaire. Aux termes de l’article L. 5312-7 du code du travail, le budget de la nouvelle institution comporte quatre sections non fongibles qui doivent chacune être présentée à l’équilibre : les sections « assurance chômage », « solidarité », « intervention » et « fonctionnement et investissement ». Le premier budget de Pôle emploi a été adopté par le conseil d’administration le 19 décembre 2008.

Il est prévu que, sous réserve des crédits inscrits en loi de finances, de 2009 à 2011, l’État contribuera au financement des dépenses inscrites aux troisième et quatrième sections du budget de Pôle emploi à hauteur de 1,36 Mds d’euros par an, ce montant intégrant une réserve de précaution. Cette subvention globale pourra être complétée par des subventions exceptionnelles, notamment en 2009 dans le cadre du plan de relance de l’économie française.

La contribution de l’Unédic est égale, conformément aux dispositions de l’article L. 5422-24 du code du travail (rédaction résultant de la loi du 13 février 2008), à 10 % de l’ensemble des contributions des employeurs et des salariés à l’assurance chômage, ce qui équivaut à un montant de 2,9 Mds d’euros pour 2009.

Par ailleurs, on peut s’interroger sur l’évolution des dépenses suivantes :

– la question des moyens alloués pour l’accompagnement de la fusion (notamment les réorganisations administratives) a parfois été posée de manière polémique, mais il serait en tout état de cause utile de disposer d’un chiffrage de l’ensemble de ces opérations ;

– le développement du recours aux opérateurs de placement pour des prestations globales, par la mise en œuvre d’une politique de sous-traitance, soit parce que Pôle emploi ne dispose pas en interne d’une telle compétence (notamment en matière d’évaluation des compétences et de formation) soit pour « majorer ses capacités d’action et (…) confronter ses méthodes et résultats à ceux d’autres opérateurs » devrait également pouvoir être chiffré ;

– il en va de même des effets, à plus long terme, de l’entrée en application de la nouvelle convention collective applicable aux personnels de Pôle emploi.

2. Les autres moyens matériels

L’article 8 de la loi du 13 février 2008 prévoit que l’ensemble des biens, droits et obligations, créances et dettes de l’Agence nationale pour l’emploi ainsi que les biens mobiliers de ses services sont transférés de plein droit et en pleine propriété à la nouvelle institution, à titre gratuit, à la date de sa création. Ce transfert a donc eu lieu le 19 décembre 2008.

En outre, la convention tripartite pluriannuelle rappelle que des conventions entre l’Unédic, les Assédic et Pôle emploi prévoient les conditions de la mise à disposition des biens immobiliers, des biens informatiques et des biens mobiliers, notamment :

– la location au prix de 50 millions d’euros, à titre transitoire en 2009, à Pôle emploi, par l’Unédic, des biens immobiliers et mobiliers dont l’Unédic et les Assédic sont propriétaires et qui sont nécessaires à l’accomplissement des missions de Pôle emploi ;

– la mise à disposition à titre gratuit, à titre transitoire en 2009, de l’ensemble des applicatifs et des biens informatiques de l’Unédic et des Assédic, nécessaires à l’accomplissement des missions de Pôle emploi.

Par ailleurs, à plus long terme, l’Unédic, Pôle emploi et l’État s’engagent à étudier les modalités d’un « règlement financier global » traitant de l’état des passifs et des actifs ainsi que de la contribution de l’Unédic à Pôle emploi. La convention tripartite pluriannuelle précise que cette étude pourra notamment porter sur la constitution d’une société civile immobilière (SCI) commune à Pôle emploi et l’Unédic, détentrice de l’ensemble des biens immobiliers nécessaires à l’accomplissement des missions de Pôle emploi. Il serait utile de disposer d’éléments d’information sur l’état d’avancée de la réflexion sur ce règlement financier global.

D. LA MISE EN œUVRE DES COORDINATIONS AU SEIN DU SERVICE PUBLIC DE L’EMPLOI

L’organisation de Pôle emploi vise à prendre en considération la diversité des territoires. C’est pourquoi elle est fortement déconcentrée, de manière à favoriser l’adaptation territoriale des politiques de l’emploi, et ce autour de quatre niveaux : le niveau national, pour la définition de la stratégie et la conception des politiques ; le niveau régional, pour la déclinaison de la politique nationale ; le niveau territorial, où est mise en œuvre la stratégie régionale ; le niveau local, qui correspond à une logique de proximité (des unités polyvalentes ou spécialisées délivrent des services). Par ailleurs, Pôle emploi exerce son action au sein du service public de l’emploi en coordination avec les maisons de l’emploi et les réseaux spécialisés d’accueil et d’accompagnement des demandeurs d’emploi.

1. Les régions

Le niveau régional est capital pour ce qui concerne l’organisation déconcentrée :

– la loi prévoit la mise en place d’un conseil régional de l’emploi présidé par le préfet de région dans chaque région (article L. 5112-1 du code du travail) ;

– la loi impose aussi la conclusion d’une convention annuelle, au nom de l’État par l’autorité administrative et le représentant régional de l’institution, convention qui a notamment pour objet de déterminer la programmation des interventions de l’institution au regard de la situation locale de l’emploi et du marché du travail (article L. 5312-11 du code du travail) ;

– la loi a enfin créé des instances paritaires régionales (article L. 5312-10 du code du travail) : celles-ci sont – entre autres missions – consultées par les directeurs régionaux dans le cadre de la préparation de la programmation régionale des interventions de Pôle emploi puis sur le projet de convention annuelle régionale avec l’État.

Il faut aussi noter que la convention tripartite pluriannuelle a prévu que, pour améliorer l’orientation et l’accès à la formation des demandeurs d’emploi, Pôle emploi propose aux conseils régionaux de négocier des conventions en vue notamment de développer l’information des demandeurs d’emploi sur les formations financées par les conseils régionaux ou de rechercher une complémentarité entre les actions du conseil régional et celles de Pôle emploi.

La mise en place rapide de ces différents outils au service d’une intervention locale de Pôle emploi est une nécessité. Aussi serait-il opportun de disposer d’un bilan précis de cette mise en place : si dans un nombre non négligeable de régions les conseils régionaux de l’emploi semblent constitués, il ne semble pas encore en aller de même s’agissant des instances paritaires régionales.

2. Les maisons de l’emploi

La question de l’articulation entre l’intervention de Pôle emploi et celle des maisons de l’emploi a été abordée dès la discussion du projet de loi qui allait devenir la loi du 13 février 2008. Le rôle des maisons de l’emploi a d’ailleurs été réaffirmé à l’article 3 de la loi, qui a souligné que celles-ci concourent à la coordination des politiques publiques et du partenariat local des acteurs publics et privés qui agissent en faveur de l’emploi, de la formation, de l’insertion et du développement économique.

Le débat organisé à l’Assemblée nationale le mardi 24 mars 2009 sur les suites de la mission d’information sur les maisons de l’emploi qui avait été constituée à l’Assemblée nationale (10) a été l’occasion de rappeler les liens entre Pôle emploi et les maisons de l’emploi, dont les actions respectives doivent être considérées comme complémentaires.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État chargé de l’emploi, a en effet estimé que « les maisons de l’emploi peuvent conserver toute leur utilité, même après ce changement majeur que représente la création de Pôle emploi. Cela ne doit toutefois pas se faire à n’importe quel prix. Nous ne devons pas faire l’économie d’une réflexion conjointe et critique s’agissant des rapports entre l’État et les maisons de l’emploi, qui doivent s’améliorer, et de l’approche des maisons de l’emploi territoire par territoire pour leur permettre d’être véritablement complémentaires. Mon obsession est de ne pas ajouter une structure de plus dans l’édifice du service public de l’emploi, mais d’en faire, au contraire, un outil permettant de simplifier et de rendre notre action plus efficace ».

3. Les réseaux spécialisés d’accueil et d’accompagnement des demandeurs d’emploi

L’action de la nouvelle institution est mise en œuvre en coordination avec les différents réseaux spécialisés d’accueil et d’accompagnement existants, l’Association pour l’emploi des cadres (APEC), les missions locales et les organismes du réseau Cap emploi. La convention tripartite pluriannuelle prévoit que les conventions existantes conclues entre Pôle emploi et ces différents réseaux seront reconduites par avenant jusqu’à fin 2009.

De nouvelles conventions seront ensuite négociées, notamment avec les organismes du réseau Cap emploi et les missions locales. S’agissant de ces dernières, lors de l’installation du nouveau Conseil national des missions locales (CNML) le 24 mars 2009, le président M. Bernard Perrut a remis au secrétaire d’État chargé de l’emploi, M. Laurent Wauquiez, des propositions pour déterminer la place des missions locales au sein du service public de l’emploi, en particulier leur coopération avec Pôle emploi (11).

L’étude présente 30 propositions pour répondre à trois objectifs : améliorer la définition du rôle des missions locales, opérateur spécialisé au sein du service public de l’emploi, pour accompagner les jeunes rencontrant des difficultés d’accès à la vie active ; s’appuyer sur un partenariat dense qui offre des complémentarités opérationnelles des métiers ; animer et soutenir le partenariat entre le réseau des missions locales et celui de Pôle emploi. Le CNML propose d’intégrer ces propositions dans un contrat de progrès.

