N° 3531 - Rapport d'information de M. Émile Blessig déposé par la délégation de l'Assemblée nationale à l'aménagement et au développement durable du territoire sur le déploiement de la couverture numérique sur le territoire (télévision numérique de terre, téléphonie mobile, internet haut débit)




N° 3531

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 19 décembre 2006.

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

AU NOM DE LA DÉLÉGATION À L'AMÉNAGEMENT
ET AU DÉVELOPPEMENT DURABLE DU TERRITOIRE (1),

sur le déploiement de la couverture numérique sur le territoire
(télévision numérique de terre, téléphonie mobile, internet haut débit)

PAR M. ÉMILE BLESSIG,

Député.

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(1) La composition de cette Délégation figure au verso de la présente page.

La Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire est composée de : M. Émile Blessig, président ; MM. Jean Launay, Serge Poignant, Max Roustan, vice-présidents ; MM. André Chassaigne, Philippe Folliot, secrétaires ; MM. Joël Beaugendre, Jérôme Bignon, Jean Diébold, Jean-Pierre Dufau, Louis Giscard d'Estaing, Patrick Lemasle, Jacques Le Nay, Mmes Henriette Martinez, Marie-Françoise Pérol-Dumont.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 7

I.- COUVERTURE EN TÉLÉPHONIE MOBILE ET ACCÈS À L'INTERNET HAUT DÉBIT : DEUX DOSSIERS EN VOIE DE RÈGLEMENT 2

A.- L'ACHÈVEMENT DE LA COUVERTURE DU TERRITOIRE EN TÉLÉPHONIE MOBILE 2

1. Une entreprise indispensable 2

a) Un outil de communication devenu rapidement universel 2

b) La question des coûts de la couverture totale du territoire 2

2. L'élaboration de plans concertés de résorption 2

a) La convention du 15 juillet 2003 2

b) L'avenant du 13 juillet 2004 2

3. Un achèvement programmé 2

a) Des débuts laborieux 2

b) Un rattrapage rapide 2

c) Trois ultimes difficultés à résoudre 2

4. La téléphonie du futur et les besoins de fréquences 2

a) La couverture du territoire en téléphonie 2G : un acquis pour l'avenir 2

b) Le déploiement de la téléphonie du futur : vers une nouvelle fracture numérique ? 2

c) Affecter une partie du dividende numérique à la téléphonie mobile 2

B.- L'ACCÈS À L'INTERNET HAUT DÉBIT 2

1. Un élément structurant 2

a) Qu'est-ce que le haut débit ? 2

b) L'apparition d'une fracture territoriale 2

2. Un rattrapage très rapide 2

a) L'ouverture à la concurrence sous la pression du régulateur 2

b) L'engagement des collectivités locales 2

c) La stratégie de France Télécom 2

3. Comment achever la couverture en haut débit ? 2

a) Les limites de l'ADSL 2

b) Le WiMax, vecteur du très haut débit dans les territoires ? 2

c) Quelles solutions pour les 1 % non couverts ? 2

II.- UN NOUVEL ENJEU POUR LES TERRITOIRES : L'ACCÈS À LA TÉLÉVISION NUMÉRIQUE TERRESTRE ET AUX SERVICES NUMÉRIQUES DU FUTUR 2

A.- LA TNT, UN NOUVEAU SERVICE POUR LES TÉLÉSPECTATEURS 2

1. Qu'est-ce que la TNT ? 2

2. Une stratégie de déploiement ambitieuse et rapide. 2

a) La planification du déploiement par le Conseil supérieur de l'audiovisuel 2

b) Un lancement réussi 2

B.-LE TRAITEMENT DES ZONES DE PARTAGE DE FRÉQUENCES 2

1. Une situation épineuse 2

a) Contourner les effets d'une ressource hertzienne limitée 2

b) Un calendrier retardé 2

2. Des solutions spécifiques 2

a)  La recherche de solutions innovantes 2

b) La question de la réception des chaînes étrangères 2

C.- AU-DELÀ DU TAUX DE 85 % D'ÉQUIPEMENT, QUEL ACCÈS À LA TNT ET QUELS DÉLAIS POUR LES ZONES NON COMPRISES DANS LE PLAN D'ÉQUIPEMENT PRIORITAIRE ? 2

1. Les moyens terrestres 2

a) Une couverture hertzienne qui ira au-delà de 85 % 2

b) Les réseaux câblés 2

c) L'ADSL 2

2. Le satellite 2

a) Un mode de diffusion indispensable 2

b) Les réticences des opérateurs 2

c) L'indispensable vote d'une loi 2

3. Quel accompagnement pour l'achèvement du basculement au numérique ? 2

D.- DE NOUVEAUX BOULEVERSEMENTS ANNONCÉS 2

1. La 6e conférence régionale des radiocommunications et ses résultats 2

a) Les enjeux de la conférence 2

b) Des résultats exceptionnels 2

2. Des perspectives remarquables qui ouvrent le dossier du dividende numérique 2

a) Un dividende numérique sans doute considérable 2

b) La télévision sur mobile 2

c) La télévision haute définition (TVHD) 2

3. Quel partage du dividende numérique ? 2

a) Quel accès au dividende numérique pour la téléphonie mobile ? 2

b) Quel accès au dividende numérique pour les opérateurs de télécommunications ? 2

c) Dividende numérique et services publics dans les territoires 2

d) Quels outils de régulation pour concilier développement de l'offre, protection des contenus et satisfaction des besoins publics ? 2

TRAVAUX DE LA DÉLÉGATION 2

I. - AUDITIONS DE SUIVI 2

● M. PAUL CHAMPSAUR, PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE RÉGULATION DES COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES ET DES POSTES ET MME GABRIELLE GAUTHEY, MEMBRE DE L'AUTORITÉ 2

● M. FRANÇOIS RANCY, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'AGENCE NATIONALE DES FRÉQUENCES 2

● M. DOMINIQUE BAUDIS, PRÉSIDENT DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'AUDIOVISUEL, ET M. PHILIPPE LEVRIER, MEMBRE DU CONSEIL 2

II.- AUDITION DE M. FRANÇOIS LOOS, MINISTRE DÉLÉGUÉ À L'INDUSTRIE 2

III.- EXAMEN DU RAPPORT 2

CONCLUSIONS ADOPTÉES PAR LA DÉLÉGATION 2

ANNEXES 2

1. ENTRETIENS DU RAPPORTEUR 2

2. CODE GÉNÉRAL DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES (extraits) 2

3. RECOMMANDATION DU CSA RELATIVE AU SERVICE ANTENNE SUR LES RÉSEAUX CÂBLÉS NUMÉRIQUES 2

4. LETTRE AU RAPPORTEUR DE M. FRANÇOIS LOOS, MINISTRE DÉLÉGUÉ À L'INDUSTRIE 2

5. LEXIQUE 2

6. LES GÉNÉRATIONS DE TÉLÉPHONIE MOBILE 2

7. CARTES DES COUCHES DE FRÉQUENCES OBTENUES PAR LA FRANCE A L'ISSUE DE LA CRR-06 2

MESDAMES, MESSIEURS,

Pour les territoires, la qualité de la couverture numérique est devenue aussi importante que celle du réseau routier ou de la desserte postale.

La téléphonie mobile a changé les modalités de travail de toutes les professions itinérantes. L'internet haut débit est le guichet de tous les services, la porte d'accès à toutes les documentations, un exceptionnel outil de transmission de données, personnelles ou professionnelles. La télévision numérique terrestre (TNT) est un vecteur de culture et de distraction. Elle va ouvrir l'accès à 18 chaînes gratuites au lieu de parfois seulement trois, sans parler des services payants et à la demande.

Si, en ville ou en zone dense, les outils de communication numériques sont d'abord une nouvelle approche des services traditionnellement accessibles, une solide couverture numérique offre aux territoires les moins denses l'accès à des services nouveaux. Le cultivateur ou le forestier peuvent désormais téléphoner depuis leur lieu de travail, les habitants d'une petite ville voire d'un village avoir accès chez eux au guichet internet de la banque alors que la première agence est à plusieurs kilomètres, à des documentations professionnelles exhaustives et même aux ressources de la Bibliothèque nationale ; les professionnels isolés peuvent travailler en réseau ; la TNT va proposer une offre de divertissement inouïe pour des zones qui n'ont jamais disposé au mieux que d'un cinéma ou d'un théâtre.

Autrement dit, ce qu'on a appelé les nouvelles technologies de l'information et de la communication sont de puissants outils de valorisation des territoires les plus difficiles et les moins denses ; elles leur donnent des instruments de travail et de distraction qui n'existaient jusqu'ici que dans les villes, et souvent seulement les grandes, et les zones denses. Elles permettent donc à ces territoires de mettre en valeur leurs atouts : avec elles, habiter dans une grande maison à la campagne n'a plus pour contrepartie des restrictions drastiques d'accès aux services offerts par la société, aux types d'emplois, à la culture, voire aux soins. La couverture numérique est ainsi un instrument essentiel d'aménagement du territoire.

Cependant, le développement de ces nouveaux outils numériques s'est d'abord fait en zone dense : au début des années 2000, bien loin de venir compenser les handicaps des territoires les plus difficiles, éloignement, enclavement, mauvaises dessertes de tous ordres, il est venu créer pour eux un handicap supplémentaire, l'absence d'accès aux méthodes nouvelles de communication et de travail.

La couverture numérique du territoire fut donc le premier dossier auquel s'attela la Délégation, dès le début de la législature, en 2002.

Les préoccupations concernaient alors le déploiement de la téléphonie mobile et de l'internet haut débit. Les préconisations adoptées par la Délégation, sur le rapport (n° 443) de M. Nicolas Forissier, étaient d'assurer la couverture en téléphonie mobile, développer la concurrence des fournisseurs d'accès à internet, autoriser les collectivités locales à être opératrices de télécommunications.

La Délégation ne s'est jamais dessaisie de cette question. À travers des auditions régulières, elle a pu, avec satisfaction, constater la mise en œuvre des préconisations qu'elle avait adoptées et voir progressivement se résorber la fracture numérique en matière de téléphonie mobile et d'internet haut débit.

Le rapport présente ainsi, dans sa première partie, les conditions dans lesquelles continue à s'effectuer la réduction rapide de la fracture numérique dans ces deux domaines sur les territoires. Il comporte aussi des propositions pour l'équipement des ultimes territoires non encore couverts.

Le suivi de la résorption de la fracture numérique constatée en 2002 n'aurait cependant certainement pas justifié à lui seul l'élaboration du présent rapport. Au fil de ses auditions de suivi, la Délégation a pu prendre conscience qu'était en train de se préparer un nouveau bouleversement, et que ce bouleversement comportait un risque d'apparition d'une nouvelle fracture numérique.

L'enjeu est désormais la télévision numérique terrestre, ou TNT. La TNT, c'est l'application de la numérisation à l'audiovisuel. Sa conséquence la plus immédiatement tangible, c'est le passage de 6 chaînes de télévision hertzienne à 18 gratuites et 11 payantes, en attendant plus. Or, il est apparu que la planification du déploiement de la TNT par le CSA ne concernait que 85 % de la population, sur une partie moins grande du territoire. Au-delà des 85 %, les calendriers et l'éventualité du déploiement restaient flous. De plus, la présentation du passage de 70 % à 85 % de la population semblait bien optimiste. La réapparition d'une fracture numérique pour 30 % de la population était une hypothèse très plausible.

Par ailleurs, il est apparu aussi que le basculement de la télévision au tout-numérique allait engendrer, là où il aurait lieu, un « dividende  numérique » disponible pour de nouveaux services, lequel pourrait bien être considérable. La fracture entre territoires numérisés et territoires non numérisés en serait accrue d'autant.

C'est pour y voir plus clair sur le nouveau paysage numérique d'après l'arrêt de l'analogique et sur les conditions de la transition progressive vers ce paysage que la Délégation, dans sa réunion du 30 mai 2006, a nommé son président rapporteur d'information sur le déploiement de la couverture numérique sur le territoire.

La Délégation a conclu qu'il est permis d'être raisonnablement optimiste sur l'égal équipement des territoires. À l'origine de cette conviction figure la constatation que des politiques volontaristes sont menées à cette fin, notamment de la part des collectivités locales. Mais l'évolution technologique nourrit aussi cette opinion : dans ce domaine, les progrès technologiques sont incessants ; ils permettent des débits de plus en plus importants ; ils créent aussi un phénomène nouveau, inconnu il y a quelques années, la « convergence numérique » : des réseaux, des dispositifs construits pour faire passer un type de données ou de communication permettent de plus en plus d'en faire passer d'autres. On connaît les offres ADSL triple play, qui donnent l'accès à la fois à l'internet haut débit, à la téléphonie fixe et à la télévision. Dans le monde rural, la technologie hertzienne WiMax va rapidement avoir les mêmes fonctionnalités : les opérateurs vont très bientôt offrir des abonnements à la fois de téléphonie et d'accès internet haut débit et très haut débit ; mais un jour, ils proposeront aussi la télévision. La convergence numérique réduit ainsi le coût d'équipement des territoires.

La deuxième conclusion est que l'État devra être vigilant pour que le bouleversement qui va accompagner le passage au tout-numérique respecte la satisfaction des besoins futurs des territoires dans tous les domaines de la communication, et des éléments de qualité des produits audiovisuels proposés. Dans ce domaine, les acteurs sont puissants. L'État devra anticiper les évolutions dans sa réflexion et fixer un certain nombre de règles pour l'usage des fréquences. Pour cela, il devra sans doute aussi lui-même réformer ses organes de régulation.

À ces conditions, les services numériques de tous ordres devraient pouvoir continuer à croître sur l'ensemble des territoires dans un équilibre globalement maîtrisé.

I.- COUVERTURE EN TÉLÉPHONIE MOBILE ET ACCÈS À L'INTERNET HAUT DÉBIT : DEUX DOSSIERS EN VOIE DE RÈGLEMENT

A.- L'ACHÈVEMENT DE LA COUVERTURE DU TERRITOIRE EN TÉLÉPHONIE MOBILE

1. Une entreprise indispensable

La croissance de l'équipement des Français en téléphonie mobile a été extrêmement rapide. En 1992, 1 % des Français seulement étaient équipés d'un téléphone mobile. Au début 2002, ce taux atteignait les 65 %.

Dans ces conditions, il était clair que le téléphone mobile devenait un instrument normal et usuel de communication, un outil auquel on recourait par réflexe aussi bien pour téléphoner depuis sa voiture, rester en relation avec son entreprise, mais aussi appeler des secours d'urgence.

Dès lors, vu la progression du taux d'équipement, le téléphone mobile avait tôt ou tard vocation à équiper l'ensemble des Français. Aujourd'hui, 47,2 millions d'entre eux ont un abonnement. La question de son extension à la totalité du territoire était alors à poser.

En matière de communication sur mobile, c'est la notion de territoire qui est pertinente, puisque les utilisateurs bougent. Un utilisateur mobile traverse, sur l'autoroute, des zones peu peuplées ; il ne souhaite pas être coupé pendant son trajet. Il effectue des randonnées en montagne ; il n'a pas idée qu'il ne pourra pas appeler les secours à partir de son portable parce que le réseau ne passe pas. Or, en 2000, alors que les opérateurs couvraient la quasi-totalité des habitations, entre 97 % et 99 %, ils ne couvraient qu'entre 80 % et 89 % du territoire, dans des conditions où l'utilisateur devait être en extérieur et s'arrêter pour téléphoner.

L'achèvement de la couverture territoriale se heurtait bien entendu à la question de son coût. Les opérateurs se trouvaient partagés entre le souhait de fournir à leurs clients une couverture totale du territoire dans les meilleures conditions de confort, et le coût des investissements à faire pour rendre ce service. Les communes situées sur des territoires non couverts voulaient que leurs administrés puissent désormais accéder à ce service, que le médecin puisse appeler son secrétariat depuis sa voiture, de façon à mieux organiser sa tournée, qu'on puisse appeler les secours de partout, que les entreprises puissent développer aussi sur ces territoires les modes d'organisation qu'elles mettaient en place ailleurs ; en revanche, communes souvent pauvres et isolées, elles n'avaient aucun moyen de participer aux frais.

De premières études furent donc lancées par le Gouvernement pour évaluer les territoires non couverts. Une première étude, conduite à la fin de l'année 2000, concluait qu'en France métropolitaine 46 000 km2 n'étaient couverts par aucun réseau. Cela représentait 390 000 personnes soit un peu moins de 0,7 % de la population, mais aussi 1 480 communes et 8,4 % du territoire.

À la suite de contestations relatives à cette étude, l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) décida de reprendre ce travail. Une étude fut donc conduite en parallèle entre octobre et novembre 2001 en partenariat avec l'École supérieure des télécommunications. Un protocole précis fut établi : pour que le territoire soit réputé couvert, il fallait que l'utilisateur du mobile puisse obtenir la tonalité sur chacun des réseaux de trois opérateurs et qu'il puisse tenir une communication pendant au moins une minute en se déplaçant à la vitesse d'un piéton. L'étude fut conduite sur 25 départements. Une fois les résultats obtenus, leur extrapolation permit de faire apparaître que 5 000 à 6 000 communes étaient à l'époque mal desservies. Ce chiffre, qui concernait donc 15 % des communes françaises, concernait évidemment une fraction du territoire plus grande encore. Surtout une extrapolation complémentaire prenant en compte le caractère rural d'une bonne partie du territoire du pays amenait à considérer que 15 000 communes pouvaient connaître des problèmes de desserte.

Le 24 septembre 2002, les trois opérateurs, SFR, Orange et Bouygues Télécom s'engagèrent, à l'initiative de l'Autorité de régulation des télécommunications à réaliser un programme destiné à couvrir les bourgs centres de près de 1 638 communes, alors non couverts.

Le principe était celui d'un partage des frais entre collectivités locales et opérateurs. Les opérateurs installaient et exploitaient à leurs frais des équipements actifs sur des infrastructures passives mises à leur disposition par des collectivités territoriales. Ces engagements correspondaient à l'équipement et l'exploitation de 1 250 sites radio.

2. L'élaboration de plans concertés de résorption

Devant les protestations d'un certain nombre de collectivités, et compte tenu des résultats de l'étude de l'ART, le dossier fut cependant repris par le Gouvernement au cours de l'automne 2002. Il fut demandé aux préfets de région de réactualiser, en concertation avec les collectivités locales et les opérateurs, les besoins de couverture qui avaient été recensés au cours de l'hiver 2001-2002, et de définir des priorités.

Le recensement, achevé au premier semestre 2003, fit apparaître que les besoins de couverture concernaient non pas 1 638 communes, mais plus de 3 000, 3 073 très précisément.

Dès lors, les zones à couvrir furent réparties en deux phases. La première phase était la reprise des engagements du 24 septembre 2002, avec 1 250 sites permettant la couverture de 1 833 communes. La seconde phase, dont les modalités devaient être définies ultérieurement, comprenait les sites restants dont le nombre était évalué à environ 930 pour la couverture de 1 240 communes.

Par ailleurs, lors du Comité interministériel d'aménagement du territoire (CIADT) du 13 décembre 2002, le Gouvernement avait décidé d'affecter 44 millions d'euros à l'extension de la couverture du territoire par les réseaux mobiles, à quoi s'ajoutaient 20 millions d'euros de récupération de TVA. Ces fonds avaient pour objet d'aider les collectivités locales, communes et départements, à financer les infrastructures. Des fonds européens étaient également recherchés, ce type d'équipement s'y étant avéré éligible.

L'ensemble de ces actions aboutit à la signature, le 15 juillet 2003, entre l'État, représenté par les ministres, d'une part, et l'ART, de l'autre, les associations de collectivités locales (Association des maires de France et Assemblée des départements de France) et les trois opérateurs de la « convention nationale de mise en œuvre du plan d'extension de la couverture du territoire par les réseaux de téléphonie mobile de deuxième génération ». Cette convention prévoyait la couverture en téléphonie mobile des zones dites « blanches », qui ne sont couvertes par aucun opérateur de téléphonie mobile. Un Comité de pilotage national chargé du suivi de ce plan était mis en place.

Le principe était celui de la mise à disposition d'infrastructures passives par les collectivités locales, en pratique les départements, en 2003-2004 auprès des opérateurs, et l'installation et l'exploitation par ceux-ci de leurs équipements actifs sur ces infrastructures. Pour réduire les coûts, le principe de la couverture par les opérateurs était celui de l'« itinérance » : dans cette définition, un seul opérateur installe ses équipements actifs sur l'infrastructure fournie ; il accueille alors sur son réseau les clients des deux autres opérateurs, sans aucun surcoût. Il était cependant prévu que, dans les cas où les conditions le permettaient, un territoire pouvait être équipé selon le principe de la « mutualisation » : dans cette configuration, l'infrastructure accueille les équipements actifs de chacun des opérateurs qui le souhaitent.

La convention reprenait les engagements des trois opérateurs en date du 24 septembre 2002, pour l'équipement de 1 250 sites.

Elle se fixait pour objectif de couvrir, à l'intérieur des zones blanches, les bourgs centres, les axes de transport prioritaires, ainsi que les zones touristiques à forte affluence : autrement dit, à ce stade, il ne s'agissait pas de couvrir l'intégralité du territoire des communes concernées.

La définition de la couverture reprenait celle de l'ART : les zones blanches étaient considérées couvertes dès lors qu'elles permettaient à un piéton d'utiliser en extérieur un téléphone mobile standard pour passer et recevoir des appels vocaux.

La technologie retenue pour la couverture était la technologie GSM, autrement dit la technologie mobile de deuxième génération (2G), et non la technologie 3G (UMTS) (1) qui permet, outre le transport de la voix, comme le GSM, celui de contenus multimédia (images, son, vidéos). Il était cependant prévu que les opérateurs s'efforçaient de mettre en œuvre « un design radio facilitant une future réutilisation des sites aux fins d'offrir des services UMTS ».

Il était ensuite prévu une sécurisation juridique de l'intervention des collectivités territoriales, pour investir dans des équipements passifs et actifs de télécommunication destinés à contribuer à l'aménagement et au développement économique des territoires. Cette sécurisation fut opérée par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, qui a introduit dans le code général des collectivités territoriales un article L. 1425-1 qui figure en annexe au présent rapport et dont les dispositions sont présentées plus bas.

Enfin, l'extension rapide du dispositif à une « phase II » concernant les collectivités non couvertes était prévue.

La « phase II » fut définie et organisée par l'avenant du 13 juillet 2004.

Elle comporte plusieurs évolutions d'importance par rapport à la phase I. D'une part, le renouvellement des autorisations GSM des opérateurs, effectué entre-temps, au moins pour Orange et SFR, ont accru le taux de couverture de la population demandé à 99 %, et surtout prévu la prise en charge financière intégrale de la phase II du plan d'action par les opérateurs mobiles. Autrement dit, dans les équipements de phase II, il n'y a plus de participation des collectivités locales. Le coût final des deux phases se monte ainsi pour chaque opérateur à 150 millions d'euros. Les opérateurs se répartissent les sites à équiper. En cas d'itinérance, l'opérateur chef de file installe les infrastructures passives (pylônes), y pose ses équipements actifs et fait passer sur son réseau le signal de ses concurrents. En cas de mutualisation, il installe les infrastructures passives et y accueille les équipements radioélectriques de ses concurrents.

D'autre part, la phase II prévoit à terme la couverture de l'intégralité du territoire. L'article 52 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique dispose en effet que « lorsque les collectivités territoriales font application de l'article L. 1425-l du code général des collectivités territoriales en matière de radiocommunications mobiles, les zones qu'elles ont identifiées comme n'étant couvertes par aucun opérateur de radiocommunications mobiles, sont couvertes par l'un de ces opérateurs chargé d'assurer une prestation d'itinérance locale. » Il est exposé dans l'avenant qu'il « s'inscrit en pleine conformité avec les dispositions de cet article, et en assure aux niveaux national et local l'application concrète. »

Autrement dit, les collectivités se trouvent désormais en charge du signalement aux opérateurs des zones blanches subsistantes, aux fins de traitement de celles-ci.

Enfin, s'agissant des délais, l'avenant expose que les opérateurs lanceront la mise en œuvre de la phase II à partir du 1er janvier 2005, pour une exploitation commerciale de l'ensemble des sites avant la fin de l'année 2007.

3. Un achèvement programmé

Le lancement du plan de résorption fut cependant extrêmement lent. Au 13 juillet 2004, date de la signature de l'avenant lançant la phase II, seulement 14 accords, pour 350 sites avaient été conclus entre les départements et les opérateurs.

Au 30 juin 2005, sur les 2 186 émetteurs prévus, seuls 91 avaient été ouverts. Fin décembre 2005, 378 sites étaient ouverts, couvrant 577 communes sur les 3 073 identifiées comme situées en zone blanche, soit 19 % seulement.

La raison en est cependant sans doute autant le caractère finalement très ambitieux du calendrier fixé que des questions de mauvaise volonté des uns ou des autres, même si, on le verra plus loin, ce type de raison ne peut pas non plus être exclu.

En effet, avant qu'un équipement fonctionne, il faut en définir le site futur ; il faut ensuite qu'un protocole soit signé ; il faut que l'infrastructure soit construite ; enfin seulement, l'opérateur pourra y installer ses équipements, puis les mettre en service.

C'est ainsi qu'au 1er novembre 2004, si seulement 5 sites étaient ouverts commercialement, 19 infrastructures étaient mises à disposition d'opérateurs par les collectivités, 37 protocoles départementaux avaient été signés et 511 sites avaient fait l'objet d'un accord entre opérateurs et collectivités territoriales sur leur lieu d'implantation.

C'est l'importance des phases préliminaires à la mise en service des sites qui permet d'expliquer aussi l'ampleur du rythme d'accélération du processus à partir de l'été 2005, sous la pression du Gouvernement, et la confiance actuelle des acteurs du domaine quant à la réalisation finale de l'ensemble de la couverture à la fin 2007. Non seulement les opérateurs se sont alors engagés à tenir ce délai pour la phase II, mais une bonne part des implantations de la phase I entrait alors dans la période de réalisation.

Ainsi, lors de son audition par la Délégation, le 12 octobre 2005, le président de l'ARCEP, M. Paul Champsaur, avait confirmé sans difficulté que, compte tenu notamment de la rapidité de la progression des travaux de la phase II, « l'ensemble du programme devrait donc être achevé à la date prévue, c'est-à-dire la fin de l'année 2007 ».

