N° 3774 - Proposition de loi de M. Bruno Le Roux relative à l'exercice, par la Croix-Rouge française, de sa mission statutaire de rétablissement des liens familiaux



N° 3774

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 mai 2016.

PROPOSITION DE LOI

relative à l’exercice, par la Croix-Rouge française,
de sa mission statutaire de rétablissement des liens familiaux,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Bruno LE ROUX, Françoise DUMAS, Bernadette LACLAIS, Michèle DELAUNAY, Gérard BAPT,

et les membres du groupe socialiste, républicain et citoyen (1) et apparentés (2)

députés.

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(1) Ce groupe est composé de Mesdames et Messieurs : Ibrahim Aboubacar, Patricia Adam, Sylviane Alaux, Éric Alauzet, Jean-Pierre Allossery, François André, Nathalie Appéré, Kader Arif, Christian Assaf, Pierre Aylagas, Alexis Bachelay, Guillaume Bachelay, Jean-Paul Bacquet, Dominique Baert, Guy Bailliart, Alain Ballay, Gérard Bapt, Frédéric Barbier, Serge Bardy, Claude Bartolone, Christian Bataille, Delphine Batho, Marie-Noëlle Battistel, Laurent Baumel, Philippe Baumel, Nicolas Bays, Catherine Beaubatie, Jean-Marie Beffara, Luc Belot, Karine Berger, Gisèle Biémouret, Philippe Bies, Erwann Binet, Jean-Pierre Blazy, Yves Blein, Patrick Bloche, Daniel Boisserie, Christophe Borgel, Florent Boudie, Marie-Odile Bouillé, Christophe Bouillon, Brigitte Bourguignon, Malek Boutih, Kheira Bouziane, Emeric Bréhier, Jean-Louis Bricout, Jean-Jacques Bridey, Isabelle Bruneau, Sabine Buis, Jean-Claude Buisine, Sylviane Bulteau, Vincent Burroni, Alain Calmette, Jean-Christophe Cambadélis, Colette Capdevielle, Yann Capet, Christophe Caresche, Marie-Arlette Carlotti, Fanélie Carrey-Conte, Martine Carrillon-Couvreur, Christophe Castaner, Laurent Cathala, Jean-Yves Caullet, Christophe Cavard Nathalie Chabanne, Guy Chambefort, Jean-Paul Chanteguet, Marie-Anne Chapdelaine, Guy-Michel Chauveau, Dominique Chauvel, Pascal Cherki, Jean-David Ciot, Alain Claeys, Jean-Michel Clément, Marie-Françoise Clergeau, Romain Colas, David Comet, Philip Cordery, Valérie Corre, Jean-Jacques Cottel, Catherine Coutelle, Jacques Cresta, Pascale Crozon, Frédéric Cuvillier, Seybah Dagoma, Karine Daniel, Yves Daniel, Carlos Da Silva, Pascal Deguilhem, Florence Delaunay, Michèle Delaunay, Guy Delcourt, Carole Delga, Jacques Dellerie, Pascal Demarthe, Sébastien Denaja, Françoise Descamps-Crosnier, Jean-Louis Destans, Michel Destot, Fanny Dombre-Coste, René Dosière, Philippe Doucet, Sandrine Doucet, Françoise Dubois, Jean-Pierre Dufau, Anne-Lise Dufour-Tonini, Françoise Dumas, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Laurence Dumont, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Philippe Duron, Olivier Dussopt, Henri Emmanuelli, Corinne Erhel, Sophie Errante, Marie-Hélène Fabre, Alain Fauré, Martine Faure, Olivier Faure, Hervé Féron, Richard Ferrand, Aurélie Filippetti, Geneviève Fioraso, Hugues Fourage, Jean-Marc Fournel, Valérie Fourneyron, Michèle Fournier-Armand, Michel Françaix, Christian Franqueville, Jean-Claude Fruteau, Jean-Louis Gagnaire, Geneviève Gaillard, Yann Galut, Guillaume Garot, Renaud Gauquelin, Jean-Marc Germain, Jean-Patrick Gille, Jean Glavany, Daniel Goldberg, Geneviève Gosselin-Fleury, Pascale Got, Marc Goua, Linda Gourjade, Laurent Grandguillaume, Jean Grellier, Élisabeth Guigou, Chantal Guittet, David Habib, Razzy Hammadi, Benoît Hamon, Mathieu Hanotin, Joëlle Huillier, Monique Iborra, Françoise Imbert, Michel Issindou, Éric Jalton, Serge Janquin, Henri Jibrayel, Romain Joron, Régis Juanico, Laurent Kalinowski, Marietta Karamanli, Philippe Kemel, Chaynesse Khirouni, Bernadette Laclais, Conchita Lacuey, François-Michel Lambert, François Lamy, Anne-Christine Lang, Colette Langlade, Jean Launay, Pierre-Yves Le Borgn’, Jean-Yves Le Bouillonnec, Gilbert Le Bris, Anne-Yvonne Le Dain, Jean-Yves Le Déaut, Viviane Le Dissez, Annie Le Houerou, Annick Le Loch, Jean-Pierre Le Roch, Bruno Le Roux, Marie-Thérèse Le Roy, Marie Le Vern, Marylise Lebranchu, Michel Lefait, Dominique Lefebvre, Patrick Lemasle, Catherine Lemorton, Christophe Léonard, Annick Lepetit, Arnaud Leroy, Michel Lesage, Bernard Lesterlin, Michel Liebgott, Martine Lignières-Cassou, Audrey Linkenheld, François Loncle, Lucette Lousteau, Victorin Lurel, Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, Jean-René Marsac, Philippe Martin, Martine Martinel, Frédérique Massat, Véronique Massonneau, Sandrine Mazetier, Michel Ménard, Patrick Mennucci, Kléber Mesquida, Pierre-Alain Muet, Philippe Naillet, Philippe Nauche, Nathalie Nieson, Robert Olive, Maud Olivier, Monique Orphé, Michel Pajon, Luce Pane, Christian Paul, Rémi Pauvros, Germinal Peiro, Jean-Claude Perez, Sébastien Pietrasanta, Christine Pires Beaune, Philippe Plisson, Elisabeth Pochon, Pascal Popelin, Dominique Potier, Michel Pouzol, Régine Povéda, Patrice Prat, Christophe Premat, Joaquim Pueyo, François Pupponi, Catherine Quéré, Valérie Rabault, Monique Rabin, Dominique Raimbourg, Marie Récalde, Marie-Line Reynaud, Pierre Ribeaud, Eduardo Rihan Cypel, Denys Robiliard, Alain Rodet, Marcel Rogemont, Frédéric Roig, Barbara Romagnan, Bernard Roman, Gwendal Rouillard, René Rouquet, Alain Rousset, François de Rugy, Béatrice Santais, Odile Saugues, Gilbert Sauvan, Gilles Savary, Gérard Sebaoun, Christophe Sirugue, Julie Sommaruga, Suzanne Tallard, Pascal Terrasse, Sylvie Tolmont, Jean-Louis Touraine, Stéphane Travert, Catherine Troallic, Cécile Untermaier, Daniel Vaillant, Jacques Valax, Michel Vauzelle, Fabrice Verdier, Michel Vergnier, Patrick Vignal, Jean-Michel Villaumé, Jean-Jacques Vlody et Paola Zanetti.

