N° 3355 - Rapport de Mme Brigitte Allain sur la proposition de loi de Mme Brigitte Allain et plusieurs de ses collègues visant à favoriser l'ancrage territorial de l'alimentation (3280)




N
° 3355

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 décembre 2015

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES,
SUR LA PROPOSITION DE
LOI
visant à favoriser l’
ancrage territorial de l’alimentation
(n° 3280)

Par Mme Brigitte ALLAIN,

Députée.

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Voir le numéro : 3280.

SOMMAIRE

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Pages

I. IL EST TEMPS DE FAVORISER L’AGRICULTURE DURABLE ET DE PROXIMITÉ 9

A. DÉFINIR L’AGRICULTURE DURABLE ET LA PROXIMITÉ 9

1. L’agriculture durable 9

2. Les produits biologiques 10

3. La difficile définition de la proximité 11

B. UNE DEMANDE SOCIÉTALE FORTE 12

1. La santé 12

2. L’environnement 12

3. Le développement économique des territoires 14

C. EN DÉPIT DU POTENTIEL, LA FRANCE À LA PEINE 14

1. Les multiples objectifs annoncés n’ont pas été atteints, faute d’obligation législative 14

2. Le retard français : les collectivités veulent de l’offre, les agriculteurs veulent de la demande 16

3. Les producteurs biologiques et ceux pratiquant les circuits courts sont pourtant moins touchés par les crises 16

II. LES CONDITIONS DE LA VALORISATION DES PRODUITS ISSUS DE L’AGRICULTURE DURABLE ET DE PROXIMITÉ 17

A. INTÉGRER LES POLITIQUES ALIMENTAIRES DANS LES PLANS RÉGIONAUX DE L’AGRICULTURE DURABLE 17

1. Les plans régionaux de l’agriculture durable (PRAD) doivent intégrer les politiques alimentaires durables 17

2. Les plans régionaux de l’agriculture durable conduisent à la définition de projets alimentaires territoriaux 18

3. L’appui nécessaire des comités régionaux pour l’alimentation 20

B. RENDRE LA RESTAURATION COLLECTIVE EXEMPLAIRE 21

1. La restauration collective : un levier de consommation 21

2. L’agriculture durable dans la restauration publique : des initiatives isolées 22

3. Relier consommation et production : la restauration collective au cœur de la dynamique des territoires 24

C. ACCOMPAGNER ET VALORISER LES BONNES PRATIQUES 25

1. Accompagner public et privé avec l’observatoire de l’alimentation et des circuits courts et de proximité 25

2. Développer la responsabilité sociale et environnementale (RSE) 26

3. Valoriser les restaurants collectifs engagés dans le fait maison 27

EXAMEN EN COMMISSION 29

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 29

II. EXAMEN DES ARTICLES 43

Article 1er (article L. 230-5-1 (nouveau) : du code rural et de la pêche maritime) : Introduction, dans la restauration collective publique, de produits issus de l’agriculture durable, dont biologiques 43

Article 2 (article L. 230-3 du code rural et de la pêche maritime) : Observatoire de l’alimentation et des circuits courts et de proximité 48

Article 3 (articles L. 1, L. 111-2-1, L. 111-2-2, L. 180-1, L. 180-2 et L. 315-2 du code rural et de la pêche maritime et article L. 425-1 et L. 515-3 du code de l’environnement) : Plans régionaux de l’agriculture et de l’alimentation durables 51

Article 4 (article L. 225-102-1 du code de commerce) : Intégration à la responsabilité sociale et environnementale d’exigences en matière de consommation alimentaire durable 55

Article 5 (article L. 121-82-1 du code de la consommation) : Extension du dispositif « fait maison » à la restauration collective 57

TABLEAU COMPARATIF 59

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 71

INTRODUCTION

Le droit à l’alimentation figure dans la déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 et précise que les États et la communauté internationale doivent garantir à chacun un accès à une alimentation suffisante, de qualité et correspondant aux traditions culturelles locales. L’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime définit, dans le même esprit, les finalités de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation, entre autres : « d’encourager l’ancrage territorial de la production, de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles, y compris par la promotion de circuits courts, et de favoriser la diversité des produits et le développement des productions sous signes d’identification de la qualité et de l’origine » (9°) et « promouvoir la conversion et le développement de l’agriculture et des filières biologiques, au sens de l’article L. 641-13 » (11°).

La présente proposition de loi fait suite aux préconisations du rapport parlementaire n° 2942 « Et si on mangeait local… » adopté en juillet 2015 par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale à la suite de la mission d’information sur les circuits courts et la relocalisation des filières agroalimentaires. Elle présente une partie des propositions législatives les plus importantes qui en découlent, qui doivent toutefois s’inscrire dans une politique publique globale, portée par les collectivités publiques et les entreprises privées.

La loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a fait de l’ancrage territorial de la production l’un des objectifs de la politique agricole et alimentaire. Les projets alimentaires territoriaux (PAT) permettent de structurer des systèmes alimentaires pour favoriser l’approvisionnement local. Ils sont en cohérence avec l’objectif de développement de l’agroécologie. Organiser les projets alimentaires territoriaux, notamment au niveau régional, est de nature à favoriser cette transition écologique économique et sociale des territoires par l’achat responsable et solidaire et une offre diversifiée et de qualité.

Aujourd’hui, tous les signaux sont au vert pour développer les approvisionnements de produits issus de l’agriculture durable, notamment biologique et de proximité. De nombreux producteurs et acheteurs ont recours à ce type d’approvisionnements, les auditions menées par la mission d’information parlementaire sur les circuits courts et la relocalisation des filières agroalimentaires l’ont confirmé. La démarche a besoin d’être soutenue à grande échelle afin de mieux structurer les filières d’approvisionnement local.

L’article 48 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement était ambitieux mais déclaratif : « L’État se donne pour objectifs […] e) De recourir, pour l’approvisionnement de ses services de restauration collective, à des produits biologiques pour une part représentant 15 % des commandes en 2010 et 20 % en 2012 ainsi que, pour une part identique, à des produits saisonniers, des produits à faible impact environnemental eu égard à leurs conditions de production et de distribution, des produits sous signe d’identification de la qualité et de l’origine ou des produits issus d’exploitations engagées dans une démarche de certification environnementale ; ».

Le guide « Mangeons local dans les cantines », publié le 3 décembre 2014 par le ministère de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt était ainsi introduit : « Il faut renforcer la présence des produits locaux dans la restauration collective. Le Président de la République a fixé un objectif : 40 % de produits de qualité, biologiques et locaux, dans la restauration collective, un engagement rappelé par le Premier ministre lors de la dernière Conférence environnementale qui a souhaité en faire un des enjeux d’une administration exemplaire. »

L’Agence bio (Agence française pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique) a révélé en 2015 que les produits biologiques en restauration collective étaient en augmentation constante mais ne représentaient en 2014 que 2,7 % des « achats alimentaires de la restauration à caractère social ».

La proposition de loi entend faire de la restauration collective, publique et privée, le levier du changement alimentaire dont la France a besoin. Les Français, auxquels sont servis près de 3 milliards de repas par an en restauration collective, ont le droit de manger des produits de qualité et de proximité. Elle prévoit également d’accompagner la restauration collective et, plus largement, les acteurs économiques concernés, avec un observatoire de l’alimentation et des circuits courts et de proximité. L’alimentation durable sera au cœur des préoccupations des politiques régionales mais également des grandes entreprises, à travers la responsabilité sociale et environnementale.

Le secteur privé, accompagné mais non contraint, disposera des outils du changement. Pour le secteur public, des objectifs chiffrés mais atteignables sont fixés.

L’article 1er prévoit l’introduction, dans la restauration collective publique dès 2020, de 40 % de produits issus de l’alimentation durable (de saison, biologiques, sous signes de qualité et d’origine), dont la moitié de biologiques. Un objectif intermédiaire est fixé et devra être satisfait dans les six mois suivant la promulgation de la loi.

L’article 2 fait évoluer l’observatoire de l’alimentation en observatoire de l’alimentation et des circuits courts et de proximité. Il aura pour nouvelle mission de suivre les données qualitatives et quantitatives relatives aux circuits courts et de proximité, en liaison avec les observatoires régionaux et inter-régionaux existants et s’assurera du respect des objectifs définis à l’article L. 230-5-1 du code rural et de la pêche maritime (créé par l’article 1er de la proposition de loi).

À l’article 3, les plans régionaux de l’agriculture durable sont amenés à intégrer les politiques alimentaires transversales dans leurs objectifs et dans leur gouvernance.

Les plans régionaux de l’agriculture durable (PRAD) deviennent des plans régionaux de l’agriculture et de l’alimentation durables (PRAAD). Les acteurs de l’alimentation, regroupés dans les comités régionaux pour l’alimentation (CRALIM) seront intégrés à la gouvernance des PRAAD.

L’article 4 s’adresse spécifiquement aux grandes entreprises, qui devront intégrer dans leur responsabilité sociale et environnementale (RSE) des exigences en matière de consommation alimentaire durable : choix de produits biologiques et locaux, cuisine sur place, lutte contre le gaspillage alimentaire et le suremballage.

L’article 5 prévoit d’étendre le dispositif de la mention valorisante « fait maison » aux restaurants collectifs qui s’impliquent dans la démarche.

On peut attendre de cette proposition de loi qu’elle engage une impulsion nationale pour répondre aux attentes des consommateurs et permettre aux agriculteurs de mieux structurer leur offre. Devrait en découler une dynamique territoriale locale pourvoyeuse d’emplois.

Ce texte concrétise dans le droit français le principe de la souveraineté alimentaire inscrit dans la loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale, et dans la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt précitée. La souveraineté alimentaire est considérée comme « le droit des peuples de définir leurs propres politiques en matière d’alimentation et d’agriculture, de protéger et de réglementer la production et le commerce agricole intérieur afin de réaliser leurs objectifs de développement durable, de déterminer dans quelle mesure ils veulent être autonomes et de limiter le dumping des produits sur leurs marchés »

Au-delà du simple accès à la nourriture, la souveraineté alimentaire englobe ainsi des dimensions sociales, économiques, politiques, culturelles et environnementales afin d’assurer une sécurité alimentaire de long terme.

L’alimentation issue de l’agriculture durable est résolument tournée vers l’avenir. Elle prend en considération les besoins actuels en se souciant de l’avenir et peut être déclinée en fonction d’indicateurs liés à l’état du système alimentaire et agricole d’un territoire. Des régions du monde souffrant de faim et de malnutrition aux régions inondées par la « malbouffe » industrielle et destructrice de l’environnement et de la santé, l’agriculture durable peut permettre à tous de concilier croissance démographique et préservation de l’environnement.

L’alimentation durable est celle qui permet d’assurer le besoin primaire fondamental de nourrir tous les humains en qualité et en quantité, aujourd’hui et demain. Pour reprendre la définition de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), l’agriculture durable est celle qui :

– contribue à la sécurité alimentaire des pays et populations ;

– est accessible économiquement et rémunératrice sur l’ensemble de la chaîne alimentaire ;

– limite les impacts environnementaux, préserve les ressources naturelles et respecte le vivant ;

– est pour chaque individu, de bonne qualité nutritionnelle et sanitaire ;

– est en adéquation avec la diversité des attentes sociales et culturelles ;

– maintient la capacité de produire pour les générations futures.

D’après l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (Food and agriculture organization), les régimes alimentaires durables sont « des régimes alimentaires ayant de faibles conséquences sur l’environnement, qui contribuent à la sécurité alimentaire et nutritionnelle ainsi qu’à une vie saine pour les générations présentes et futures. Les régimes alimentaires durables contribuent à protéger et à respecter la biodiversité et les écosystèmes, sont culturellement acceptables, économiquement équitables et accessibles, abordables, nutritionnellement sûrs et sains, et permettent d’optimiser les ressources naturelles et humaines ».

Ces définitions sont proches des objectifs de la politique agricole et alimentaire définis à l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime.

Les produits de saison ne sont pas nécessairement biologiques ou issus de circuits courts mais permettent d’ancrer l’alimentation dans les productions d’un territoire et ainsi, développer la sensibilité du consommateur aux produits qu’il consomme. Il rapproche les consommateurs de leur environnement climatique et géographique.

Les indications d’origine que sont les appellations d’origine contrôlée (AOC) et protégée (AOP), et l’indication géographique protégée (IGP) contribuent à l’identification de produits locaux et de qualité. Ils sont encadrés par les règlements européens.

Associé à chaque indication géographique, un cahier des charges définit la zone et les pratiques de production. En maintenant des pratiques et des savoir-faire vivants, ils participent à l’expression de cultures originales inscrites dans le patrimoine des régions. Cela peut se traduire par des événements de la vie locale rassemblant les habitants.

Les indications géographiques sont souvent associées à des espèces ou des variétés adaptées à chaque terroir et participent à la biodiversité. En parallèle, les pratiques locales (verger, pâturage des animaux, transformation en lait cru…) maintiennent des milieux et des paysages diversifiés, des savoirs faire locaux et des recettes liées aux terroirs

Elles représentent également un outil essentiel de valorisation des productions pour les opérateurs économiques et participent à la pérennisation des tissus économiques locaux.

Les produits issus de l’agriculture biologique entrent dans le périmètre de l’agriculture durable. Est dite biologique la production qui respecte l’ensemble des règles définies par le règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil, du 28 juin 2007, définissant les principes, objectifs et règles générales applicables à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques. Cette réglementation européenne est un gage de transparence et d’harmonisation pour les consommateurs.

L’agriculture biologique constitue en France l’un des signes officiels d’identification de la qualité et de l’origine. En découlent des actions de contrôle, de sanction et d’étiquetage.

La marque AB de certification identifie des produits 100 % biologiques ou contenant au moins 95 % de produits agricoles biologiques dans le cas des produits transformés. Elle est la propriété du ministère de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt et est protégée par l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO).

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La certification garantit les principes de production, d’élevage, de préparation, de distribution et d’importation, les listes de produits, additifs et auxiliaires utilisables (pour la fertilisation, les traitements ou la transformation) etc. Le mode de production est basé sur la non-utilisation de produits chimiques de synthèse et d’organismes génétiquement modifiés (OGM).

Les circuits courts ont fait l’objet d’une définition par le ministère de l’agriculture en 2009. Un circuit court est un mode de commercialisation des produits agricoles qui s’exerce soit par la vente directe du producteur au consommateur – vente à la ferme, marché de producteurs, par exemple –, soit par la vente indirecte, à condition qu’il n’y ait qu’un seul intermédiaire entre l’exploitant et le consommateur – commerçants détaillants de type épicier, bouchers, ou restaurateur. Les circuits courts n’impliquent pas nécessairement la proximité géographique mais la favorisent souvent.

Les circuits de proximité correspondent à l’idée d’une distance spatiale maximale mesurant le chemin à parcourir entre le lieu de production et celui de vente. Cette distance, qui n’a fait l’objet d’aucune définition officielle, peut varier selon le type de production concernée, le bassin de vie concerné et ses capacités de production. Ces circuits s’inscrivent dans une vraie complémentarité avec les artisans, commerces de bouche et autres commerces de proximité.

Il est vrai que le local peut différer selon l’échelon auquel on se place. Ainsi, une commune qui approvisionne sa cantine avec des produits locaux entend en général les produits des exploitations immédiatement environnantes. Les autorités françaises, pour l’application des mesures agro-environnementales et climatiques d’aides aux circuits courts, relevant de la politique agricole commune ont sélectionné un rayon de 70 kilomètres.

La définition d’un seuil kilométrique strict ne paraît donc pas nécessaire puisque variable en fonction des quantités de produits demandées et des spécificités des bassins de production. En effet, une métropole ou une agglomération peuvent toutes deux prétendre à un approvisionnement local alimentaire, créant ainsi un lien fort entre zones urbaines et rurales.

En outre, la loi ne peut enjoindre les organismes soumis au code des marchés publics (État, collectivités territoriales et leurs groupements) à intégrer dans leurs appels publics à la concurrence des critères géographique. Exiger des produits français et a fortiori des produits de proximité serait contraire au droit européen dans la mesure où cela contreviendrait aux principes de liberté d’accès à la commande publique et d’égalité de traitement des candidats.

De plus en plus de citoyens français souhaitent mettre davantage de sens dans leurs actes de consommation. Face à la multiplication des crises alimentaires et sanitaires, on assiste à l’émergence d’une tendance de fond : la recherche de lien social au travers de l’acte d’achat. De plus en plus de consommateurs souhaitent savoir qui produit ce qu’ils mangent – et ce qu’ils font manger à leurs enfants – et dans quelles conditions.

Les études qui montrent la toxicité sur le long terme des produits phytosanitaires se multiplient – 117 résidus de pesticides suspectés d’être cancérigènes ou perturbateurs endocriniens ont été détectés dans des produits non biologiques (1). Les produits issus de l’agriculture biologique présentent des qualités nutritives et sanitaires supérieures aux produits standards.

Les Français souhaitent consommer des produits tracés, et être assurés d’une certaine transparence quant aux pratiques agricoles. Si tous les consommateurs ne consomment pas bio, il est incontestable qu’il existe une tendance lourde en faveur d’une agriculture plus respectueuse de nos assiettes, combinant diminution des produits phytosanitaires, des antibiotiques et des pratiques telles que l’utilisation d’OGM ou des hormones.

On considère que le secteur agroalimentaire contribue à hauteur de 30 % des émissions de gaz à effet de serre en France.

