N° 4125 annexe 39 - Rapport de M. Alain Chrétien sur le projet de loi de finances pour 2017 (n°4061).



N
° 4125

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 octobre 2016.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2017 (n°4061),

PAR M. Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

——

ANNEXE N° 39

RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE

PENSIONS

Rapporteur spécial : M. Alain CHRÉTIEN

Député

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SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE. – LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE PENSIONS 8

I. LE POIDS CROISSANT DES DÉPENSES DE PENSIONS DANS LE BUDGET DE L’ÉTAT 9

II. UN SOLDE CUMULÉ À SON PLUS HAUT NIVEAU DEPUIS SA CRÉATION 13

III. LE FINANCEMENT DES PENSIONS CIVILES ET MILITAIRES DE RETRAITE 14

A. LES DÉPENSES DE PENSIONS CONTINUENT À PROGRESSER 15

1. Les revalorisations 17

2. Les pensions des entrants et sortants 17

B. DES RECETTES EN HAUSSE DE 3,8 % 19

1. L’augmentation des taux de cotisations salariales se poursuit 19

2. Un taux de contribution employeur maintenu à un niveau élevé 20

C. LES RÉFORMES INTERVENUES DEPUIS 2010 AMÉLIORERAIENT LA SITUATION DU RÉGIME DE 3 MILLIARDS D’EUROS EN 2017 21

D. L’IMPACT DE LA REVALORISATION DU POINT D’INDICE ET DE L’ACCORD SUR LA MODERNISATION DES PARCOURS PROFESSIONNELS, DES CARRIÈRES ET DES RÉMUNÉRATIONS 23

1. La revalorisation du point d’indice améliore les recettes à court terme, mais accroît les dépenses à moyen terme 23

2. Les effets de l’accord sur la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations sur le CAS Pensions et sur le RAFP sont difficiles à évaluer 24

E. UNE MODERNISATION DE LA GESTION DES RETRAITES DES FONCTIONNAIRES À ACCÉLÉRER 26

F. SANS RÉFORME, LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DU RÉGIME À LONG TERME VONT IMPOSER LE MAINTIEN D’UNE CONTRIBUTION DE L’ÉTAT ÉLEVÉE 29

1. Des engagements de retraite estimés à 1 535 milliards d’euros fin 2015 29

2. Un besoin de financement actualisé négatif en 2050, avec le maintien de taux de cotisations employeurs élevés 30

IV. LES PENSIONS DES OUVRIERS DES ÉTABLISSEMENTS INDUSTRIELS DE L’ÉTAT 31

V. LES SUBVENTIONS D’ÉQUILIBRE POUR LES PENSIONS MILITAIRES D’INVALIDITÉ ET DES VICTIMES DE LA GUERRE ET AUTRES PENSIONS 33

DEUXIÈME PARTIE. – LA MISSION RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE 34

I. UNE BAISSE DES CRÉDITS UNIQUEMENT DUE AUX MOINDRES DÉPENSES DES RÉGIMES FERMÉS 35

II. DES RÉGIMES EN FORT DÉSÉQUILIBRE DÉMOGRAPHIQUE, FINANCÉS AUX DEUX TIERS PAR LE BUDGET DE L’ÉTAT 38

A. DES RATIOS DÉMOGRAPHIQUES DÉGRADÉS 38

B. LA SUBVENTION DE L’ÉTAT COUVRE PLUS DES DEUX TIERS DES PRESTATIONS DE CES RÉGIMES 39

C. DES RÉFORMES PROGRESSIVES, AUX EFFETS ENCORE LIMITÉS 40

1. Une montée en charge progressive et décalée des réformes des retraites 40

2. L’âge moyen de départ à la retraite augmente progressivement 44

3. Les effets des réformes des régimes spéciaux sont insuffisamment documentés 44

III. LES PERSPECTIVES DÉMOGRAPHIQUES ET FINANCIÈRES DES RÉGIMES DES TRANSPORTS TERRESTRES 46

A. LE RATIO DÉMOGRAPHIQUE DE LA CRP RATP DEVRAIT SE DÉTÉRIORER JUSQU’EN 2020, PUIS ÉVOLUER DE MANIÈRE IRRÉGULIÈRE 46

B. UNE AMÉLIORATION PROGRESSIVE DE L’ÉQUILIBRE DÉMOGRAPHIQUE DU RÉGIME DE LA SNCF 47

C. LE BESOIN DE FINANCEMENT ACTUALISÉ DES RÉGIMES SPÉCIAUX 48

TROISIÈME PARTIE. – VERS UN RÉGIME UNIVERSEL « FRANCE RETRAITES » ? 50

I. LA LÉGITIMITÉ DE LA DICHOTOMIE PUBLIC-PRIVÉ 50

A. LA LIMITATION DU STATUT PUBLIC AUX FONCTIONS RÉGALIENNES 50

B. LA NÉCESSITÉ DE FAIRE PARTAGER UNE VISION GLOBALE ET POSITIVE DE LA RÉFORME 50

1. Assurer l’égalité des français face à la retraite 50

2. Affecter les gains de la réforme à la croissance 53

3. Appréhender les métiers et non les statuts 54

4. Reconnaître la pénibilité de manière plus simple dans le public comme dans le privé 54

II. METTRE FIN AUX RÉGIMES SPÉCIAUX ; OUI MAIS LESQUELS ? 55

A. LA RATP ET LA SNCF NE SONT QUE DEUX RÉGIMES PARMI 37 CAISSES DIFFÉRENTES 55

1. Des subventions d’équilibre financées par le contribuable qui paie deux fois 55

2. Mettre fin à l’éparpillement des caisses 55

B. UNE QUESTION DE MÉTHODE : APPLIQUER AUX ÉLUS LES EFFORTS DEMANDÉS AUX FRANÇAIS : LA SUPPRESSION DU RÉGIME SPÉCIAL DE RETRAITE DES PARLEMENTAIRES. 56

EXAMEN EN COMMISSION 59

ANNEXE : PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 61

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 10 octobre 2016, 100 % des réponses étaient parvenues à la commission des finances.

INTRODUCTION

En 2017, 63,9 milliards d’euros seront consacrés au financement des dépenses du compte d’affectation spécial Pensions et de la mission Régimes sociaux et de retraite, ce qui représente près de 15 % des dépenses du budget général.

Sur ces 63,9 milliards d’euros, 57,65 milliards d’euros sont destinés aux dépenses du CAS Pensions, pour le paiement des pensions des fonctionnaires civils, des militaires et des ouvriers des établissements industriels de l’État. Les engagements de retraite sont aujourd’hui estimés à 73 % du produit intérieur brut.

Les dépenses de la mission Régimes sociaux et de retraite s’élèveront pour leur part à 6,25 milliards d’euros. Elles servent à subventionner des régimes spéciaux de retraite, dont certains sont « ouverts » et d’autres « fermés », c’est-à-dire qu’ils ne reçoivent plus de nouveaux cotisants et sont destinés, à terme, à s’éteindre.

Les prévisions pour 2017 s’inscrivent dans la tendance observée les deux années précédentes d’une légère diminution des dépenses de la mission Régimes sociaux et de retraite et d’un ralentissement de l’augmentation des dépenses du CAS Pensions. Ces évolutions résultent de facteurs structurels (montée en charge des réformes visant à faire en partie converger ces régimes vers le régime général et diminution des effectifs de pensionnés des régimes « fermés »), mais aussi de facteurs conjoncturels. La modération de l’inflation se traduit en effet par une faible revalorisation des pensions.

Compte tenu des évolutions prévisibles de l’équilibre démographique du régime de la fonction publique de l’État – dont le ratio démographique est désormais inférieur à 1 –, et des régimes spéciaux « ouverts », le financement de ces régimes continuera à peser lourdement sur le budget de l’État dans les prochaines années.

Les différences de règles entre les régimes posent en outre un problème d’équité entre nos concitoyens. Il ne s’agit pas pour le Rapporteur spécial de considérer que telle ou telle catégorie de la population bénéficierait de privilèges indus, mais de constater que les différences héritées du passé ne sont plus justifiées et plus comprises par la population.

Pour ces deux raisons, il proposera, au-delà de l’analyse des crédits de la mission et du compte d’affectation spéciale, des pistes pour rendre notre système plus équitable et alléger le poids des pensions de retraite sur le budget de l’État.

PREMIÈRE PARTIE. – LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE PENSIONS

Conformément à l’article 21 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) et à l’article 51 de la loi de finances pour 2006, le compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions retrace, en recettes et en dépenses, les opérations relatives aux pensions civiles et militaires de retraite et d’invalidité des agents de l’État. Il est structuré en trois programmes, représentant chacun une section du compte spécial. Cette structuration ne fait pas l’objet de modification dans le projet de loi de finances pour 2017 :

– le programme 741 Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité (53,8 milliards d’euros de dépenses pour 2017) retrace les opérations relatives aux régimes de retraite et d’invalidité des fonctionnaires civils et militaires de l’État. Il est financé par les retenues pour pension supportées par les fonctionnaires et par les contributions des employeurs (État, Orange, La Poste et organismes employant des fonctionnaires affiliés au régime des pensions civiles et militaires de retraite de l’État) ;

– le programme 742 Ouvriers des établissements industriels de l’État (1,9 milliard d’euros de dépenses pour 2017) retrace les dépenses et recettes du Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État (FSPOEIE) et du fonds gérant les rentes d’accident du travail des ouvriers civils des établissements militaires (RATOCEM). Il est financé par les retenues pour pension à la charge des ouvriers, les contributions des établissements employeurs et une subvention d’équilibre ;

– enfin, le programme 743 Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions (1,9 milliard d’euros de dépenses pour 2017) retrace les dépenses et recettes consacrées aux pensions versées au titre du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, ainsi qu’à d’autres prestations financées par l’État au titre d’engagements historiques et de reconnaissance de la Nation. Ce programme n’obéit pas à une logique contributive, mais repose sur la solidarité nationale. Il est entièrement financé par des subventions d’équilibre.

Comme le montre le graphique suivant, la répartition des dépenses du CAS Pensions entre les programmes est très inégale, le programme 741 Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité, qui finançait les retraites de 2,37 millions de pensionnés (dont 1,9 million de droit direct) au 31 décembre 2014, en absorbant logiquement la plus grande partie.

RÉPARTITION DES DÉPENSES DU CAS PENSIONS POUR 2017

(en milliards d’euros courants)

Source : rapports annuels de performances du compte d’affectation spéciale Pensions.

Depuis 1990, les dépenses de pensions des fonctionnaires civils et militaires de l’État (programme 741) ont augmenté à un rythme de 4,3 % par an, nettement plus élevé que celui de l’inflation, et soutenu principalement par l’augmentation de la pension moyenne (+ 2,5 % par an). Le montant total des prestations versées à ce titre est passé de 18 milliards d’euros en 1990 à 51,4 milliards d’euros en 2015.

L’autre paramètre qui a contribué à l’augmentation des dépenses de pensions est la croissance des effectifs de pensionnés (+ 1,7 % par an). Après avoir accéléré entre 1990 et 2004, la croissance de cette population s’est stabilisée autour de + 2 % par an, puis a nettement ralenti depuis 2012, avec deux années de faibles départs en retraite en 2012 et 2013 dus à la réforme des retraites de 2010.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE PENSIONS DE LA FONCTION PUBLIQUE D’ÉTAT

(base 100 en 1990)

Source : projet annuel de performances du compte d’affectation spéciale Pensions pour 2017.

L’État étant le principal financeur du régime de retraite des fonctionnaires de l’État – en 2015, il a pris à sa charge 75 % des dépenses de ce régime –, la part du budget de l’État consacrée à la charge des pensions civiles et militaires de retraite est tendanciellement en hausse sensible.

Entre 2006, date de la création du CAS Pensions, et 2015, la croissance moyenne des dépenses de pensions (+ 3,5 %) a été trois fois supérieure à celle du budget général dans son intégralité (+ 1,1 %). Le rapport entre les contributions de l’État-employeur et les dépenses du budget général est passé, pendant la même période de 11,3 % à 13,3 %. Sur la même période, 32 % de la progression des dépenses du budget général est dû à l’accroissement du besoin de financement des pensions des fonctionnaires de l’État .Cette dynamique exerce une contrainte forte sur le budget de l’État, puisqu’elle conduit, en l’absence d’économies sur les autres dépenses, à une aggravation de la dette publique.

PART DES PENSIONS DES FONCTIONNAIRES ET DES OUVRIERS D’ÉTAT
DANS LE BUDGET GÉNÉRAL DE L’ÉTAT

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique annexé au projet de loi de finances pour 2016.

L’augmentation est quasiment continue entre 1990 et 2014, la baisse du ratio observée en 2009 et 2010 étant due à une forte augmentation des dépenses du budget général de l’État (dénominateur), et non à une baisse des dépenses de pensions (numérateur).

