N° 4599 - Proposition de loi de M. Jean-Claude Bouchet visant à rendre obligatoire le port d’arme des policiers municipaux, et à renforcer leurs pouvoirs judicaires



N° 4599

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 avril 2017.

PROPOSITION DE LOI

visant à rendre obligatoire le port d’arme des policiers municipaux
et à
renforcer leurs pouvoirs judiciaires,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Jean-Claude BOUCHET,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les drames successifs qu’a connus la France mais également et surtout les atteintes aux forces de polices municipales dont ont malheureusement été victimes Aurélie Fouquet, jeune policière municipale, abattue par un commando armé sur la ville de Villiers-sur-Marne en mai 2010, mais également Clarissa Jean-Philippe, tuée en janvier 2015 à Montrouge, près de Paris, par un terroriste, auteur le lendemain de la prise d’otages meurtrière de l’Hyper Cacher, ont suscité l’émotion de l’opinion publique qui a pris conscience que nos policiers municipaux n’étaient pas toujours simplement des gardes champêtres, mais de véritables policiers, pouvant être mis en danger et risquer leur vie pour la sécurité de leurs concitoyens.

Il s’agit d’un véritable métier de la sécurité publique, comportant de nombreux risques.

Ces tragédies soulignent à quel point les policiers municipaux sont exposés eux aussi à la violence des criminels les plus dangereux.

Actuellement au nombre de 20 000, les policiers municipaux assurent chaque jour, aux côtés de la police nationale, la sécurité des communes ou intercommunalités qui ont fait le choix de se doter d’une force de police municipale.

Or l’article L. 511-5 du code de la sécurité intérieure renferme de profondes inégalités entre les agents de police.

Exerçant des missions sans cesse plus périlleuses face à des délinquants de plus en plus armés, les agents de la police municipale interviennent conjointement ou souvent en lieu et place de la police nationale ou de la gendarmerie.

Le ministre de l’intérieur a rappelé le 29 novembre 2016 que l’État ne décrèterait pas la généralisation de l’armement des polices municipales, cette décision appartenant aux maires en vertu du principe de « libre administration des collectivités ». La loi « antiterrorisme » du 21 juillet 2016 faisant suite à celle adoptée le 3 juin, autorise les maires à demander une autorisation de port d’arme pour leur police municipale sans avoir désormais à justifier d’une situation particulière, ce qui n’était pas le cas auparavant (article 16 de la loi). Dans une circulaire du 23 juillet 2016, l’ancien ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve écrit que les préfets ne sont « plus fondés à refuser une autorisation de port d’arme au seul motif des circonstances locales que constituent, par exemple, le niveau de délinquance, l’importance de la commune, ou encore la nature des interventions de la police municipale de cette commune ». Il demande néanmoins aux préfets de vérifier « scrupuleusement », par une enquête administrative, si le comportement des agents est compatible avec le port d’une arme.

Néanmoins, dans le contexte actuel en France, il apparaît légitime de rendre obligatoire le port d’arme pour les policiers municipaux et de laisser aux maires qui le souhaitent le soin de décider de ne pas armer les policiers municipaux de leur commune.

De même, toujours dans le contexte actuel, comment ne pas envisager le renforcement des missions des policiers municipaux en augmentant leurs pouvoirs judicaires en leur conférant la qualité d’officier de police judiciaire ou d’agent de police judiciaire.

En effet, au cours des débats précédant l’adoption de la LOPPSI, la commission des lois de l’Assemblée nationale avait introduit un nouveau chapitre relatif aux polices municipales, visant à accroître les pouvoirs judiciaires des agents. Il était ainsi proposé de conférer la qualité d’agent de police judiciaire aux directeurs de police municipale, de donner aux agents la possibilité d’effectuer des contrôles d’identité, enfin de leur permettre de mettre en œuvre des contrôles d’alcoolémie préventifs sur la voie publique.

À l’époque, selon le rapporteur du projet de loi à l’Assemblée nationale, il s’agissait « d’améliorer la coordination entre polices municipales et police nationale ou gendarmerie ». Il était, en outre, expressément mentionné qu’en tant qu’APJ, le directeur de la police municipale ne relèverait pas du maire, bien que celui-ci soit officier de police judiciaire (OPJ), « afin de ne pas mettre en place une filière de police judiciaire concurrente de la police ou de la gendarmerie ».

À l’époque, dans sa décision sur la LOPPSI, le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions qui conféraient la qualité d’agent de police judiciaire aux directeurs de police municipale et celles qui permettaient aux agents d’effectuer des contrôles d’identité. Il a, en effet, estimé qu’en l’absence de contrôle de l’autorité judiciaire sur les agents, ces dispositions allaient à l’encontre de l’article 66 de la constitution.

Cette décision avait alors mis un coup d’arrêt à l’accroissement des pouvoirs judiciaires des policiers municipaux.

Néanmoins, le contexte sécuritaire a grandement changé en France depuis ces discussions qui datent de 2012. La France est en guerre et nos forces de police, quelles qu’elles soient, doivent avoir les moyens de se défendre et défendre leurs concitoyens.

Tel est, Mesdames et Messieurs, l’objet de la présente proposition de loi qu’il vous est demandé d’adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

I. – L’article L. 511-5 du code de la sécurité intérieure est ainsi rédigé :

« Sauf décision motivée contraire prise par le maire, les agents de police municipale portent une arme individuelle.

« Lorsque l’agent est employé par un établissement public de coopération intercommunale et mis à la disposition de plusieurs communes dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L. 512-2, il porte une arme individuelle si l’ensemble des maires desdites communes ont donné leur accord.

« Un décret en Conseil d’État précise, par type de mission, les circonstances et les conditions dans lesquelles les agents de police municipale portent une arme. Il détermine, en outre, les catégories et les types d’armes susceptibles d’être autorisés, leurs conditions d’acquisition et de conservation par la commune ou par l’établissement public de coopération intercommunale et les conditions de leur utilisation par les agents. Il précise les modalités de la formation que ces derniers reçoivent à cet effet. »

II. – Le début des articles L. 2122-24 et L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé : « Sans préjudice de l’article L. 511-5 du code de la sécurité intérieure, le maire… (le reste sans changement) ».

Article 2

I. – Après le cinquième alinéa de l’article 16 du code de procédure pénale, il est inséré un 5° ainsi rédigé :

« 5° Les directeurs de police municipale. »

II. – Après le sixième alinéa de l’article 20 du code de procédure pénale, il est inséré un 6° ainsi rédigé :

« 6° Les directeurs de police municipale. »

Article 3

La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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