Il serait de même utile de disposer d’éléments d’information sur la stratégie retenue concernant la coordination entre l’action de Pôle emploi et celle du réseau Cap emploi.

*

Au terme de cette analyse, la multiplicité des questions posées pourrait inviter à un relatif pessimisme. Par-delà les motifs de satisfaction liés à l’adoption même de la loi du 13 février 2008 et à la publication rapide de ses principaux décrets d’application, le rapporteur estime qu’au contraire, ces préoccupations légitimes attestent l’état d’une réflexion à un instant donné, sans préjuger en rien de l’avenir.

C’est en faisant état de ces interrogations que le débat peut s’ouvrir et que pourront être distingués, le cas échéant, les éventuels motifs légitimes d’inquiétude des interrogations inhérentes à toute réforme d’une telle ampleur. Les éléments de réponse apportés par M. Christian Charpy, directeur général de Pôle emploi, lors de son audition par la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l’Assemblée nationale, sont à cet égard indispensables pour nourrir une discussion que ne fait qu’ouvrir le présent développement.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DE M. CHRISTIAN CHARPY,
DIRECTEUR GÉNÉRAL DE PÔLE EMPLOI

La Commission procède à l’audition, ouverte à presse, de M. Christian Charpy, directeur général de Pôle emploi, au cours de sa séance du mercredi
6 mai 2009.

M. Christian Charpy, directeur général de Pôle emploi. Pôle emploi
a été créé le 19 décembre 2008, c’est-à-dire avant la date prévue, qui était
le 1er janvier 2009.

L’exercice n’était pas facile car il fallait solliciter les comités d’entreprise de l’ANPE, de l’Unédic et des 31 structures différentes dont les Assédic étaient constituées. Ma crainte était que le processus prenne un retard considérable, comme ce fut le cas lors de la fusion entre Gaz de France et Suez. Nous avons donc mené la concertation de telle façon que les comités d’entreprise soient en mesure de se prononcer avant le 19 décembre, et la saisine du Conseil d’État et du tribunal de grande instance de Paris par voie de référé a conduit à l’établissement du constat selon lequel la concertation avait été menée jusqu’à son terme.

Le nouvel organisme a ainsi pu voir le jour dans les délais prévus. Il compte aujourd’hui quelque 45 000 collaborateurs, dont 30 000 sont issus de l’ANPE et 15 000 des Assédic et de l’Unédic. Son conseil d’administration, composé de cinq représentants de l’État, cinq représentants des employeurs, cinq représentants des salariés, un représentant des collectivités territoriales et deux personnalités qualifiées, a commencé ses travaux. Là aussi, il a fallu s’adapter pour passer d’une organisation paritaire au sein de l’Unédic à une structure plus complexe. Plusieurs mesures indispensables au bon fonctionnement de Pôle emploi ont déjà été adoptées : nous avons défini une offre de services, identifié les conventions qu’il faudra passer avec l’Unédic, notamment en matière immobilière, et approuvé un règlement des marchés ainsi qu’une procédure comptable.

En revanche, le contexte a quelque peu évolué depuis le moment où la fusion a été décidée. De l’été 2005 jusqu’à mi-2008, le chômage avait en effet connu une régression forte et constante, le nombre de demandeurs d’emploi en fin de mois de catégorie 1, indicateur de référence de l’ANPE, passant de 2 495 000 à un peu moins de 1 900 000. À partir de fin 2007, il a cessé de régresser ; et depuis août 2008, le nombre de demandeurs d’emploi explose, ce qui entraîne une surcharge considérable pour Pôle emploi, avec 430 000 demandeurs supplémentaires en catégorie A, soit une hausse de près de 25 % en six mois, et il y a chaque semaine 25 à 30 % d’inscriptions de plus par rapport à la semaine correspondante de l’année précédente. Cette progression du chômage a été inégalement répartie sur le territoire : elle a été comprise entre 35 et 38 % en un an en Franche-Comté, et forte également en Rhône-Alpes, en Alsace, en Bourgogne, en Basse-Normandie et dans les Pays de la Loire.

À ces difficultés conjoncturelles s’ajoute un contexte social interne qui n’est pas simple. Pôle emploi rassemble en effet des personnels dont l’histoire, la culture et les pratiques professionnelles sont très différentes.

Pour ce qui est de la gouvernance, on ne saurait imaginer qu’une direction générale de cinq personnes suffise à animer un organisme de 45 000 personnes, qui doit s’occuper de 2,5 millions de personnes chaque mois et qui gère une masse financière de 35 milliards d’euros. Nous devons nous donner les moyens administratifs de gérer cette grande « entreprise » dont le rôle est de rendre des services. À cet égard, je me considère comme un chef d’entreprise. L’ANPE disposait déjà d’une direction du marketing. Si nous en avons maintenu une à Pôle emploi, c’est qu’il nous faut définir les services à rendre tant aux demandeurs d’emploi qu’aux entreprises.

S’agissant des aspects financiers de la fusion, il faut également tordre le cou à certaines rumeurs. Notre logo et notre charte graphique, qui ont fait l’objet d’un marché public passé par le ministère de l’emploi, ont coûté 150 000 euros, ce qui est bien loin des chiffres très fantaisistes qui circulent, et ce qui me semble raisonnable pour un logo qui va s’afficher sur 2 000 sites et figurer sur deux millions de lettres chaque mois. En ce qui me concerne, ma rémunération n’a pas évolué depuis mon recrutement le 8 avril 2005 comme directeur général de l’ANPE.

Quant au numéro téléphonique 3949, c’est un service qui existait déjà depuis environ un an du côté des Assédic. Il n’était guère envisageable, une fois la fusion réalisée, qu’il y ait un numéro de téléphone unique en matière d’indemnisation et qu’en matière de placement, il faille rechercher le numéro de l’agence de Pôle emploi. Nous avons donc décidé d’élargir le 3949 à l’ensemble des services de Pôle emploi destinés aux demandeurs d’emploi. Ce numéro unique de Pôle emploi a été mis en service dès le 5 janvier mais, je le reconnais, des difficultés sont apparues au tout début. Le premier jour, nous avons enregistré un million d’appels, ce qui dépasse largement les capacités de toutes les plateformes existantes. Grâce aux moyens supplémentaires que nous avons déployés, la situation est aujourd’hui stabilisée, à l’exception toutefois de quelques cas particuliers, notamment dans les départements d’outre-mer ; le taux d’aboutement, c’est-à-dire la possibilité d’obtenir un conseiller en ligne en direct, est en général supérieur à 80 %, ce qui correspond au service rendu par la plupart des plateformes téléphoniques.

D’autre part, il y a eu en effet un problème de coût d’accès. Nous avons, à l’origine, repris le contrat mis en place par l’Unédic, qui prévoyait une sur-taxation en cas d’appel depuis un téléphone mobile ou d’une ligne fixe gérée par un autre opérateur que France Télécom. Depuis la fin du mois d’avril, les opérateurs ont renoncé à toute surfacturation ; le coût de l’appel est désormais inclus dans le forfait d’abonnement. Je vais en outre proposer au conseil d’administration de fournir aux demandeurs d’emploi en grande difficulté financière des cartes prépayées pour appeler le 3949. Toutes les difficultés semblent donc réglées. Nous veillerons à ce que la qualité du service ne se dégrade pas au mois de septembre, le nombre d’inscriptions étant toujours élevé à cette période.

En ce qui concerne l’amélioration du service rendu aux demandeurs d’emploi, nous travaillons sur trois thèmes principaux.

Tout d’abord, nous voulons simplifier l’accès à nos services. Cela passe par le 3949, mais aussi par le site internet pole-emploi.fr, fusion entre anpe.fr et assedic.fr. En place depuis le 2 janvier dernier, ce site, que nous allons continuer à améliorer, permet d’accéder à l’ensemble de nos services d’indemnisation et de placement. On peut ainsi déposer un CV ou une offre d’emploi en ligne, consulter les offres, actualiser son dossier d’indemnisation. Le troisième élément de simplification est la mise en place des sites uniques, par fusion des 830 agences ANPE et des 630 agences Assédic pour constituer 950 sites mixtes d’ici à la fin de l’été. Nous avons donc organisé la concertation avec les organisations syndicales et les comités d’entreprise. Nous avons rencontré des difficultés dans certaines régions, mais la phase de consultation est achevée dans cinq cas sur six. Une centaine de sites mixtes ont déjà vu le jour, nous devrions en être à peu près à la moitié en juillet et avoir quasiment terminé d’ici à la fin du mois de septembre.

Ensuite, nous voulons personnaliser la relation avec les demandeurs d’emploi, chacun ayant un conseiller personnel en mesure de lui répondre aussi bien en matière d’indemnisation que de placement. Pour cela, nous avons 30 000 agents à former, les uns aux techniques d’indemnisation, les autres aux techniques de placement. L’objectif est d’achever cette formation avant la fin de l’année 2009. Jusqu’à présent, 4 500 à 5 000 personnes ont été formées et ont pu ensuite prendre leur poste dans un guichet unique. C’est naturellement un programme lourd, qui nécessite de remplacer temporairement les personnels en formation.