Si les dépenses de pensions continuent à augmenter, on observe toutefois depuis quelques années un léger ralentissement de leur rythme de progression, du fait de la faiblesse de l’inflation, qui limite les effets de la revalorisation des pensions, et du ralentissement du nombre de départs en retraite après la réforme des retraites de 2010. Ainsi, après avoir augmenté de 4,7 % en 2011, elles ont augmenté de 3,8 % en 2012, 2,7 % en 2013, 1,5 % en 2014 et 1,1 % en 2015. Malgré cette décélération, le poids de ces dépenses au sein du budget de l’État continue à croître.

● Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2017 confirment la tendance constatée les années précédentes au ralentissement de l’augmentation des dépenses du CAS Pensions, puisqu’il est prévu qu’elles augmentent de 0,79 % par rapport aux crédits inscrits en loi de finances pour 2016. Elles s’élèveraient au total à 57,65 milliards d’euros, contre 57,2 milliards d’euros en 2016.

Comme le montre le tableau suivant, l’augmentation (+ 0,99 %) des dépenses de pensions civiles et militaires de retraites et allocations temporaires d’invalidité (programme 741) est partiellement compensée par la diminution
(– 1,45 %) des dépenses de pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État (programme 742), ainsi que des pensions militaires d’invalidité et des autres pensions prises en charge sur le programme 743 (– 2,53 %).

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PENSIONS PAR PROGRAMME ET PAR ACTION

(en millions d’euros)

Intitulé du programme ou de l’action

Crédits de paiement

Exécution
2015

Ouverts en LFI pour 2016

Demandés
pour 2017

Variation

2017/2016

En %

Programme 741 Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité

52 536,68

53 297,3

53 824,7

+ 0,99

Action 1 Fonctionnaires civils relevant du code des pensions civiles et militaires

42 586,63

43 181,7

43 699,4

+ 1,2

Action 2 Militaires relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite

9 809,19

9 972,5

9 986,5

+ 0,14

Action 3 Allocations temporaires d’invalidité

140,87

143,1

138,8

– 3

Programme 742 Ouvriers des établissements industriels de l’État

1 902,84

1 916,19

1 888,45

– 1,45

Action 1 Prestation vieillesse et invalidité

1 837,22

1 850,9

1 821

– 1,62

Action 3 Autres dépenses spécifiques

0,98

1,25

2,46

+ 96,09

Action 4 Gestion du régime

7,21

7,9

7,68

– 2,77

Action 5 Rentes accidents du travail des ouvriers civils des établissements militaires

57,43

56,14

57,32

+ 2,09

Programme 743 Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions

2 094,62

1 991,16

1 940,86

– 2,53

Action 1 Reconnaissance de la Nation

772,22

757,36

749,26

– 1,07

Action 2 Réparation

1 278,41

1 189,72

1 147,35

– 3,56

Action 3 Pensions d’Alsace-Lorraine

15,35

16

16

-

Action 4 Allocations de reconnaissance des anciens supplétifs

14,92

15,3

15,07

– 1,5

Action 5 Pensions des anciens agents du chemin de fer franco-éthiopien

0,07

0,06

0,05

– 5,24

Action 6 Pensions des sapeurs-pompiers et anciens agents de la défense passive victimes d’accidents

13,34

12,44

12,87

+ 3,47

Action 7 Pensions de l’ORTF

0,31

0,28

0,25

– 10,71

Total du CAS Pensions

56 534,15

57 204,65

57 654,01

+ 0,79

Source : rapport annuel de performances pour 2015 et projet annuel de performances du compte d’affectation spéciale Pensions pour 2017.

● Le projet de loi de finances pour 2017 prévoit une augmentation des recettes du CAS de 3,5 % par rapport à la loi de finances pour 2016. Elles devraient atteindre 59,87 milliards d’euros, ce qui se traduirait par un solde en excédent de 2,2 milliards d’euros en fin d’exercice, nettement supérieur au solde constaté en 2015 (779 millions d’euros) et au solde prévu pour 2016 (670 millions d’euros). Cet excédent serait dû au programme 741, le solde du programme 743 étant à l’équilibre et celui du programme 742 en déficit de 21 millions d’euros (afin de ramener le solde cumulé de ce programme, de 81 millions d’euros à la fin de l’année 2016, à un niveau plus proche de l’équilibre).

ÉQUILIBRE EN RECETTES ET EN DÉPENSES DU CAS PENSIONS

(en millions d’euros)

Programmes

Recettes

Dépenses

Solde

2015

LFI 2016

PLF 2017

2015

LFI 2016

PLF 2017

2015

LFI 2016

PLF 2017

741 Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité

53 301

54 011

56 063

52 537

53 297

53 825

+ 764

+ 713

+ 2 238

742 Ouvriers des établissements industriels de l’État

1 958

1 873

1 868

1 903

1 916

1 888

+ 55

– 43

– 21

743 Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions

2 054

1 991

1 941

2 095

1 991

1 941

– 40

0

0

Total

57 313

57 874

59 872

56 534

57 205

57 654

+ 779

+ 670

+ 2 218

Source : rapport annuel de performances pour 2015 et projet annuel de performances du compte d’affectation spéciale Pensions pour 2017.

Aux termes de la LOLF, un compte d’affectation spéciale doit être équilibré à tout moment. Son article 21 dispose en effet que « en cours d’année, le total des dépenses engagées ou ordonnancées au titre d’un compte d’affectation spéciale ne peut excéder le total des recettes constatées ». Pour cette raison, le CAS Pensions est doté, depuis sa création, d’une marge, dénommée solde cumulé, destinée à assurer son équilibre à tout instant.

Entre les prévisions de la budgétisation et le constat en exécution, le niveau de ce solde cumulé est soumis à des aléas, en dépenses comme en recettes. D’une part, la masse des prestations est sensible aux choix des agents en matière de départ en retraite ainsi qu’aux variations de l’inflation ; d’autre part, l’essentiel des recettes du CAS est constitué par des contributions des employeurs publics dont les assiettes ne peuvent pas être prévues parfaitement. Le CAS a donc besoin d’une réserve couvrant les aléas de prévisions, en plus de la nécessaire réserve qu’implique le décalage temporel entre les décaissements et les encaissements.

Au moment de sa création, la loi de finances initiale pour 2006 avait doté le CAS Pensions d’1 milliard d’euros de solde cumulé. Après avoir atteint un niveau critique en 2007, le fonds de roulement s’est reconstitué. Le solde cumulé du compte est prévu à 3,2 milliards d’euros à la fin de l’année 2016, après avoir atteint 2,4 milliards en fin d’exercice 2015, le niveau le plus élevé jamais atteint jusque-là.

SOLDE CUMULÉ DU CAS PENSIONS EN FIN D’ANNÉE

(en milliards d’euros)

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Prévision 2016

1,23

0,43

0,8

1,15

1,25

1,01

0,78

0,99

1,6

2,4

3,2

Source : projet annuel de performances du compte d’affectation spéciale Pensions pour 2017.

Le niveau élevé du solde cumulé pose la question du maintien du taux des cotisations employeurs à leur niveau élevé actuel. Pour le ministère des finances, il n’est pas souhaitable de modifier, par à-coups, le niveau des taux de contribution au CAS Pensions. Une baisse des taux enverrait un mauvais signal, alors que le régime est loin d’être équilibré et qu’une hausse serait nécessaire quelques années plus tard. Une stabilisation des taux est donc privilégiée, de manière à ramener le solde cumulé autour de 1 milliard d’euros à moyen terme, sachant que, en l’état actuel des prévisions, le solde d’exercice du CAS Pensions repassera en négatif à compter de 2020, sous l’effet de la croissance tendancielle des dépenses de pensions.

Dépenses

Recettes

Pensions civiles

41 835

79,6 %

Contributions employeur État

38 929

73 %

Pensions militaires

9 570

18,2 %

Contributions des autres employeurs

7 608

14,3 %

Compensation démographique

626

1,2 %

Cotisations salariales (dont rachats)

5 926

11,1 %

Transfert État-CNRACL (2)

258

0,5 %

Transfert État-CNRACL (1)

573

1,1 %

Allocations temporaires d’invalidité

141

0,3 %

Contributions pour les ATI

148

0,3 %

Affiliations rétroactives et autres

107

0,2 %

Autres transferts

117

0,2 %

Total

52 537

100 %

Total

53 301

100 %

Source : projet annuel de performances du compte d’affectation spéciale Pensions pour 2017.

En 2015, dernière année exécutée, les recettes du programme 741 se sont élevées à 53,3 milliards d’euros, dont 73 % issues de la contribution employeur de l’État, et les dépenses à 52,5 milliards d’euros. Ces recettes financent principalement des pensions civiles (80 %), les pensions militaires (18 %) et la compensation démographique (1 %). Les transferts de compensation démographique versés par le régime de la fonction publique d’État sont en baisse tendancielle, le ratio démographique du régime se dégradant.

Les transferts de compensation généralisée vieillesse

Prévue par les articles L. 134-1 et L. 134-2 du code de la sécurité sociale, la compensation généralisée vieillesse vise à remédier aux inégalités provenant des déséquilibres démographiques et des disparités de capacités contributives entre les différents régimes d’assurance vieillesse. Elle est calculée en déterminant la situation des différents régimes si on leur appliquait les caractéristiques d’un régime fictif qui servirait une prestation dite de référence et qui recevrait une cotisation moyenne par actif lui permettant de s’équilibrer. Les régimes excédentaires, dans ces conditions de fonctionnement, sont débiteurs à la compensation et les régimes déficitaires, créanciers.

Compte tenu des fortes disparités de situation démographique et de capacité contributive entre les régimes, les transferts de compensation sont élevés. Ils étaient de près de 8 milliards d’euros en 2015. Le principal contributeur est le régime général et le principal bénéficiaire la Mutualité sociale agricole (MSA).

RÉPARTITION DES RÉGIMES PARTICIPANT AUX MÉCANISMES DE COMPENSATION SELON LA NATURE DE LEUR PARTICIPATION EN 2015

Régimes contributeurs

Régimes bénéficiaires

Régime général

64 %

MSA (exploitants agricoles)

43 %

CNRACL

18 %

MSA (salariés agricoles)

29 %

Professions libérales

9 %

Régime social des indépendants (RSI)

23 %

FPE

8 %

Régimes spéciaux (3)

5 %

Régimes spéciaux (4)

2 %

Source : Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2016.

Les règles posées par la LOLF imposent une double limitation de la dépense du CAS Pensions. D’une part, la gestion du compte doit être équilibrée dans la mesure où, à aucun moment, les dépenses ne doivent excéder les recettes. D’autre part, la dépense de chaque programme est limitée par les crédits inscrits en loi de finances. La qualité de la budgétisation du programme 741, qui représente 93 % des dépenses du CAS Pensions, est donc particulièrement importante.

Les prévisions de dépenses sont réalisées par le service des retraites de l’État (SRE), sur la base des hypothèses retenues par la direction du budget (inflation, etc.). Les deux principales sources de variation de la dépense sont les revalorisations des pensions – l’effet « valeur » – et les montants de pensions des entrants et des sortants. Ce dernier aspect inclut un effet « nombre », l’augmentation des effectifs de retraités, et un effet « noria », qui rend compte du fait que la pension moyenne des nouveaux retraités est supérieure à celle des décédés.

Pour 2017, les principales hypothèses retenues pour la prévision de dépense sont présentées dans le tableau suivant :

PRINCIPALES HYPOTHÈSES RETENUES POUR LA PRÉVISION
DE LA DÉPENSE DU CAS PENSIONS DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2017

Taux de revalorisation au 1er avril 2017 des pensions d’invalidité

(art. L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale)

+ 0,2 %

Taux de revalorisation au 1er octobre 2017 des pensions hors invalidité

(art. L. 341-6 du code de la sécurité sociale)

+ 0,6 %

Nombre de liquidants civils (droit direct)

54 800

Nombre de liquidants militaires (droit direct)

12 000

Nombre de sortants civils (droit direct et droit dérivé)

53 000

Nombre de sortants militaires (droit direct et droit dérivé)

18 900

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Les dépenses effectuées au titre du programme 741 devraient augmenter au total de 1 % (527 millions d’euros) par rapport à la loi de finances pour 2016, cette augmentation concernant principalement les dépenses de pensions civiles (43 066 millions d’euros, en hausse de 1,5 %) et dans une moindre mesure les dépenses de pensions militaires (9 647 millions d’euros, en hausse de 0,6 %).

Cette augmentation est plus lente que celle qui a été observée entre 2007 et 2015 (+ 2,5 % par an en moyenne), mais elle devrait être légèrement plus forte en 2017 qu’en 2015 et 2016. Selon le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2016, tous les facteurs contribuent à faire augmenter la masse des pensions servies davantage que les années précédentes : les effectifs de retraités (+ 1,1 %), le montant de la pension moyenne (+ 0,3 %) et la revalorisation des pensions (+ 0,2 %).

