N° 3620 - Avis de Mme Nathalie Nieson sur le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, autorisant l'accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l'Atlantique Nord (n°3578).




N
° 3620

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 30 mars 2016.

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES
SUR LE PROJET DE LOI (n° 3578), ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE,
autorisant l’accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord,

PAR Mme Nathalie NIESON,

Députée.

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Voir les numéros :

Sénat : 1ère lecture : 286, 457, 458 et T.A. 111 (2015-2016).

Assemblée nationale : 1ère lecture : 3615.

SOMMAIRE

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Pages

A. LA FRANCE ET L’OTAN, UNE HISTOIRE MOUVEMENTÉE 7

B. DEPUIS 2009, LA FRANCE ACCUEILLE DE NOUVEAU DU PERSONNEL DE L’ALLIANCE 9

II. LES DISPOSITIONS DU PROTOCOLE DE PARIS : UNE SIMPLIFICATION ADMINISTRATIVE ATTENDUE POUR LES QUARTIERS GÉNÉRAUX MILITAIRES ET LEURS PERSONNELS 11

A. L’APPLICATION DU PROTOCOLE SUR LE TERRITOIRE NATIONAL 11

B. LES DISPOSITIONS DU PROTOCOLE DE PARIS 12

TRAVAUX DE LA COMMISSION 17

ANNEXE : Liste des personnes auditionnées par la rapporteure pour avis 19

Mesdames, Messieurs,

La commission de la Défense nationale et des forces armées s’est saisie pour avis du projet de loi autorisant l’accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord, dit Protocole de Paris. Le présent texte, renvoyé au fond à la commission des Affaires étrangères, sera examiné en séance publique lors de la séance du 7 avril 2016. Il a été adopté par le Sénat le 16 mars dernier.

Dès son accession aux plus hautes responsabilités de l’État, le président de la République, M. François Hollande, a souhaité que soit réévaluée la décision prise en 2009 par son prédécesseur de pleinement réintégrer les structures militaires intégrées de l’OTAN. Afin de mener cette évaluation de manière impartiale, le chef de l’État a confié à M. Hubert Védrine la mission d’établir un rapport sur les conséquences du retour de la France dans les structures militaires intégrées de l’OTAN.

Remis au président de la République en novembre 2012, ce rapport a conclu notamment qu’une « (re)sortie française du commandement intégré n’est pas une option ». Suivant cette conclusion, la France a réaffirmé son engagement au sein des structures militaires intégrées de l’OTAN, confirmant le processus de rapprochement vers l’organisation entamé au début des années 1990, sur la volonté du président Mitterrand.

Aujourd’hui, il est proposé à la représentation nationale d’autoriser l’accès de la France au protocole de Paris, qui définit le cadre juridique applicable aux quartiers généraux de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord, ou reconnus par elle, ainsi qu’aux officiers et soldats issus de pays alliés qui y servent. Ce protocole complète la convention entre les États parties au Traité de l’Atlantique Nord signée le 19 juin 1951, dite SOFA OTAN, qui régit les échanges de personnels entre Alliés et constitue la référence dans ce domaine.

Membre fondateur de l’OTAN, la France fut l’un des signataires originels de ce protocole, le 28 août 1952. Il n’est d’ailleurs pas anodin que ce texte porte le nom de notre capitale... À la suite de la décision du général de Gaulle de quitter le commandement militaire intégré de l’Organisation, le 30 mars 1966, les autorités françaises ont dénoncé ce protocole qui n’était plus pertinent, le territoire national n’accueillant plus de quartiers généraux militaires de l’OTAN, ni d’hommes et de femmes affectés à cette structure.

La situation a changé et la « ré-accession » au Protocole de Paris est ainsi la suite logique de la réintégration de notre pays dans les structures militaires intégrées de l’OTAN. D’une certaine manière, la décision de réintégration au sein du commandement militaire intégré aurait dû s’accompagner de la ratification de ce protocole. Depuis 2009, la France a recommencé à accueillir du personnel de l’Organisation dans ses quartiers généraux militaires sans que ceux-ci ne bénéficient d’aucun statut international. Seuls des arrangements de circonstance ont permis jusqu’ici l’accueil de personnels de l’OTAN dans les quartiers généraux situés sur le sol français.