Nous avons également veillé à simplifier les parcours de retour à l’emploi en distinguant un parcours de base et un parcours renforcé pour les personnes éprouvant des difficultés particulières. S’il existe toujours des parcours différents, notre objectif est de personnaliser le service rendu. D’autre part, il n’y a plus de variation des aides selon que le demandeur d’emploi est, ou non, indemnisé. Depuis le 1er janvier 2009, elles sont en effet accordées en fonction des besoins réels, notamment en matière de formation et de mobilité.

Enfin, l’objectif fixé par la loi et par la convention tripartite était de réduire le nombre de demandeurs d’emploi suivis par chaque conseiller. La dégradation de la situation économique ne favorise pas une telle évolution : on compte désormais 90 demandeurs d’emploi par conseiller, contre 75 au début du mois d’août 2008. Dans certaines agences, cela peut aller jusqu’à 120, 140, voire 180. C’est pourquoi les renforts annoncés par le gouvernement sont essentiels. Peut-être faudra-t-il encore des moyens complémentaires, mais nous n’avons pas vocation à tout faire seuls : nous avons des structures cotraitantes, comme les missions locales, l’Apec, Cap emploi, les maisons de l’emploi ; et il existe aussi des opérateurs privés de placement, que nous comptons solliciter dans les semaines à venir. Nous avons lancé un appel d’offres pour la prise en charge d’une centaine de milliers de demandeurs d’emploi par an.

J’en viens à la question des personnels de l’AFPA. L’article 19 du projet de loi relatif à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie prévoit effectivement un transfert des agents chargés de missions d’orientation professionnelle vers Pôle emploi avant le mois d’avril 2010. Dans un rapport remis à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État chargé de l’emploi, le directeur général de l’AFPA et moi-même avons proposé que les 950 agents concernés soient transférés dans des services spécifiques. En effet, il n’est pas question de les disperser dans nos agences ; nous comptons plutôt les faire intervenir dans le cadre de plateformes régionales ou départementales spécifiquement consacrées à l’orientation.

Concernant le budget pour 2009, nous disposons de 4,5 milliards d’euros de crédits, dont 1,3 milliard en provenance de l’État et 3 milliards de l’Unédic, auxquels s’ajoutent des moyens complémentaires relevant du Fonds social européen et de différents partenariats avec les collectivités locales et divers organismes. Pour le moment, ces moyens me semblent suffisants. Ce qui compte en effet, ce ne sont pas tant les moyens financiers que leur mobilisation. La difficulté actuelle est de recruter et de déployer rapidement les effectifs dont nous avons besoin.

Il reste que la conjoncture économique nous contraint à décaler dans le temps certaines évolutions. La généralisation des plateformes de prospection d’emplois se fera ainsi un peu moins vite que prévu, non seulement parce que nous avons besoin de mobiliser plus de conseillers pour suivre les demandeurs d’emplois, mais aussi parce que le gisement des offres d’emploi est moins abondant. Nous avions également prévu de faire bénéficier les jeunes d’un suivi mensuel dès le premier mois, mais la tâche se complique singulièrement du fait de la très forte augmentation du nombre de jeunes inscrits – 37 % de plus en moyenne, et même 50 % pour les jeunes hommes en un an. Il faudra donc travailler avec les missions locales et avec d’autres partenaires extérieurs pour accélérer ce dispositif.

Toute personne s’inscrivant à Pôle emploi pourra néanmoins bénéficier d’un entretien dès le premier jour ; elle aura ensuite accès à un atelier de recherche d’emploi dans les trois premiers mois de son inscription ; puis elle pourra faire l’objet d’un suivi mensuel. Dans un délai de quinze jours suivant son inscription, elle connaîtra également le nom de son conseiller personnel.

Pour ce qui est des relations avec l’Unédic, il nous reste à élaborer un règlement financier global. Un accord prévoit déjà que l’ensemble du patrimoine immobilier et mobilier de l’Unédic est mis à la disposition de Pôle emploi pour un montant annuel de 50 millions d’euros. D’autres points demeurent toutefois en suspens car nous avons hérité de l’Unédic des créances, mais aussi des dettes. Nous devrons ainsi financer les droits aux congés payés et les indemnités de départ en retraite des personnels qui nous été transférés, ce qui représente plusieurs centaines de millions d’euros. Nos relations avec l’ANPE sont en revanche plus simples, l’ensemble des actifs et des passifs ayant été transféré en même temps.

Concernant nos liens avec les organismes co-traitants et sous-traitants, ainsi qu’avec les collectivités locales, je répète que notre objectif n’est pas de tout faire tout seuls. Nous n’en aurions pas les moyens, et ce serait également contraire à notre objectif de territorialisation des politiques de l’emploi. Pour l’année 2009, nous avons décidé de prolonger toutes nos conventions avec les missions locales, l’Apec, Cap emploi et les maisons de l’emploi. Nous succéderons d’ailleurs aux Assédic et à l’ANPE au sein des conseils d’administration, et nous comptons travailler avec nos partenaires dans un esprit de complémentarité.

Une fusion d’une telle ampleur ne peut pas se faire du jour au lendemain. Mais cela ne nous empêche pas de réaliser très vite des progrès dont nous mesurons déjà les effets. Chacun se souvient, par exemple, que la rapide augmentation du chômage en 1992 et 1993 s’était traduite par des files d’attente devant les Assédic et les antennes de l’ANPE. Aujourd’hui, il y a certes du monde dans les agences, mais nous pouvons recevoir 92 % des personnes dans les cinq jours suivant leur inscription par téléphone ou par Internet, et 94 % des dossiers sont définitivement traités en moins de quinze jours.

Il est vrai qu’il y a encore des problèmes, parfois plus médiatisés que les succès que nous remportons. Toutefois, si certains d’entre eux correspondent à des dysfonctionnements imputables à Pôle emploi, d’autres relèvent plutôt d’une insatisfaction à laquelle nous ne pouvons pas grand-chose. C’est ce que j’ai pu constater en lisant certains des courriers que j’ai reçus après avoir donné mon adresse mail lors d’une émission télévisée, dans lesquels des personnes se plaignaient par exemple de ne pas être indemnisés, alors qu’elles ne réunissaient pas les conditions requises. S’il reste bien des progrès à faire, il faut admettre que nous ne pouvons pas réaliser en trois mois une fusion qui nécessiterait trois ans de travail dans la plupart des entreprises et des administrations.

M. le président Pierre Méhaignerie. J’ai compté 76 députés présents ce matin pour vous écouter, monsieur Charpy. Cela témoigne d’une réelle inquiétude sur le terrain, mais aussi d’une très forte attente.

Personne ne rejette la fusion, mais les demandeurs d’emploi ont besoin d’espoir, de même que vos personnels. Pour cela, ne faut-il pas essayer d’éclaircir l’horizon en mettant en avant ce qui marche et en s’inspirant des bonnes solutions ? Il me semble qu’il faut faire du benchmarking.

Je redoute surtout que les acteurs de terrain ne soient écrasés par les structures nationales ou régionales. Nous avons trop tendance, dans notre pays, à constituer des doublons au niveau central et à monter des usines à gaz sans lien avec les réalités locales.

Je donne la parole à M. Yves Albarello, qui était rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques de la loi du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi.

M. Yves Albarello. Il faut du temps pour fusionner deux entreprises comptant au total 45 000 personnes et aux cultures différentes. C’est encore plus compliqué dans un contexte de crise économique mondiale. Il reste que c’est un beau pari.

Compte tenu des difficultés actuelles, pensez-vous que le déploiement de 1 800 agents supplémentaires suffira ? Nous sommes loin de l’objectif d’un conseiller pour 60 demandeurs d’emploi. Dans combien de temps pensez-vous que Pôle emploi pourra atteindre sa vitesse de croisière ?

M. Bernard Perrut. L’un des objectifs du nouvel opérateur est de mettre en synergie les offres de service et de tisser des liens avec les réseaux spécialisés d’accueil et d’accompagnement. Or les missions locales ont pratiquement rempli leurs objectifs annuels d’accueil de jeunes demandeurs d’emploi dès la fin du premier trimestre. Quelle réponse comptez-vous apporter, à court terme, au dépassement des objectifs d’accueil en co-traitance ?

À moyen terme, quelle est votre position à l’égard des 30 propositions adoptées par le Conseil national des missions locales, le 29 avril dernier, en vue de rendre plus complémentaires les offres de services du réseau des missions locales et celles de Pôle emploi ? À long terme, allez-vous développer des outils spécialisés pour le public jeune, comme l’a fait par exemple Emploi Québec ?

On peut également s’interroger sur les différences de situation entre les territoires en matière d’emploi. Dans quelle mesure votre organisation territoriale prendra-t-elle en compte ces disparités ? Comment ferez-vous pour assurer une véritable égalité de traitement ? Enfin, comment les politiques menées par les services publics régionaux vont-elles s’articuler avec les priorités définies au niveau national ?