De fait, depuis, les implantations se poursuivent à un rythme soutenu, et qui devrait s'accélérer encore. Selon le ministère délégué à l'aménagement du territoire, au 30 juin 2006 les opérateurs mobiles avaient mis en service 554 sites, contre 378 à fin 2005, dont 436 sites de la phase 1 et 118 sites de la phase 2. Ces 554 sites permettaient désormais de couvrir près de 883 communes, soit 306 de plus au cours du premier semestre 2006. Pour la phase I, le cap des 25 % est maintenant dépassé.

Le ministère a également exposé que les opérateurs mobiles ont réaffirmé leur engagement d'avoir ouvert 1 000 sites d'ici fin 2006 ; c'est alors environ 1 500 communes, soit la moitié des communes concernées, qui devraient être desservies. Ils ont aussi indiqué que, s'agissant de la phase I, la dynamique de réalisation des infrastructures par les collectivités devrait être compatible avec cet objectif. Les informations recueillies par votre rapporteur, auprès de l'ARCEP notamment, permettent de confirmer ces informations.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE COMMUNES COUVERTES

1er juin 2005

31 décembre 2005

30 juin 2006

Objectif fin 2006

Objectif fin 2007

91

577

883

1 500

3 000

NOMBRE DE SITES OUVERTS AU 30 JUIN 2006
PAR OPÉRATEUR LEADER ET PAR PHASE

 

Phase I

Phase II

Total

Bouygues Telecom

131

5

136

Orange France

157

59

216

SFR

148

54

202

Total

436

118

554

Source : Ministère délégué à l'aménagement du territoire

Enfin, 70 % environ de la couverture se fait en itinérance et 30 % en mutualisation.

Les cartes ci-après présentent les zones blanches dont la couverture est prévue par la convention du 15 juillet 2003 et la réalisation de cette couverture au 30 juin 2006.

TÉLÉPHONIE MOBILE :
OBJECTIF DE COUVERTURE DES ZONES BLANCHES

graphique

ZONES BLANCHES COUVERTES AU 30 JUIN 2006

graphique

Zones en bleu : phase I

Zones en vert : phase II

Source : Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires

Pour autant, la question de la couverture du territoire en téléphonie mobile n'est pas un dossier définitivement clos. Trois difficultés restent à résoudre : les « zones grises », l'attitude de quelques départements et la continuité des communications.

Les « zones grises » sont les parties du territoire qui sont couvertes par seulement un ou deux des trois opérateurs mobiles, mais non par les trois. Bien qu'il n'en existe pas de mesure précise, selon l'ARCEP, elles concerneraient à ce jour 15 % du territoire et 4 % à 4,5 % de la population métropolitaine, soit entre 2,4 et 2,7 millions de personnes, réparties entre 0,9 million desservies seulement par un opérateur, et 1,8 million par deux opérateurs.

Sur ces zones, à l'exception des appels d'urgence, pris en charge quoi qu'il arrive, seuls les clients du ou des opérateurs présents ont accès au service.

Il n'y a pas de plan de résorption des zones grises. En effet, selon le Gouvernement, l'existence de zones grises résulte seulement des différences entre les plans de déploiement des trois opérateurs : tous n'ont pas choisi de se déployer exactement sur les mêmes zones, en fonction de calculs de rentabilité différents, et tous ne se sont pas déployés aussi rapidement. Les zones grises ont donc tendance à se résorber spontanément à mesure que chaque opérateur progresse dans son déploiement. De plus, le plan de couverture des zones blanches constitue une incitation pour les opérateurs à investir dans les zones grises afin d'assurer la continuité de leur service sur le territoire.

On peut néanmoins souhaiter que la résorption des zones grises continue à être suivie de près.

En zone blanche, s'agissant de la phase I, un petit nombre de départements avait décidé de ne pas engager la construction des infrastructures. Ils considéraient qu'ils n'avaient pas à financer des infrastructures qui, ailleurs, dans des départements plus denses, au relief plus facile, et souvent plus riches, ont été financées par les opérateurs. Si le ministre délégué à l'aménagement du territoire considère qu'en moyenne un pylône ne coûte que 40 000 euros à une collectivité, un département rural et montagneux, comme l'Ardèche, qui ne fait du reste pas partie de ce petit nombre, fait valoir, par la voix de son président, qu'« en Ardèche chaque station nous coûte entre 110 000 et 160 000 euros, sans parler de tous les frais supplémentaires, tels que les recrutements. Au total, notre budget s'élèvera à 5,88 millions d'euros, dont 1,9 à notre charge ».

Selon les propos du président de l'ARCEP, lors de son audition, cette problématique concernait alors 70 sites environ.

Il faut cependant noter que, du fait de la concertation instaurée au sein du comité de pilotage de l'accord du 13 juillet 2004 entre le ministère délégué à l'aménagement du territoire, l'ARCEP, les collectivités locales et les opérateurs, la situation se résout peu à peu ; d'abord au nombre de dix, ces départements sont passés à huit puis à six. Dans les cas où rien n'apparaît possible, il semble que c'est avec les communautés de communes que l'État et les opérateurs négocient désormais.

Par ailleurs, dans la détermination des zones à équiper, il revient aussi aux départements de déterminer les axes principaux de circulation et de les faire connaître aux opérateurs, de façon à ce que ceux-ci les équipent, et ce de façon pertinente. Or il semble aussi que certains itinéraires, considérés par tel département comme à grande circulation, ne le soient pas toujours par le département limitrophe ; il y a ainsi rupture de la communication lors du passage d'un département à l'autre.

M. Paul Champsaur l'avait rappelé lors de son audition, « l'ARCEP n'a aucun pouvoir pour intervenir » ni sur l'inaction de certains départements, ni sur leur détermination des caractéristiques des itinéraires.

De l'avis du rapporteur cependant, il appartient à l'État d'assurer la cohérence nationale des choix d'équipement. Sur ce point, il semble que l'ARCEP ait trouvé un outil pour l'amélioration de la situation. Depuis mars 2006 figure dans les licences des opérateurs mobiles l'obligation de publier des cartes des zones de desserte qui font donc apparaître les zones blanches. C'est un instrument précieux pour la résorption des dernières zones de discontinuité.

4. La téléphonie du futur et les besoins de fréquences

On l'a vu, l'achèvement de la couverture mobile du territoire se fait à la norme 2G. Cette norme est tout à fait pertinente pour le transport de la voix. Cependant, on assiste actuellement au développement de la norme 3G ; celle-ci permet le transport, d'un téléphone à l'autre, de l'image. Elle permet donc les visioconférences, ainsi qu'une première version de télévision sur mobile, de point à point, et aussi, bien sûr le transport jusqu'à un portable de fichiers d'images animées. La norme suivante est déjà annoncée, avec la possibilité de recevoir sur mobile la télévision en mode diffusion, où le portable captera les diverses chaînes de télévision ou des programmes à la demande, exactement comme un téléviseur hertzien aujourd'hui. La question est alors que ne se recrée pas une nouvelle fracture numérique.

Une première crainte peut être levée. L'actuel équipement en 2G des zones blanches est compatible avec le développement de la téléphonie mobile 3G. Lors de son audition par la Délégation, le 25 janvier 2006, le directeur général de l'Agence nationale des fréquences, M. François Rancy, a en effet expliqué « qu'aujourd'hui, dans la mesure où la téléphonie 3G n'est pas disponible partout, les terminaux commutent automatiquement vers la bande GSM dans les zones non équipées ; ils fonctionnent alors comme des appareils GSM. » Autrement dit, l'acquis constitué par l'achèvement de la couverture mobile du territoire à la norme 2G, c'est-à-dire pour le transport de la voix, est bien acquis, quels que soient les progrès futurs de la technologie.

En revanche, on peut se poser la question de la recréation d'une fracture numérique entre les territoires pour l'accès à la téléphonie 3G. Lors de son audition par la Délégation, le président de l'ARCEP, M. Paul Champsaur a en effet exposé que « l'équipement du territoire en téléphonie mobile de troisième génération fait quant à lui apparaître d'ores et déjà une difficulté pour les territoires : avec les fréquences qui lui ont été assignées en France, le système UMTS (universal mobile telecommunications system ou système de télécommunications mobiles universel) ne pourra pas couvrir l'ensemble du territoire. Le coût, pour couvrir les territoires peu denses ou accidentés, est trop élevé. »

En effet, plus on monte en fréquence dans le spectre hertzien, plus la bande passante est large, c'est-à-dire plus on fait passer de contenu, mais moins la portée est étendue, autrement dit plus il faut de relais et donc plus le coût de la couverture est élevé. En zone peu dense ou accidentée, et les zones accidentées sont souvent peu denses, le surcoût en relais n'est pas compensé par l'intérêt présenté par l'élargissement de la bande, celle-ci étant évidemment beaucoup moins encombrée qu'en zone dense.

Sur ce point, les bandes à la meilleure portée sont celles du spectre UHF (ultra hautes fréquences), qui est le spectre utilisé par la télévision. La portée des UHF est comprise entre 50 km et 100 km autour d'un émetteur principal, parfois bien plus dans des conditions favorables. La télévision terrestre émet sur des canaux UHF compris entre 470 et 860  mégahertz (MHz).

Au fur et à mesure qu'augmentait le besoin de fréquences, les États ont dégagé ensemble de nouvelles fréquences pour les nouveaux usages. Comme l'a exposé M. François Rancy, en vue du développement du téléphone mobile, la conférence administrative mondiale des radiocommunications de 1979 a ouvert pour cet usage les bandes des 900 MHz ; ce sont celles qui sont aujourd'hui utilisées par le GSM. Ensuite, les responsables des fréquences ont entrepris de préparer l'après-saturation des bandes utilisées par le GSM. La conférence administrative de 1992 a donc identifié à l'échelle mondiale des bandes de fréquences de 2 gigahertz (GHz) pour pouvoir passer à la troisième génération (3G). Le déploiement à grande échelle des réseaux a commencé en 2003-2004. En 2000, en prévision du succès de la troisième génération, on a commencé à rechercher de nouvelles bandes de fréquences ; la bande des 2,5 GHz a été identifiée. Selon M. François Rancy, « on parle maintenant, pour la quatrième génération, de bandes de fréquences situées entre 3 GHz et 6 GHz. »

Autrement dit, les nouveaux usages vont utiliser des fréquences de plus en plus coûteuses à déployer sur l'ensemble du territoire, et notamment dans les zones les plus difficiles.

La difficulté commence donc avec la couverture du territoire en téléphonie 3G, c'est-à-dire avec le passage de l'image et non plus seulement de la voix, puisque le déploiement se fait aujourd'hui sur la bande de 2 GHz. L'équipement en pylônes qui s'achève dans les zones blanches ne permettra pas d'assurer en 2004 une future couverture en 3G de même étendue qu'en 2G. Selon M. François Rancy, « les opérateurs prévoient cependant une saturation de cette bande (de 2GHz) en 2008. Ils ont donc, à cette date, prévu de basculer une partie du trafic 3G dans la bande actuellement réservée au GSM, laquelle va bientôt assurer une couverture totale du territoire. Les licences qui leur seront délivrées par l'ARCEP leur permettront de le faire sans autorisation particulière. » Cependant, pour que cela puisse être fait en zone ex-blanche, encore faut-il que le GSM ne sature pas lui-même la bande. En effet, tant qu'il y aura des appareils GSM, il n'y aura bien sûr pas extinction du GSM. « L'ensemble de ces évolutions ne suppose à aucun moment l'abandon du GSM, a exposé le directeur général de l'ANFR ; celui-ci sera simplement cantonné à une place de plus en plus faible au sein de sa fréquence. »

En tout état de cause, l'évolution future, une fois les bandes GSM saturées, n'apparaît guère rassurante : « dans une troisième étape, à l'horizon 2010, les opérateurs envisagent de recourir aussi à la bande 2,5 GHz. », a encore exposé M. François Rancy. On voit que la bande choisie ne permettra pas de maintenir avec les équipements actuels la même couverture du territoire qu'en GSM.

Dès lors se pose la question de l'affectation aux communications, pour l'aménagement du territoire, d'une partie des fréquences UHF du « dividende numérique » que va générer la remise à plat des fréquences opérée par la 6e conférence régionale des radiocommunications, et le passage à la télévision numérique, qui demande six fois moins de bande par chaîne que la télévision analogique. À partir de 2011, il y aura en France au moins 48 canaux UHF, sans parler des canaux radio.

Lors de son audition par la Délégation, le président de l'ARCEP, M. Paul Champsaur, a ouvert ce dossier. « Pour des raisons historiques, les fréquences les plus performantes pour couvrir dans les meilleures conditions, techniques et économiques, la totalité du territoire, ont été attribuées à la télévision hertzienne. Cependant, la numérisation, c'est-à-dire le passage à la télévision numérique terrestre (TNT), va permettre de diviser par six le besoin de fréquences pour diffuser un nombre constant de chaînes. Avec l'arrêt définitif, en 2012, de la diffusion analogique de la télévision, se posera donc la question de l'affectation des fréquences ainsi libérées : les remploiera-t-on toutes pour diffuser d'autant plus de chaînes, ou en réservera-t-on une petite partie, 10 % environ, à la téléphonie mobile à haut débit ? Certains pays, comme le Japon, ont déjà tranché, en faveur de la téléphonie mobile. En Europe et en France, la question n'a pas encore été abordée. Or, pour des questions de matériels et de frontières, la détermination de nouvelles fréquences pour la téléphonie mobile doit faire l'objet d'un aval de l'Union européenne et d'accords entre États. Si l'on veut s'assurer d'une couverture totale du territoire et d'un accès généralisé des Français à la téléphonie mobile à haut débit, le dossier doit désormais être ouvert. »

Pour votre rapporteur, il y a une sorte d'évidence : l'objectif d'égalité d'accès aux mêmes types de services est un impératif qui s'impose aux pouvoirs publics pour la cohérence territoriale de la Nation. Les technologies, les coûts, ne permettent pas toujours de le satisfaire. Mais que, dans cinq ans, les deux tiers de la France bénéficient de systèmes image et voix interactifs, y compris sur mobile, tandis qu'en montagne, dans des départements entiers, on en sera toujours, sur mobile, à l'appel voix parce que le GSM ne pourra suffire à passer les autres données, n'est pas concevable.

Il faudra, a dit l'un des interlocuteurs de la Délégation, que les opérateurs aient de bons arguments pour convaincre les actuels utilisateurs du spectre UHF de leur céder une part de leurs fréquences. La problématique doit être inversée : pour que la totalité du dividende numérique leur soit laissée, il faudra que les utilisateurs UHF aient des arguments techniques très forts démontrant que les territoires les plus difficiles n'auront pas besoin du spectre UHF pour pouvoir fournir les mêmes services de communication que les autres. Sur ce point, le rapporteur ne peut que se réjouir de l'ouverture manifestée par le ministre délégué à l'industrie, M. François Loos, lors de son audition par la Délégation, puisque pour lui : « l'extinction de la diffusion analogique créera un dividende numérique. Les fréquences disponibles pourraient être utilisées par des télévisions locales. Le téléphone mobile haut débit ou la télévision, mobile ou fixe, haut débit seraient d'autres utilisations possibles. »

B.- L'ACCÈS À L'INTERNET HAUT DÉBIT

1. Un élément structurant

On appelle liaisons à haut débit des liaisons permettant d'échanger des volumes de données importants. Les débits proposés aux entreprises et aux particuliers ne cessant de s'élever, une définition pragmatique du haut débit a progressivement été formulée par les professionnels et les organismes de régulation.

Ainsi, l'ARCEP constate qu'à ce jour les usages principaux des connexions internet sont la consultation de pages web (50 kilooctets [ko] par page), et le téléchargement de fichiers musicaux (4 mégaoctets [Mo], soit 4 000 ko). Une connexion haut débit à 512 Kbit/s permet en théorie de télécharger un fichier musical en une minute, et surtout une page en moins d'une seconde : dans ce dernier cas, on est ainsi, pour un utilisateur, en « temps réel », le chargement ne demandant aucune attente.

La rupture d'usage est alors importante par rapport aux connexions bas débit, dix fois plus lentes, pour lesquelles la simple consultation de pages internet suppose une certaine patience.

Un autre usage important est le téléchargement de films compressés (600 Mo) ; il se fait alors en trois heures, mais en tâche de fond : l'utilisateur n'a pas à surveiller sa progression.

En revanche, il apparaît que l'accroissement du débit de la connexion au-delà de 512 Kbit/s n'introduit guère d'amélioration fonctionnelle. Le gain de confort entre l'ouverture d'une page web en une seconde et un dixième de seconde apparaît relativement marginal pour un utilisateur. De plus, les débits des serveurs ou des réseaux interpersonnels d'échange de fichiers n'arrivent pas, le plus souvent, à exploiter la totalité des capacités offertes par des connexions de cette puissance.

En revanche, les connexions à plus de 5 Mbit/s introduisent, elles, une vraie rupture. Elles permettent en effet la diffusion en temps réel de flux audiovisuels de qualité numérique. Autrement dit, elles permettent de recevoir la télévision par l'ADSL. On voit bien cependant que le service offert change alors de nature : l'enjeu n'est alors plus l'accès aux services offerts par internet mais l'accès par l'ADSL à la télévision, et notamment aux nouvelles chaînes de la TNT.

On entre alors dans un nouveau type de service. Mais c'est aussi un service déjà assuré par ailleurs. Au contraire de la consultation des sites internet, la réception des chaînes de télévision, analogiques ou numériques peut être satisfaite par d'autres moyens qu'internet ou le câble, et plus précisément la diffusion hertzienne terrestre et le satellite.

C'est pourquoi même si aujourd'hui ce sont plutôt des accès de 2 Mbit/s qui sont recherchés, les instances officielles, dont l'ARCEP, considèrent qu'il y a haut débit dès lors qu'il y a accès permanent d'au moins 512 Kbit/s.

Longtemps, les liaisons haut débit n'ont concerné que les centres de recherche et les grandes entreprises. Ces liaisons étaient alors des liaisons spécialisées, et utilisaient des technologies relativement coûteuses.

La nouveauté de la fin des années 1990 a été la possibilité, en passant par les réseaux câblés, d'y faire accéder, à un prix désormais abordable, les moyennes entreprises et les particuliers.

Le développement du haut débit en France a été relativement lent. Le retard de l'équipement en réseaux câblés, la faiblesse du nombre d'abonnés au câble, les Français continuant à recevoir la télévision par voie hertzienne, a entraîné un important retard sur les pays étrangers, y compris nos voisins (Belgique, Pays-Bas, Allemagne), solidement équipés en réseaux câblés.

La situation n'a changé qu'à partir du développement des technologies du DSL (digital subscriber line, ou ligne numérique dédiée) qui permettent de faire passer le haut débit par le fil du téléphone, et pour être plus précis, la paire téléphonique en cuivre. La France disposait en effet d'un outil remarquable, le réseau téléphonique de France Télécom. Ce réseau est très dense, plus tardif que ceux des autres pays industrialisés, et aussi, logique contrepartie, plus moderne et d'excellente qualité.

Pour autant, en 2000, la France ne comptait que quelques dizaines de milliers d'abonnés. Elle était alors toujours nettement en retard sur les autres pays européens pour l'accès au haut débit.

Il est apparu que cette situation s'expliquait essentiellement par un déficit de concurrence : alors que la boucle locale en cuivre, c'est-à-dire la paire téléphonique, était le seul vecteur du haut débit en France, France Télécom était le seul acteur à y avoir accès. Dès lors, cette société avait une politique de gestion très confortable pour elle de ses tarifs et des services proposés.

Pendant ce temps, à l'étranger, le haut débit devenait un équipement d'organisation de la société. Il devenait notamment le mode normal de transmission de données entre entreprises, entre maisons mères et filiales, sièges sociaux et usines, donneurs d'ordres et sous-traitants.

L'équipement en France concernant alors seulement les zones les plus denses, on pouvait véritablement craindre la constitution d'une fracture numérique entre les territoires, laquelle ferait courir un grand risque de désertification des territoires non équipés. Non seulement ces territoires, traditionnellement plus difficiles, se voyaient ainsi affligés d'un handicap supplémentaire, qui les rendait moins attractifs, mais ils devenaient même dangereux pour leurs entreprises, celles-ci ne pouvant plus s'insérer dans les systèmes de communication de l'économie moderne : des risques de délocalisation massifs de l'activité économique étaient ainsi encourus par les territoires non équipés.

La situation avait alors suscité une forte mobilisation des forces vives et des élus de ces territoires. La Délégation y avait apporté sa contribution, avec le rapport d'information qu'elle avait confié à M. Nicolas Forissier, et publié en décembre 2002 sous le numéro 443.

Pour parer à ce risque, il fallait donc faire progresser le haut débit. Pour cela, eu égard à la politique de l'opérateur unique, il fallait ouvrir la possibilité à d'autres opérateurs de le proposer par l'ADSL.

2. Un rattrapage très rapide

La clé de l'ouverture à la concurrence était ce qu'on appelle le dégroupage de la boucle locale. Le dégroupage est l'ouverture à la concurrence du marché de gros. Il permet aux opérateurs alternatifs d'installer leurs équipements actifs dans les locaux de France Télécom, à l'extrémité de la paire de cuivre téléphonique, et donc de s'en rendre indépendants, qu'il s'agisse de technique ou de prix. Courant 2002, l'Autorité de régulation des télécommunications a modifié les conditions techniques et tarifaires du dégroupage. Cette décision a permis l'essor de la concurrence.

Le résultat a été à la mesure des attentes : entre la mi-2002 et la mi-2004, dans les zones où les opérateurs alternatifs pouvaient dégrouper la boucle locale, les tarifs ont été divisés par deux, voire par trois. En même temps, les opérateurs ont aussi montré une capacité impressionnante à développer des stratégies efficaces et novatrices, y compris sur le plan technologique. La France s'est brusquement trouvée en avance pour les services offerts, avec la téléphonie sur large bande ou encore la télévision par ADSL, et le développement d'un standard de fait, le triple play, c'est-à-dire la combinaison de l'accès à l'internet haut débit et de ces deux services nouveaux. Du reste, aujourd'hui, ce dynamisme ne se dément pas : des offres de visiophonie ont déjà été formulées.

Il faut croire aussi que l'attente était grande. Dans le même temps, le nombre d'abonnés au haut débit est passé de 700 000 à près de 5 millions ; à la mi-2006, il était de plus de 11 millions, dont 10,5 millions d'abonnements ADSL et 630 000 abonnements par le câble. Là aussi, cette évolution dynamique se poursuit puisqu'on continue à assister à une transformation massive des abonnements au bas débit en abonnements au haut débit, ce qui est aussi le signe d'une progression de l'équipement des Français en ordinateurs.

En France, le taux de pénétration du haut débit est maintenant supérieur à la moyenne européenne, à celui de l'Allemagne, du Royaume-Uni, de l'Espagne et de l'Italie. Les prix du marché sont parmi les plus bas d'Europe. Autre spécificité française, l'ADSL représente environ 95 % des accès.

La concurrence n'est cependant pas présente sur l'ensemble des territoires. Elle se développe en effet à partir des zones les plus denses. Selon l'ARCEP, fin 2005, elle concernait 50 % de la population environ. Dans ces zones dégroupées, elle s'exerce à la fois sur les prix et sur la qualité de l'offre, c'est-à-dire sur le débit proposé : la télévision par ADSL, par exemple, nécessite un débit de cinq mégabits par seconde. Le développement de la concurrence a cependant aussi des conséquences sur les prix en zone non dégroupée : les tarifs à destination des particuliers de France Télécom, opérateur national, sont établis pour l'ensemble du territoire. Les habitants des zones non dégroupées profitent ainsi de tarifs calculés pour affronter la concurrence en zone dégroupée. En revanche, en zone non dégroupée, la concurrence n'a pas d'influence sur l'offre de services, c'est-à-dire sur la technologie et le débit offerts.

Par ailleurs, l'extension indéfinie de la concurrence n'est pas un fait acquis : lors de son audition, M. Paul Champsaur avait exposé que « les données actuelles de structure et d'équilibre du marché, y compris du marché de gros, permettaient sans doute une extension du dégroupage à 60 % des abonnés environ, contre 50 % aujourd'hui. » Il est vrai que le succès de l'attribution des licences WiMax, qui sera évoquée plus loin, n'était pas encore pris en compte.

Pour développer la concurrence au-delà de 60 % d'abonnés, et donc diffuser de meilleures offres à de meilleurs tarifs, le président de l'ARCEP plaidait pour une action en ce sens des collectivités locales : « l'action des collectivités locales peut permettre d'accroître le dégroupage au-delà de la limite de 60 %. Dans l'hypothèse d'une généralisation de cette action sur le modèle des meilleurs projets actuels, les 75 % pourraient être atteints. »

Il faut aussi noter que, selon le régulateur, la concurrence pour les services aux entreprises est plus difficile à développer que pour les services aux particuliers. Comme l'a exposé Mme Gabrielle Gauthey, membre de l'ARCEP, lors de l'audition du 12 octobre 2005, « elle est d'abord beaucoup plus concentrée : les opérateurs sont moins nombreux. Ensuite, nombre d'entreprises peuvent présenter des conditions de localisation, à l'écart de la ville, loin du répartiteur, qui n'incitent pas forcément la concurrence à venir opérer. La position de l'opérateur historique est ainsi plus dominante dans le service aux entreprises que dans le service aux particuliers ». Or, des études ont montré que l'absence de concurrence entraîne des surcoûts qui, à l'extrême, peuvent aller jusqu'à 40 %. Et Mme Gabrielle Gauthey d'ajouter : « il y a donc là un champ d'action important pour les collectivités locales. Certaines d'entre elles ont du reste commencé à s'y intéresser. »

Un deuxième élément est justement l'engagement en faveur de l'équipement en haut débit des collectivités locales.

L'inertie de France Télécom devant le développement international du haut débit n'a pas suscité l'inquiétude du seul régulateur. Les territoires autres que les plus denses se sont rapidement inquiétés du sort que leur réservait cette politique. Au premier rang des protestataires, il y eut bien sûr les entreprises, usines, filiales, ou encore PME sous-traitantes de grands groupes. Devant les modernisations techniques des modes de transmission de données et de communication, elles se sont enquises des conditions de mise à disposition de ces services dans les territoires où elles étaient situées. L'absence de perspective ou de calendrier les a alors amenées à en tirer les conséquences devant les pouvoirs publics locaux : faute de disposer de ce qui devenait un moyen de travailler, elles devraient mettre la clé sous la porte ou délocaliser.

