Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1889 à 1940 (Jean Jolly)

Né le 16 mai 1890 à Tulle (Corrèze), mort le 1er septembre 1958 à Viry-Chatillon (Seine-et-Oise), Député de la Seine de 1936 à 1942.

Pionnier de l'aviation civile française,. héros de nombreux combats aériens pendant la première guerre mondiale, promoteur de l'aéronavale et détenteur de-29 records du monde, Lucien Bossoutrot était l'une des figures les plus populaires. de l'aviation des temps héroïques, lorsqu'il commença en 1936 sa brève carrière parlementaire.

De famille auvergnate, il avait débuté dans la vie, à l'âge de 18 ans, comme employé de banque, mais ses aspirations l'entrainaient ailleurs et, devait-il confier plus tard, il ne se considérait pas comme un très bon employé : « Je ne pensais qu'à l'aviation et, mes moments de liberté je les passais sur les aérodromes... ». A. cette époque l'aventure aérienne relevait encore des exploits des héros de Jules Verne et enfants et adolescents se passionnaient pour les nouvelles découvertes. dans ce domaine.

Captivé, subissant naturellement la séduction des exploits fraîchement réalisés, le jeune Lucien Bossoutrot n'en devait pas moins, pour sa part, pressentir les développements qui allaient en résulter et désirait s'y associer.

C'est à vingt ans, en 1910, qu'il réussissait à voler pour la première fois et qu'il faisait ses premières armes, à un moment où les exercices aériens offraient moins de sécurité que de danger. Ces dangers, Bossoutrot devait les connaître au plus haut degré quelques années plus tard lorsque éclatait le grand conflit mondial, au cours duquel on allait progressivement exploiter l'arme aérienne. Ce n'est toutefois qu'au cours de l'année 1915 qu'il arrivait à se faire-affecter, non sans difficultés, à l'aviation militaire, - il avait fait la première année de guerre dans l'infanterie - Dès lors, il se distinguait dans de nombreux combats aériens, aux côtés de Guynemer et de Fonck et il terminait le conflit comme lieutenant d'aviation avec trois citations et un actif de 500 heures de vol en opérations, chiffre tout particulièrement important pour l'époque. Démobilisé, il entra dans l'aviation civile et fut chargé chez Farman, où il avait été nommé chef pilote, de la mise au point des appareils prototypes, avions ou hydravions. Dès 1919, il effectuait plusieurs missions de confiance et réalisait le 8 février le premier vol commercial Paris-Londres (le voyage durait trois heures à l'aller...). En août de la même année, il reliait sans escale Paris et Casablanca avec sept passagers. Il avait déjà tenté un premier vol vers Dakar en 1918 et avait dû amener à son point de vue le maréchal Lyautey, Résident général de France au Maroc, qui hésitait à lui accorder l'autorisation de survoler la Mauritanie non encore pacifiée.

Le 16 août 1919, il pilotait l'avion Goliath, qui tomba en panne au-dessus du Sahara et dut atterrir sur une plage, à 180 kilomètres au nord de Saint-Louis du Sénégal. Avec ses huit compagnons, il vécut six jours en plein désert, n'ayant pu consommer qu'un peu d'eau filtrée, avant d'être retrouvé et secouru. S'il était déjà célèbre à cette date, cette aventure devait le mener au faîte de sa popularité. L'opinion avait suivi avec passion ses tentatives et applaudit encore lorsqu'il réussit, au cours d'un raid Paris-Dakar, à effectuer un vol de nuit complet, suivi d'un amerrissage nocturne devant la grande ville du Sénégal, en pleine mer et sans balisage.

Dès lors, au cours de la période qui suivit la guerre, il ne cessa de se consacrer à l'aviation expérimentale et obtint notamment le grand prix des avions de transport sur Farman, au Bourget, le 15 novembre 1922, avant de s'adjuger successivement les records du monde d'altitude, de durée, de distance, de vitesse et de vol à voile.

Fêté avec enthousiasme en France, aussi bien qu'à l'étranger, il était devenu pour l'opinion, aussi célèbre que ses collègues de l'aéropotsale et de la ligne de l'Atlantique sud. Son amie, Louise Faure-Favier devait plus tard le présenter ainsi : « La plus spirituelle et la plus douce des figures, des yeux de pilote... des mains de demoiselle et toutes les plus jolies qualités de notre race... ». A ce portrait, quelque peu romantique, le lieutenant de vaisseau Nomy, qui avait été son compagnon de vol sur le Santos Dumont, ajoutait une note plus austère, le 18 janvier 1935, au cours d'une conférence prononcée au théâtre des Ambassadeurs. « Il donne confiance...», concluait-il en rendant hommage aux qualités de chef énergique et de pilote hors de pair de Lucien Bossoutrot et à la préparation prudente et méthodique de ses expéditions.