CONTRIBUTION DES DIFFÉRENTS FACTEURS À L’ÉVOLUTION DES PENSIONS CIVILES
DE RETRAITE PAR RAPPORT À L’ANNÉE N-1

(en %)

 

2014

2015

2016

2017

Prestations vieillesse

1,6

1,2

1,3

1,5

Effectifs

1,2

1

0,9

1,1

Revalorisation

0,3

0

0,1

0,2

Pension moyenne

0,1

0,2

0,3

0,3

Source : rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2016.

Les deux principales revalorisations susceptibles d’augmenter les dépenses de pensions sont :

– la revalorisation annuelle des pensions prévue par les articles L. 341-6 et L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale, qui se fait dans les mêmes conditions que pour le régime général. Elle a lieu depuis la réforme des retraites de 2014 au 1er octobre pour les pensions de retraite et au 1er avril pour les pensions d’invalidité. Depuis le 1er janvier 2016, le coefficient annuel de revalorisation des pensions de retraite se fonde sur les dernières données d’inflation, appréciées en moyenne annuelle sur les douze derniers mois, en partant de l’avant-dernier mois qui précède la date de revalorisation des prestations concernées. La nouvelle règle prévoit en outre un plancher : en cas d’inflation négative sur la période de référence prise en compte, les montants des prestations sont maintenus à leur niveau antérieur. Il n’y a pas eu de revalorisation au 1er octobre 2016. Les prévisions d’inflation conduisent à envisager une revalorisation des pensions de 0,2 % au 1er avril 2017 et de 0,6 % au 1er octobre 2017. Ces revalorisations devraient contribuer à l’augmentation des dépenses de pension à hauteur de 66 millions d’euros pour les fonctionnaires civils et de 13 millions d’euros pour les militaires ;

– celle de la valeur du point d’indice de la fonction publique en vigueur à la date de radiation des cadres, qui sert au calcul du montant de la pension. La valeur du point augmentera de 0,6 % au 1er février 2017. Pour les entrées de nouvelles pensions en 2017, la revalorisation du point d’indice (au 1er juillet 2016 et au 1er février 2017) et la mise en place des mesures de l’accord sur la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations (PPCR) devraient entraîner une dépense supplémentaire de 15 millions d’euros pour les fonctionnaires civils et de 2 millions d’euros pour les militaires.

C’est le taux de revalorisation des pensions qui a le plus d’impact sur le montant des dépenses de pensions, puisqu’il touche l’intégralité du stock de pensions en paiement au jour de la revalorisation, alors que la revalorisation du point de la fonction publique n’a d’effet que sur le montant de la dépense relative aux nouveaux retraités.

L’estimation des dépenses découle aussi des prévisions en matière d’effectifs de pensionnés entrants et sortants ainsi que de montant moyen de pension. Le modèle de prévision de dépenses utilisé par le SRE prend en compte à la fois la démographie des fonctionnaires en activité et une analyse des comportements de départ à la retraite, modifiés notamment par le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite prévu par la réforme des retraites de 2010 et la suppression de dispositifs de départ anticipé.

Au vu des résultats d’exécution obtenus ces dernières années, la méthode de prévision peut être considérée comme donnant des résultats satisfaisants. Le projet annuel de performances comprend un indicateur mesurant l’écart entre la prévision et l’exécution. Cet écart ne cesse de diminuer et reste sensiblement inférieur à la cible de 0,8 %. Il devrait être réduit à 0,12 % en 2016.

En 2017, l’impact du relèvement de l’âge légal sur la limitation des départs à la retraite devrait être plus modéré qu’en 2016. 54 800 nouvelles pensions civiles de droit direct sont attendues en 2017, contre 54 200 en 2016 et 51 100 pensions observées en 2015. Pour les militaires, 12 000 pensions de droit direct devraient entrer en paiement en 2017, après 11 700 départs estimés en 2016 et 11 200 observés en 2015.

Les sorties de pensions proviennent essentiellement des décès des pensionnés. Leurs effectifs sont prévus en appliquant les tables de mortalité de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), adaptées à la spécificité de la fonction publique d’État en termes de mortalité, à la pyramide des âges des pensions en paiement. Pour 2017, les prévisions de sorties de pensions sont de 53 000 pour les pensions civiles et de 18 900 pour les pensions militaires.

Selon les prévisions du SRE, le nombre de pensions en paiement devrait donc continuer à augmenter. La seule diminution prévue concerne les pensions militaires de réversion.

Le nombre de pensionnés de droit direct devrait augmenter de 1,2 % pour les pensions civiles et de 0,6 % pour les pensions militaires.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE PENSIONS EN PAIEMENT

 

Civils

Militaires

Pensions de droit direct

Pensions de droit dérivé

Ensemble

Pensions de droit direct

Soldes de réserve

Pensions de droit dérivé

Ensemble

2015

1 530 505

308 973

1 839 478

382 244

4 605

160 464

547 313

2016 (prév)

1 550 100

311 600

1 861 700

389 100

158 000

547 100

2017 (prév)

1 568 800

314 400

1 883 200

391 400

155 700

547 100

Source : service des retraites de l’État.

L’entrée de nouvelles pensions en 2017 devrait se traduire par une augmentation des dépenses de 939 millions d’euros pour les fonctionnaires civils et de 182 millions d’euros pour les militaires. Cette augmentation est nettement supérieure aux baisses de dépenses résultant des décès de pensionnés en 2017 (506 millions d’euros pour les civils, 117 millions d’euros pour les militaires).

La prévision des flux de nouveaux retraités en 2016 et 2017 tient compte des comportements de départs récemment observés. Elle intègre les effets de la réforme des retraites de 2010, principalement la mesure d’âge et la mise en extinction des départs anticipés de parents de trois enfants, ainsi que du décret n° 2012-847 du 2 juillet 2012 étendant l’accès au dispositif « carrières longues » (5).

Même si l’impact du relèvement de l’âge légal de départ à la retraite sur le nombre de départs varie d’une année sur l’autre, la tendance à l’augmentation de l’âge moyen à la radiation des cadres se confirme. Pour les fonctionnaires sédentaires, l’âge moyen de départ à la retraite (62 ans et 4 mois) est désormais le même que dans le régime général. Pour les personnels civils dans leur ensemble, en incluant les catégories actives, l’âge moyen à la radiation des cadres devrait s’élever en 2017 à 61,6 ans, contre 61,3 en 2015. Pour les militaires, il devrait passer de 48 ans en 2015 à 48,7 ans en 2017.

ÉVOLUTION DE L’ÂGE MOYEN À LA RADIATION DES CADRES

(en années)

 

2014

2015

2016
prévision

2017
prévision

Personnels civils (1)

61,05

61,30

61,4

61,6

Personnels militaires

47,62

48,01

48,4

48,7

(1) Sédentaires et catégories actives.

Source : projet annuel de performances pour 2017.

Le présent projet de loi de finances prévoit une augmentation des recettes du programme 741 de plus de 2 milliards d’euros par rapport à la loi de finances pour 2016. Elles s’élèveraient à 56,06 milliards d’euros, dont 5,3 milliards d’euros de retenues pour pensions des personnels civils (6), 854,8 millions d’euros de retenues pour pensions des personnels militaires, 37,3 milliards d’euros de contributions des employeurs de fonctionnaires civils de l’État et 9,8 milliards d’euros de contributions des employeurs pour les militaires.

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Taux de cotisation

7,85

8,12

8,39

8,76

9,14

9,54

9,94

10,29

10,56

10,83

11,10

Variation

 

+ 0,27

+ 0,27

+ 0,37

+ 0,38

+ 0,40

+ 0,40

+ 0,35

+ 0,27

+ 0,27

+ 0,27

Dont réforme de 2010

 

+ 0,27

+ 0,27

+ 0,27

+ 0,27

+ 0,27

+ 0,27

+ 0,27

+ 0,27

+ 0,27

+ 0,27

Dont décret RALC 2012

     

+ 0,10

+ 0,05

+ 0,05

+ 0,05

       

Dont réforme de 2013

       

+ 0,06

+ 0,08

+ 0,08

+ 0,08

     

Source : ministère des finances et des comptes publics.

Le taux de cotisation salariale des fonctionnaires devrait s’élever à 11,1 % en 2020. La convergence avec le privé ne sera toutefois pas totale, puisque le taux pour un salarié du secteur privé rémunéré au SMIC devrait être de 11,2 % en 2020.

La contribution employeur à la charge de l’État, prévue à l’article L. 61 du code des pensions civiles et militaires de retraite, est calculée pour assurer, après prise en compte des autres recettes concernées, la couverture des charges de pensions et, conformément à l’article 21 de la LOLF, assurer l’équilibre du CAS. Elle consiste donc en fait, pour partie, en une subvention d’équilibre, d’une nature qui n’est pas différente de celle qui est versée aux régimes spéciaux de la mission Régimes sociaux et de retraite.

Trois taux de contribution de l’État-employeur sont distingués, en lien avec les trois actions du programme : un taux « civil », un taux « allocations temporaires d’invalidité », un taux « militaire ». Les taux de contributions des autres employeurs de fonctionnaires et militaires de l’État sont alignés depuis 2009 sur le taux « civil » à la charge de l’État. Enfin, les contributions de La Poste et Orange SA pour les fonctionnaires que ces entreprises emploient sont calculées sur la base d’un taux d’équité concurrentielle (7).

Du fait de la hausse des dépenses de pensions, les taux de contribution employeur ont fortement augmenté entre 2006 et 2014, avant de se stabiliser au niveau élevé de 74,28 % du traitement indiciaire brut et des primes ouvrant droit à pension pour les fonctionnaires civils et 126,07 % de la solde indiciaire brute pour les militaires. Les taux civils ont augmenté de plus de 24 points en huit ans. Entre 2006 et 2015, le montant des contributions employeur a augmenté de 34,2 % et le montant des contributions salariales de 19,4 %.

TAUX DE COTISATION EMPLOYEUR (2006-2017)

(en %)

Année

Taux de cotisation employeur de l’État

Taux de cotisations des employeurs autres que l’État

Pension de retraite - civils

Pensions militaires

Allocation temporaire d’invalidité - civils

Pension de retraite - civils

Pensions militaires

Allocation temporaire d’invalidité - civils

2006

49,90

100,00

0,30

33,00

0,30

2007

50,74

101,05

0,31

39,50 (1)

0,31

2008

55,71

103,50

0,31

50,00

0,31

2009

58,47 (2)

108,39

0,32

60,14

0,32

2010

62,14

108,63

0,33

62,14

0,33

2011

65,39

114,14

0,33

65,39

0,33

2012

68,59

121,55

0,33

68,59

0,33

2013

71,78 (2)

126,07

0,32

74,28

0,32

2014

74,28

126,07

0,32

74,28

0,32

2015

74,28

126,07

0,32

74,28

0,32

2016

74,28

126,07

0,32

74,28

0,32

2017
(prévision PAP)

74,28

126,07

0,32

74,28

0,32

(1) à compter du 13 mars 2007.
(2) en moyenne annuelle, en tenant compte de la réduction de taux au mois de décembre.
Source : service des retraites de l’État.

Pour 2017, les prévisions de recettes au titre des contributions employeur des ministères et des budgets annexes au titre des personnels civils s’établissent à 31 320 millions d’euros, contre 30 056 millions d’euros en 2016 (+ 4,2 %). À ces recettes s’ajoutent celles provenant des contributions acquittées par les différents organismes employant des fonctionnaires affiliés au régime des pensions civiles et militaires de l’État (établissements publics, collectivités territoriales, associations, etc.), qui sont estimées pour 2017 à 6 011 millions d’euros. Enfin, les contributions employeurs d’Orange et de La Poste s’élèveront respectivement à 661,2 et 886,7 millions d’euros.

Le montant des contributions employeur des ministères (essentiellement les ministères de la Défense et de l’Intérieur) au titre des militaires devrait s’élever à 9 806,7 millions d’euros en 2017, contre 9 323,4 millions d’euros en exécution 2015.

Après la réforme des retraites de 2003, celle de 2010 avait pour objectif principal d’améliorer les perspectives financières du système de retraite à long terme par une modification des paramètres du régime de retraite des fonctionnaires civils de l’État et des militaires, comprenant à la fois des mesures spécifiques de convergence vers les régimes de droit commun et l’application de mesures transversales comme l’augmentation progressive de l’âge légal de départ et la hausse de l’âge d’annulation de la décote.

Le régime de retraite de la fonction publique est également concerné par la réforme de 2014 (augmentation de la durée requise pour partir à la retraite sans décote, décalage de six mois de la date de revalorisation des pensions, réduction de la clause de stage des militaires et réforme du cumul emploi retraite). L’augmentation de la durée d’assurance de référence est supposée fortement contribuer à l’amélioration de la situation financière du régime de la fonction publique à long terme, à partir de 2020.