L’alimentation représente un poste important de l’empreinte environnementale de la consommation des Français : selon le rapport de l’ADEME, « Alléger l’empreinte environnementale de la consommation des Français en 2030 », « les produits alimentaires et boissons sont à l’origine de 55 % de l’acidification générée par la consommation française, 32 % des émissions de composés organiques volatils non méthaniques, 31 % des émissions de gaz à effet de serre et 12 % des déchets industriels non dangereux ».

Les principaux impacts environnementaux générés par l’alimentation sont ainsi répartis (2) :

– les émissions de gaz à effet de serre ;

– l’impact sur la qualité de l’eau ;

– l’impact sur la consommation d’eau ;

– l’impact sur la biodiversité.

La phase du cycle de vie des produits alimentaires qui génère le plus d’impacts environnementaux est la production agricole : pour des produits transformés, elle est responsable de l’ordre de 75 à 95 % des impacts environnementaux, selon la nature des impacts (3).

Les circuits courts et de proximité sont souvent mis en avant pour réduire les impacts liés au transport de marchandises, ils se caractérisent aussi par un moindre recours aux procédés de conservation et aux emballages, ce qui limite leur impact environnemental. Inversement, les circuits longs comprennent plus de risques sur la traçabilité des produits et la fraude, d’autant plus lorsque les quantités transportées sont importantes. L’affaire de la viande de cheval dans les plats préparés censés être composés de viande de bœuf témoigne de ces risques (4).

L’agriculture biologique est indéniablement le mode de production le plus respectueux de l’environnement car elle interdit l’usage des produits phytosanitaires de synthèse. Elle respecte, restaure et entretient les équilibres biologiques. Elle préserve la ressource en eau, tant en qualité, par la non-utilisation des engrais et pesticides chimiques, qu’en quantité, par l’utilisation d’espèces rustiques mieux adaptées à leur environnement.

Elle conserve et accroît la fertilité physique et biologique des sols, favorise la biodiversité animale et végétale, a un impact positif sur les émissions de gaz à effets de serre par des émissions moindres et un stockage accru du carbone dans les sols. Elle a en outre une moindre consommation d’énergie fossile du fait de l’interdiction des engrais et pesticides chimiques de synthèse dont la production et le transport sont très gourmands en pétrole et dérivés (5). Cependant, cet impact sur l’environnement ne reste positif que si les produits biologiques ne sont pas expédiés à des milliers de kilomètres.

97 % des Français qui consomment local disent le faire pour soutenir la production locale et, par là, l’activité de leurs voisins. Cette attitude presque instinctive a d’ailleurs une logique économique. En effet, la production locale crée de l’emploi para-agricole et dans l’industrie agroalimentaire.

Par ailleurs, les circuits courts, de proximité et de qualité sont plus intensifs en main-d’œuvre que les circuits de distribution traditionnels. Les savoir-faire spécifiques et les conditions de production strictes des AOP génèrent par exemple 2,8 fois plus d’emplois directs que la laiterie France à volume de lait équivalent (6).À surface égale, une ferme biologique nécessite également davantage de main-d’œuvre qu’une ferme conventionnelle : en moyenne plus 0,9 unité de travail annuel (7). Ainsi, la valeur ajoutée de ces produits est essentiellement réinvestie sur le territoire.

Aussi, de nombreuses collectivités territoriales cherchent à créer une stratégie alimentaire. Les enjeux sont multiples. Ils sont économiques, en créant autour des agglomérations des ceintures alimentaires, ou en maintenant des fermes en zones rurales, de nature à garantir l’approvisionnement des villes, et en préservant une activité agricole dynamique, mise en danger par le grignotage du foncier et l’étalement urbain. Ils sont également sociaux en créant une solidarité entre les villes et les campagnes, en fournissant aux publics de la restauration collective – enfants, personnes âgées – des produits de qualité, locaux et sains.

L’article 48 du titre IV intitulé « État exemplaire » de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement n’était que déclaratif : « L’État se donne pour objectifs : […] e) De recourir, pour l’approvisionnement de ses services de restauration collective, à des produits biologiques pour une part représentant 15 % des commandes en 2010 et 20 % en 2012 ainsi que, pour une part identique, à des produits saisonniers, des produits à faible impact environnemental eu égard à leurs conditions de production et de distribution, des produits sous signe d’identification de la qualité et de l’origine ou des produits issus d’exploitations engagées dans une démarche de certification environnementale ».

La circulaire du 2 mai 2008 relative à l’exemplarité de l’État en matière d’utilisation de produits issus de l’agriculture biologique dans la restauration collective était pourtant explicite :

« Le “ Grenelle de l’environnement ” a retenu l’objectif de mieux intégrer les préoccupations du développement durable dans l’agriculture. En particulier, il a souhaité encourager le développement de l’agriculture biologique. En effet, les études montrent ses résultats positifs sur l’environnement (réduction de l’azote et du phosphore, interdiction des produits chimiques de synthèse, meilleure protection de la biodiversité, des sols et de la qualité de l’eau, économies d’énergie et baisse des émissions de gaz à effet de serre) ainsi que sur l’emploi.

« En 2006, l’agriculture biologique ne représentait que 2 % de la surface agricole utile. Pourtant, le marché des produits issus de l’agriculture biologique progressait rapidement de 10 % par an en moyenne entre 1999 et 2006. Le “ Grenelle de l’environnement ” a ainsi retenu un objectif de 6 % de la surface agricole utile en agriculture biologique en 2012.

« Le Gouvernement souhaite encourager la consommation de produits issus de l’agriculture biologique. Je vous demande donc d’inciter les services de restauration des administrations de l’État et des établissements publics placés sous votre tutelle à utiliser régulièrement des denrées issues de l’agriculture biologique, que ce soit pour la restauration collective ou pour les besoins des réceptions officielles.

« Cette orientation s’inscrit dans la stratégie nationale de développement durable qui prévoit que l’État s’applique à lui-même la démarche de développement durable qu’il entend promouvoir auprès des collectivités territoriales, des particuliers et des entreprises.

« L’objectif, pour l’année 2010, est d’introduire 15 % de denrées issues de l’agriculture biologique dans les menus et d’atteindre 20 % en 2012. »

En mai 2013, le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt lançait le programme « Ambition Bio 2017 ». L’objectif annoncé était de donner une nouvelle impulsion au développement et à la structuration de la filière, en doublant les surfaces et en augmentant fortement la consommation française de produits issus de l’agriculture biologique.

Les chiffres montrent que les objectifs sont loin d’être atteints, faute de moyens réels

L’Agence bio de la Commission européenne a donné les chiffres de l’agriculture biologique en France. Elle a dénombré 26 500 exploitations agricoles biologiques (soit 5,6 % des exploitations), occupant 1 118 000 hectares (soit 4,14 % de la surface agricole utile française).

Les agriculteurs sont de plus en plus nombreux à être séduits par les circuits courts et de proximité. Les raisons économiques sont évidentes. Ces modes de commercialisation doivent permettre, en réduisant le nombre d’intermédiaires, de fixer un prix qui permette aux agriculteurs de conserver une marge supérieure et d’être moins dépendants tant de l’industrie agroalimentaire que de la grande distribution. À côté, ils créent aussi de la valeur hors prix par la reconnaissance et la fierté qu’ils en tirent.

Selon l’Agence bio de la Commission européenne, on dénombre en France environ 9 450 opérateurs certifiés pour la transformation de produits biologiques, et 3 450 pour la distribution. Au total, ce sont près de 40 000 opérateurs biologiques (producteurs, transformateurs, distributeurs et importateurs). Le marché dépasse 5 Mds d’euros en 2014, soit une croissance de 500 % sur les 15 dernières années. La progression d’achats par le consommateur final a été de 10 % entre 2013 et 2014.

Par souci éthique ou stratégie commerciale, de nombreux agriculteurs se sont tournés vers la biologie mais beaucoup attendent encore que la demande s’accroisse pour poursuivre la conversion de leurs terres agricoles. À l’inverse, la France n’est pas autosuffisante en produits biologiques et importe ces produits de l’Union européenne, avec un degré de certification moins exigeant et un volume de production très important. Consommateurs et producteurs font ainsi preuve d’attentisme, en particulier dans le secteur de la restauration collective où les volumes et les structures d’approvisionnement doivent se renforcer.

Pour avancer, chaque acteur doit mieux comprendre l’autre. C’est l’objet des conseils alimentaires locaux au sein des projets alimentaires territoriaux. En l’espèce, les gestionnaires de restaurants collectifs doivent être plus souples dans la détermination de leurs menus, en fonction des arrivages et disponibilités des producteurs, et parallèlement les producteurs doivent se structurer pour proposer leurs produits de façon constante et en quantité suffisante

Cet état de fait justifie la mise en place d’une dynamique nationale, lancée par la restauration collective.

Les témoignages des éleveurs depuis le début de la crise des élevages montrent que les éleveurs produisant en biologique résistent mieux à la crise que les éleveurs conventionnels. Ce constat est également vrai pour les autres productions agricoles.

Certes un crédit d’impôt de 2 500 € est accordé aux entreprises agricoles dont 40 % des recettes proviennent d’un mode de production biologique pour rémunérer partiellement leur impact positif sur l’environnement et la santé mais, surtout, la filière biologique est moins soumise aux fluctuations du marché des intrants. L’indépendance vis-à-vis des protéines végétales est déterminante. L’élevage biologique est plus résistant que le conventionnel face à la crise actuelle. Les produits se vendent mieux avec des prix de vente plus élevés (8) : 15 à 20 % de plus que le conventionnel en viande bovine, 3,50 € du kilogramme de porc en biologique contre 1,38 € en conventionnel. L’effondrement du prix du lait avec la fin des quotas européens depuis le 1er avril 2015 ne touche pas le secteur biologique : 420/450 € en biologique contre 300 € les 1 000 litres en conventionnel.

La diversification des productions et le choix de variétés et races adaptées accroît la résilience des systèmes agro écologiques aux aléas économiques et climatiques.

En outre, les agriculteurs pratiquant la vente directe ont des revenus plus stables, ils dégagent davantage de valeur ajoutée en réduisant le nombre d’intermédiaires et en fidélisant leurs clients. Les agriculteurs biologiques sont également moins dépendants des exportations et des aléas qui les accompagnent.

Le développement des circuits courts et de proximité fait également sens au regard de la crise que traversent les filières d’élevage depuis un an et demi. Ils constituent de nouveaux débouchés pour leurs produits.

Les politiques alimentaires devraient s’articuler autour de deux axes principaux : l’alimentation en tant que telle, à destination des citoyens-consommateurs, et le système de production.

Les politiques publiques en matière alimentaire sont souvent trop segmentées : la direction de la santé est en charge de la nutrition, celle de l’agriculture en charge de la production et celle de l’environnement en charge du développement durable. Il est donc impératif de décloisonner l’action publique en matière d’alimentation.

L’État et les collectivités territoriales ont tendance à méconnaître leurs besoins alimentaires, ne voient pas l’intérêt économique potentiel d’une relocalisation de l’agriculture et minimisent les emplois agricoles qui en découleraient.

L’échelon régional, déjà compétent en matière économique, intervient depuis la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche de l’outil dans les plans régionaux de l’agriculture durable (PRAD) qui fixent les grandes orientations de la politique agricole, agroalimentaire et agroindustrielle à l’échelon régional. Ils déclinent des objectifs en actions en définissant des priorités en matière d’installation des agriculteurs, d’utilisation de l’eau, de protection du foncier, d’agroécologie etc.

L’article D. 111-1 du code rural et de la pêche maritime précise déjà, au niveau réglementaire, que les PRAD comprennent « la préservation et la déclinaison régionale de modèles alimentaires visant à garantir la sécurité alimentaire, la santé publique et l’accès de tous à une alimentation équilibrée ». Faire des PRAD des PRAAD, c’est-à-dire des plans régionaux de l’agriculture et de l’alimentation durable, permettra de concevoir leur stratégie alimentaire régionale et de définir des priorités alimentaires adaptées au contexte régional c’est-à-dire de rapprocher la production de l’alimentation, favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation en rapprochant les consommateurs des producteurs et en déclinant régionalement une politique favorisant l’alimentation durable de qualité.

Les régions ont été renforcées dans leur gestion du volet économique et agricole à la suite de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République et à la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Cette nouvelle compétence doit donner lieu à une dynamique qui pourrait passer par l’ajout d’une dimension agricole et alimentaire aux schémas régionaux de développement économique, d’innovation et d’internationalisation ou aux schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires.

L’appel à projet du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt pour le programme national de l’alimentation en 2015 intègre les dimensions de l’ancrage territorial de l’alimentation et de la mise en valeur du patrimoine alimentaire.

Créés par l’article 39 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, les projets alimentaires territoriaux sont définis par l’article L. 111-2-2 du code rural et de la pêche maritime.

« Art. L. 111-2-2. – Les projets alimentaires territoriaux mentionnés au III de l’article L. 1 sont élaborés de manière concertée avec l’ensemble des acteurs d’un territoire et répondent à l’objectif de structuration de l’économie agricole et de mise en œuvre d’un système alimentaire territorial. Ils participent à la consolidation de filières territorialisées et au développement de la consommation de produits issus de circuits courts, en particulier relevant de la production biologique.

« À l’initiative de l’État et de ses établissements publics, des collectivités territoriales, des associations, des groupements d’intérêt économique et environnemental définis à l’article L. 315-1, des agriculteurs et d’autres acteurs du territoire, ils répondent aux objectifs définis dans le plan régional de l’agriculture durable et sont formalisés sous la forme d’un contrat entre les partenaires engagés.

« Ils s’appuient sur un diagnostic partagé de l’agriculture et de l’alimentation sur le territoire et la définition d’actions opérationnelles visant la réalisation du projet.

« Ils peuvent mobiliser des fonds publics et privés. Ils peuvent également générer leurs propres ressources. »

Ils sont le pendant opérationnel des objectifs des PRAD. Ces projets alimentaires territoriaux revêtent une triple dimension (9) :

– économique : structuration et consolidation des filières dans les territoires et mise en adéquation de l’offre avec la demande locale : contribution à l’installation d’agriculteurs et à la préservation des espaces agricoles sans lesquels la production n’est pas possible ;

– environnementale : développement de la consommation de produits issus de circuits de proximité ; valorisation d’un nouveau mode de production agroécologique, dont la production biologique ;

– sociale : il s’agit de projets collectifs fondés sur la rencontre d’initiatives, et regroupant tous les acteurs d’un territoire ; ils contribuent à une identité et à une culture du territoire et permettent de valoriser les terroirs.

Tout projet doit commencer par un diagnostic de territoire partagé par les acteurs locaux et la mise en place d’une instance collégiale, un conseil alimentaire local, pour suivre l’état d’avancement du projet : le projet alimentaire territorial (PAT). Les directions régionales de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt (DRAAF) peuvent apporter une aide à la réalisation de ce diagnostic. Le PAT peut mobiliser des fonds publics – appel à projet du programme national de l’alimentation du ministère de l’agriculture, crédits du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) ou du Fonds européen de développement régional (FEDER), appels à projet des pôles territoriaux de coopération économique (PTCE), des lignes dédiées en région – et privés ou encore générer leurs propres ressources.

Le projet alimentaire territorial dépend du PRAD mais il est important que ce dernier soit explicitement et législativement également consacré à l’alimentation durable. L’approvisionnement alimentaire durable suppose d’identifier les productions disponibles, en quantités suffisantes et par saison. Cette identification est possible au niveau régional. Par la synergie régionale, les politiques en faveur de l’alimentation seront plus efficaces.

Pour toutes ces raisons, la présente proposition de Loi fait évoluer les PRAD en PRAAD.

Les orientations de la politique publique de l’alimentation sont déclinées à travers un programme national de l’alimentation. Ce programme interministériel traduit la volonté des pouvoirs publics de coordonner les actions pour favoriser une alimentation durable et de qualité, accessible à tous, considérant toutes les dimensions de l’alimentation. Comme l’indique le rapport au Parlement du programme national de l’alimentation (PNA) de juillet 2013 « les actions du PNA sont nombreuses et diverses. Certaines partent d’une initiative nationale et sont ensuite déclinées en régions, d’autres sont le fruit d’initiatives locales. Si un certain nombre d’actions sont pluriannuelles et harmonisées au niveau national, d’autres sont ponctuelles et spécifiques à un territoire donné ».

La gouvernance régionale du PNA est confiée aux DRAAF sous l’autorité des représentants de l’État dans les régions. Les collectivités participent également de ce programme puisqu’elles relayent et adaptent les orientations nationales au niveau de leur territoire et ont également des initiatives qui leur sont propres. Elles ont un rôle primordial en matière d’alimentation, notamment à travers de la restauration collective.

Formellement, la gouvernance s’appuie sur des comités régionaux pour l’alimentation (CRALIM) qui sont composés de représentants des consommateurs, des professionnels de l’ensemble de la filière, des services déconcentrés relevant des ministères partenaires, des collectivités territoriales et des autres acteurs de l’alimentation au niveau régional. Ils sont placés sous l’autorité du représentant de l’État dans la région, qui en valide les orientations.

Le fonctionnement efficace des CRALIM, lié notamment au nombre et à la qualité des acteurs les composants doit pouvoir être un appui pour les plans régionaux de l’agriculture et de l’alimentation durable. Il est ainsi proposé que la gouvernance des futurs PRAAD intègre les CRALIM, au même titre que les collectivités territoriales et, aujourd’hui pour le volet agricole, les chambres d’agriculture et les organisations syndicales agricoles représentatives.

