Jehan Faulquier

1910 - 1984

Informations générales
  • Né le 30 septembre 1910 à Cervon (Nièvre - France)
  • Décédé le 27 août 1984 à Cervon (Nièvre - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 30 novembre 1958 au 9 octobre 1962
Département
Nièvre
Groupe
Indépendants et paysans d'action sociale

Biographies

Biographie de la Ve République

FAULQUIER (Jehan, Marie, François)
Né le 30 juin 1910 à Cervon (Nièvre)
Décédé le 27 août 1984 à Cervon

Député de la Nièvre de 1958 à 1962

Le nom de Jehan Faulquier apparaît dans de nombreuses biographies de François Mitterrand. C’est en effet à ce notable nivernais, dont la famille avait fourni des procureurs et des avocats au Parlement de Dijon sous l’Ancien Régime, puis des présidents du Tribunal civil de Clamecy et des élus locaux, qu’il revint d’infliger au futur chef de l’Etat une défaite aux élections législatives en novembre 1958. La carrière politique de Jehan Faulquier ne saurait cependant être résumée à ce seul épisode.
Né à Cervon, petite commune du Morvan, Jehan Faulquier fréquente l’école Saint-François de Sales à Dijon avant d’obtenir son baccalauréat en philosophie. Ses études supérieures ont pour cadres la faculté de droit de Dijon, puis la faculté catholique de Paris et l’Ecole supérieure des sciences économiques et commerciales (ESSEC). Il appartient à la Jeunesse agricole chrétienne (JAC) dès 1934, est élu conseiller d’arrondissement dans la Nièvre en 1938, à 28 ans, puis maire de Cervon l’année suivante. Mobilisé en 1939, Jehan Faulquier est fait prisonnier pendant la campagne de France, au printemps 1940. Il connaît cinq années de captivité en Allemagne, de 1940 à 1945, et regagne la Nièvre après la défaite du IIIe Reich. Il reprend alors ses activités professionnelles d’avant-guerre. Son temps se partage entre une tuilerie de Corbigny, dont il est le gérant pendant 16 ans, la société d’exploitation des carrières du Morvan, dont il assure la direction commerciale, et l’exploitation agricole familiale. Jehan Faulquier a retrouvé la mairie de Cervon à la Libération et ajoute à ce mandat celui de conseiller général du canton de Corbigny. Il figure en seconde position sur la liste de « Rassemblement républicain » qui se revendique de la droite modérée lors des élections à la première Assemblée nationale constituante et n’a pas d’élu. Emmenée par le docteur Burgeat, elle n’obtient en effet que 14118 voix le 21 octobre 1945, soit 11,3% des suffrages exprimés, derrière les listes communiste (32,9%), MRP (25,7%) et SFIO (24,4%).
Très investi dans les organisations syndicales et professionnelles, Jehan Faulquier préside la Mutualité sociale agricole de la Nièvre de 1950 à 1982 et fonde la Fédération départementale des centres sociaux en 1957. Onze ans après sa première tentative, il se porte candidat aux élections législatives du 2 janvier 1956. Second de la liste d’ « Union des Indépendants et paysans » derrière le maire de Dompierre-sur-Nièvre, Jehan Faulquier n’est pas élu. Devancée par les communistes, les socialistes, l’UDSR de François Mitterrand et le MRP, sa liste ne recueille que 9,4% des voix.
François Mitterrand, comme Pierre Mendès France, s’oppose au retour au pouvoir du général de Gaulle le 1er juin 1958. Candidat unique de la droite et des gaullistes pour les élections législatives de novembre 1958 dans la 3ème circonscription de la Nièvre, Jehan Faulquier, qui a reçu l’investiture du Centre national des indépendants et paysans (CNIP), en fait son principal adversaire. Le maire de Cervon, vice-président de l’amicale des maires de la Nièvre, affirme dans sa profession de foi électorale que « Mitterrand a dit « non » à tout et combattu avec acharnement et le général de Gaulle et la Vème République, se complaisant dans le système ». Jehan Faulquier se veut au contraire le candidat du « oui » à la nouvelle Constitution et développe un argumentaire très fidèle aux thèmes des Indépendants. Dans ses documents électoraux, il imagine « un syndicalisme plus grand et apolitique dans toutes les branches de la profession agricole », prend position « pour la libre entreprise dans tous les domaines » et « contre l’étatisation » de l’économie. Il plaide pour une paix négociée « dans un esprit de justice entre Musulmans et Européens » en Algérie et se dit plein d’espoir quant aux « richesses incroyables » du Sahara, qui « arriveront à faire la prospérité commune de l’Algérie et de la France ». De nombreux responsables politiques, à l’image de l’ancien ministre Maurice Lemaire, insistent alors sur la chance que les ressources –notamment pétrolières- du Sahara représentent pour la France. Outre François Mitterrand, Jehan Faulquier affronte le communiste Raymond Bussière et le maire socialiste de Luzy, Daniel Benoist. Le maire de Cervon arrive en tête du premier tour avec 12930 voix (36,3%). Il l’emporte dans huit des onze cantons de la circonscription. Le canton de Corbigny, qu’il représente depuis treize ans à l’Assemblée départementale, lui offre son meilleur résultat (48,8%). Le second tour des législatives présente un visage inattendu dans la troisième circonscription de la Nièvre. Quoique devancé par le socialiste Daniel Benoist le 23 novembre 1958, François Mitterrand, député sortant et ancien ministre, ne se retire pas en sa faveur. Les deux hommes entretiennent des rapports difficiles. Cette division de la gauche modérée permet à Jehan Faulquier d’être élu député de la Nièvre le 30 novembre 1958. Il bénéficie en outre de la hausse de la participation entre les deux tours (+6,6%). Se portent sur son nom, lors du scrutin décisif, 15318 suffrages (40,3%) contre 12219 (32,1%) pour François Mitterrand et 10489 (27,6%) pour Daniel Benoist.