Finalement, les négociations en vue d’une accession de la France au Protocole de Paris ont débuté en septembre 2014, en marge du Sommet de l’OTAN du pays de Galles, et la décision française a été présentée au secrétaire général de l’OTAN le 21 janvier 2015. Soumise dans la foulée au Conseil de l’Atlantique Nord, elle a été aussitôt saluée et a recueilli le soutien unanime des 27 autres membres de l’Alliance, ainsi que le secrétaire général de l’OTAN en a pris acte par courrier en date du 28 janvier 2015.

Votre rapporteure souhaite insister sur le caractère essentiellement technique du Protocole de Paris. Il ne s’agit en rien de relancer le débat sur l’opportunité politique et militaire de rejoindre pleinement les structures de l’Alliance atlantique. Comme l’ont montré récemment dans leur rapport sur l’évolution du rôle de l’OTAN nos collègues MM. Gilbert Le Bris et Philippe Vitel (1), il ne convient pas de questionner la place de la France dans l’OTAN, si ce n’est pour nous demander si nous assumons pleinement notre retour. Dans ce contexte, l’accession au Protocole de Paris est hautement symbolique, car elle témoigne de l’engagement de notre pays au sein de l’Alliance, alors que la résurgence d’une menace à l’est, l’ancrage d’un front au sud et au Moyen-Orient en raison de la menace terroriste et l’apparition de nouvelles sources de déstabilisation appellent une réponse coordonnée entre les alliés.

L’accession au Protocole de Paris n’a pas vocation à autoriser l’accueil de nouveaux quartiers généraux de l’OTAN sur notre sol, mais à sécuriser les structures qui y sont déjà présentes. Elle nous permettra de simplifier la vie quotidienne des personnels implantés sur notre territoire, de renforcer l’attractivité de la France et ainsi de conforter notre influence au sein de l’Alliance, tout en témoignant à nos alliés de notre plein engagement.

Elle ne porte nullement atteinte à l’autonomie et à l’indépendance de notre politique de défense ou à la souveraineté nationale, et c’est pourquoi votre rapporteure engage l’Assemblée nationale à adopter le présent projet de loi.

Votre rapporteure n’a pas pour ambition de présenter ici une histoire exhaustive des relations entre la France et l’OTAN. S’il n’y avait qu’un constat à dresser, il conviendrait de rappeler que la France n’a jamais réellement quitté l’OTAN, demeurant engagée auprès de l’Alliance après 1966.

En tant que membre fondateur, la France participe pleinement à la structuration de l’OTAN, et ce dès l’origine. Cet engagement au sein de l’Alliance se traduit par l’accueil sur le territoire de multiples infrastructures et de très nombreux personnels, dont la présence marquera profondément des villes comme Châteauroux, Évreux, Laon, La Rochelle, Orléans, Verdun et tant d’autres, en quelque sorte américanisées durant une quinzaine d’années.

La France accueille également les instances décisionnelles de l’Alliance. Le Palais de Chaillot, situé au Trocadéro à Paris, accueille de manière transitoire le siège de l’OTAN à partir de 1952, jusqu’à son transfert en 1959 Porte Dauphine, au « Palais de l’OTAN » construit à cet effet sur des plans de l’architecte Jacques Carlu. De même, le Grand quartier général des puissances alliées en Europe (SHAPE), est établi à Rocquencourt, dans les Yvelines, tandis que plusieurs bases de l’Alliance sont implantées sur le territoire, dont des bases aériennes de l’US Air Force.

Lorsque le général de Gaulle évoque, le 21 février 1966, l’incompatibilité entre « la volonté qu’a la France de disposer d’elle-même […] et une organisation de défense où elle se trouve subordonnée », une large partie de la population française est prise de court. Quelques jours plus tard, le 7 mars, le ministre des Affaires étrangères, M. Maurice Couve de Murville, remet à l’ambassadeur des États-Unis une lettre manuscrite destinée au président Johnson, dans laquelle le chef de l’État confirme son souhait de se retirer des structures militaires intégrées. Le 10 mars, un mémorandum est transmis aux quatorze alliés de l’OTAN, complété le 29 mars d’un aide-mémoire les informant que le retrait des états-majors et des bases devait être achevé avant le 1er avril 1967.

Au-delà des deux commandements intégrés installés à Fontainebleau et à Rocquencourt, 30 bases militaires, 27 000 soldats et 37 000 employés civils sont concernés, soit près de 100 000 personnes en ajoutant leurs familles.