L’intégration des CRALIM à l’article L. 111-2-1 du code rural et de la pêche maritime leur donnera également une base législative, aujourd’hui inexistante.

Au sein de la restauration hors foyer où un repas sur sept est aujourd’hui pris en France, il faut distinguer la restauration commerciale et la restauration collective. La restauration collective se distingue de la restauration commerciale par sa fonction sociale historique. En effet, la restauration collective a vocation à préparer et servir des repas à des personnes travaillant ou vivant dans un espace déterminé (entreprises, établissements d’enseignement, sociaux, médicaux, pénitentiaires, collectivités, administrations…) à un prix inférieur à celui pratiqué par les restaurants commerciaux.

En ce qui concerne le secteur privé, il n’y a pas d’obligation de mettre en place un restaurant collectif, seulement un local dédié à la prise de repas dès vingt-cinq salariés. L’offre de restauration collective ou de tickets restaurants relève de l’initiative de l’employeur.

Le service de restauration collective dans le secteur public n’est pas toujours obligatoire mais il est souvent lié à une mission de service public. La restauration est alors prise en charge en gestion directe ou déléguée à une entreprise tierce.

S’agissant des écoles, les communes ou groupements de communes ont la pleine responsabilité et maîtrise de l’organisation de ce service. S’agissant des collèges et lycées, les conseils départementaux et régionaux ont respectivement pour mission de fixer les orientations, les objectifs, les tarifs et les moyens alloués à l’accomplissement de cette mission. Les établissements assurent la gestion proprement dite : appels d’offres, gestion, etc. Les restaurants universitaires sont quant à eux gérés par les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS).

D’après Restau’co (réseau des professionnels de la restauration collective en gestion directe), la restauration collective sert plus de 3 milliards de repas par an et concerne 72 700 restaurants. Cette restauration collective peut être assurée en direct (en régie) ou concédée, dans le public comme dans le privé. La restauration directe concerne 60 % des repas et la gestion concédée 40 %. La gestion directe se répartit entre la restauration médico-sociale (39 %), la restauration scolaire (39 %), la restauration d’entreprise (14 %), et les autres collectivités (8 %).

En gestion directe ou concédée, la maîtrise des objectifs alimentaires est entre les mains de multiples acteurs. Y compris en cas d’externalisation, les entreprises et collectivités sont responsables des cahiers des charges et des appels d’offres qui définissent des objectifs, des exigences et un prix.

D’après l’Agence bio, « l’introduction des produits biologiques en restauration collective résulte d’impulsions données par la direction (54 % des cas), les élus (42 %), l’équipe en cuisine (41 %), les parents d’élèves (35 %) et les convives (30 %) » (10).

Certes, les appels d’offres publics sont liés par le code des marchés publics qui encadre les critères admissibles mais le guide du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la pêche « Favoriser l’approvisionnement local et de qualité en restauration collective » donne les clés aux décideurs pour y parvenir. Pour mettre en place un approvisionnement local, il faut connaître l’offre locale : produits agricoles et agroalimentaires mais aussi entreprises qui les fournissent. Cette offre doit être identifiée en fonction de la saisonnalité, de la qualité et des quantités disponibles.

Avoir recours à un approvisionnement en alimentation durable peut avoir un surcoût que la restauration collective doit pouvoir surmonter en formant ses cuisiniers à la lutte contre le gaspillage alimentaire. La chaîne logistique doit être organisée en conséquence. Le poste de dépense alimentaire (les denrées) ne représente pourtant en moyenne que 26 % du coût total d’un repas en restauration collective (11). 45 % concernent les ressources humaines, 8 % le fonctionnement et 21 % les investissements.

Les cuisines ont largement disparu des écoles, collèges, lycées et hôpitaux. Les cuisiniers y reçoivent des produits prêts à consommer, ce qui en augmente le coût. Pour ne prendre que deux exemples très simples : les carottes râpées coûtent trois fois plus cher que les carottes biologiques en vrac et la salade en sachet coûte deux fois et demie plus cher en moyenne que la salade biologique vendue entière (12).

Il est également possible de déplorer l’insuffisance de formation des gestionnaires et cuisiniers spécialisés dans la cuisine des collectivités.

La restauration collective est parfois déjà engagée dans des démarches de valorisation de l’alimentation durable. Tous les acheteurs sont soucieux de faire des économies, d’autres veulent acheter mieux. Cela ne consiste pas seulement à acheter des produits plus qualitatifs en termes de goût, le mode de production des produits et des repas est également important. Il s’agit alors de multiplier les gestes de respect de l’environnement : acheter des produits plus près, cultivés dans des conditions respectueuses de l’environnement, lutter contre le gaspillage alimentaire, réduire les déchets etc.

D’après l’Agence bio, 73 % des actifs sont intéressés par des produits biologiques sur leur lieu de travail (13). En réponse à ces attentes, 59 % des établissements de restauration collective déclaraient proposer des produits biologiques à leurs convives début 2015 alors qu’ils n’étaient que 4 % avant 2006. Mais ces 59 % sont peu significatifs puisqu’il peut s’agir de proposer un produit biologique une fois de temps en temps sans nécessairement qu’il y en ait au moins un à chaque repas.

Certaines collectivités publiques sont en revanche exemplaires. En réponse à la demande des élus d’approvisionner la restauration collective en produits frais et locaux, des agriculteurs se sont organisés en plateformes pour être en capacité, en massifiant leur offre, de répondre aux appels d’offres des collectivités. L’une des plus connues est « Agrilocal ».

L’association « Agrilocal.fr » (www.agrilocal.fr) a été créée par la Drôme et le Puy-de-Dôme. Elle met au service des acteurs du territoire une plate-forme de mise en relation internet, respectueuse du code des marchés publics, favorisant les échanges entre les acheteurs de la restauration collective et les fournisseurs de produits agricoles. Elle offre aux acheteurs publics un outil simple pour la recherche de fournisseurs afin de réaliser leurs achats de denrées dans le cadre de la réglementation (codes des marchés publics, traçabilité). Grâce à un module de géolocalisation, les acheteurs obtiennent une photographie instantanée de l’offre agricole et artisanale de proximité.

Le réseau de la Fédération nationale de l’agriculture biologique (FNAB), qui comprend les groupements régionaux d’agrobiologistes, développe des plates-formes d’approvisionnement pour la restauration collective.

À Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes), ville d’un peu plus de 10 000 habitants, tous les enfants des écoles et des crèches, ainsi que le personnel communal mangent 100 % biologiques depuis le 1er janvier 2012 et 70 % des légumes consommés sont produits sur le sol communal, en régie agricole. La ville a acquis un domaine agricole de quatre hectares, qu’elle a converti à l’agriculture biologique. Elle a également mis en place une légumerie dans chaque cuisine, un service municipal qui englobe l’école et la restauration, une véritable approche de la cuisine de marché, la pesée quotidienne des restes alimentaires, une réflexion sur les portions servies – réduction de la part de la viande dans les repas, au profit de la redécouverte de protéines végétales. 66 % des parents interrogés confirment avoir également changé leurs habitudes alimentaires à la maison.

Le coût matière par repas est passé de 2,02 euros en 2012 à 1,86 euro en 2013. Cette réduction est notamment liée à la politique anti-gaspillage qui correspond à une économie de 15 centimes par repas.

La ville de Paris est également engagée dans un « plan alimentation durable 2015 - 2020 ». L’objectif est d’atteindre en 2020 un approvisonnement à hauteur de 50 % de produits issus de l’alimentation durable. La collectivité sert 30 millions de repas par an qui concernent à 69 % la restauration scolaire. La restauration scolaire est gérée par un système ancien de caisses des écoles autonomes. D’après Alexandra Cordebard, adjointe à la maire de Paris, chargée des questions relatives aux affaires scolaires, à la réussite éducative et aux rythmes scolaires, cet objectif rencontre trois difficultés : le problème de compétence juridique et de ressources humaines pour les petits établissements, le problème de l’offre d’approvisionnement parfois inexistante sur certains produits, et le problème de la fabrication qui se fait sur des lieux très différents (cuisines centrales ou satellites). Il est indispensable d’avoir une bonne connaissance de l’offre locale. La mairie de Paris a étendu le critère de proximité aux régions limitrophes de l’Île-de-France. À ce jour, le taux d’approvisionnement en produits issus de l’alimentation durable des caisses des écoles oscille entre 3 et 80 %.

La caisse des écoles du 20e arrondissement a fait part, lors de son audition par votre rapporteure, qu’à la fin de l’année 2014, 35 % du volume de son approvisionnement était issu de l’alimentation durable. Cette caisse devrait atteindre 37 % en 2015, suivant un plan d’augmentation progressive. Cela correspond en moyenne à un approvisionnement en pain bio, à un produit durable supplémentaire par repas et à un produit durable supplémentaire tous les dix repas. Les produits identifiés comme répondant à ce critère sont les produits Label rouge, biologiques et MSC (Marine stewardship council, label pour la pêche durable). Cette caisse livre 9,4 millions de repas par an, soit entre 8 000 (le mercredi) et 15 000 repas par jour.

Il est important que les produits biologiques soient consommés près du lieu de leur production : les études de l’Agence Bio montrent que 75 % des produits biologiques consommés en France sont produits sur le territoire national, et que la moitié des 25 % restants est composée de produits que le climat métropolitain ne permettrait pas de produire. Les importations ont en effet fortement diminué au cours des dernières années, passant de près de 40 % en 2009 à 25 % en 2012. Les ventes de produits issus de l’agriculture biologique à l’extérieur de la France, constituées à 60 % par les ventes de vins, sont estimées à 380 M€ en 2013, en hausse de plus de 20 % par rapport à 2012.

Certes, la production locale n’est pas en mesure de couvrir l’intégralité des besoins quelle que soit la saison. Il existe pour autant des marges de manœuvre pour améliorer son positionnement sur le marché de la restauration collective, en organisant le marché local et en orientant des terres agricoles.

Le délai laissé aux collectivités publiques pour atteindre les objectifs chiffrés donnera le temps aux acteurs locaux et aux producteurs de consolider leur offre et les incitera s’investir dans la co-construction de politiques foncières et d’infrastructures de transformation favorisant cet approvisionnement local alimentaire. Il faudra aussi que les offres se structurent localement et que de nouvelles plates-formes se mettent en place. Les nouveaux PRAAD pourront prendre en compte ces contraintes et agir localement pour orienter les productions, y compris en fonction de leurs moyens et des outils disponibles en les y accompagnant. Les avantages des plates-formes de producteurs – qui peuvent d’ailleurs associer d’autres acteurs – sont nombreux : sécurisation de l’approvisionnement, diversification de l’offre pour les collectivités ou optimisation de l’organisation logistique pour le producteur. Pour toutes ces raisons, il convient d’encourager les élus et les producteurs à se rassembler, autour de conseils alimentaires locaux, un territoire donné afin d’éviter l’éparpillement de l’offre et de favoriser une ingénierie logistique efficiente, économe et écologique.

L’observatoire de l’alimentation a pour mission l’analyse nutritionnelle, sanitaire, économique et sociale des politiques de l’alimentation. Il contribue, par son action, à éclairer les pouvoirs publics, les professionnels du secteur et les consommateurs sur les progrès réalisés par les acteurs des filières alimentaires. Il a été créé après recommandation du Conseil national de l’alimentation. Les données qu’il collecte sont analysées et donnent lieu à des études sur les produits répertoriés. Une charte définit la méthodologie et le caractère public ou privé des informations transmises. Ainsi, les professionnels n’ont pas de réticence à transmettre les informations nécessaires à l’analyse de l’alimentation.

Les missions actuelles de l’observatoire sont parfaitement adaptées au contrôle de l’application de la proposition loi dans le domaine de la restauration collective publique. Il sera un organisme d’appui et de collecte des informations. L’analyse des données collectées permettra de mieux percevoir les progrès restant à réaliser jusqu’à atteindre les taux fixés par la loi. On peut également y voir un outil de mise à disposition des informations au public afin que ce dernier contrôle l’engagement des collectivités publiques. L’observatoire déterminera l’usage des données.

La deuxième nouvelle mission assignée par la proposition de loi est de collecter les données relatives aux circuits courts et de proximité dans la restauration collective publique et privée. Si cette mission est nouvelle, elle ne partira néanmoins pas de zéro puisque l’observatoire s’appuiera sur les nombreux observatoires régionaux et interrégionaux des circuits courts et de proximité existants. À titre d’exemple, un tel observatoire existe depuis 2013 en région Provence-Alpes-Côte-d’Azur et a « pour finalités :

« – d’œuvrer au développement des circuits-courts et de proximité pour répondre aux enjeux sociaux, économiques et environnementaux de l’agriculture, ainsi qu’aux attentes des consommateurs et de la société civile ;

« – de participer au développement harmonieux des circuits-courts aux échelles régionales et locale, en favorisant le partenariat entre les acteurs des territoires et la complémentarité entre les projets ;

« – de créer une dynamique régionale et participative pour améliorer l’efficacité et la cohérence des actions. » (14)

En s’appuyant sur les structures existantes, l’efficacité de cette nouvelle mission de l’observatoire sera renforcée.

La responsabilité sociale et environnementale (RSE) a été introduite dans le code de commerce par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques. Les entreprises mentionnées à l’article L. 225-102-1 du code de commerce et précisées par décret (à ce jour les sociétés cotées, les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions non cotées dont le bilan ou le chiffre d’affaires est au minimum de 100 M€ et dont le nombre moyen de salariés permanents employés au cours de l’exercice est au moins de 500 (15)) ont l’obligation de communiquer sur la prise en compte des conséquences sociales et environnementales de leurs activités. Il s’agit des conséquences sur le changement climatique, en faveur du développement durable, de l’économie circulaire et de la lutte contre les discriminations et de la promotion des diversités. Ces informations sont intégrées à leur rapport de gestion.

Les sociétés concernées par ces obligations sont pleinement engagées en faveur de cette responsabilité. La France a été un pays précurseur en matière de reporting extra-financier. Les entreprises en ont fait un outil de communication, de pilotage et de valorisation de leurs activités. La RSE a permis de développer les bonnes pratiques.

La RSE ne concerne que les grandes entreprises. Elles ont les moyens humains et financiers de mettre en place de telles politiques. Ajouter au rapport de gestion des informations sur la manière dont la société prend en compte ses engagements sociétaux en faveur de l’alimentation durable sera un levier efficace pour diffuser cette préoccupation aux entreprises privées et aux milliers de salariés concernés.

L’alimentation durable n’a pas vocation à ne concerner que les entreprises agroalimentaires. Elle sera intégrée à l’ensemble des entreprises qui mettent à la disposition de leurs salariés un service de restauration collective : politique d’achat en produits respectueux de l’environnement, issus de l’agriculture biologique, de saison, sous signes de qualité et d’origine, de proximité, issus de circuits courts, etc.

La possibilité, pour les personnes ou entreprises qui transforment ou distribuent des produits alimentaires dans le cadre d’une activité de restauration commerciale ou de vente à emporter, de mentionner qu’un plat est « fait maison » a été créée par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation. Il s’agissait d’une demande des professionnels de la restauration, soucieux de valoriser les pratiques vertueuses des cuisiniers qui s’efforcent de fournir un travail de transformation de produits sur place qui met plus souvent en valeur les produits de qualité, de saison et locaux.

Une telle possibilité doit être offerte à la restauration collective qui peut vouloir mettre en avant l’effort consenti à améliorer la qualité de l’alimentation fournie aux consommateurs. La mention valorisante « fait maison » peut également contribuer à valoriser le métier de cuisinier en restauration collective et mettre en valeur les compétences et les emplois.

Les consommateurs attendent de la restauration collective un prix raisonnable et une alimentation de qualité. Il semblerait que cette double exigence ne soit pas satisfaite par l’offre actuelle, aussi bien publique que privée, puisque de nombreux consommateurs se détournent de leurs cantines pour apporter sur leur lieu de travail leur repas, véritablement « fait maison ».

Le dispositif proposé est identique à celui prévu pour la restauration commerciale c’est-à-dire volontariste pour les produits et plats répondant à des critères définis par voie réglementaire. Les décrets pris pour la restauration commerciale sont déjà à ce jour adaptés aux contraintes particulières des traiteurs hors domicile ou des activités de restauration non sédentaire (foires etc.) qui peuvent fabriquer ces produits ou plats dans un lieu différent de celui du lieu de vente ou de consommation. Ces particularités pourraient être étendues aux cuisines centrales qui fournissent parfois plusieurs cantines mais dont les pratiques correspondent néanmoins aux critères du « fait maison ».

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission examine, sur le rapport de Mme Brigitte Allain, la proposition de loi visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation (n° 3280).

Mme la présidente Frédérique Massat. Nous abordons l’examen de la proposition de loi de Mme Brigitte Allain, cosignée par l’ensemble du groupe Écologiste, visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation, dont l’examen en séance publique est prévu le jeudi 14 janvier prochain.

Sur les seize amendements déposés, deux ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, les amendements CE14 de M. Hervé Pellois et CE16 de Mme Annie Genevard.

Mme Brigitte Allain, rapporteure. Notre commission est saisie d’une proposition de loi visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation. Cette proposition de loi résulte du travail effectué avec les membres de la mission d’information sur les circuits courts et la relocalisation des filières agricoles et alimentaires et du rapport qui en a été tiré, « Et si on mangeait local... », accueilli avec enthousiasme, me semble-t-il, au mois de juillet 2015 par la Commission.

