N° 2898 - Proposition de loi de M. Bernard Gérard visant à lutter contre le cyber-harcèlement et à protéger les mineurs disposant d'un abonnement à un téléphone mobile connecté à Internet



N° 2898

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 juin 2015.

PROPOSITION DE LOI

visant à lutter contre le cyber-harcèlement et à protéger les mineurs disposant d’un abonnement à un téléphone mobile connecté à Internet,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Bernard GÉRARD, Dino CINIERI, Damien ABAD, Bernard ACCOYER, Nicole AMELINE, Laurence ARRIBAGÉ, Julien AUBERT, Olivier AUDIBERT TROIN, Jacques Alain BÉNISTI, Xavier BERTRAND, Étienne BLANC, Marcel BONNOT, Jean-Claude BOUCHET, Valérie BOYER, Bernard BROCHAND, Guillaume CHEVROLLIER, Alain CHRÉTIEN, Éric CIOTTI, Philippe COCHET, Jean-François COPÉ, Marie-Christine DALLOZ, Gérald DARMANIN, Marc-Philippe DAUBRESSE, Bernard DEBRÉ, Jean-Pierre DECOOL, Lucien DEGAUCHY, Nicolas DHUICQ, Jean-Pierre DOOR, Dominique DORD, Daniel FASQUELLE, Marie-Louise FORT, Yves FOULON, Marc FRANCINA, Laurent FURST, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Annie GENEVARD, Alain GEST, Daniel GIBBES, Franck GILARD, Charles-Ange GINESY, Jean-Pierre GIRAN, Claude GOASGUEN, Philippe GOSSELIN, Philippe GOUJON, Arlette GROSSKOST, Jean-Claude GUIBAL, Michel HEINRICH, Patrick HETZEL, Laure de LA RAUDIÈRE, Thierry LAZARO, Marc LE FUR, Bruno LE MAIRE, Véronique LOUWAGIE, Lionnel LUCA, Hervé MARITON, Patrice MARTIN-LALANDE, Jean-Claude MATHIS, Pierre MORANGE, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Alain MOYNE-BRESSAND, Dominique NACHURY, Yves NICOLIN, Valérie PÉCRESSE, Jacques PÉLISSARD, Bernard PERRUT, Michel PIRON, Bérengère POLETTI, Josette PONS, Christophe PRIOU, Jean-Luc REITZER, Frédéric REISS, Arnaud RICHARD, Martial SADDIER, Paul SALEN, Jean-Marie SERMIER, Thierry SOLÈRE, Claude STURNI, Jean-Charles TAUGOURDEAU, Patrice VERCHÈRE, Philippe VITEL, Michel VOISIN, Marie-Jo ZIMMERMANN, Michel ZUMKELLER,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les opérateurs de téléphonie mobile sont soumis à un certain nombre d’obligations qui concernent notamment la couverture du territoire, la qualité de service, la fourniture de certains services et le respect de règles relatives à la santé et à l’environnement.

J’ai souhaité ajouter la prévention des risques de cyber-harcèlement lors de la souscription d’abonnements à un forfait de téléphonie mobile connecté à Internet pour un mineur.

Le phénomène du cyber-harcèlement est devenu un véritable fléau qui touche aujourd’hui plus de 1,4 million de jeunes mineurs, selon les chiffres récents avancés lors d’un reportage très inquiétant de France TV diffusé à l’occasion de la journée européenne de l’Internet sans crainte en février 2015. Ce phénomène reste encore très difficile à évaluer, le ministère de l’éducation nationale a identifié quant à lui 700 000 cas de harcèlement scolaire. Le comportement des mineurs, celui de la génération Y sur l’Internet mobile, rend urgente la prise de mesures préventives et éducatives pour les familles et toutes les personnes en charge de l’encadrement des enfants et des jeunes mineurs. L’Internet mobile participe à la construction de l’identité et de la personnalité de nos enfants.

Les familles aidées parfois par des pressions commerciales des opérateurs, par souci de sécurité, par besoin de mieux gérer le quotidien des enfants et pour garder un contact permanent avec eux ou par la pression des modes des usages des réseaux sociaux, offrent des téléphones mobiles connectés à Internet à leurs enfants de plus en plus jeunes.

Dès l’âge de 8-13 ans les enfants sont confrontés à des moqueries à l’école, dans leur entourage et avec leurs amis. Ces moqueries trouvent un prolongement multi-supports et multiplateformes sur Internet et notamment sur les réseaux sociaux. Plus de 88 % des enfants de 12 ans possèdent un abonnement à un téléphone mobile connecté en France et ils sont équipés dès l’âge de 8 ans. Ce taux d’équipement des jeunes mineurs est en croissance de plus de 3 points chaque année.