Les collectivités locales ont alors cherché un moyen de pallier la carence de France Télécom. Après bien des difficultés et des obstacles, elles réussirent, en 2003, à obtenir du Gouvernement qu'il insère, dans ce qui allait devenir la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, un article leur permettant enfin d'intervenir pour faire sauter ce qui s'apparentait de plus en plus à un véritable « verrou numérique » et asseoir légalement leurs projets pour offrir le haut débit à leurs entreprises et à leurs habitants.

L'article 1425-1 du code général des collectivités territoriales, qui est reproduit en annexe du présent rapport, les autorise désormais à acheter, établir et exploiter sur leur territoire des infrastructures et des réseaux de communications électroniques, et à les mettre à disposition d'opérateurs ou d'utilisateurs indépendants. Au cas où les conditions économiques ne permettraient pas la rentabilité de l'équipement ou de l'exploitation, la loi les autorise aussi à mettre ces infrastructures ou réseaux à disposition des opérateurs à un prix inférieur au coût de revient. En cas d'insuffisance d'initiatives privées d'opérateurs, elle les autorise à fournir elles-mêmes des services de communications électroniques ou à compenser des obligations de service public par des subventions, accordées dans le cadre d'une délégation de service public ou d'un marché public. Enfin, les interventions des collectivités doivent s'effectuer dans des conditions objectives, transparentes, proportionnées et respecter le principe d'égalité et de libre concurrence. À ces fins, elles sont soumises au contrôle de l'ARCEP.

L'intervention des collectivités ne s'est pas faite sans tâtonnements. Comme l'ont fait remarquer plusieurs membres de la Délégation lors des auditions, elles n'étaient pas placées dans une situation optimale. Le plus souvent, les collectivités locales ne disposent pas de la capacité humaine d'ingénierie nécessaire, pour choisir entre les diverses technologies disponibles et les solutions à adopter pour le montage des projets. Ensuite, chaque territoire fait l'objet à la fois d'une politique régionale, d'une politique départementale et d'une politique de chaque collectivité communale. Lorsque ni la région ni le département n'ont souhaité se saisir du dossier, comment construire une cohérence sur un territoire ? Inversement, des cas ont été cités où le réseau construit par le département doublonne celui financé par la commune.

Pour répondre à ces préoccupations, l'ARCEP a créé un service collectivités et régulation des marchés haut débit. Ce service a un rôle d'expertise et de conseil aux collectivités locales. À cette fin, il a créé une organisation à la disposition des collectivités locales, le Comité des réseaux d'initiative publique (CRIP). Le CRIP est composé de deux groupes de travail, l'un ouvert exclusivement aux collectivités locales, l'autre composé de collectivités locales et d'opérateurs ; ces groupes se réunissent tous les deux mois. Selon les propos de M. Paul Champsaur pendant son audition, « l'objet de ce mécanisme, qui fonctionne, est de permettre aux collectivités locales d'échanger sur leurs expériences, d'exposer leurs projets, de présenter leurs difficultés et de rechercher des solutions ». Toujours selon l'ARCEP, les échanges entre collectivités dans le cadre du CRIP ont fait progressivement apparaître des points de repère pour le choix d'un dispositif et le montage des projets ; les collectivités sont désormais sorties de l'inconnu. L'ARCEP publie régulièrement les travaux de ces groupes de travail, notamment sur son site (arcep.fr).

L'expérience fait en effet apparaître aujourd'hui un certain nombre de constantes. D'abord, plus le territoire sur lequel la cohérence est organisée est grand, plus on peut envisager des durées de subventionnement brèves. Ensuite, cette cohérence peut être assurée a posteriori, par la mise en relation de plusieurs réalisations. Ainsi, certains départements ont développé des projets globaux, laissant très peu de zones non couvertes, et les ont articulés avec ceux de leurs principales métropoles ; la cohérence est plus grande que lorsque celles-ci sont contournées. Réciproquement, une collectivité isolée pourra toujours mieux trouver ses solutions en s'insérant dans un cadre général. Enfin, selon les politiques mises en œuvre, les évolutions possibles sont différentes : le dégroupage, et donc la concurrence, s'étendant plus vite dans les territoires qui ont construit des réseaux que dans ceux qui se contentent de subventionner un opérateur.

Il s'avère aussi que le cœur de la difficulté est bien de construire une cohérence dans la durée, et ce à partir de technologies en évolution permanente. Mme Gabrielle Gauthey a formulé devant la Délégation une méthodologie pour tenter de la surmonter. « La démarche de construction d'un dispositif peut cependant s'engager par une réflexion sur les lacunes des territoires non desservis, a-t-elle exposé. On s'aperçoit alors que la principale lacune concerne la collecte elle-même. Or, si la collecte passe par des technologies, elle n'est pas elle-même une notion technologique. La détermination de son périmètre et de ses capacités précède le choix des technologies. Le point de départ d'une action des collectivités locales peut donc être de construire plus d'offre de collecte sur le territoire. Ensuite seulement se posent les autres choix. On s'aperçoit par exemple que construire des boucles locales est toujours plus facile quand on a construit préalablement un système de collecte. »

Un tel réseau de collecte a été présenté lors de la même réunion par Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, députée de la Haute-Vienne, celui construit en région Limousin : « dans l'objectif d'une desserte maximum du territoire et de coûts de service aussi bas que possibles, l'ensemble des collectivités locales, alliées dans un organisme ad hoc, dénommé Dorsal, ont préféré sélectionner un opérateur chargé de construire, d'entretenir et d'exploiter un réseau intégré (fait de fibres optiques, de liaisons hertziennes, d'utilisation moyennant redevance d'installations du réseau téléphonique), à charge pour lui de traiter avec les fournisseurs de services, dont France Télécom, que de s'en remettre à l'opérateur historique. »

En tout état de cause, selon l'ARCEP, depuis, 2003, les projets de réseaux d'initiative publique représentent un investissement de l'ordre de 1 milliard d'euros, une fois inclus les subventions des fonds européens (Feder) ou de l'État, notamment celles du Fonds national de soutien au déploiement du haut débit. Les trois quarts des nouveaux centraux équipés en haut débit par les nouveaux opérateurs en 2005 sont directement liés à des initiatives publiques locales. Le réseau ainsi construit approche aujourd'hui les 18 000 kilomètres.

L'accès au haut débit du consommateur est conditionné à l'équipement à cette fin du central téléphonique, dit aussi répartiteur, dont il dépend. Le répartiteur téléphonique doit préalablement être équipé en haut débit, avec, d'une part, l'installation d'équipements de transmission sur la paire de cuivre et, d'autre part, le raccordement du central lui-même à l'internet mondial.

Pensant que la demande serait limitée, France Télécom avait d'abord envisagé de n'équiper pour le haut débit qu'une fraction de ses répartiteurs, ceux situés dans les zones les plus denses, et où l'équipement pouvait être rentabilisé même avec une faible proportion de clients haut débit.

Devant le succès de ces opérateurs, France Télécom a changé radicalement d'approche et a annoncé en 2004 l'équipement en haut débit de l'ensemble des 12 000 centraux téléphoniques qui assurent le maillage téléphonique de la France.

Cette décision avait trois motifs. Le premier était que la ruée observée sur les abonnements haut débit faisait apparaître une demande future massive, qui rendait indiscutablement rentable l'équipement non seulement des centraux les plus importants, mais aussi des petits centraux.

Ensuite, France Télécom pouvait ainsi développer une offre dans des zones où elle pouvait espérer que les opérateurs alternatifs ne viendraient pas la concurrencer. Déployer un réseau local haut débit suppose, à partir du répartiteur de France Télécom, de passer des câbles et d'installer des sous-répartiteurs. Dans cette affaire, les coûts les plus élevés sont les coûts de travaux publics, bâtiments et tranchées. Ces coûts sont d'autant plus élevés que le territoire considéré est peu dense : dans ce cas, les distances s'allongent tandis que le nombre d'utilisateurs desservis diminue. Or, la densité du réseau de France Télécom fait que, partout en France, France Télécom a déjà construit les bâtiments et les tranchées ; leur équipement en haut débit pouvait donc se faire pour une fraction seulement du coût d'un déploiement complet, lui donnant un avantage certain sur la concurrence.

Troisième élément, la couverture complète en haut débit du territoire par France Télécom pouvait amener certaines collectivités locales à renoncer à lancer des projets alternatifs.

À partir de 2004, France Télécom se mit donc à équiper ses répartiteurs au rythme quasiment constant d'environ 1 000 répartiteurs par trimestre.

Le diagramme ci-après, qui indique la proportion de répartiteurs équipés par France Télécom sur les 12 000 existants, fait bien apparaître également le point d'inflexion du changement de stratégie. Selon l'ARCEP, conformément à ce qu'avait annoncé l'opérateur historique, il est probable que l'intégralité des répartiteurs français sera équipée en haut débit avant la fin de l'année 2006.

Ce taux vaudra sans doute aussi pour les entreprises. Dans le cadre de cette même stratégie, France Télécom a lancé en 2004 un programme particulier de transformation en centraux répartiteurs des sous-répartiteurs qui desservent les zones d'activité, et d'équipement de ces nouveaux répartiteurs pour le haut débit.

En effet, nombre d'entreprises sont installées dans des zones industrielles spécialement construites à l'écart des centres-villes pour les héberger, et de ce fait éloignées des répartiteurs. Du fait des limites de rayonnement de l'ADSL à partir du répartiteur, point sur lequel on reviendra, l'équipement du répartiteur ne permettait pas de faire venir le haut débit jusqu'à la zone industrielle, et des solutions spécifiques, aussi originales que coûteuses (location d'une liaison satellite, par exemple), devaient être mises en œuvre. Selon le président de l'ARCEP, c'est au moins une dizaine de zones d'activités par département qui étaient concernées.

La transformation des sous-répartiteurs en répartiteurs a permis également à France Télécom, en développant des offres spécifiques pour les PME (Business internet office, par exemple) de se garantir une clientèle, la localisation parfois difficile des zones ou des entreprises rendant alors hasardeuse la formulation d'une offre concurrente.

3. Comment achever la couverture en haut débit ?

Lors de son audition, le 12 octobre 2005, M. Paul Champsaur estimait que, du fait de l'ensemble des évolutions ci-dessus relatées, « à la fin 2006, seuls n'auront pas accès à l'ADSL les habitations situées trop loin du répartiteur, c'est-à-dire à plus de 5 kilomètres de celui-ci environ ». Avec l'achèvement de l'équipement des 12 000 centraux téléphoniques, cela représente, selon l'ARCEP, 2 % de la population, 98 % de la population ayant accès au haut débit.

Au bout du compte, selon le président de l'ARCEP, en 2006, la situation est « proche de celle de la téléphonie mobile en 2003, avec deux différences toutefois : d'une part, la localisation des implantations non reliées est très diffuse ; de l'autre, leur situation est due à une limite technologique, qu'il paraît peu vraisemblable de voir surmontée dans les prochaines années. »

La technologie ADSL a en effet une limite. La paire de cuivre ne doit pas être trop longue : au-delà d'une certaine distance, le signal s'affaiblit brutalement, le haut débit devient moyen débit, puis, il n'y a plus de débit du tout. Il y a encore deux ans, cette distance était de l'ordre de 3 à 4 kilomètres. Depuis, l'ADSL a connu une évolution, dénommée ReADSL. Avec cette évolution, la distance a pu être portée aujourd'hui à 5 kilomètres. Or, ces 2 % représentent en fait plusieurs milliers de communes rurales, voire de hameaux, situés trop loin des répartiteurs. La carte page suivante présente, pour la région Provence-Côte d'Azur, la situation de la couverture par l'ADSL à la mi-2005.

Comment résorber ces zones ? La difficulté est celle des coûts. Compte tenu de l'état de la technologie dite « filaire », il faudrait équiper chaque commune, voire chaque hameau d'un répartiteur : le coût est disproportionné. Pour ces raisons, on s'est tourné vers des technologies hertziennes.

Les technologies hertziennes demandent beaucoup moins d'investissement matériel pour desservir des zones lointaines ou des maisons isolées. Avec elles, il devient possible de développer des solutions de coût proportionné.

La technologie WiFi a été la première à être déployée en milieu rural pour répondre aux besoins économiques et politiques de connexion haut débit. La technologie WiFi, qui utilise la bande hertzienne des 2,4 GHz, est une technologie très locale ; sa portée est cantonnée tout au plus à quelques centaines de mètres. Lorsque le WiFi est utilisé là où l'ADSL ne peut pas aller, l'ordinateur est connecté à internet non pas par le téléphone, mais par une antenne radio. À ce jour, selon l'ARCEP, quelques centaines de communes sont couvertes en haut débit par l'intermédiaire de cette technologie, soit environ 10 % des communes non couvertes en DSL.

Mais c'est avec l'apparition d'une évolution du WiFi, le WiMax, que le recours à la voie hertzienne a récemment connu un nouvel élan. Fonctionnant selon le même principe que le WiFi, mais sur la bande des 3,5 GHz et surtout avec des antennes directionnelles, le WiMax permet de desservir en haut débit des abonnés dans un rayon non plus d'une centaine de mètres mais jusqu'à 25 kilomètres. Les opérateurs envisagent dans un premier temps des réseaux offrant dans les deux sens des débits de l'ordre de 10 Gbits/s, et même beaucoup plus, autrement dit du très haut débit.

L'ADSL EN RÉGION PROVENCE-ALPES-CÔTE D'AZUR

graphique

Zones blanches ( éloignement du répartiteur supérieur à 5 km ) : pas de DSL

Zones beige( éloignement du répartiteur supérieur à 3,5 km ) : - ADSL inférieur à 1 Mb/s

- pas de SDSL

Source : HDRR

Contrairement aux bandes WiFi cependant, qui du fait de leur faible portée sont d'usage libre, les bandes du spectre destinées au WiMax font l'objet d'une régulation par l'ARCEP : ce sont en fait les fréquences dites de la boucle radio locale (BLR), aujourd'hui largement sous-utilisées.

L'ARCEP a donc organisé entre mi-2005 et mi-2006 une procédure d'attribution des fréquences BLR, désormais plus connues sous le nom de fréquences WiMax. Deux fréquences par région ont été proposées aux acteurs, sachant qu'un opérateur dispose déjà d'une couverture quasi nationale. Les principaux critères d'attribution étaient la contribution au développement territorial du projet, son aptitude à favoriser la concurrence, et le volume d'investissements financiers proposé par le candidat.

La procédure suscita au final 35 candidatures fermes. Les candidats semblent avoir suivi deux types d'objectifs, amener le haut débit là où le DSL ne pouvait pas l'amener, cela valant notamment pour les collectivités locales, et concurrencer, aujourd'hui ou plus tard, les réseaux haut débit des opérateurs ADSL.

Les licences ont été attribuées à l'été 2006, à quatre opérateurs privés et à six conseils régionaux. Les attributaires se sont engagés à ouvrir 3 500 sites d'émission avant mi-2008, ce qui est considérable et à formuler dans chaque région deux offres de gros à l'usage des autres opérateurs.

Selon l'ARCEP, en termes de couverture, les engagements pris par les acteurs devraient permettre de résorber la moitié des zones blanches résiduelles. S'agissant de la concurrence, deux nouvelles fréquences WiMax pourraient encore être attribuées dans les prochaines années.

La carte ci-dessous montre le potentiel de couverture du WiMax (plus exactement 90 % de l'objectif retenu par l'opérateur, en l'occurrence HDRR) en région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

graphique

Zones en vert : couverture maximale possible par le réseau WiMax à partir du parc de sites TDF

Source : HDRR

Avec le WiMax ainsi déployé, c'est 99 % des ménages qui seront désormais couverts en haut débit. Par ailleurs, ce déploiement signifie aussi le développement d'offres concurrentielles, y compris pour les entreprises, sur des territoires desservis par l'ADSL mais sur lesquels il n'y avait jusqu'ici qu'une seule offre, et donc une amélioration potentielle, en prix et en services, de la prestation offerte aux abonnés. C'est en particulier l'accès au très haut débit symétrique pour les entreprises situées à plus de 3,5 kilomètres du répartiteur, et donc la résorption, avant même qu'elle ne se matérialise trop clairement, d'une éventuelle fracture numérique du très haut débit, qui serait pénalisante pour les territoires en termes d'implantation des entreprises. C'est du reste bien ce dernier point qui explique la rapidité des plans de déploiement des opérateurs, dont certains, comme HDRR, filiale à 70 % de TDF et 20 % de la Caisse des dépôts, disposent déjà des pylônes nécessaires.

La France devient ainsi, si elle ne l'est pas déjà, l'un des pays du monde les mieux équipés en accès à l'internet haut débit.

Reste alors le dernier 1 %. De l'avis de l'ARCEP, il semble insoluble sans mécanismes de financement mutualisé ou public.

Quelles solutions développer ? Il est clair que le mécanisme du service universel, où un opérateur est subventionné par les autres, est un pis-aller. L'évolution du coût du service universel est du reste en très forte baisse, passant de 125 millions d'euros en 2002 à 33,3 millions d'euros en 2004, baisse qui devrait se poursuivre. Le modèle de la téléphonie mobile paraît quant à lui difficilement transposable. Les « trous » dans la couverture mobile ont en effet des conséquences pour les abonnés des opérateurs eux-mêmes : là où la couverture n'est pas assurée, la conversation de l'abonné mobile est coupée. Par ailleurs, il n'y a que trois opérateurs, dont chacun couvre l'ensemble du territoire national. Le partage de la charge entre les opérateurs était pleinement justifié. Grâce à cette solution, chaque opérateur a pu bénéficier d'une couverture complète en finançant moins du quart, compte tenu de la forte participation des départements pour la phase I, des investissements nécessaires.

En revanche, pour un opérateur haut débit, ne pas desservir 1 % de la population n'a aucune conséquence tangible pour la quasi-totalité de ses abonnés. Une mutualisation entre chacun des deux attributaires de fréquences pour chaque région serait possible. Encore faudrait-il qu'une occasion permette de la mettre en place : on sait que la phase II de la résorption des zones blanches de la téléphonie mobile a été concomitante au renouvellement des licences de deux des trois opérateurs. Cette solution pourrait aussi se voir opposer le caractère régional et non national des attributions de fréquences. Il y a des régions où les zones blanches sont plus étendues et plus difficiles à résorber qu'ailleurs. Les soumissionnaires qui auraient remporté ces marchés se verraient soumis à des contraintes supplémentaires sans commune mesure avec celles des opérateurs de régions moins difficiles.

Interrogés par l'ARCEP, les nouveaux opérateurs WiMax font tous valoir que la résorption des zones blanches fait partie de leurs priorités. C'est en effet là que, pour eux, est le marché. Ils exposent aussi qu'ils n'arriveront pas à en résorber la totalité. Ils exposent enfin qu'ils vont travailler avec les collectivités locales... Le décor est planté.

Il ne faut cependant pas que les choses dérapent. L'ARCEP a décidé, sur la question de la résorption des zones blanches, d'épauler à travers le CRIP les collectivités dans cette action.

Elle travaille aussi, en association avec la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, à la mise en place, début 2007, d'un observatoire public des zones blanches du haut débit.

Cet observatoire pourrait travailler à partir de la publication par les opérateurs WiMax de leur couverture des zones blanches. Pour des raisons d'égalité et de transparence, cette publication pourrait être rendue obligatoire. Un décret en ce sens est en préparation. Les résultats ainsi obtenus pourraient ensuite être publiés sur les sites internet de la DIACT, ou sur celui de l'Observatoire des territoires (www.territoires.gouv.fr), ou encore de l'ARCEP (www.arcep.fr).

On pourrait ainsi disposer, à partir de 2008, de la carte des zones non couvertes par le marché. Dès lors, il faudrait chiffrer le coût de l'achèvement de la couverture. Une couverture de l'ensemble des communes paraît en effet d'autant plus légitime qu'il ne s'agit pas de couvrir des territoires vides d'habitants, comme ce peut être le cas des zones blanches de la téléphonie mobile, mais bien de faire accéder chaque Français au haut débit. Le chiffrage fait, le plan d'équipement final, incluant la répartition de son financement et la propriété des équipements pourrait être élaboré en collaboration entre l'État, les collectivités locales et les opérateurs. Il serait légitime que le Fonds national de soutien au déploiement du haut débit, ainsi que le plan de subventionnement de 10 millions d'euros annoncé par l'État en juillet pour les petites communes laissées à l'écart de l'internet haut débit en 2007 puissent aussi intervenir. Sur ce point, l'objectif du Gouvernement de faire venir l'internet haut débit dans au moins deux points publics (la mairie et un autre) de chaque commune paraît à la Délégation un objectif minimal : la technologie WiMax doit permettre de faire mieux et la couverture du plus grand nombre d'habitations possibles doit être recherchée.

II.- UN NOUVEL ENJEU POUR LES TERRITOIRES : L'ACCÈS À LA TÉLÉVISION NUMÉRIQUE TERRESTRE ET AUX SERVICES NUMÉRIQUES DU FUTUR

A.- LA TNT, UN NOUVEAU SERVICE POUR LES TÉLÉSPECTATEURS

1. Qu'est-ce que la TNT ?

L'expression « télévision numérique de terre » désigne une technologie qui permet de diffuser un signal numérisé par voie hertzienne.

La révolution introduite par la TNT est que, outre les qualités d'image et de son reconnues au numérique, elle permet la multiplication du nombre de chaînes de télévision émises par voie hertzienne terrestre. Alors qu'en mode analogique six chaînes au plus peuvent être diffusées (ce sont les six chaînes nationales, qui ne sont du reste pas reçues partout), un canal qui transportait jusqu'à aujourd'hui une chaîne analogique peut en véhiculer cinq ou six en mode numérique, et plus encore dans l'avenir. La TNT permet ainsi dès aujourd'hui de recevoir 18 chaînes de télévision gratuites et 11 chaînes payantes, c'est-à-dire accessibles par abonnement.

Le deuxième atout de la TNT, c'est que pour y accéder, le téléspectateur n'a pas à modifier ses habitudes ni ses équipements. La TNT passe par l'antenne de toit. Pour la recevoir, il suffit d'acheter ou de louer un adaptateur numérique et de le relier à son téléviseur. C'est d'une très grande simplicité. Plusieurs modèles de décodeurs sont en vente actuellement dans les magasins spécialisés et dans les grandes surfaces, à partir de 50 euros environ. Il existe également sur le marché de plus en plus de téléviseurs avec adaptateur numérique intégré.

Comme M. Dominique Baudis, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, l'a exposé devant la Délégation, le déploiement de la TNT représente un intérêt majeur pour la société. Le public qui reçoit la télévision par voie hertzienne représente en effet entre les deux tiers et les trois quarts des téléspectateurs ; le public qui reçoit la télévision par l'ADSL, le câble ou le satellite ne représente que le quart restant. La TNT permet de porter le choix de programmes offert à la grande majorité des Français, sans qu'ils n'aient rien ou presque à changer à leurs habitudes, de 5 à 17 (2) pour les programmes gratuits et de 1 à 11 pour les programmes payants.

Le nombre de 17 chaînes gratuites n'est du reste pas contraint par la technique. Il résulte de deux facteurs. Le premier, exposé par M. Dominique Baudis à la Délégation, est que les études commandées par le CSA en vue du lancement de la TNT ont montré que le marché publicitaire permettrait difficilement d'assurer la vie de plus de 20 chaînes gratuites sans créer d'importants déséquilibres. Le second est que l'État avait projeté la création de cinq chaînes gratuites supplémentaires ; au lieu de quoi il n'a utilisé que deux canaux de plus, l'un pour permettre la diffusion d'une nouvelle chaîne, France 4, l'autre pour permettre à France 5 de ne plus partager son canal avec Arte, et donc d'accroître librement sa durée de diffusion. En l'état actuel des choses, il reste encore trois canaux exploitables pour des chaînes gratuites.

Toujours selon M. Dominique Baudis, dans l'immédiat, devraient s'ajouter aux actuelles chaînes de la TNT les chaînes locales, qui aujourd'hui sont encore diffusées par le réseau de diffusion analogique. Dans chaque région, une chaîne gratuite de plus devrait ainsi s'ajouter aux chaînes actuelles.

Par ailleurs, la TNT offre aussi des capacités qui l'éloignent de la télévision traditionnelle, dont celle de pouvoir transporter des informations numériques de natures diverses : images et sons mais aussi textes et données. Cela ouvre à la télévision numérique hertzienne les mêmes perspectives de services interactifs que ceux qui sont actuellement présents sur le câble et sur le satellite.

2. Une stratégie de déploiement ambitieuse et rapide.

C'est la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 qui a introduit dans la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication les dispositions juridiques nécessaires au déploiement de la télévision numérique de terre. Cette loi a confié au CSA la mission de répartir les autorisations d'usage de la ressource radioélectrique entre les éditeurs, publics ou privés, de la TNT.

Le mode de déploiement retenu a été celui d'un déploiement parallèle au maintien de la télévision analogique. Compte tenu du poids en France de la diffusion hertzienne par rapport aux autres modes de diffusion (câble, ADSL), il était inenvisageable de procéder par basculement brutal. De toute façon, le nombre d'adaptateurs actuellement disponibles sur le marché ne le permettrait pas.

L'idée a donc été d'offrir les chaînes de la TNT en parallèle à la télévision analogique, et de laisser les Français soit s'équiper progressivement en adaptateurs, soit bénéficier d'un adaptateur intégré lors du renouvellement de leur téléviseur. Après quelques années de cohabitation du numérique et de l'analogique, l'extinction progressive de l'analogique pourra être organisée. On sait que l'extinction définitive est aujourd'hui prévue pour le 30 novembre 2011.

Sur ces bases, le CSA a donc entrepris la planification du spectre de façon à permettre le déploiement de la télévision numérique terrestre, sans pour autant perturber la diffusion des services de télévision en mode analogique. Aux chaînes analogiques existantes, on a donc ajouté cinq multiplex numériques, soit au total 25 canaux disponibles pour autant de programmes.

Dans les zones où la TNT est déployée, les Français qui souhaitent accéder aux chaînes de la TNT achètent un adaptateur ou un nouveau téléviseur équipé. Ils y retrouvent alors les six chaînes analogiques, qu'ils reçoivent désormais en numérique, et les chaînes nouvelles, les 12 gratuites et les 11 payantes.

Par ailleurs, le déploiement de la TNT a été organisé de façon progressive. L'actuelle diffusion hertzienne de la télévision est faite par le moyen de 3500 émetteurs qui couvrent l'ensemble du territoire national. Cependant, ces émetteurs sont de dimensions extrêmement différentes. À côté de la Tour Eiffel, qui couvre l'ensemble de l'agglomération parisienne et même au-delà, on compte, en montagne notamment, de tout petits relais qui couvrent une vallée et ses quelques centaines d'habitants.

