N° 747 - Proposition de loi de M. Yves Foulon relative à la réserve citoyenne



N° 747

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 février 2013.

PROPOSITION DE LOI

relative à la réserve citoyenne,

(Renvoyée à la commission de la défense nationale et des forces armées, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Yves FOULON, Guy TEISSIER, Luc CHATEL, Marc LE FUR, Nicolas DHUICQ, Christophe GUILLOTEAU, Olivier AUDIBERT-TROIN, Étienne BLANC, Jean-Claude BOUCHET, Valérie BOYER, Alain CHRÉTIEN, Dino CINIERI, Jean-Pierre DECOOL, Rémi DELATTE, Marie-Louise FORT, Guy GEOFFROY, Valérie LACROUTE, Philippe LE RAY, Véronique LOUWAGIE, Lionnel LUCA, Alain MARC, Patrice MARTIN-LALANDE, Alain MARTY, Jean-Claude MATHIS, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Jean-Luc MOUDENC, Bérengère POLETTI, Josette PONS, Claudine SCHMID, Thierry SOLÈRE, Claude STURNI, Patrice VERCHÈRE et Jean-Pierre VIGIER,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La réserve citoyenne constitue, avec la réserve opérationnelle, l’une des deux composantes de la réserve militaire. Elle a été créée dans cadre du nouveau format des armées issues de la professionnalisation initiée par le Président Chirac.

Elle accueille les Français volontaires, âgés de plus de 17 ans, pour servir en qualité de réserviste citoyen au sein d’une armée ou d’une formation rattachée. Ces volontaires font l’objet d’un agrément délivré par l’autorité militaire habilitée. L’agrément est une condition préalable à l’intégration dans la réserve citoyenne. Il ne préjuge pas de la fréquence ni des conditions de la participation du réserviste citoyen à des activités définies ou agréées par l’autorité militaire.

Autrefois, la loi incluait automatiquement dans la réserve citoyenne les anciens militaires soumis à l’obligation de disponibilité et non affectés dans la réserve opérationnelle. Elle comprenait en outre les anciens réservistes de la réserve opérationnelle ayant atteint la limite d’âge de leur grade. Cette diversité des sources de recrutement nuisait à la lisibilité du dispositif.

Une clarification était nécessaire. Elle a été l’une des motivations de la modification de la loi de 1999. Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la défense, expliquait en effet devant la commission de la défense nationale et des forces armées, le 15 novembre 2005 que « La distinction entre réserve opérationnelle et réserve citoyenne sera maintenue mais la première regroupera désormais les anciens militaires soumis à l'obligation de disponibilité et les volontaires tandis que la seconde ne comptera dans ses rangs que les seuls bénévoles affectés à la promotion du lien entre les armées et la Nation ».

Ainsi, l’article L. 4211-1 du code de la défense créé par la loi n° 99-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense, modifiée par la loi n° 2006-449 du 18 avril 2006, précise que :

« III. – La réserve militaire a pour objet de renforcer les capacités des forces armées dont elle est une des composantes pour la protection du territoire national, comme dans le cadre des opérations extérieures, d’entretenir l’esprit de défense et de contribuer au maintien du lien entre la nation et ses forces armées. Elle est constituée :

1° D’une réserve opérationnelle comprenant :

a) Les volontaires qui ont souscrit un engagement à servir dans la réserve opérationnelle auprès de l’autorité militaire ;

b) Les anciens militaires soumis à l’obligation de disponibilité ;

2° D’une réserve citoyenne comprenant les volontaires agréés mentionnés à l’article L. 4241-2. »

Aujourd’hui, la réserve citoyenne n’est donc plus le réceptacle des « anciens » et des « non affectés », et il n’y a plus d’automaticité : l’entrée dans la réserve citoyenne résulte de la rencontre entre un volontariat de servir et un intérêt marqué par l’autorité militaire.

La césure entre réserve opérationnelle et réserve citoyenne connaît toutefois un aménagement puisque, en fonction des besoins des forces armées, l’autorité militaire peut faire appel aux volontaires de la réserve citoyenne pour, avec leur accord, les affecter dans la réserve opérationnelle. Les intéressés souscrivent alors un engagement à servir dans la réserve opérationnelle. Cette passerelle est l’exception, la règle étant l’absence de porosité entre les deux réserves militaires.

Ainsi, la vocation de la réserve citoyenne est de contribuer, au titre d’un engagement volontaire et bénévole, au renforcement du lien entre la société civile et les forces armées, au développement de l’esprit de défense au sein de la communauté nationale, ainsi qu’au devoir de mémoire, et, le cas échéant, de fournir les renforts nécessaires à la réserve opérationnelle.

La réserve citoyenne existe désormais depuis 13 ans, mais sa visibilité, tant sur le plan civil que sur le plan militaire, n’est pas encore suffisante. Les militaires comme la société civile considèrent encore trop souvent les réservistes citoyens comme des civils, même si, depuis l’arrêté ministériel du 14 décembre 2007 les réservistes citoyens peuvent être autorisés « à titre exceptionnel » à porter « la tenue spécifique de la réserve citoyenne lors de prises d’armes, de cérémonies militaires ou de rencontres officielles ».