Resté simple malgré le succès, il s'occupa alors activement du développement du trafic commercial aérien et défendit notamment la thèse des hydravions commerciaux de gros tonnage, avant de poser la question séduisante des îles flottantes. Pilote d'essai de la maison Blériot, épaulé par le général d'aviation Victor Denain, Ministre de l'air, il lutta passionément pour que soit reconnue 1 importance de la ligne d'Amérique du sud, en laquelle il avait mis sa foi la plus profonde. A cette époque, il totalisait 1.200.000 kilomètres de vol en 8.000 heures et avait volé sur 250 types différents d'appareils. Il en avait mis au point 125.

Il ne laissait pas pour autant de se préoccuper de l'évolution politique en France, à propos de laquelle il appréhendait le pire. En 1936, il préfaçait dans ce sens un livre intitulé Canons à vendre qui attaquait le « trust international Schneider ». Aux élections législatives des 26 avril et 3 mai 1936, il prenait définitivement parti et se présentait dans la 2e circonscription du 10e arrondissement de la Seine, sur un programme radical-socialiste, soutenu par le Front populaire. Adversaire des « marchands de canons », il fut élu au deuxième tour-de scrutin, par 6.534 suffrages, à douze-voix seulement de majorité, battant le colonel Fabry, de la fédération républicaine, ancien Ministre de la guerre. Membre, puis président de la Commission de l'aéronautique, il devait s'attacher principalement à défendre la cause de l'aviation à la Chambre, comme il l'avait déjà fait dans le pays. Bien qu'intervenant peu à la tribune, il tint plusieurs fois à exprimer son opinion au cours de la discussion d'interpellations concernant la défense nationale, notamment en 1937.

Bien qu'ayant voté les pouvoirs constituants au maréchal Pétain, le 10 juillet 1940, à Vichy, il fut interné sous l'occupation au centre d'Evaux. Il réussit à s'évader en juin 1944 et organisa aussitôt de nombreux parachutages d'armes pour le maquis du Lot, où il s'était réfugié. Il abandonna la vie politique à la Libération et se retira en Seine-et-Oise, à Viry-Chatillon, où il mourut le 1er septembre 1958. Il était commandeur de la Légion d'honneur.

La personnalité de Lucien Bossoutrot était digne de figurer dans les ouvrages de son camarade Saint-Exupéry. Il est bon de citer à ce sujet certaines de ses paroles rapportées par Louise Faure-Favier : « Si vous saviez quel exaltant plaisir, c'est, de voler à 3 heures du matin, de quitter la terre encore toute grise et endormie et d'aller chercher-l'aube dans le ciel... ». « Quand il parlait de l'aviation française, concluait Louise Faure-Favier, il était vraiment lui-même. Il s'animait, il la voulait la première du monde. Il était prêt à tout lui donner, il était disposé à toutes les audaces, à braver tous les risques... ».


Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1940 à 1958 (La documentation française)



Né le 16 mai 1890 à Tulle (Corrèze)

Décédé le 1er septembre 1958 à Viry-Chatillon (Seine-et-Oise)

Député de la Seine de 1936 à 1942

(Voir première partie de la biographie dans le dictionnaire des parlementaires français 1889-1940, tome II, p. 684, 685)

Dès 1942, Lucien Bossoutrot participe à la Résistance. Son comportement lui vaudra d'être arrêté par les Allemands en mars 1943 et interné à Evaux (Creuse). Evadé 15 mois plus tard, l'ancien compagnon de Guynemer reprend le combat dans le maquis du Lot où il s'était réfugié. Il y constitue des groupes francs et organise des parachutages d'armes. A la libération, Lucien Bossoutrot demande au Jury d'honneur de le relever de inéligibilité qui le frappait du fait de son vote du 10 juillet 1940 en faveur du projet de loi portant révision constitutionnelle. Par sa décision du 24 avril 1945, cette instance satisfait la requête de l'ancien député de la Seine.

Toutefois, celui-ci ne reprendra pas d'activité politique.

En revanche, Lucien Bossoutrot retrouve le monde de l'aviation : président d'honneur de la Fédération aéronautique de l'Union française et Président des Experts réunis, il devient administrateur de la société mutuelle d'assurances aériennes.

Retiré à Viry-Chatillon, il y meurt le 1" septembre 1958. Il était Commandeur de la légion d'honneur.