Une première phase a prévu l'équipement de 85 % de la population en deux ans, de mars 2005 à mars 2007, au moyen de 115 émetteurs. Ceux-ci sont choisis soit pour l'étendue de leur couverture, soit pour la population, au moins 50 000 habitants, qu'ils desservent. Il s'agissait ainsi d'installer rapidement la TNT dans le paysage audiovisuel français, en minimisant les coûts de ce qui s'annonçait comme un bouleversement : 18 chaînes gratuites au lieu de 6. Cette phase comporte cinq étapes. Les quatre premières se sont déroulées selon le planning prévu. Le 31 mars 2005, 17 premiers sites ont été ouverts, couvrant 35 % de la population. En septembre 2005, 15 sites supplémentaires ont été ouverts, portant la couverture de la population à 50 %. En juin 2006, troisième étape, 19 sites ont été ouverts, faisant passer la couverture à près de 60 % de la population. Enfin, l'automne 2006 a vu l'ouverture de 24 sites supplémentaires, portant la population desservie à 65 %.

L'accueil fait au déploiement est un succès. Certes, le taux d'équipement des Français suit avec retard la progression de la couverture : selon une récente enquête Médiamétrie publiée le 9 novembre dernier, 9,7 % des Français sont équipés d'un adaptateur ; la proportion est de 20 % en zone desservie par la TNT. Cette proportion est du reste plus forte qu'il n'y paraît : les premières zones de déploiement de la TNT sont aussi celles où la présence du câble ou de la diffusion par ADSL est la plus forte, et où les abonnés à ces modes de diffusion reçoivent déjà par ces canaux les chaînes de la TNT. En tout état de cause, et sur le plan national cette fois, ajoutés aux abonnés au câble ou à la télévision par ADSL, ces 9,7 % font reculer en deçà des deux tiers la proportion des Français qui n'ont accès qu'à la télévision hertzienne analogique.

Surtout, auprès des Français qui les reçoivent, les chaînes de la TNT trouvent leur place. Le président du CSA s'en est félicité devant la Délégation : « Les premiers éléments montrent le succès du déploiement de la TNT. Les chaînes de la TNT ont déjà capté 25 % de l'audience. La durée moyenne d'écoute des téléspectateurs disposant de la TNT est désormais supérieure de 20 minutes à celle des autres téléspectateurs ; c'est un bon indice de la satisfaction des foyers ; celle-ci a pour origine principale la grande variété de chaînes offertes par la TNT par rapport à la diffusion analogique. » Ces propos sont confirmés par la récente enquête citée ci-dessus : elle expose que, auprès de foyers équipés pour recevoir la TNT, les chaînes de la TNT représentent 22,5 % de l'audience. La chaîne Gulli, qui n'est présente que sur la TNT, vient en cinquième position chez ces téléspectateurs, avec 4 % d'audience, après TF1, France 2, France 3 et M6, mais devant France 5, Canal + et Arte, chaînes hertziennes. Autre signe tangible du succès, les grands hebdomadaires de la télévision ont intégré les chaînes de la TNT dans leurs pages, et le font savoir.

Cependant, alors que la TNT est maintenant installée dans le paysage audiovisuel français, que le succès d'audience est là et que l'ensemble attise les impatiences des populations qui n'accèdent pas encore à la TNT, la poursuite du déploiement va demander des efforts renouvelés. En abordant le dernier tiers de la population, ce déploiement rencontre en effet des obstacles nouveaux.

B.-LE TRAITEMENT DES ZONES DE PARTAGE DE FRÉQUENCES

1. Une situation épineuse

Pour arriver à la couverture de 85 % de la population, une cinquième étape a été planifiée par le CSA, avec l'ouverture de 40 sites au 31 mars 2007. Une difficulté de calendrier se fait cependant jour : en effet si 8 de ces sites sont à l'intérieur des terres, et donc peuvent être ouverts sans difficulté, 32 se trouvent dans des zones de partage des fuseaux hertziens avec des États voisins.

Il faut savoir que ces zones ne s'identifient pas aux simples zones frontalières. Entre la France et l'Espagne et la France et l'Italie, les montagnes arrêtent le cours du signal hertzien. Les zones de partage de fréquence sont limitées. En revanche, dans le Nord et l'Est de la France, le relief favorise la propagation du signal. Sont ainsi en zone de partage de fréquence la région Nord-Pas-de-Calais, la moitié de la région Champagne-Ardenne, la Lorraine et l'Alsace dans leur totalité, la Franche-Comté, et la moitié des départements de l'Ain et de la Haute-Savoie.

La carte ci-après, qui présente l'état actuel du déploiement de la TNT, montre, en rouge, les émetteurs de la phase V.

LE DÉPLOIEMENT DE LA TÉLÉVISION NUMÉRIQUE DE TERRE

graphique
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Points bleus : émetteurs diffusant la TNT en octobre 2006

Points rouges : émetteurs dont la mise en place est prévue avant 2008

Zone colorée : zone couverte par la TNT en octobre 2006

(Source : Université Robert-Schuman, Strasbourg)

Du fait du partage de fréquences entre pays voisins, dans ces zones, comme l'a exposé le directeur général de l'Agence nationale des fréquences (ANFR), M. François Rancy, « le spectre des fréquences est divisé par deux et même par trois ou quatre en fonction du nombre de pays concernés. » De ce fait, on n'y reçoit même pas toujours les six chaînes analogiques. En revanche, on y reçoit les chaînes étrangères. Cette pénurie a aussi pour conséquence l'impossibilité de déployer la TNT selon les mêmes méthodes que dans le reste de la France. Il n'y a pas la place d'y déployer la TNT en coexistence avec la diffusion analogique. En l'état actuel des ressources, « pour y faire arriver la TNT, il faut arrêter totalement la diffusion analogique ». C'est pourquoi la carte de déploiement de la TNT par TDF prévoyait un déploiement très tardif dans ces zones, en particulier en Alsace-Moselle.

Au fur et à mesure que le fait TNT s'imposait dans le référentiel audiovisuel français, cette position, qui renvoyait l'équipement de régions entières à l'extinction définitive de l'analogique, c'est-à-dire au plus tôt en 2011, est devenue de plus en plus difficile à justifier. On s'est donc tourné vers d'autres hypothèses, le prêt de fréquences par les pays voisins et la substitution anticipée du numérique à l'analogique. Lors de son audition, le ministre délégué à l'industrie l'a exposé à la Délégation à propos de l'Alsace : « Il ne pourra pas y avoir en Alsace coexistence des chaînes analogiques françaises et allemandes et de la TNT française. La France devra donc, pendant cette période de coexistence, avoir recours à des fréquences prêtées temporairement par ses voisins ; elle devra peut-être aussi envisager d'éteindre de manière anticipée la diffusion de l'analogique sur quelques sites. » Pour accompagner une éventuelle extinction anticipée, un Fonds d'accompagnement du numérique a été créé et doté de 15 millions d'euros.

Cependant, il est clair que la tenue de l'échéance de mars 2007 n'est plus du seul ressort des autorités françaises, mais dépend aussi des délais des négociations avec les pays riverains. M. Dominique Baudis l'avait du reste exposé à la Délégation.

Or ce type de négociations est assez complexe. Il faut constituer un véritable plan de fréquences international provisoire. Pour fixer un dispositif transitoire en zone frontalière, il faut en effet d'abord que soit conclu un accord avec chacun des pays riverains de la France : Royaume-Uni, Belgique, Luxembourg, Allemagne et Suisse. En effet, l'attribution des fréquences attribuées aux uns a des répercussions sur celles disponibles pour les autres. Tout retard ou toute non-coopération d'un seul des six pays bloque l'ensemble du plan.

De telles négociations étaient déjà en cours l'hiver dernier. Et déjà, il apparaissait que leur rythme ne permettrait pas de tenir les échéances.

M. François Rancy, directeur général de l'Agence nationale des fréquences, et à ce titre négociateur au premier titre de ces accords, avait exposé à la Délégation lors de son audition, le 25 janvier 2006, que « pour que le délai de mars 2007 soit tenu, il faudrait que l'accord soit conclu dans les prochaines semaines ; un décalage de la date de conclusion de quelques semaines ou de quelques mois retardera d'autant, de façon mécanique, l'ouverture des sites. » Or l'accord n'est plus envisagé que pour janvier 2007, retardant d'autant les dates d'équipement.

Quelles en sont les raisons ? La première raison était la tenue prochaine de la 6e conférence régionale des radiocommunications (CRR), qui a eu lieu du 15 mai au 16 juin 2006. Ses résultats en sont décrits plus loin. À ce stade, il faut savoir qu'elle avait pour objet la remise à plat du spectre dans l'ensemble de la zone Europe-Afrique-Moyen-Orient, pour dégager des fréquences aux frontières et accroître ainsi pour chaque pays le spectre disponible. De telles conférences sont très lourdes à organiser, et n'ont lieu que de loin en loin. Elles organisent le spectre pour cinquante ans.

Dans ces conditions, il était très difficile de conclure un plan transitoire : le risque pour chacun était de négocier dans le cadre du plan provisoire des configurations qui auraient pu être pénalisantes lors de l'abord de la négociation générale. Comme l'a exposé M. Philippe Levrier, membre du CSA, lequel CSA n'était pas partie prenante aux négociations, chacun était « tout particulièrement attentif à ne pas concéder pour des besoins limités dans le temps des aménagements durables. » Les négociations n'ont donc pas pu aboutir avant la tenue de la CRR. Elles ont repris dès le mois de juillet.

La deuxième raison pour laquelle ce plan de transition est toujours en cours de négociation est sa complexité. Chaque avancée avec un pays est marquée par de nouvelles solutions, qui doivent être rediscutées avec les autres. Ainsi chaque avancée de la négociation avec l'Allemagne entraîne la réouverture du dossier de négociation avec la Suisse.

De ce fait, le calendrier de la cinquième phase a été révisé. Dès le 20 juin 2006, lors de son audition par la Délégation, le ministre délégué à l'industrie, M. François Loos, a exposé que le taux de couverture « devrait ensuite atteindre 66 % en octobre 2006 (phase IV) puis 70 % au 31 mars 2007 (phase V) ».

Autrement dit, la couverture des zones non pas seulement frontalières mais « de partage de fréquences », où vit 15 % de la population française, est désormais renvoyée à l'après-mars 2007. Plus exactement, compte tenu des délais dans la conclusion des accords internationaux de transition, on peut penser que leur équipement n'aura pas lieu avant la fin de l'année 2007. « L'objectif est d'atteindre une couverture numérique hertzienne de 85 % avant la fin 2007 » a exposé le ministre délégué lors de son audition.

En revanche, l'objectif de la négociation pour la France est d'obtenir en zones frontalières 5 multiplex TNT, comme dans le reste de la France, et ce d'ici la fin 2007. À ce stade, l'Agence nationale des fréquences considère cet objectif comme réalisable même si, bien entendu, le résultat n'est pas aujourd'hui acquis.

2. Des solutions spécifiques

Une fois le plan provisoire prêt, il faudra, compte tenu de ce qui a pu être obtenu, organiser la transition, bassin d'émission par bassin d'émission. Le ministre délégué à l'industrie, M. François Loos, est ainsi venu expliquer à la Délégation les orientations retenues pour l'Alsace.

Une solution aurait été trouvée pour le département du Haut-Rhin : « il devrait être couvert pour l'essentiel par l'allumage de l'émetteur de Mulhouse, prévu lors de la « phase V » de la TNT ». À l'image des zones non frontalières, cet allumage permettrait la coexistence des diffusions analogique et numérique ; la cause de cette bonne surprise est que, sou réserve de la conclusion de l'accord final, « les négociations ont pu aboutir sur le prêt d'une fréquence par la Suisse ».

Concernant le département du Bas-Rhin, où la situation est plus difficile, le CSA a annoncé le 10 mai dernier un plan fondé sur le basculement au numérique de plusieurs émetteurs analogiques de faible puissance. Le ministre délégué à l'industrie a précisé qu' « une opération pilote devrait être menée fin 2006-début 2007 sur une zone réduite pour valider les modalités pratiques de l'opération. Le site de Niederbronn-les-Bains a été choisi pour cette expérimentation. » Le basculement au tout numérique sera progressif, et se traduira d'abord par l'offre gratuite en qualité numérique des chaînes analogiques actuelles. Dans une lettre au rapporteur du 7 septembre 2006, publiée en annexe au présent rapport d'information, le ministre délégué à l'industrie confirme que, même si « le projet échafaudé par le CSA » a été rendu caduc par un avis du Conseil d'État du 23 novembre 2006, « quelle que soit la solution technique retenue, la couverture en TNT de l'Alsace sera contrainte par l'interdiction partielle d'émetteurs analogiques existants ».

Il faut noter qu'une telle méthode suppose une modification de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. En effet, les autorisations données par le CSA en mode analogique ne viennent à échéance que dans plusieurs années. Dès lors, seule la loi peut autoriser le CSA à les éteindre.

L'article 5 du projet de loi actuellement en discussion relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur effectue cette modification. En ce sens, l'aboutissement du projet de loi est un élément indispensable pour une extension aussi rapide que possible de la couverture de la TNT dans les zones de partage de fréquences.

L'option du basculement impose cependant un équipement accéléré des foyers pour recevoir la TNT. Lors de son audition, M. François Rancy a exposé que « c'est pour cela que le Fonds d'accompagnement du numérique a été créé ; il est aujourd'hui doté de 15 millions d'euros ». Sur ce point, il a encore précisé que, dans l'esprit des pouvoirs publics, le Fonds d'accompagnement du numérique était « exclusivement destiné à accélérer le déploiement de la TNT et l'extinction de la diffusion analogique aux frontières. (...) Il n'est pas destiné à payer des adaptateurs TNT aux gens mais à leur permettre de continuer à recevoir la télévision. » Depuis lors, avec la présentation du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, et la fixation d'un calendrier d'extinction de la diffusion analogique, la problématique s'est globalisée. Elle sera donc évoquée plus loin, dans un cadre général.

La deuxième question qui reste posée est la capacité des régions frontalières à continuer à recevoir les chaînes des pays voisins pendant la période de transition. Le problème concerne à vrai dire essentiellement l'Alsace, où c'est une habitude de regarder les chaînes allemandes, et où l'accès à ces chaînes est considéré, à juste titre, comme la compensation logique du fait que les téléspectateurs alsaciens n'ont accès qu'à trois, voire deux, des six chaînes hertziennes analogiques françaises.

Pour l'après-extinction du numérique, le problème ne se pose pas. Plusieurs de ses interlocuteurs l'ont affirmé à votre rapporteur, les adaptateurs ne seront pas différents selon les pays. Ainsi, lors de son audition par la Délégation, M. François Loos a-t-il exposé que « techniquement, il n'est pas nécessaire d'avoir deux adaptateurs différents pour recevoir les TNT française et allemande ». Dans la lettre déjà citée, il précise que, en conséquence « dans une zone de couverture commune entre les deux pays, le même adaptateur TNT permettra ainsi de recevoir les chaînes françaises et allemandes. Les deux pays utilisent en effet des normes que tous les décodeurs du commerce peuvent interpréter. » C'est ainsi 29 chaînes gratuites, les 18 françaises et les 11 allemandes, qui pourront être reçues. Par ailleurs, la même remarque vaut aussi pour la TNT suisse.

En revanche, pendant la période de transition, un certain nombre de risques existent.

Ils sont d'abord liés au calendrier et à la pénurie de fréquences. Dans le département du Haut-Rhin, la cohabitation de la diffusion analogique et de la diffusion numérique devrait permettre de continuer à recevoir les chaînes analogiques allemandes pendant cette période.

Le problème est alors l'harmonisation des calendriers. En effet, les Allemands semblent bien vouloir avoir fini d'équiper leur pays en diffusion numérique fin 2008. Cela vaudrait désormais aussi pour les zones frontalières, ce qui n'était pas le cas il y a quelques mois. Or, les Allemands ne font cohabiter numérique et analogique que pendant quelques semaines, le temps de permettre à la faible proportion de téléspectateurs qui ne reçoivent la télévision que par voie hertzienne (15 %) de s'équiper. Ensuite, ils éteignent l'analogique.

Les téléspectateurs d'Alsace du Sud qui ne seraient pas passés au numérique à la date du basculement allemand seront donc alors privés des chaînes allemandes. Pour les retrouver, il leur faudra passer au numérique. En l'état actuel de nos informations, cela devrait être possible du fait de la coexistence entre l'analogique et le numérique permise par le prêt de la fréquence suisse.

Le Fonds d'accompagnement du numérique devra alors pouvoir intervenir, dès ce moment, notamment au profit des personnes les plus modestes, pour leur permettre ce passage dès l'extinction du numérique allemand.

En Alsace du Nord, la question est encore plus complexe. Dans toutes les zones où il faudra éteindre l'analogique pour passer au numérique, le maintien de l'accès aux chaînes allemandes hertziennes est conditionné à une coordination parfaite entre les basculements locaux français et allemand.

Or, lors de son audition par la Délégation, le directeur général de l'Agence nationale des fréquences, M. François Rancy, a indiqué que « s'agissant des régions frontalières, où l'abandon de l'analogique est la condition nécessaire pour que le numérique permette à leurs habitants d'accéder à autant de chaînes qu'ailleurs, à partir de 2007 quelques petits émetteurs vont être coupés çà et là et le basculement se fera progressivement jusqu'en 2010. »

Il est clair que, si le basculement s'étale sur trois ans, et que le basculement allemand s'effectue en 2008, certains téléspectateurs alsaciens risquent, soit d'accéder pendant un an aux chaînes numériques françaises, mais, provisoirement, plus aux chaînes analogiques allemandes, soit, pire encore, d'être privés pendant plus de deux ans des chaînes allemandes, tout en continuant de n'accéder qu'à deux ou trois chaînes françaises.

Lors de son audition par la Délégation, le ministre délégué à l'industrie a cependant exposé quant à lui que « s'agissant de la transition dans les régions frontalières, des discussions sont en cours entre le CSA, l'Agence nationale des fréquences et leurs homologues allemands, fédéraux et de Länder ». Dans sa lettre déjà citée, il expose aussi que « l'avènement du numérique ne doit toutefois pas perturber la réception des chaînes existantes en analogique et toutes les précautions doivent être prises en ce sens », et que « La coordination de l'extinction de l'analogique en Alsace et en Allemagne permettrait aux deux pays de basculer ensemble au numérique, avec la satisfaction de voir arriver alors les dix-huit chaînes gratuites de la TNT française et les onze chaînes numériques allemandes ».

Le rapporteur insiste sur la nécessité que les discussions évoquées par le ministre soient effectivement un instrument d'organisation du calendrier d'extinction, de façon à ce que les téléspectateurs alsaciens ne se trouvent pas à un moment ou un autre et pour un certain temps privés des chaînes hertziennes allemandes.

Il faut ajouter aussi, comme on le verra plus loin, que le service antenne gratuit du câble permet d'accéder aux chaînes de la TNT dans les mêmes conditions que la diffusion hertzienne.

C.- AU-DELÀ DU TAUX DE 85 % D'ÉQUIPEMENT, QUEL ACCÈS À LA TNT ET QUELS DÉLAIS POUR LES ZONES NON COMPRISES DANS LE PLAN D'ÉQUIPEMENT PRIORITAIRE ?

La stratégie de déploiement adoptée par le CSA pose aussi la question des conditions de l'accès à la TNT des 15 % d'habitants non compris dans le plan d'équipement prioritaire. Comme M. Dominique Baudis l'avait exposé à la Délégation, « le CSA n'a jamais annoncé que la totalité du territoire serait équipé à la fin de 2007 ; il n'a non plus jamais présenté d'objectif au-delà de la desserte de 85 % de la population. »

Pour autant, ce dernier point a été abordé dès l'ouverture de la TNT, le 31 mars 2005. Un groupe de travail entre le CSA et la direction du développement des médias, qui dépend des services du Premier ministre, a dégagé les données de la question. Pour équiper 85 % de la population, 115 sites suffisent ; pour passer à 95 %, il faut équiper 2000 émetteurs supplémentaires ; enfin, pour assurer le remplacement total de l'actuelle diffusion analogique, qui est de près de 99 %, il faut équiper encore 1000 émetteurs. Une autre solution étudiée était celle de la diffusion gratuite des chaînes de la TNT par satellite, ce qu'on appelle la TNS (télévision numérique satellitaire).

1. Les moyens terrestres

La première solution est donc l'extension du réseau. Lors de son audition, M. Dominique Baudis avait exposé qu' « aujourd'hui, il est à peu près acquis que ce réseau hertzien ira au-delà de la couverture initiale de 85 % de la population ».

Deux raisons sont citées à l'appui de cette décision. La première est une question de cohérence territoriale. En effet, un taux de couverture de 85 % laisse non équipées des parties de villes importantes ; or le CSA considère qu'il y a un minimum de cohérence à apporter : « on n'envisage pas, a exposé son président, qu'en déménageant au sein d'une même ville, un téléspectateur doive passer de la réception hertzienne à la réception par satellite ».

La deuxième raison tient à la simplicité d'équipement. Pour le président du CSA, cette simplicité « est l'une des raisons du succès actuel et un des gages du succès futur de la TNT : aujourd'hui, pour recevoir les chaînes de la TNT, un téléspectateur recevant la télévision analogique a simplement à acheter un adaptateur, au prix de 50 euros environ, et à le brancher. Au contraire, l'équipement d'une habitation au moyen d'une parabole est toujours plus cher et plus compliqué pour l'utilisateur ».

« Dans les zones d'habitat dispersé, a exposé encore M. Philippe Levrier, membre du CSA, les téléspectateurs sont demandeurs d'une solution qui soit dans la continuité du service actuel. Pour cette raison, le CSA considère qu'il est très important d'y faire venir le réseau TNT. »

Et il a conclu que la TNS ne valait raisonnablement « que pour les zones où l'on ne peut faire venir le réseau TNT à des coûts raisonnables ».

Enfin, on l'a vu, les critères de sélection des sites pour l'implantation prioritaire de la TNT étaient soit l'étendue de leur zone de couverture, soit encore qu'ils desservent une population d'au moins 50 000 habitants. Cependant, il s'agit là d'un critère de priorité, et seulement de priorité. Comme l'a fait remarquer Mme Henriette Martinez, députée des Hautes-Alpes, département qui ne comporte aucun site prioritaire, on peut difficilement imaginer que dans des agglomérations de 40 000 habitants, comme c'est le cas de la ville de Gap, voire de 10 000 habitants, comme c'est le cas de Briançon, chaque foyer doive se doter d'une parabole.

Ainsi, il y a un domaine d'expansion latent de la couverture hertzienne terrestre au-delà des 85 % de la population qui seront desservis à la fin 2007. Selon M. Philippe Levrier, sur les 3000 sites restant à équiper, « les 1000 les plus importants devraient être intégrés dans le réseau de télévision numérique terrestre ».

Cependant, la couverture du réseau TNT pourrait aller plus loin encore. Pourraient également être équipés tout ou partie des 1000 sites suivants.

Selon M. Philippe Levrier, le traitement de ces 1000 sites intermédiaires dépend de paramètres de fait. L'un de ceux-ci, a-t-il expliqué, est celui du maintien concomitant de la diffusion analogique et de la diffusion numérique. Si, au contraire, « au moment où l'on passe au numérique, on arrête la diffusion analogique, l'équipement des sites ne coûte rien puisqu'on récupère l'émetteur, qu'on affecte à un autre mode de diffusion. Dans ces conditions, il est possible d'équiper les sites sans que cela ait de conséquences sur le budget de diffusion des chaînes. »

En effet, pour être diffusées par voie hertzienne, les chaînes paient à TDF une redevance, correspondant à l'installation et à l'entretien de l'émetteur. Si le passage au numérique se fait par simple réaffectation de l'émetteur à ce mode de diffusion, il n'y a pas de coût supplémentaire. En ce cas, il y a deux points à régler. Le premier est celui de la concertation avec les téléspectateurs, afin qu'ils ne se trouvent pas du jour au lendemain privés de télévision parce que le mode de diffusion a changé inopinément. Cette concertation n'est pas difficile à organiser. Les émetteurs sont de petits émetteurs. Ils desservent souvent moins de 400 habitants. Le deuxième est l'aide à l'équipement d'un adaptateur pour certaines catégories de téléspectateurs. On retrouve alors la question du barème des aides.

Prenant acte de cette situation, le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur sur dispositions a prévu des dispositions pour inciter les chaînes à augmenter leur couverture du territoire au-delà de 85 % en échange de divers avantages.

Cependant, le texte du Gouvernement limitait ces incitations aux chaînes hertziennes. Le Sénat, avec raison, les a étendues à l'ensemble des chaînes de la TNT ayant souscrit à l'objectif de couverture de 85 %. Il a de plus fixé un objectif de couverture de 95 % de la population française.

Le rapporteur ne traite pas ici des modalités des incitations. Elles relèvent de la discussion du texte en commission puis en séance publique. Il y a en effet un mécanisme économique complexe : chaque point de couverture supplémentaire coûtant plus cher que le précédent, plus l'exigence de couverture est élevée, plus l'incitation doit être substantielle.

En revanche, le rapporteur considère lui aussi que la couverture de diffusion hertzienne doit être aussi étendue que possible et concerner non plus les seules chaînes analogiques en clair, mais l'ensemble des chaînes gratuites de la TNT. C'est là une question d'équité pour les territoires.

Lorsque l'on parle de la TNT, il faut distinguer deux réalités parallèles. La première est le réseau hertzien capable de diffuser un signal audiovisuel numérique. Lorsqu'on parle de taux de couverture par la TNT, c'est de taux de couverture par ce réseau. La deuxième est constituée par les chaînes qui diffusent sur ce réseau numérique hertzien. Or, nombre de ces chaînes existent déjà. Elles ne peuvent pas diffuser sur le réseau hertzien analogique, qui ne peut porter que six chaînes au plus. Mais elles sont déjà diffusées, soit sur le câble, soit sur l'ADSL.

Le CSA a dû s'emparer de la diffusion par le câble. En effet, dans certaines villes où les réseaux câblés sont importants, certains immeubles reçoivent la télévision par le câble. Ils n'ont parfois plus d'antenne de toit. Dans ce cas, il est prévu que le câblo-opérateur apporte aux foyers équipés mais non abonnés le service d'antenne, c'est-à-dire les chaînes gratuites.

