Les trésors de la Bibliothèque

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Si le cœur de l’Assemblée nationale est son hémicycle où résonne encore la voix des grands orateurs, le Palais-Bourbon abrite également un chef-d’œuvre du patrimoine français : sa bibliothèque.

Créée dès la Révolution pour aider les élus de la Nation dans leur travail législatif, la bibliothèque de l’Assemblée nationale rassemble aujourd’hui plus de 600 000 ouvrages mis à la disposition des députés. Les premiers bibliothécaires, héritiers des Lumières, ont eu à cœur d’accueillir un fonds ancien exceptionnel qui compte par exemple quatre-vingt incunables datant du XVe siècle – les premiers temps de l’imprimerie – et plus de 2 000 manuscrits. Un vrai trésor !

L’ancienneté de ces ouvrages les rend très fragiles et impose de les conserver dans une chambre forte dont la porte ne s’ouvre qu’exceptionnellement.

Le lieu est lui-même exceptionnel avec ses plafonds peints par Eugène Delacroix entre 1835 et 1847. De chaque côté de la nef, les culs-de-four représentent la naissance et la fin de l’Antiquité. La nef est structurée autour de cinq coupoles qui représentent les cinq thématiques qui permettaient autrefois de classer les livres : les sciences, la philosophie, la législation, la théologie et la poésie.

Pour chaque thématique, la Bibliothèque dispose d’ouvrages exceptionnels comme par exemple le Roman de la Rose. Chef d’œuvre et grand succès de la poésie du Moyen Âge, ce poème de plus de 20 000 vers évoque les codes de l’amour courtois. La Bibliothèque de l’Assemblée nationale en possède deux exemplaires : un manuscrit et un incunable édité à Paris en l’an 1490. Les lettres sont imprimées mais les illustrations sont encore peintes à la main.

Parmi les nombreux trésors, on trouve deux enveloppes que Jean-Jacques Rousseau avait soigneusement cachetées en 1778. Il avait donné pour consigne de ne les ouvrir qu’en 1801 en raison des informations qu’elles contiennent. Cette dernière volonté ne sera pas respectée : les enveloppes sont décachetées le 5 vendémiaire an III - c’est-à-dire le 26 septembre 1794 - à la demande de la Convention. Elles contiennent les manuscrits des Confessions. Rousseau s’y présente avec sincérité : « Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature ; et cet homme, ce sera moi ».

Dans les espaces consacrés à la Théologie, la Bibliothèque conserve une sphère armillaire, de la fin du XVe siècle. Elle servait à étudier le mouvement des astres. Dans certaines civilisations anciennes, cette étude a servi à l’élaboration des premiers calendriers rituels. L’un de ces calendriers que possède la Bibliothèque est d’ailleurs un joyau de renommée mondiale. Le Codex Borbonicus est un calendrier aztèque de plus de 14 mètres de long. Peint au tout début du XVIe siècle sur des feuilles de ficus, il présente le cycle sacré des cinquante-deux années solaires. On y découvre entre autre la description de rituels souvent macabres : le prête qui incarnait Xipe Totec, le dieu du printemps, écorchait sa victime et portait sa peau comme un vêtement pendant vingt jours pour célébrer la renaissance de la nature. On peut aussi voir Quetzalcoatl, le serpent à plume dévorant sa proie.

Le Manuscrit du Procès de Jeanne d’Arc, conservé par la Bibliothèque, exprime encore l’âme de celle qui fut sacrifiée sur le bûcher. C’est l’évêque Cochon, lui-même, qui authentifie ce document, comme l’atteste le sceau apposé sur la dernière page. Détail troublant, le manuscrit a gardé sur les côtés, de manière inexpliquée, des traces ressemblant à des brûlures.

Les sciences nous ouvrent les portes de l’Égypte ancienne. À partir de 1809, paraissaient les premiers volumes de la description des travaux des 167 savants qui accompagnèrent Bonaparte lors de sa campagne entre 1798 et 1801. Les textes, les cartes et les magnifiques gravures réalisés sont encore aujourd’hui une source d’information précieuse pour les archéologues et les historiens.

La coupole centrale, celle de la législation, est en lien direct avec l’Assemblée nationale. Elle nous invite à revenir aux sources de la démocratie française. Dans ce voyage dans le temps, on trouvera le manuscrit de la Marseillaise écrit par Rouget de Lisle ou la signature du Serment du Jeu de Paume, le 20 juin 1789, à Versailles, sous la présidence de Bailly. Dans ce document, véritable acte de naissance de nos institutions, les députés s’engagent à ne jamais se séparer avant d’avoir donné à la France une Constitution et à se rassembler là où les circonstances l’exigent. On y trouve la formule selon laquelle « partout où ses membres sont réunis, là est l’Assemblée nationale ».

Le procès-verbal des séances des 16 et 17 janvier 1793 consacrées au jugement de Louis XVI constitue un autre document précieux de cette période. Parmi les élus qui votent la mort du roi, on trouve notamment Danton ou Robespierre.