Pourquoi, alors que ce rapport contient cinquante propositions, la présente proposition de loi ne prévoit-elle que cinq articles ? Tout simplement parce que toutes n’étaient pas de nature législative et que, compte tenu des contraintes de temps liées à la seule journée consacrée aux niches parlementaires, nous n’avons pu retenir que les mesures structurantes au plan national.

En s’intéressant à la restauration collective publique et privée, la proposition de loi que nous examinons a pour ambition de concrétiser les avancées de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, mais aussi le programme Ambition bio 2017 et les annonces du ministre de l’agriculture et du Président de la République, à savoir favoriser l’alimentation durable, notamment bio, et de proximité.

Ce texte s’appuie sur la multitude de communes, pays, départements, régions, et entreprises, ou organisations qui se sont mobilisés depuis des années pour soutenir la mise en place d’une alimentation de qualité et de proximité. Le succès de ces expériences montre qu’il est possible et souhaitable de les généraliser à moyen terme dans tout le pays.

Au moment où nos concitoyens déclarent ne pas faire confiance aux politiques pour agir sur l’emploi, sur la qualité de vie ou sur le lien social, il est essentiel de favoriser, par une démarche globale, le respect d’un droit inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948. Celle-ci stipule en effet que les États et la communauté internationale doivent garantir à chacun un accès à une alimentation suffisante, de qualité et correspondant aux traditions locales. Elle prolonge les orientations de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, qui a placé l’ancrage territorial de la production au rang des objectifs de la politique agricole et alimentaire. Elle fait de cet ancrage une solution à la crise de l’élevage, révélatrice de cette impasse agricole généralisée que vient d’évoquer le ministre de l’agriculture lors de son audition par notre commission. Les producteurs commercialisant en circuit court, ceux qui produisent sous un signe de qualité, en appellation ou en agriculture biologique, plus économes en intrants et visant des marchés moins concurrentiels, résistent mieux aux crises liées aux marchés internationaux.

La restauration collective sert annuellement plus de 3 milliards de repas et concerne 78 000 restaurants. Il est nécessaire de fixer des objectifs chiffrés, mais réalisables pour le secteur public d’accompagner aussi bien le secteur public que le secteur privé dans cette démarche.

En 2008, le Grenelle de l’environnement avait fixé à 20 % la part du bio dans la restauration collective pour 2012, et au même pourcentage celle des produits durables. L’Agence française pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique a révélé que, en 2014, les produits biologiques ne représentaient que 2,7 % des achats alimentaires de la restauration à caractère social. Nous sommes donc loin du compte, alors que les surfaces agricoles utiles certifiées bio et en conversion ne cessent d’augmenter.

L’article 1er de la proposition de loi prévoit l’introduction, dans la restauration collective publique, dès 2020, de 40 % de produits issus de l’alimentation durable, dont 20 % issus de l’agriculture biologique. Il n’est pas possible de définir dans les marchés publics un critère de proximité géographique, mais les acheteurs peuvent viser cet objectif dans leur cahier des charges. Ces taux, relativement ambitieux, sont réalisables. L’État et les collectivités territoriales doivent être exemplaires, et donc contraints, pour engager des dynamiques de territoire. En accompagnant l’organisation logistique de l’approvisionnement local, ils rendent les produits de qualité et durables accessibles au plus grand nombre, en particulier aux personnes les plus fragiles, tels les enfants dans les cantines scolaires. Cela permet de co-construire de vrais objectifs territoriaux et, ainsi, de remédier à l’impasse actuelle qui conduit les collectivités à se plaindre de l’insuffisance de l’offre et les producteurs bio ou les producteurs locaux de l’insuffisance de débouchés.

L’article 2 transforme l’observatoire de l’alimentation en observatoire de l’alimentation et des circuits courts et de proximité. Il aura pour nouvelle mission de suivre les données qualitatives et quantitatives relatives aux circuits courts et de proximité, en liaison avec les observatoires régionaux et interrégionaux existants, et il s’assurera du respect des objectifs définis à l’article 1er de la proposition de loi. Il est, en effet, fondamental d’acquérir plus de savoirs et de données sur les circuits courts et de proximité.

Si nous montrons que ce modèle fonctionne et crée de la valeur ajoutée, il pourra se diffuser. Il est gagnant pour les producteurs, pour l’emploi, pour la santé des consommateurs, pour le lien social — puisque les citoyens deviennent acteurs des politiques locales —, pour les collectivités territoriales, qui peuvent ainsi prendre la main sur la politique alimentaire. Il est évident qu’il doit s’appuyer sur des indicateurs de bien-être collectifs autres que le seul produit intérieur brut.

Pour le privé, l’idée est d’agir sans contrainte, mais en nous dotant d’outils d’évaluation pour progresser. L’observatoire accompagnera les restaurants collectifs en analysant les données qui manquent aujourd’hui au secteur.

L’article 4 s’adresse spécifiquement aux grandes entreprises qui devront intégrer dans leur responsabilité sociale et environnementale des exigences en matière de consommation alimentaire durable : choix de produits ou plats bio et locaux, cuisine sur place, lutte contre le gaspillage alimentaire et le suremballage.

Avec l’article 5, la faculté de mentionner les plats « faits maison » dans la restauration collective valorise les cuisiniers et les cuisines qui s’impliquent pour la qualité de l’alimentation. Il étend, tout en l’adaptant, un dispositif aujourd’hui prévu pour la restauration commerciale et plébiscité par les professionnels. Lors du déplacement de la mission d’information en Dordogne, les cuisiniers de la restauration collective, fidèles à la réputation du Périgord, ont déploré que leur volontarisme pour favoriser les produits locaux soit totalement ignoré.

Enfin, à l’article 3, les plans régionaux de l’agriculture durable sont amenés à intégrer les politiques alimentaires transversales dans leurs objectifs et dans leur gouvernance. Les plans régionaux de l’agriculture durable (PRAD) deviennent les plans régionaux de l’agriculture et de l’alimentation durables (PRAAD). Les acteurs de l’alimentation, regroupés en région dans les comités régionaux pour l’alimentation (CRALIM) sont intégrés à la gouvernance des PRAAD. L’échelon régional, renforcé dans ses compétences par la loi n° 2013-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) et la loi précitée d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, est le mieux à même de favoriser une alimentation de proximité et de qualité. En effet, à l’échelon régional, accompagner à travers le plan de développement rural le développement de filières complètes et diversifiées est un formidable outil de cohésion sociale et environnementale.

S’appuyer sur les savoir-faire locaux, les productions traditionnelles, les richesses naturelles et économiques locales n’est pas en contradiction avec une ouverture sur le monde extérieur. Bien au contraire, c’est donner envie aux entrepreneurs de créer leur entreprise de production, de transformation et de commercialisation, et de s’appuyer sur des ambassadeurs locaux fiers de promouvoir un patrimoine collectif. Cela renforce l’attractivité des territoires, encourage le développement du tourisme gastronomique et permet de proposer à l’exportation des produits à forte valeur ajoutée, non concurrentiels, liés à l’identité d’un pays.

Je veux saluer ici le Pays basque qui, pour favoriser l’installation en agriculture, s’est engagé depuis plus de vingt ans dans une démarche offensive de valorisation des produits des petites fermes, et dont la dernière appellation -le porc Kintoa- vient d’être reconnue.

Avec cette proposition de loi, nous donnons aux élus locaux les moyens de porter, avec les acteurs économiques de l’agroalimentaire, une ambition politique forte et de créer des synergies de territoire.

Les circuits de proximité et les pratiques agricoles agro-écologiques sont pourvoyeurs d’emplois, économes en intrants et moins polluants, respectueux des sols, sous-sols, de l’eau et de l’air. Quoi de plus passionnant que de s’organiser régionalement pour définir une politique alimentaire, comme nous le faisons pour la santé, la formation, la mobilité et les transports ?

Je proposerai donc à notre Commission d’émettre un avis favorable à l’adoption de la proposition de loi, après un débat que je souhaite fructueux pour reconstruire des territoires de projets.

M. Hervé Pellois. Nous sommes ravis d’examiner aujourd’hui la proposition de loi de Mme Brigitte Allain avec qui j’ai eu le plaisir de travailler dans le cadre de la mission d’information sur les circuits courts et la relocalisation des filières agricoles et alimentaires. Ce texte reprend certaines propositions du rapport d’information intitulé « Et si on mangeait local… », remis au mois de juillet dernier à la suite des travaux de la mission.

Nous partageons pleinement l’objectif affiché de favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation, d’autant qu’il fait écho au modèle prôné dans la loi précitée d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, à travers la mise en place de projets alimentaires territoriaux, et aux annonces du Président de la République sur le sujet.

Cette proposition de loi intervient une semaine après l’adoption par l’Assemblée nationale, à l’unanimité, de la proposition de loi relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire. Il est important que ces deux combats soient menés de façon convergente. Inscrire notre modèle de développement dans une logique de circuit court pourrait permettre de réduire considérablement le nombre de denrées alimentaires jetées.

La valorisation des ressources locales est également un facteur non négligeable de développement agricole, économique, écologique et social.

Toutefois, le groupe Socialiste, républicain et citoyen émet quelques réserves et présentera quelques amendements, afin que le texte réponde pleinement à l’objectif qu’il s’est fixé : inscrire notre modèle alimentaire au cœur des territoires et des attentes des acteurs de terrain.

L’article 1er est central puisqu’il vise à introduire 40 % de produits issus de l’alimentation durable dans les restaurants collectifs publics à partir de 2020, conformément à un engagement du chef de l’État. L’amendement que je défendrai au nom du groupe prévoit d’en modifier deux aspects. Il vise tout d’abord à ne pas créer d’obligation, mais à inciter la restauration collective publique à se conformer à l’objectif de 40 %. C’est d’ailleurs ce qui est écrit dans l’exposé des motifs. Nous craignons en effet que, dans certains territoires, il soit impossible de remplir cet objectif de 40 % de produits issus de l’alimentation durable. D’ailleurs, il n’a pas été prévu de sanction si ce plancher n’est pas atteint.

Ensuite, les auditions que nous avons menées ensemble ont montré qu’il faut encore lever quelques incertitudes, notamment en ce qui concerne la comptabilisation de ces 40 %. Doit-on comptabiliser chaque plat servi ou le repas entier ? Doit-on compter le pain ? Donne-t-on le même poids aux entrées, au plat principal, au fromage et au dessert ? Prend-on en considération le prix, le volume ? On a bien vu que, dans les écoles de la ville de Paris, le calcul n’est pas le même d’une cantine à l’autre. Il semble donc nécessaire de clarifier ce point.

La formulation de l’article 1er -« en veillant à la proximité géographique entre les producteurs agricoles, les transformateurs et les consommateurs »- n’intègre pas suffisamment la notion de proximité dans les critères essentiels à la composition des repas servis. Aussi, nous proposerons une nouvelle rédaction.

L’article 2 prévoit de transformer l’observatoire de l’alimentation en observatoire de l’alimentation et des circuits courts et de proximité. Or cet observatoire fait déjà doublon avec le Conseil national de l’alimentation (CNA). Il faut donc clarifier les rôles du CNA et de l’observatoire.

Cet article prévoit également des modalités de recueil des informations. Nous pensons qu’elles devraient être fixées par décret et en liaison avec les observatoires régionaux et interrégionaux.

L’article 3 vise à transformer les PRAD en PRAAD. Si cette idée est louable, il me semble difficile de modifier avant leur prochaine échéance, c’est-à-dire avant 2020, les PRAD qui ont déjà été réalisés ou qui le seront très bientôt.

Nous avions déposé un amendement qui visait à confier aux chambres d’agriculture régionales le soin de concourir au développement de l’ancrage territorial de l’alimentation, notamment via les projets alimentaires territoriaux. Mais cet amendement a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. Nous y reviendrons peut-être ultérieurement.

Enfin, nous sommes favorables aux articles 4 et 5.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Nous sommes heureux de pouvoir débattre des circuits courts et de proximité, même si la distinction entre les deux est parfois sujette à caution.

L’exposé des motifs de la proposition de loi reprend le ton du rapport parlementaire sur les circuits courts et la relocalisation des filières agricoles et alimentaires. Toutefois, nous regrettons que cela se fasse en opposition avec une agriculture qualifiée de « productiviste et mondialisée ». Il définit les circuits courts comme « un mode de commercialisation des produits agricoles qui s’exerce soit par la vente directe du producteur au consommateur -vente à la ferme, marché de producteurs…-, soit par la vente indirecte, à condition qu’il n’y ait qu’un seul intermédiaire entre l’exploitant et le consommateur- commerçants détaillants de type épicier, bouchers ou restaurateur ». Quant aux circuits de proximité, ils doivent ne pas excéder trente kilomètres pour les produits bruts et cent kilomètres pour les produits transformés. On peut regretter que le circuit de proximité prime sur le circuit court, ce qui interdit d’acheter le produit brut de qualité que fait, par exemple, un paysan situé à trente-cinq kilomètres.

Si la volonté de mettre en avant les circuits courts est clairement affichée dans l’exposé des motifs, elle est moins évidente dans les articles de la proposition de loi. Certes, la promotion des filières de proximité est un objectif louable, mais cela ne peut devenir l’alpha et l’oméga de la valorisation de l’agriculture. Du reste, la proximité n’est pas de facto un gage de qualité, et un produit de qualité peut très bien avoir été produit et transformé au-delà du périmètre fixé pour le circuit de proximité.

La distance envisagée -trente à cent kilomètres- ne prend pas en compte la grande variété des productions agricoles de qualité de notre territoire national. Cette proposition de loi devrait avoir une vision plus large de l’ancrage territorial de l’alimentation, en préférant la notion d’alimentation durable qui concernerait les filières garantissant la fraîcheur du produit par une production et une transformation faite en France et en tenant compte des spécificités territoriales en termes de production agricole. Un producteur de Nantes est aussi français et européen qu’un producteur d’Orléans. La Commission européenne a expliqué qu’il était compliqué de fixer des distances, mais que l’on pouvait agir sur la fraîcheur du produit.

Certains articles risquent de compliquer encore un peu plus la vie des entreprises. Nous sommes favorables à l’amendement CE13 rectifié, qui permet de ne pas leur ajouter de contraintes supplémentaires.

L’article 4 vise à intégrer dans la responsabilité sociale et environnementale des entreprises des exigences en matière d’alimentation durable. Nous proposerons la suppression de cet article, car les entreprises ont déjà suffisamment d’obligations.

Dans un esprit constructif, nous avons déposé plusieurs amendements afin de promouvoir l’alimentation de qualité de l’ensemble des filières agricoles, tout comme le « fait maison », qu’il n’est pas facile de définir.

L’article 1er stipule que « Ce taux est fixé à 40 % à compter du 1er janvier 2020, dont 20 % de produits issus de l’agriculture biologique ». Cette rédaction signifierait que vous souhaitez 20 % de 40 % de produits biologiques, soit 8 %. Je crois que vous voulez plutôt que la moitié soit issue de l’agriculture biologique. Il me semble donc nécessaire de revoir la rédaction de cet article.

Mme la présidente Frédérique Massat. Nous y reviendrons lors de l’examen des articles.

Mme Michèle Bonneton. Les écologiques défendent la relocalisation de l’économie depuis de nombreuses années. La mondialisation des échanges conduit à des aberrations économiques, sociales et écologiques que nous payons très cher, aussi bien en termes de balance commerciale que d’emplois et d’environnement -changement climatique, pollution de l’air et des cours d’eau, etc.

La logique du déplacement généralisé des productions et des produits à l’échelle européenne et planétaire affecte fortement le domaine agricole et alimentaire. Le yaourt ou le cochon qui fait le tour de l’Europe avant de finir dans nos assiettes est une réalité que nous devons combattre. Le virage, il y a une cinquantaine d’années, vers une agriculture productiviste a conduit de fait à une généralisation de la monoculture dans de nombreux territoires. Il s’agit aujourd’hui de se redonner les moyens d’un ancrage territorial de l’agriculture en favorisant les circuits courts et l’emploi local, et ainsi de lutter contre le changement climatique dont les enjeux ont été une nouvelle fois posés lors de la COP21.

Comme l’indique très justement l’exposé des motifs de la proposition de loi, « notre alimentation redevient un enjeu politique et un patrimoine culturel à préserver. Face à des accords marchands internationaux générateurs de casse et de dumping social, prendre en main nos politiques alimentaires nous rend acteurs de l’aménagement de nos territoires, de nos emplois, de notre santé, de notre environnement ». Les écologistes constatent que la sphère politique a peu à peu intégré cette dimension, du moins dans les déclarations. Mais, au-delà du discours et des textes déjà adoptés, ils ne sauraient se satisfaire du manque de changements concrets et de moyens pour permettre le recentrage de l’activité agricole et de la commercialisation de la production. Cette proposition de loi est donc la bienvenue.

Ici ou là, comme le souligne le rapport, de belles réalisations ont vu le jour. Dans mon département, par exemple, de nombreux efforts ont été accomplis depuis 2001 en ce qui concerne la restauration dans les collèges. Une centrale d’achats spécifique a été mise en place pour acheter des produits alimentaires bio et locaux. Plus récemment, une légumerie a été créée dans l’agglomération de Voiron pour transformer les légumes bio et locaux à destination de la restauration collective.

Il faut maintenant passer à la généralisation des produits de proximité ou des filières régionalisées. L’enjeu est considérable, puisque 11 millions de repas sont servis chaque jour dans la restauration collective, soit davantage que dans la restauration commerciale.