Dès le lancement de la TNT, le CSA a donc demandé que ce service d'antenne inclue, lorsque la télévision est reçue en mode numérique, l'ensemble des chaînes de la TNT. Mais, comme son président l'a exposé à la Délégation, la loi du 9 juillet 2004 n'a imposé aux opérateurs que de faire des propositions commerciales aux gestionnaires des immeubles. Dès lors « les opérateurs ont entrepris de faire des propositions où la diffusion des chaînes de la TNT était payante. » Le CSA a donc dû intervenir pour égaliser les conditions d'accès à la TNT entre téléspectateurs câblés et téléspectateurs hertziens. À ces fins, il a élaboré une recommandation, qu'on trouvera en annexe du présent rapport d'information, contraignant les câblo-opérateurs « à proposer aux foyers câblés des adaptateurs leur permettant de recevoir ces chaînes, à des tarifs correspondants à ceux des adaptateurs pour la télévision hertzienne ». En conséquence, depuis le mois de septembre 2006, la société Ypso, qui regroupe les réseaux Noos/UPC et Numéricâble (soit 96 % des réseaux câblés), met à disposition des raccordés au câble des décodeurs permettant l'accès aux dix-huit chaînes gratuites de la TNT, moyennant un paiement unique (sous forme de dépôt de garantie) de 75 euros. Les foyers abonnés au câble reçoivent, quant à eux, automatiquement les chaînes de la TNT.

L'équipement en réseaux câblés est plutôt le fait de zones urbaines qui ont vocation à être couvertes par la TNT. Dans celles de ces zones où la couverture par la TNT est difficile à conduire, le câble est donc forcément une solution. Il y est parfois déjà largement installé. Ainsi, dans les grandes villes situées en zone de partage de fréquences, le taux de pénétration du câble est de 50 % environ. De ce fait, les chaînes de la TNT y sont déjà diffusées.

L'ADSL est aussi l'un des vecteurs possibles de la TNT. On l'a vu, il continue à se développer en France un standard triple play, où l'offre, payante, associe accès à l'internet haut débit, téléphonie illimitée et télévision. Le débit minimum doit être de 5Mbit/s pour recevoir la télévision.

On a vu plus haut que les offres ne cessent de progresser en débit. On a vu aussi que la couverture ne cesse de s'étendre.

Certes, on peut penser que les territoires qui ne seront pas couverts par le programme d'équipement en TNT ne seront pas les mieux pourvus en ADSL, et notamment en ADSL d'un débit suffisant pour faire passer la télévision.

Cette situation pourra cependant évoluer. Aujourd'hui, la conception par les opérateurs des réseaux WiMax ne permet pas d'y faire passer la télévision. M. Alain Cote, conseiller pour l'innovation numérique de la région Alsace, l'a exposé au rapporteur, le dispositif est cadré pour proposer aux clients privés, autres que les entreprises, du début de l'ordre de 2 MHz, insuffisant pour recevoir la télévision.

Il reste que des montées en débit sont possibles. Des expériences de diffusion de films par WiMax ont déjà eu lieu aux États-Unis. On peut parier qu'une prochaine génération d'offres WiMax offrira l'accès au triple play. Le WiMax pourra donc être aussi, à une date aujourd'hui non déterminée, un moyen de faire passer la TNT dans les zones couvertes par les 1000 émetteurs les plus petits ou ceux des 1000 émetteurs intermédiaires qui ne seront pas transformés en émetteurs numériques.

2. Le satellite

Une fois les différents modes de diffusion terrestres activés, il reste inévitablement une partie de la population non desservie. En effet, le nombre de sites qu'il faudrait équiper pour desservir la totalité de la population est de 3000. On l'a vu, sur les 1000 sites intermédiaires, tous ne seront pas équipés pour la TNT. Par ailleurs, il est acquis que les 1000 plus petits sites ne le seront pas non plus. Or, il paraît difficile que l'ensemble des foyers aujourd'hui desservis par ces sites soient couverts par le WiMax au débit nécessaire pour la télévision.

Autre élément, le calendrier d'équipement d'une partie des sites peut apparaître relativement lointain. Les équiper par substitution du numérique à l'analogique suppose que chaque foyer puisse passer du jour au lendemain de l'un à l'autre, autrement dit qu'il dispose de l'équipement adéquat. Comme il est hors de question que des foyers se retrouvent privés de télévision, il faudra fournir un certain nombre d'adaptateurs gratuits. Les téléviseurs neufs étant désormais équipés d'un adaptateur intégré, plus la substitution sera tardive, plus le coût sera réduit pour la puissance publique. Il y a là un puissant facteur pour un équipement tardif de ces sites. En fait, tout milite pour que la transformation se fasse dans le cadre de la procédure d'extinction générale de l'analogique. Certains ne seront donc transformés qu'en 2011.

Ces deux raisons ont mis en évidence la nécessité, outre la desserte terrestre, d'une desserte des chaînes de la TNT par le satellite. Lors de l'audition du CSA par la Délégation, M. Philippe Levrier a exposé que les 1000 sites les moins importants, ceux « qui couvrent chacun une centaine d'habitants tout au plus, devraient être desservis par diffusion satellitaire (TNS) »

« Les études de coût sont encore en cours. C'est sur la base d'un pronostic et d'une évaluation que se fonde l'idée que le satellite va sans doute apparaître plus intéressant financièrement pour l'équipement des 1000 derniers sites. On va sans doute s'orienter vers une réception par voie numérique terrestre pour les sites desservant plus de 250 habitants, et une réception par voie satellitaire pour les sites desservant moins de 250 habitants.

Il a même ajouté qu'« il arrive d'ores et déjà aujourd'hui que, lorsqu'on procède à des réaménagements du réseau de diffusion analogique de la télévision, on ne transfère pas des fréquences mais qu'on les supprime, et qu'on offre en contrepartie aux personnes anciennement desservies un abonnement au satellite. » Ainsi, l'organisation d'une desserte par satellite apparaît comme incontournable.

Il est cependant remarquable que cette voie n'ait pas été choisie d'emblée pour la diffusion des chaînes de la TNT. Les raisons de cette situation ne sont pas d'ordre technique. Lors de l'audition du CSA, M. Gilles Brégant, directeur des technologies du Conseil a exposé « que les conditions techniques de la diffusion numérique par satellite permettent sans la moindre difficulté la diffusion gratuite et en clair des chaînes de la TNT ; dès lors que la décision serait prise de le faire, le délai de réalisation pour que chaque foyer puisse les recevoir est de l'ordre de deux semaines » ; il a même précisé que « cela vaut depuis 2002. »

Ce n'est pas non plus une question de coût, même si cela a pu l'être. Lors de la même audition, M. Philippe Levrier a indiqué que les chaînes diffusées par le réseau de télévision numérique terrestre étaient amenées de toute façon à « bientôt être toutes présentes sur le satellite » ; dès lors « l'utilisation du satellite pour diffuser les chaînes hertziennes gratuites n'implique donc pas de coût de transport supplémentaire du signal. »

En réalité, les difficultés concernent les habitudes de l'usager, la facilité et le coût relatifs d'équipement, et aussi la politique des chaînes.

En France, ce point a déjà été évoqué, l'habitude de la télévision gratuite est ancrée. M. Dominique Baudis l'a exposé : « en France, au contraire d'autres pays, la télévision payante n'avait pas beaucoup progressé : 25 % à 30 % des foyers seulement souscrivent des abonnements payants. » Cela a pour la diffusion par satellite une conséquence importante : le taux d'équipement des Français pour la réception de la télévision satellitaire est faible. Il n'y a que dans les zones où, du fait des difficultés actuelles de réception, on est déjà équipé d'une parabole que la réception satellitaire sans formalité est possible. Ailleurs, il faut à la fois acheter une parabole mais aussi la faire installer. En effet, une parabole ne s'installe pas aussi simplement qu'un adaptateur qu'on branche sur le téléviseur : elle doit être installée en extérieur, dans des endroits pas forcément très accessibles pour l'usager, en général sur le toit, être convenablement orientée, et être fixée ; bref, elle requiert le recours à un installateur professionnel, qui facturera son intervention. La complexité et le coût pour l'usager sont donc sans commune mesure avec la diffusion hertzienne terrestre.

Les chaînes non plus n'ont pas souhaité explorer cette voie. Plusieurs raisons rendent compte de cette décision. La première, exposée par le ministre délégué à l'industrie, découle directement des considérations ci-dessus : « les chaînes ont eu peur de na pas toucher assez de clients pour rentabiliser cet investissement. En revanche les chaînes ont bien été candidates à une diffusion numérique terrestre ; elles savaient qu'elles pouvaient compter sur un parc important. »

Le deuxième ensemble de raisons concerne les conditions juridiques de la diffusion. La question des droits d'auteur a été évoquée devant la Délégation. Les émissions d'un satellite forment un cône dont la pointe est le satellite lui-même et la base sa zone d'émission au sol. Celle-ci forme un cercle plus ou moins grand selon la capacité de couverture qu'on veut donner au satellite. Si l'on veut que l'ensemble du territoire français soit desservi, il faut qu'il se trouve tout entier à l'intérieur du cercle. Par conséquent, la zone d'émission du satellite va largement déborder les frontières ; elle sera beaucoup plus grande que la zone d'émission hertzienne analogique qu'elle remplace. Dès lors, des difficultés peuvent concerner les droits d'auteur, les auteurs pouvant considérer qu'ils devraient être réévalués dans la mesure où le public susceptible d'être atteint par le satellite serait supérieur au public actuellement atteint par le réseau terrestre, analogique ou numérique.

Les réticences des chaînes ont aussi pour origine les conditions de la concurrence : la diffusion gratuite des chaînes de la TNT par satellite vient forcément faire concurrence à l'actuelle diffusion payante des bouquets satellitaires, comme du reste à la diffusion payante par le câble. Le développement de la TNT et de l'ADSL a déjà eu pour conséquence des concentrations dans le câble et le satellite, avec le rachat des réseaux câblés français par un seul opérateur, Numéricâble, et la fusion des deux bouquets satellitaires, TPS et CanalSat.

Dès lors, comme l'a exposé M. Dominique Baudis, « les opérateurs n'ont pas forcément intérêt à organiser la diffusion gratuite des chaînes de la TNT ; nombre d'entre eux ne souhaitent pas forcément aller au-delà des 115 sites à équiper pour couvrir 85 % de la population. »

Et M. Gilles Brégant de faire remarquer, lors de l'audition du 22 février, que « aujourd'hui, la situation reflète les positions des éditeurs et des diffuseurs : le multiplex R1, qui regroupe les chaînes publiques, est diffusé en clair sur le satellite ; en revanche, quatre autres bouquets multiplex ont choisi d'embrouiller le signal de façon à ce qu'il ne puisse pas être capté par une antenne parabolique sans abonnement. »

Bref, les éditeurs de programmes (les chaînes), y compris les petits, avaient intérêt, compte tenu du mode d'équipement des Français, à privilégier la diffusion terrestre. Quant aux grands opérateurs, dont certains sont à la fois éditeurs et opérateurs, leur intérêt était la diffusion la plus restreinte de la TNT sur le territoire, de façon à préserver autant que possible leurs abonnements payants.

Eu égard aux positions des opérateurs, l'intervention de la puissance publique devenait indispensable.

Répondant à une question au Gouvernement le 27 octobre 2005, le ministre de la culture et de la communication, M. Renaud Donnedieu de Vabres, avait répondu non seulement que « 85 % des Français doivent recevoir la TNT au printemps 2007 », ce qui, on l'a vu, était sans doute un peu optimiste, mais aussi que, pour ceux qui n'y auront pas accès à ce moment-là, « la solution technologique se présentera sous la forme d'une offre de satellite gratuite permettant d'assurer la réception partout sur le territoire national » et enfin que « au 31 décembre 2007, toute la population française devra recevoir la TNT ».

Le programme est donc clair : indispensable techniquement pour couvrir l'ensemble de la population en TNT, le satellite devient aussi l'instrument qui permettra sa couverture à partir du printemps 2007 pour qui le souhaite vraiment.

Cependant, à la différence de ses pouvoirs envers les câblo-opérateurs, le CSA n'a aucune autorité pour imposer aux opérateurs de satellites la diffusion gratuite des chaînes en clair. M. Dominique Baudis l'a exposé à la Délégation : « En 2004, lors de la préparation du projet de loi relatif aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, le CSA avait proposé que soit institué un service d'antenne gratuit ; il avait demandé que les rapports entre chaînes de la TNT et diffuseurs satellitaires soient régis par le principe « must carry, must deliver », bref, que les diffuseurs satellitaires soient tenus d'acheminer gratuitement et en clair le signal. Cette proposition n'a pas été retenue par la loi du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle ; aujourd'hui elle n'oblige pas les opérateurs à donner aux foyers l'accès aux chaînes gratuites de la TNT par le satellite. L'ouverture de cet accès relève donc de la seule bonne volonté de chaque opérateur. »

Dans la mesure où, comme l'a exposé le ministre délégué à l'industrie, l'achèvement de la couverture totale du territoire en télévision numérique, « rendra seul possible l'extinction de l'analogique », et où, pour des raisons de coûts et de délais, l'utilisation d'un satellite est nécessaire pour cet achèvement, le temps de la création d'un service d'antenne de diffusion des chaînes gratuite pour les opérateurs satellite est maintenant venu.

Le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur était là aussi fort peu hardi. Le nouvel article 100 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication introduit par l'article 5 de ce projet de loi prévoyait bien un tel service d'antenne : mise à la disposition gratuite d'un distributeur satellitaire des chaînes nationales, et offre de ce service aux téléspectateurs pour les seuls coûts du matériel de réception et de son installation.

En revanche, il ne le prévoyait que pour les chaînes hertziennes analogiques actuelles. Douze chaînes numériques en clair pouvaient n'être rendues accessibles par l'opérateur satellite qu'au prix d'un abonnement payant ! Le Sénat a modifié de façon bienvenue ce dispositif, en élargissant dans ce qui sera l'article 98-1 de la loi du 30 septembre 1986 le service d'antenne à l'ensemble des chaînes nationales en clair de la TNT.

Ainsi, si la loi est votée avant la fin de la législature, il y aura une véritable offre gratuite de la TNT sur l'ensemble du territoire au plus tard à la mi-2007.

Il faut dire aussi que désormais, pour les opérateurs, l'enjeu est sans rapport avec l'enjeu initial. Après la planification de la cinquième étape de la couverture du territoire et le basculement des 1000 émetteurs suivants, c'est moins de 10 % de la population, sans doute de l'ordre de 9 %, qui n'aura pas accès aux chaînes de la TNT par le réseau hertzien. On a vu aussi que le Sénat a introduit dans le projet de loi un objectif de couverture hertzienne terrestre de 95 % de la population. Les répercussions du service d'antenne sur les comptes des opérateurs ne sont plus du tout du même ordre qu'avec un réseau hertzien de télévision numérique qui ne couvrirait que la moitié de la population. On peut même penser que, compte tenu des dates envisagées, il pourrait être facteur d'un développement de l'équipement en paraboles, certains foyers, tout particulièrement en zones isolées, préférant anticiper un basculement plus tardif de l'émetteur hertzien.

3. Quel accompagnement pour l'achèvement du basculement au numérique ?

Après le vote de la loi, l'extinction de la télévision analogique sera fixée au 30 novembre 2011. Comme l'extension de la couverture numérique, l'extinction sera réalisée par étapes. La question est alors celle de la continuité du service. Elle suppose la satisfaction de deux conditions.

La première concerne les adaptateurs. Pour que la France atteigne son objectif d'un équipement total en 2011, il faut que les fabricants d'adaptateurs soient capables d'en livrer 50 à 60 millions en quelques années. Malgré le succès des chaînes de la TNT, il n'en a été vendu à ce jour que 4 millions.

Surtout, il faut que chaque téléviseur soit équipé. Le Fonds d'accompagnement du numérique était exclusivement destiné à accélérer le déploiement de la TNT et l'extinction de la diffusion analogique aux frontières. Les critères d'aide devaient être fixés, selon le ministre délégué à l'industrie à la suite d'une première expérience anticipée conduite à Niederbronn-les-Bains ; « L'expérience conduite à Niederbronn-les-Bains permettra de déterminer des critères d'aide ».

Cependant, selon les propos de M. François Rancy, si ce fonds « devait servir à la couverture de tout le territoire, ce n'est pas de 15 millions d'euros qu'il faudrait doter le fonds, mais de 1,5 milliard d'euros, voire plus encore si l'on se réfère aux modèles britannique ou américain ». De fait, les pouvoirs publics britanniques ont fixé à 1 milliard de livres sterling le coût de l'accompagnement du basculement auprès des particuliers.

La perspective d'extinction programmée de l'analogique a donc amené le Gouvernement à instaurer par la loi un fonds d'aide aux visées beaucoup plus générales. Le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur prévoyait l'institution d'un fonds d'aide « au bénéfice des téléspectateurs attributaires d'allocations consenties sous conditions de ressources, membres d'un foyer exonéré de redevance audiovisuelle et ne recevant les services de télévision que par la voie hertzienne terrestre en mode analogique ».

Le Sénat a élargi le nombre des destinataires de cette aide en supprimant la condition d'être attributaire d'allocations consenties sous conditions de ressources. Le nombre de personnes exonérées de la redevance audiovisuelle est de l'ordre de 4 millions, en grande majorité des personnes âgées. On peut penser qu'à la date du basculement une partie d'entre elles seront équipées d'un téléviseur apte à recevoir la TNT.

En revanche, il faut aussi compter que l'aide ne se limitera pas forcément à la fourniture gratuite d'un adaptateur. Comme l'a exposé M. François Rancy, « le fonds n'est pas destiné à payer des adaptateurs TNT aux gens mais à leur permettre de continuer à recevoir la télévision. On peut donc imaginer qu'il serve aussi à subventionner un abonnement, ici au câble, là à l'ADSL ou au satellite. » Avec la décision de constituer un bouquet satellite gratuit pour l'achèvement de la couverture numérique, on peut désormais penser qu'il risque d'avoir vocation à financer la fourniture et l'installation d'équipements satellitaires en zones isolées pour des personnes dégrevées de la redevance. Il y a là des coûts envisageables très supérieurs à ceux d'un adaptateur.

Or, le projet de loi ne traite aucunement du barème des aides qu'apportera le fonds. Il énonce juste que « cette aide est modulée en fonction des capacités contributives des bénéficiaires ». L'un des interlocuteurs de la Délégation a exposé que le Fonds d'accompagnement du numérique avait « vocation à être encore abondé, en particulier, si elles le souhaitent, par les contributions des collectivités locales ». Le rapporteur n'est pas de cet avis : il serait injuste que la base soit si chiche que, pour pouvoir garantir à leurs administrés la continuité du service d'accès à la télévision, les collectivités locales les plus rurales, les plus isolées et souvent les plus pauvres, soient obligées, contrairement aux autres, de prévoir des aides complémentaires, eu égard au prix élevé du passage au numérique pour leurs habitants, notamment lorsqu'ils devront s'équiper d'une parabole.

D.- DE NOUVEAUX BOULEVERSEMENTS ANNONCÉS

1. La 6e conférence régionale des radiocommunications et ses résultats

La thématique de la couverture du territoire en services de télévision ne s'arrête pas au seul calendrier de la TNT. La 6e conférence régionale des radiocommunications organisée par l'Union internationale des télécommunications (UIT) et qui s'est tenue du 15 mai au 16 juin 2006, est prometteuse de nouveaux bouleversements.

Cette conférence a réuni 119 pays de l'Europe géographique, du Moyen-Orient et de l'Afrique, pour remettre à plat le partage des fréquences utilisées pour la télévision à partir de la date d'arrêt de la diffusion analogique.

En effet, les fréquences ne s'arrêtent pas aux frontières. Pour une utilisation optimale, lorsqu'un pays planifie ses fréquences, il faut qu'elles s'emboîtent avec celles des pays voisins ; mais il faut ensuite que le dispositif ainsi mis en place s'emboîte aussi avec les voisins des pays voisins. Compte tenu de l'ampleur de la zone couverte, le puzzle à assembler comportait 78 000 pièces.

Cette conférence avait un caractère exceptionnel : le dispositif qu'elle mettait à plat, et qui est le dispositif actuel, avait été mis en place en 1961 lors de la conférence de Stockholm, pour préparer l'arrivée de la télévision analogique hertzienne en couleur.

La conférence devait donc travailler sur les bandes de fréquences 174-230 MHz, qui est une bande VHF (bande III) (et utilisée en France principalement par Canal +), et 470-862 MHz, bandes UHF dites aussi bandes IV et V (utilisées pour les autres chaînes de télévision analogique et pour les nouvelles chaînes de la TNT). Dans l'ensemble des pays, ces bandes sont réservées, de par la qualité de propagation et de solidité du signal, à la télévision.

La France, comme les autres pays, espérait de cette conférence un solide accroissement du potentiel hertzien utilisable, sous l'effet de deux facteurs, d'une part la réduction de l'espace de spectre hertzien nécessaire pour faire passer une chaîne numérique par rapport à une chaîne analogique, et de l'autre la rationalisation du spectre à l'échelle continentale, notamment aux frontières, qui augmenterait la gamme de spectre utilisable.

Comme le ministre délégué à l'industrie, M. François Loos, l'a exposé à la Délégation, l'objectif principal de la France, lors de cette conférence, était d'obtenir un maximum de fréquences disponibles sur tout le territoire. « La délégation française, conduite par l'Agence nationale des fréquences, a pleinement atteint cet objectif : elle a ainsi obtenu en UHF l'équivalent de huit multiplex, c'est-à-dire 48 chaînes numériques, sur la quasi-totalité du territoire, qui seront toutes utilisables lorsque toute la diffusion analogique sera arrêtée. Ce chiffre est à comparer avec la situation actuelle où seulement trois chaînes analogiques couvrent toute la France. S'ajoutent à ces huit multiplex un multiplex national en VHF pour la télévision numérique et deux pour la radio numérique. »

Plus précisément, la nouvelle ressource est la suivante. En UHF, sept « couches » de fréquences, permettant chacune de faire passer six chaînes de télévision numérique (à la norme dite DVB-T), ont été obtenues pour l'ensemble du territoire. Six d'entre elles sont configurées pour la réception par des postes de télévision fixes avec une antenne râteau extérieure (configuration dite CPR1), à l'exception de la partie nord-est de la France, où leur configuration, plus exigeante à l'instar des pays riverains, permet aussi la réception sur récepteur mobile avec antenne extérieure (configuration CPR2). La septième est d'emblée configurée pour la réception sur mobile (CPR2).

Une huitième couche, également configurée pour la réception sur mobile (CPR2), couvre l'ensemble du territoire sauf le nord-est.

Sur les six couches CPR1, cinq sont organisées pour des diffuseurs nationaux ; une l'est pour des diffuseurs locaux ou régionaux.

La couche CPR2 (pour récepteurs mobiles) complète est organisée pour des diffuseurs nationaux ; la couche CPR2 incomplète est organisée pour des diffuseurs locaux ou régionaux.

Par ailleurs, dans le sud-ouest du pays, les conditions ont permis de dégager une neuvième, voire une dixième couche, chacune pour six multiplex.

En VHF, une couche complète, représentant un multiplex de sept chaînes, a pu être dégagée. Cette couche permettra la diffusion sur mobile en intérieur (configuration dite CPR3) et non seulement en extérieur comme les couches UHF ; elle permettra aussi de faire passer, si nécessaire, la nouvelle télévision sur mobile en mode diffusion à la norme DVB-H, norme dérivée de la norme DVB-T, et qui semble aujourd'hui s'imposer en Europe, ou encore des communications radio avec capacité de réception mobile en intérieur (configuration dite CPR5). S'y ajoutent trois couches radio, l'une réservée aux armées, les deux autres pour les émissions radio numérique civiles (norme dite T-DAB).

Le présent rapport comporte, en annexe, les cartes, établies par l'Agence nationale des fréquences, des couches de fréquences obtenues par la France, avec leurs caractéristiques.

Au bout du compte, le territoire national sera pourvu de 55 canaux nationaux de diffusion audiovisuelle, dont 12 pour la télévision sur mobile, répartis en 43 canaux organisés pour la diffusion nationale et 12 pour la diffusion régionale, ou encore (mais ce n'est pas la même répartition) 43 pour la diffusion sur poste fixe et 12 sur mobile. Le dispositif de diffusion régionale se détaille entre 6 canaux pour diffusion fixe et 6 pour diffusion sur mobile.

Dans les régions du nord-est, la situation est moins favorable. Elle offre cependant 48 canaux de télévision, dont six canaux UHF organisés selon un découpage régional. Le fait que les canaux UHF soient tous au standard CPR2 donne une certaine souplesse pour développer la télévision sur mobile au-delà des 6 canaux qui seraient la norme si les standards avaient été les mêmes que dans le reste du pays : les 6 canaux manquants pourront être répartis entre télévision fixe et télévision mobile.

Enfin, les régions du sud-ouest accèdent à 61, voire 67 canaux, tandis que les zones littorales, ainsi que celles en contact avec l'Espagne et l'Italie, reçoivent encore une troisième couche radio civile supplémentaire, voire une quatrième pour le sud et la Corse.

Il faut ajouter que la conférence a aussi traité de La Réunion et de Mayotte, qui font partie de la région. Les deux îles ont obtenu, comme la métropole, huit couches en UHF et, en VHF, une couche DVT-B et deux couches radio T-DAB.

En revanche, la conférence n'a pas traité des autres collectivités d'outre-mer, qui n'étaient pas dans sa zone de compétence.

2. Des perspectives remarquables qui ouvrent le dossier du dividende numérique

Cette situation est remarquable, notamment dans les zones nord-est : la ressource y est multipliée par trois. Or, il s'agit là d'une situation de départ. En effet, le résultat est celui de la seule planification aux frontières. Selon le compte rendu de la conférence publié par l'Agence des fréquences, les procédures de révision des accords existants devraient permettre « d'ajouter ultérieurement les éléments manquants de la huitième couche en métropole, moyennant certaines contraintes que, par manque de temps, il aurait été impossible de préciser pendant la durée de la Conférence. » De la même façon, « « d'autres couches pourront de cette façon être envisagées loin des frontières. » Plus précisément, il est envisagé qu'en moyenne, en zone non frontalière, il soit possible de créer au moins le double du nombre de multiplex obtenus près des frontières.