Les forces de l’OTAN en France en 1966

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Comme le souligne le rapport d’information précité, la France a néanmoins conservé une position particulière : toujours membre de l’Alliance, elle ne mettait plus de forces à disposition de l’OTAN. Ainsi, « l’engagement de la France auprès de l’OTAN a perduré, que l’on pense à la contribution aux orientations politiques de l’organisme, de ses engagements au titre de la défense collective ou de sa participation aux opérations de gestion de crise. La solidarité de la France avec ses Alliés ne s’est ainsi jamais démentie pendant les périodes de tension de la Guerre froide, de la crise des missiles de Cuba à celle des « euromissiles », lors de laquelle la France a soutenu le déploiement par l’OTAN de missiles Pershing en République fédérale d’Allemagne en réponse au déploiement de missiles nucléaires soviétiques SS-20. » À la fin de la Guerre froide, la France a entamé un lent processus de rapprochement, en participant à la définition du concept stratégique de l’Alliance et à toutes les instances intergouvernementales de l’Alliance, en « insérant » des personnels auprès du Grand quartier général des forces alliées en Europe et surtout en participant militairement aux opérations de l’OTAN, en Bosnie, en ex-Yougoslavie et en Afghanistan.

Le plein retour de la France dans les structures intégrées de l’OTAN, annoncé lors du Sommet de Strasbourg-Kehl des 3 et 4 avril 2009, avait fait l’objet d’un vote à l’Assemblée nationale en mars 2009, le gouvernement ayant engagé sa responsabilité sur une déclaration de politique étrangère au titre de l’article 49-1 de la Constitution. Cette décision était attendue, le président de la République ayant fait part dès octobre 2007 devant le Congrès américain de son intention de pleinement réintégrer l’Alliance atlantique.

Si des questions demeurent s’agissant des conséquences de la réintégration, notamment en matière d’influence et de retombées économiques pour les entreprises françaises, force est de constater que le retour de la France dans les structures militaires intégrées de l’OTAN s’est accompagné de l’obtention du poste de commandement suprême allié chargé de la transformation de l’OTAN, basé à Norfolk. Ce poste est actuellement occupé par le général français Denis Mercier, qui a pris ses fonctions le 30 septembre 2015 à la suite du général Jean-Paul Paloméros et du général Stéphane Abrial. Plus largement, plusieurs centaines de militaires français ont été déployés dans la quinzaine d’états-majors de la structure militaire de l’OTAN et notre pays contribue de manière significative à cette force en termes d’effectifs et de moyens. Enfin, notre pays est aujourd’hui le troisième contributeur aux budgets de l’OTAN, sa contribution s’élevant en 2015 à près de 220 millions d’euros.

Parallèlement, la France a recommencé d’accueillir des personnels militaires issus des pays de l’OTAN et, selon les données communiquées par le ministère de la Défense, 240 militaires affectés en France seraient susceptibles de bénéficier de l’application du protocole de Paris. Ces militaires dépendent actuellement d’un régime juridique plus ou moins bricolé, issu d’arrangements bilatéraux ou multilatéraux ponctuels. Ils ne disposent pas d’un statut harmonisé, à l’inverse de l’ensemble des personnels OTAN déployés dans les différentes structures implantées sur les territoires des membres de l’Alliance. Cet imbroglio engendre des difficultés administratives, juridiques et financières, auxquelles ils ne sont pas confrontés dans les autres pays de l’Alliance. Il convient également de souligner que nos propres officiers en poste dans les structures de nos alliés n’y sont pas non plus confrontés, puisqu’ils bénéficient du statut défini par le protocole de Paris. Il y a là une incohérence qu’il convient de résorber au plus vite.

Le protocole de Paris est un texte d’essence avant tout technique. Il n’en demeure pas moins clair et accessible. Sa brièveté – 16 articles (2) – s’explique par sa nature même : le protocole de Paris ne crée en effet pas un régime spécifique mais étend simplement l’application de la convention entre les États parties au Traité de l’Atlantique Nord sur le statut des forces, dite « SOFA OTAN », signée à Londres le 19 juin 1951, aux quartiers généraux interalliés créés en vertu du traité de l’Atlantique Nord ou aux « organismes militaires internationaux », ainsi qu’à leurs personnels civils et militaires. Le texte de l’accord précise d’ailleurs bien qu’il s’agit d’un « protocole à la Convention sur le statut [des] forces ».

La France est partie au SOFA OTAN depuis l’origine et sans discontinuer puisque, rappelons-le, notre pays n’a jamais quitté l’Alliance atlantique. Il s’agit donc, par l’accession au protocole de Paris, de n’opérer qu’une simple action de coordination et de bonne administration.