Madame la rapporteure, vous affirmez dans votre rapport que tous les signaux sont au vert pour développer les circuits courts, de qualité et de proximité. Quels signaux forts vous poussent à un tel optimisme ?

Vous faites une distinction tout à fait justifiée entre circuits courts et circuits de proximité. Quel est le contenu de chacune de ces notions ?

En dehors des pressions économiques exercées par la grande distribution, quel est le frein principal au développement des circuits courts et de proximité ?

Bien entendu, je voterai cette proposition de loi.

M. Germinal Peiro. Voilà déjà plusieurs années que la commission nationale agricole du parti socialiste prône la relocalisation de l’agriculture. Avant la campagne présidentielle de 2007, nous avions publié un document qui faisait état de vingt-cinq propositions pour une révolution agricole et alimentaire et qui prévoyait une relocalisation de l’agriculture à deux niveaux. Au niveau mondial, il nous semblait que faire venir du mouton de Nouvelle-Zélande à Limoges ou de la viande bovine d’Amérique du Sud dans le Massif central n’était peut-être pas la meilleure façon d’économiser les ressources de la planète. Aujourd’hui, les transports étant reconnus comme des éléments polluants au niveau planétaire, il convient de redevenir raisonnable et de produire au moins sur chaque continent.

M. Jacques Diouf, ancien directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, disait avec raison qu’il faut produire là où les gens ont faim. Aussi faut-il éviter de produire, dans des pays pauvres, une alimentation qui est ensuite acheminée vers les pays riches, à plusieurs milliers de kilomètres de là.

Il y a cinquante ou soixante ans, on trouvait des cultures maraîchères autour de chaque ville. Cela évitait des transports inutiles et créait un lien direct entre consommateurs et producteurs. Ne faudrait-il pas réinventer aujourd’hui ce qui se faisait hier ? C’est certes plus facile à dire qu’à faire, et de nombreux départements français qui se sont engagés dans cette démarche se heurtent à des questions de production. Si la Dordogne n’a pas de mal à produire des céréales et de la viande, car elle possède une grande organisation en matière de viande porcine, bovine, caprine, ovine ou de volaille, les choses sont beaucoup plus compliquées en ce qui concerne la production maraîchère : c’est toute une économie qu’il faut reconstruire.

Bien évidemment, je soutiendrai avec grand plaisir cette proposition de loi.

Mme Annie Genevard. Madame la rapporteure, je vous remercie d’avoir défini précisément les termes. L’exposé des motifs rappelle ainsi que le circuit court évoque le mode de commercialisation -la vente directe ou avec un seul intermédiaire-, tandis que le circuit de proximité fait référence à la question spatiale et à celle de l’alimentation durable.

La question n’est pas celle du bien-fondé de l’ancrage local. Manger local est utile, mais l’avenir de l’agriculture ne peut pas se résumer à la question de la valorisation locale. Nous sommes aussi un grand pays exportateur de produits agricoles, et nous devons nous féliciter qu’il y ait des gens pour les consommer.

L’amendement que j’ai déposé à l’article 1er n’a pas été retenu, puisqu’il créait une charge pour l’État. Je souhaite toutefois revenir sur la réflexion qui l’a inspiré. La norme que vous fixez crée une charge pour les collectivités territoriales : vous exigez que la restauration collective propose 20 % de produits relevant de l’alimentation durable, avec, à l’horizon de 2020, un taux à 40 %, dont 20 % -ou la moitié- de produits issus de l’agriculture biologique. Bien sûr, on peut souscrire à de tels objectifs, mais il semble que vous fixez la barre un peu haut. Vous avez dit tout à l’heure que les pouvoirs publics devaient être exemplaires, donc contraints. Cette contrainte aura un coût pour les collectivités territoriales. Or, vous le savez, leurs finances sont très mal en point. L’Association des maires de France (AMF) s’émeut de cette norme qu’impose votre proposition de loi. Plutôt que de créer une obligation, nous vous proposons de prévoir une incitation. Si l’État oblige, s’il contraint, il doit financer. Sinon, il incite.

M. Dominique Potier. À mon tour, je tiens à saluer l’initiative de Mme Brigitte Allain qui s’inscrit dans les multiples combats que nous menons dans la présente législature en faveur de l’agro-écologie, de l’agriculture de proximité, des circuits courts, des relocalisations et de diverses régulations.

Il y a plusieurs décennies, Fernand Braudel, historien de l’école des Annales, né en Lorraine, avait tranché ce débat en disant que les économies les plus résilientes sont celles qui sont, à la fois, inscrites dans un écosystème local dense et tournées vers le monde. C’est ce que vous proposez, Madame la rapporteure, en renforçant cet enracinement dans la proximité.

Ce qui m’intéresse avant tout dans votre démarche, c’est le processus. Comment l’agriculture, aujourd’hui emprisonnée dans un certain corporatisme et livrée à tous les vents du libéralisme et de la mondialisation sans foi ni loi, peut-elle retrouver, à partir de ses externalités environnementales, un ancrage local ? M. le ministre de l’agriculture a évoqué tout à l’heure, lors de son audition par la Commission, le programme « 4 pour mille » dans le cadre de la COP21 et les contrats internationaux avec l’Afrique. L’agriculture doit retrouver un ancrage local pour contribuer à la lutte contre le changement climatique, à la préservation de la biodiversité et de la qualité de l’alimentation, qui est le premier vecteur de santé. Cette proposition de loi s’inscrit dans ce récit républicain d’une agriculture qui peut à nouveau coopérer avec toutes les forces d’un territoire et créer des passerelles entre la ville et la campagne, réenchanter le dialogue entre le monde rural et le monde urbain et redonner de l’espérance à des campagnes qui en ont bien besoin.

M. Philippe Le Ray. Madame la rapporteure, si je partage la plupart de vos orientations, je suis en désaccord avec vous sur plusieurs points.

La dimension de la consommation locale a quelques limites : il ne faut pas opposer systématiquement l’agriculture de masse et l’agriculture dite de proximité.

La notion de distance est extrêmement dangereuse. Elle n’est pas perçue de la même manière suivant les régions. Il faut prendre en compte la qualité de la terre, la nature du bassin d’élevage, etc.

Votre proposition n’est peut-être pas adaptée aux produits de la mer et aux cultures marines qui sont aussi fortement concernées par la consommation dite de proximité.

Je rejoins Mme Annie Genevard en ce qui concerne la distinction entre circuits courts et circuits de proximité. Consommer local ne veut pas forcément dire consommer bio. On peut également encourager la consommation de produits liés à un territoire, issus de l’agriculture raisonnée ou respectant un cahier des charges défini par des groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE).

Quoi qu’il en soit, il faut laisser un peu de liberté aux collectivités territoriales. L’objectif sera peut-être atteint plus facilement qu’on ne le croit. Malgré la crise, agriculteurs, citoyens et responsables politiques se rejoignent dans leur désir sincère de développer la consommation des produits locaux et de faire de la pédagogie.

Mme la rapporteure. Monsieur Hervé Pellois, les instruments de mesure restent en effet à définir. Nous proposons de confier cette mission à l’observatoire : il remplit déjà un rôle de collecte et d’analyse des données, mais nous prévoyons d’élargir son domaine de compétence à la question des circuits courts et de proximité. Quant au CNA, qui relève du code de la consommation, il joue plutôt un rôle consultatif. Dans une première mouture du texte, j’avais proposé la création d’un nouvel observatoire. Mais il paraît beaucoup plus intéressant de s’appuyer sur celui qui existe déjà.

Monsieur Jean-Charles Taugourdeau, la loi, qui a défini précisément le circuit court, stipule qu’il s’exerce soit par la vente directe du producteur au consommateur, soit par la vente indirecte, à condition qu’il n’y ait qu’un seul intermédiaire entre l’exploitant et le consommateur. Le circuit court n’induit donc aucune proximité : lorsqu’un viticulteur vient lui-même vendre son vin à Paris, il s’agit d’un circuit court. L’objet de la proposition de loi est bien l’ancrage territorial, mais le code des marchés publics nous empêche d’inscrire dans l’article 1er les produits de proximité. Quand nous sommes allés à Bruxelles, on nous a donné des définitions qui sont reconnues officiellement. Il s’agit de trente kilomètres pour les produits agricoles simples, comme les fruits et légumes et quatre-vingts kilomètres pour ceux qui nécessitent une transformation. La référence, mentionnée à l’article 1er, en veillant à la « proximité géographique » permet la souplesse que vous souhaitez.

L’agriculture durable reste à définir. Toutefois, je n’invente rien et je renvoie à des textes qui ont déjà précisé cette notion. On confie aux PRAAD le soin de donner leurs orientations en matière d’alimentation. Ce sont donc les régions qui définiront clairement ce que l’on entend par agriculture durable, sachant que, dans le texte, je me réfère à la notion de produits de qualité –sous signes d’identification de la qualité et de l’origine agriculture biologique. Il n’est fait référence à aucun moment à la seule agriculture biologique.

Je propose de fixer un taux de 40 %, dont 20 % de produits issus de l’agriculture biologique. L’idée n’est bien évidemment pas d’aboutir à 8 % de produits biologiques seulement. Si la rédaction pose problème, nous y reviendrons. M. Hervé Pellois a déposé un amendement qui vise à réécrire l’alinéa 2 de l’article 1er.

Au titre des signaux forts, j’indiquerai à Madame Michèle Bonneton que les travaux de la mission d’information ont montré que toutes les collectivités d’ores et déjà engagées dans l’ancrage territorial de l’alimentation – qu’il s’agisse de communautés d’agglomération, de communautés de communes, de départements ou de régions –, et dont beaucoup témoignent que les coûts n’en sont pas plus élevés, ont besoin d’une bonne coordination. La loi doit donc les accompagner afin que, à terme, elles puissent être reconnues ; les collectivités concernées pourront ainsi mettre en œuvre les préconisations du ministère de l’agriculture, en conformité avec les dispositions du code des marchés publics qui sont contraignantes.

En effet, ce code est redouté, et cette appréhension s’étend bien au-delà de ce qu’il prescrit concrètement. Par ailleurs, depuis plus de cinquante ans, une agriculture verticale totalement séparée de la consommation locale s’est imposée, ce qui donne le sentiment qu’un changement de pratique serait très complexe et que tout est à inventer. Lorsque la coordination est au rendez-vous, ce qui est le rôle des PRAD, on constate que les choses se passent bien.

Monsieur Germinal Peiro a posé la question de la relocalisation à deux niveaux. Notre texte reprend deux éléments de la loi précitée d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt : l’ancrage territorial de notre alimentation, mais, surtout, le principe de la souveraineté alimentaire, qui constitue un droit nouveau de première importance ; il revient ainsi à chaque État de définir le niveau minimal d’autonomie souhaité.

À Monsieur Philippe Le Ray, je réponds que le dispositif de la proposition de loi, pas plus que l’exposé des motifs, n’emporte d’opposition entre l’ancrage territorial -qui constitue l’un des axes de la loi précitée d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt- et la production de masse destinée à l’exportation.

Je rappelle que le débat que nous venons d’avoir avec le ministre a permis l’évocation des crises agricoles qui ne sont pas l’apanage de notre seul pays. Les marchés internationaux, qui ont été laissés parfaitement libres, sont à l’origine de ces crises dans le monde entier. Chaque pays tente aujourd’hui de garantir un minimum vital, et cette sécurité alimentaire s’inscrit dans la problématique de la sécurité des États au sens large. C’est là l’enjeu de l’autosuffisance et de l’indépendance alimentaire : ne pas être dépendant, c’est aussi garantir l’indépendance des autres ; nous avons à conduire une réflexion profonde au sujet des politiques agricoles et alimentaires mondiales.

En réponse aux interrogations de Madame Annie Genevard, je répète que l’objectif de 20 % de produits biologiques pour la restauration collective n’est pas complètement nouveau, puisqu’il figurait dans le Grenelle de l’environnement de 2008. Nous en sommes très loin aujourd’hui, car nous ne nous sommes pas donné les moyens de l’atteindre ; c’est pourquoi notre texte se veut contraignant. Il ne s’agit pas d’édicter des normes relatives aux moyens, mais de faire porter la contrainte sur le but à atteindre.

Dans le cadre de la mission d’information, nous nous sommes rendus dans la petite ville de Mouans-Sartoux qui se fournit à 100 % en produits biologiques, bien au-delà des prescriptions de la proposition de loi ; et il nous a été indiqué que les coûts étaient moindres. J’évoquerai les communautés d’agglomération de Saint-Étienne, de Lille et de Rennes, du pays du Mené en Bretagne qui ont mis ces démarches en œuvre et considèrent que le coût ne fait pas problème. De fait, dans la constitution d’un repas, les denrées de base représentent moins de 25 % ; or, dans les cantines, ce sont parfois jusqu’à plus de 30 % de la nourriture servie qui sont jetés : ces repas sont achetés pour être mis au rebut. La consommation de denrées locales produit un effet vertueux à toutes les étapes du processus ; le recours aux produits issus de l’agriculture biologique n’est pas nécessairement visé au départ, mais il s’impose rapidement au cours de la concertation entre les acteurs.

Les collectivités constatent alors qu’elles réalisent des économies sur le gaspillage, la consommation d’eau et la gestion des déchets. Bien plus, un lien social se crée, de nature à limiter les problèmes de sécurité et à améliorer la réintégration dans le monde du travail, puisque des emplois sont créés. Les collectivités et les protagonistes deviennent acteurs de ces politiques, et, Monsieur Dominique Potier l’a rappelé, ce travail commun redonne de l’espoir. Ces actions permettent encore de s’affranchir des aspects corporatistes caractéristiques des activités agricoles, car l’agriculteur dans son exploitation peut être tenté d’oublier le reste du monde. Aller vers le consommateur est valorisant, c’est l’occasion d’expliquer comment l’on travaille, et l’ensemble de la chaîne en bénéficie, de la cuisine au restaurateur.

Par ailleurs, l’article 3 de la proposition de loi renvoie aux plans régionaux d’agriculture durable, car, lorsqu’elles les élaborent, les régions adoptent des mesures et prévoient des soutiens financiers. Ajouter à l’acronyme PRAD le « A » d’alimentation renvoie encore au développement rural et donne aux régions les moyens de se réapproprier leurs pratiques alimentaires.

Article 1er
(article L. 230-5-1 (nouveau) du code rural et de la pêche maritime)

Introduction, dans la restauration collective publique, de produits issus de l’agriculture durable, dont biologiques

L’article 48 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement dispose que « l’État se donne pour objectifs : […] e) De recourir, pour l’approvisionnement de ses services de restauration collective, à des produits biologiques pour une part représentant 15 % des commandes en 2010 et 20 % en 2012 ainsi que, pour une part identique, à des produits saisonniers, des produits à faible impact environnemental eu égard à leurs conditions de production et de distribution, des produits sous signe d’identification de la qualité et de l’origine ou des produits issus d’exploitations engagées dans une démarche de certification environnementale ». Cet objectif, non contraignant, n’a pas été atteint puisque, d’après le programme de 2013 « Ambition bio 2017 » du ministère de l’agriculture, le biologique représentait en 2012 seulement 2,4 % des achats alimentaires de la restauration collective.

L’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime dispose que la politique agricole et alimentaire a pour objectifs, entre autres : « d’encourager l’ancrage territorial de la production, de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles, y compris par la promotion de circuits courts, et de favoriser la diversité des produits et le développement des productions sous signes d’identification de la qualité et de l’origine » (9°) et « de promouvoir la conversion et le développement de l’agriculture et des filières biologiques, au sens de l’article L. 641-13 » (11°). Cet article, créé par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, fixe les orientations du code rural et de la pêche maritime. Ces deux objectifs sont codifiés mais le code rural et de la pêche maritime n’a pas actualisé les objectifs du Grenelle de l’environnement.

2. Le dispositif de l’article 1er

L’article 1ercrée un nouvel article L. 230-5-1 au sein du chapitre préliminaire « La politique publique de l’alimentation » – créé par la loi
n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche
 – du titre III « Qualité nutritionnelle et sécurité sanitaire des aliments » du livre II « Alimentation, santé publique vétérinaire et protection des végétaux » du code rural et de la pêche maritime.

Le dispositif fixe, pour l’État, les collectivités territoriales et leurs groupements, l’obligation de servir des repas composés à hauteur de 20 % de produits relevant de l’agriculture durable dans les six mois suivant la promulgation de la loi. Ce volume de produits devra atteindre 40 % en 2020. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture – Food and agriculture organization (FAO) – a défini les régimes alimentaires durables comme « des régimes alimentaires ayant de faibles conséquences sur l’environnement, qui contribuent à la sécurité alimentaire et nutritionnelle ainsi qu’à une vie saine pour les générations présentes et futures. Les régimes alimentaires durables contribuent à protéger et à respecter la biodiversité et les écosystèmes, sont culturellement acceptables, économiquement équitables et accessibles, abordables, nutritionnellement sûrs et sains, et permettent d’optimiser les ressources naturelles et humaines ». L’objectif de l’introduction de celle nouvelle notion est de favoriser une alimentation locale et de qualité mais en l’absence de définition juridique contraignante des critères locaux et qualitatifs, le choix a été fait de décliner l’alimentation durable en produits de saison, biologiques ou produits sous signes d’identification de la qualité et de l’origine. Le champ d’identification de ces produits devrait permettre de répondre à l’objectif fixé en donnant aux responsables de la restauration publique collective les outils d’un chiffrage. À défaut de pouvoir contraindre explicitement les acteurs publics à favoriser la proximité géographique de leurs approvisionnements, le dispositif introduit un critère de vigilance qui contribue à expliciter l’esprit de la démarche.

