Bernard, Adolphe Granier de Cassagnac

1806 - 1880

Informations générales
  • Né le 11 août 1806 à Bergelle (Gers - France)
  • Décédé le 31 janvier 1880 à Couloumé-Mondebat (Gers - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Second Empire - Corps législatif
Législature
Ire législature
Mandat
Du 29 février 1852 au 29 mai 1857
Département
Gers
Groupe
Majorité dynastique
Régime politique
Second Empire - Corps législatif
Législature
IIe législature
Mandat
Du 21 juin 1857 au 7 mai 1863
Département
Gers
Groupe
Majorité dynastique
Régime politique
Second Empire - Corps législatif
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 31 mai 1863 au 27 avril 1869
Département
Gers
Groupe
Majorité dynastique
Régime politique
Second Empire - Corps législatif
Législature
IVe législature
Mandat
Du 23 mai 1869 au 4 septembre 1870
Département
Gers
Groupe
Majorité dynastique
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
Ire législature
Mandat
Du 20 février 1876 au 25 juin 1877
Département
Gers
Groupe
Appel au peuple
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
IIe législature
Mandat
Du 14 octobre 1877 au 31 janvier 1880
Département
Gers
Groupe
Appel au peuple

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Député au Corps législatif de 1852 à 1870, et de 1876 à 1880, né à Averon-Bergelle (Gers) le 11 août 1806, mort au château de Couloumé (Gers) le 31 janvier 1880, « fils de noble homme Pierre-Paul de Granier et de dame Ursule Lissagaray », il appartenait à une famille originaire de l'Ariège qui se fixa au siècle dernier à la Verrerie de Montpellier, canton du Vic : un petit bois, dépendance de cette terre, s'appelle le Cassagnac : c'est de là que Bernard-Adolphe Granier prit la seconde partie de son nom.

Ses études terminées au collège de Toulouse, il s'essaya à la littérature, obtint des succès aux Jeux floraux, avec une Epître à moi-même, signée. B. Adolphe Granier (du Gers), étudiant en droit, et se révéla comme publiciste, en 1831, par une brochure politique Aux électeurs de France, remarquable par l'ardeur des opinions démocratiques et anti-royalistes qui y étaient exprimées. L'année suivante, il vint à Paris, et son talent d'écrivain ne tarda pas à le mettre en évidence. Recommandé à Victor Hugo, il embrassa avec fougue la cause du romantisme, débuta, sous les auspices du maître, au Journal des Débats et à la Revue de Paris par des articles de critique littéraire dont le ton agressif fit du bruit : une série de feuilletons sur ou plutôt contre Racine causa une sorte de scandale à la suite duquel M. Granier de Cassagnac quitta les Débats pour entrer à la Presse. Doué d'un véritable tempérament de polémiste, et animé de l'esprit le plus exclusif, il eût volontiers fait table rase de toutes les renommées littéraires, anciennes et modernes, pour donner plus de relief à la gloire de son patron Victor Hugo. En 1840, il reçut du gouvernement une mission aux Antilles : c'était alors un moyen de se débarrasser à peu de frais des écrivains dont l'opposition était gênante. Il y épousa une créole, Mlle de Beauvallon, et revint en France délégué de la Guadeloupe auprès de la métropole.

Il aborda la politique et les questions sociales par quelques travaux aujourd'hui oubliés, tels que l'Histoire des classes ouvrières et des classes bourgeoises ; Histoire des classes nobles et des classes anoblies (1837-1840), et publia encore, vers la même époque, une monographie de l'Eglise de la Madeleine (1838), et un roman : Danaé. L'amour du paradoxe avait poussé M. Granier de Cassagnac, dans ses grands ouvrages historiques, à soutenir la thèse de la légitimité de l'esclavage : il la traita, d'ailleurs, à fond dans une brochure spéciale : De l'affranchissement des esclaves, et la reprit encore dans une relation de son Voyage aux Antilles (1840) et dans divers articles de la Revue de Paris. Quelques duels, dont l'un où il blessa grièvement le député baron Lacrosse, plus tard sénateur (1842), des accusations réitérées de vénalité portées contre lui firent paraître son nom devant les tribunaux. Tout dévoué au ministère Guizot, il apporta dans la défense de la politique gouvernementale ses procédés ordinaires de polémique, dirigea le Globe, puis l'Epoque, et se vit accusé par l'opposition de soutenir son journal, après l'épuisement des fonds secrets, au moyen de la vente illicite de certaines concessions administratives telles que des privilèges de directions théâtrales, etc. Au Globe, le feuilleton des théâtres était rédigé par son beau-frère, Rosemond de Beauvallon ; une querelle d'intérêts amena un duel au pistolet entre celui-ci et Dujarrier, gérant de la Presse, qui fut tué : au cours du procès qui suivit cette affaire, des témoins affirmèrent que les pistolets étaient pipés. En dépit des subventions ministérielles et des scandales, l'Epoque sombra à son tour.

