N° 1195 - Proposition de loi de M. Yves Foulon tendant à créer un service national citoyen obligatoire



N° 1195

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 juin 2013.

PROPOSITION DE LOI

tendant à créer un service national citoyen obligatoire,

(Renvoyée à la commission de la défense nationale et des forces armées, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Yves FOULON, Dino CINIERI, Arlette GROSSKOST, Alain CHRÉTIEN, Jean-Pierre DECOOL, Guillaume LARRIVÉ, Jean-Paul TUAIVA, Gérard CHERPION, Jean-Claude BOUCHET, Jean-Luc MOUDENC, Damien ABAD, Lionnel LUCA, Guy GEOFFROY, Sylvain BERRIOS, Laurent FURST, Olivier AUDIBERT-TROIN, Isabelle LE CALLENNEC, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Yannick MOREAU, Alain MARLEIX, Bernard REYNÈS, Franck GILARD, Daniel FASQUELLE et Véronique BESSE,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le service militaire était unanimement reconnu comme un moyen efficace pour gommer les différences sociales, ethniques et religieuses. Le 28 mai 1996, le Président de la République Jacques Chirac a annoncé la professionnalisation des armées et la fin du service militaire obligatoire, malgré les réserves énoncées dans le rapport « la France et son service » issu des travaux de la mission d’information de l’Assemblée nationale présidé par Philippe Séguin.

Le 8 novembre 1997 est publiée la loi n° 97-1019 portant réforme du service national au Journal officiel. Elle officialise la suspension de la conscription pour tous les jeunes nés après 1979 et crée la Journée d’appel de préparation à la défense (JAPD).

Cette suppression du service militaire a été globalement saluée par toute la classe politique car sur un plan strictement militaire, l’Armée a gagné en qualité.

Pourtant, 15 ans après l’adoption de cette loi, on s’aperçoit que la fin de la conscription a eu un réel impact sur la cohésion de la jeunesse.

Dans le contexte historique des émeutes de novembre 2005, alors que le Président de la République Jacques Chirac venait d’annoncer la création du « service civil volontaire », le journal La Vie lançait trois jours plus tard « Appel pour un service obligatoire » insistant sur le rôle civique que jouerait un tel service « citoyen », d’où la nécessité qu’il soit obligatoire. Il a été signé par 10 000 personnes dont 443 parlementaires de tous les partis politiques et de nombreuses personnalités.

Si le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 n’a pas évoqué cette question, les travaux menés en 2009 par l’ancien ministre de l’Éducation nationale, Luc Ferry, puis par le Haut-Commissaire à la Jeunesse Martin Hirsch, ont abouti en mars 2010, sous l’impulsion du Président de la République Nicolas Sarkozy, à la création d’un « service civique » (facultatif) sous l’égide d’un groupement d’intérêt public, l’Agence du service civique et de l’Éducation populaire, en remplacement du « service civil volontaire » de 2006 qui faute de financement n’avait pas été mis en œuvre.

Si les modes d’appartenance à la citoyenneté ont évolué, la nécessité de développer la cohésion sociale, l’intégration et l’apprentissage du civisme demeure. La loi de 2010 a donc établit un double dispositif : le service civique, de 6 à 12 mois, s’adresse aux jeunes de 16 à 25 ans et, pour les plus de 25 ans, est créé un volontariat de service civique, de 6 à 24 mois. Il prend le relais du service civil et se superpose aux formes de volontariat civil. Il est effectué moyennant indemnité dans des associations agréées par l’Agence du service civique et de l’Éducation populaire, au sein des collectivités locales ou pour l’État, dans les domaines philanthropique, éducatif, environnemental, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial ou culturel. L’objectif était de toucher 10 000 volontaires en 2010, puis 25 000 en 2011, 40 000 en 2012, et enfin 75 000 en 2015, ce qui représenterait 10 % d’une classe d’âge.

Néanmoins, nombreux sont ceux qui craignent une confusion entre service et engagement associatif, et se prononcent par conséquent en faveur de l’établissement d’un service obligatoire, véritable outil d’intégration sociale.

C’est pourquoi la présente proposition de loi tend à créer un « service citoyen » qui durerait 3 mois fractionnables, et pourrait être militaire, humanitaire ou associatif. Il permettrait aux jeunes de s’engager généreusement pour une cause, d’agir pour autrui, d’être utile à la collectivité, d’apprendre à vivre en groupe, de rencontrer des jeunes issus de milieux différents, et d’acquérir des compétences nouvelles. Il pourrait être effectué en 2 ou 3 périodes, afin de ne pas retarder les jeunes filles et jeunes hommes dans leur cursus universitaire ou professionnel, et se dérouler en France ou à l’étranger.

Au-delà du secteur de la Défense, les jeunes pourraient découvrir la diversité du monde associatif : secourisme, aide aux personnes âgées ou handicapées, protection de l’environnement, arts, sports, humanitaire, restauration du patrimoine...

Ce serait également l’occasion pour certains de mieux connaître les collectivités dans lesquelles ils vivent : CCAS (centre communal d’action sociale), conseils de quartier, CLIS (centre de liaison et d’initiatives sociales), animation de groupe d’enfants pendant les vacances scolaires (travaux manuels, jeux, sports...), cours de soutien scolaire dans les quartiers défavorisés...

Tel est, Mesdames, Messieurs, l’objet de la présente proposition de loi que nous vous demandons de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Il est créé un service national citoyen obligatoire pour toutes les jeunes filles et tous les jeunes hommes. Ce service doit être effectué à partir de l’âge de dix-huit ans, et au plus tard un an après la fin des études. Il dure trois mois et peut être accompli en deux ou trois périodes.

Article 2

Le service national citoyen peut s’effectuer dans les domaines suivants : défense, humanitaire, coopération, solidarité, secourisme, environnement ou monde associatif culturel, artistique ou sportif.

Article 3

La mise en œuvre de la présente loi est assurée par un délégué interministériel.

Article 4

Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application de la présente loi et notamment les coopérations à mettre en œuvre avec les collectivités publiques et privées intéressées.

Article 5

Les charges pour l’État qui pourraient résulter de l’application de la présente loi sont compensées par le relèvement à due concurrence de la taxe visée à l’article 991 du code général des impôts.

Les charges pour les collectivités territoriales qui pourraient résulter de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par le relèvement de la dotation globale de fonctionnement et corrélativement pour l’État par la majoration de la taxe visée à l’article 991 du code général des impôts.


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