Pour 2017, la réforme de 2010, l’élargissement du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue, l’augmentation du taux de cotisation salariale et le décalage de la date de revalorisation des pensions devraient avoir un effet positif sur la soutenabilité du CAS Pensions de l’ordre de 3 milliards d’euros. Près de la moitié est due aux mesures d’âge votées en 2010, avec un calendrier accéléré par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.

IMPACT FINANCIER DES RÉFORMES VOTÉES DEPUIS 2010
SUR LE RÉGIME DE RETRAITE DE LA FPE

(en milliards d’euros courants)

 

Réalisé

Projections actualisées

 

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Impact de la réforme de 2010

Impact en dépense

 

Mesures âge avec accélération - LFSS pour 2012

– 0,05

– 0,33

– 0,57

– 0,74

– 0,97

– 1,22

– 1,47

Mesures de convergence public / privé

0,17

0,24

0,17

0,12

0,05

– 0,01

– 0,08

Impact en recette

 

Alignement du taux de cotisation salariale

0,16

0,32

0,48

0,64

0,80

0,97

1,15

Sous-total réforme de 2010

0,05

0,40

0,87

1,26

1,72

2,20

2,70

Impact de l’élargissement du dispositif de « retraite anticipée pour carrière longue »

Impact en dépense liés aux départs anticipés

 

0,01

0,09

0,17

0,24

0,28

0,33

Impact en recette - relèvement du taux de cotisation

 

0,05

0,06

0,09

0,12

0,15

0,15

Sous-total dispositif carrière longue

 

0,05

– 0,03

– 0,08

– 0,12

– 0,13

– 0,18

Impact de la réforme de 2014

Augmentation du taux de cotisation salariale

     

0,03

0,08

0,11

0,18

Décalage de la revalorisation au 1er octobre (réduction des dépenses)

     

– 0,21

– 0,28

– 0,3

– 0,32

Sous-total réforme de 2014

     

0,24

0,36

0,41

0,5

Total général

0,05

0,45

0,84

1,42

1,96

2,48

3,02

Source : commission des finances, d’après les données fournies par le SRE et la direction du budget.

Après six années de gel, le décret n° 2016-670 du 25 mai 2016 portant majoration de la rémunération des personnels civils et militaires de l’État, des personnels des collectivités territoriales et des établissements publics d’hospitalisation a prévu une augmentation du point d’indice de 1,2 %, en deux étapes : + 0,6 % au 1er juillet 2016 et + 0,6 % au 1er février 2017.

La revalorisation du point d’indice a des effets à la fois sur les recettes et sur les dépenses du CAS Pensions. Elle a un effet immédiat en recettes, l’augmentation de la valeur du point d’indice induisant une augmentation des cotisations des agents actifs et des contributions employeurs. L’effet sur les dépenses est décalé dans le temps et plus progressif : l’augmentation du point d’indice induit à terme une augmentation du montant des pensions liquidées par les agents partant en retraite.

Avec une hypothèse de stabilité des taux de contribution au CAS Pensions sur la période 2016-2019, la revalorisation du point d’indice améliorerait le solde du CAS Pensions de 492 millions d’euros en 2017 et de 494 millions d’euros en 2018. L’effet positif sur le solde serait alors à son maximum et diminuerait rapidement les années suivantes sous l’effet de la hausse de la pension moyenne à la liquidation. Il faut préciser qu’il s’agit de l’impact sur le solde du CAS, et non sur le solde public, l’augmentation des recettes comprenant l’augmentation des contributions des employeurs.

EFFETS DE LA REVALORISATION DU POINT D’INDICE
SUR LES RECETTES ET LES DÉPENSES DU CAS PENSIONS

(en millions d’euros)

 

2016

2017

2018

2019

Impact en recettes

133

507

529

530

Impact en dépenses

2

15

35

56

Solde de l’impact sur le CAS Pensions

131

492

494

474

Source : direction du budget.

Malgré l’absence de majorité syndicale, le Gouvernement a décidé le 30 septembre 2015 d’appliquer l’accord sur la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations (PPCR), signé par six syndicats représentant 49 % des fonctionnaires. Sa mise en œuvre, qui nécessite de très nombreux textes réglementaires, devrait être progressive jusqu’en 2020.

Cet accord comporte un volet sur la rémunération de la fonction publique qui, comme l’augmentation du point d’indice, aura des conséquences sur les régimes de retraite. Il prévoit notamment une refonte et une revalorisation des grilles de rémunération des fonctionnaires, ainsi qu’un rééquilibrage de cette rémunération au profit de la rémunération indiciaire, par la transformation de certaines primes en points d’indice. Pour les fonctionnaires ne percevant que de très faibles primes, ou aucune prime, cette transformation se traduira par une pure augmentation du traitement indiciaire. Or c’est le traitement indiciaire (8) qui constitue l’assiette des retenues pour pensions dues par les agents, ainsi que des contributions des employeurs. C’est également lui qui sert de base au calcul du montant de la pension des nouveaux retraités.

La mise en œuvre de l’accord devrait donc conduire, à court terme, à une augmentation des recettes de cotisations, par l’élargissement de l’assiette, et, à moyen terme, à une augmentation du montant des pensions liquidées par les agents partant à la retraite, du fait de l’élévation des indices de fin de carrière.

Il n’est pour l’heure pas possible de connaître de façon précise les conséquences de cet accord pour le régime de retraite des fonctionnaires, de nombreuses dispositions sur l’évolution des grilles indiciaires restant à finaliser.

Pour déterminer des ordres de grandeur de l’impact de l’accord, la direction du budget, le service des retraites de l’État et la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) ont privilégié une approche par cas-types et déterminé plusieurs scénarii d’évolution des indices à la liquidation. Les tableaux suivants présentent un ordre de grandeur de l’impact de l’accord PPCR sur les retraites, en dépenses et en recettes. Il ne s’agit que d’ordres de grandeur, susceptibles d’évoluer, et qui agrègent les trois fonctions publiques.

ORDRE DE GRANDEUR DE L’IMPACT EN DÉPENSES DE L’ACCORD PPCR

Fonction publique de l’État, fonction publique territoriale et fonction publique hospitalière

 

2016

2017

2018

2019

2020

Gain moyen annuel par agent bénéficiaire (en euros)

235

465

599

653

723

Coût global dépenses de pensions

(en millions d’euros)

4

25

73

137

210

Source : direction du budget.

Sans tenir compte de l’inflation et de la progression du point d’indice, l’impact de l’accord PPCR sur les dépenses de retraite pourrait être de l’ordre de 210 millions d’euros en 2020, en incluant les trois versants de la fonction publique. Il montera en charge progressivement au rythme des flux de départs en retraite des agents qui seront concernés par les augmentations indiciaires prévues par l’accord. Ce n’est qu’à partir de 2040 que l’effet de l’accord se fera pleinement sentir, en raison du renouvellement global du stock de retraités qui auront tous été concernés par les mesures de l’accord.

ORDRE DE GRANDEUR DE L’IMPACT EN RECETTES DE L’ACCORD PPCR

Fonction publique de l’État, fonction publique territoriale et fonction publique hospitalière

(en millions d’euros)

 

2016

2017

2018

2019

2020

Hausse des cotisations salariales

14

110

160

197

202

Hausse des cotisations patronales

64

567

847

1 069

1 075

Source : direction du budget.

Du point de vue des recettes, il faut distinguer la part relative aux cotisations salariales de celle relative aux cotisations patronales. Seule la première a un effet positif sur le solde public.

L’impact de l’accord PPCR sur l’augmentation des cotisations versées par le stock d’actifs pourrait être supérieur à l’impact en dépenses jusqu’en 2019, le rapport s’inversant à compter de 2020.

Enfin, la mise en œuvre de l’accord pourrait se traduire par une réduction de l’assiette des cotisations au régime de retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP).

L’assiette de ce régime additionnel, opérationnel depuis 2005, est constituée par les rémunérations accessoires de toute nature (primes, indemnités, supplément familial de traitement...) non prises en compte au titre du régime des pensions de la fonction publique. L’assiette cotisée est limitée à 20 % du traitement indiciaire brut total de l’intéressé. La cotisation est fixée à 5 % pour la part salariée et à 5 % pour la part employeur.

Il s’agit d’un régime par points obligatoire, fonctionnant par capitalisation. La retraite additionnelle est servie sous forme de rente, sauf pour les bénéficiaires qui ont acquis un nombre de points limité, pour lesquels la retraite est versée sous forme de capital.

Les prestations versées sont encore faibles (268 millions d’euros en 2015) compte tenu de la jeunesse du régime, mais le régime est amené à prendre de l’ampleur au fur et à mesure de l’allongement de la durée de cotisation des fonctionnaires au RAFP s’allonge. Les engagements du régime, qui étaient de 10,3 milliards d’euros en 2011, devraient ainsi atteindre 24,5 milliards d’euros en 2020 et environ 100 milliards d’euros en 2060.

Comme le souligne la Cour des comptes, « la contribution de la pension du RAFP à la retraite totale devrait cependant rester modeste, même au terme de sa montée en charge. Ainsi, selon les projections de taux de remplacement sur cas-types réalisées par le COR pour la génération 1990, le taux de remplacement pour un cadre A + ayant un taux de primes supérieur à 50 % en fin de carrière s’élèverait à 55 %, la contribution du RAFP étant limitée à 1,6 point. Pour le cas-type de catégorie B (sédentaire) de la même génération, le taux de remplacement est évalué à 70 % dont 2 points pour le RAFP. La pension du RAFP apporte dans tous les cas un complément très limité par comparaison avec les régimes complémentaires obligatoires du secteur privé. » (9)

Le Rapporteur spécial estime néanmoins utile de rappeler que le RAFP constitue une source de revenus pour les retraités de la fonction publique, complémentaire du CAS Pensions, et permet la prise en compte des primes. Il s’interroge sur l’effet sur ce régime de la démarche engagée dans le cadre du PPCR du transfert d’une partie de la rémunération indemnitaire sur la rémunération indiciaire, qui risque de se traduire par une réduction de l’assiette de cotisations pour le RAFP. Selon des simulations sur des cas types réalisées par la DGAFP (10), la transformation de primes en points d’indice étant limitée à 9 points, elle devrait avoir un effet modéré sur la part des primes dans la rémunération. Ces estimations demandent cependant à être confirmées.

Créé en 2009, trois ans après le CAS Pensions, le service des retraites de l’État (intégré à la direction générale des finances publiques - DGFiP), est chargé de la gestion administrative et financière du régime de retraite et d’invalidité des fonctionnaires civils et militaires de l’État, ainsi que du pilotage de la réforme de la gestion des pensions décidée en 2007 dans le cadre du conseil de modernisation des politiques publiques.

Cette réforme s’appuie sur la création d’un compte individuel de retraite (CIR), qui permet de collecter et d’exploiter les informations nécessaires afin de liquider la pension de chaque assuré et de renseigner les assurés sur leur retraite à tout moment de leur carrière. Le SRE assure la gestion des CIR des fonctionnaires, dont l’alimentation est assurée par les employeurs.

La création des CIR s’est opérée en trois temps. Il y a d’abord eu une phase d’identification de tous les fonctionnaires, achevée depuis 2010. Ensuite, pour construire les CIR, une reconstitution de la carrière des fonctionnaires a été nécessaire, à partir des systèmes de gestion de personnel de chaque ministère et des dossiers sous forme papier. Cette reconstitution a été complétée par la mise en place d’un système permettant l’alimentation annuelle des CIR par les systèmes d’information des ressources humaines des employeurs. Enfin, le troisième stade de la création du CIR consiste à calculer les droits à pensions à partir du contenu des comptes, alors qu’auparavant la carrière était reconstituée au dernier moment, lorsque le fonctionnaire souhaitait faire valoir ses droits à la retraite. Selon les informations fournies au Rapporteur spécial par le directeur du SRE lors de son audition, tous les fonctionnaires bénéficient désormais d’un CIR et son utilisation pour le calcul des droits à retraite se généralise. La prévision du projet annuel de performances de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines pour le taux de retraites pouvant être calculées à partir des comptes individuels retraite est ainsi réévaluée à la hausse, à 85 % pour 2016 et 95 % pour 2017.

Le stade suivant de la réforme, qui consiste à transférer au SRE la réception de la demande de pension du fonctionnaire et, plus globalement, la relation à l’usager, est en revanche peu avancé. Or c’est ce dernier stade qui est le plus susceptible de générer des économies, en libérant les effectifs des services gestionnaires des employeurs. Il est également porteur de simplification pour les fonctionnaires, qui n’ont ainsi plus qu’un interlocuteur pour leur retraite. Enfin, la centralisation des demandes au SRE paraît cohérente avec la montée en charge progressive des réformes des retraites, qui a pour effet de complexifier le calcul des droits.

