N° 2703 annexe 0 - Rapport sur la proposition de résolution européenne de M. Yves Daniel, rapporteur de la commission des affaires européennes sur la proposition de règlement relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques (COM(2014) 180 final – E 9240) (n°2676)



N° 2703

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 avril 2015.

TEXTE DE LA COMMISSION
DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

ANNEXE AU RAPPORT

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

sur la proposition de règlement relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques.

Voir le numéro : 2676.

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu le règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil, du 28 juin 2007, relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques et abrogeant le règlement (CEE) n° 2092/91,

Vu le rapport du 11 mai 2012 de la Commission au Parlement et au Conseil sur l’application du règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques,

Vu la communication du 24 mars 2014 de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, intitulée : « Plan d’action pour l’avenir de l’agriculture biologique dans l’Union européenne » (COM [2014] 179 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques, modifiant le règlement (UE) n° XXX/XXX du Parlement européen et du Conseil [règlement sur les contrôles officiels] et abrogeant le règlement (CE) no 834/2007 du Conseil (COM [2014] 180 final),

Vu l’avis du Comité économique et social européen, du 16 octobre 2014, sur la « Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques, modifiant le règlement (UE) n° XXX/XXX du Parlement européen et du Conseil [règlement sur les contrôles officiels] et abrogeant le règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil » (NAT/647),

Vu l’avis du Comité des régions, du 4 décembre 2014, sur le train de mesures sur la production biologique (2015/C 019/18),

Considérant que l’agriculture biologique peut se définir comme un système de production lié au sol qui maintient et améliore la santé des sols, des écosystèmes et des personnes en s’appuyant sur des pratiques de culture et d’élevage en phase avec les conditions locales, les cycles naturels et la biodiversité ; qu’elle exclut le recours à des organismes génétiquement modifiés et vise à supprimer l’utilisation de produits chimiques de synthèse ainsi qu’à assurer un niveau élevé de bien-être aux animaux de l’exploitation ; qu’à ce titre, elle est source d’inspiration pour l’agriculture conventionnelle ;

Considérant que l’Union européenne, depuis le règlement (CEE) n° 2092/91 du Conseil, du 24 juin 1991, concernant le mode de production biologique de produits agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimentaires, a établi des règles communes afin de garantir la confiance du consommateur dans les produits issus de l’agriculture biologique ainsi que les conditions d’une concurrence équilibrée entre les producteurs européens et entre ceux-ci et les producteurs situés dans des pays tiers ;

Considérant que ces règles communes, améliorées par le règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil, du 28 juin 2007, susvisé, ont contribué à convertir 235 000 exploitations agricoles, représentant 9,5 millions d’hectares, au mode de production biologique et à créer un marché de 22,2 milliards d’euros pour les produits biologiques, faisant de l’Union européenne le deuxième marché mondial pour ces produits ;

Considérant que la filière biologique est créatrice d’emplois dans l’ensemble des États membres de l’Union européenne ;

Considérant que la consommation européenne de produits biologiques croît aujourd’hui plus vite que la production, obligeant l’Union européenne à augmenter ses importations en provenance des pays tiers ;

Considérant que la mise en œuvre du règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil, du 28 juin 2007, susvisé, telle qu’évaluée par la Commission européenne, le Parlement européen et la Cour des comptes européenne, a révélé la nécessité de poursuivre le processus d’amélioration de la réglementation afin de favoriser le développement de la production et d’apporter les garanties nécessaires aux consommateurs ;

Considérant que les règles applicables à la production biologique doivent évoluer afin de garantir la pérennité et le développement durable de l’agriculture biologique européenne ainsi que la confiance des consommateurs dans les produits de celle-ci comme dans les produits importés ;

Considérant que l’évolution des règles actuelles doit s’accompagner d’une harmonisation des pratiques en vigueur dans les États membres, en particulier s’agissant des organismes de contrôle et des méthodes d’analyse qu’ils emploient ;

Considérant que la proposition de règlement abroge le règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil, du 28 juin 2007, susvisé, à compter du 1er juillet 2017 ;

Considérant que la Commission européenne a annoncé qu’elle retirerait sa proposition de règlement si celle-ci n’était pas adoptée par le Conseil et le Parlement européen avant la fin du premier semestre 2015 ;

1. Se félicite que l’attention croissante des citoyens européens à la qualité de leur alimentation comme à la mise en œuvre de pratiques agricoles respectueuses de l’environnement ait contribué à faire de l’Union européenne le deuxième marché mondial pour les produits biologiques ;

2. Rappelle que ces mêmes institutions ont, d’une manière générale, constaté que la complexité des règles actuelles, en particulier pour les petits exploitants, est susceptible de les dissuader de se convertir au mode de production biologique ; que les divergences dans l’application des règles actuelles, tant entre les États membres qu’entre les organismes de contrôle, et la mise en œuvre des dérogations entraînent des distorsions de concurrence entre les producteurs européens et entravent le développement de la production ; qu’enfin, les mécanismes de contrôle sont, sur plusieurs points, défaillants, faisant peser un risque majeur pour la confiance du consommateur en cas de révélation d’une fraude ou d’une négligence affectant la qualité des produits biologiques ;

3. Salue l’initiative de la Commission européenne, à l’issue d’une consultation de l’ensemble des parties prenantes, de faire évoluer les règles applicables à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques ;

4. Invite la Commission européenne à interpréter de manière souple le délai qu’elle a fixé au Conseil et au Parlement européen pour adopter sa proposition de règlement et à tenir compte du travail effectué par ces deux institutions ainsi que de leur volonté d’aboutir, dans les meilleurs délais, à un compromis souhaité par l’ensemble des parties prenantes ;

