N° 1182
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 4 novembre 2003.
PROPOSITION DE LOI
portant modification de la loi relative à la réduction
du temps de travail.
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de
constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉE
par Mme Maryse JOISSAINS-MASINI
Additions de signatures : MM. Jean Auclair, Loïc Bouvard, Ghislain Bray, Jacques Domergue, Philippe Dubourg, Mme Arlette Franco,
MM. Daniel Gard, Lionnel Luca, Daniel Mach, Philippe Armand Martin, Christian Ménard, Étienne Mourrut, Jacques Remiller, Bernard Schreiner, Daniel
Spagnou, Frédéric Soulier et Michel Voisin
Députés.
Travail et emploi.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Alors que la loi sur la Réduction du Temps de Travail a été votée, en 1999, dans
l'optique de dégager plus de temps libre pour les loisirs des Français et, directement favoriser la création d'emplois dans l'économie publique et privée, force est de
constater que ces objectifs n'ont pas été atteints.
La situation économique a changé depuis. Il est, en effet, difficile pour l'économie
française de rester dans le cadre strict des critères du Traité de Maastricht et de maintenir, en même temps, un haut niveau de qualité de ses services publics soumis à
la loi de la Réduction du Temps de Travail.
C'est l'effet contraire qui a pu être observé par les chefs d'entreprise comme les
responsables du service public, et rappelé par les résultats des diverses analyses du Conseil Economique et Social et de la Direction des études économiques de la Caisse
des dépôts et consignations.
Depuis 1999, la réduction du temps de travail à 35 heures hebdomadaire aura coûté aux
contribuables près de 13,7 milliards d'euros, via les allégements de charges destinées aux entreprises qui ont réduit leur temps de travail, soit un coût annuel compris
entre 6 100 et 9 100 euros par emploi créé.
A l'heure de l'essoufflement de la croissance économique, les entreprises éprouvent de
plus en plus de mal à répondre à la demande sur le marché et les administrations nationales ou locales à l'ensemble des besoins croissants d'une population
économiquement fragilisée.
L'impact économique et social de la réduction du temps de travail à 35 heures n'a pas
permis de lutter contre le chômage.
L'économie française a connu une augmentation de 20 % du coût horaire du travail en
quatre ans, une baisse de 3 points du taux de marge brute, et une progression de la productivité par personne employée presque moitié moins importante que dans les
autres pays de l'OCDE. La compétitivité des entreprises françaises s'est, en fait, dégradée durablement.
La loi sur la Réduction du Temps de Travail n'a pas réduit le temps de travail des
Français mais elle a réduit l'activité de la France.
Elle a encouragé les délocalisations ou leur accélération vers des pays à faible coût
du travail, aggravant ainsi les plans sociaux brutaux, les pertes d'emplois sèches et la perte définitive de métiers et de savoir-faire français tels que la confection
ou la fabrication du textile.
Par ailleurs, cette loi contribue à détériorer le lien social, les acquis de la
politique de proximité : emblème d'une démocratie adulte.
Dans le secteur de l'économie privée, les commerces ont réduit l'amplitude de leurs
heures d'ouverture au public.
Dans le secteur de l'économie publique, les hôpitaux, les maisons de retraite, tout
service aux personnes en difficulté se retrouve régulièrement en panne de main d'uvre,
ou de personnel indispensable à la santé publique.
La RTT a amputé nos moyens de 11 % dans ce secteur. Les petits hôpitaux ont été les
grands perdants des « 35 heures » et il faut désormais parler de « parcellisation du travail », ceci, alors que c'est un travail pénible.
Ce raisonnement est applicable à l'ensemble du Service public à qui il est imposé,
contre toute philosophie républicaine, de fermer ses portes durant la semaine.
Désormais, les salariés sont les premières victimes de cette exception française du
chômage de masse, que devait résorber les bienfaits de cette réduction du temps de travail.
De 1998 à 2001, les créations d'emplois que l'on croyait liées à l'effet bénéfique de
la loi dite des « 35 heures » étaient imputables à la croissance et à la création artificielles d'emplois publics.
Aujourd'hui, les salariés les plus modestes sont soumis à une loi qui pénalise leur
pouvoir d'achat, accroît la flexibilité des horaires et le stress, sans les prémunir contre les risques du chômage. La limitation des heures supplémentaires pénalise les
salariés, aux rémunérations les plus faibles, qui voudraient acquérir un train de vie supérieur pour le bien-être de leur famille.
Il s'agit de donner à l'ensemble des Français la possibilité d'augmenter leur
pouvoir d'achat par une rémunération juste qui encourage leur effort.
La vie privée subit une déstructuration de son temps avec un nouveau rythme incohérent
du temps de travail, des temps de pause interminables en milieu de journée ou des horaires incompatibles avec l'épanouissement de la vie de famille.
Pour permettre à l'économie française de répondre à la puissante concurrence qui ne
cesse de la faire chuter dans le rang des pays industrialisés, pour permettre aux services publics de la République de fonctionner à nouveau normalement, pour permettre
à chaque salarié français de choisir librement son temps de travail et son niveau de revenu, la présente proposition de loi propose :
- de maintenir la loi pour les personnes ayant un travail « pénible » (défini par les
accords des branches professionnelles) et les personnes dont l'âge excède 53 ans ;
- de maintenir la loi pour les Sapeurs Pompiers volontaires ;
- de maintenir la loi dans les entreprises ayant contractualisé des accords de
branches ;
- d'abroger la loi sur la réduction du temps de travail et rétablir la durée légale à
39 heures par semaine ;
- de créer une mesure d'accompagnement de l'abrogation qui consiste à augmenter le
coût horaire du SMIC de 4 % ;
- de supprimer toute limite autoritaire du nombre d'heures supplémentaires.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
Le premier alinéa de l'article L. 212-1 du code du travail est remplacé par trois
alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 212-1. - Dans les établissements ou professions mentionnés à
l'article L. 200-1, ainsi que dans les établissements artisanaux et coopératifs et leurs dépendances, la durée légale du travail effectif des salariés est fixée à
trente-neuf heures par semaine.
Toutefois, la durée légale du travail effectif des salariés âgés de plus de 53 ans,
des salariés sapeurs-pompiers volontaires et des salariés exerçant un métier pénible dont la liste est déterminée par accord de branche est fixée à trente-cinq heures
par semaine.
Il en va de même pour les salariés dont les entreprises ont contractualisé des accords
de branches. »
Article 2
Le contingent d'heures supplémentaires prévu à l'article L. 212-6 du code du travail
est fixé par des conventions signées par établissement et par les partenaires sociaux.
Article 3
Sans préjudice des dispositions visées aux articles L. 141-4 et L. 141-7 du code du
travail, à compter de la promulgation de la présente loi, pour les catégories de travailleurs mentionnées à l'article L. 131-2 du code du travail, le montant du salaire
minimum de croissance est porté à 7,48 euros de l'heure en métropole, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les départements d'outre-mer.
Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS
Prix de vente : 0.75
ISBN : 2-11-118076-9
ISSN : 1240 - 8468
En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21
N° 1182 - Proposition de loi de Mme Maryse Joissains-Masini portant modification de la loi
relative à la réduction du temps de travail
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