Survint la révolution de février. M. Granier de Cassagnac attaqua avec violence le gouvernement républicain, collabora à l'Assemblée nationale, puis au Pouvoir, mit sa plume au service de Louis-Napoléon Bonaparte, qu'il avait couvert d'outrages lors des tentatives de Strasbourg et de Boulogne, et devint un des collaborateurs ordinaires du Constitutionnel.

Admirateur enthousiaste du coup d'Etat du 2 décembre 1851, il attaqua les vaincus de cette journée, fit l'apologie de l'événement dans un Récit populaire publié en 1852 et réédité en 1869, et fut désigné comme candidat officiel du gouvernement aux élections du 29 février 1852 pour le Corps législatif : la 3e circonscription du Gers lui donna 24 132 voix (25 149 votants, 32 723 inscrits), contre 785 à M. Joret, ancien représentant républicain. Il s'associa au rétablissement de l'Empire et, pendant toute la durée du règne, fut un des membres les plus zélés de la majorité dynastique.

Réélu, le 22 juin 1857, par 26 077 voix (26 363 votants, 32 134 inscrits), puis, le 1er juin 1863, par 20 897 voix (27 950 votants, 32 510 inscrits), contre 6 990 voix à M. Lacave-Laplagne, indépendant, et, le 24 mai 1869, par 15 350 voix (28 746 votants, 32 899 inscrits), contre 11 428 voix à M. Lacave-Laplagne et 1 858 à Jules Favre, il prit à tâche de se signaler par l'outrance de ses sentiments conservateurs et autoritaires, parut quelquefois à la tribune du Corps législatif, et multiplia surtout les interruptions, quand les orateurs de l'opposition avaient la parole. Un jour que Berryer faisait le relevé des avancements que certains magistrats de Paris devaient à des condamnations de journaux, et qu'il allait jusqu'à citer des noms :
« Ceci est une lâcheté ! cria une voix.
- Qui a prononcé le mot de lâcheté ? » dit Berryer, frémissant.
M. Granier de Cassagnac se leva et se nomma.
« Oh! alors, ce n'est rien. » répliqua l'illustre orateur.

Durant les dernières années de l'Empire, M. Granier de Cassagnac accentua encore son rôle parlementaire dans le sens de la réaction, et fit une opposition acharnée à toute mesure libérale, à toute concession du pouvoir. En 1868, avec six de ses collègues, il vota contre la loi sur la presse.

« Vous n'êtes que sept, lui fit-on observer sur les bancs mêmes de la droite.
- Les sept sages de la Grèce », répondit-il.

Il fit partie de la réunion de députés dite de la rue de l'Arcade, formée des partisans absolus du régime autoritaire. De plus, ses discours et ses interruptions prirent, à l'égard de la gauche, un caractère de plus en plus provocateur. La discussion de la loi sur la presse ne se passa point sans qu'il proposât un cartel à MM. Emile Ollivier et Ernest Picard, qui ne crurent pas devoir le relever (22 février 1868). Il appuya de toutes ses forces la dénonciation de M. de Kervéguen qui accusait les députés journalistes, entre autres MM. Guéroult et Havin, d'être à la solde du comte de Bismarck pour soutenir en France la politique de la Prusse.