M. Marcel Rogemont. En présentant cette nouvelle structure, Mme Christine Lagarde avait évoqué la suppression des maisons de l’emploi. Nous avons compris que ce ne serait finalement pas le cas, ce qui est heureux. Toutefois, il serait sans doute bon d’améliorer la lisibilité du dispositif. Sur un même territoire, on peut en effet compter jusqu’à trois intervenants potentiels.

D’autre part, j’aimerais savoir il a été proposé à certains conseils généraux, notamment celui d’Ille-et-Vilaine, de créer des postes spécifiques pour les allocataires du RMI, et bientôt du RSA. Vos conseillers n’ont-ils pas vocation à s’occuper de tous les publics, qu’ils soient ou non éloignés de l’emploi ?

Enfin, chacun sait que de nombreuses personnes attendent beaucoup trop longtemps – parfois cinq mois – avant d’obtenir des rendez-vous jugés satisfaisants avec les services de l’emploi, notamment en matière de formation. Que comptez-vous faire pour remédier à cette situation ?

M. Roland Muzeau. Tout d’abord, j’aurais préféré que vous vous présentiez à nous comme le dirigeant d’un grand service public, et non comme un chef d’entreprise. C’est sans doute l’effet d’une certaine mode…

Le Gouvernement a justifié la fusion des services de l’emploi au nom de la simplification et de l’efficacité. Or, nous sommes loin du compte. Si la situation est difficile dans ce pays, ce n’est pas seulement à cause de la détérioration des conditions économiques, c’est aussi à cause de certains dysfonctionnements du service public.

À Gennevilliers et à La Garenne, par exemple, qui sont des bassins d’emploi en grande difficulté, vos agents s’occupent chacun de 150, voire de 180 dossiers car il manque une dizaine de postes. On est donc très loin de l’objectif de 70 demandeurs d’emploi suivis par chaque agent. On constate également un turnover très important des effectifs, qui s’explique notamment par les difficultés rencontrées par le public concerné, souvent issu de l’immigration. Face à la charge de travail, certains agents ne souhaitent pas rester en poste. Pôle emploi ne devrait-il pas répartir ses moyens en faisant en sorte de les renforcer là où il y a le plus de difficultés ?

D’autre part, que pensez-vous de l’objectif prêté au Gouvernement de doubler le nombre de personnes suivies par des sociétés privées ?

Enfin, quel dispositif comptez-vous mettre en place en faveur des bénéficiaires du RSA ?

M. Francis Vercamer. Sans remettre en cause le principe de la fusion des services, on peut tout de même se poser quelques questions.

Tout d’abord, la mise en relation par téléphone améliore-t-elle la qualité du service et humanise-t-elle vraiment le système ?

Je m’interroge également sur le rythme de formation des agents, étant donné les chiffres que vous avez annoncés.  Comment comptez-vous faire pour achever cette formation avant la fin de l’année ? Allez-vous réduire la durée des formations, comme le disent les délégués du personnel ?

Quels sont vos objectifs en ce qui concerne le nombre de demandeurs d’emploi dont s’occupe chaque agent – critère important pour la qualité du service ?

À la suite d’un amendement que j’avais déposé, les compétences de Pôle emploi ont été élargies aux parcours d’insertion sociale et professionnelle. Aurez-vous les moyens de remplir cette mission, ou bien allez-vous la sous-traiter ?

Enfin, quel type de partenariat entendez-vous développer avec les maisons de l’emploi ?

M. Christian Charpy. Je crois effectivement que nous devons nous inspirer de ce qui se fait dans d’autres pays, notamment le Danemark, les Pays-Bas, l’Allemagne et la Grande-Bretagne, où je me rends très régulièrement. Je me suis ainsi aperçu que nous rencontrions les mêmes difficultés et que nous avions souvent recours aux mêmes solutions que nos voisins, notamment le renforcement des effectifs, ou encore le développement de plateformes centralisées.

J’ajoute que le benchmarking vaut également au plan interne : il y a, par exemple, des régions où la coopération avec les maisons de l’emploi produit des résultats très intéressants.

Pour ce qui est des structures, je fais avec ce que j’ai : nous avons commencé par regrouper les services, puis nous verrons quelles évolutions nous pouvons favoriser, sachant que l’on ne peut pas brutalement demander à un agent en poste dans une direction générale de rejoindre des services implantés au niveau local. En revanche, nous avons calculé que l’on pourrait redéployer, dans un délai de trois ans, près de 4 500 personnes, soit 10 % de nos effectifs, vers les services opérationnels grâce à l’amélioration du service rendu, à la suppression de certains doublons et à l’allégement des fonctions de soutien. Les départs à la retraite favoriseront également ce processus.

D’autre part, nous allons répartir les 1 840 postes supplémentaires qui nous ont été attribués en fonction des taux de chômage constatés au niveau local et de leur évolution, ainsi qu’en fonction des dotations actuelles. Il ne faut pas non plus oublier que nous allons pouvoir redéployer 1 300 personnes actuellement en poste au service du recouvrement des cotisations d’assurance chômage car leurs fonctions seront assurées par les Urssaf à partir de 2011.

Afin d’améliorer le service rendu, nous souhaitons effectivement réduire le nombre de demandeurs d’emploi suivis par chaque conseiller, mais cela ne signifie pas qu’il faut nécessairement augmenter de façon exponentielle nos effectifs. Actuellement, la formation prend du temps, et l’on peut également espérer que la situation de l’emploi va s’améliorer à terme.

Nous allons aussi faire appel à d’autres partenaires. Le nombre de demandeurs d’emploi pris en charge par nos sous-traitants devrait ainsi passer, à terme, de 40 000 à 100 000, voire 120 000. Les opérateurs du secteur privé utilisent en effet des techniques et des méthodes intéressantes que nous ne devons pas négliger. Par ailleurs, il serait dommage de ne pas exploiter les capacités techniques des entreprises de travail temporaire, lesquelles sont peu sollicitées dans la conjoncture actuelle.

M. le président Pierre Méhaignerie. Pouvez-vous nous dire où en sont les appels d’offres ?

M. Christian Charpy. Les offres doivent être remises à la mi-mai, de sorte que nous devrions être en mesure d’attribuer les marchés à la fin du mois de juin ou au début du mois de juillet. Nous disposerons donc de capacités supplémentaires au mois de septembre, au moment où les inscriptions au chômage risquent d’augmenter du fait des mouvements de sortie hors du système scolaire et universitaire.

Nous proposerons également aux missions locales d’augmenter le nombre des personnes qu’elles suivent et nous relèverons en proportion les montants que nous leur versons. D’autre part, nous comptons appliquer l’ensemble des conclusions retenues par le Conseil national des missions locales. Nous considérons en effet ces structures comme des partenaires essentiels. Les missions locales accueillent des jeunes qui ne viennent pas s’inscrire à Pôle emploi ; en commençant par les accompagner dans leur projet de vie, elles parviennent par la suite à les accompagner dans la vie professionnelle.

En ce qui concerne les maisons de l’emploi, il me semble que nous avons besoin de plus de lisibilité. Elles gagneraient à se placer davantage dans une démarche de coordination des intervenants. Afin de favoriser la territorialisation des politiques, j’ai donné pour instruction à tous nos responsables de travailler en partenariat étroit avec elles.

J’en viens à la question du nombre de personnes suivies par chaque conseiller. Il y a effectivement des sites où il est très élevé, ce qui peut s’expliquer par un taux de chômage plus important au niveau local, mais aussi par un turnover plus élevé des équipes. Afin d’éviter que les départs n’occasionnent une surcharge de travail trop importante, il faut simplifier et fluidifier notre politique de recrutement. C’est pour cette raison que nous n’organisons plus de concours à échéances périodiques, comme le faisait l’ANPE.

Pour ce qui est du 3949, il me paraît indéniable que l’instauration d’un numéro unique présente bien des avantages pratiques et permet de rapprocher les demandeurs d’emploi de nos services. Toutefois, je suis bien conscient que ce n’est pas l’alpha et l’oméga, et j’ai par exemple donné la consigne de recevoir les personnes qui se présentent dans les agences, au lieu de les renvoyer vers une plateforme téléphonique pour prendre un rendez-vous.

Tous les bénéficiaires du RSA auront accès aux services de Pôle emploi. Nous allons proposer aux conseils généraux, dans le cadre de conventions d’objectifs et de moyens, d’offrir un service renforcé à ceux qui rencontreraient des difficultés particulières, à l’instar de ce qui se fait dans le cadre du RMI.

Un mot enfin sur notre convention collective, qui est en cours de négociation : les dispositions du code du travail n’étant pas directement applicables, il faut que nous nous mettions d’accord sur un calendrier, puis que nous fassions des efforts mutuels. Nous devons en effet préserver les intérêts légitimes des salariés sans augmenter les frais de personnel dans des proportions démesurées. Même si la tâche est ardue, je pense que nous y arriverons car nous sommes déjà parvenus à signer un certain nombre d’accords depuis la création de Pôle emploi.

Mme Marisol Touraine. En matière de benchmarking, quels dispositifs souhaiteriez-vous emprunter à nos voisins étrangers, notamment les pays nordiques ? À l'inverse, quels sont les aspects du système français que vous trouvez performants ?