Il y a actuellement deux groupes d’employeurs : certains ont transféré au SRE la réception de la demande de pension du fonctionnaire et une partie de la relation à l’usager ; la plupart ont conservé ces activités tout en mettant en œuvre l’utilisation des données du CIR pour établir les demandes de pension.

Selon les données recueillies par la Cour des comptes (11), au 1er janvier 2016, une minorité des administrations (40 %) figurait dans le premier groupe (12) et elle ne représentait que 11 % du total des CIR. Les employeurs qui conservent l’instruction de la demande de départ en retraite de leurs agents représentaient toujours 89 % du nombre de CIR.

La montée en charge est très progressive. Il est prévu de confier la réception de la demande de pensions au SRE pour l’ensemble des employeurs à compter de 2020, mais les employeurs pourraient conserver la relation à l’usager pendant trois ans supplémentaires. Le Rapporteur spécial estime qu’il est indispensable d’accélérer la mise en œuvre dans cette réforme, afin de supprimer tous les doublons entre le SRE et les services gestionnaires des pensions dans les différentes administrations. Selon la Cour des comptes, les effectifs de ces services ont peu en effet peu baissé entre 2012 et 2014, passant de 1 426 ETPT à 1 364 ETPT.

À ces 1 364 ETPT des ministères employeurs s’ajoutent les 918 ETPT qui correspondent, à la DGFiP, aux effectifs du service des retraites de l’État (SRE), à ceux de diverses structures du réseau (centres de gestion des retraites, trésorerie générale pour l’étranger et trésorerie à l’étranger) et à une part des services informatiques centraux et déconcentrés contribuant à la mise en œuvre de ces missions. Ces effectifs ont pour missions l’enregistrement des droits et l’information des pensionnés, le contrôle et la liquidation des droits à pensions de retraite et d’invalidité, ainsi que le paiement des droits à pensions.

Comme le rappelle la Cour des comptes, la réduction du nombre de centres de paiement, déjà ramenée de 24 à 12, voire la concentration de l’ensemble des paiements sur un seul centre, serait susceptible de réduire les coûts de gestion.

Ces coûts de gestion ne sont pas inscrits au compte d’affectation spéciale, mais en dépenses du budget général, au sein du programme 156 Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.

Pour 2017, 64,15 millions d’euros sont demandés pour l’action Gestion des pensions, dont 58,15 millions d’euros de frais de personnel. Le coût de gestion d’un ressortissant du régime est calculé, dans le cadre de l’indicateur du projet annuel de performances du CAS Pensions, en divisant les dépenses complètes du service des retraites de l’État et des centres de gestion des retraites par le nombre de ressortissants du régime, actifs et retraités. Il s’élevait à 14,25 euros en 2015 et la prévision pour 2017 s’établit à 13,80 euros. En incluant les coûts exposés par les employeurs pour préparer les dossiers de retraite (estimés à 43,1 millions d’euros en 2015), la prévision pour 2017 monte à 22,1 euros. Ces coûts ont baissé ces dernières années grâce à l’utilisation du compte individuel de retraite comme source des bases de liquidation des pensions. Selon le projet annuel de performance, ils pourraient temporairement augmenter à court terme avec la reprise par le service des retraites de l’État de la relation avec les usagers. Il est donc impératif que, au fur et à mesure du transfert de la relation avec les usagers au SRE, les effectifs correspondant dans les autres ministères soient supprimés ou réorientés vers d’autres tâches.

En application de l’article 54 de la LOLF, « le compte général de l’État (…) comprend (…) une évaluation des engagements hors bilan de l’État », au nombre desquels figurent les engagements de retraite de l’État au titre de ses fonctionnaires.

Cette évaluation représente les réserves nécessaires à la date d’évaluation pour solder les droits acquis des agents présents dans le régime au moment de l’évaluation. Elle est réalisée en « groupe fermé » (13) et ne prend pas en compte les cotisations.

La méthode utilisée pour l’évaluation de ces engagements, dite des unités de crédit projetées, consiste à évaluer, à législation constante, la valeur actualisée des pensions qui seront versées aux retraités et aux actifs présents à la date d’évaluation. Cette méthode est celle qui est la plus adaptée pour refléter la situation des engagements à droit constant, sans préjuger des recrutements futurs.

Elle conduit à une estimation du niveau des engagements d’environ 1 535 milliards d’euros au 31 décembre 2015, au taux d’actualisation de 0,18 %, soit près de 73 % du PIB. Sur ce total, 65 % des engagements concernent les agents déjà à la retraite à cette date. L’impact des réformes des retraites de 2010 et 2014 ne porte donc que sur les 35 % d’engagements restants, à savoir les droits acquis par les actifs. L’effet des réformes est donc moins visible dans le cadre de la méthode des unités de calcul projetées que dans le cadre d’un calcul en besoin de financement réalisé en système ouvert (14).

Le besoin de financement actualisé permet d’appréhender les besoins de financement futurs inhérents au régime, compte tenu de la masse des prestations et des cotisations anticipées. Cette analyse permet d’appréhender les efforts supplémentaires à réaliser ultérieurement, à législation inchangée pour faire revenir le système à l’équilibre. Le « besoin de financement actualisé » mesure les réserves qui seraient en théorie nécessaires aujourd’hui, en étant placées au taux d’intérêt du marché, pour faire face à l’ensemble des décaissements nécessaires pour combler les déficits anticipés.

Compte tenu de la hausse significative des taux de contribution patronale en 2013, maintenus constants en 2014, 2015 et sur toute la durée de la projection, et de la montée en charge des réformes des retraites, le besoin de financement cumulé actualisé au taux de 0,18 % à l’horizon 2050 s’élève à – 95 milliards d’euros, ce qui indique que les recettes de cotisations seraient supérieures aux dépenses de pensions. Il faut toutefois rappeler que cet équilibre prévisionnel repose sur l’hypothèse du maintien de taux de contribution des employeurs très élevés.

Le graphique ci-après illustre l’évolution annuelle de la masse des prestations du régime et décompose son financement entre les cotisations salariales et les contributions des employeurs à droit constant, ainsi que le solde du régime. Il indique également le solde du régime actualisé cumulé sur la période de projection.

BESOIN DE FINANCEMENT ACTUALISÉ DES RETRAITES DU RÉGIME DES FONCTIONNAIRES CIVILS ET MILITAIRES DE L’ÉTAT AU 31 DÉCEMBRE 2015

Depuis 1990, l’augmentation des dépenses de pensions des ouvriers d’État a été plus lente que celle des pensions civiles et militaires de retraite (+ 2,3 % par an), en raison d’une faible, mais régulière, diminution des effectifs de pensionnés (– 0,3 % par an en moyenne et – 0,7 % par an depuis 2001). L’évolution de la subvention de l’État au Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels d’État (FSPOEIE) n’en est pas moins dynamique : de 2006 à 2015, elle a augmenté de 4,9 % par an en moyenne.

Pour 2017, il est prévu une baisse de 1,6 % des crédits dévolus au règlement des pensions des ouvriers d’État (1 821 millions d’euros) par rapport aux crédits inscrits en loi de finances pour 2016. Cette baisse s’explique notamment par une prévision d’exécution des dépenses en 2016 moins élevée que celle prévue en loi de finances initiale. En effet, alors que la loi de finances initiale pour 2016 prévoyait une revalorisation des pensions de + 0,6 % au 1er octobre 2016, celle-ci n’a finalement pas eu lieu. Par ailleurs, les hypothèses de revalorisation pour 2017 restent modérées et les effectifs de pensionnés seront légèrement moins importants que ceux retenus en budgétisation 2016. Le nombre total de pensionnés (droits directs et réversion) devrait s’établir à 100 289 au 31 décembre 2017, contre 101 231 au 31 décembre 2016.

Le régime des ouvriers d’État se caractérise par une baisse de l’effectif des cotisants (30 898 au 31 décembre 2015 contre 34 602 au 31 décembre 2014) plus rapide que celle de l’effectif des pensionnés (102 249 ayants droit et ayants cause au 31 décembre 2015 contre 103 487 au 31 décembre 2014), conduisant à une dégradation régulière de son rapport démographique, qui s’établissait fin 2015 à 0,3.

EFFECTIFS DU RÉGIME DE PENSION DES OUVRIERS
DES ÉTABLISSEMENTS INDUSTRIELS DE L’ÉTAT

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015 (p)

2016 (p)

Cotisants

47 100

44 511

41 643

39 761

37 108

34 602

30 898

27 904

Total des pensionnés

107 250

106 647

106 007

104 869

104 120

103 487

102 249

101 231

Pensionnés de droit direct

69 962

69 815

69 732

69 167

69 163

69 169

68 734

68 248

Pensionnés de droit dérivé

37 288

36 832

36 275

35 702

34 957

34 318

33 515

32 983

Ratio démographique brut

0,44

0,42

0,39

0,38

0,36

0,33

0,30

0,28

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Cette dégradation du ratio démographique pèse sur le besoin de financement du programme, principalement couvert par :

– les retenues à la charge des ouvriers, dont le taux est identique à celui des fonctionnaires, soit 10,29 % au 1er janvier 2017 ;

– les contributions des employeurs, au taux de 34,63 % (15) ;

– une subvention d’équilibre inscrite chaque année au budget général, à laquelle s’ajoute une subvention inscrite au budget annexe Contrôle et exploitation aériens. En 2015, la subvention de l’État a représenté 70,9 % des recettes du programme 742.

En 2017, pour couvrir les 1 821 millions d’euros de dépenses de pensions, les principales ressources seront :

– 411,6 millions d’euros de cotisations, dont 317,1 millions d’euros de cotisations patronales (contre 337,3 millions d’euros en 2016) et 94,5 millions d’euros de cotisations salariales (contre 97,5 millions d’euros en 2016) ;

– 56,6 millions d’euros de contributions du ministère de la défense pour le financement des rentes accidents du travail des ouvriers civils des établissements militaires de l’État (RATOCEM) ;

– 1 324 millions d’euros de subvention de l’État au FSPOEIE. Afin de ramener le solde cumulé de la section 2 du CAS Pensions à un niveau plus proche de l’équilibre et compte tenu du niveau prévisionnel de ce solde à la fin de l’année 2016 (+ 81 millions d’euros), le montant de la subvention de l’État pour 2017 baisse de 12 millions d’euros par rapport à celui qui était inscrit en loi de finances initiale pour 2016.

Le programme 743 Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions est composé de deux ensembles de dépenses de pensions et autres avantages à vocation viagère :

– les pensions versées au titre du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre ;

– d’autres pensions, rentes et allocations de régimes de retraite dont l’État est directement redevable, notamment au titre d’engagements historiques et de reconnaissance de la Nation.

Ces dépenses ont la particularité d’être exclusivement prises en charge par la solidarité nationale. À la différence de celles du programme 741, elles ne mettent pas en œuvre une logique contributive.

Les crédits prévus pour 2017 sont en baisse de 2,5 %. Cette baisse concerne toutes les actions du programme, à l’exclusion de l’action 6 Pensions des sapeurs-pompiers et anciens agents de la défense passive victimes d’accident, qui ne représente que 0,7 % des dépenses du programme.

ÉVOLUTION DES DIFFÉRENTES PRESTATIONS ENTRE 2016 ET 2017

(en euros)

 

LFI 2016

PLF 2017

Évolution
(en %)

Reconnaissance de la Nation

757 364 000

749 263 500

– 1,07

Réparation

1 189 720 000

1 147 350 000

– 3,56

Pensions d’Alsace-Lorraine

16 000 000

16 000 000

0,00

Allocations de reconnaissance des anciens supplétifs

15 300 000

15 070 000

– 1,50

Pensions des anciens agents du chemin de fer franco-éthiopien

56 226

53 281

– 5,24

Pensions des sapeurs-pompiers et anciens agents de la défense passive victimes d’accident

12 438 000

12 870 000

3,47

Pensions de l’ORTF

280 000

250 000

– 10,71

Total

757 364 000

749 263 500

– 2,53

DEUXIÈME PARTIE. – LA MISSION RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE

La mission Régimes sociaux et de retraite retrace les subventions versées par l’État à neuf régimes spéciaux de retraite, ainsi que sa participation au financement du congé de fin d’activité des routiers.