De plus, ce nombre de canaux s'entend aussi à la norme actuelle de la TNT, c'est-à-dire la norme MPEG 2. Mais les nouvelles normes permettent des compressions plus élevées encore, et donc le passage, à la définition actuelle de la qualité d'image, d'encore plus de chaînes sur le multiplex. Ainsi la norme MPEG 4, qui sera la norme pour la diffusion des chaînes payantes de la TNT, permet de faire passer deux à trois fois plus de chaînes par multiplex, autrement dit entre 12 et 18 au lieu de 6. Inversement, certains usages (réception sur mobile, réception par une antenne intérieure) sont plus consommateurs de fréquences que la réception par antenne extérieure.

Selon certaines sources, c'est à 20 multiplex qu'il faudrait évaluer la ressource hertzienne future, soit de l'ordre de 120 programmes audiovisuels qui pourront être diffusés par voie hertzienne au lieu des 6 d'avant la TNT.

En tout état de cause, la question de l'utilisation du « dividende numérique », fruit tant d'une meilleure gestion collective des fréquences que des progrès technologiques, se trouve ainsi clairement posée. Les idées ne manquent pas.

La première de ces idées est constituée par la télévision sur les téléphones mobiles. Aujourd'hui, dans ce domaine, pour reprendre les propos du ministre délégué à l'industrie, « la France est l'un des marchés les plus avancés d'Europe, avec plus de 93 % de la population couverte, des dizaines de chaînes déjà diffusées, plus de 2 millions de Français déjà équipés d'un mobile permettant de recevoir la télévision, dont près de 500 000 clients actifs. » La France occupe le troisième rang mondial et le premier en Europe, avec 10 millions d'utilisateurs réguliers.

Cependant, telle qu'elle est aujourd'hui mise en œuvre par les opérateurs de télécommunications, la télévision sur mobile fonctionne sur le modèle « point à point », c'est-à-dire comme une communication téléphonique. L'idée est de remplacer le mode « communication », très gourmand en bande passante, c'est-à-dire espace hertzien, par un mode « diffusion » qui correspond à celui de la télévision traditionnelle, et qui est beaucoup plus rationnel en termes d'utilisation du spectre, notamment pour les chaînes à forte audience.

Quatre expérimentations de diffusion terrestre de télévision mobile ont eu lieu à Paris cet été. « Le Gouvernement, a exposé le ministre, est très attentif au retour d'expérience industriel, en ce qui concerne tant la qualité des différentes technologies qui sont utilisées que les usages observés et les modèles économiques développés. » Ces expériences ont utilisé la norme DVB-H, et des canaux de la bande UHF pour trois d'entre elles, et la bande VHF pour la quatrième.

Aux termes des propos du ministre délégué à l'industrie, pour permettre à la France de garder une longueur d'avance dans le développement de ces technologies, l'Agence pour l'innovation industrielle « proposera à ses partenaires européens que chaque État membre se dote d'au moins un réseau de télévision mobile selon la norme DVB-H, qui est une évolution de la norme DVB-T utilisée par la TNT. À travers un réseau « multi-ville », correspondant à un septième multiplex (« R7 » ou « M7 ») en cours de planification par le CSA, le lancement commercial d'un réseau de télévision mobile en DVB-H pourrait être effectif dans 15 grandes agglomérations françaises dès 2007 ».

Une autre idée d'utilisation du dividende numérique est la télévision haute-définition (TVHD). La télévision analogique propose une définition d'image dite entrelacée de 720 pixels de large par 576 pixels de haut (414 720 pixels). L'entrelacement signifie qu'une ligne sur deux seulement est rafraîchie à chaque balayage de l'image. Cette définition est tout à fait suffisante pour les écrans de moins de 1 mètre de diagonale. Néanmoins, avec le développement du format 16/9 et la commercialisation de grands écrans plasma et LCD, dont la technologie permet d'atteindre une diagonale de plusieurs mètres, il faut augmenter la définition de l'image pour garder un rendu satisfaisant. Le format HD est né de cette constatation.

Il y a deux normes de TVHD. La norme Full HD propose une définition entrelacée (une ligne rafraîchie sur deux à chaque balayage) de 1080 pixels de haut par 1920 pixels de large, soit plus de 2 millions de pixels, cinq fois plus que les standards actuels. La norme HD Ready offre une définition moins exigeante de 720 pixels de haut par 1280 pixels de large (921 600 pixels), mais avec un rafraîchissement complet des lignes, ce qui en fait un standard proche du précédent.

Ces définitions consomment évidemment beaucoup plus d'espace sur la fréquence que la définition standard. On considère que dans un multiplex où l'on peut faire passer 6 chaînes en définition standard, on ne peut en faire passer que 2 en TVHD. Le dividende numérique est ainsi bien vite préempté, même si les dernières technologies de compression (MPEG4) permettent de réduire l'espace nécessaire, et si l'on peut penser que des progrès sont encore à venir.

Cet été, des chaînes de télévision ont reçu l'autorisation du CSA d'expérimenter à Paris, Lyon et Marseille la télévision haute définition sur le réseau TNT. Il s'agissait d'une première mondiale pour une diffusion d'événements en direct. Comme on pourrait le penser, les images sont d'une qualité exceptionnelle par rapport aux normes actuelles.

Selon le ministre de l'industrie, un multiplex (« R5 ») actuellement laissé vacant par la TNT « pourrait être mis à profit afin de lancer commercialement une offre de télévision numérique terrestre haute définition sur tout le territoire couvert par la TNT, dès 2007 ».

Le volontarisme des pouvoirs publics dans ce domaine s'explique, selon le ministre délégué à l'industrie, par le fait que « les entreprises françaises maîtrisent toutes les technologies, à l'exception peut-être des téléviseurs haute définition. Les caméras, les régies, les encodeurs, les diffuseurs, les décodeurs, les terminaux de réception mobile, la création de nouveaux programmes, toutes ces technologies sont maîtrisées par des entreprises françaises, petites ou grandes, mais toutes innovantes, qui créent de nouveaux marchés, de la croissance et de l'emploi. » Donner libre champ au développement de leurs projets, c'est concourir à leur expansion et au développement de la place des technologies françaises dans ce domaine de haute compétence en expansion.

3. Quel partage du dividende numérique ?

On s'aperçoit cependant que, comme M. François Rancy l'a exposé à la Délégation, « le déploiement actuel de la TNT est une façon de prendre le dividende numérique. Faire de la télévision vers les mobiles en est aussi une, qui profite à la télévision. Car la télévision vers les mobiles reste de la télévision numérique ». Bref, les innovations en cours préemptent le dividende numérique aux dépens d'autres utilisations possibles ; c'est déjà deux multiplex qui leur sont réservés par le CSA.

Or, le caractère exclusif de cette préemption paraît contestable.

On a vu plus haut que, dans le spectre actuel des fréquences qui lui sont attribuées, la téléphonie mobile, celle qui va de point à point, pourrait bien ne plus pouvoir couvrir la totalité du territoire. Or, au contraire de la télévision, même sur mobile, la téléphonie n'est pas seulement une distraction. La téléphonie mobile 3G permettra aussi à un médecin rural de recevoir des analyses, de consulter des dossiers, aux pompiers de recevoir des images d'un sinistre de la part de celui-là même qui le signale...

Face à des enjeux qui sont des enjeux de santé et de sécurité publique, il serait paradoxal que, dans les ex-zones blanches, on puisse recevoir la télévision sur portable, celle-ci étant diffusée sur la bande UHF, mais pas passer une communication point par point en 3G, celle-ci passant par une bande de fréquence élevée nécessitant plus de relais qu'il n'en a été installé pour permettre la couverture GSM.

Dès lors, on comprend mieux la légitimité de la demande des territoires ruraux, évoquée dans la partie consacrée à l'achèvement de la téléphonie mobile, d'accéder pour la téléphonie mobile à des fréquences confortables permettant aux communications sur portable de passer sur l'ensemble des territoires, de mieux porter dans les bâtiments, tout en répliquant les progrès croissants des services offerts.

Il convient donc qu'une part du dividende numérique, qu'il ne revient pas ici au rapporteur de fixer, revienne aux dispositifs de communication, et notamment de téléphonie mobile.

Cette proposition n'a du reste rien d'une novation : lors de son audition par la Délégation, le directeur général de l'Agence nationale des fréquences, M. François Rancy, a exposé qu'un groupe rassemblant les opérateurs et réuni sous la présidence de l'Agence avait élaboré deux scénarios d'utilisation du futur dividende numérique, « qui ont été entérinés par le conseil d'administration de l'Agence. Le premier est un scénario d'enrichissement des services audiovisuels, notamment avec la téléphonie vers les mobiles, qui préempteraient donc l'intégralité du dividende numérique ; le second est un scénario de cohabitation entre l'audiovisuel et les télécommunications, au sein duquel une partie, qu'on n'a pas encore spécifiée, de la bande actuellement attribuée à la télévision serait réservée aux services mobiles ».

Dans ce cas, le calendrier d'attribution est presque fixé, a exposé le directeur général : « cela ne relève toutefois pas de la prochaine conférence régionale, qui ne s'intéressera qu'à la radiodiffusion, mais de conférences ultérieures ; à la conférence mondiale de 2007, on pourra si nécessaire faire état d'un besoin de fréquences pour les mobiles ; le sujet pourra alors être inscrit à l'ordre du jour de la conférence de 2010, qui pourra identifier une partie de la bande réservée à la télévision pour y faire passer de la téléphonie mobile. Il faudra alors procéder à une harmonisation européenne, replanifier la bande pour la télévision et rebâtir tous les puzzles, ce qui pourra intervenir à l'horizon 2015 ».

Le développement de la télévision sur mobile pose aussi la question de la convergence entre opérateurs traditionnels de télévision, qui sont à la fois éditeurs et distributeurs de leurs programmes, et les opérateurs de télécommunications.

La téléphonie 3G amène déjà les opérateurs de télécommunications à entrer dans le domaine de l'édition audiovisuelle.

En effet, l'ensemble des études qu'ils ont pu conduire leur montre que les centres d'intérêt du téléspectateur sur mobile, qui regarde seul son écran, parfois entre deux tâches, ne sont pas les mêmes que ceux du téléspectateur sur poste fixe, qui s'installe devant la télévision, éventuellement entouré de ses proches ou de sa famille. Les programmes doivent notamment être plus courts et adaptés à un aussi petit écran.

De ce fait, pour rentabiliser leurs investissements, les opérateurs sont amenés soit à faire pression sur les éditeurs traditionnels pour qu'ils élaborent de nouveaux produits adaptés à la demande de leur clientèle, soit à produire eux-mêmes de tels programmes, et ainsi à devenir éditeurs. L'annonce récente, le 7 novembre 2006, par France Télécom de la création d'une filiale chargée d'investir dans les droits cinématographiques français et européens, tant en coproduction qu'en achat de catalogues de droits, est un signe tangible de cette tendance. Cette structure viserait à coproduire 10 à 15 œuvres françaises et européennes par an.

Le projet de loi déposé par le Gouvernement ne prenait clairement pas en compte cette évolution puisqu'il refusait d'attribuer aux opérateurs de téléphonie mobile des fréquences de diffusion audiovisuelle. Il prévoyait en effet que l'attribution des fréquences destinées à la télévision mobile se ferait selon la procédure prévue à l'article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986, qui précise (paragraphe II) : « Les déclarations de candidature sont présentées par les éditeurs de services constitués sous forme de société commerciale ». Le dernier paragraphe de l'article 9 ne mentionnait l'attribution de fréquences numériques de télévision personnelle à des distributeurs (donc le cas échéant à des opérateurs mobiles) que pour renvoyer cette question à un rapport du Gouvernement au Parlement.

Le Sénat a fort justement modifié en profondeur ces dispositions. À l'article 9, il a adopté un amendement permettant que l'attribution des fréquences du dividende numérique destinées à la télévision mobile privilégie non la reprise des services existants, mais la promotion des services les plus adaptés à la télévision mobile personnelle.

En contrepartie, à l'article 10, il a introduit pour les distributeurs de services l'interdiction de refuser à un éditeur de services diffusant en clair de le diffuser dans des conditions de marché, et pour les éditeurs diffusant en clair l'interdiction symétrique de refuser à un distributeur de commercialiser ses programmes dans des conditions de marché. Cette introduction, pour la télévision sur mobile, du principe « must carry, must deliver » venant après son introduction pour la diffusion satellitaire, est une saine décision.

Seule reste désormais hors de ce principe, la diffusion des programmes hertziens en clair par l'ADSL. Il faudra travailler à l'y intégrer.

La décision du Sénat est d'autant plus bienvenue qu'il ne faut pas sous-estimer, tôt ou tard, les capacités de contournement par les opérateurs télécom d'une éventuelle interdiction d'accès aux fréquences UHF. Un projet de télévision sur mobile, conduit par les sociétés Alcatel, Eutelsat et SES Astra, a entrepris d'exploiter la bande de fréquences S, c'est-à-dire celle des 2,2 GHz. La portée de cette fréquence à partir d'antennes terrestres étant médiocre, le signal ne sera relayé qu'en ville par des antennes terrestres ; sur le reste du territoire, les téléphones recevront directement le signal depuis le satellite. Ainsi, le projet assurera aux services de télévision mobile une couverture universelle en même temps qu'une réception à l'intérieur des bâtiments. Le satellite dénommé W2A, sera mis en orbite début 2009. Il est prévu que le déploiement du réseau terrestre associé à cette solution puisse débuter dès la fin 2007. L'Agence de l'innovation industrielle soutient ce projet, qui fédère toute une démarche d'innovation industrielle : la norme utilisée est une évolution adaptée à la bande S du standard DVB-H, des partenaires élaborent des relais, des terminaux spécifiques...

Par ailleurs, les projets actuels de réseaux de fibre optique amèneront aussi les opérateurs à développer des stratégies de capacité d'édition pour accroître le contenu à faire passer par ces réseaux. On est là hors de la gestion de l'allocation de fréquences. Cependant, on voit bien qu'on s'oriente vers des modes de fonctionnement où le même contenu peut emprunter des voies différentes : fréquences hertziennes réservées à la télévision par diffusion, utilisées pour la radio ou pour les télécommunications, et technologies filaires, câble, ADSL et bientôt fibre optique. Dès lors, on n'est sans doute qu'au début d'une évolution en profondeur des fonctions d'éditeur, de distributeur et d'opérateur télécom. C'est ainsi qu'aujourd'hui le Conseil d'État lui-même s'interroge sur l'intérêt qu'il y aurait à fusionner dans un même code les textes relatifs à l'audiovisuel et le code des postes et des communications électroniques.

Il faut aussi rappeler que les usagers des fréquences ne sont pas les seuls diffuseurs de programmes audiovisuels et opérateurs de télécommunications.

Comme le directeur général de l'Agence national des fréquences, M. François Rancy, l'a exposé à la Délégation, « l'ARCEP et le CSA ne sont que deux des neuf principaux utilisateurs de fréquences ; parmi ces neuf, le ministère de la défense est le premier utilisateur ; s'y ajoutent ensuite le ministère de l'intérieur, pour la police, les pompiers et le SAMU, le ministère de la recherche, notamment la radioastronomie, le ministère des transports pour ce qui concerne la météorologie, les phares et balises et le contrôle fluvial, le ministère en charge de l'espace pour le CNES et toutes les applications spatiales, et enfin l'aviation civile. »

On peut penser que ces neuf utilisateurs peuvent tous souhaiter profiter d'une partie du dividende numérique, pour améliorer leur réseau de communications, y ajouter l'image là où il n'y avait que la voix, ou encore même les protéger. Protéger une fréquence consomme de la fréquence ; mais qui dira que, parmi les 30 000 réseaux, locaux ou nationaux, certains ne doivent pas être mieux sécurisés, fut-ce au prix d'une petite partie du dividende numérique ? Parmi les réseaux les plus importants utilisant les fréquences, il y a celui de la SNCF et celui d'EDF. Dans ce dernier cas, les fréquences utilisées servent aussi à la surveillance des centrales nucléaires. Rendre celle-ci plus sûre grâce au dividende numérique peut bien entrer en concurrence avec la TVHD.

L'apparition d'un important dividende numérique comme le développement du besoin en fréquences amène enfin à s'interroger sur les modalités de la régulation des attributions de fréquences.

Aujourd'hui, celle-ci est assurée auprès des opérateurs privés par deux instances ; l'ARCEP assure la régulation concurrentielle de tous les réseaux de communications électroniques, y compris le câble et le téléphone mobile ; le CSA est responsable des contenus audiovisuels, sur tous supports de diffusion, et notamment de la télévision hertzienne.

Leurs méthodes sont différentes. On pourrait dire que l'ARCEP loue des fréquences, tandis que le CSA les alloue. L'ARCEP accorde des autorisations d'utiliser un faisceau en se concentrant sur la gestion du caractère concurrentiel du marché ; tout le reste est déclaratif. Au contraire, le CSA se concentre sur les contenus. Quand le CSA donne une autorisation de fréquence à une chaîne, l'usage de cette fréquence est donné comme un sous-produit de l'autorisation : elle doit servir à diffuser le contenu ainsi autorisé.

Or, avec le développement de la numérisation, des services qui ne sont pas des chaînes de télévision en mode diffusion pourraient souhaiter être diffusés sur les ondes. On pense notamment aux services de télévision à la demande. Le dividende numérique peut offrir des opportunités pour cette diffusion. Les questions sont alors de qualifier ces services, de savoir quel principe, gratuité ou location, il faut retenir pour leur attribuer une fréquence et enfin de déterminer qui doit effectuer ce travail d'allocation.

Sur le premier point, une directive européenne est en cours d'élaboration. La Commission, selon une ligne qui ne surprendra pas, y envisage que l'attribution des fréquences se fasse dans la transparence et le respect de la concurrence. Dans ces conditions, il ne faut pas sous-estimer le risque de voir le dispositif français de contrôle et de protection des contenus remis en question. Les fréquences UHF rejoindront le droit commun, et leur allocation sera payante, et faite au mieux offrant. Dans ce cas, l'allocation gratuite en fonction du contenu, telle qu'opérée par le CSA, devrait disparaître.

Le rapporteur estime cependant qu'un certain nombre de préoccupations régaliennes et de service public doivent pouvoir prévaloir. Elles concernent d'abord la politique d'aménagement du territoire. Un fort niveau de concurrence ne doit pas aboutir au sous-équipement, ou à l'absence d'équipement, de certains territoires. La Commission a déjà accepté ce raisonnement pour la desserte des zones blanches de téléphonie mobile. Des considérations d'équité dans la desserte des territoires par les services doivent pouvoir prévaloir sur toute autre considération. Les États doivent pouvoir réserver des tranches de fréquences à ces fins. L'attribution de fréquences du dividende numérique au téléphone mobile, voire au WiMax ou à de nouveaux services doit rester possible. La convergence numérique permet des conditions de desserte en très haut débit, en télévision numérique ou à la demande inenvisageables il y a encore cinq ans. Il est du devoir de l'État d'intégrer cette préoccupation dans la gestion et l'affectation des fréquences.

Il serait également déraisonnable que l'État abandonne toute sélection par le contenu. Aujourd'hui, les chaînes, et notamment les grandes chaînes analogiques nationales, ont des cahiers des charges. Ceux-ci concernent d'abord l'expression des partis politiques, leurs conditions d'accès à l'antenne, la limitation l'équilibre mais aussi la garantie minimum d'accès hors de toute considération commerciale. Il s'agit là d'exercice pur et simple de la démocratie. Ils concernent ensuite la connaissance : des chaînes ont obtenu le droit d'émettre de par la qualité scientifique des programmes proposés. Ils concernent enfin la production audiovisuelle française : il y a des quotas minima d'œuvres originales d'expression française.

La multiplication des canaux ne doit pas être la porte ouverte à la multiplication des réglementations. Cependant, il paraît logique que des canaux continuent d'être réservés à des profils de diffusion. On peut même envisager d'élargir le spectre de ces profils : des chaînes paneuropéennes, des chaînes régionales transfrontalières apparaissent comme des expériences à ouvrir.

Bref, une réflexion sur le mode d'attribution des fréquences induit par la numérisation et la multiplication des canaux et services qu'elle permet doit s'ouvrir. Elle doit faire l'objet d'un débat public.

La numérisation amène donc, d'une part, à une offre nouvelle de fréquences, d'autre part, à l'apparition de nouveaux services dont il est difficile de considérer qu'ils devront pouvoir user gratuitement des fréquences dégagées.

Plus techniquement, parallèlement à l'extinction du numérique, c'est un travail considérable d'analyse économique, de qualification des services nouveaux proposés, de détermination des modes d'attribution des fréquences, et en particulier sur l'attention donnée à la protection des contenus, actuellement assurée par le CSA, de réflexion sur les meilleures structures administratives pour gérer le nouveau dispositif, qui attend les instances actuelles de régulation.

La question se pose alors du rapprochement non seulement de l'ARCEP et du CSA, mais aussi de l'Agence nationale des fréquences.

Au nom du Premier ministre, c'est en effet cette Agence, placée sous la tutelle du ministre de l'industrie, qui gère les fréquences et affecte à chacun des neuf utilisateurs les fréquences dont il a besoin.

Plusieurs voies peuvent être explorées. L'Agence nationale des fréquences pourrait se voir confier un rôle plus actif dans l'attribution des fréquences. On pourrait aussi penser à une fusion des trois organismes. Le Royaume-Uni, avec Ofcom, et les États-Unis, avec la FCC (Federal Communications Commission), ont fusionné la fonction de gestion du spectre avec celle de réglementation de l'audiovisuel. Ofcom comporte à cette fin à la fois un conseil général et un conseil des contenus.

On pourrait enfin penser à une articulation plus forte entre les trois organismes actuels, l'Agence nationale des fréquences voyant croître son rôle de gestion active de la répartition des fréquences entre catégories de soumissionnaires et selon des principes différents.

Le projet de loi déjà cité effectue un pas dans cette voie d'une gestion active puisqu'il expose que « afin d'arrêter une stratégie sur l'utilisation des fréquences après l'extinction de la diffusion analogique, toute fréquence libérée par l'arrêt d'une diffusion analogique doit faire l'objet d'une réaffectation aux administrations, au CSA ou à l'autorité de régulation des communications électroniques et des postes, par le Premier ministre ».

À l'occasion de l'examen du projet de loi, M. Paul Champsaur a fait observer « la dimension éminemment politique des arbitrages relatifs aux fréquences en raison de leurs implications de société et de politique industrielle » et il a insisté sur « l'importance d'avoir une vision d'ensemble des fréquences » et « d'envisager leur gestion sur le long terme ». Prenant appui sur les constatations qu'il a pu faire concernant la situation future de la téléphonie mobile, le rapporteur ne peut qu'approuver ces propos.

On est là au début d'un chantier de très grande ampleur. La gestion des fréquences après l'extinction de l'analogique est un domaine auquel non seulement le Gouvernement mais aussi le législateur devra s'intéresser de près, et sans attendre : si l'on veut pouvoir formuler sereinement une vision française de la gestion du dividende numérique, et surtout lui permettre de s'insérer dans les textes européens, c'est maintenant qu'il faut commencer à travailler. Du reste, le colloque « convergence numérique, convergence juridique », organisé le 28 novembre 2006 par le Conseil d'État l'a bien montré, les termes du débat sont désormais sur la place publique. Par le présent rapport d'information, la Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire espère y apporter une contribution utile.

TRAVAUX DE LA DÉLÉGATION

I. - AUDITIONS DE SUIVI

 M. PAUL CHAMPSAUR, PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE RÉGULATION DES COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES ET DES POSTES ET MME GABRIELLE GAUTHEY, MEMBRE DE L'AUTORITÉ (mercredi 12 octobre 2005)

Le président Émile Blessig, rappelant que c'était la troisième fois que la Délégation recevait l'ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes), anciennement ART (Autorité de régulation des télécommunications), a observé que cette institutionnalisation d'un rendez-vous régulier avait sans doute deux origines. La première est l'intérêt continu de la Délégation pour l'équipement numérique du territoire : la progression de celui-ci a des conséquences considérables sur l'attractivité des territoires et les conditions de vie de leurs habitants. La deuxième est l'ampleur et la rapidité des évolutions dans ce domaine : la présentation faite l'an dernier par le président de l'ART renvoyait presque à la préhistoire du haut débit les analyses, les inquiétudes et les propositions formulées deux ans plus tôt par M.  Nicolas Forissier dans son rapport sur la fracture numérique, pour l'élaboration duquel la Délégation avait pourtant entendu l'ART. Cette présentation faisait apparaître que les enjeux majeurs en matière de haut débit se situaient désormais dans l'équipement des zones dites « grises », celles où seul l'opérateur historique était présent : quelle part de ces zones allait-il accepter d'ouvrir au haut débit, et à quel coût ? Comment les collectivités locales pouvaient peser en faveur de leur équipement ?

Le président Émile Blessig a alors exposé que, aujourd'hui, l'ampleur de la demande et la vitesse de la diffusion du haut débit amenait à s'interroger sur l'évolution de la réflexion, et donc de la stratégie, des opérateurs, notamment de France Télécom. En même temps apparaît un nouveau défi technologique pour la couverture du territoire, le haut débit mobile.

Il a conclu que le point que le président de l'ARCEP pourrait faire sur le développement des technologies numériques, leur diffusion dans les territoires et leur influence sur l'attractivité de ceux-ci sera très éclairant pour permettre à la Délégation, placée devant une situation sans cesse mouvante, de repérer les vrais enjeux et les vraies difficultés du moment pour l'équipement numérique du territoire.

M. Paul Champsaur, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, a d'abord fait le point de l'équipement de la France en accès à l'internet haut débit. À partir d'un taux d'équipement plutôt faible, l'accès au haut débit a connu, à partir de 2003, une croissance à une cadence élevée, supérieure à celles des pays voisins. La conséquence en est qu'aujourd'hui, la France est le mieux équipé des grands États d'Europe. Seuls la dépassent les États du Nord de l'Europe et ceux du Benelux, dont l'équipement a commencé plus tôt, au moyen des réseaux câblés ; dans une évolution remarquable, le taux d'équipement de la France se rapproche ainsi désormais de celui des États-Unis.

Cette évolution a deux causes : la première est le dégroupage, c'est-à-dire l'ouverture à la concurrence du marché de gros, opéré par l'ART ; il a permis aux fournisseurs d'accès internet de se rendre indépendants de France Télécom, qu'il s'agisse de technique ou de prix. La seconde a été la capacité de ces opérateurs à développer des stratégies efficaces et novatrices, y compris sur le plan technologique. Ces deux causes ont entraîné à la fois une très forte baisse des prix, qui sont aujourd'hui les plus bas d'Europe et parmi les plus bas du monde, et un très grand dynamisme de l'offre : en avance en termes de taux d'équipement, la France l'est aussi pour les services offerts, avec la téléphonie sur large bande ou encore la télévision par ADSL (ligne numérique dédiée asymétrique), et le développement d'un standard de fait, le triple play, c'est-à-dire la combinaison de l'accès à l'internet haut débit et de ces deux services nouveaux.