Dans mon département, je constate que le taux de retour à l’emploi des personnes prises en charge par Pôle emploi est inférieur à celui des demandeurs dont s’occupent certaines structures d’insertion, alors qu’il n’y a pas de différence dans le ratio de suivi. Comment expliquer cet écart, nul ne remettant en cause la compétence des personnels de Pôle emploi ?

D’autre part, pourquoi faudrait-il que les conseils généraux s’adressent à Pôle emploi pour les bénéficiaires du RSA au lieu de se tourner vers les partenaires avec lesquels ils ont l’habitude de travailler, notamment certaines associations ? Vous avez d’ailleurs indiqué que ce type d’accompagnement n’entrait pas dans vos missions de base, et que vous comptiez facturer un service renforcé. Faut-il en conclure que vous n’avez pas vocation à prendre en charge les bénéficiaires du RSA ?

M. Michel Herbillon. À Maisons-Alfort, dont je suis le député-maire, les locaux prévus pour Pôle emploi sont disponibles, mais ils demeurent vides. Quand passerons-nous enfin du virtuel au réel ? Pour reprendre l’expression utilisée par le président Méhaignerie, j’aimerais avoir de l’espoir, moi aussi.

En outre, je serais heureux de savoir qui fait quoi en matière d’emploi : ma circonscription dispose d’une mission locale depuis le début des années 1990, et elle bénéficie également d’une maison de l’emploi ; à cela devrait s’ajouter demain un site de Pôle emploi. Or, ces trois structures ont le même objectif : venir en aide aux personnes privées d’emploi. Il faudrait maintenant définir avec plus de précision les responsabilités de chacun dans le parcours de recherche d’emploi. Evitons les doublons !

M. Dominique Dord. Il y a les questions de logistique et de mécanique, fort complexes au demeurant, mais ce qui nous intéresse le plus, ce sont les résultats. Pouvez-vous nous donner une bonne raison d’espérer que la fusion des structures contribuera à améliorer la situation ?

J’aimerais également savoir quelle autonomie vous comptez accorder aux responsables locaux de Pôle emploi. Il faudrait leur donner la possibilité de monter des opérations avec les entreprises et les collectivités locales.

M. Jean-Patrick Gille. Etes-vous sûr, monsieur Charpy, que vous avez les moyens nécessaires pour réduire le nombre de personnes suivies par chaque conseiller et pour assurer le suivi des bénéficiaires du RSA, alors même que les trois quarts de vos ressources proviennent de l’Unédic, dont chacun connaît les difficultés dans la conjoncture actuelle ? Je ne comprends pas que vous fassiez preuve d’une telle assurance. Lorsque vous nous avez présenté le projet de fusion, l’an dernier, vous nous avez expliqué que vous ne vouliez pas d’un mammouth, mais plutôt d’une gazelle : il me semble que la gazelle a les jambes bien lourdes...

Je ne reviens pas sur la question des missions locales, déjà évoquée par Bernard Perrut, mais il me semble qu’il faudrait effectivement être en mesure de débloquer plus facilement les fonds.

Pour ce qui est de la gouvernance, j’avoue un certain étonnement : vous vous adressez tantôt à nous comme un chef d’entreprise, tantôt comme le dirigeant d’une ANPE « plus », nous exposant ce qu’il faut faire. Mais j’aimerais surtout savoir comment vous envisagez l’intervention de Pôle emploi dans le domaine de la formation et de l’orientation, quel rôle vous comptez jouer concernant le RSA, et avec quels interlocuteurs vous allez traiter dans les bassins d’emploi. Accepterez-vous qu’un dialogue s’engage avec les élus pour renforcer l’efficacité du système ?

M. Yves Bur. Pouvez-vous nous expliquer les avantages de la fusion des structures face à la crise ?

Comment envisagez-vous d’appliquer l’obligation faite aux demandeurs d’emploi d’accepter une offre après deux refus ?

Enfin, ne pensez-vous pas que les personnes qui sont aujourd’hui parquées dans les missions locales pourraient, elles aussi, profiter de l’efficacité de Pôle emploi ? Pourquoi a-t-on laissé ce dispositif en dehors de la fusion ?

M. Pierre Morange. Confirmez-vous l’existence de problèmes de compatibilité entre les systèmes d’information et de communication de l’ANPE et ceux des Assédic ? Avez-vous programmé des investissements pour améliorer les échanges de données ? Le cas échéant, quel calendrier avez-vous retenu ?

Je m’interroge par ailleurs sur la philosophie de Pôle emploi. De quelle façon peut-on éviter de sombrer dans l’approche aristocratique qui prévaut trop souvent ? Il me semble que l’éthique républicaine impose que Pôle emploi soit ouvert à tous les types de publics, cadres et non cadres.

Étant un acteur pivot du système, Pôle emploi aura également pour vocation d’impulser les mouvements d’ensemble, notamment afin de promouvoir une flexisécurité à la française. Comment comptez-vous remplir cet objectif ?

M. Christian Charpy. Les évolutions actuelles des services publics de l’emploi en Europe sont assez convergentes. D’abord, partout on s’oriente vers une plus grande proximité entre l’indemnisation et le placement ; cela s’est fait il y a des années en Allemagne, plus récemment en Grande-Bretagne. Ensuite, une relation plus forte s’établit entre le placement et l’insertion, c’est-à-dire entre le service public de l’emploi et les collectivités territoriales en charge de l’insertion ; nous pourrions nous inspirer dans ce domaine des exemples allemand et danois. Mais nous avons, plus que les services étrangers, une bonne expérience dans l’articulation entre ce qui se fait en interne et ce qui est fait par les partenaires extérieurs. On dit souvent que les Britanniques font beaucoup appel aux opérateurs privés de placement ; en réalité ils le font moins que nous, et les Allemands ne le font pas du tout.

En ce qui concerne le RSA, nous souhaitons que Pôle emploi soit dans la même situation que l’ANPE depuis 2005 vis-à-vis des départements : depuis la décentralisation du RMI et de l’accompagnement, l’ANPE a passé des conventions avec 75 départements, qui ont accepté d’assumer la charge financière de personnels. Le conseil général du Rhône, par exemple, prend en charge 50 personnes au sein de Pôle emploi. S’agissant d’un public pour lequel la problématique de retour à l’emploi est plus difficile, et sachant qu’on devrait passer de 350 000 demandeurs d’emploi Rmistes à un nombre de bénéficiaires du « RSA socle » compris entre 600 000 et 800 000, il paraît envisageable de mobiliser des moyens complémentaires de ceux de Pôle emploi. On le fait bien pour les personnes licenciées pour cause économique, avec les conventions de reclassement personnalisées – CRP – et les contrats de transition professionnelle – CTP. Cela étant, je comprends bien que les départements puissent connaître eux aussi des difficultés financières.

Le financement en provenance de l’Unédic a été fixé à 10 % des cotisations. Ma crainte était que leur niveau baisse, ce qui aurait eu des répercussions sur Pôle emploi deux ans plus tard, soit en 2011, mais ce n’est pas le cas. À niveau de cotisations inchangé, la masse salariale continuant, bon an mal an, à augmenter, nous n’avons pas de difficultés à court terme. Pour la CRP et le CTP, l’Unédic va nous apporter un financement en plus.

Si pour 2009 nous n’avons pas de difficultés financières, pour 2010 et 2011 la situation dépendra de l’évolution du chômage.

Quant aux espoirs, on peut en avoir quelques-uns. Alors qu’il y a 25 % de chômeurs en plus, nous avons depuis février-mars rétabli la situation du service. En novembre, avant la fusion, il y avait 100 000 dossiers non traités dans les Assédic ; actuellement, il y en a 50 000 – ce qui correspond à deux jours de traitement. Par ailleurs, alors qu’il y avait auparavant deux entretiens, depuis février il n’y en a qu’un pour les demandeurs d’emploi non indemnisés et à partir de septembre, ce sera le cas pour tous. La formation des personnels, qui concerne ceux qui sont en contact avec les demandeurs d’emploi, soit 22 000 conseillers ex-ANPE et 9000 conseillers ex-Assédic, est en cours et se poursuivra en 2010.

En ce qui concerne l’informatique, les systèmes sont partiellement compatibles – et donc partiellement incompatibles. Le déploiement du poste unique de travail qui permettra d’accéder à l’ensemble des applications se fera à partir de septembre. D’ores et déjà, un conseiller ex-Assédic peut accéder aux principales opérations de placement qui résultent des systèmes ANPE et un conseiller ex-ANPE peut accéder au système d’indemnisation des Assédic.

Concernant les ORE – offres raisonnables d’emploi –, le système défini par la loi est mis en application. Les sanctions sont exceptionnelles ; l’objectif est d’amener les personnes à la reprise d’un emploi durable, non de les forcer à prendre un emploi dont elles ne veulent pas. Au-delà de la polémique, je puis vous assurer que le dispositif fonctionne sans difficultés.