La réserve citoyenne est trop souvent confondue avec la réserve civile alors que les dispositions du code de la défense sont claires en la matière : la réserve citoyenne fait partie intégrante de la réserve militaire.

Afin de clarifier le statut des réservistes citoyens, l’article 1er de la présente proposition de loi prévoit de rédiger ainsi l’article L. 4211-5 du code de la défense : « Ont la qualité de militaires les réservistes quand ils exercent une activité pour laquelle ils sont convoqués en vertu de leur engagement à servir dans la réserve opérationnelle ou citoyenne, ou au titre de la disponibilité. »

En étant agréé par l’Autorité militaire, le réserviste citoyen devient collaborateur bénévole du service public. Il ne perçoit donc pas de rétribution pour les activités qu’il exerce pour le compte des armées à l’exception des remboursements de frais de mission que l’autorité militaire lui aura demandé d’accomplir. Contrairement à ses camarades de la réserve opérationnelle, le réserviste citoyen n’a pas un nombre de jours d’activité annuelle défini.

Le statut du réserviste citoyen, en tant que collaborateur bénévole du service public, ne lui permet pas, comme pour le réserviste opérationnel, de disposer jours d’activité annuelle définis. Il est ainsi contraint d’effectuer ses actions au profit des armées, sur son temps libre, soit le week-end, soit en posant des journées de congés.

Afin de combler cette lacune, l’article 2 propose d’accorder aux réservistes citoyens le même statut que celui des réservistes opérationnels en terme de périodes disponibles, en inscrivant les employeurs des réservistes citoyens dans une véritable démarche cohérente. La disponibilité offerte par l’entreprise employant le réserviste citoyen serait de 5 jours par an, afin de ne pas pénaliser son activité.

L’entreprise qui permettra la disponibilité de ses réservistes citoyens en lui maintenant son salaire durant les 5 jours pourra se voir nommée « Partenaire de la Défense », récompensant ainsi son engageant en direction de la Défense.

Le réserviste citoyen se voit agréé par l’Autorité militaire d’un grade « Ad Honores ». Ce grade d’assimilation ne lui confère aucune autorité de commandement et ne peut être transformé en grade équivalent dans la réserve opérationnelle et l’armée d’active. Ce grade lui conforte le réserviste citoyen dans son appartenance à la réserve militaire et lui donne accès à divers lieux réservés aux militaires (Cercles des armées, Cercle sportif et artistique de Garnison, …).

Cependant, la déclinaison entre les différentes armées de la mise en application de la loi relative à la réserve citoyenne, ne donne pas lieu à une uniformisation. Ainsi l'armée de terre et l’armée de l’air disposaient d’environ 660 réservistes citoyens fin 2011 alors que la Marine nationale ne comptait quant à elle que 250 réservistes citoyens dans ses rangs au 31 décembre 2012.

De même, alors que l’Armée de terre attribue un grade d’assimilation au premier grade de chaque groupe de grades (officiers supérieurs, officiers subalternes, sous-officiers supérieurs et sous-officiers subalternes, (Commandant, Sous-lieutenant, Adjudant, Sergent) pour les personnels venant directement de la société civile, selon l’Instruction N° 93/DEF/CAB/CSRM/SP, les personnels venant de la réserve opérationnelle ou de l’active conservent leur grade.

L’Armée de l’Air, pour sa part, a décliné la mise en œuvre
de la réserve selon les dispositions de l’Instruction n° 331/DEF/EMAA/GMG/DRAA/CDT. Cette instruction prévoit la possibilité de réserviste citoyen du rang Aviateur de 2e classe (simple soldat). Elle précise les conditions d’attribution du grade pour le réserviste ainsi que les conditions pour l’avancement au grade supérieur.

On peut ainsi constater qu’il existe de véritables différences entre les Armées quant à l’attribution de grades ou à la progression dans un grade.

L’attribution d’un grade dans la réserve citoyenne étant parfois très aléatoire voire discriminatoire en fonction de l’importance, parfois politique, que peut avoir le candidat. La discussion de la présente proposition de loi serait également l’occasion d’envisager une harmonisation de l’attribution des grades dans un cadre « interarmée ».

L’article 3 prévoit, en récompense des services rendus par le réserviste citoyen, la possibilité de lui permettre d’obtenir l’honorariat de son grade après 15 années passées au service de la réserve citoyenne ou à la limite d’âge supérieure de son grade. Ce grade honoraire récompenserait à titre permanent l’engagement dans la durée du réserviste citoyen qui aura œuvré au profit des armées.

Tel est l’objet de la proposition de loi que nous vous prions, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

À l’article L. 4211-5 du code de la défense, après le mot : « opérationnelle », sont insérés les mots : « ou citoyenne, ».

Article 2

Après l’article L. 4241-2 du code de la défense, il est inséré un article L. 4241-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 4241-3. – Le volontaire de la réserve citoyenne peut accomplir son engagement pendant son temps de travail sans solliciter l’accord de son employeur dans la limite de 5 jours par an. Il doit prévenir l’employeur de son absence un mois au moins avant le début de celle-ci. »

Article 3

Le premier alinéa de l’article L. 4211-4 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les réservistes citoyens peuvent obtenir l’honorariat de leur grade après 15 années passées au service de la réserve citoyenne ou à la limite d’âge supérieure de leur grade. »


© Assemblée nationale