Jehan Faulquier s’inscrit au groupe des Indépendants et paysans d’action sociale (IPAS) et siège à la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale sous la 1ère législature de la Vème République. Il ne dépose pas de proposition de loi et n’intervient qu’à une seule reprise dans l’hémicycle. Nommé membre de la Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la promotion sociale en mai 1959, il prend la parole au Palais-Bourbon lors de la discussion de ce texte en séance publique, le 1er juillet 1959. Le projet de loi répond, selon lui, à un objectif d’harmonisation et d’extension des différents dispositifs existant déjà en matière de protection sociale. Il estime cependant qu’il devra être suivi « par une réforme de notre organisation économique » qui établisse « un système de collaboration entre le capital et le travail ». Jehan Faulquier, qui fut proche des milieux démocrates chrétiens, souhaite que « le capital autant que le travail soient au service de l’homme et non l’homme asservi à l’un ou à l’autre ».
Le député de la Nièvre évolue vers l’opposition aux gouvernements de Michel Debré et de Georges Pompidou entre 1959 et 1962. Au début de la législature, il appartient à la majorité, comme en témoigne son approbation du programme du gouvernement Debré (16 janvier 1959) et son vote favorable au nouveau règlement de l’Assemblée nationale (3 juin 1959). L’allocution prononcée par le général de Gaulle le 16 septembre 1959, dont lequel le chef de l’Etat évoque la perspective de l’autodétermination algérienne, ne rejette pas immédiatement Jehan Faulquier dans l’opposition. Il ne prend pas part au scrutin qui suit la déclaration de politique générale du Premier ministre, le 15 octobre 1959. A cette occasion, le groupe des Indépendants et paysans d’action sociale se divise entre ceux qui, comme Alain de Lacoste-Lareymondie ou Henri Yrissou, émettent un vote négatif, les élus qui font le choix de l’abstention volontaire, tel Edouard Frédéric-Dupont, ou celui du soutien au gouvernement (Paul Reynaud). Jehan Faulquier se prononce en faveur de la loi Debré, qui réforme le financement de l’enseignement privé (23 décembre 1959) et accorde les pouvoirs spéciaux au gouvernement pour ramener l’ordre en Algérie après la semaine des barricades (2 février 1960). Il s’abstient volontairement sur le programme du gouvernement Pompidou (27 avril 1962), refuse la levée de l’immunité parlementaire de l’ancien président du Conseil Georges Bidault (5 juillet 1962) et vote la motion de censure du 4 octobre 1962.
Le 28 octobre 1962, 51,9% des électeurs de la Nièvre soutiennent l’élection du président de la République au suffrage universel direct, malgré l’engagement de François Mitterrand, sénateur du département depuis 1959, en faveur du « non ». Jehan Faulquier, qui a lui aussi plaidé pour un vote négatif, semble coupé d’un électorat modéré qui soutient en majorité le général de Gaulle. Bien que sortant et investi par le CNI, il n’obtient que 10,96% des suffrages exprimés au premier tour des élections législatives de novembre 1962. L’UNR a en effet décidé de lui opposer un concurrent en la personne de l’ancien administrateur de la France d’Outre-mer Jacques Tailleur, déjà proche du gaullisme à l’époque du RPF. Jacques Tailleur devance nettement Jehan Faulquier le 18 novembre 1962 (18,3%). Le socialiste Daniel Benoist, déjà candidat en 1958, accepte cette fois de se désister en faveur de François Mitterrand. Le 25 novembre 1962, le candidat de l’UNR affronte donc seul un François Mitterrand qui, devenu maire de Château-Chinon en 1959, l’emporte aisément au second tour (67,4%).
En mars 1967, l’avocat Jacques Mercier, candidat unique des modérés et de la droite, ne réussit pas à inquiéter François Mitterrand aux élections législatives. Un an plus tard, après les événements de mai 1968 et la dissolution de l’Assemblée nationale, l’Union pour la défense de la République (UDR) investit Jean-Claude Servan-Schreiber, cousin du fondateur de l’Express et gaulliste de longue date, dans la 3ème circonscription de la Nièvre, face à François Mitterrand. Jehan Faulquier accepte de devenir son suppléant. Devancé de quatre voix dans l’ensemble de la circonscription le 23 juin 1968, François Mitterrand est finalement réélu député avec 56,2% des suffrages exprimés une semaine plus tard.
Jehan Faulquier se consacre dès lors à ses mandats locaux ainsi qu’à ses activités professionnelles ou syndicales. Il quitte le Conseil général de la Nièvre en 1967 mais demeure maire de Cervon. En 1970, il est élu Président de la Chambre d’agriculture de la Nièvre et conserve ces fonctions jusqu’en 1976. L’ancien parlementaire décède dans sa commune natale, âgé de 74 ans. Il était chevalier de la Légion d’honneur et officier de l’Ordre national du mérite.