Tout d’abord, il convient de préciser que le protocole de Paris s’applique, aux « quartiers généraux suprêmes » de l’OTAN, ainsi qu’à « tout quartier général militaire international créé en vertu du traité de l’Atlantique Nord et directement subordonné à un quartier général suprême ». Pour rappel, il n’existe en fait que deux quartiers généraux suprêmes, dont aucun n’est situé en France : le commandement allié opérations (ACO), situé à Mons, en Belgique, et le commandement allié transformation (ACT), implanté à Norfolk, aux États-Unis. La France n’abrite par ailleurs aucun quartier général militaire international subordonné à un quartier général suprême et il n’existe pas de projet d’en installer un.

En revanche, l’article 14 du protocole de Paris prévoit que le Conseil de l’Atlantique Nord peut décider d’appliquer tout ou partie des stipulations du protocole à tout « quartier général militaire international » ou à toute « organisation militaire internationale » n’entrant pas dans les définitions de l’article 1er du protocole de Paris. De manière plus précise, cette disposition signifie que tout membre de l’Alliance peut solliciter le Conseil de l’Atlantique Nord en vue d’« activer » une des structures militaires implantées sur son territoire, afin de lui voir appliquer les dispositions du protocole.

D’après l’étude d’impact annexée au projet de loi, quatre sites pourraient être concernés en France :

– le Quartier général du corps de réaction rapide (CRR-FR) de Lille, certifié par l’OTAN, dont le statut est fixé par un arrangement technique conclu en 2006 entre les ministres de la Défense de douze membres de l’OTAN, le ministre de la Défense français et le SHAPE. Ce site regroupe 425 personnels dont une soixantaine de militaires étrangers provenant de différents États membres de l’Alliance ;

– le Quartier général du corps de réaction rapide européen (CRR-E, « Eurocorps ») de Strasbourg, certifié par l’OTAN, régi par le Traité relatif au corps européen et au statut de son Quartier général, conclu entre la République française, la République fédérale d’Allemagne, le Royaume de Belgique, le Royaume d’Espagne et le Grand-Duché de Luxembourg, signé à Bruxelles le 22 novembre 2004. 1 100 personnels issus de différentes nations européennes y sont affectés ;

– le Quartier général de l’état-major de force aéromaritime française de réaction rapide, situé à Toulon (COMFRMARFOR), qualifié pour opérer au sein de la force de réaction rapide de l’OTAN, regroupe 115 personnels dont 15 étrangers de huit nations différentes ;

– le « centre d’excellence » français d’analyse et de simulation pour la préparation aux opérations aériennes (CASPOA) de Lyon bénéficie d’une accréditation OTAN afin d’apporter un soutien en matière d’entraînement, de formation et de développement doctrinal aux activités de l’OTAN. Il compte actuellement 40 personnels dont trois étrangers en provenance d’Italie, des États-Unis et d’Allemagne.

L’article 4 du protocole pose le principe selon lequel les droits et les obligations que le SOFA OTAN confère à un État d’origine à l’égard de ses personnels militaires et civils ainsi qu’aux personnes à charge de ces personnels seront, en ce qui concerne les quartiers généraux interalliés, leurs personnels et les personnes à charge, dévolus au quartier général suprême approprié et aux autorités qui en relèvent, sous les réserves suivantes :

– le personnel affecté aux quartiers généraux bénéficie des privilèges de juridiction prévus par le SOFA OTAN ;

– les quartiers généraux partagent avec les États d’origine les obligations du SOFA OTAN liées à l’arrestation de leur personnel, aux enquêtes, à la recherche des preuves en matière de demandes d’indemnités ainsi qu’au paiement des amendes.

L’article 5 du protocole de Paris impose aux quartiers généraux interalliés de fournir à leurs membres une carte d’identité personnelle, qui devra être produite à toute réquisition.

L’article 6 du protocole de Paris précise les conditions d’application, dans le contexte des quartiers généraux interalliés, des dispositions du SOFA OTAN relatives au règlement des dommages occasionnés ou subis sur le territoire de l’État de séjour. Ainsi l’obligation de renoncer à toute indemnité s’applique à la fois aux quartiers généraux interalliés et à tout État Partie au protocole. Les stipulations du SOFA OTAN relatives aux dommages causés ou subis par les membres des forces s’appliquent aux employés des quartiers généraux interalliés.

Les articles 7 et 8 du protocole de Paris traitent des exonérations fiscales dont bénéficient les personnels civils et militaires ainsi les quartiers généraux.