L’objectif de 2020 est doublé par un objectif secondaire d’un volume de 20 % de produits issus de l’agriculture biologique. Ces produits sont définis à l’article L. 641-13 du code rural et de la pêche maritime comme ceux « qui satisfont aux exigences de la réglementation de l’Union européenne relative à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques ou, le cas échéant, aux conditions définies par les cahiers des charges homologués ».

3. L’avis de votre rapporteure

Votre rapporteure est convaincue que sans objectifs chiffrés, les pratiques ne changeront pas suffisamment rapidement. L’État et les collectivités territoriales doivent être exemplaires. La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a prouvé qu’en matière d’accessibilité dans les bâtiments publics, les bonnes intentions ne suffisaient pas et que sans contrainte législative, les discours restaient lettre morte. Le fonctionnement de l’État et des collectivités publiques est trop lourd pour que les intentions d’un cercle restreint de personnes, élus ou responsables d’administrations, suffisent à changer un mode de fonctionnement ancien.

Pour autant, si la contrainte des objectifs chiffrés doit être ambitieuse, elle doit aussi être réalisable et laisser suffisamment de temps aux acteurs publics pour s’adapter et changer leurs pratiques. La mise en place d’un objectif intermédiaire a vocation à accompagner les progrès dans l’ordre du « faisable ».

Cet article est aussi un moyen de saluer les bonnes initiatives, déjà mises en place dans certaines collectivités, notamment en ce qui concerne les cantines scolaires.

Votre rapporteure vous propose un amendement de clarification rédactionnelle.

4. La position de votre commission

La commission, après avoir discuté de la nécessité de maintenir le caractère obligatoire du dispositif et s’être interrogée sur le périmètre de l’alimentation durable a adopté l’article 1er, modifié par l’amendement rédactionnel de la rapporteure. Les questions soulevées donneront lieu à des propositions au stade de la séance publique.

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* *

La Commission examine l’amendement CE11 de M. Hervé Pellois.

M. Hervé Pellois. Cet amendement tend à transformer l’obligation de distribuer 40 % de produits provenant de l’alimentation durable dans la restauration collective en incitation. Il convient de ne pas créer une nouvelle contrainte, mais plutôt d’encourager une dynamique positive en fixant un objectif dans la loi. Il conviendrait de vérifier que cela est applicable dans tous les cas ; en ce qui concerne les produits de proximité, nous mentionnons « les produits à faible impact environnemental, eu égard à leurs conditions de production, de transformation et de distribution ». De fait, les produits de proximité doivent être mis sur le même pied que les produits de saison et les produits alimentaires de qualité.

Mme la rapporteure. Cet amendement concerne divers aspects de la question : cela me gêne, car il modifie l’intégralité de la rédaction de l’article 1er.

Les mésaventures du Grenelle de l’environnement, qui, dix ans après son adoption, n’a produit pratiquement aucun effet, faute d’objectifs précis à atteindre, nous ont conduits à recourir à la contrainte ; les objectifs poussent les acteurs à entrer dans le jeu d’un défi commun.

Vous demandez si cela peut être réalisé partout, si l’on regarde l’agriculture telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, la réponse peut sembler négative ; c’est ce qu’ont d’abord estimé nos interlocuteurs de la communauté d’agglomération de Lille. Lorsqu’ils ont entrepris leur démarche, les élus locaux pensaient la chose impossible en avançant que, dans le Nord–Pas-de-Calais, n’étaient produits que du sucre, des pommes de terre et des céréales. Or le but était, dans le domaine de la production maraîchère -base indispensable de l’alimentation-, de renouer avec la proximité de périphérie des villes, qui était la norme il n’y a pas si longtemps.

De son côté, le Grand Paris entre dans ce processus de production locale pour sa propre consommation. Si un rayon kilométrique précis était défini, les choses seraient plus difficiles ; mais je rappelle que la communauté urbaine de Bordeaux s’approvisionne à 40 % en produits biologiques locaux au marché d’intérêt national (MIN) qui sert de plateforme de regroupement pour toute la région. Là où ce type de productions a disparu, il faudra être en mesure de les réintroduire, en recourant à tous les outils utiles, aux légumeries évoquées par Mme Michèle Bonneton et aux abattoirs de proximité. Ce sont les régions qui doivent s’interroger sur l’ancrage territorial de l’alimentation.

L’impact environnemental est insuffisamment perçu, j’en veux pour preuve les difficultés rencontrées pour instituer un affichage alimentaire s’y rapportant ; l’élevage en pâturage extensif a plus d’impact que l’élevage hors-sol. La rédaction que vous proposez pose la question : préférons-nous une production animale issue de production hors-sol ou issue de l’élevage ?

Monsieur Hervé Pellois, je vous suggère de retirer votre amendement afin que nous puissions réfléchir ensemble à la question de la contrainte et réécrire cet article pour la séance.

Mme Michèle Bonneton. Je conçois que cette contrainte puisse sembler pesante. Cependant, elle ne s’appliquera qu’en 2020, ce qui laisse aux territoires le temps de s’adapter. Sans contrainte, les pratiques actuelles ne changeront guère. Heureusement, certaines collectivités se sont engagées d’elles-mêmes dans cette voie. Ainsi, en Isère, il existe des marchés très dynamiques, animés par un grand nombre de maraîchers qui parviennent à vivre de leurs productions sur des surfaces de faibles dimensions. Autour des villes, les petits maraîchers commencent à renaître, ce qui n’est pas à négliger.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CE1 de la rapporteure.

Elle se saisit ensuite de l’amendement CE3 de M. Jean-Charles Taugourdeau.

M. Philippe Le Ray. L’amendement CE3 propose de porter de six mois à un an le délai prévu, à partir de la promulgation de la loi, pour rendre obligatoires dans un premier temps les 20 % de produits relevant de l’alimentation durable. La plupart des collectivités qui sous-traitent certains marchés contractent pour un an : ce délai supplémentaire ne ferait que leur faciliter les choses.

Mme la rapporteure. Je suis plutôt favorable à cette proposition. Il serait aussi possible de jouer sur la date de renouvellement des contrats, puisque certains d’entre eux sont de deux ou trois ans. Cependant, je suggère, dans le cadre de la réécriture de cet article, de privilégier le critère de la date de renouvellement, au moins pour la mise en route de la mesure.

L’amendement est retiré.

La Commission étudie l’amendement CE4 rectifié de M. Jean-Charles Taugourdeau.

M. Philippe Le Ray. Il est proposé d’élargir le champ visé en précisant que les produits concernés sont « issus de filières garantissant une production et une transformation faites en France ».

Mme la rapporteure. Nous disposons déjà de beaucoup de signes de qualité dans le domaine de la viande et de la charcuterie, notamment ; de plus la réglementation européenne et le code des marchés publics empêchent l’adoption de votre proposition. M. le ministre de l’agriculture l’a évoqué : la possibilité est ouverte aux interprofessions d’utiliser la mention « origine France », mais il n’est pas possible de l’inscrire dans la loi. Je vous demande donc de retirer votre amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

M. Germinal Peiro. Je conçois que, en l’état, l’amendement de M. Le Ray ne puisse être transcrit dans la loi. Il n’en soulève pas moins une vraie question si l’on se limite aux produits de saison et aux divers signes mentionnant la qualité d’origine : je lis dans l’exposé sommaire de cet amendement que seuls 3,3 % des volumes de viandes produites en France répondent à ces critères.

M. Philippe Le Ray. Cette situation est due au très faible nombre d’abattoirs présents sur le territoire national ; dans la production de volailles, par exemple, pour fournir la restauration collective, il faut recourir à des abattoirs éloignés du lieu de production. Nous proposons d’élargir la notion d’alimentation durable, ce qui n’entre pas en contradiction avec votre rédaction.

Mme la rapporteure. La définition pourrait être élargie à l’occasion de la réécriture de l’article 1er : la mention « agriculture biologique », par exemple, fait partie des signes de qualité, et les produits de montagne sont également identifiés, comme les produits fermiers ; nombre de nos produits sont labellisés ; nous pourrions peut-être les mentionner dans le texte. Cependant, la réglementation européenne nous lie.

Mme la présidente Frédérique Massat. Monsieur Le Ray, je vous suggère de retirer votre amendement. Nous avons entendu votre souhait de compléter l’article 1er ; je vous invite à vous rapprocher de la rapporteure afin de procéder à sa réécriture globale. Dans le même esprit, je suggère le retrait de votre amendement CE5.

M. Philippe Le Ray. La question des cultures marines n’a pas été abordée ; par ailleurs, mon amendement CE5 a trait à la question de la proximité.

L’amendement est retiré.

L’amendement CE5 de M. Jean-Charles Taugourdeau est également retiré.

La Commission adopte l’article 1er, modifié.

Article 2
(article L. 230-3 du code rural et de la pêche maritime)

Observatoire de l’alimentation et des circuits courts et de proximité

1. L’état du droit

L’article L. 230-3 du code rural et de la pêche maritime, créé par la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche, a mis en place un observatoire de l’alimentation. Ses missions sont larges puisqu’elles s’étendent à l’analyse nutrionnelle, sanitaire, économique et sociale des politiques de l’alimentation. Cet observatoire a été créé par amendement du Gouvernement dont l’exposé sommaire résumait son ambition :

« Le Conseil national de l’alimentation recommande la création d’un “ grand observatoire de l’alimentation ” couvrant trois missions principales (Suivant la position n° 51 du CNA adoptée le 19 mai 2005 sur “ la mise en place d’un observatoire de l’alimentation ” et le rapport de propositions du CNA du 17 juin 2010 pour la mise en œuvre du programme national pour l’alimentation) :

« – la production de données nouvelles, par exemple sur l’évolution de l’offre en restauration, ou sur l’opinion des consommateurs sur des questions d’actualité, ainsi que d’indicateurs pérennes sur l’évolution de leur perception de l’alimentation et sur les comportements alimentaires. Le baromètre de la perception de l’alimentation réalisé par le CREDOC aurait par exemple vocation à intégrer l’observatoire ;

« – la centralisation des données existantes dans les domaines nutritionnels, sanitaires et socio-économiques. Cet outil transversal et permanent de mise en réseau, d’échange et de partage des informations aura pour vocation de permettre l’émergence d’une vision objective et partagée sur les questions en lien avec l’alimentation ;

« – l’analyse de ces données, leur mise en perspective dans le but d’anticiper les évolutions futures et leur diffusion auprès des différents acteurs des filières, des producteurs jusqu’aux consommateurs. Comme pour le baromètre de la perception de l’alimentation, l’observatoire de la qualité de l’alimentation (OQALI) serait appelé à intégrer ce nouvel outil. »

Production, centralisation et analyse des données de l’alimentation sont regroupées dans cet observatoire.

Il est doté d’un comité de pilotage qui réunit les trois ministères de tutelle, l’Agence nationale de sécurité sanitaire des aliments, l’Institut national de la recherche agronomique ainsi que le président et le vice-président de l’observatoire. Il est également doté d’un conseil d’orientation technique qui est composé, outre les membres du comité de pilotage, des représentants des secteurs agricoles, agroalimentaires, du commerce, de la distribution, de la restauration et des associations nationales de consommateurs

2. Le dispositif de l’article 2

L’article 2 ajoute une nouvelle mission à l’observatoire de l’alimentation : le respect de l’article 1er. Son objet actuel étant l’analyse de données quantitatives, il est l’outil le plus adapté à la mesure des volumes définis par le dispositif de l’article 1er.

Le adapte le nom de l’observatoire qui deviendra observatoire de l’alimentation et des circuits courts et de proximité et étend le champ de ses domaines de compétence à l’analyse des données sur le développement des circuits courts et de proximité.

Le décrit sa nouvelle mission de contrôle du respect de l’article L. 250-5-1 créé par l’article 1er de la proposition de loi en précisant qu’il s’appuie sur les observatoires régionaux et inter-régionaux des circuits courts et de proximité déjà existants. Ces observatoires déjà créés n’ont pas de reconnaissance législative. En outre, le confie à l’observatoire le recueil des données quantitatives et qualitatives relatives à la consommation des produits entrant dans la composition des repas servis par la restauration collective, aussi bien publique que privée.

L’article 1er de la proposition de loi ne concerne que la restauration collective publique, l’article 2 concerne non seulement les gestionnaires publics mais aussi les gestionnaires de restauration collective privée, c’est-à-dire, pour l’essentiel, les cantines des entreprises.

3. L’avis de votre rapporteure

La proposition de loi que nous examinons n’envisage pas de sanction si les acteurs de la restauration publique collective n’atteignent pas les seuils définis à l’article 1er.

Pour autant, votre rapporteure est convaincue de la nécessité de mettre en place un outil de mesure des taux définis à l’article 1er, au sein d’un observatoire qui serait également chargé d’accompagner les acteurs publics assignés à un volume quantifié. L’observatoire doit non seulement accompagner le secteur public de la restauration collective mais aussi le secteur privé, tout aussi concerné par d’importants volumes de repas servis quotidiennement. Pour cette raison, le secteur privé ne sera pas soumis à une quelconque contrainte ou à un quelconque objectif chiffré mais devra faire parvenir des données permettant, à terme, de connaître les proportions de produits issus des circuits courts et de proximité. Il est en effet indispensable de mieux connaître le secteur en disposant d’un outil de mesure quantitatif afin de bénéficier d’un état des lieux des consommations et d’un suivi.

Le choix a été fait de ne pas avoir recours à un énième observatoire mais de s’appuyer sur une structure existante en lui ajoutant une nouvelle mission. La reconnaissance de l’existence d’observatoires régionaux et inter-régionaux des circuits courts et de proximité existants devrait permettre d’unifier les pratiques, d’échanger sur les méthodologies et d’accompagner, au plus près des territoires, les acteurs déjà engagés dans ces démarches.

4. La position de votre commission

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission a adopté l’article 2 sans modification. La pertinence du choix d’ajouter des missions à l’observatoire de l’alimentation a été questionnée, de même que l’étendue de ses nouvelles missions. Là encore, des propositions seront avancées pour la séance publique.

*

* *

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CE6 de M. Jean-Charles Taugourdeau et CE12 de M. Hervé Pellois.

M. Philippe Le Ray. L’objectif de la proposition de loi est certes louable, mais nous proposons d’adopter une notion beaucoup plus large : certains aliments fournis à la restauration collective ne sont pas produits localement, tels le cacao ou les abricots pour faire des yaourts ou des entremets. La notion de proximité s’avère trop restrictive ; mieux vaut privilégier celle de filières d’alimentation durable.

Mme la rapporteure. L’observatoire de l’alimentation prend déjà en compte la notion de « durable » : nous proposons d’ajouter les circuits courts et de proximité à son champ de compétence, ce qu’empêcherait l’adoption de votre amendement. Or nous aurons précisément besoin d’informations relatives à cette forme de consommation ; en conséquence, je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

M. Hervé Pellois. L’amendement CE12 vise à supprimer l’obligation qui serait faite aux gestionnaires des activités de restauration collective de collecter et de transmettre les données qualitatives et quantitatives concernant leur activité selon les modalités voulues par l’observatoire et qui apparaît trop lourde pour les professionnels ; il s’agirait là d’une contrainte trop importante.

Mme la rapporteure. L’adoption de votre amendement aurait pour effet de nous priver d’outils pour évaluer la progression des professionnels du secteur privé dans le champ de l’alimentation durable. La restauration collective privée dispose de moyens de facturation et de gestion analytique, et peut ainsi remplir les objectifs déterminés par l’observatoire.

M. Hervé Pellois. L’article L. 230-5-1 du code rural et de la pêche maritime, introduit par l’article 1er de la proposition de loi, nous semble suffisamment précis ; il n’y a pas lieu d’ajouter de contraintes supplémentaires.

Mme la rapporteure. L’article L. 230-5-1 de ce code ne concerne que la restauration collective publique ; dans ces conditions, votre amendement ferait peser sur le secteur public des contraintes dont le secteur privé serait affranchi. En revanche, nous devrions chercher à rendre applicables les dispositions de l’article L. 230-5-1 à la restauration collective privée, car elle tient une place importante et dégage un chiffre d’affaires non négligeable. Je demande donc le retrait de votre amendement.

L’amendement CE12 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CE6.

Puis elle adopte l’article 2, sans modification.

Article 3
(articles L. 1, L. 111-2-1, L. 111-2-2, L. 180-1, L. 180-2 et L. 315-2 du code rural et de la pêche maritime et article L. 425-1 et L. 515-3 du code de l’environnement)

Plans régionaux de l’agriculture et de l’alimentation durables

1. L’état du droit

La loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche a inséré dans le code rural et de la pêche maritime un article L. 111-2-1 instituant un plan régional de l’agriculture durable (PRAD). Ce plan fixe les grandes orientations de la politique agricole, agroalimentaire et agro-industrielle de l’État dans chaque région ainsi que ses objectifs prioritaires. La politique agricole régionale tient ainsi compte des spécificités des territoires.

La loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a quant à elle conforté la région comme échelon de définition et de programmation des politiques agricoles, ainsi que de gestion des crédits européens. Le contenu du PRAD a été élargi aux actions conduites par les régions dans les domaines agricole, agroalimentaire et agro-industriel et les prérogatives des régions ont été renforcées dans l’élaboration des PRAD.