Pour répondre à M. Herbillon, je voudrais revenir sur le climat social. Nous avons eu de grosses difficultés pour consulter les comités d’entreprise sur la fusion. Nous en avons maintenant pour les consulter sur les organigrammes et sur les sites mixtes. En Ile-de-France, nous avons organisé huit réunions du comité d’entreprise transitoire mais elles n’ont abouti à rien, en raison d’un refus de siéger ou d’évoquer les sujets. Je déplore ce blocage. Le « juge de paix » sera soit le tribunal de grande instance de Bobigny, qui doit se prononcer dans les jours prochains, soit les élections professionnelles.

M. Jean Ueberschlag. Je me réjouis que le recouvrement des cotisations d’assurance chômage soit désormais assuré par les Urssaf ; j’espère qu’il en sera de même un jour pour les cotisations de formation professionnelle. En ce qui concerne le transfert à Pôle emploi du « personnel d’orientation » de l’AFPA, c’est-à-dire de 920 psychologues, je m’interroge sur l’efficacité de psychologues pour orienter des demandeurs d’emploi. Ne faudrait-il pas que les services d’orientation comptent davantage de personnes connaissant les métiers ? Par ailleurs, le fait que ce personnel continue à être rémunéré par l’AFPA me semble un peu difficile à accepter mais ne m’étonne pas, les rémunérations versées par l’AFPA étant bien supérieures à celles que versent les GRETA ou l’ANPE. Ne faudrait-il pas songer à harmoniser ces rémunérations ?

Enfin, qu’en est-il des tentatives de rapprochement contractuel dont M. Michel Bernard, pour l’ANPE, et M. Gilbert Hyvernat, pour l’AFPA, avaient pris l’initiative ? Il y a eu beaucoup de contrats de collaboration mais nous n’en avons pas eu de bilan.

Mme Monique Iborra. Les exigences posées par la loi du 13 février 2008 nous faisaient prévoir que sa mise en application serait longue et difficile. Pour notre part, nous avons voté contre ce texte, qui procédait d’une démarche technocratique et centralisatrice. Nous savions bien que les ambitions affichées ne correspondaient pas à la réalité du terrain.

Pôle emploi a désormais en charge l’ensemble des formations, non pas seulement pour les personnes prises en charge par les Assédic, mais pour tous les demandeurs d’emploi. En dépit des compétences des régions en matière de formation professionnelle, aucune concertation n’a eu lieu avec elles en amont. Il en résulte aujourd’hui une grande confusion. Certaines régions veulent passer des conventions avec vos agents, afin de savoir qui fait quoi – sauf à admettre le gaspillage d’argent public. Or ces agents sont dans l’incapacité de nous dire quelles formations ils vont prendre en charge. Par ailleurs, ils nous indiquent que l’enveloppe affectée aux formations par Pôle emploi est identique à celle qui était auparavant utilisée pour les personnes relevant des Assédic ; il y a donc un problème de financement.

Concernant les effectifs, le Président de la République a annoncé des recrutements. Où en est-on ?

M. Jean-Frédéric Poisson. Au cours du débat sur la création de Pôle emploi, Dominique Tian et moi-même avions appelé l’attention de Mme Lagarde sur la différence de culture des deux institutions dont on organisait le rapprochement. J’avais donc émis le souhait que soit menée une action déterminée pour accompagner le changement. Qu’en est-il ?

M. Régis Juanico. J’aimerais avoir quelques indications chiffrées. Combien de demandeurs d’emploi Pôle emploi reçoit-il en un mois ? Quel est le nombre de conseillers qui sont en position de réception de ces demandeurs ? De combien de demi-journées de réception ces conseillers disposent-ils par semaine, eu égard à leurs autres activités – plateforme téléphonique notamment ? Il semble qu’ils ne peuvent consacrer que deux demi-journées à la réception des demandeurs, alors qu’il en faudrait cinq ou six pour qu’ils puissent les recevoir correctement.

Par ailleurs, comment concevez-vous l’avenir des instances paritaires régionales ? Quel rôle comptez-vous donner aux partenaires sociaux, notamment dans le suivi de l’application de la convention d’assurance chômage ? Comptez-vous préserver les commissions paritaires locales, chargées d’examiner les recours des demandeurs d’emploi ?

M. Jacques Domergue. Je commencerai par des félicitations car je viens de tester le 3949 avec mon téléphone : au bout de trois minutes, j’avais un conseiller au bout du fil.

En revanche, j’émets des doutes sur l’objectif que vous avez fixé qu’un conseiller prenne en charge 60 demandeurs d’emploi. En effet, avec 45000 salariés et 2 500 000 chômeurs, on arrive au ratio de un salarié pour 55 ; passer au ratio de un pour 60 ne laisse qu’une faible marge pour le personnel administratif, dont je doute qu’il soit aussi peu nombreux. Enfin, je voudrais faire une suggestion : ne faudrait-il pas, en s’inspirant de ce qui se fait pour le personnel commercial dans les entreprises, rémunérer les conseillers de Pôle emploi sur une base salariale fixe, à laquelle s’ajouterait une partie variable, fonction non pas du nombre de dossiers ouverts, mais du nombre de solutions trouvées ?

Mme Monique Iborra. Il ne manquerait plus que cela !

M. le président Pierre Méhaignerie. Je rappelle que Marie-Christine Dalloz, à qui je passe maintenant la parole, est l’auteur du rapport sur les maisons de l’emploi.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je voudrais tout d’abord féliciter Dominique Tian pour son travail. Son document pose les bonnes questions.

Madame Iborra, ce n’est pas parce que c’est difficile qu’il faut renoncer. Je suis très fière d’avoir voté cette fusion, mais il faut nécessairement du temps pour que le nouveau dispositif soit pleinement efficace. On constate d’ores et déjà plutôt une amélioration qu’une dégradation du service.

Monsieur le directeur général, vous avez parlé de co-traitance avec les missions locales. Je souhaite beaucoup que cela puisse se faire également avec les maisons de l’emploi. Cela suppose, et c’est une clarification qui sera nécessaire, que celles-ci ne s’occupent pas d’accueil public des demandeurs et d’accompagnement, mais d’ingénierie, de conseil, de stratégies à mettre en œuvre en partenariat avec Pôle emploi, en utilisant leur connaissance des spécificités de chaque territoire.

S’agissant du nombre de demandeurs d’emploi par conseiller, il me semble qu’il faudrait une approche spécifique pour ceux des bassins d’emploi appelés à une reconversion, qui nécessiteraient un accompagnement plus individualisé, et donc un ratio amélioré.

M. Gérard Cherpion. Le Président de la République a annoncé récemment l’élargissement des contrats de transition professionnelle à de nouveaux bassins. Il en existe deux types, les anciens, expérimentaux, pilotés par Transition CTP, filiale de l’AFPA, et les nouveaux, qui relèvent totalement de votre responsabilité. Concernant les premiers, il existe encore des problèmes de « bascule » des dossiers, qui conduisent à quelques retards. Par ailleurs, se pose le problème de la rémunération des bénéficiaires du dispositif. Tant que nous étions en phase expérimentale, la rémunération se faisait manuellement ; maintenant que le dispositif prend de l’ampleur, la charge du personnel s’accroît et les bénéficiaires constatent des retards. Où en est-on dans ce domaine ?

M. Christian Charpy. S’agissant du recouvrement, la difficulté était de convaincre les partenaires sociaux de l’Unédic de faire le transfert le plus tôt possible. Nous nous sommes mis d’accord sur le 1er janvier 2011.

En ce qui concerne les personnels de l’AFPA, il s’agit de psychologues du travail, qui ont donc compétence pour vérifier l’adéquation entre les capacités du demandeur d’emploi, les formations et les emplois. La collaboration de l’ANPE avec l’AFPA s’était notablement améliorée ces dernières années, notamment sur le « service intégré » – consistant à envoyer des demandeurs d’emploi à l’AFPA pour qu’ils soient orientés. L’AFPA est un organisme de formation comme un autre, que nous pouvions mettre en concurrence, et un organisme d’évaluation des compétences professionnelles. Une partie de ses activités sera donc désormais intégrée dans Pôle emploi, et pour le reste elle demeurera prestataire de services, avec mise en concurrence.

Madame Iborra, j’ai donné instruction aux directeurs régionaux de prolonger l’ensemble des conventions passées avec les conseils régionaux en matière de formation. Il reste trois problèmes à régler. Tout d’abord, il me paraît impératif qu’au niveau régional s’organise une conférence des financeurs, afin d’effectuer le partage des responsabilités et d’éviter, en effet, toute superposition. Ensuite, Pôle emploi doit définir sa politique de formation à moyen terme car, contrairement aux Assédic, il ne se limite pas à la formation dans les métiers en tension ; un conseil d’administration va être consacré à ce sujet début juin. Enfin, nous devons passer les marchés de formation indispensables avec des prestataires ; un accord cadre sera prochainement publié.