(2) Marie-Françoise Bechtel, Chantal Berthelot, Jean-Luc Bleunven, Yves Goasdoué, Édith Gueugneau, Christian Hutin, Jean-Luc Laurent, Serge Letchimy, Gabrielle Louis-Carabin, Paul Molac, Hervé Pellois, Napole Polutélé et Boinali Said.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La Croix-Rouge française (CRF) a été créée le 25 mai 1864 et a pris la forme d’un établissement d’intérêt public par décret impérial du 26 juin 1866. Elle est devenue association reconnue d’utilité publique par ordonnance du 27 avril 1945 du gouvernement provisoire de la République française.

Régie par les Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels, dont la France est signataire, la Croix-Rouge française, en application de ces normes internationales, est auxiliaire des pouvoirs publics dans le domaine humanitaire.

Initialement circonscrit à un soutien aux services sanitaires des forces armées dans le domaine du secours aux blessés militaires, et élargi par la suite à la protection des civils en temps de guerre, l’auxiliariat de la Croix-Rouge française à l’égard des pouvoirs publics a progressivement évolué en temps de paix dans le cadre du développement de ses activités.

Cette mission consiste à prendre le relais de l’État au service de la population dans le domaine humanitaire. Ce concours de la Croix-Rouge française s’exerce, soit à la demande de l’État, soit sur proposition de la Croix-Rouge française. Conformément aux principes fondamentaux du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge (humanité, impartialité, neutralité, indépendance, volontariat, unité, universalité), la Croix-Rouge française peut être amenée à refuser la demande de concours de l’État. De son côté, l’État peut décider également de ne pas donner suite à une proposition de concours émanant de la Croix-Rouge française.