La préparation des PRAD est menée par le représentant de l’État dans la région et le président du conseil régional, qui y associent les collectivités territoriales et les chambres d’agriculture concernées, ainsi que les organisations syndicales agricoles représentatives. Elle comprend une phase d’association du public, d’une durée d’un mois, pendant laquelle le projet de plan est mis à sa disposition, notamment sous des formes électroniques. Le représentant de l’État dans la région en arrête le contenu.

2. Le dispositif de l’article 3

L’objet de l’article 3 est d’intégrer la politique alimentaire dans les PRAD. Ces PRAD deviendraient ainsi des PRAAD, plans régionaux de l’agriculture et de l’alimentation durables. Les plans régionaux devront intégrer des politiques alimentaires transversales dans leurs objectifs et leur gouvernance.

Le 1° du I ajoute la dimension alimentaire aux plans régionaux de l’agriculture durable définis à l’article L. 111-2-1 du code rural et de la pêche maritime. Le II tire les conséquences du changement de nom des PRAD en PRAAD dans les quatre autres articles du même code où les PRAD sont cités ainsi qu’à deux articles du code de l’environnement.

Le 2° du I adapte l’objet des futurs PRAAD en substituant à la mission de fixation de l’orientation de la politique agro-industrielle la politique alimentaire. La politique agro-industrielle comprend aujourd’hui deux volets : l’agroalimentaire (satisfait par la rédaction actuelle de l’article) et les entreprises industrielles qui fournissent des biens à l’agriculture (engrais, pesticides, machines…). Ces dernières sont déjà, par stratégie d’entreprise, implantées près des lieux de production agricole.

Le 3° du I consacre dans le code rural et de la pêche maritime l’existence et le rôle des comités régionaux pour l’alimentation (CRALIM) dans l’élaboration des futurs PRAAD qui y seront associés, au même titre que les collectivités territoriales, les chambres d’agriculture et les organisations syndicales agricoles représentatives. Les CRALIM, dont le secrétariat est assuré par les directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF), sont les instances de concertation et d’information mutuelle comprenant l’ensemble des représentants des acteurs publics et privés intéressés. Les CRALIM sont un premier outil d’ancrage territorial car ils ont pour mission d’assurer la déclinaison en région du programme national pour l’alimentation. Les comités apportent une analyse de l’offre alimentaire en région et les actions menées à cet échelon, ils sont des comités de pilotage et de suivi du programme national pour l’alimentation au niveau régional. Son caractère interministériel permet une mutualisation des efforts et des moyens sur des actions concrètes, variées et adaptées au contexte local. Le III tire les conséquences de l’existence des CRALIM à l’article L. 180-2 du code rural et de la pêche maritime consacré au programme national pour l’alimentation en outre-mer.

3. L’avis de votre rapporteure

Substituer à l’orientation de la politique agro-industrielle la politique alimentaire a pour objet de rappeler la vocation première de l’agriculture qui est de nourrir les hommes. L’idée est de se soucier de la destination de ce que nous produisons et, in fine, rapprocher le consommateur du producteur. La politique alimentaire couvre un champ plus large que la production agricole et agroalimentaire et vise à assurer une alimentation sûre, diversifiée, en quantité suffisante et respectueuse de l’environnement. L’idée est de ne pas produire pour produire mais de revenir à la finalité de l’agriculture qu’est l’alimentation.

Votre rapporteure vous propose un amendement de coordination.

4. La position de votre commission

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission a adopté l’article 3 en précisant les missions des nouveaux PRAAD et en assouplissant la date à laquelle certains des nouveaux plans devront être adoptés. Elle a également adopté un amendement de coordination.

*

* *

La Commission se saisit de l’amendement CE7 de M. Jean-Charles Taugourdeau.

M. Philippe Le Ray. À la lecture de l’article 3 de la proposition de loi, je constate que le troisième alinéa substitue à l’expression « agro-industrielle », le mot « alimentaire » ; or notre amendement propose, au premier alinéa, d’insérer, après le mot « agricole », le mot « alimentaire ». Votre rédaction rend cette substitution inutile.

Nous souhaitons que la notion d’alimentation ne soit pas opposée à celle d’agro-industrie, qui n’est pas contraire à l’objet de la proposition de loi et entre dans le champ de compétence du PRAD.

Mme la rapporteure. La notion d’agroalimentaire excède celle d’agro-industrie, elle englobe aussi les artisans et les producteurs transformant eux-mêmes leurs produits ; notre souhait est d’inclure toutes les entreprises, quelles qu’elles soient. Je demande donc le retrait de cet amendement ; dans le cas contraire, mon avis sera défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle se saisit de l’amendement CE8 de M. Jean-Charles Taugourdeau, qui fait l’objet du sous-amendement CE17 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Je suis favorable à la définition d’un circuit de proximité adapté aux particularités territoriales et aux besoins de la région ; c’est dans ce sens que nous souhaitons faire évoluer les PRAD, en y ajoutant un « A ». En revanche, la mention de « chaque filière de production » met à mal le « choc de simplification » ; dans ce contexte, le plan régional d’agriculture et d’alimentation durables (PRAAD) donnera une orientation correspondant aux besoins alimentaires de la région, mais son rôle ne sera pas de la décliner filière par filière, ce qui serait contraire au modèle d’agriculture horizontale vers laquelle nous tendons. C’est le sens de mon sous-amendement.

M. Philippe Le Ray. Je souscris pleinement à ce sous-amendement.

La Commission adopte le sous-amendement CE17.

Puis elle adopte l’amendement CE8 sous-amendé.

Elle adopte ensuite l’amendement de coordination CE2 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CE13 rectifié de M. Hervé Pellois.

M. Hervé Pellois. Cet amendement vise à ne pas demander aux acteurs ayant révisé leur plan de développement de l’agriculture durable, après la promulgation de la loi d’avenir pour l’agriculture, ou dans les six mois après la promulgation de la présente proposition de loi, de le réviser à nouveau pour y intégrer la nouvelle dimension relative à l’alimentation, avant le 1er janvier 2020, leur laissant ainsi un délai raisonnable pour s’adapter.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’éviter, au moment de la promulgation de la loi, de demander aux intéressés de redéfinir les plans régionaux d’agriculture durable. Aujourd’hui, peu de régions ont conclu leur PRAD, alors que la date limite était le 31 décembre -il faut toutefois reconnaître que la réforme territoriale a pu perturber l’élaboration des plans.

Je suis favorable à cet amendement, mais nous devrons interpeller le Gouvernement afin qu’il donne des directives anticipées dans le cadre de la préparation des nouveaux plans régionaux d’agriculture et d’alimentation durables.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 3, modifié.

Article 4
(article L. 225-102-1 du code de commerce)

Intégration à la responsabilité sociale et environnementale d’exigences en matière de consommation alimentaire durable

1. L’état du droit

L’article 116 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques crée un article L. 225-102-1 du code de commerce, qui prévoit, pour les entreprises ayant recours à l’épargne sur le marché réglementé, l’obligation de communiquer sur la prise en compte des conséquences sociétales de leur activité. La loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement crée l’obligation de communiquer sur leurs engagements sociétaux en faveur du développement durable et étend l’ensemble du dispositif de l’article L. 225-102-1 aux entreprises qui ont l’obligation d’établir un bilan social ou qui ont recours à l’épargne publique. La création de la responsabilité sociale des entreprises en 2001 a placé la France en position de pionnière.

Cette information est rattachée au rapport de gestion initialement destiné aux seuls actionnaires mais aujourd’hui public. Il fait l’objet d’un reporting dont la sincérité et la concordance sont contrôlées par un commissaire aux comptes. Un organisme tiers indépendant en vérifie également les informations.

1. Le dispositif de l’article 4

L’article 4 ajoute à la liste des informations d’inclure dans le rapport de gestion des entreprises concernées par la responsabilité sociale et environnementale, des informations sur ses engagements sociétaux en faveur de l’alimentation durable. Le contenu de ces informations concernera les actions de lutte contre le gaspillage alimentaire et le suremballage et l’approvisionnement en produits de saison, biologiques, sous signes d’identification de la qualité et de l’origine, cuisinés sur place, ou issus de circuits courts et d’approvisionnements de proximité.

2. L’avis de votre rapporteure

Il est aujourd’hui indispensable que les entreprises fassent état de l’impact de leurs activités en ce domaine, notamment les plus grandes d’entre elles, afin d’encourager la promotion d’un modèle d’entreprise « éco-responsable ». Votre rapporteure relève, à cet égard, que l’obligation pour les sociétés commerciales recourant à l’épargne publique d’inclure dans leurs rapports de gestion des données sociales et environnementales a permis de développer des démarches de responsabilité sociétale. Certes les nouvelles informations collectées impliqueront du temps et parfois un coût pour les entreprises mais ces contraintes seront vite compensées par les économies réalisées en termes de politique alimentaire durable (lutte contre le gaspillage notamment) et auront un effet indéniable sur les territoires, économiquement et socialement.

3. La position de votre commission

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission a adopté l’article 4 sans modification.

*

* *

La Commission examine l’amendement CE9 de M. Jean-Charles Taugourdeau.

M. Philippe Le Ray. Dans un souci de simplification pour nos entreprises, mon amendement propose la suppression de cet article. Le souhait de consommer davantage de produits locaux est bel et bien présent dans notre pays ; dans ces conditions, pourquoi imposer des contraintes supplémentaires qui seraient contraires au choc de simplification évoqué par la rapporteure ?

Mme la rapporteure. Il ne s’agit pas, dans le cadre de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE), de leur compliquer la tâche, mais, au contraire, de leur permettre de mettre en valeur les actions qu’elles mènent -d’ores et déjà, pour la plupart d’entre elles- dans le domaine de l’alimentation durable. Le Medef, que j’ai rencontré la semaine dernière, est bien conscient des bénéfices que l’on peut tirer du développement de ce type d’agriculture. Encore une fois, il faut avoir les mêmes exigences envers le secteur privé et le secteur public. Pour ces raisons, je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi mon avis serait défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 4, sans modification.

Article 5
(article L. 121-82-1 du code de la consommation)

Extension du dispositif « fait maison » à la restauration collective

1. L’état du droit

La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a créé un article L. 121-82-1 du code de la consommation qui crée la possibilité, pour les personnes ou entreprises qui transforment ou distribuent des produits alimentaires dans le cadre d’une activité de restauration commerciale ou de vente à emporter, de mentionner qu’un plat est « fait maison ».

La loi a laissé au pouvoir réglementaire le soin de préciser les conditions de cette mention.

2. Le dispositif de l’article 5

Le dispositif étend la possibilité d’afficher qu’un plat est « fait maison » aux activités de restauration collective, publiques ou privées.

Inséré à l’article L. 121-82-1, le dispositif est identique à celui prévu pour la restauration commerciale c’est-à-dire volontariste pour les produits et plats répondant à des critères définis par voie réglementaire.

3. L’avis de votre rapporteure

L’objectif, identique à celui de la restauration commerciale, est double : mieux informer les consommateurs et valoriser le travail et le savoir-faire des cuisiniers. L’objet de cet article n’est pas d’ajouter une contrainte supplémentaire aux restaurants collectifs mais bien de valoriser les cuisiniers qui se donnent la peine de transformer les produits sur place en utilisant leur savoir-faire au bénéfice de la qualité gustative et nutritionnelle des mets proposés. On sait en effet que les produits transformés sont souvent « enrichis » de conservateurs, colorants, excipients qui nuisent à la qualité de l’alimentation. Le « fait maison » valorise indirectement les produits frais, de saison, et de qualité et les filières de proximité.

Corrélativement se pose un enjeu de métier : retrouver des cuisiniers qui cuisinent et tirer vers le haut les cuisines qui font l’effort de valoriser des produits bruts.

4. La position de votre commission

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission a adopté l’article 5 sans modification.

*

* *

La Commission étudie l’amendement CE10 de M. Jean-Charles Taugourdeau.

M. Philippe Le Ray. Étendre le dispositif « fait maison » à la restauration collective constitue une contrainte supplémentaire, alors que, dans la restauration commerciale, ce « fait maison » ne rencontre guère de succès. Pour cette raison, nous demandons la suppression de l’article 5.

Mme la rapporteure. Le « fait maison » n’est pas perçu de façon négative par le milieu de la restauration collective qui, au contraire, réclame la reconnaissance des pratiques vertueuses mises en œuvre. À moins que l’initiative ne soit prise de le signaler, les consommateurs eux-mêmes ne sont pas au fait de ces efforts ; le décret relatif au « fait maison » n’a été pris que l’été dernier, il y a seulement quelques mois. Vous n’êtes pas sans savoir que les acteurs de la restauration commerciale, lorsqu’ils sont aux fourneaux, ne sont pas disponibles pour appliquer le dispositif ; ils mettront à profit la période creuse hivernale pour user de cette possibilité de mise en valeur de la qualité de leur travail.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 5, sans modification.

Elle adopte enfin l’ensemble de la proposition de loi, modifiée.

TABLEAU COMPARATIF

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Dispositions en vigueur

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Texte de la proposition de loi

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Texte adopté par la Commission

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PROPOSITION DE LOI VISANT À FAVORISER L’ANCRAGE TERRITORIAL DE L’ALIMENTATION

PROPOSITION DE LOI VISANT À FAVORISER L’ANCRAGE TERRITORIAL DE L’ALIMENTATION

 

Article 1er

Article 1er

Code rural et de la pêche maritime

Livre II : Alimentation, santé publique vétérinaire et protection des végétaux

Titre III : Qualité nutritionnelle et sécurité sanitaire des aliments

Chapitre préliminaire : La politique publique de l’alimentation

Après l’article L. 230-5 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 230-5-1 ainsi rédigé :

(Alinéa sans modification)

Art. L. 230-5. – Les gestionnaires, publics et privés, des services de restauration scolaire et universitaire ainsi que des services de restauration des établissements d’accueil des enfants de moins de six ans, des établissements de santé, des établissements sociaux et médico-sociaux et des établissements pénitentiaires sont tenus de respecter des règles, déterminées par décret, relatives à la qualité nutritionnelle des repas qu’ils proposent et de privilégier, lors du choix des produits entrant dans la composition de ces repas, les produits de saison. Les règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas sont publiées sous la forme d’une charte affichée dans les services concernés.

   

Les agents habilités veillent au respect des règles fixées en application du présent article. Ils disposent à cet effet des pouvoirs d’enquête prévus au premier alinéa de l’article L. 218-1 du code de la consommation.

   

Lorsqu’un agent mentionné au deuxième alinéa constate dans un service de restauration mentionné au premier alinéa du présent article la méconnaissance de règles relatives à la qualité nutritionnelle applicables en vertu du même article, l’autorité administrative compétente de l’État met en demeure le gestionnaire du service de restauration concerné de respecter ces règles dans un délai déterminé. Si, à l’expiration de ce délai, l’intéressé n’a pas déféré à la mise en demeure, cette autorité peut :

   

1° Ordonner au gestionnaire la réalisation d’actions de formation du personnel du service concerné ;

   

2° Imposer l’affichage dans l’établissement concerné des résultats des contrôles diligentés par l’État.

   

Lorsque le service relève de la compétence d’une collectivité territoriale, d’un établissement public, d’une association gestionnaire ou d’une autre personne responsable d’un établissement privé, l’autorité administrative compétente informe ces derniers des résultats des contrôles, de la mise en demeure et, le cas échéant, des mesures qu’elle a ordonnées.

   

Un décret en Conseil d’État précise la procédure selon laquelle sont prises les décisions prévues au présent article.

   
 

« Art. L. 230-5-1. – Dans les six mois à compter de la promulgation de la loi n° du visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation, l’État ainsi que les collectivités territoriales et leurs groupements servent dans les restaurants collectifs, dont ils ont la charge, 20 % de produits entrant dans la composition des repas servis, relevant de l’alimentation durable c’est-à-dire produits de saison ou sous signes d’identification de la qualité et de l’origine, en veillant à la proximité géographique entre les producteurs agricoles, les transformateurs et les consommateurs. Ce taux est fixé à 40 % à compter du 1er janvier 2020, dont 20 % de produits issus de l’agriculture biologique. »

« Art. L. 230-5-1. – À l’expiration d’un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi n°        du          visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation, l’État ainsi que les collectivités territoriales et leurs groupements servent dans les restaurants collectifs, dont ils ont la charge, 20 % de produits entrant dans la composition des repas servis, relevant de l’alimentation durable c’est-à-dire produits de saison ou sous signes d’identification de la qualité et de l’origine, en veillant à la proximité géographique entre les producteurs agricoles, les transformateurs et les consommateurs. Ce taux est fixé à 40 % à compter du 1er janvier 2020, dont 20 % de produits issus de l’agriculture biologique. »

amendement CE1

 

Article 2

Article 2

 

L’article L. 230-3 du même code est ainsi modifié :

(Sans modification)

 

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

 

Art. L. 230-3. – L’observatoire de l’alimentation a pour mission d’éclairer les acteurs économiques et les pouvoirs publics sur les évolutions de l’offre et de la consommation alimentaires.

a) Après le mot : « alimentation », sont insérés les mots : « et des circuits courts et de proximité » ;

 
 

b) Il est complété par les mots : « et sur le développement des circuits courts et de proximité » ;

 

Il analyse les données nécessaires à l’exercice de ses missions dans les domaines nutritionnel, sanitaire, économique et social. Il assiste le Gouvernement dans la définition des objectifs de la politique publique de l’alimentation et l’évaluation de ses effets. Il fournit également aux secteurs professionnels des outils d’aide à la décision utiles à la mise en œuvre des engagements collectifs définis à l’article L. 230-4.