S’agissant des exonérations fiscales individuelles, l’article 7 distingue deux régimes :

– les membres des forces ou de l’élément civil d’un État partie au Traité de l’Atlantique Nord affectés par leur État d’envoi auprès d’un quartier général sont exonérés d’impôt dans l’État d’accueil au titre des traitements et émoluments perçus payés par la force armée à laquelle ils appartiennent ou par laquelle ils sont employés, mais restent imposables par le pays dont ils ont la nationalité ;

– les personnels directement employés par un quartier général interallié et rémunérés sur le budget de l’OTAN, soumis à l’impôt interne prévu par l’organisation, sont exempts d’impôt sur les traitements et émoluments versés en cette qualité par le quartier général, dans tous les États parties au protocole (3).

Concernant les quartiers généraux, ils peuvent être exonérés, sur le territoire des États Parties, des droits et taxes afférents aux dépenses qu’ils supportent dans l’intérêt de la défense commune et pour leur avantage officiel et exclusif. Cette exonération est relativement classique s’agissant d’une organisation internationale.

L’article 9 précise les conditions de liquidation des avoirs acquis par un quartier général interallié au moyen de fonds internationaux dès lors qu’ils ont cessé d’être nécessaires. Deux possibilités sont ainsi envisagées :

– le produit issu de la liquidation d’avoirs acquis au moyen de fonds internationaux d’un quartier général interallié sur son budget en capital est réparti entre les membres de l’Alliance. L’État de séjour dispose en ce cas d’une priorité pour acquérir toute propriété ainsi liquidée sur son territoire ;

– les terrains ou installations mis à disposition à titre gracieux par l’État de séjour lui sont rendus, toute plus ou moins-value des biens étant répartie entre les membres de l’Alliance.

Les articles 10 et 11 du protocole de Paris dotent chaque quartier général suprême de la capacité juridique, lui permettant de contracter, d’acquérir et d’aliéner, sous réserve d’accords particuliers signés avec l’État d’accueil. Par ailleurs, les quartiers généraux suprêmes sont fondés à ester en justice, soit pour eux-mêmes, soit pour tout quartier général subordonné autorisé par lui, tandis qu’aucune mesure d’exécution ne peut être prise contre un quartier général interallié.

L’article 12 autorise un quartier général interallié à détenir des devises quelconques ainsi que des comptes en toute monnaie pour assurer le fonctionnement de son budget international. Il prévoit également que les transferts de fonds et la conversion desdites devises doivent être facilités par les États parties.

L’article 13 instaure un régime d’inviolabilité des archives et documents officiels détenus par un quartier général interallié, sauf dans le cas où ce dernier renonce à cette immunité.

L’article 14, dont il a déjà été question, permet d’étendre les dispositions du protocole de Paris à d’autres structures, sous réserve d’une décision d’activation prononcée par le Conseil de l’Atlantique Nord.

L’article 15, enfin, traite des contestations relatives à l’interprétation ou à l’application du protocole, en précisant qu’elles doivent être réglées par voie de négociations directes entre les parties intéressées ou, en cas d’échec, devant le Conseil de l’Atlantique Nord.

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* *

En définitive, l’application du protocole de Paris a vocation à faciliter la vie quotidienne des personnels militaires et civils déployés sur le territoire national par nos alliés. Les multiples dénonciations, entendues ici ou là, au sujet d’une soumission à une puissance étrangère et d’un abandon de souveraineté, n’ont pas lieu d’être. Il est davantage question de la mise en place d’un statut relativement classique s’agissant des organisations internationales et de leurs personnels. Aujourd’hui, l’accueil de ces personnels étrangers se fait sur la base d’arrangements techniques qui offrent moins de sécurité juridique et d’harmonisation, et pénalisent notre pays.

Notre engagement militaire au sein de l’Alliance n’est pas mis en cause, et nos alliés savent que la France est volontaire, engagée, et prête à faire face aux menaces multiples qui pèsent sur l’Europe et le monde. Le niveau d’engagement de nos forces en opérations extérieures comme sur le territoire national en atteste quotidiennement.

Il serait hautement regrettable de ternir cette image par la permanence de tracasseries administratives et techniques, alors même que nos propres hommes et femmes déployés dans les structures de l’OTAN bénéficient des dispositions du protocole de Paris.

Pour toutes ces raisons, votre rapporteure engage l’Assemblée nationale à adopter le présent projet de loi.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission examine pour avis, sur le rapport de Mme Nathalie Nieson, le projet de loi, adopté par le sénat, après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord, au cours de sa réunion du mercredi 30 mars 2016 (n° 3578).