Les emblèmes de la croix rouge, du croissant rouge et du cristal rouge, définis par les Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels, apportent une protection aux services sanitaires des forces armées en période de conflit armé. Dans chaque pays, l’usage des emblèmes est réservé, en dehors du service de santé des armées, aux Sociétés nationales du Mouvement de la Croix-Rouge, du Croissant-Rouge, au Comité International de la Croix-Rouge et à la Fédération Internationale de la Croix-Rouge. Son usage par les hôpitaux publics afin de signaler leurs services d’urgence est toléré.

La Croix-Rouge française est aujourd’hui la première association française, tant par la diversité de ses actions dans le domaine de l’action sociale, médico-sociale, sanitaire et humanitaire en France et à l’étranger, que par la densité de son maillage territorial (cinquante-trois mille bénévoles et dix-huit mille salariés répartis au sein de huit cents unités et six cents établissements).

Elle est un acteur majeur lors de catastrophes naturelles et de situations d’exception et un interlocuteur privilégié de l’État dans la mise en œuvre des politiques publiques dans le domaine de la santé et de l’action sociale.

Elle exerce son action à l’étranger en lien avec les cent quatre-vingt-dix autres sociétés nationales de Croix-Rouge et de Croissant-Rouge réparties dans le monde.

Elle est à ce titre une organisation structurante exerçant depuis cent cinquante ans un rôle essentiel au sein de la société française.

Si ses missions en temps de paix sont largement tributaires de l’évolution des politiques publiques, elle exerce en tout temps deux missions statutaires en application des Conventions de Genève de 1949 et de leurs Protocoles additionnels, des résolutions statutaires et des engagements des conférences internationales du Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, qui sont le rétablissement des liens familiaux et la diffusion du droit international humanitaire.

Le rétablissement des liens familiaux : un service d’intérêt général

La mission de rétablissement des liens familiaux exercée par les sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge consiste à apporter une assistance aux familles que des situations de conflit ou de violence armés, des catastrophes d’origine naturelle ou humaine et toutes autres situations humanitaires, notamment les situations de migration internationale, ont séparées.

La Croix-Rouge française œuvre à rechercher les membres de familles dispersées, à rétablir et à maintenir le lien familial et à réunir ces familles (1). Cette mission trouve son fondement dans les quatre Conventions de Genève de 1949 et les Protocoles additionnels de 1977 ratifiés par la France (2), ainsi que dans les résolutions statutaires et les engagements des Conférences internationales du Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, dont la France est partie.

Les demandes de recherche sont introduites auprès des sociétés nationales ou du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) par des particuliers recherchant exclusivement un ou plusieurs membres de leurs famille et ce quels que soient la nationalité et le statut administratif de ces personnes (résidents, réfugiés, demandeurs d’asile, migrants, mineurs isolés étrangers, détenus…).

Toutes les demandes sont soumises à des critères très stricts appliqués dans l’ensemble du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Sont ainsi exclues les disparitions inquiétantes qui sont du ressort des autorités nationales, les recherches à caractère généalogique ou historique et les recherches de personnes sans lien de parenté.

Les demandes répondent à des critères d’éligibilité qui sont l’existence d’un lien familial entre le demandeur et la ou les personne(s) recherchée(s), et la cause de la rupture de contact qui doit être liée à une situation de conflit ou de violence armés, une catastrophe naturelle ou d’origine humaine, ou toute autre situation humanitaire.

Les demandes répondent également à un critère de territorialité :

– les demandes qui proviennent de l’étranger et qui visent à rechercher ou à rétablir et à maintenir le lien avec une personne sur le territoire national. Elles doivent obligatoirement émaner d’une société nationale de la Croix-Rouge ou du Croissant-Rouge ou du CICR qui l’adresse pour traitement à la Croix-Rouge française sur la base d’une demande exprimée par une personne vivant à l’étranger ;

– les demandes qui émanent d’une personne vivant sur le territoire national, quels que soient sa nationalité et son statut administratif et qui visent à rechercher ou à rétablir et à maintenir le lien avec un membre de sa famille situé à l’étranger. Ces demandes sont transmises pour traitement par la Croix-Rouge française à la société nationale du pays concerné ou au CICR dans les zones de conflits armés.