M. le président Pierre Méhaignerie. Quel sera le montant de ces marchés ?

M. Christian Charpy. Nous dépenserons environ 300 millions chaque année.

En ce qui concerne les recrutements, il faut ajouter aux 1840 emplois nouveaux prévus les emplois vacants à pourvoir. Nous ne pouvions pas recruter tant que nous n’avions pas établi le mode de passage de la grille Assédic à la grille Pôle emploi. Nous faisons des recrutements au fil de l’eau, en mettant en place un portail de recrutement, avec la particularité que tous nos recrutements se feront sur CV anonyme. Près de 2500 personnes vont être recrutées en mai et juin.

Monsieur Poisson, vous avez raison, les cultures d’origine sont différentes. J’ai tenu essentiellement à ce que l’on ne donne pas le sentiment qu’une maison mangeait l’autre, à plus forte raison parce que j’avais été directeur général de l’ANPE. J’ai donc veillé à assurer la parité dans les nominations aux postes de responsabilité. Il reste, c’est certain, des problèmes culturels à régler. Par exemple, la notion d’autonomie du conseiller ou du directeur d’agence faisait davantage partie de la culture de l’ANPE que de celle des Assédic, qui avaient à mettre en œuvre une convention d’assurance chômage qui ne permettait pas des ajustements locaux. En revanche, les notions de qualité et de maîtrise des risques étaient peut-être plus développées du côté des Assédic. Nous mettons donc en place à la fois les outils de management d’un établissement multiculturel et, au niveau local, des groupes de travail pour que les uns et les autres puissent acquérir le meilleur de la culture de l’autre. Les choses avancent, donc, et désormais les gens travaillent ensemble sans se poser la question de l’établissement d’origine de chacun.

La mise en place des instances paritaires régionales – IPR – relève surtout des partenaires sociaux. Syndicats d’un côté, organismes patronaux de l’autre doivent se mettre d’accord au plus vite sur les nominations. Les IPR reprendront l’ensemble des compétences des commissions paritaires. Sans doute faudra-t-il, dans les grandes régions, créer des subdivisions car il y avait chaque année 130 000 saisines des anciennes commissions paritaires des Assédic.

Monsieur Domergue, je suis heureux que le 3949 fonctionne ! Quant au ratio de un pour 60, la convention tripartite signée par l’État, l’Unédic et Pôle emploi prévoit de l’atteindre dans un premier temps pour les publics des parcours d’accompagnement lourd.

Madame Dalloz, dans les bassins d’emploi en reconversion, la CRP – convention de reclassement personnalisée – et le CTP – contrat de transition professionnelle – permettent de ramener de 1 pour 90 ou 100 à 1 pour 50 pour la CRP et 1 pour 30 pour le CTP le niveau d’accompagnement. Nous avons les moyens financiers de le faire, à la fois par les budgets complémentaires qui ont été donnés à Pôle emploi, mais aussi par la contribution apportée par l’Unédic.

S’agissant des chiffres, environ 20 000 conseillers reçoivent des demandeurs d’emploi, et ils en reçoivent environ deux millions chaque mois. Cela veut dire que, pendant chaque heure d’ouverture des locaux de Pôle emploi, sur l’ensemble du territoire, 10 000 personnes sont reçues. La règle que nous avions fixée à l’ANPE était que les conseillers qui recevaient des demandeurs d’emploi devaient y consacrer trois à quatre demi-journées, de façon à avoir du temps pour traiter les offres et aller en entreprise. Au cours des dernières semaines, il est possible qu’à Pôle emploi on soit passé de trois à quatre demi-journées en moyenne. Il n’y a pas de problème pour les plateformes téléphoniques, 80 % des appels concernant l’indemnisation.

Concernant la stratégie des maisons de l’emploi, l’objectif doit être la complémentarité. Comme vous, madame la députée, je ne pense pas que les maisons de l’emploi doivent se lancer systématiquement dans l’accompagnement des demandeurs d’emploi car c’est plutôt le rôle de Pôle emploi, avec les partenaires que sont pour lui les missions locales, les plans locaux pour l’insertion et l’emploi (PLIE), l’Apec et Cap emploi. En revanche, elles doivent jouer un rôle de coordination des interventions, d’analyse en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et de relation avec les entreprises. La situation est différente lorsque la maison de l’emploi a incorporé en son sein le PLIE ou la mission locale ; dans les autres cas, il n’y a pas lieu de doublonner les effectifs.

Concernant la rémunération CTP, nous allons automatiser le dispositif dans les prochaines semaines.

M. Jean-Marie Rolland. Dans mon département, on observe un certain retard dans l’ouverture des droits à l’indemnisation du chômage, ce qui entraîne notamment une augmentation des demandes de secours financier auprès des services sociaux. Il conviendrait, monsieur le directeur général, de remédier à cette situation.

Par ailleurs, puisque le RSA va entrer en vigueur le 1er juin, j’aimerais vous entendre sur votre politique en matière d’insertion par l’activité économique ainsi que sur l’accompagnement, spécifique ou non, des personnes concernées. Quelles propositions allez-vous faire aux départements ? Quel sera votre calendrier ?

Mme Françoise de Panafieu. Les emplois étant créés par les entreprises, comment envisagez-vous les relations de Pôle emploi avec elles, en matière de formation, dans le traitement du chômage partiel et pour préparer la sortie de crise ?

Mme Valérie Rosso-Debord. Ma question concerne également le RSA. Certaines personnes qui pourraient y prétendre ne sont pas aujourd’hui bénéficiaires du RMI mais relèvent de vos services, en ayant une activité à temps partiel. Envisagez-vous, dans le cadre de la future convention, de prévoir l’instruction du dossier de ces demandeurs dans vos locaux ?

M. Michel Issindou. À situation économique exceptionnelle, moyens exceptionnels : il serait, me semble-t-il, de votre devoir de demander à votre ministre de tutelle de renforcer les moyens de Pôle emploi. Ne pourrait-on, pendant un temps, sortir du dogme de la suppression d’un poste de fonctionnaire sur deux et procéder à un redéploiement vers la structure que vous dirigez ?

M. le président Pierre Méhaignerie. Je prolonge la question : certaines agences d’intérim qui faisaient un excellent travail sont aujourd’hui sous-utilisées. N’y a-t-il pas des liens à créer pour employer le potentiel d’hommes et de femmes qui risquent d’être conduits au licenciement ?

M. Alain Marc. Dans les départements à faible densité, des publics particulièrement fragiles sont éloignés des bureaux de Pôle emploi. Allez-vous donner des consignes à vos directeurs régionaux pour qu’ils laissent suffisamment d’autonomie aux pôles locaux, afin que des conseillers puissent aller vers ces demandeurs ?

M. Patrice Verchère. Afin de veiller à la réalisation des objectifs fixés, je crois savoir qu’un tableau de bord comportant une vingtaine d’indicateurs devait être mis en place. Concernant le baromètre de satisfaction des demandeurs d’emploi et des entreprises, disposez-vous de résultats ?

M. Christophe Sirugue. En ce qui concerne le RSA, que prévoyez-vous pour répondre à l’afflux attendu des demandes ? Alors que le RMI concernait 300 000 personnes, le RSA en concernera 800 000 ; comment les conseils généraux pourront-ils faire ? Pourquoi assumeraient-ils la charge financière de ceux qui, dans le cadre de la loi RSA, ont été ciblés pour être pris en charge par Pôle emploi, alors que Pôle emploi va financer le privé pour prendre en charge les demandeurs d’emploi ?

M. Vincent Descœur. Les bénéficiaires potentiels du RSA vont devoir être identifiés par un référent de Pôle emploi, qui devra les accompagner. Au-delà du problème des moyens dont vous disposerez pour faire face à l’affluence et à la fragilité des bénéficiaires, pourriez-vous apporter des précisions sur la nature de la relation qui s’instaurera avec le conseil général et sur la manière dont vous envisagez la participation de Pôle emploi aux équipes pluridisciplinaires que nous sommes en train de mettre en place ?

M. Guy Malherbe. Ma commune fait partie, avec dix autres communes, d’une communauté d’agglomération mais ses habitants doivent néanmoins se rendre au pôle emploi situé dans l’intercommunalité voisine. Peut-on envisager un redécoupage afin d’harmoniser les circonscriptions de Pôle emploi avec les intercommunalités ?

M. Christian Charpy. De fait, la mise en place du RSA aurait été plus facile à gérer pour nous il y a un an mais bien sûr, nous ferons le nécessaire. En ce qui concerne l’instruction, il serait logique que nous nous chargions de l’ouverture du dossier d’une personne arrivant en fin d’indemnisation par l’ARE – allocation de recherche d’emploi. Je préfère que Pôle emploi fasse des ouvertures en second niveau plutôt qu’en premier niveau, même si à ce stade il donne tous les renseignements.

J’ai indiqué très clairement dans le projet d’accord avec l’Association des départements de France que nous serions présents dans tous les dispositifs d’orientation, bien sûr à titre gratuit, et que si les conseils généraux mettaient en place des plateformes, nous y participerions. J’espère que nous pourrons prochainement finaliser cet accord, ayant pu constater que celui qui avait été signé il y a quelques années à propos du RMI avait permis de débloquer nombre de situations.

