Camille Desmoulins

1760 - 1794

Informations générales
  • Né le 2 mars 1760 à Guise ( - Généralité de Soissons France)
  • Décédé le 5 avril 1794 à Paris (Département de Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Révolution
Législature
Convention nationale
Mandat
Du 8 septembre 1792 au 5 avril 1794
Département
Seine
Groupe
Montagne

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Membre de la Convention, né à Guise (Généralité de Soissons) le 2 mars 1760, exécuté à Paris (département de Paris) le 5 avril 1794.

Son père était lieutenant général au bailliage de Guise ; sa mère Marie-Madeleine Godart, était de Wiège-et-Faty (Aisne).

Desmoulins enfant était doué d'une mémoire prodigieuse. Ses parents obtinrent pour lui, par la protection de M. Viefville des Essarts, plus tard député à la Constituante, une bourse au collège Louis-le-Grand, où il se lia avec Maximilien Robespierre. L'étude de Rome et d'Athènes le rendit républicain. Les Révolutions romaines de Vertot étaient son livre de chevet. Il fit son droit à Paris et prêta serment en 1785 comme avocat au parlement de Paris, mais, affecté d'une sorte de bégayement, il plaida peu et vécut obscur jusqu'à la Révolution.

Il fit paraître, en 1788, La Philosophie du Peuple français dont quelques auteurs lui contestent la paternité, et, l'année suivante il composa (juin 1789) La France Libre. Ce dernier ouvrage contenait sur les trois ordres des aphorismes d'une hardiesse qui épouvanta les esprits les plus novateurs de l'époque. Pendant un mois, aucun libraire ne voulut publier ce violent réquisitoire contre l'ancien régime. Mais les événements qui allaient se précipiter firent une popularité immense à Desmoulins et préparèrent le succès de son livre.

La disgrâce de M. de Necker (11 juillet) avait consterné Paris, qui la regardait comme le signal de la famine et de la guerre civile. Desmoulins allait tous les jours à Versailles où il suivait assidûment les séances de l'Assemblée nationale. Le 12 juillet, il courut au Palais-Royal où la foule avait coutume de s'assembler pour s'entretenir de la situation ; il monta sur une table, tira l'épée, montra un pistolet et une cocarde, et appela le peuple aux armes. Il a raconté lui même cette scène dans son Vieux Cordelier.

« Voici ma courte harangue que je n'oublierai jamais : Citoyens, il n'y a pas un moment à perdre, j'arrive de Versailles où M. Necker est renvoyé. Ce renvoi est le tocsin d'une Saint-Barthélemy de patriotes. Ce soir, tous les bataillons suisses et allemands sortiront du Champ de Mars pour nous égorger. Il ne nous reste qu'une ressource, c'est de courir aux armes et de prendre des cocardes pour nous reconnaître. »

Sur le champ la foule choisit le vert, couleur de l'espérance. Les rubans verts sont apportés et comme bientôt il n'en reste plus : « Les feuilles sont vertes, dit Desmoulins. » La foule arracha les feuilles des arbres dont elle se fit des cocardes, puis se répandit dans la ville pour préparer l'insurrection. Dans la nuit du 12 au 13, les citoyens prirent des armes chez des arquebusiers. Desmoulins, à la tête du peuple, entra aux Invalides, et choisit pour lui-même un fusil armé d'une bayonnette et deux pistolets. Le lendemain, la Bastille était prise. Ces événements avaient mis Desmoulins en vue ; La France Libre fut publiée. Vainement le Parlement de Toulouse la condamna au feu ; elle eut plusieurs éditions en moins de deux mois. Desmoulins fit paraître ensuite le Discours de la Lanterne aux Parisiens.
La réputation de Desmoulins le fit rechercher par les députés influents. Il fut pendant quelques semaines secrétaire de Mirabeau et lui prépara ses motions. Le 28 septembre 1789 parut le premier numéro de ses Révolutions de France et de Brabant, pamphlet périodique qui fit une guerre audacieuse au clergé, à la noblesse et à la monarchie.

Il attaqua aussi l'Assemblée à l'occasion du vote qui n'accordait le droit de suffrage qu'aux citoyens possédant au moins un marc d'argent, (Le marc d'argent valait 8 écus de six livres et 6 dixièmes) : « Jean-Jacques Rousseau, écrivait-il, Corneille, Mably n'auraient pas été éligibles... Vous venez de reléguer Jésus-Christ parmi la canaille. »

Il fut admis aux Cordeliers sous la présidence de Danton en février 1790.

Le 29 décembre de la même année, il épousa Lucile Duplessis, fille du premier commis du contrôle général des finances et, le 6 juillet 1792, il lui naquit un fils qu'il appela Horace, et qu'il fit inscrire, sans aucune cérémonie religieuse, sur les registres de l'état civil.
Il avait repris sa profession d'avocat. Une consultation en faveur de deux individus condamnés pour tenue illicite de maison de jeu fut qualifiée de scandaleuse apologie des jeux de hasard par Girey-Dupré, collaborateur de Brissot. Desmoulins se vengea en publiant son Brissot dévoilé, pamphlet d'une violence extrême contre Brissot et les brissotins, et qui fut comme le point de départ du conflit qui allait éclater entre les Girondins et les Montagnards.
En juillet 1792, la France était menacée. Le manifeste du duc de Brunswick avait exaspéré les patriotes, et, de tous côtés, on demandait la déchéance de Louis XVI. Les sections se tinrent en permanence du 4 au 10 août, et, dans la nuit du 9 au 10, elles nommèrent des délégués « pour sauver la patrie ». Ces délégués se rendirent à l'hôtel de ville et prirent la place de la municipalité. Pendant que le nouveau pouvoir arrêtait Mandat, commandant de la force armée, Desmoulins et Danton soulevaient le quartier du Théâtre-français où se trouvaient les fédérés marseillais.