L'avènement de M. Emile Ollivier au pouvoir l'irrita profondément. Il se refusa à accepter comme chef de file un homme qu'il avait naguère aussi violemment combattu et ne tarda pas à l'attaquer ouvertement : d'après lui, l'Empire, avec un tel pilote, marchait à sa perte. Néanmoins, il adhéra à la campagne plébiscitaire de mai, et prit une part active aux discussions soulevées dans le Corps législatif par la déclaration de guerre à la Prusse (juillet 1870). Il poussa tant qu'il put aux hostilités, et, à la nouvelle de nos premiers revers, quand l'opposition, par l'organe de Jules Favre, proposa la nomination d'un comité de défense ainsi que l'armement immédiat de la garde nationale, il s'écria, en s'adressant aux membres de la gauche :
« Si j'avais l'honneur de siéger sur les bancs du gouvernement, vous seriez tous ce soir livrés aux conseils de guerre ! »

Historien et publiciste, M. Granier de Cassagnac a donné une Histoire de la Révolution française (1850), une Histoire du Directoire (1851-56), une Histoire de la chute de Louis-Philippe, de la Révolution de février et du rétablissement de l'Empire (1857), une Histoire des Girondins et des massacres de septembre (1860). A la fin de 1857, il avait fondé avec les frères Escudier, Barbey d'Aurevilly, etc., un nouveau journal hebdomadaire, le Réveil, où il entreprenait la triple défense de la religion, de la morale et de la saine littérature : un critique, Hippolyte Rigaut, l'appela à ce propos le journaliste « porte-glaive, porte-balance et porte-croix ».

Le Réveil ne dura qu'une année. M. Granier de Cassagnac prit plus tard la rédaction en chef d'une feuille quotidienne de combat, le Pays, qu'il abandonna en 1863 pour la reprendre, avec son fils comme auxiliaire, en 1866. L'existence du Pays, des plus orageuses, fut semée de polémiques injurieuses, de voies de fait, de procès et de duels.

Après la révolution du 4 septembre, M. Granier de Cassagnac quitta la France : il publia à l'étranger un journal bonapartiste, le Drapeau, qui était envoyé gratuitement aux prisonniers internés en Allemagne, et dont plusieurs numéros soulevèrent les protestations d'un grand nombre d'officiers de l'armée de Metz.

De retour à Plaisance (Gers) en 1871, il fut un moment arrêté, mais bientôt relâché par ordre de Thiers, s'occupa de faire reparaître le Pays (1872), et y reprit sa plume des anciens jours.

Aux élections générales du 20 février 1876 pour la Chambre des députés, M. Granier de Cassagnac fut élu député par l'arrondissement de Mirande, avec 10 463 voix (19 954 votants, 23 372 inscrits), contre 5 846 voix à M. Maumus, républicain, et 3 576 à M. de Gontaut. Il alla siéger au groupe de l'Appel au peuple, et ne fit à la tribune qu'une seule apparition ; ce fut pour prononcer, à propos du budget des cultes de 1877, dans la séance du 23 novembre 1876, un grand discours, d'un ton plus modéré que de coutume, en faveur du clergé catholique.

Favorable au coup d'Etat du Seize-Mai, il appuya, contre les 363, le ministère Fourtou-de Broglie, et, dans le Pays comme dans le Figaro, auquel il collaborait sous le pseudonyme de Mauprat, entreprit une campagne pour conseiller au gouvernement des mesures de violence.

Réélu, le 14 octobre 1877, député de Mirande, par 12 667 voix (19 793 votants, 23 844 inscrits), contre 6 907 à M. Sansot, républicain, M. Granier de Cassagnac reprit sa place dans le groupe bonapartiste, vota constamment avec la droite : contre le ministère Dufaure, contre l'amnistie, contre l'article 7 de la loi sur l'enseignement supérieur, et intervint personnellement dans la discussion de cette loi ; il combattit la création des écoles normales départementales d'institutrices (17 mars 1879), et défendit vivement les jésuites et leur enseignement.

Il mourut avant la fin de la législature, le 31 janvier 1880, dans son château de Couloumé (Gers).

On doit encore à M. Granier de Cassagnac, outre les ouvrages déjà cités : une Histoire des origines de la langue française (1872) ; une Histoire populaire illustrée de Napoléon III (1874) ; Le 16 mars à Chislehurst (1874) ; Histoire de la colonne Vendôme (1877) ; les Souvenirs du Second Empire (1879), etc.