Elle se compose de trois programmes :

– le programme 198 Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres, qui consomme la majeure partie des crédits de la mission, comporte principalement les crédits destinés à assurer l’équilibre des régimes de retraite de la société nationale des chemins de fer français (SNCF) et de la régie autonome des transports parisiens (RATP). Plus marginalement, il comprend des crédits destinés à assurer la participation de l’État au congé de fin d’activité des routiers, ainsi qu’à garantir les pensions des anciens agents des chemins de fer d’Afrique du nord et de Niger-Méditerranée et de certains anciens agents des chemins de fer secondaires d’intérêt local. Il est doté pour 2017 de 4 049 millions d’euros (contre 4 039 millions d’euros en 2016, soit une hausse de 0,26 %) ;

– le programme 197 Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins, qui vise à financer, via l’établissement national des invalides de la marine (ENIM), le régime spécial de sécurité sociale des marins. Il est doté, pour 2017, de 828,2 millions d’euros (contre 824,8 millions d’euros en 2016, soit une hausse de 0,4 %) ;

– le programme 195 Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers finance des régimes spéciaux en rapide déclin démographique. Contrairement aux régimes de la SNCF, de la RATP et des marins, il s’agit de régimes fermés, qui n’ont plus – ou très peu – de cotisants. Il est doté pour 2017 de 1 375,7 millions d’euros (contre 1 456,8 millions d’euros en 2016, soit une baisse de 5,6 %).

RÉPARTITION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2017

(en milliards d’euros)

Source : commission des finances, d’après les données des rapports annuels de performances pour les années 2006 à 2015 et du projet annuel de performances pour 2017.

Comme le montre le tableau suivant, cette baisse n’est toutefois pas uniforme pour tous les programmes de la mission. La baisse des crédits demandés pour 2017 est principalement due à la baisse des crédits du programme 195
(– 5,6 %) qui regroupe des régimes en rapide déclin démographique, dont certains sont quasiment éteints. Les crédits de l’action 5 du programme 198 Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres contribuent également à cette diminution (– 32,3 %) : le nombre de bénéficiaires de pensions des anciens agents des chemins de fer d’Afrique du Nord et d’outre-mer, d’une part, et de certains anciens agents des chemins de fer secondaires d’intérêt local, d’autre part, continue à diminuer. Cette action subventionne également le congé de fin d’activité des routiers, dont les crédits diminuent fortement, passant de 131 millions d’euros en loi de finances pour 2016 à 79,4 millions d’euros dans le présent projet de loi de finances. La baisse de la contribution de l’État au congé de fin d’activité des routiers prend notamment en compte le report de 55 à 57 ans de l’âge d’entrée dans le régime et la suppression de la dérogation « carrières longues », qui avait été à l’origine de la forte progression des besoins de financement du dispositif au cours des dernières années.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS (17) DE LA MISSION RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE
PAR PROGRAMME ET PAR ACTION

(en euros)

Intitulé du programme et de l’action

Crédits de paiement

Exécution 2015

Ouverts en LFI pour 2016

Demandés pour 2017

Variation 2017/2016 en %

Programme 198 Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

4 088 816 356

4 038 730 778

4 049 096 778

+ 0,26

Action 3 Régime de retraite du personnel de la SNCF

3 281 292 196

3 215 618 329

3 253 096 778

+ 1,17

Action 4 Régime de retraite du personnel de la RATP

618 324 301

652 571 360

680 600 000

+ 4,3

Action 5 Autres régimes

189 199 859

170 541 089

115 400 000

– 32,33

Programme 197 Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins

852 952 581

824 838 307

828 190 724

+ 0,41

Programme 195 Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers

1 509 793 281

1 456 785 889

1 375 745 306

– 5,56

Action 1 Versements au fonds spécial de retraite de la caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines

1 342 949 004

1 293 463 659

1 215 715 400

– 6,01

Action 2 Régime de retraite de la SEITA

163 754 277

160 620 000

157 537 690

– 1,92

Action 4 Caisse des retraites des régies ferroviaires d’outre-mer

2 770 000

2 422 230

2 242 216

– 7,43

Action 7 Versements liés à la liquidation de l’ORTF

320 000

280 000

250 000

– 10,71

Total de la Mission Régimes sociaux et de retraite

6 451 562 218

6 320 354 974

6 253 032 808

– 1,07

Source : commission des finances, à partir des chiffres du rapport annuel de performances pour 2015 et du projet annuel de performances pour 2017.

Les subventions versées aux trois régimes encore ouverts, qui consomment à eux seuls 76 % des crédits de la mission, devraient en revanche augmenter en 2017, modérément pour les régimes des marins (+ 0,41 %) et de la SNCF (+ 1,17 %), plus fortement pour celui de la RATP (+ 4,3 %). Les subventions versées aux régimes des marins et de la SNCF devraient rester inférieures à celles qui ont été exécutées en 2015.

La faible revalorisation des pensions prévue pour 2017, ainsi que l’augmentation progressive des taux de cotisations applicables dans les régimes de la SNCF et de la RATP (cf. infra) contribuent à limiter l’augmentation de la subvention de l’État.

● Pour le régime de la SNCF, les charges de pensions devraient diminuer en 2017 (– 11 millions d’euros) sous l’effet de la baisse des effectifs de pensionnés. La subvention de l’État devrait cependant augmenter pour compenser la diminution concomitante du produit des cotisations (– 51 millions d’euros). Les effectifs cotisants devraient en effet continuer à diminuer. Il y a en outre une interrogation sur le niveau du taux T1 de cotisation patronale de la SNCF (cf. infra) à la suite de l’annulation récente par le Conseil d’État (18) des arrêtés interministériels du 16 juillet 2014 et du 27 juillet 2015 fixant ce taux pour les années 2013 à 2015. Une baisse de ce taux aurait pour conséquence mathématique une augmentation de la subvention d’équilibre de l’État.

● Pour le régime de la RATP, l’augmentation des recettes de cotisations (+ 11 millions d’euros) ne suffit pas à couvrir l’augmentation des charges de pensions (+ 36 millions d’euros). Alors que le nombre de cotisants est stable, le nombre de pensionnés continue à progresser. Il devrait s’élever à 52 982 en 2017. Le montant moyen des pensions servies est en outre plus élevé à la RATP (28 106 euros en 2015) qu’à la SNCF (24 649 euros en 2015), et semble augmenter plus rapidement (+ 1,25 % entre 2014 et 2015, contre + 0,7 % à la SNCF).

● Pour le régime des marins, la subvention de l’État se décompose en une subvention pour charges de service public attribuée à l’Établissement national des invalides de la marine (ENIM) et une subvention versée, au titre de la solidarité nationale, pour la couverture des dépenses des prestations vieillesse. Le projet de loi de finances prévoit une augmentation modérée de la subvention de l’État au titre des dépenses vieillesse par rapport à la loi de finances pour 2016 (+ 0,3 %). Toutefois, si l’on prend en compte le fait que la subvention pour 2016 s’accompagnait d’un prélèvement sur le fonds de roulement de l’ENIM de 20 millions d’euros, la subvention pour 2017 est en fait en diminution, en cohérence avec la diminution prévue des dépenses de pensions.

Les régimes spéciaux subventionnés par la mission Régimes sociaux et de retraite ont en commun un ratio démographique dégradé – c’est-à-dire un fort déséquilibre en le nombre de cotisants et le nombre de pensionnés – à la fois par rapport au régime général et, dans une moindre mesure, par rapport au régime de la fonction publique. Tous ces régimes ont un ratio démographique inférieur à 1.

Il faut toutefois rappeler que les régimes de la SNCF et de la RATP sont tous deux contributeurs à la compensation généralisée vieillesse (cf. supra), à hauteur, pour 2017, de 4 millions d’euros pour le premier et de 30 millions d’euros pour le deuxième. D’autres régimes sont donc dans une situation démographique encore plus dégradée.

Le tableau suivant présente les effectifs de cotisants et de pensionnés, ainsi que les ratios démographiques des principaux régimes de la mission, et les compare à ceux du régime général et de la fonction publique de l’État (FPE).

EFFECTIFS ET RATIO DÉMOGRAPHIQUE DES PRINCIPAUX RÉGIMES EN 2015

 

Nombre de cotisants

Nombre de retraités (1)

Ratio démographique

Régime général

17 560 000

13 854 832

1,27

FPE

2 033 228

2 121 397

0,96

SNCF

150 378

263 841

0,67 (2)

RATP

42 574

48 194

0,88

Marins

30 356

113 595

0,27

Mines

2 229

282 855

0,01

SEITA

11

9 027

0,01

(1) bénéficiaires vieillesse de droit direct et de droit dérivé

(2) ratio pondéré des pensions de réversion.

Sources : rapport national d’activité de la Caisse nationale d’assurance vieillesse pour 2015, rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2016 et projet annuel de performances de la mission Régimes sociaux et de retraite pour 2017.

Le déséquilibre démographique est maximal pour les régimes dits « fermés », comme celui des mines ou de la SEITA (0,01), qui n’accueillent plus de nouveaux cotisants. Il est également très important pour le régime des marins (0,27), qui devrait compter 30 215 actifs pour 112 513 pensionnés en 2016.

Les deux principaux régimes du programme par le nombre de bénéficiaires ont comparativement des situations démographiques moins dégradées. À la SNCF, les effets conjugués de la diminution des effectifs en activité du cadre permanent (de près de 500 000 agents avant la seconde guerre mondiale à environ 149 600 au 31 décembre 2015) et de l’augmentation du nombre des retraités pendant la même période (de 230 000 à environ 266 200) ont conduit à un déséquilibre important, mais le ratio démographique du régime est stable depuis le début des années 2000, avec environ 0,67 cotisant pour un retraité.

Le régime de la RATP a le ratio démographique le plus élevé parmi les régimes de la mission, mais il se dégrade régulièrement, puisqu’il est passé de 1 en 2007 à 0,88 en 2015.

ÉVOLUTION DE LA SITUATION DÉMOGRAPHIQUE DU RÉGIME DE LA RATP

Années

Nombre de pensionnés

Nombre de cotisants

Ratio démographique

2007

44 035

44 203

1

2008

44 770

44 176

0,99

2009

44 850

44 390

0,99

2010

45 435

43 517

0,96

2011

45 630

43 237

0,95

2012

47 749

42 321

0,89

2013

47 953

42 688

0,89

2014

48 232

42 483

0,88

2015

48 488

42 545

0,88

Source : caisse de retraites du personnel de la RATP (CRP RATP).

 

2013

2014

2015

2016 (p)

2017 (p)

SNCF

Subvention de l’État

3 334,1

3 310,9

3 281,3

3 216

3 253

Charges de pensions

5 317,1

5 312,9

5 288,7

5 265

5 254

Ratio subvention / pensions

62,7 %

62,3 %

62 %

61,1 %

61,9 %

RATP

Subvention de l’État

611,1

619

618,3

653

681

Charges de pensions

1 027,5

1 043,1

1 058,9

1 099

1 135

Ratio subvention / pensions

59,5 %

59,3 %

58,4 %

59,4 %

60,0 %

Marins

Subvention de l’État

840

820,21

853

824,8

828,2

Charges de pensions

1 093,6

1 083,3

1 067,4

1 059,3

1 040,2

Ratio subvention / pensions

76,8 %

75,7 %

79,9 %

77,9 %

79,6 %

Mines

Subvention de l’État

1 328,5

1 385,8

1 342,9

1 263,7

1 215,7

Charges de pensions

1 705,2

1 646,6

1 578,9

1 516,3

1 454,2

Ratio subvention / pensions

77,9 %

84,2 %

85,1 %

83,3 %

83,6 %

Seita

Subvention de l’État

165,5

168

165,3

162,7

157,5

Charges de pensions

168,9

170,6

165,6

163,5

157,8

Ratio subvention / pensions

98 %

98,5 %

99,8 %

99,5 %

99,8 %

Total

67 %

68 %

68 %

67 %

68 %

Source : commission des finances, d’après les données des rapports et projet annuels de performances de la mission Régimes sociaux et de retraite.

Les régimes spéciaux de retraite ont fait l’objet, depuis 2008, de plusieurs réformes tendant à rapprocher progressivement leurs règles de celles du régime de la fonction publique. Les régimes « fermés », c’est-à-dire ne comptant plus de nouveaux cotisants (19), n’ont toutefois pas été réformés : compte tenu du faible nombre de cotisants et de pensionnés, la modification des paramètres aurait eu peu d’effet sur leur équilibre. Il en a été de même pour le régime des marins, en raison de la pénibilité du métier.

Les réformes des retraites de 2003, de 2010 et de 2014 ont en revanche été transposées par voie réglementaire aux régimes de la SNCF et de la RATP, qui ont en plus fait l’objet de mesures spécifiques, comme la mise en extinction des bonifications à compter du 1er janvier 2009.

La loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites a prévu l’alignement très progressif des régimes de la fonction publique sur le régime général en matière de durée d’assurance, de décote et de surcote, et d’indexation des pensions sur l’inflation. Ces mesures ont été transposées par décret aux régimes de la SNCF (20) et de la RATP (21), selon une montée en charge différée par rapport à la fonction publique.

La loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a procédé au relèvement des bornes d’âge de deux ans dans la fonction publique, dans les mêmes conditions que pour le régime général. Les âges anticipés dont bénéficient les catégories actives sont maintenus, mais relevés de deux ans, comme pour les catégories sédentaires. La loi a également prévu un alignement progressif des taux de cotisation salariale. Comme celle de 2003, cette réforme a été étendue aux régimes spéciaux par voie réglementaire (22), avec toutefois un calendrier différé pour tenir compte de la montée en charge de la réforme de 2008. C’est pourquoi la plupart des mesures prises en application de la réforme des retraites de 2010 entrent en vigueur au 1er janvier 2017 pour les régimes spéciaux.

Enfin, la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites a poursuivi l’augmentation de la durée d’assurance requise pour bénéficier d’une pension de retraite non proratisée et sans décote et décalé d’avril à octobre de la date de revalorisation des pensions, à l’exception des pensions d’invalidité. Cette réforme a également fait l’objet d’une transposition aux régimes spéciaux (23).

Le relèvement des âges d’ouverture des droits et de la limite d’âge, de 2 ans, s’applique selon une montée en charge progressive, à compter du 1er janvier 2017. À l’issue de la montée en charge, les assurés « sédentaires » des régimes spéciaux partiront à l’âge de 62 ans, à l’exception de ceux de la SNCF, qui pourront partir à 57 ans, et les personnels roulants à 52 ans.

À compter de 2024, l’âge d’ouverture des droits (62 ans) et la durée d’assurance (168 trimestres) des sédentaires des régimes spéciaux, seront alignés sur ceux de la fonction publique et du régime général et évolueront à l’identique (172 trimestres pour la génération 1973). Pour la SNCF, la durée de 172 trimestres s’appliquera pour les agents nés à partir du 1er janvier 1978.

Les mécanismes de décote et surcote, introduits par la réforme de 2003, ont été transposés aux régimes spéciaux lors de la réforme de 2008. La décote est mise en œuvre progressivement avec des durées de montée en charge identiques à celles prévues dans la fonction publique. L’âge d’annulation de la décote augmente lui-même progressivement entre 2010 et 2024 jusqu’à correspondre à l’âge d’ouverture des droits majoré de cinq ans. Quant à la surcote, initialement fixée à 0,75 % par trimestre supplémentaire cotisé et travaillé, elle a été portée à 1,25 % pour les trimestres cotisés et travaillés à compter du 1er janvier 2009.

Pour le régime de la SNCF, l’évolution des paramètres de calcul de la pension à la suite des différentes réformes est retracée dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION DES PARAMÈTRES DE CALCUL DE LA PENSION
DU RÉGIME DE LA SNCF (SÉDENTAIRES)

Source : Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (CPRPSNCF).

Les régimes spéciaux sont également concernés par l’augmentation progressive des taux de cotisations salariales et patronales qui ont été mises en œuvre pour l’ensemble des régimes. Le calendrier d’augmentation des taux de cotisation salariale pour les régimes de la SNCF et de la RATP est récapitulé dans le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES TAUX DE COTISATION SALARIALE
DES AGENTS DE LA SNCF ET DE LA RATP

 

RATP

SNCF

2015

12,30 %

8,15 %

2016

12,35 %

8,20 %

2017

12,50 %

8,52 %

2018

12,55 %

8,79 %

2019

12,60 %

9,06 %

2020

12,65 %

9,33 %

2021

12,65 %

9,60 %

2022

12,65 %

9,87 %

2023

12,65 %

10,14 %

2024

12,65 %

10,41 %

2025

12,65 %

10,68 %

2026

12,65 %

10,95 %

Source : décret n° 2007-1056 du 28 juin 2007 relatif aux ressources de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français et décret n° 2005-1635 du 26 décembre 2005 relatif à la caisse de retraites du personnel de la Régie autonome des transports parisiens.

Les taux de cotisations employeur ont également connu une progression régulière. Pour la SNCF, le taux de cotisation employeur est égal à la somme de deux taux :

– le taux T1 est déterminé afin de couvrir, déduction faite du produit des cotisations salariales, le montant qui serait dû si les salariés relevaient du régime général et des régimes de retraite complémentaire obligatoires ;

– le taux T2 est destiné à contribuer forfaitairement au financement des droits spécifiques de retraite du régime spécial.

Les taux de cotisation de la SNCF, recalculés chaque année, sont donnés en pourcentage de la masse salariale sur le tableau ci-après :

TAUX DE COTISATION DE L’ENTREPRISE SNCF

(en %)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016 (1)

Taux T1

22,52

22,56

22,44

22,46

22,91

23,19

23,60

23,86

23,86

Taux T2

12,27

12,62

12,73

11,26

11,26

11,35

11,58

11,72

11,81

Total

34,79

35,18

35,17

33,72

34,17

34,54

35,18

35,58

35,67

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

(1) Les taux de cotisation sont définitifs de 2008 à 2015. Le taux de cotisation pour 2016 est provisionnel : le taux T1 n’ayant pas encore été arrêté, celui de 2015 est provisoirement reconduit.

Le taux de cotisation patronale de la RATP est prévu à 18,82 % en 2017.

Les mesures de relèvement des âges d’ouverture des droits n’entreront en vigueur qu’au 1er janvier 2017, mais la montée en charge des réformes engagées depuis 2008, notamment l’allongement de la durée d’activité et la suppression de la mise à la retraite d’office, conduit à un relèvement de l’âge moyen de départ à la retraite dans les régimes spéciaux. Ce relèvement est toutefois très progressif.

L’âge moyen de départ en retraite pour les pensionnés de droit direct du régime de la SNCF était ainsi de 56 ans et 9 mois en 2015 (contre 56 ans et 6 mois en 2014 et 56 ans et 1 mois en 2013). Ce chiffre varie selon les catégories professionnelles. En 2015, les conducteurs partaient à 53 ans (contre 52 ans et 7 mois en 2014 et 50 ans et 3 mois en 2008) alors que les autres agents partaient en moyenne à 57 ans et 1 mois (contre 56 ans et 10 mois en 2014 et 55 ans et 2 mois en 2008).

À la RATP, l’âge moyen du départ en retraite est de 54,80 ans en 2015 (54,70 ans en 2014 et 55,25 ans en 2013).

Force est de constater que l’âge moyen de départ à la retraite dans les régimes spéciaux, même s’il augmente tendanciellement (avec toutefois une baisse entre 2013 et 2014 à la RATP), reste très inférieur à celui du régime général (62 ans et quatre mois) et à celui du régime de la fonction publique de l’État (62 ans et quatre mois pour les sédentaires). Il est même significativement en deçà de l’âge de départ des catégories actives de la fonction publique (58 ans et 5 mois).

La direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, responsable du programme 198, a indiqué au Rapporteur spécial ne pas disposer d’une analyse précise de l’impact de la réforme des régimes spéciaux de 2008. La Cour des comptes a évoqué à plusieurs reprises les coûts des mesures - notamment salariales – consenties par les entreprises (SNCF et RATP) pour accompagner la réforme des régimes spéciaux de 2008 et les conséquences de ces mesures sur l’augmentation des charges de pensions.

Selon les informations communiquées au Rapporteur spécial par la CPRPSNCF, le coût de ces mesures pour la caisse est désormais supérieur aux recettes de cotisations supplémentaires qu’elles procurent et il devrait aller croissant. Il faut toutefois rappeler que ces mesures d’accompagnement ont incité certains agents à prolonger leur activité, ce qui entraîne des économies pour la caisse. Cet aspect n’a pas été mesuré.

Le Rapporteur spécial estime indispensable que le Parlement dispose d’une information précise sur les conséquences financières des réformes des régimes spéciaux, afin de mieux appréhender l’évolution future de la subvention d’équilibre de l’État et d’en tirer les leçons dans la perspective d’éventuelles réformes ultérieures. Une information consolidée dans les documents budgétaires devrait dresser un bilan de ces réformes et chiffrer leurs effets sur l’évolution des subventions d’équilibre versées par l’État aux régimes concernés.

Au cours de ses travaux préparatoires, le Rapporteur spécial n’a pu obtenir que des informations partielles sur les effets des réformes passées.

La CRP RATP a ainsi évalué les économies réalisées sur le montant des prestations de retraite à servir avant et après les réformes de 2008 et 2010. Ces deux réformes permettraient d’économiser 14 millions d’euros en 2017 et 45 millions d’euros en 2020. En 2020, l’économie resterait donc modeste, en comparaison des 1 179 millions d’euros de prestations que le régime aurait dû servir en l’absence de réforme. Il faut préciser que ce chiffrage porte uniquement sur les prestations, et non sur la subvention de l’État, et a été réalisé en 2012 sans être actualisé depuis.

ÉVOLUTION PRÉVISIONNELLE DES PRESTATIONS DE RETRAITE À SERVIR PAR LE RÉGIME DE LA RATP

Année

Avant réforme des droits 2008 (1)

Après réforme des droits 2008 (2)

Après réforme des droits 2010 (3)

Écart

(3) - (1)

2017

1 124

1 110

1 109

– 14

2018

1 150

1 125

1 125

– 25

2019

1 167

1 137

1 136

– 30

2020

1 179

1 144

1 135

– 45

2021

1 191

1 147

1 134

– 56

2022

1 205

1 155

1 133

– 73

2023

1 214

1 161

1 133

– 81

2024

1 221

1 165

1 133

– 88

2025

1 229

1 171

1 133

– 96

Source : CRP RATP.

Pour ce qui concerne la réforme de 2014, seul l’impact du décalage de la revalorisation des pensions du 1er avril au 1er octobre a été évalué par la CRP RATP. Ce décalage conduirait à une réduction du besoin de financement de 10,5 millions d’euros en 2017.

BESOIN DE FINANCEMENT DE LA CRP RATP

(en millions d’euros)

année

scénario avec revalorisation
au 1er avril

scénario avec revalorisation
au 1er octobre

écart

2017

733

722,6

– 10,5

2018

773,1

762,2

– 10,9

2019

795,3

794,1

– 11,2

2020

805,3

793,9

– 11,4

Source : CRP RATP.

À moyen terme, à l’horizon 2020, le ratio démographique du régime de la RATP devrait continuer à se dégrader. La population des actifs cotisant au régime est supposée rester stable (environ 42 500) (24), alors que le nombre d’allocataires, toutes pensions confondues, devrait continuer à augmenter. Le montant total des prestations à servir devrait donc augmenter nettement à l’horizon 2020. L’augmentation des produits des cotisations ne compensant que partiellement cette hausse, la subvention de l’État devrait augmenter et passerait de 657,3 millions d’euros effectivement versés en 2016 à 801,1 millions d’euros en 2020.

À plus long terme, l’hypothèse de stabilité des effectifs de cotisants est maintenue, mais l’évolution des effectifs de retraités serait irrégulière. Ils devraient, après 2020, retrouver leur niveau actuel, avant de repartir à la hausse à partir de 2032.

Année

SNCF

RATP

Marins

Mines

SEITA

Total

2050

75

24

25

24

ND

148

2115

134

55

53

25

2,6

270

Source : compte général de l’État 2015, annexe au projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes.

Le graphique ci-dessous illustre l’évolution annuelle de la masse des prestations des principaux régimes spéciaux subventionnés et décompose leur financement entre les cotisations salariales et contributions des employeurs à droit constant et le besoin supplémentaire de financement annuel. Il montre que, sous l’effet conjugué de la diminution des prestations à servir et de l’augmentation de la masse des cotisations salariales et des contributions des employeurs, le besoin de financement devrait sensiblement baisser, d’environ 2 milliards d’euros, d’ici 2030, puis continuer à diminuer plus progressivement avant de se stabiliser autour de 2 milliards d’euros par an.

FINANCEMENT DES RETRAITES DES RÉGIMES SPÉCIAUX SUBVENTIONNÉS (HORS SEITA)

Source : compte général de l’État 2015, annexe au projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes.

TROISIÈME PARTIE. – VERS UN RÉGIME UNIVERSEL « FRANCE RETRAITES » ?

Les fonctions régaliennes peuvent être considérées comme celles qui ne peuvent être déléguées à d’autres personnes publiques ou privées et qui ne peuvent entrer dans le champ concurrentiel : les activités qui limitent les libertés publiques des individus (police, justice), les activités militaires et de souveraineté (armée, diplomatie).

Ces agents doivent ainsi bénéficier de protections spécifiques dues à la nature même de leur activité (prévenir toute pression qui conduiraient à modifier l’exercice de leurs missions ou la menace du licenciement).

L’existence d’un statut particulier lié à la nature des missions revient donc à s’interroger sur la justification du maintien d’un statut public pour les salariés de l’État ne remplissant pas des fonctions régaliennes.

La nature du recrutement par concours n’est pas suffisante pour justifier la différence de traitement d’avec les salariés du privé.

De plus en plus d’agents publics sont recrutés en dehors de la voie du concours. Dans la fonction publique territoriale par exemple, aux deux extrémités de l’échelle, les catégories A et C peuvent faire l’objet de recrutement direct sans concours.