Cette évolution dynamique se poursuit : on assiste ainsi à une transformation massive des abonnements au bas débit en abonnements au haut débit, ce qui est aussi le signe d'une progression de l'équipement des Français en ordinateurs.

La concurrence n'est cependant pas présente sur l'ensemble des territoires. Elle se développe en effet à partir des zones les plus denses. Aujourd'hui, elle concerne 50 % de la population environ. Dans ces zones dégroupées, elle s'exerce à la fois sur les prix et sur la qualité de l'offre, c'est-à-dire sur le débit proposé : la télévision par ADSL, par exemple, nécessite un débit de six mégabits par seconde. Le développement de la concurrence a cependant aussi des conséquences sur les prix en zone non dégroupée : les tarifs à destination des particuliers de France Télécom, opérateur national, sont établis pour l'ensemble du territoire. Les habitants des zones non dégroupées profitent ainsi de tarifs calculés pour affronter la concurrence en zone dégroupée. En revanche, la concurrence n'a pas d'influence sur l'offre de services, c'est-à-dire sur la technologie et le débit offerts, en zone non dégroupée.

Le rythme d'expansion de la demande en zone dégroupée a aussi eu des répercussions sur la couverture du territoire en zone non dégroupée. Dans une optique où l'on pensait qu'une petite fraction des abonnés au téléphone souhaiterait accéder au haut débit, l'équipement à cette fin par France Télécom des centraux téléphoniques répartiteurs n'était rentable qu'en zone dense. Or, les opérateurs travaillent désormais sur une demande en haut débit, dans un avenir proche, de 50 % des abonnés environ. Dans cette optique l'équipement des petits centraux répartiteurs devient lui aussi rentable. Dès lors, l'opérateur historique, qui pensait n'équiper qu'une partie de ses centraux répartiteurs, a changé de stratégie : France Télécom aura équipé l'intégralité de ses centraux téléphoniques en haut débit d'ici la fin de l'an prochain.

En conséquence, aujourd'hui, 90 % environ des abonnés ont accès au haut débit par l'ADSL. À la fin 2006, seuls n'y auront pas accès les habitations situées trop loin du répartiteur, c'est-à-dire à plus de 5 km de celui-ci environ. On estime que seront concernés 3 % ou 4 % de la population. Si l'on veut raisonner plus en détail, il n'y a plus aujourd'hui que dans dix départements que moins de 70 % de la population a accès au haut débit par l'ADSL ; cette situation devrait avoir cessé à la fin de l'année. En 2006, la situation sera ainsi proche de celle de la téléphonie mobile en 2003, avec deux différences toutefois : d'une part la localisation des implantations non reliées sera très diffuse ; de l'autre leur situation sera due à une limite technologique, qu'il paraît peu vraisemblable de voir surmontée dans les prochaines années. Néanmoins, d'ici deux à trois ans, la France sera sans doute l'un des pays du monde les mieux équipés en accès au haut débit. La grande qualité du réseau téléphonique, dense, avec 12 000 répartiteurs, récent, avec des lignes d'excellente qualité, est le support de cette situation.

En revanche, la situation actuelle de la concurrence laisse subsister une difficulté. Si les enjeux en sont limités en matière de services aux particuliers, tel n'est pas le cas pour les services aux entreprises. Chaque entreprise est un marché particulier : selon qu'elle est en zone dégroupée ou non, les écarts entre les tarifs proposés peuvent être considérables. Ils sont difficiles à mesurer précisément. Mais on peut penser que, pour une prestation équivalente, ils peuvent aller jusqu'à 40 %.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a souligné l'importance, pour la stratégie d'équipement des collectivités locales, des propos ainsi tenus. Ils valident totalement une démarche comme celle menée en région Limousin, où, dans l'objectif d'une desserte maximum du territoire et de coûts de service aussi bas que possibles, l'ensemble des collectivités locales, alliées dans un organisme ad hoc, dénommé Dorsal, ont préféré sélectionner un opérateur chargé de construire, d'entretenir et d'exploiter un réseau intégré (fait de fibres optiques, de liaisons hertziennes, d'utilisation moyennant redevance d'installations du réseau téléphonique), à charge pour lui de traiter avec les fournisseurs de services, dont France Télécom, que de s'en remettre à l'opérateur historique.

Le président Émile Blessig a demandé comment se répartissaient sur le territoire zones dégroupées et non dégroupées.

M. Paul Champsaur a répondu que l'offre dégroupée était contrastée selon les territoires. Si dans neuf départements, de 75 % à 100 % de la population y ont accès, dans trente-six autres, c'est seulement au plus 25 % de la population. Il y a même neuf de ces départements où aucune offre n'est disponible, c'est-à-dire où il n'y a aucune concurrence.

M. Philippe Folliot a demandé si les écarts de tarifs pour les entreprises avaient pu être chiffrés précisément par l'ARCEP.

Mme Gabrielle Gauthey, membre de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, a répondu que des enquêtes brutes montraient pour elles en zone non dégroupée des surcoûts pour l'accès à l'ADSL allant jusqu'à 40 % ou 50 % par rapport aux tarifs pratiqués en zone dégroupée. Il faut cependant considérer ces chiffres comme des fourchettes hautes : les entreprises se situant hors zone de dégroupage présentent par définition des caractéristiques d'éloignement des répartiteurs plus difficiles que les autres, et l'offre dégroupée qui pourrait leur être faite devrait forcément elle aussi tenir compte de ces caractéristiques : elle serait plus élevée que les offres auxquelles on peut aujourd'hui comparer la prestation non dégroupée.

Elle a ajouté que l'introduction de la concurrence pour les services aux entreprises était plus difficile à développer que pour les services aux particuliers. Elle est d'abord beaucoup plus concentrée : les opérateurs sont moins nombreux. Ensuite, nombre d'entreprises peuvent présenter des conditions de localisation, à l'écart de la ville, loin du répartiteur, qui n'incitent pas forcément la concurrence à venir opérer. La position de l'opérateur historique est ainsi plus dominante dans le service aux entreprises que dans le service aux particuliers. Il y a donc là un champ d'action important pour les collectivités locales. Certaines d'entre elles ont du reste commencé à s'y intéresser.

M. Philippe Folliot a demandé quel était le nombre des PME qui n'avaient pas accès du tout au haut débit, même non dégroupé. Cette situation est très pénalisante. Dans le département du Tarn, c'est le cas de la filiale d'un grand groupe canadien : la maison mère ne comprend pas les difficultés de sa filiale à lui transmettre ses données.

M. Paul Champsaur a répondu que les ordres de grandeur étaient les mêmes pour les entreprises et pour les particuliers. La localisation des entreprises, dans des zones d'activités situées en périphérie des villes et donc, en général, loin des répartiteurs, a bien créé pour elles un handicap spécifique. Mais France Télécom a lancé pour le traiter un programme particulier de transformation en centraux répartiteurs des sous-répartiteurs qui desservent les zones d'activité, et d'équipement de ces nouveaux répartiteurs pour le haut débit. C'est la progression de ce programme qui explique que l'évolution du taux d'équipement en haut débit des entreprises soit comparable à celui des particuliers.

Les acteurs du secteur se satisferont-ils de cet effort de France Télécom ? Nombre de collectivités locales pensent qu'il faut aller plus loin. Il est probable qu'un débat sur la concurrence va se faire jour assez vite.

Mme Gabrielle Gauthey a précisé que, en moyenne, 10 % des PME n'avaient pas de possibilité d'accès au haut débit, soit de 7 % à 15 % selon les départements, et que 50 % environ n'avaient pas d'accès à la concurrence.

Le président Émile Blessig a demandé si l'on pouvait considérer que l'enjeu d'il y a deux ans, la généralisation de l'accès au haut débit, avait été remplacé aujourd'hui par la généralisation de la concurrence.

M. Paul Champsaur a répondu positivement. Il a cependant souligné que, même si la marge de progression était importante, il ne serait pas possible d'introduire la concurrence partout.

M. Philippe Folliot a demandé si l'ARCEP avait fixé des règles pour l'intervention des collectivités locales pour le développement du haut débit, ou si, à défaut, avec l'expérience de l'analyse, elle avait pu définir des bonnes pratiques pour cette intervention : il y a des cas où le réseau construit par le département doublonne celui financé par la commune.

Il a ensuite demandé si l'ARCEP procédait à des évaluations des projets et des réalisations des collectivités locales.

M. Paul Champsaur a répondu que l'ARCEP disposait d'un service collectivités et régulation des marchés haut débit. Ce service a un rôle d'expertise et de conseil aux collectivités locales. À cette fin, il a créé une organisation à la disposition des collectivités locales, le Comité des réseaux d'initiative publique (CRIP). Le CRIP est composé de deux groupes de travail, l'un ouvert exclusivement aux collectivités locales, l'autre composé de collectivités locales et d'opérateurs ; ces groupes se réunissent tous les deux mois.

L'objet de ce mécanisme, qui fonctionne, est de permettre aux collectivités locales d'échanger sur leurs expériences, d'exposer leurs projets, de présenter leurs difficultés et de rechercher des solutions

En revanche, l'ARCEP ne souhaite pas conduire d'évaluations de projets. La loi lui confère en effet un rôle de règlement des différends. Ceux-ci peuvent apparaître par exemple entre collectivités et opérateurs, une fois un dispositif mis en place par une collectivité. L'ARCEP ne peut donc pas être à la fois expert pour la mise en place de ces dispositifs et juge des différends qu'ils peuvent créer.

Mme Henriette Martinez a fait observer que les collectivités avaient le plus grand mal à maîtriser toutes les données nécessaires aux choix des solutions à adopter pour le montage des projets.

M. Laurent Laganier, chef du service collectivités et régulation des marchés haut débit de l'ARCEP, a répondu que les choix à faire n'apparaissaient pas toujours facilement, et qu'ils dépendaient étroitement des données du territoire : on ne saurait élaborer un modèle-type à l'échelon national.

En revanche, les échanges entre collectivités dans le cadre du CRIP ont fait progressivement apparaître des points de repère pour le choix d'un dispositif et le montage des projets ; les collectivités ne sont désormais plus dans l'inconnu.

Le président Émile Blessig a exposé que la construction de la cohérence de la desserte d'un territoire par les collectivités locales devait faire face à deux obstacles. D'une part, le plus souvent, les collectivités locales ne disposent pas de la capacité humaine d'ingénierie, nécessaire notamment pour choisir entre les diverses technologies disponibles, ou encore les imbriquer. Ensuite, chaque territoire fait l'objet à la fois d'une politique régionale, d'une politique départementale et d'une politique de chaque collectivité locale. L'appel à projet récemment lancé par la DATAR sera sans doute très utile dans la mesure où l'on invite les acteurs de chaque territoire à construire cette cohérence.

Mme Gabrielle Gauthey a fait valoir que le cœur de la difficulté était de construire une cohérence dans la durée, et ce à partir de technologies en évolution permanente.

La démarche de construction d'un dispositif peut cependant s'engager par une réflexion sur les lacunes des territoires non desservis ; on s'aperçoit alors que la principale lacune concerne la collecte elle-même. Or, si la collecte passe par des technologies, elle n'est pas elle-même une notion technologique. La détermination de son périmètre et de ses capacités précède le choix des technologies.

Le point de départ d'une action des collectivités locales peut donc être de construire plus d'offre de collecte sur le territoire. Ensuite seulement se posent les autres choix. On s'aperçoit par exemple que construire des boucles locales est toujours plus facile quand on a construit préalablement un système de collecte.

Mme Henriette Martinez s'est interrogée sur les moyens de construire une cohérence sur un territoire lorsque ni la région, ni le département n'ont souhaité se saisir du dossier. Dans ce cas, le statut des pays ne leur permettant pas d'agir, les schémas cohérents les plus étendus ne dépassent pas l'échelle des communautés de communes.

Mme Gabrielle Gauthey a répondu que, dans de tels cas, le risque d'aller vers des politiques de subventionnement durables était grand. Il s'avère au contraire que plus le territoire sur lequel la cohérence est organisée est grand, plus on peut envisager des durées de subventionnements brèves.

Cette cohérence peut être assurée par la mise en relation de plusieurs réalisations. Certains départements ont développé des projets globaux, laissant très peu de zones non couvertes, et articulés avec ceux de leurs principales métropoles ; la cohérence est plus grande que lorsque ceux-ci sont contournés. Réciproquement, une collectivité isolée pourra toujours mieux trouver ses solutions en s'insérant dans un cadre général.

Enfin, selon les politiques mises en œuvre, les évolutions possibles sont différentes : le dégroupage s'étend plus vite dans les territoires qui ont construit des réseaux que dans ceux qui se contentent de subventionner un opérateur.

M. Paul Champsaur a ajouté que les données actuelles de structure et d'équilibre du marché, y compris du marché de gros, permettaient sans doute une extension du dégroupage à 60 % des abonnés environ, contre 50% aujourd'hui.

On ne pourra pas faire venir la concurrence sur la totalité du territoire. Cependant, l'action des collectivités locales peut permettre d'accroître le dégroupage au-delà de la limite de 60 %. Dans l'hypothèse d'une généralisation de cette action sur le modèle des meilleurs projets actuels, les 75 % pourraient être atteints. Actuellement, les projets des collectivités locales qu'a recensés l'ARCEP devraient permettre l'ouverture au haut débit dégroupé de 800 à 900 répartiteurs supplémentaires.

M. Jean Launay l'interrogeant sur les moyens d'action des collectivités locales pour développer l'équipement des répartiteurs pour le haut débit, M. Paul Champsaur a répondu que France Télécom allait bien équiper tous ses répartiteurs pour le haut débit, sans exception. Cette décision laisse cependant matière à intervention des collectivités locales d'une part pour équiper les segments terminaux, et d'autre part, dans certains cas, les zones d'activité notamment, pour faire venir la concurrence au lieu de laisser le monopole de l'offre au seul opérateur historique.

Sur le premier point, M. Paul Champsaur a suggéré que les collectivités locales pourraient faire l'inventaire des zones que leur éloignement des répartiteurs prive, sans doute pour longtemps, de l'accès au haut débit, et qu'elles pourraient statuer sur leur équipement. Aujourd'hui, par exemple, la technologie WiMax, qui est une technologie hertzienne, permet d'apporter le haut débit dans ces zones, et ainsi d'assurer le complément de couverture que ne permet pas l'ADSL.

Le président Émile Blessig s'est alors enquis de l'achèvement de la couverture de territoire en téléphonie mobile. Exposant ensuite que, dans les territoires les moins denses ou les plus difficiles, le haut débit mobile serait sûrement, dans un proche avenir, un enjeu d'importance aussi grand que le haut débit fixe aujourd'hui, il a aussi souhaité savoir quelles étaient les perspectives d'équipement du territoire dans ce domaine.

M. Paul Champsaur a répondu que le programme d'achèvement de la couverture du territoire avait été divisé en deux phases. La première phase a défini 1200 sites à équiper, en collaboration entre les collectivités locales, chargées notamment d'installer les pylônes, et les opérateurs. Les débuts ont été laborieux. Aujourd'hui cependant, 70 conventions sont signées ; 250 sites seront ouverts fin 2005, et le mouvement s'accélère. La deuxième phase est entièrement financée par les opérateurs, en conséquence de l'obligation qui leur a été imposée à l'occasion du renouvellement de leur licence ; 900 sites supplémentaires à équiper ont été délimités ; 50 sites ont déjà été ouverts et la progression est très rapide.

L'ensemble du programme devrait donc être achevé à la date prévue, c'est-à-dire la fin de l'année 2007. Une seule réserve est à faire, et concerne la première phase ; il semble que, dans une dizaine de départements, représentant 70 sites environ, la réalisation du programme n'ait guère débuté. L'ARCEP n'a cependant aucun pouvoir pour intervenir.

L'équipement du territoire en téléphonie mobile de troisième génération fait quant à lui apparaître d'ores et déjà une difficulté pour les territoires : avec les fréquences qui lui ont été assignées en France, le système UMTS (universal mobile telecommunications system ou système de télécommunications mobiles universel) ne pourra pas couvrir l'ensemble du territoire. Le coût, pour couvrir les territoires peu denses ou accidentés, est trop élevé.

Pour assurer une bonne couverture des territoires en téléphonie mobile de troisième génération, il faudra donc rouvrir le dossier des fréquences. Pour des raisons historiques, les fréquences les plus performantes pour couvrir dans les meilleures conditions, techniques et économiques, la totalité du territoire, ont été attribuées à la télévision hertzienne. Cependant, la numérisation, c'est-à-dire le passage à la télévision numérique terrestre (TNT), va permettre de diviser par six le besoin de fréquences pour diffuser un nombre constant de chaînes. Avec l'arrêt définitif, en 2012, de la diffusion analogique de la télévision, se posera donc la question de l'affectation des fréquences ainsi libérées : les remploiera-t-on toutes pour diffuser d'autant plus de chaînes, ou en réservera-t-on une petite partie, 10 % environ, à la téléphonie mobile à haut débit ?

Certains pays, comme le Japon, ont déjà tranché, en faveur de la téléphonie mobile. En Europe et en France, la question n'a pas encore été abordée. Or, pour des questions de matériels et de frontières, la détermination de nouvelles fréquences pour la téléphonie mobile doit faire l'objet d'un aval de l'Union européenne et d'accords entre États. Si l'on veut s'assurer d'une couverture totale du territoire et d'un accès généralisé des Français à la téléphonie mobile à haut débit, le dossier doit désormais être ouvert.

 M. FRANÇOIS RANCY, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'AGENCE NATIONALE DES FRÉQUENCES (mercredi 25 janvier 2006)

Le président Émile Blessig a exposé que, depuis le début de la législature, la Délégation se préoccupait tout particulièrement des conditions de développement de la couverture numérique du territoire. Elle s'est beaucoup souciée de la constitution d'une fracture numérique en matière de téléphonie mobile et d'accès à l'Internet à haut débit. L'audition, en octobre dernier, de M. Paul Champsaur, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), a montré que cette dernière était en cours de résorption. En revanche, une nouvelle fracture pourrait apparaître entre territoires favorisés et territoires plus difficiles en matière de téléphonie mobile de troisième génération. Les fréquences hertziennes attribuées à la téléphonie mobile ne sont en effet pas les plus confortables ni les plus économiques ; elles demandent beaucoup plus d'installations que celles qui ont été attribuées à la télévision analogique.

La télévision numérique terrestre (TNT) va demander beaucoup moins d'espace sur le spectre hertzien pour faire passer le même nombre de chaînes qu'aujourd'hui. Au-delà de la forte augmentation du nombre de chaînes diffusées qu'elle permettra, la question se pose donc aussi d'autres usages de ce dividende numérique, en faveur de la téléphonie par exemple, pour diffuser de l'image et du son sur les mobiles.

L'Agence nationale des fréquences est chargée de tenir à jour 1e tableau d'attribution des bandes de fréquences, de surveiller leur emploi et de proposer au Premier ministre des répartitions de fréquences, avec l'objectif d'une utilisation optimale du spectre. C'est pourquoi, pour éclairer sa réflexion, la Délégation a souhaité que son directeur général puisse lui présenter l'état actuel de la réflexion relative au dividende numérique, l'informer sur les enjeux et les conséquences éventuelles de la conférence internationale sur les fréquences qui se tiendra en juin prochain, et enfin lui expliquer les rôles respectifs de l'Agence, du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et de l'ARCEP.

M. François Rancy, directeur général de l'Agence nationale des fréquences, a fait observer que les questions abordées étaient liées non seulement à la téléphonie, mais à toute la panoplie des usages numériques à destination du grand public, en particulier la télévision numérique terrestre. Aussi, quand on parle d'aménagement numérique du territoire et de fracture numérique, il faut prendre en compte l'ensemble des services.

L'ARCEP, le CSA et l'Agence ont des fonctions différentes. L'ARCEP est responsable des communications électroniques, en particulier du téléphone mobile, dont elle régule les marchés. Le CSA est responsable de la télévision. Au contraire de l'ARCEP, il se concentre sur les contenus. Quand le CSA donne une autorisation de fréquence à une chaîne, l'usage de cette fréquence est donné comme un sous-produit de l'autorisation : elle doit servir à diffuser le contenu ainsi autorisé. Au contraire, l'ARCEP donne des autorisations d'utiliser un faisceau ; tout le reste est déclaratif. L'ARCEP se concentre sur la gestion du caractère concurrentiel du marché.

Pour sa part, l'Agence s'occupe de la gestion des fréquences. L'ARCEP et le CSA ne sont que deux des neuf principaux utilisateurs de fréquences ; parmi ces neuf, le ministère de la défense est le premier utilisateur ; s'y ajoutent ensuite le ministère de l'intérieur, pour la police, les pompiers et le SAMU, le ministère de la recherche, notamment la radioastronomie, le ministère des transports pour ce qui concerne la météorologie, les phares et balises et le contrôle fluvial, le ministère en charge de l'espace pour le CNES et toutes les applications spatiales, et enfin l'aviation civile.

Le rôle de l'Agence est de faire en sorte que les besoins de chacun de ces utilisateurs soient satisfaits. L'organisation n'est d'ailleurs pas très différente dans la plupart des autres pays, même s'ils ne disposent pas tous d'une agence en tant que telle. Le spectre relève du domaine public des États ; lorsqu'il n'y a pas d'agence, ce sont les ministères des télécommunications ou de l'industrie qui sont chargés de sa gestion. Seuls le Royaume-Uni avec Offcom et les États-Unis avec la FCC (Federal Communications Commission), ont fusionné cette fonction avec celle de réglementation de l'audiovisuel.

L'Agence est en charge de tout ce qui relève du domaine régalien, au bénéfice des neuf affectataires de fréquences. Ainsi, elle représente la France dans les négociations internationales qui concernent le spectre. En effet ce dernier ne s'arrête évidemment pas aux frontières ; en outre, l'harmonisation internationale est facteur de progrès : le bond en avant du téléphone mobile à la norme GSM (Global System for Mobile Communications) a pour origine les réductions de coûts dues aux économies d'échelle induites par cette harmonisation. Le premier lieu de négociations est l'Union internationale des télécommunications, à Genève, qui remet à jour tous les trois ou quatre ans le règlement des radiocommunications, c'est-à-dire le livre des partages des fréquences entre États. Il y a aussi des conférences régionales des radiocommunications. Celle qui devrait s'achever le 15 juin 2006 est particulièrement importante puisqu'elle va planifier l'usage de la télévision numérique terrestre à partir de la date d'arrêt de la diffusion analogique. Il est prévu la réalisation de sept, peut-être huit, multiplex de cinq chaînes chacun. La conférence spécifiera l'usage des fréquences à utiliser par les télévisions pour les cinquante ans à venir, le précédent plan datant de 1951.

L'Agence traduit ensuite l'ensemble de ces décisions internationales d'harmonisation dans un tableau national de répartition des fréquences, qui permet à chacun des neuf affectataires d'accéder à une bande dans des conditions convenables.

Pour accompagner ces mouvements, elle dispose d'un fonds de réaménagement du spectre. Au total, depuis 1998, 100 millions d'euros ont transité par ce fonds, alimenté pour moitié par le budget de l'État et pour moitié par les remboursements de ceux qui ont bénéficié de ses avances : aujourd'hui opérateurs GSM, demain opérateurs de téléphonie de troisième génération (dite aussi téléphonie mobile 3G ou UMTS système universel de télécommunications mobiles) et de télévision numérique terrestre.

En revanche, le fonds d'accompagnement du numérique, créé il y a quelques semaines à l'initiative du Premier ministre, a exclusivement vocation à résoudre les problèmes particuliers des secteurs frontaliers, qui sont confrontés à une pénurie de fréquences. Le spectre y est divisé par deux et même par trois ou quatre en fonction du nombre de pays concernés. Pour les téléspectateurs, cette pénurie a toutefois pour contrepartie la réception des chaînes étrangères.

TDF et le CSA ont décidé de déployer la TNT tout en conservant la diffusion analogique. Aux chaînes analogiques existantes, on ajoute donc cinq multiplex numériques, soit au total 25 programmes. Or, la pénurie de fréquences aux frontières, où d'ailleurs on ne reçoit pas toujours les six chaînes analogiques, ne permet pas de procéder ainsi. Pour y faire arriver la TNT, il faut arrêter totalement la diffusion analogique. C'est pourquoi la carte de déploiement de la TNT par TDF prévoyait un déploiement très tardif dans ces zones, en particulier l'Alsace-Moselle. Pour éviter un tel décalage, il a été décidé de faire de l'Alsace-Moselle une région pilote du passage au numérique. Elle sera équipée dans les mêmes délais que les autres régions. Cependant, pour cela, il faut arrêter la diffusion analogique de façon anticipée. Les téléspectateurs n'y perdront rien, puisque les chaînes analogiques sont déjà sur la TNT. En revanche, cela suppose un équipement accéléré des foyers pour recevoir la TNT. C'est pour cela que le fonds d'accompagnement du numérique a été créé ; il est aujourd'hui doté de 15 millions d'euros et il a vocation à être encore abondé, en particulier, si elles le souhaitent, par les contributions des collectivités locales.

L'Agence nationale des fréquences est également chargée de coordonner l'implantation des stations radioélectriques. Elle doit protéger l'utilisation des fréquences contre les brouillages qui proviennent d'équipements fonctionnant hors du cadre de l'autorisation : équipements étrangers interdits en France car fonctionnant selon le tableau national de leur pays d'origine, ou autres. L'Agence poursuit par exemple ceux qui disposent de téléphones sans cordon, d'une portée de 20 à 30 km et fonctionnant sur la bande de l'aviation civile, avec tous les dangers que cela comporte. Elle joue donc un rôle de police des fréquences.

Enfin, elle contrôle la bonne utilisation du spectre, à partir d'une base de données perpétuellement alimentée par les contrôles.

M. Patrice Martin-Lalande a exposé que c'est en tant que rapporteur spécial des crédits de la mission « médias », qu'il espérait retirer de cette réunion des éléments de réponses à des questions qu'il se pose depuis un certain temps.