Après la victoire du peuple, Danton, nommé ministre de la justice, prit Desmoulins pour secrétaire. Desmoulins fut élu membre de la Convention par le département de Paris (8 septembre 1792), le 6e sur 21, avec 465 voix sur 677 votants.

Il parla peu, siégea à la Montagne et vota : oui sur la question : Louis Capet est-il coupable de conspiration contre la liberté et d'attentat contre la sûreté générale de l'Etat ? Le Moniteur ne mentionne pas son vote au 2e appel nominal sur la question : Le jugement sera-t-il soumis à la ratification du peuple réuni dans ses assemblées primaires ? Sur la question de la peine à appliquer à Louis, il motiva ainsi son vote : « Manuel dans son opinion du mois de novembre a dit : Un roi mort n'est pas un homme de moins. Je vote pour la mort, trop tard peut-être pour l'honneur de la Convention nationale ».
Après la chute des Girondins auxquels il avait porté un coup décisif par son Histoire des Brissotins ou fragments d'une histoire secrète de la Révolution, il se sépara nettement de ceux. qui, sous les noms d'ultras, d'exagérés, d'enragés, voulaient une rupture définitive avec ce qui restait de l'ancienne organisation sociale et religieuse.

Robespierre avait un grand ascendant sur lui, et c'est à sa plume qu'il eut recours pour frapper ses adversaires. Le 5 décembre 1793 (15 frimaire an II), Camille entra en guerre, avec le premier numéro de son Vieux Cordelier, contre les athées, les anticatholiques, ceux qu'on appelait alors les Nouveaux cordeliers. Jamais son esprit ne fut plus vif, sa verve plus cruelle.

Mais bientôt il se laissa aller, sous prétexte de traduction de Tacite, à des allusions meurtrières pour la Montagne : dans son n° 4, il demanda l'établissement d'un Comité de clémence et à la mise en liberté immédiate des suspects. Robespierre défendit son ami : « Camille, dit-il est un enfant gâté qui avait d'heureuses dispositions, mais que les mauvaises compagnies ont égaré. Il faut sévir contre ses numéros que Brissot lui-même n'eût oser avouer, et conserver Camille au milieu de nous. » Desmoulins repoussa dédaigneusement l'intervention de Robespierre: « Brûler n'est pas répondre » fut sa réplique. Ici commence son duel à mort avec Robespierre. Le n° 7 du Vieux Cordelier attaquait le Comité de sûreté générale. Desmoulins en corrigeait les épreuves lorsqu'il fut arrêté (31 mars 1794).

Condamné à mort, il fut exécuté le 5 avril (16 germinal).

Dans le trajet de la prison à l'échafaud, il harangua la foule : « Qui t'a donné la cocarde ? qui t'a appelé à la Bastille ? Je suis Camille Desmoulins ! » La veille de sa mort, il avait écrit à sa femme une lettre qu'on ne peut lire sans un déchirement de cœur. Cette lettre se termine ainsi :

« Je te reverrai un jour, ô Lucile ! sensible comme je l'étais, la mort qui me délivre de la vue de tant de crimes est-elle un si grand malheur ? Adieu, ma vie, mon âme, ma divinité sur la terre ! Je sens fuir devant moi le rivage de la vie. Je vois encore Lucile. Je la vois ma bien aimée, ma Lucile. Mes mains liées t'embrassent et ma tête séparée repose encore sur toi ses yeux mourants. »

Lucile avait fait appel à tous les vieux Cordeliers pour sauver son mari. Le soir même de l'arrestation, elle avait écrit à Robespierre : « ... toi qui fis des vœux pour notre union, qui joignis nos mains dans les tiennes, toi qui as souri à mon fils et que ses mains enfantines ont caressé tant de fois, pourras tu donc rejeter ma prière, mépriser mes larmes ? »

Accusée elle-même de complot pour avoir essayé de sauver son mari, elle fut arrêtée et condamnée à mort. Elle n'était âgée que de 24 ans.
Horace Desmoulins, recueilli par Mme Duplessis, sa grand-mère, fut élevé au collège Louis-le -Grand. Il faisait son droit à Paris lorsque les Bourbons rentrèrent en France. Il partit pour l'Amérique, où il mourut vers 1820.

Les œuvres complètes de Camille Desmoulins ont été publiées en 1828. 2 vol. in-8°, et en 1874, 2 vol. in-12.

Ont été publiés à part : La France libre (1834) ; Le vieux Cordelier (1840) in-8° ; Le discours de la Lanterne (1868) in-12.

M. Vermorel a aussi publié les œuvres complètes (1867-1868).