2° Le deuxième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :

 
 

« En liaison avec les observatoires régionaux et inter-régionaux des circuits courts et de proximité existants, il veille au respect de l’article L. 230-5-1. Les gestionnaires, publics et privés, d’activités de restauration collective recueillent et communiquent à l’observatoire les données quantitatives et qualitatives utiles à l’accomplissement de sa mission de suivi des circuits courts et de proximité. »

 

Les modalités de désignation du président de l’observatoire, le fonctionnement de l’observatoire ainsi que sa composition sont définis par décret.

   
 

Article 3

Article 3

Livre Ier : Aménagement et équipement de l’espace rural

Titre Ier : Développement et aménagement de l’espace rural

Chapitre Ier : Dispositions générales

I. – L’article L. 111-2-1 du même code est ainsi modifié :

I. – (Alinéa sans modification)

Art. L. 111-2-1. – Un plan régional de l’agriculture durable fixe les grandes orientations de la politique agricole, agroalimentaire et agro-industrielle dans la région en tenant compte des spécificités des territoires ainsi que de l’ensemble des enjeux économiques, sociaux et environnementaux.

1° Au premier alinéa, à la dernière phrase du deuxième alinéa, à la première phrase du quatrième alinéa et au cinquième alinéa, le mot : « durable » est remplacé par les mots : « et de l’alimentation durables » ;

1° (Sans modification)

 

2° Au premier alinéa, le mot : « agro-industrielle » est remplacé par le mot : « alimentaire » ;

2° (Sans modification)

   

2° bis (nouveau) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : 

« Ce plan définit le circuit de proximité adapté aux spécificités territoriales et aux besoins de la région. » ;

amendement CE8 et sous-amendement CE17

Le plan précise les actions qui feront l’objet prioritairement des interventions de l’État et des régions. Dans les régions qui comprennent des territoires classés en zone de montagne au titre de l’article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, le plan régional détaille les actions spécifiques ou complémentaires que l’État et les régions mènent pour l’agriculture de montagne, en tenant compte des orientations fixées en ce domaine par le schéma interrégional d’aménagement et de développement de massif, et en indiquant lesquelles ont vocation à être contractualisées dans le cadre des conventions interrégionales de massif. La commission permanente des comités de massif concernés peut donner son avis sur le projet de plan régional de l’agriculture durable et des régions.

   

Le représentant de l’État dans la région et le président du conseil régional conduisent conjointement la préparation du plan en y associant les collectivités territoriales et les chambres d’agriculture concernées ainsi que l’ensemble des organisations syndicales agricoles représentatives ; ils prennent en compte, dans cette préparation, les dispositions des schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux mentionnés à l’article L. 212-1 du code de l’environnement et des schémas régionaux de cohérence écologique mentionnés à l’article L. 371-3 du même code ainsi que les orientations découlant des directives territoriales d’aménagement et de développement durables définies à l’article L. 113-1 du code de l’urbanisme.

[…]

3° Au troisième alinéa, après le mot : « représentatives », sont insérés les mots : « et les comités régionaux pour l’alimentation. »

3° (Sans modification)

Art. L. 1. – […]

III. – L’État veille, notamment par la mise en œuvre de ses missions régaliennes, à la sécurité sanitaire de l’alimentation.

II. – 1° À la première phrase du quatrième alinéa du III de l’article L. 1, au deuxième alinéa de l’article L. 111-2-2, à la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 180-1 et à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 315-2 du même code, le mot : « durable » est remplacé par les mots : « et de l’alimentation durables ».

II. – A. – À la première phrase de l’avant-dernier alinéa du III de l’article L. 1, au deuxième alinéa de l’article L. 111-2-2, à la première phrase du 1° de l’article L. 180-1, à la fin de la seconde phrase du I de l’article L. 312-1, au 3° de l’article L. 315-2 et à la première phrase du second alinéa de l’article L. 511-14 du même code, le mot : « durable » est remplacé par les mots : « et de l’alimentation durables ».

amendement CE2

Le programme national pour l’alimentation détermine les objectifs de la politique de l’alimentation mentionnée au 1° du I du présent article, en prenant en compte notamment la justice sociale, l’éducation alimentaire de la jeunesse et la lutte contre le gaspillage alimentaire. Pour assurer l’ancrage territorial de cette politique, il précise les modalités permettant d’associer les collectivités territoriales à la réalisation de ces objectifs. Il propose des catégories d’actions dans les domaines de l’éducation et de l’information pour promouvoir l’équilibre et la diversité alimentaires, les produits locaux et de saison ainsi que la qualité nutritionnelle et organoleptique de l’offre alimentaire, dans le respect des orientations du programme national relatif à la nutrition et à la santé défini à l’article L. 3231-1 du code de la santé publique.

   

Le programme national pour l’alimentation encourage le développement des circuits courts et de la proximité géographique entre producteurs agricoles, transformateurs et consommateurs. Il prévoit notamment des actions à mettre en œuvre pour l’approvisionnement de la restauration collective, publique comme privée, en produits agricoles de saison ou en produits sous signes d’identification de la qualité et de l’origine, notamment issus de l’agriculture biologique.

   

Les actions répondant aux objectifs du programme national pour l’alimentation et aux objectifs des plans régionaux de l’agriculture durable, définis à l’article L. 111-2-1 du présent code, peuvent prendre la forme de projets alimentaires territoriaux. Ces derniers visent à rapprocher les producteurs, les transformateurs, les distributeurs, les collectivités territoriales et les consommateurs et à développer l’agriculture sur les territoires et la qualité de l’alimentation.

[…]

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. L. 111-2-2. – Les projets alimentaires territoriaux mentionnés au III de l’article L. 1 sont élaborés de manière concertée avec l’ensemble des acteurs d’un territoire et répondent à l’objectif de structuration de l’économie agricole et de mise en œuvre d’un système alimentaire territorial. Ils participent à la consolidation de filières territorialisées et au développement de la consommation de produits issus de circuits courts, en particulier relevant de la production biologique.

   

À l’initiative de l’État et de ses établissements publics, des collectivités territoriales, des associations, des groupements d’intérêt économique et environnemental définis à l’article L. 315-1, des agriculteurs et d’autres acteurs du territoire, ils répondent aux objectifs définis dans le plan régional de l’agriculture durable et sont formalisés sous la forme d’un contrat entre les partenaires engagés.

[…]

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. L. 180-1. – En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion et à Mayotte, les actions en matière de développement agricole, agro-industriel, halio-industriel et rural qui font prioritairement l’objet des interventions de l’État sont précisées dans deux plans régionaux, en conformité avec les orientations déterminées par les comités d’orientation stratégique et de développement agricole mentionnés à l’article L. 181-25 :

   

1° Le plan régional de l’agriculture durable mentionné à l’article L. 111-2-1, dont les orientations prioritaires comprennent le développement des filières afin de garantir leur accès aux marchés, le soutien à la petite agriculture familiale, à l’agriculture vivrière et à l’installation des agriculteurs, la préservation du foncier agricole et forestier, le développement des énergies renouvelables et la promotion de la mise en place de groupements d’intérêt économique et environnemental au sens de l’article L. 315-1. Ce plan détaille les actions spécifiques ou complémentaires menées par l’État en tenant compte des orientations fixées en la matière par le schéma d’aménagement régional ;

2° […]

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. L. 315-2. – Pour permettre la reconnaissance d’un groupement comme groupement d’intérêt économique et environnemental, le projet pluriannuel mentionné à l’article L. 315-1 doit :

1° […]

2° […]

   

3° Répondre aux enjeux économiques, sociaux et environnementaux du territoire où sont situées les exploitations agricoles concernées, notamment ceux identifiés dans le plan régional de l’agriculture durable mentionné à l’article L. 111-2-1, en cohérence avec les projets territoriaux de développement local existants ;

4° […]

   

Code de l’environnement

Art. L. 425-1. – Un schéma départemental de gestion cynégétique est mis en place dans chaque département. Ce schéma est établi pour une période de six ans renouvelable. Il est élaboré par la fédération départementale ou interdépartementale des chasseurs, en concertation notamment avec la chambre d’agriculture, les représentants de la propriété privée rurale et les représentants des intérêts forestiers, en particulier lorsque le programme régional de la forêt et du bois prévu à l’article L. 122-1 du code forestier fait état de dysfonctionnements au regard de l’équilibre sylvocynégétique. Le schéma est compatible avec le plan régional de l’agriculture durable mentionné à l’article L. 111-2-1 du code rural et de la pêche maritime ainsi qu’avec les orientations régionales de gestion et de conservation de la faune sauvage et de ses habitats mentionnées à l’article L. 414-8 du présent code et avec les programmes régionaux de la forêt et du bois mentionnés à l’article L. 122-1 du code forestier. Il est approuvé, après avis de la commission départementale compétente en matière de chasse ou de faune sauvage, par le préfet, qui vérifie notamment qu’il est compatible avec les principes énoncés à l’article L. 420-1 et les dispositions de l’article L. 425-4 du présent code et qu’il prend en compte le schéma régional de maîtrise des dangers sanitaires défini à l’article L. 201-12 du code rural et de la pêche maritime.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

2° À la quatrième phrase de l’article L. 425-1 et au quatrième alinéa du II de l’article L. 515-3 du code de l’environnement, le mot : « durable » est remplacé par les mots : « et de l’alimentation durables ».

B. – (Sans modification)

Art. L. 515-3. – […]

II. – Le schéma régional des carrières est élaboré par le préfet de région.

   

Le contenu du schéma, les modalités et les conditions de son élaboration, de sa révision et, le cas échéant, de sa modification sont précisés par décret en Conseil d’État.

   

Le schéma régional des carrières est élaboré après consultation :

   

1° Du plan régional de l’agriculture durable mentionné à l’article L. 111-2-1 du code rural et de la pêche maritime ;

[…]

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Code rural et de la pêche maritime

Livre Ier : Aménagement et équipement de l’espace rural

Titre VIII : Dispositions particulières à l’outre-mer

   

Art. L. 180-2. – I. – Pour l’application en Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion et à Mayotte de l’article L. 111-2-1 :

1° […]

2° […]

   

3° Le début du troisième alinéa est ainsi rédigé : " Le représentant de l’État et le président de la collectivité compétente en matière de développement agricole conduisent conjointement la préparation du plan en y associant les autres collectivités territoriales, la chambre d’agriculture ainsi que l’ensemble des organisations professionnelles agricoles et des organisations syndicales agricoles représentatives ; ils prennent en compte dans cette préparation, les dispositions des schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux mentionnés à l’article L. 212-1 du code de l’environnement et des schémas régionaux de cohérence écologique mentionnés à l’article L. 371-3 du même code ainsi que les orientations découlant des directives territoriales d’aménagement et de développement durables définies à l’article L. 102-4 du code de l’urbanisme ;

4° […]

III. – Au 3° des I et II de l’article L. 180-2 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « représentatives », sont insérés les mots : « et les comités régionaux pour l’alimentation. »

III. – (Sans modification)

II. – Pour l’application en Martinique de l’article L. 111-2-1 :

1° […]

2° […]

   

3° Le début du troisième alinéa est ainsi rédigé : " Le représentant de l’État et le président du conseil exécutif de la Martinique conduisent conjointement la préparation du plan en y associant les autres collectivités territoriales, la chambre d’agriculture ainsi que l’ensemble des organisations professionnelles agricoles et des organisations syndicales agricoles représentatives ; ils prennent en compte... (le reste sans changement). " ;

4° […]

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   
   

IV (nouveau). – Les plans régionaux de l’agriculture durable arrêtés dans la période comprise entre le 14 octobre 2014 et l’expiration d’un délai de six à compter de la promulgation de la présente loi sont révisés avant le 1er janvier 2020 pour y intégrer les actions relatives à la politique de l’alimentation.

amendement CE13 (rect)

 

Article 4

Article 4

Code de commerce

LIVRE II : Des sociétés commerciales et des groupements d’intérêt économique.

TITRE II : Dispositions particulières aux diverses sociétés commerciales.

Chapitre V : Des sociétés anonymes.

Section 3 : Des assemblées d’actionnaires

 

(Sans modification)

Art. L. 225-102-1. – Le rapport visé à l’article L. 225-102 rend compte de la rémunération totale et des avantages de toute nature versés, durant l’exercice, à chaque mandataire social, y compris sous forme d’attribution de titres de capital, de titres de créances ou de titres donnant accès au capital ou donnant droit à l’attribution de titres de créances de la société ou des sociétés mentionnées aux articles L. 228-13 et L. 228-93.

[…]

   

Il comprend également des informations sur la manière dont la société prend en compte les conséquences sociales et environnementales de son activité, incluant les conséquences sur le changement climatique de son activité et de l’usage des biens et services qu’elle produit, ainsi que sur ses engagements sociétaux en faveur du développement durable, de l’économie circulaire et en faveur de la lutte contre les discriminations et de la promotion des diversités. Un décret en Conseil d’État établit deux listes précisant les informations visées au présent alinéa ainsi que les modalités de leur présentation, de façon à permettre une comparaison des données, selon que la société est ou non admise aux négociations sur un marché réglementé.

[…]

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

À la première phrase du cinquième alinéa de l’article L. 225-102-1 du code de commerce, après le mot : « durable », sont insérés les mots : « , de l’alimentation durable ».

 
 

Article 5

Article 5

Code de la consommation

Livre Ier : Information des consommateurs et formation des contrats

Titre II : Pratiques commerciales

Chapitre Ier : Pratiques commerciales réglementées

Section 10 bis : Qualité et transparence dans l’élaboration des plats proposés dans le cadre d’une activité de restauration commerciale

 

(Sans modification)

Art. L. 121-82-1. – Les personnes ou entreprises qui transforment ou distribuent des produits alimentaires dans le cadre d’une activité de restauration commerciale ou de vente à emporter de plats préparés, permanente ou occasionnelle, principale ou accessoire, précisent sur leurs cartes ou sur tout autre support qu’un plat proposé est "fait maison".

Au premier alinéa de l’article L. 121-82-1 du code de la consommation, après le mot : « commerciale », sont insérés les mots : « , de restauration collective ».

 

Un plat "fait maison" est élaboré sur place à partir de produits bruts. Des produits, déterminés par voie réglementaire, peuvent entrer dans la composition des plats "faits maison" après avoir subi une transformation de leur état brut nécessaire à leur utilisation.

   

Les modalités de mise en œuvre de la mention "fait maison", les conditions d’élaboration des plats "faits maison", notamment les cas dans lesquels le lieu d’élaboration peut être différent du lieu de consommation ou de vente, et celles permettant au consommateur d’identifier les plats "faits maison" et ceux qui ne le sont pas sont précisées par décret.

   

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mairie de Paris

Mme Alexandra Cordebard, maire adjointe de Paris, chargée des questions relatives aux affaires scolaires, à la réussite éducative, aux rythmes scolaires

Caisse des écoles du 20e arrondissement de Paris

M. Philippe Cosnay, directeur

M. Jean-Philippe Flageul, responsable de la cuisine centrale

Mme Hélène Jourdain, collaboratrice de la présidente de la caisse des écoles

Association des maires de France (AMF) *

M. Sébastien Ferriby, conseiller éducation et culture

Mme Ann-Charlotte Bérard-Walsh, conseiller en charge de la commande publique

Mme Charlotte de Fontaines, chargée des relations avec le Parlement

Chambres d’agriculture de France *

M. Jean-Louis Cazaubon, vice-président de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture, président de la chambre régionale d’agriculture de Midi-Pyrénées

Mme Isabelle Froux, chargée de mission alimentation de proximité

Mme Aline Muzard, chargée d’études relations publiques et affaires parlementaires françaises

Association Un plus bio

M. Gilles Pérole, vice-président du Club des territoires un plus bio

Fondation Nicolas Hulot (FNH)

M. Édouard Marchand, coordinateur agriculture et alimentation

M. Patrice Raveneau, chargé de projet restauration collective responsable

Syndicat national de la restauration collective (SNRC)

M. Jacques Roux, président

M. Dominique-Ph. Bénézet, délégué général

Restau’co

M. Éric Lepêcheur, directeur

Mouvement des entreprises de France (MEDEF) *

M. Michel Laviale, président du groupe de travail performance extra-financière

Mme Marine Binckli, chargée de mission à la direction des affaires publiques

Association des départements de France (ADF) *

Contribution écrite

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

© Assemblée nationale

1 () INRA, Denis Lairon, « 90 arguments en faveur de l’agriculture biologique ».

2 () Ibidem.

3 () Ibidem.

4 () Le 8 février 2013, l’entreprise Findus retire de la viande des plats préparés contenant de la viande de cheval. En France, c’est l’entreprise Spanghero qui a été mise en cause.

5 () Guide pratique d’Agrobio Périgord et de Bio d’Aquitaine, « Comment introduire des produits biologiques en restauration collective. »

6 () Dossier d’information du Conseil national des appellations d’origine laitières (CNAOL), 2014.

7 () Agence bio, 2010.

8 () Agrapresse

9 () Source : ministère de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt, 2014.

10 () Baromètre Agence Bio/CSA 2015.

11 () Fédération nationale d’agriculture biologique (FNAB) 2015

12 () Corabio, Étude sur le prix des produits bio et conventionnels, janvier 2012

13 () Baromètre Agence Bio/CSA 2015

14 () www.inpact-paca.org.

15 () Décret n° 2012-557 du 24 avril 2012 relatif aux obligations de transparence des entreprises en matière sociale et environnementale