La multiplication des dérogations entame ainsi la crédibilité du principe même des recrutements par voie de concours.

Le statut doit-il pour autant provoquer une différenciation des droits à la retraite ?

Il s’agit d’avoir une vision globale de la question des retraites en France et de l’équité des français devant le droit à une pension digne.

Depuis 30 ans, des réformes adoptées, souvent dans la douleur, ont assuré la survie du système sans remettre en cause son architecture globale. La modulation de différents critères permet ainsi de limiter des déséquilibres sur le moyen terme, de repousser la situation critique sans la faire disparaître.

La question de fond qui se pose, est moins le respect des équilibres budgétaires que l’égalité des français devant la retraite, ceci, en tenant compte du parcours de vie professionnelle de chacun.

Le Conseil d’orientation des retraites (COR), dans sa lettre n° 12 de septembre 2015 rappelle que « la pension moyenne brute en 2013 est, par mois, de 2 510 euros pour les fonctionnaires d’État civils, de 1 830 euros pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers et de 1 760 euros pour les assurés du régime général (y compris les régimes complémentaires) ».

Le COR justifie ces écarts par le fait que « les anciens fonctionnaires sont en moyenne plus qualifiés » ce qui est largement contestable.

Les différentes réformes qui se sont succédé depuis 2003 rapprochent les régimes mais de manière extrêmement progressive. Elles conservent aussi les architectures différentes notamment en raison de l’existence des primes et indemnités du secteur public.

TAUX DE COTISATION LÉGAUX SUR LES DIVERSES ASSIETTES DE COTISATION EN 2015

Régimes de salariés du privé
(CNAV, MSA salariés, ARRCO, AGIRC)

Régimes de fonctionnaires
(CNRACL, régime de la FPE, RAFP)

Rémunérations sous le plafond de la sécurité sociale

Traitement indiciaire de base

Part salarié :

Part salarié :

Non-cadre : 11,05 % (CNAV 7,15 % ; ARRCO + AGFF 3,90 %)

Tous fonctionnaires : 9,54 %

Cadre : 11,18 % (idem + CET : 0,13 %)

 

Part employeur :

Part employeur :

Non-cadre : 16,15 % (CNAV 10,3 % ; ARRCO + AGFF 5,85 %)

Fonctionnaires territoriaux ou hospitaliers : 30,5 %

Cadre : 16,37 % (idem + CET : 0,22 %)

Fonctionnaire d’État civil : 74,28 %

 

Militaire : 126,07 %

Rémunérations au-dessus du plafond
(et sous 4 fois le plafond)

Primes et indemnités
(dans la limite de 20 % du traitement)

Part salarié :

Part salarié :

Non-cadre : 9,3 % (CNAV 0,3 % ; ARRCO + AGFF 9 %)

Tous fonctionnaires : 5 %

Cadre : 9,13 % (CNAV 0,3 % ; AGIRC + AGFF + CET 8,83 %)

 

Part employeur :

Part employeur :

Non-cadre : 15,25 % (CNAV 1,8 % ; ARRCO + AGFF 13,45 %)

Tous fonctionnaires : 5 %

Cadre : 16,07 % (CNAV 1,8 % ; AGIRC + AGFF + CET 14,27 %)

 

Source : Conseil d’orientation des retraites, Les différences de retraite entre salariés du privé et fonctionnaires, La lettre du COR n° 12, septembre 2015.

ARCHITECTURE DES RÉGIMES ET RÈGLES DE CALCUL
(EN CAS DE RETRAITE SANS DÉCOTE NI SURCOTE)

 

Régimes de salariés du privé

(CNAV, MSA salariés, ARRCO, AGIRC)

Régimes de fonctionnaires

(CNRACL, régime de la FPE, RAFP)

Partie « principale » des rémunérations

Rémunérations sous le plafond de la sécurité sociale (environ 85 % du total des rémunérations en moyenne)

Traitement indiciaire de base (environ 75 à 80 % des rémunérations totales en moyenne, dépend du grade et de l’ancienneté)


Régime de base (CNAV ou MSA salariés) :

Pension = 50 % x salaire moyen des 25 meilleures années x proratisation

+ Régime complémentaire ARRCO :

Pension = nombre de points acquis sur toute la carrière x valeur du point

+ Régime supplémentaire d’entreprise (éventuellement) : règles spécifiques à chaque régime

Régime intégré (régime des fonctionnaires d’État, ou CNRACL pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers) :

Pension = 75 % x traitement indiciaire des 6 derniers mois x proratisation

Reste des rémunérations

Rémunérations au-dessus du plafond de la sécurité sociale (environ 15 % du total des rémunérations)

Primes et indemnités (environ 20 à 25 % du total des rémunérations)

Régime complémentaire ARRCO (pour les non-cadres) ou AGIRC (pour les cadres) :

(dans la limite de 20 % du traitement indiciaire) Régime additionnel de la Fonction publique (RAFP) :

Pension = nombre de points acquis sur toute la carrière x valeur du point

Pension = coefficient d’ajournement x nombre de points acquis sur toute la carrière (depuis 2005) x valeur du point

Régime supplémentaire d’entreprise (éventuellement) : règles spécifiques à chaque régime

+ Une partie des primes est prise en compte dans la pension du régime intégré (pour certaines catégories actives)

+ Rémunérations non prises en compte pour la retraite : participation, intéressement…

+ Rémunérations non prises en compte pour la retraite : partie des primes au-delà de 20 % du traitement indiciaire

Source : Conseil d’orientation des retraites, Les différences de retraite entre salariés du privé et fonctionnaires, La lettre du COR n° 12, septembre 2015.

Le compte personnel de prévention de la pénibilité a été créé par la loi n° 14–40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraite. Sans revenir sur la complexité de mise en œuvre de ce compte par les entreprises, il convient de rappeler qu’il coexiste désormais avec un système public archaïque reposant sur les catégories « actives » et « superactives ».

Ces catégories, dont les critères reposent notamment sur un arrêté du 3 mai 1979, s’additionnent à un maquis d’indemnités et de primes qui rendent illisible toute politique de prévention des risques professionnels.

L’Inspection générale de l’administration et l’Inspection générale des affaires sociales ont reconnu, dans un rapport de mai 2016 (28), les insuffisances de la reconnaissance de la pénibilité au travail et surtout l’incapacité de l’administration à mettre en œuvre les dispositions contenues dans la loi du 20 janvier 2014.

Entre un système très complexe pour les entreprises et un classement archaïque pour les fonctionnaires, il conviendrait de mettre en place une reconnaissance harmonisée et simplifiée des risques professionnels indépendamment de l’origine publique ou privée des métiers exercés.

Ainsi, l’État reconnaît lui-même qu’il est incapable de mettre en œuvre le dispositif qu’il exige des entreprises.

Les régimes spéciaux traités dans ce rapport sont essentiellement ceux de la SNCF et de la RATP. Ils bénéficient chacun, comme on l’a vu, d’une subvention d’équilibre d’environ, respectivement, 4 milliards et 600 millions d’euros chaque année.

Héritage de l’histoire (les premières compagnies ferroviaires ont, dès 1850, créé des caisses de retraite pour leurs employés), ces régimes spéciaux sont souvent la pierre d’achoppement qui font caler les réformes d’envergure.

Pourtant, ces subventions d’équilibre octroyées par l’État proviennent des impôts de l’ensemble des contribuables, en particulier de ceux qui cotisent aussi pour le régime général. Il est donc légitime de s’interroger sur leur justification même si par principe la solidarité nationale peut jouer pour garantir, dans des conditions démographiques très dégradées, une retraite convenable à une catégorie d’actifs.

Ces régimes spéciaux ont aussi été concernés par les réformes qui se sont succédé (allongement de la durée de cotisation, report de la borne d’âge…). Toutefois, la dernière en date, celle de 2008, n’a eu qu’un impact limité sur l’équilibre général voire même impossible à évaluer clairement (voir page 44).

Les régimes spéciaux de la SNCF et de la RATP sont les plus visibles en raison du montant important de la subvention publique mais ils ne sont pas les seuls.

L’éparpillement de la retraite des français dans une multitude de caisses génère une complexité et une paralysie sans précédent. Les frais de gestion sont évalués entre 5 et 6 milliards d’euros soit l’équivalent des subventions d’équilibres traitées dans ce rapport spécial. Ces frais de gestion concernent aussi bien les caisses privées que publiques.

Outre la diversité structurelle du système de retraite, la diversité des droits génère cette inégalité de plus en plus incompréhensible aux yeux des français.

305 MILLIARDS D’EUROS DE RETRAITES OBLIGATOIRES EN 2015 :
UNE MOSAÏQUE DE RÉGIMES

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique annexé au projet de loi de finances pour 2017.

Le rapprochement, et à terme la fusion, de l’ensemble de ces caisses dans un régime universel de base par répartition « France Retraite » semble indispensable. La suppression régulièrement annoncée, toujours abandonnée, des régimes spéciaux va dans ce sens et doit être confirmée et expliquée comme une mesure d’équité et de simplification.

Le régime de retraite des députés n’est, à proprement parler, pas un régime spécial. Créée par une résolution de la Chambre des députés le 23 décembre 1904 la caisse de retraite des députés échappe à la loi et au contrôle extérieur en vertu de la séparation des pouvoirs.

En 2015, le régime des députés s’élevait à 63 millions d’euros et distribuait une pension moyenne de 2 700 euros nets par mois à 1 121 anciens élus et 714 ayants-droits.

Un régime largement déficitaire puisque sur ces 63 millions d’euros, 40 millions proviennent de la subvention d’équilibre (prélevée sur le budget de l’Assemblée nationale) soit un taux de couverture similaire aux régimes spéciaux de la RATP ou de la SNCF (60 %).

Des mesures de rapprochement avec le régime de retraite des fonctionnaires ont été prises concomitamment aux réformes de 2003, 2008, 2010. Ainsi le taux de cotisation augmente (de 8,39 % en 2012 à 10,85 % en 2020) et l’âge d’ouverture des droits est repoussé progressivement à 62 ans.

Certes, ces chiffres sont beaucoup moins considérables que les sommes en jeu pour les principaux régimes spéciaux mais les principes et les équilibres sont similaires. La légitimité de l’existence de telles situations pose donc question.

Rattacher les parlementaires (y compris les sénateurs qui bénéficient d’un régime proche de celui des députés) au régime général ou à la future caisse de retraite des agents de l’État serait ainsi des hypothèses à envisager.

Par ailleurs, de nombreuses voix s’élèvent, à droite comme à gauche, pour proposer une réduction du nombre de parlementaires (de 577 députés à 400 et de 348 sénateurs à 202 par exemple).

Cette évolution aurait ainsi des conséquences importantes sur le déséquilibre du régime : moins de cotisants pour un nombre stable de pensionnés et d’ayants-droits. La réforme de ce régime deviendra donc indispensable pour éviter de creuser son déficit.

À l’heure où des mesures d’égalité profonde sont à mettre en place il semble incompréhensible que ceux qui les réclament, au nom du bien de tous, ne se les appliquent pas à eux-mêmes.

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EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique, et de M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics (voir le compte rendu de la commission élargie du 4 novembre 2016 à 15 heures (29)), la commission examine les crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, ainsi que les crédits de la mission Régimes sociaux et de retraite et du compte spécial Pensions.

Suivant l’avis favorable des rapporteurs spéciaux Mme Karine Berger, MM. Jean-Louis Dumont et Michel Pajon et malgré l’avis défavorable du rapporteur spécial M. Camille de Rocca Serra, la commission adopte les crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.

Puis, suivant l’avis favorable de M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial, la commission adopte les crédits du compte spécial Gestion du patrimoine immobilier de l’État et sur l’avis favorable de M. Michel Pajon, rapporteur spécial, elle adopte les crédits de la mission Crédits non répartis.

Enfin, la commission adopte suivant l’avis favorable de M. Alain Chrétien, rapporteur spécial, les crédits de la mission Régimes sociaux et de retraite et du compte spécial Pensions.

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ANNEXE :
PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Ministère de l’économie et des finances 

– M. Alain Piau, directeur du service des retraites de l’État ; M. Alexis Guillot, chef du bureau des retraites et des régimes spéciaux (6BRS) à la direction du budget.

Caisse de retraites du personnel de la Régie autonome des transports parisiens (CRP RATP) 

– M. Christophe Rolin, directeur ; Mme Nathalie Droulez, ancienne directrice.

Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français (CPRPSNCF)

– M. Philippe Georges, président du conseil d’administration ; M. Jean-Loup Moussier, directeur ; M. Cédric Brun, sous-directeur du pilotage économique.

Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques (iFRAP)*

– Mme Agnès Verdier-Molinié, directrice ; Mme Sandrine Gorreri.

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