Cette mission se décline en quatre activités :

– la recherche de personnes : les personnes ayant perdu la trace de leurs proches, suite aux circonstances évoquées précédemment, peuvent s’adresser à la Croix-Rouge française ou à une autre composante du Mouvement international de la Croix-Rouge afin d’instruire une demande de recherche ;

– la réunification des familles : une fois le contact rétabli entre les membres des familles séparées, la Croix-Rouge française accompagne et conseille les familles dans leurs démarches ;

– la transmission de nouvelles familiales : lorsque tous les moyens de communication sont bloqués ou inaccessibles, l’échange de message Croix-Rouge permet aux familles de rétablir et/ou de maintenir le contact ;

– la transmission et l’obtention de documents émanant du Comité international de la Croix-Rouge (attestations de privation de liberté et titres de voyage du CICR) ou délivrés par les États (documents d’état-civil, certificats, attestations).

Dans le cadre des activités de recherche menées sur le territoire français, la Croix-Rouge française veille à respecter le droit au respect de la vie privée. Le traitement des données personnelles est assuré de manière confidentielle et conformément aux règles nationales encadrant la protection de ces données.

La collecte et le traitement de données personnelles dans le cadre de sa mission de rétablissement des liens familiaux ont été autorisés par la Commission Nationale Informatique et Liberté (référence IFP/TBE/NDT121124, demande d’autorisation n° 1523263). Dans sa délibération n° 2012-161 du 24 mai 2012, la CNIL reconnaît à cette activité la qualité de mission d’intérêt public.

À ce titre, la Croix-Rouge française a mis en place une plateforme électronique d’échanges d’informations permettant la transmission sécurisée avec les autres composantes du Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge de données personnelles ayant trait aux demandes de recherche.

Lorsque la Croix-Rouge française parvient à retrouver la personne recherchée, cette dernière peut choisir de rentrer ou pas en contact avec sa famille. La personne peut aussi demander expressément à ce que les autres composantes du Mouvement ne soient pas informées du résultat positif des recherches. La Croix-Rouge française fait toujours prévaloir le choix de la personne retrouvée et son droit à l’oubli. À cet effet, un formulaire d’autorisation de transmission des coordonnées doit impérativement être complété par la personne concernée. Le personnel du service de rétablissement des liens familiaux de la Croix-Rouge française est soumis, dans le cadre de son contrat de travail, au secret professionnel et s’engage à observer la discrétion la plus stricte quant aux informations auxquelles il pourrait avoir accès dans l’exercice de ses activités au sein de l’association.

La mission accomplie par la Croix-Rouge française au titre de son activité de rétablissement des liens familiaux est aujourd’hui d’autant plus indispensable que le ministère de l’intérieur n’assure plus depuis le printemps 2013 la mission de recherche dans l’intérêt des familles qu’il exerçait depuis la fin de la première guerre mondiale pour permettre aux membres d’une famille de se retrouver avec l’aide de la puissance publique.

Une circulaire du 26 avril 2013 a en effet abrogé la circulaire n° 83-52 du 21 février 1983 relative aux recherches dans l’intérêt des familles. Le service qui accomplissait cette mission au sein du ministère de l’Intérieur a ainsi été dissout sans qu’aucune offre de substitution ne soit créée, les demandeurs potentiels étant invités par la circulaire à se tourner vers « les réseaux sociaux de l’Internet ».

En 2015, 922 demandes ont été traitées par la Croix-Rouge française, dont 562 demandes de recherche, 258 messages Croix-Rouge, 79 pièces officielles délivrées et 23 situations de réunification familiale.

Afin de mener à bien cette mission statutaire, la Croix-Rouge française sollicite quotidiennement les administrations centrales, les services déconcentrés de l’État, les collectivités territoriales et divers établissements publics administratifs dans le but de recueillir tous les renseignements utiles pour éclaircir le sort de personnes recherchées en France par leurs proches qui se trouvent à l’étranger. En 2015, la Croix-Rouge française a été sollicitée par le CICR et les autres sociétés nationales afin de rechercher cent trente-six personnes se trouvant sur le territoire national. Deux tiers de ces demandes concernent des personnes séparées suite à la Seconde Guerre Mondiale. Le soutien des services de l’État est essentiel afin de pouvoir répondre à ce besoin de savoir des familles, notamment lorsque les séparations sont dues à des conflits anciens.

Pour autant, la Croix-Rouge française est régulièrement confrontée à un refus par les administrations et les services publics de la transmission de données personnelles concernant les personnes recherchées.