5. Souhaite que le Conseil et le Parlement européen parviennent à un accord qui respecte l’équilibre entre la nécessaire confiance du consommateur, qui repose sur des règles strictes et des contrôles renforcés, et le développement de la production biologique, qui exige un allègement des contraintes pesant sur les producteurs ;

6. Juge que cet équilibre n’est pas respecté dans la proposition de règlement qui, dans sa volonté d’uniformiser les règles applicables, aggrave les contraintes pesant sur les exploitants, au risque de déprimer la production européenne de produits biologiques ; à l’inverse, en allégeant d’autres contraintes, en particulier s’agissant des contrôles, elle est susceptible de nuire à la confiance du consommateur ;

7. Réaffirme que le lien au sol des végétaux et des animaux est un principe fondamental de l’agriculture biologique ; que la proposition de règlement, en n’interdisant pas de manière suffisamment précise l’hydroponie, ouvre la voie à des modes de production biologique hors sol ;

8. Se félicite que la proposition de règlement continue à exclure de la production biologique le recours à des organismes génétiquement modifiés (OGM), à des produits obtenus à partir d’OGM ou par des OGM ;

9. Partage l’objectif de la Commission européenne s’agissant de la fin programmée de la mixité des modes de production sur les exploitations à l’issue de la période de conversion à l’agriculture biologique mais souligne que la mixité est, pour certaines exploitations, une obligation ; que son interdiction est de nature à rendre plus difficile la conversion des exploitations, à contraindre certaines d’entre elles d’abandonner la production biologique ou à les inciter à séparer juridiquement production biologique et production conventionnelle, complexifiant ainsi la mise en œuvre des contrôles ;

10. Partage l’objectif de la Commission européenne d’une réduction du nombre des dérogations aux règles de production ainsi que leur limitation dans le temps, de telles dérogations étant de nature à déséquilibrer les conditions de la concurrence entre les producteurs européens, à défavoriser la recherche pour la mise au point d’intrants biologiques comme les semences autant qu’à nuire à la confiance du consommateur ;

11. Attire l’attention du Conseil et du Parlement européen sur le fait que la réduction du nombre des dérogations aux règles de production, comme leur limitation dans le temps, en particulier pour les semences, n’a de sens qu’à la condition de disposer d’alternatives biologiques ; que, sans un effort important en matière de recherche pour la mise au point de semences biologiques adaptées aux conditions locales pour l’ensemble des variétés de végétaux d’ici au 31 décembre 2021, la fin à cette date des dérogations en matière d’utilisation de semences non biologiques est susceptible de déprimer la production en privant les producteurs des intrants nécessaires ; appelle donc la Commission européenne à mobiliser les financements nécessaires, dans le cadre du « plan d’action », pour que cette échéance puisse être tenue ;

12. Rappelle l’importance de renforcer la recherche en matière d’agriculture biologique, condition indispensable à son développement ;

13. Rappelle que l’élevage biologique respecte des normes élevées en matière de bien-être animal mais que certaines pratiques mises en œuvre de longue date (l’attache), qui peuvent apparaître comme des mutilations, sont parfois nécessaires à la sécurité physique des éleveurs et des animaux (écornage), à la sécurité sanitaire des animaux (coupe de la queue), ainsi qu’à la qualité nutritionnelle et gustative des produits (castration) ; qu’à ce titre, des dérogations doivent pouvoir continuer à être accordées sous le strict contrôle des autorités compétentes ;

14. Estime que, malgré les contraintes de coût et de charges administratives qu’il fait peser sur les exploitants biologiques, un mécanisme de contrôle crédible est fondamental pour la confiance du consommateur et, par conséquent, pour la pérennité et le développement de la production biologique ;

15. Regrette que la proposition de règlement supprime, en raison de son coût, l’obligation de contrôle annuel sur site des exploitations biologiques au profit d’un mécanisme de contrôle basé sur l’évaluation des risques ; demande à ce que cette obligation, régulièrement mise en avant par les producteurs et aisément compréhensible par les consommateurs, soit rétablie ;

16. Salue la possibilité d’une certification de groupe pour les petits producteurs qui, par la mutualisation des coûts qu’elle permet, est de nature à faciliter la conversion des exploitations vers la production biologique ;

17. Partage l’objectif de la Commission européenne de fixer un seuil harmonisé s’agissant des résidus de produits non autorisés dans les produits biologiques ; considère toutefois que cet objectif, sauf à créer de graves difficultés pour les producteurs, exige au préalable que les stratégies d’échantillonnage des organismes de contrôle, les conditions de réalisation de leurs prélèvements, leurs méthodes d’analyse et les décisions de leur comité de certification soient harmonisées au niveau européen et que soient définies de manière précise les conditions de mise en cause de la responsabilité du producteur (ou, le cas échéant, de l’auteur de la contamination) ainsi que celles de son indemnisation éventuelle ;

18. Approuve la proposition de règlement en ce qu’elle renforce les règles applicables aux produits biologiques importés qui, au terme d’une période de transition, devront être conformes et non plus seulement équivalents aux règles européennes de production biologique, ainsi que celles relatives à la reconnaissance et à la supervision des autorités et des organismes de contrôle dans les pays tiers ; rappelle, toutefois, que la Commission européenne devra dégager les ressources matérielles et humaines nécessaires pour un contrôle efficace de ces derniers ;

19. Comprend l’intérêt des actes délégués pour adapter rapidement les règles à l’évolution du contexte mais s’étonne de leur nombre considérable dans la proposition de règlement et s’inquiète de voir le Conseil et le Parlement européen se prononcer sur celle-ci sans pouvoir mesurer pleinement la portée de certaines de ses dispositions parmi les plus importantes et les producteurs être confrontés à l’insécurité juridique découlant de changements inopinés des règles applicables.


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