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Examen de la recevabilité financière de deux propositions de loi au regard de l’article 40 de la Constitution et de l’article 89, alinéa 1er, du Règlement de l’Assemblée nationale.
Sur le rapport de la Présidente et en application de l’article 89 alinéa 1er du Règlement de l’Assemblée nationale, le Bureau a refusé le dépôt de deux propositions de loi relatives à l’âge légal de départ à la retraite, considérant que leur adoption aurait les conséquences prévues par l’article 40 de la Constitution.
Le Bureau a adopté la décision suivante :
Vu la proposition de loi dont Mme Mathilde PANOT et plusieurs de ses collègues demandent le dépôt, visant à porter l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans ;
Vu la proposition de loi dont M. Ugo BERNALICIS et plusieurs de ses collègues demandent le dépôt, visant à abroger le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans ;
Vu la Constitution, notamment son article 40 ;
Vu le Règlement de l’Assemblée nationale, notamment ses articles 14 et 89 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des impositions sur les biens et services ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le code rural et de la pêche maritime ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 ;
1. Considérant que l’article 1er de la proposition de loi visant à porter l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans modifie l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale aux fins d’abaisser l’âge légal d’ouverture des droits à une pension de retraite à 60 ans ; qu’il modifie également l’article L. 161-17-3 du même code afin de réduire la durée d’assurance pour pouvoir bénéficier d’une pension de retraite à taux plein à 160 trimestres ;
2. Considérant que l’article 1er de la proposition de loi visant à abroger le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans modifie l’article L. 161-17-2 susmentionné aux fins d’abaisser l’âge légal d’ouverture des droits à une pension de retraite à 62 ans ; qu’il modifie également plusieurs dispositions relatives à la durée d’assurance pour pouvoir bénéficier d’une pension de retraite à taux plein afin de rétablir la rédaction existant avant l’entrée en vigueur de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, laquelle prévoyait des durées d’assurance inférieures ;
3. Considérant qu’aux termes de l’article 40 de la Constitution : « Les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique » ;
4. Considérant qu’aux termes de l’article 89, alinéa 1er, du Règlement de l’Assemblée nationale : « Les propositions de loi présentées par les députés sont transmises au Bureau de l’Assemblée ou à certains de ses membres délégués par lui à cet effet. Lorsqu’il apparaît que leur adoption aurait les conséquences prévues par l’article 40 de la Constitution, le dépôt en est refusé » ;
5.Considérant que l’abaissement de l’âge légal d’ouverture des droits à une pension de retraite et la réduction de la durée d’assurance permettant de bénéficier d’une pension de retraite à taux plein assouplissent les conditions d’attribution de prestations sociales versées par les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale ; que ces mesures aggravent une charge publique ;
6. Considérant, au surplus, que cette aggravation a un caractère massif et manifeste ; que l’irrecevabilité qui doit résulter de l’assouplissement des conditions d’attribution de prestations sociales versées par les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale a été dûment constatée par de nombreuses décisions rendues sur le fondement des alinéas 2, 3 et 4 de l’article 89 du Règlement ; que la cohérence des décisions rendues en cette matière est nécessaire au bon fonctionnement de l’institution ;
7. Considérant que les autres articles des deux propositions de loi, qui en sont inséparables, prévoient des compensations des charges résultant pour les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale de l’application de leur article 1er ; que, toutefois, l’article 40 de la Constitution fait obstacle à toute initiative d’un député se traduisant par l’aggravation d’une charge, quand bien même cette dernière serait compensée par la diminution d’une autre charge ou par une augmentation des ressources publiques ;
8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les deux propositions de loi méconnaissent les exigences de l’article 40 de la Constitution,
DÉCIDE :
Le dépôt de la proposition de loi visant à porter l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans et de la proposition de loi visant à abroger le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans est refusé.
Présents ou excusés :
Présents :
Mme Yaël Braun-Pivet, Présidente ;
Mmes Elodie Jacquier-Laforge, Naïma Moutchou, Caroline Fiat, M. Sébastien Chenu et Mme Hélène Laporte, Vice‑Présidents ;
Mme Marie Guévenoux, MM. Éric Ciotti et Eric Woerth, Questeurs ;
M. Christophe Blanchet, Mmes Soumya Bourouaha, Claire Colomb-Pitollat, Caroline Janvier et Lise Magnier, MM. Maxime Minot et Pierre
Morel-À-L’Huissier, Mme Danièle Obono, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Sabrina Sebaihi, M. Jean Terlier, Mme Laurence Vichnievsky, Secrétaires.
Excusée :
Mme Valérie Rabault
Assistaient également :
Mme Marine Le Pen et M. Bertrand Pancher, Présidents de groupe politique.