La transposition en droit national de la mission de rétablissement des liens familiaux de la Croix-Rouge française prévue par les conventions internationales, les résolutions statutaires et les engagements des conférences internationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge faciliterait l’exercice par la Croix Rouge de sa mission universelle et s’inscrirait dans une démarche déjà engagée par plusieurs États européens.

Ainsi l’Allemagne a adopté une loi reconnaissant la mission de rétablissement des liens familiaux de sa société nationale, explicitant son champ d’action et demandant aux administrations de faciliter son action. Le gouvernement belge, par décret, permet au service de rétablissement des liens familiaux de sa société nationale de bénéficier d’un accès au fichier central de la population de Belgique.

Enfin, les ministères britanniques de la Santé et de l’Intérieur ont signé des conventions avec le service de rétablissement des liens familiaux de la Croix-Rouge britannique détaillant leurs relations de travail et encadrant l’accès aux données de l’administration.

La Croix-Rouge française sollicite l’adoption de la proposition de loi qui suit et qui précise les conditions dans lesquelles la Croix-Rouge française exerce sa mission de rétablissement des liens familiaux et a accès à des données personnelles contenues dans des documents de nature administrative lorsqu’elles sont strictement nécessaires à la détermination du sort de la personne recherchée sur le territoire national.

L’accès aux documents de nature administrative étant encadré par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, il est prévu que la confidentialité ne pourra pas être opposée aux demandes émanant du service de rétablissement des liens familiaux de la Croix-Rouge française en considération de la stricte nécessité que représente la communication de ces données à caractère personnel dans la détermination du sort de la personne recherchée sur le territoire national.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Par dérogation aux dispositions de l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration, la Croix-Rouge française peut, dans le cadre de sa mission d’intérêt général de rétablissement des liens familiaux prévue par les protocoles additionnels aux conventions de Genève du 12 août 1949, obtenir communication auprès des administrations de l’État, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics administratifs, des organismes de sécurité sociale et des organismes qui assurent la gestion des prestations sociales, sur demande écrite et motivée, des informations relatives à la personne recherchée, figurant dans un document administratif ou un traitement de données, dans la mesure où ces informations sont indispensables à la détermination du sort de la personne recherchée sur le territoire national.

Article 2

La Croix-Rouge française peut, dans le cadre de sa mission d’intérêt général de rétablissement des liens familiaux prévue par les protocoles additionnels aux conventions de Genève du 12 août 1949, demander directement aux officiers de l’état civil dépositaires des actes les copies intégrales et extraits d’actes de l’état civil.

Article 3

Par dérogation aux dispositions de l’article L. 28 du code électoral, la Croix-Rouge française est habilitée, dans le cadre de sa mission d’intérêt général de rétablissement des liens familiaux prévue par les protocoles additionnels aux conventions de Genève du 12 août 1949, à saisir le représentant de l’État afin de vérifier l’inscription ou non d’une personne sur les listes électorales et, le cas échéant, de prendre communication des données relatives à cette personne.

Article 4

Tant que la personne concernée n’a pas été retrouvée, la Croix-Rouge française ne transmet à des tiers aucune information la concernant. Si la personne a été retrouvée par la Croix-Rouge française, aucune information la concernant ne peut être transmise à des tiers sans le consentement écrit de la personne. Si la personne est décédée, la Croix-Rouge française indique le décès, et, le cas échéant, le lieu de sépulture de la personne recherchée, aux tiers qui les lui demandent.

1 () Art. 1 des statuts de la Croix-Rouge : « La CRF s’engage à exercer une mission de rétablissement des liens familiaux afin de maintenir ou de rétablir les liens entre les membres d’une même famille et de faire la lumière sur le sort des personnes portées disparues, lorsqu’un conflit, une catastrophe naturelle ou d’origine humaine, ou tout autre situation, ayant une incidence sur le plan humanitaire vient rompre les liens familiaux. »

2 () Protocole I, art. 74 « Les Hautes Parties contractantes et les Parties au conflit faciliteront dans la mesure du possible le regroupement des familles dispersées en raison de conflits armés et encourageront notamment l’action des organisations humanitaires qui se consacrent à cette tâche conformément aux dispositions des Conventions et du présent protocole ».

Protocole I article 32 prévoit le principe général suivant : « Dans l'application de la présente Section [Personnes disparues et décédées], l'activité des Hautes Parties contractantes, des Parties au conflit et des organisations humanitaires internationales mentionnées dans les Conventions et dans le présent Protocole est motivée au premier chef par le droit qu'ont les familles de connaître le sort de leurs membres».


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