Un débat suit l’exposé de la rapporteure pour avis.

M. Nicolas Dhuicq. Le plein retour de la France dans l’OTAN était accompagné du pari de la création d’un pôle européen de défense. Force est de constater que ce n’est pas le cas. L’OTAN coûte de l’argent et je me demande même aujourd’hui à quoi sert l’OTAN, dont certains membres, je pense à la Turquie M. Erdoğan, pratiquent un jeu trouble comme chacun le sait ici. Le roi de Jordanie lui-même vient de rappeler que le terrorisme constituait un allié objectif de M. Erdoğan. Ma chère collègue, vous avez évoqué l’attractivité de la France, mais ne nous leurrons pas ! La France est la seule aujourd’hui à payer le prix du sang et se trouve aujourd’hui à la remorque des États-Unis. Nous voyons bien quelle est la logique anglo-saxonne guerrière, particulièrement américaine, fondée sur une propagande éhontée dénonçant le supposé retour de la puissance russe. Il y a quelques mois à peine, la Russie était attaquée pour avoir déployé cinquante aéronefs alors que 300 aéronefs américains étaient en vol dans le même temps entre le Bosphore et le détroit d’Ormuz. Je me demande donc à quoi sert l’OTAN ! Ce que je constate, c’est que petit à petit nous perdons notre souveraineté, notre autonomie et au bout du compte notre crédibilité dans un monde devenu multipolaire. Je ne suis absolument pas rassuré par vos allégations. C’est totalement inefficace, c’est même dangereux, et il serait de salut public de rejeter ce traité.

M. Philippe Folliot. Au-delà du contenu de ce traité, qui est ce qu’il, ce qui m’interpelle est la question plus générale de la politique européenne de sécurité et de défense commune et la compatibilité de celle-ci avec l’OTAN. Notre situation semble complexe, pour ne pas dire schizophrène. Nous le savons, le besoin de multilatéralité est de plus en plus prégnant. Dans le même temps, nombre de membres de l’Union européenne ne conçoivent leur défense que par l’OTAN et la protection, supposée et parfois réelle, du parapluie américain. Je pense avant tout aux pays européens les plus orientaux, qui sont en première ligne face à ce qu’ils considèrent comme une forme d’agressivité de la part de la Russie. Pour l’Union européenne, la principale difficulté tient à trouver un équilibre dans ce contexte. Il me paraît donc essentiel d’appréhender ce traité plus largement au regard de l’ensemble de la politique et de la stratégie vis-à-vis de l’OTAN ainsi que de la nécessité d’approfondir la politique européenne de défense. Dans un monde toujours plus incertain et multipolaire, l’Europe ne pourra exister que si elle est capable d’assurer elle-même sa défense, sans dépendre de quiconque, et même de nos alliés et amis américains.

Mme Nathalie Nieson, rapporteure pour avis. J’entends les craintes et les scepticismes car nous connaissons depuis de longs mois une situation d’insécurité en Europe. Je tiens d’abord à rappeler que les élargissements successifs de l’Alliance ont conduit à l’européaniser toujours plus…

M. Nicolas Dhuicq. Ah bon ? Ils achètent des Rafale vos amis polonais ?

Mme Nathalie Nieson, rapporteure pour avis. … et l’OTAN compte aujourd’hui 25 pays européens, dont 22 membres de l’Union européenne, sur 28 membres. Par ailleurs, nombre de nos alliés européens considèrent que leur défense repose avant tout sur l’OTAN et non sur l’Europe. S’agissant de la Turquie, elle demeure un allié fiable et robuste au sein de l’Alliance comme l’ont rappelé nos collègues Gilbert le Bris et Philippe Vitel lors de la présentation de leur rapport.

J’aimerais simplement souligner que vous vous trompez de débat. Nous parlons ici du Protocole de Paris qui n’a pas grand-chose à voir avec la défense européenne.

M. le président Philippe Nauche. Notre commission ayant été éclairée, je vais mettre aux voix le présent projet de loi.

Conformément aux conclusions de la rapporteure pour avis, la commission émet un avis favorable à l’adoption du projet de loi.

ANNEXE

Liste des personnes auditionnées par la rapporteure pour avis

Ø M. le colonel Jérôme Goisque, état-major des armées, PRIM/EA/OTAN, chef du bureau OTAN ;

Ø Mme Élody Justo, adjointe au chef de bureau et M. Cédric Fragata, chargé d’études, bureau du droit international, direction des affaires juridiques, ministère de la Défense.

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