Les études indiquent que les parents habituent leurs enfants aux téléphones et tablettes dès l’âge de 6 mois. La tendance aux États-unis indique que 63 % des enfants de moins de 8 ans utilisent un téléphone mobile connecté (Common sens media, juin 2013). Le Président des États-unis s’est lui-même engagé dans la lutte contre le cyber-harcèlement avec son épouse Michèle Obama en lançant un programme de « Bullying prevention » (prévention du harcèlement).

Il devient essentiel d’accompagner la croissance de ce taux d’équipement en téléphonie mobile connectée par plus d’informations sur les bonnes pratiques et la lutte contre le cyber-harcèlement.

La protection des mineurs sur Internet est une priorité, c’est un engagement citoyen, une composante des droits de l’enfant. L’éducation et la prévention sont l’objet de cette présente proposition de loi, afin de faire prévaloir l’intérêt de l’enfant.

Le téléphone mobile n’est plus un accessoire de vie mais un outil de service pour tous, parfois vital, et les numéros d’appels d’urgence sont par défaut accessibles depuis tous les mobiles. Le téléphone mobile connecté est partie intégrante de notre quotidien et nos enfants grandissent avec l’Internet mobile. Demain ils seront plongés dans un univers tout connecté avec la révolution des objets connectés. Il apparaît nécessaire d’ajouter l’information des adultes et des mineurs au moment de la souscription à un abonnement de l’ensemble des applications pédagogiques préventives de lutte contre le cyber-harcèlement gratuites accessibles sur les téléphones.

Comme les numéros d’appels d’urgence, il faut associer une obligation d’informer toute personne qui souscrit un abonnement pour un mineur de l’ensemble des applications qui existent en l’état de l’art, au moment de la souscription. Aux règles relatives à la durée de l’abonnement, sa résiliation nous devons ajouter celles de l’information du consommateur sur les risques de cyber-harcèlement et la protection des mineurs.

Le cyber-harcèlement passe par le téléphone mobile à plus de 90 % selon les études européennes et américaines (I-Safe, Telefono Azzurro). Parce que, sans doute, les enfants sont livrés à eux-mêmes sur leur portable et n’ont pas connaissance de la définition du harcèlement ni de ce qui peut le caractériser, il est important de donner aux enfants tous les outils pour les aider et qu’ils puissent avoir connaissance de toutes les applications accessibles sur leur téléphone pour gérer les contenus choquants reçus le plus souvent par les amis.

Au début des années deux mille, ce qui importait était les outils de contrôle parental qui sont aujourd’hui pratiquement inopérants pour les problèmes liés au harcèlement. Il est de la responsabilité des élus de veiller à la bonne information des consommateurs en matière des usages de l’Internet en mobilité. Le cyber-harcèlement est non seulement lié à un usage des jeunes du mobile qui échappe la plupart du temps aux adultes qui n’ont pas conscience de l’univers tout connecté qui est pourtant le quotidien de leurs enfants.

Il existe des applications qui sont conformes aux usages des mineurs : des smileys et des images ou captures d’écran qui permettent à l’enfant de se soulager en demandant de l’aide en direct pour interpréter un commentaire ou une photo. Les enfants victimes de harcèlement s’enferment souvent dans la culpabilité et le silence, ou bien cherchent la bagarre, ont des troubles du sommeil, des vomissements, des troubles d’anxiété ou des troubles liés à la nutrition. Et souvent les familles ou l’entourage pédagogique décèlent trop tard les symptômes, une fois que les enfants sont plongés dans des dépressions, des troubles d’anorexie et des drames, comme des suicides, arrivent à des enfants de plus en plus jeunes dès l’âge de 10-13 ans. Le téléphone mobile connecté peut non seulement devenir une source de conflit dans les familles, selon 69 % des parents, d’après une étude TNS-Sofres réalisée pour l’Union nationale des associations familiales (UNAF), mais peut surtout devenir un calvaire pour les enfants victimes de harcèlement.

Le code de la consommation dispose d’un certain nombre de règles concernant l’accès au public des services de communication électroniques, auquel j’ajoute par la présente proposition de loi un élément d’information supplémentaire concernant la protection des mineurs, les bonnes pratiques et la lutte contre le cyber-harcèlement.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Après le m) de l’article L. 121-83 du code de la consommation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les contrats souscrits au bénéfice d’un mineur consommateur doivent mentionner les applications gratuites accessibles en l’état de l’art sur les téléphones mobiles connectés à Internet qui permettent de lutter contre le cyber-harcèlement. »


© Assemblée nationale