Il reste que, même s’il faut s’attendre à un afflux considérable de demandeurs, je ne dispose pas de moyens complémentaires. Nous devrons faire face avec les effectifs globaux de Pôle emploi. J’ai indiqué par ailleurs que nous étions en mesure de redéployer environ 10 % des effectifs vers les services directs aux demandeurs d’emploi.

En ce qui concerne les relations avec les entreprises, bien évidemment essentielles, nous mettons en place, au-delà des visites d’entreprise classiques telles que les pratiquait l’ANPE, des plateformes de prospection, en nous appuyant sur l’enquête des besoins en main-d’œuvre que faisait auparavant l’Unédic, sur les déclarations uniques d’embauche et sur les nouveaux dispositifs d’exonération de charges. Les grandes entreprises sont concernées aussi bien que les PME ; j’ai signé il y a quelques jours un accord avec le groupe Carrefour, qui nous confie chaque année 22 000 recrutements.

Nous ne sommes pas directement en charge du chômage partiel. En revanche, je suis très attentif aux situations de pérennisation du chômage partiel, qui peut aboutir au chômage total. Il faut donc que nous puissions avoir des relations étroites avec les DDTEFP – directions départementales du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle –, qui gèrent le chômage partiel, pour pouvoir anticiper les besoins.

La suppression d’un poste de fonctionnaire sur deux ne s’applique pas à Pôle emploi, dont le Gouvernement s’était engagé à maintenir tous les emplois ; c’est inscrit dans la convention tripartite. Par ailleurs, un renforcement à hauteur de 400 ETP a été prévu dans le budget 2009 pour remplacer les personnels qui partent en formation. Nous avons également anticipé, à hauteur de 300 à 400 ETP, les remplacements des personnes partant à la retraite. Si la situation est trop difficile, nous nous tournerons vers le Gouvernement, mais avec la sous-traitance, la co-traitance et les renforts d’effectifs, auxquels il faut ajouter les redéploiements que nous devons opérer au sein de Pôle emploi, nous devrions parvenir à faire face.

Les agences d’intérim seront en effet des acteurs essentiels sur le marché d’accompagnement que nous allons ouvrir.

Il est encore un peu tôt pour disposer de résultats du tableau de bord. En revanche, nous avons testé la satisfaction des demandeurs d’emploi : ils sont beaucoup plus satisfaits lorsqu’il y a un site mixte que lorsqu’ils doivent se rendre dans deux sites séparés.

Je souhaite mettre en place des agences spécialisées pour certains publics, notamment les cadres. Elles devront compléter les agences tous publics de Pôle emploi. Ces agences doivent également s’articuler avec les PLIE, les missions locales. Dans ces conditions, un redécoupage des territoires est difficile. En Ile-de-France, nous avons eu beaucoup de mal à le faire à partir des fichiers de l’ex-Assédic et l’ex-ANPE. Je compte envoyer à l’ensemble des maires et des présidents de conseil général un document précisant quels sont leurs interlocuteurs, et je demanderai à chaque directeur régional d’aller expliquer le fonctionnement de Pôle emploi et la recomposition du réseau.

M. Dominique Tian. Je souhaite remercier tout particulièrement M. Christian Charpy et le féliciter à titre personnel. Cette audition a duré plus de deux heures, ce qui atteste l’intérêt qu’elle a suscité, et le débat a été d’une très grande qualité, s’agissant tant des questions posées que des réponses.

M. le président Pierre Méhaignerie. Il y a un immense besoin d’information, notamment dans les bassins industriels où l’on constate certaines confusions. On ne peut pas aimer ce que l’on ne comprend pas. Les autorités régionales ou départementales ont-elles la capacité de mettre des agents opérationnels à la disposition des maisons de l’emploi ?

M. Christian Charpy. Cela se fera d’autant mieux que nous aurons mis en place les conventions de partenariat.

M. Yves Albarello. A Toul, où l’usine de Kleber a fermé l’année dernière, laissant 826 salariés sans emploi, un dispositif remarquable et très efficace a été mis en place sur le site lui-même. Cette immersion du personnel de Pôle emploi dans les lieux sinistrés est un exemple à suivre.

M. le président Pierre Méhaignerie. En ce qui concerne le chômage partiel, le Gouvernement a fait en matière de financement un effort non négligeable dans les derniers mois.

Monsieur le directeur général, merci beaucoup.

II.- EXAMEN DU RAPPORT D’INFORMATION

La Commission des affaires culturelles, familiales et sociales procède à l’examen du rapport d’information de M. Dominique Tian sur la mise en application de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi, au cours de sa séance du mercredi
6 mai 2009.

La Commission autorise le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

ANNEXE

TABLEAU DE SUIVI DE L’APPLICATION DE LA LOI N° 2008-126
DU 13 FÉVRIER 2008 RELATIVE À LA RÉFORME DE L’ORGANISATION DU SERVICE PUBLIC DE L’EMPLOI

Articles de la loi

Base légale
(dispositions insérées
ou modifiées par la loi)

Textes d’application

Article 1er
(et article 16)

Code du travail, art. L. 311-1-1 et L. 311-1-2 (devenus art. L. 5112-1, L. 5112-2 et L. 5312-3)

Décret n° 2008-1010 du 29 septembre 2008

Article 2
(et article 16)

Code du travail, art. L. 311-7 à L. 311-7-6 et L. 311-7-8 à L. 311-7-12 (devenus art. L. 5312-1, L. 5312-2, L. 5312-4 à L. 5312-8 et L. 5312-10 à L. 5312-14)

Décret n° 2008-1010 du 29 septembre 2008

Décret n° 2008-1056 du 13 octobre 2008

Décret n° 2009-270 du
9 mars 2009

 

Code du travail, art. L. 311-7-7 (devenu art. L. 5312-9)

Décret n° 2008-1435 du 22 décembre 2008

Décret n° 2009-241 du
2 mars 2009

Décret non publié

 

Code du travail, art. L. 351-18 (devenu art. L. 5426-1 et art. L. 5426-9)

Décret non publié

Article 4
(et article 16)

Code du travail, art. L. 351-21 et L. 351-22 (devenus art. L. 5427-1 à L. 5427-5 et L. 5427-7)

Décret n° 2008-1010 du 29 septembre 2008

Décret non publié

Article 5
(et article 17)

Code du travail, art. L. 143-11-4, L. 143-11-6, L. 351-5-1, L. 351-6, L. 351-8, L. 351-12 et L. 620-9 (devenus art. L. 3253-14, L. 3253-18, L. 5422-16, L. 5422-17 à L. 5422-19, L. 5422-20, L. 5424-5 et L. 7122-27) 

Code de la sécurité sociale, art. L. 114-12, L. 142-1, L. 142-2, L. 213-1 et L. 243-7

 

Article 6

Dispositions non codifiées

Arrêté du 24 avril 2008

Décret du 9 mai 2008

Article 15

(et article 16)

Code du travail, art. L. 322-2 (devenu art. L. 5112-1)

Décret n° 2008-1010 du 29 septembre 2008

1 () Dans son allocution à l’occasion du 40e anniversaire de l’Association des journalistes de l’information sociale (AJIS) le mardi 18 septembre 2007.

2 () À savoir : les indemnités de préavis, le montant de l’allocation de formation correspondant aux droits acquis au titre du droit individuel à la formation (DIF) et les contributions dues en cas de non-proposition d’un CTP.

3 () Pour l’autre part, les dispositions d’application réglementaires figurent dans le décret n° 2008-1010 du 29 septembre 2008 relatif à l’organisation du service public de l’emploi (voir infra).

4 () Arrêté du 24 avril 2008 portant nomination au conseil de l’instance nationale provisoire mentionnée à l’article 6 de la loi no 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi.

5 () Décret du 9 mai 2008 portant nomination du délégué général de l’instance nationale provisoire mentionnée à l’article 6 de la loi no 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi.

6 () Premières informations et premières synthèses, direction de l’animation, de la recherche et des études statistiques du ministère du travail, avril 2009, n° 18.1.

7 () Ce comité de suivi est composé de trois représentants de l’État désignés par le ministre chargé de l’emploi, le directeur général et deux représentants du conseil d’administration de l’Unédic, le président du conseil d’administration et le directeur général de Pôle emploi.

8 () Ce texte est notamment disponible sur le site internet du Premier ministre : http://www.premier-ministre.gouv.fr/chantiers/travail/poleemploi.

9 () Soit d’une part 1400 ETP par l’accroissement de 79,5 % à 83 % des effectifs totaux de la part des effectifs dédiés à la production de service ; et d’autre part 3200 ETP par l’optimisation du réseau et des processus opérationnels (y compris la suppression des entretiens redondants pour l’inscription et le suivi des demandeurs d’emploi).

10 () Cette mission a conclu ses travaux par la publication du rapport d’information (n° 952) sur les maisons de l’emploi présenté par Mme Marie-Christine Dalloz.

11 () Élaborées par le secrétariat général du Conseil, ces propositions figurent dans un rapport intitulé « Une nouvelle coopération entre les missions locales et Pôle emploi », qui s’appuie sur la consultation d’une cinquantaine de personnes lancée par le CNML en juin 2008 et sur l’évaluation des trois dernières années de partenariat renforcé entre l’ANPE et les missions locales.


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