N° 2593 - Proposition de loi de M. Guénhaël Huet visant à protéger les enfants des dérives sectaires à caractère religieux de leurs parents



N° 2593

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 février 2015.

PROPOSITION DE LOI

visant à protéger les enfants des dérives sectaires
à caractère religieux de leurs parents,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Guénhaël HUET, Élie ABOUD, Nicole AMELINE, Julien AUBERT, Jacques Alain BÉNISTI, Jean-Claude BOUCHET, Valérie BOYER, Éric CIOTTI, Jean-Louis COSTES, Édouard COURTIAL, Jean-Michel COUVE, Jean-Pierre DECOOL, Lucien DEGAUCHY, Nicolas DHUICQ, Dominique DORD, Jean-Pierre DOOR, David DOUILLET, Daniel FASQUELLE, Laurent FURST, Guy GEOFFROY, Philipe GOUJON, Arlette GROSSKOST, Antoine HERTH, Michel HEINRICH, Michel HERBILLON, Sébastien HUYGHE, Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, Laure de LA RAUDIÈRE, Valérie LACROUTE, Véronique LOUWAGIE, Lionnel LUCA, Thierry MARIANI, Alain MARLEIX, Olivier MARLEIX, Patrice MARTIN-LALANDE, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Jacques MYARD, Bernard PERRUT, Bérengère POLETTI, Josette PONS, Jean-Luc REITZER, Paul SALEN, Claude STURNI, Michèle TABAROT, Jean-Charles TAUGOURDEAU, Guy TEISSIER, Michel TERROT, Patrice VERCHÈRE et Marie-Jo ZIMMERMANN,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France rencontre, depuis quelques années, un phénomène de radicalisation religieuse à caractère sectaire. En 2010, entre 50 000 et 60 000 enfants étaient sous l’emprise de dérives sectaires.

Devant les dérives sectaires à caractère religieux de leur conjoint, de leur frère, sœur, fils ou fille, les familles concernées se retrouvent dans l’impasse quand la question de la protection d’enfants mineurs se pose et dans un profond désarroi face à une justice qu’ils estiment inadaptée en la matière.

En effet, dans certains cas, la justice accorde, malgré les preuves évidentes de radicalisation religieuse à caractère sectaire, un droit de visite sans surveillance au parent concerné au nom de la liberté de conscience.

Par ailleurs, on observe un manque cruel d’informations et de formation des travailleurs sociaux qui sont confrontés à ce type de situations. Du côté de la justice, les inquiétudes des familles touchées se heurtent à une absence de prise en compte de leurs craintes au moment de la décision concernant les modalités d’exercice de l’autorité parentale et du droit de visite.

Dans ces affaires, il n’existe pas de réponses spécifiques dictées par la loi. Face aux gourous thérapeutiques qui mettent en danger la vie des enfants, face au développement de l’extrémisme de certaines religions, il devient impératif de renforcer l’arsenal juridique pour que les juges saisis de ce type d’affaires puissent agir et protéger les enfants concernés.

C’est pourquoi cette proposition de loi présente plusieurs dispositions pour que les dérives sectaires à caractère religieux constituent un élément rédhibitoire à la conservation de l’autorité parentale et à l’accord d’un droit de visite ou d’hébergement pour un enfant mineur.

La première fonction de la loi est de protéger, et notamment les plus faibles. Le seul objectif de cette proposition de loi est de protéger les enfants car ils sont, à l’évidence, les plus exposés aux dérives sectaires des membres de leurs familles.

L’article 1er introduit dans l’article 373 du code civil la notion de « dérive sectaire à caractère religieux » dans les motifs de privation de l’exercice de l’autorité parentale d’un des parents.

L’article 2 précise clairement dans la loi que les dérives sectaires à caractère religieux constituent un motif grave pouvant entraîner la suspension du droit de visite et d’hébergement par le parent concerné.

L’article 3 indique que l’un des deux parents ou un tiers peut saisir le juge des affaires familiales si l’autre parent peut être considéré comme une menace pour son enfant en raison de ses dérives sectaires à caractère religieux.

L’article 4 introduit la possibilité pour le juge qui doit statuer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale de prendre en compte les éventuelles enquêtes de police qui auraient été menées à l’encontre de l’un des deux parents.

L’article 5 ajoute à l’article 373-2-11 du code civil un 7° précisant que le juge qui se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale prend en compte les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, que l’un des parents est amené à exercer sur son enfant.

L’article 6 donne la possibilité au juge des affaires familiales, devant statuer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale et du droit de visite, de demander une enquête de police s’il existe un soupçon de dérive sectaire à caractère religieux pour l’un des deux parents.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

À l’article 373 du code civil, après le mot : « absence », sont insérés les mots : « , de ses dérives sectaires à caractère religieux ».

Article 2

L’alinéa 2 de l’article 373-2-1 du code civil est complété par les mots : « tels que les dérives sectaires à caractère religieux ».

Article 3

L’article 373-2-8 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le juge peut également être saisi, par l’un des parents ou par un tiers, lorsque l’autre parent est considéré comme une menace pour son enfant en raison des dérives sectaires à caractère religieux. »

Article 4

Le 5° de l’article 373-2-11 du même code est complété par les mots : « ainsi que les éventuelles enquêtes de police ».

Article 5

L’article 373-2-11 du même code est complété par un 7° ainsi rédigé :

« 7° les pressions ou les violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur son enfant. »

Article 6

À l’article 373-2-12 du même code, après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de soupçon de dérive sectaire à caractère religieux de l’un des parents, le juge des affaires familiales peut demander une enquête de police afin de vérifier ces soupçons avant de prendre toute décision fixant les modalités de l’exercice de l’autorité parentale et du droit de visite. »


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