Dans le cadre de l'aménagement numérique du territoire, il y a trois séries de services pour lesquels certaines zones ne sont pas desservies : la TNT, l'Internet à haut débit et le téléphone mobile de nouvelle génération. Il a demandé si, compte tenu de ce qu'apporte la convergence numérique, il ne serait pas possible d'éviter de réaliser trois fois les investissements nécessaires pour couvrir ces zones, dont certaines sont les mêmes, et de tripler les frais de fonctionnement. Il a suggéré que ces zones soient desservies, selon les cas, pour les trois services, par la ou les nouvelles technologies les mieux adaptées à la situation, satellite, WiMax ou ADSL, et que les frais soient supportés par les consommateurs, les opérateurs, les collectivités locales, l'État. Cette solution permettrait une résorption rapide des zones d'ombre.

M. Philippe Folliot a souligné que ce sont les mêmes parties du territoire qui cumulent les handicaps et reçoivent en dernier les avancées technologiques. Il a ensuite considéré que, pour remédier de façon structurelle à cette dernière difficulté, on pourrait développer des offres liées, un opérateur ne pouvant se voir attribuer une zone rentable sans devoir remplir simultanément l'obligation de couvrir 100 % d'un territoire moins bien doté.

S'agissant de la TNT, il a demandé à qui, de TDF ou des collectivités locales, il était prévu de faire supporter le coût de l'équipement de la desserte des villages encaissés, qui bénéficient pour l'instant des relais secondaires de TDF. Si le fonds d'accompagnement du numérique est véritablement destiné à résorber la fracture numérique, ne pourrait-il pas être utilisé pour cela ?

M. François Rancy a répondu que les zones blanches de la téléphonie mobile risquaient en effet d'être aussi celles de la TNT et du haut débit. Faisant observer que, dans la mesure où leur résorption est onéreuse, aucun opérateur ne fera spontanément des investissements en infrastructures ne permettant de gagner que quelques abonnés, il a néanmoins reconnu qu'il était difficile de faire appel aux collectivités locales de ces zones, qui sont souvent peu fortunées. Pour la TNT, on dispose en revanche de l'option du satellite, qui permet de couvrir pratiquement la totalité du territoire, à l'exception de quelques vallées ; le Gouvernement et le CSA étudient sérieusement cette solution.

Il a ensuite exposé que l'appréciation d'offres spécifiques, telles que des offres liées, relevait de l'ARCEP, autorité indépendante à laquelle l'Agence ne pouvait rien imposer.

Rappelant qu'il avait été à l'origine de l'aménagement du code des collectivités territoriales pour permettre l'intervention des collectivités locales en matière d'équipement numérique, M. Patrice Martin-Lalande a fait observer que les communes avaient, dans ce cadre, la possibilité de se tourner vers le département et la région pour pouvoir faire engager, grâce à la solidarité, l'effort nécessaire.

M. François Rancy a souligné que les négociations qui avaient eu lieu avec les trois opérateurs GSM pour résorber les zones blanches produisaient en ce moment des effets solides et tangibles, et que les solutions retenues devaient pouvoir être appliquées à l'UMTS. En revanche, il en va différemment pour la TNT : il n'y a pas de concurrence pour l'acheminement d'un programme ; il ne peut donc pas y avoir de mutualisation.

M. Patrice Martin-Lalande s'est étonné qu'on exclue de la gamme de solutions l'utilisation de l'ADSL de nouvelle génération à 50 mégabits, qui permet tout à fait de faire passer la télévision. Dans le Loir-et-Cher, sur 168 000 abonnés, 2 013 seulement ne seraient pas desservis pour des raisons techniques. On pourrait donc diffuser beaucoup plus loin qu'avec le simple déploiement du réseau TNT. L'ADSL paraît aussi plus intéressante que le satellite dans la mesure où elle peut être utilisée à la fois pour l'Internet à haut débit, la télévision et la téléphonie sur protocole internet.

M. François Rancy a répondu que, au vu des nouveaux progrès technologiques enregistrés chaque année par l'ADSL et des efforts déployés par France Télécom, on pouvait espérer en effet que le haut débit serait à plus ou moins brève échéance disponible partout. L'ensemble des solutions techniques doit être utilisé.

Il a ensuite indiqué que le déploiement du réseau de la TNT s'arrêterait probablement à une couverture de 85 % de la population : poursuivre les investissements n'aurait pas grand sens quand on sait que, pour passer de 65 % à 85 %, il faut déjà passer de 115 à 500 émetteurs. Il y a actuellement 3 500 émetteurs pour la diffusion analogique et personne n'envisage d'aller jusque-là pour la TNT.

M. Philippe Folliot a demandé ce que deviendraient les 15 % restants en 2012, au moment de l'abandon de l'analogique.

M. François Rancy a répondu qu'ils seraient couverts par les autres technologies disponibles, le satellite, l'ADSL et le câble.

Il a ensuite précisé que dans l'esprit des pouvoirs publics, le fonds d'accompagnement du numérique était exclusivement destiné à accélérer le déploiement de la TNT et l'extinction de la diffusion analogique aux frontières. Il n'a pas pour objet d'aider l'équipement des zones difficiles. S'il devait servir à la couverture de tout le territoire, ce n'est pas de 15 millions d'euros qu'il faudrait doter le fonds, mais de 1,5 milliard d'euros, voire plus encore si l'on se réfère aux modèles britannique ou américain. Un décret sur les conditions de son utilisation est en préparation. Comme il s'agit d'une aide d'État, il faut demander l'avis de la Commission européenne. Le fonds devra respecter la neutralité technologique. Il n'est pas destiné à payer des adaptateurs TNT aux gens mais à leur permettre de continuer à recevoir la télévision. On peut donc imaginer qu'il serve aussi à subventionner un abonnement, ici au câble, là à l'ADSL ou au satellite. La France essaiera aussi de tirer parti des erreurs qui ont été commises ailleurs, en Allemagne ou surtout en Italie, où la confusion des genres a été signalée à la Commission.

Le président Émile Blessig a souhaité savoir si le plan numérique serait défini dès la conférence de 2006.

M. François Rancy a répondu que tel serait bien le cas, les discussions avec les États voisins étant déjà très avancées. La principale inconnue tient à l'effet « dominos ». En effet, le plan détermine exactement quelle fréquence va être utilisée par chaque grand émetteur, l'idée étant d'assurer la compatibilité entre les grands émetteurs pour chacun des sept multiplex. Il faut donc que les émetteurs à l'intérieur de chacune des couches soient compatibles en fréquence et que la compatibilité soit également assurée entre chaque couche. Ce sont donc en fait sept puzzles qui sont construits ensemble pour assurer la couverture nationale. Ensuite, ils doivent être raccordés aux frontières. On peut envisager d'arriver à la conférence avec un puzzle tout prêt entre pays européens. Mais si ce puzzle ne se connecte pas avec les autres États voisins, le Maroc, la Turquie, la Russie, ... il faudra tout reprendre.

La conférence durera cinq semaines, il y aura sept groupes de négociations et le point sera fait chaque semaine. La complexité de la question fait que le succès n'est pas assuré à la date prévue. Si cependant tel est le cas, le 15 juin un plan sera disponible, qui sera applicable dès l'arrêt de l'ensemble de l'analogique aux frontières.

Le fait que certains de ses voisins soient plus avancés que la France complique les choses. L'Italie avait annoncé qu'elle arrêterait l'analogique fin 2006, mais cette échéance a été repoussée de deux ans. Il est par ailleurs inenvisageable que, du jour au lendemain, un certain nombre de foyers ne reçoivent plus la télévision. Le fonds d'accompagnement du numérique vise bien à éviter cela.

Pour que la France atteigne son objectif d'un équipement total en 2012, il faut aussi que les fabricants d'adaptateurs soient capables d'en livrer 50 à 60 millions en quelques années. Malgré le succès des chaînes de la TNT, il n'en a été vendu l'an dernier que 1,7 million.

Enfin, s'agissant des régions frontalières, où l'abandon de l'analogique est la condition nécessaire pour que le numérique permette à leurs habitants d'accéder à autant de chaînes qu'ailleurs, à partir de 2007 quelques petits émetteurs vont être coupés çà et là et le basculement se fera progressivement jusqu'en 2010.

Le président Émile Blessig a fait observer que le dossier du calendrier de déploiement de la télévision numérique risquait forcément d'être débattu dans le cadre d'autres échéances prévues en 2007.

Convenant que la pression était sans doute appelée à s'accroître, M. François Rancy a cependant fait valoir le poids des négociations avec les pays voisins. Une liste des fréquences des 41 émetteurs proches de la frontière a été transmise le mois dernier aux négociateurs allemands ; ceux-ci arriveront eux-mêmes avec leur liste au prochain rendez-vous. L'image du puzzle reste valable, mais dans la phase transitoire, le puzzle change à chaque fois qu'on éteint un émetteur. Si l'objectif reste d'équiper les régions frontalières au même rythme que le reste du pays, aboutir en 2007 suppose que les décisions internationales soient prises dans les prochaines semaines. Plus on ira vite, plus le risque d'erreur sera grand. On devra donc parfois revenir sur certaines décisions. Pour ces raisons, la concertation devra être étroite avec les collectivités locales et avec les élus d'Alsace-Moselle, qui sont les mieux à même de sensibiliser la population aux enjeux et à la complexité du dossier.

Le président Émile Blessig a demandé si, dans la mesure où le spectre n'est pas extensible, on pouvait envisager que les avancées technologiques permettent une redistribution des fréquences entre les usagers. Par ailleurs, le rapport du CSA indique que certaines fréquences militaires pourraient être réaffectées à des usages civils. Il a donc souhaité savoir si le champ de compétence de l'Agence incluait une telle redistribution ou s'il était limité à l'affectation des gains obtenus par l'évolution technologique.

M. François Rancy a fait observer que le rapport du CSA traitait de l'accélération du déploiement de la TNT, ce qui n'est pas exactement ce qu'on appelle le dividende numérique. Dans ce contexte, il est envisagé un prêt de fréquences militaires jusqu'en 2010, pour permettre la transition.

Quant au dividende numérique, il ne se matérialisera pas avant l'extinction de l'analogique, en 2010 dans les zones frontalières et en 2012 dans toute la France. Ce n'est qu'à ce moment que l'on pourra réaffecter les fréquences qui auront été libérées par la télévision analogique. C'est aussi à ce moment que le nouveau plan pourra être appliqué. Or, dans ce plan, le dividende numérique est entièrement affecté à la radiodiffusion. En fait, le déploiement actuel de la TNT est une façon de prendre le dividende numérique. Faire de la télévision vers les mobiles en est aussi une, qui profite à la télévision. Car la télévision vers les mobiles reste de la télévision numérique : il faut plus d'émetteurs et de fréquences, mais la topologie du réseau reste la même.

Le discours de la Commission européenne sur le dividende numérique, selon lequel le passage au numérique permettra de consommer moins de fréquences pour la télévision, est inadapté à la situation actuelle. Si l'objectif est de diffuser trois chaînes de télévision sur toute la France, là on gagnera effectivement des fréquences. Mais la TNT, telle qu'elle va être déployée dès le départ, c'est déjà 5 multiplex, c'est-à-dire 25 chaînes. Le déploiement de la TNT préempte ainsi l'essentiel du dividende numérique.

M. François Rancy a ensuite retracé l'historique de la téléphonie mobile. Avant le GSM, il y a eu, au début des années 1980, les réseaux Radiocom 2000 et SFR 450 mégahertz (MHz) qui se situaient dans les bandes de la télévision. Cependant, faute d'une harmonisation des fréquences et des équipements, ces systèmes n'ont pas pu se développer. Les pays européens en ont conclu qu'il fallait harmoniser les fréquences. C'est ce qui a été fait à la conférence administrative mondiale des radiocommunications de 1979, sur la base d'une ouverture de nouvelles bandes, celles aujourd'hui utilisées par le GSM, des 900 MHz. L'effort d'harmonisation a duré jusqu'en 1992. Le GSM s'est alors développé progressivement, jusqu'à exploser à partir de 1998-2000, avec la baisse concomitante des prix.

Une fois les obstacles au développement du GSM aplanis, les responsables des fréquences ont entrepris de préparer la suite, c'est-à-dire l'après-saturation des bandes utilisées par le GSM. La conférence administrative de 1992 a donc identifié à l'échelle mondiale des bandes de fréquences de 2 gigahertz (GHz) pour pouvoir passer à la troisième génération. Le déploiement des réseaux à grande échelle a commencé en 2003-2004 : le mouvement a donc pris cette fois douze ans.

En 2000, en prévision du succès de la troisième génération, on a commencé à rechercher de nouvelles bandes de fréquences ; la bande des 2,5 GHz a été identifiée.

On observe donc une montée en fréquence et on parle maintenant, pour la quatrième génération, de bandes de fréquences situées entre 3 GHz et 6 GHz. Plus une bande est haute, plus il faut de relais mais plus la bande est large et permet de faire passer de données.

Le calendrier de déploiement de la téléphonie mobile 3G part de la bande de 2 GHz en 2004. Celle-ci n'est peut-être pas idéale en termes d'aménagement du territoire. Les opérateurs prévoient cependant une saturation de cette bande en 2008. Ils ont donc, à cette date, prévu de basculer une partie du trafic 3G dans la bande actuellement réservée au GSM, laquelle va bientôt assurer une couverture totale du territoire. Les licences qui leur seront délivrées par l'ARCEP à partir du printemps prochain leur permettront de le faire sans autorisation particulière. Dans une troisième étape, à l'horizon 2010, ils envisagent de recourir aussi à la bande 2,5 GHz. L'ensemble de ces évolutions ne suppose à aucun moment l'abandon du GSM : celui-ci sera simplement cantonné à une place de plus en plus faible au sein de sa fréquence. Enfin, s'il y avait un dividende numérique, la bande UHF serait disponible à partir de 2015.

Le président Émile Blessig a demandé si cela signifiait que la gamme des services auxquels aura accès un téléphone mobile 3G variera en fonction de la desserte de l'endroit où il se trouvera.

M. François Rancy a expliqué qu'aujourd'hui, dans la mesure où la téléphonie 3G n'est pas disponible partout, les terminaux commutent automatiquement vers la bande GSM dans les zones non équipées ; ils fonctionnent alors comme des appareils GSM. En 2008, en revanche, ils pourront conserver leurs fonctionnalités 3G sur la bande actuellement GSM. Le problème éventuel de la saturation de l'ensemble de ces bandes pourra alors être résolu en 2015 avec l'option du dividende numérique. Mais il faudra que les opérateurs aient de bons arguments pour convaincre les actuels utilisateurs du spectre UHF.

Il a aussi rappelé que l'Agence des fréquences n'a pas autorité sur l'ARCEP, le CSA ou le ministère de la défense. Elle s'applique à mettre les gens autour d'une table pour essayer de concilier les points de vue. Dans cette optique, le responsable des études prospectives, M. Jean-Jacques Guitot, préside depuis deux ans un groupe au sein duquel les opérateurs sont parvenus à définir deux scénarios, qui ont été entérinés par le Conseil d'administration de l'agence. Le premier est un scénario d'enrichissement des services audiovisuels, notamment avec la téléphonie vers les mobiles, qui préempteraient donc l'intégralité du dividende numérique ; le second est un scénario de cohabitation entre l'audiovisuel et les télécommunications, au sein duquel une partie, qu'on n'a pas encore spécifiée, de la bande actuellement attribuée à la télévision serait réservée aux services mobiles. Cela ne relève toutefois pas de la prochaine conférence régionale, qui ne s'intéressera qu'à la radiodiffusion, mais de conférences ultérieures ; à la conférence mondiale de 2007, on pourra si nécessaire faire état d'un besoin de fréquences pour les mobiles ; le sujet pourra alors être inscrit à l'ordre du jour de la conférence de 2010, qui pourra identifier une partie de la bande réservée à la télévision pour y faire passer de la téléphonie mobile. Il faudra alors procéder à une harmonisation européenne, replanifier la bande pour la télévision et rebâtir tous les puzzles, ce qui pourra intervenir à l'horizon 2015.

Aujourd'hui, la priorité de l'Agence est de réussir la conférence régionale de juin prochain et de négocier le plan de transition avec les pays voisins pour accélérer le mouvement aux frontières, notamment en Alsace-Lorraine.

M. François Rancy s'est enfin déclaré prêt à revenir devant la Délégation à l'issue de la conférence régionale, en particulier pour présenter la phase de transition aux frontières.

Le président Émile Blessig a remercié M. François Rancy pour cette proposition ainsi que pour sa présentation très complète.

 M. DOMINIQUE BAUDIS, PRÉSIDENT DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'AUDIOVISUEL, ET M. PHILIPPE LEVRIER, MEMBRE DU CONSEIL (mercredi 22 février 2006)

Le président Émile Blessig a exposé que, depuis le début de la législature, la Délégation à l'aménagement du territoire s'était tout particulièrement souciée des conditions d'installation de la couverture numérique du territoire. Elle est particulièrement attentive à ce que ne se crée pas une fracture numérique entre les territoires les mieux dotés et les territoires les plus difficiles ou encore les moins peuplés.

S'agissant plus particulièrement de la télévision numérique terrestre (TNT), il a indiqué que la Délégation souhaitait d'abord savoir dans quelles conditions et dans quels délais l'ensemble du territoire pourrait être couvert, et si les prévisions d'achèvement de la couverture pour la fin de l'année 2007 pourraient être tenues. Évoquant ensuite les zones de partage de fréquences entre pays riverains, qui concernent près du tiers du territoire et dont certaines ne reçoivent parfois que trois des chaînes à diffusion nationale, il a demandé quelles actions étaient en cours pour permettre leur accès à la TNT au plus vite. Enfin, signalant qu'il apparaissait que la couverture du territoire en TNT par des relais terrestres ne devrait pas dépasser les 85 %, il a indiqué que la Délégation souhaitait savoir par quels moyens et dans quels délais le reste du territoire sera couvert.

M. Dominique Baudis, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, a exposé que le déploiement de la TNT représentait un intérêt majeur pour la société. Tous les citoyens sont téléspectateurs. Les téléspectateurs hertziens représentent entre les deux tiers et les trois quarts de l'ensemble ; la TNT permet de porter le choix de programmes qui leur est offert de 5 à 17 pour les programmes gratuits et de 1 à 11 pour les programmes payants.

Les premiers éléments montrent le succès du déploiement de la TNT. Les chaînes de la TNT ont déjà capté 25 % de l'audience. La durée moyenne d'écoute des téléspectateurs disposant de la TNT est désormais supérieure de 20 minutes à celle des autres téléspectateurs ; c'est un bon indice de la satisfaction des foyers ; celle-ci a pour origine principale la grande variété de chaînes offertes par la TNT par rapport à la diffusion analogique.

Le déploiement de la TNT a été organisé en étapes. Une première phase prévoit l'équipement de 85 % de la population d'ici mars 2007. Le 31 mars 2005, 17 sites ont été ouverts, couvrant 35 % de la population. En septembre 2005, 15 sites supplémentaires ont été ouverts, portant la couverture de la population à 50 %. La troisième étape, qui va se dérouler entre le 15 mars 2006 et le 15 juillet 2006, prévoit l'ouverture de 19 sites supplémentaires, permettant la couverture de près de 60 % de la population. Du 15 juillet 2006 au 15 octobre 2006, 24 sites supplémentaires seront ouverts, la population desservie passant alors à 66 %. Pour arriver à la couverture de 85 % de la population, une cinquième étape va voir l'ouverture de 40 sites. Une difficulté de calendrier se fait cependant jour : en effet si 8 de ces sites sont à l'intérieur des terres, et donc peuvent être ouverts sans difficulté, 32 se trouvent dans des zones de partage des fuseaux hertziens avec des États voisins ; pour l'ouverture de ces sites, il faut donc passer des accords avec ces États ; pour que le délai de mars 2007 soit tenu, il faudrait que l'accord soit conclu dans les prochaines semaines ; un décalage de la date de conclusion de quelques semaines ou de quelques mois retardera d'autant, de façon mécanique, l'ouverture des sites.

À ce stade se posera la question de l'équipement des 15 % restants de la population. Dès l'ouverture de la TNT, le 31 mars 2005, le président du CSA a attiré l'attention du Premier ministre sur la nécessité d'offrir la diffusion gratuite des chaînes de la TNT à l'ensemble de la population. Un groupe de travail entre le CSA et la direction du développement des médias, qui dépend des services du Premier ministre, a dégagé les données de la question. Pour équiper 85 % de la population, 115 sites suffisent ; pour passer à 95 %, il faut équiper 2000 émetteurs supplémentaires ; enfin, pour assurer le remplacement total de l'actuelle diffusion analogique, qui est de près de 99 %, il faut équiper encore 1000 émetteurs. Une autre solution étudiée est celle de la diffusion gratuite des chaînes de la TNT par satellite, ce qu'on appelle la TNS (télévision numérique satellitaire).

M. Patrice Martin-Lalande a demandé si le coût d'installation de ces 3000 émetteurs avait été calculé, et si une diffusion par l'ADSL, c'est-à-dire par la ligne téléphonique, ou encore par le satellite n'aboutirait pas à des coûts inférieurs. Il a ensuite souhaité savoir si des actions de mutualisation étaient envisagées pour couvrir les zones qui allaient se trouver dépourvues de couverture numérique, TNT, ADSL ou téléphonie mobile, pour des raisons de coût.

M. Dominique Baudis, président du C.S.A. a répondu que les études en cours avaient pour objectif de fixer les limites de l'extension du réseau hertzien de diffusion numérique terrestre de la télévision, et d'élaborer des solutions pour la couverture des populations qui ne seraient pas équipées par ce réseau. Aujourd'hui, il est à peu près acquis que ce réseau hertzien ira au-delà de la couverture initiale de 85 % de la population : cette couverture laisse en effet non équipées des parties de villes importantes ; or le CSA considère qu'il y a un minimum de cohérence à apporter : on n'envisage pas qu'en déménageant au sein d'une même ville, un téléspectateur doive passer de la réception hertzienne à la réception par satellite. Par ailleurs, le CSA est attentif à la simplicité d'équipement. Celle-ci est l'une des raisons du succès actuel et un des gages du succès futur de la TNT : aujourd'hui, pour recevoir les chaînes de la TNT, un téléspectateur recevant la télévision analogique a simplement à acheter un adaptateur, au prix de 50 € environ, et à le brancher. Au contraire, l'équipement d'une habitation au moyen d'une parabole est toujours plus cher et plus compliqué pour l'utilisateur.

M. Philippe Levrier, membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel, a précisé que sur les 3000 sites restant à équiper, les 1000 les plus importants devraient être intégrés dans le réseau de téléphonie numérique terrestre. Les 1000 les moins importants, en revanche, qui couvrent chacun une centaine d'habitants tout au plus, devraient être desservis par diffusion satellitaire (TNS) ; il arrive d'ores et déjà aujourd'hui que, lorsqu'on procède à des réaménagements du réseau de diffusion analogique de la télévision, on ne transfère pas des fréquences mais qu'on les supprime, et qu'on offre en contrepartie aux personnes anciennement desservies un abonnement au satellite. Le traitement des 1000 sites intermédiaires dépend, lui, de paramètres de fait. L'un de ceux-ci est celui du maintien concomitant de la diffusion analogique et de la diffusion numérique. Si, au moment où l'on passe au numérique, on arrête la diffusion analogique, l'équipement des sites ne coûte rien puisqu'on récupère l'émetteur, qu'on affecte à un autre mode de diffusion. Dans ces conditions, il est possible d'équiper les sites sans que cela ait de conséquences sur le budget de diffusion des chaînes. Il faut savoir que, pour l'équipement de 600 des 1000 sites les plus importants, TDF a annoncé un coût supplémentaire de diffusion de un million d'euros par an pour les chaînes, aboutissant à une hausse de 25 % par rapport au coût de la diffusion par les 115 émetteurs desservant 85 % de la population.

M. Patrice Martin-Lalande a demandé sur quels éléments de comparaison se fondait le choix de ne pas recourir à la diffusion satellitaire pour passer d'une couverture de 65 % à 100 % de la population.

M. Philippe Levrier a répondu que certes les chaînes diffusées par le réseau de télévision numérique terrestre vont bientôt être toutes présentes sur le satellite ; l'utilisation du satellite pour diffuser les chaînes hertziennes gratuites n'implique donc pas de coût de transport supplémentaire du signal. Il est aussi techniquement tout à fait possible de permettre au téléspectateur final d'avoir accès gratuitement aux chaînes gratuites de la TNT par l'intermédiaire du satellite. En revanche les coûts d'équipement ne sont pas répartis de la même façon pour la réception des chaînes de la TNT par voie numérique terrestre et par voie satellitaire : dans le cas de la réception par voie terrestre, le particulier n'a presque rien à faire ; pour la réception par voie satellitaire, c'est à lui qu'il revient de s'équiper d'une parabole.

Les études de coût sont encore en cours. C'est sur la base d'un pronostic et d'une évaluation que se que se fonde l'idée que le satellite va sans doute apparaître plus intéressant financièrement pour l'équipement des 1000 derniers sites. On va sans doute s'orienter vers une réception par voie numérique terrestre pour les sites desservant plus de 250 habitants, et une réception par voie satellitaire pour les sites desservant moins de 250 habitants.

M. Patrice Martin-Lalande a fait observer que les coûts pour l'utilisateur étaient très proches, la différence n'excédant pas 10 €.

M. Gilles Brégant, directeur des technologies au CSA, a fait observer que la notion à prendre en compte était celle du coût d'activation ; aujourd'hui, pour l'usager, celui de la TNT se limite à l'achat d'un adaptateur. En revanche, l'équipement pour la réception satellitaire suppose l'achat d'une parabole, mais aussi en amont, des campagnes d'information de l'usager, pour qui aujourd'hui la TNT emprunte les voies de l'ancienne télévision analogique.

Quant à la diffusion par l'ADSL, elle suppose le paiement d'un abonnement mensuel, qui est au minimum de 30 € par mois, et qui constitue donc un élément de coût particulièrement défavorable. De plus, le standard de confort en matière de réception de télévision est désormais la réception simultanée de deux chaînes ; le public s'habitue progressivement à pouvoir regarder une chaîne tandis qu'il enregistre un programme sur une deuxième chaîne. Or l'ADSL n'a pas la capacité à fournir ce service partout où il est installé ; il ne l'a notamment pas en zone d'habitat dispersé ; dans ces zones la diffusion numérique terrestre de la télévision sera plus efficace que la diffusion par ADSL ; dans le sud-ouest de la France, il existe des zones qui sont d'ores et déjà couvertes par le réseau de télévision numérique terrestre, alors que n'y passent ni l'ADSL ni le réseau de téléphonie mobile GSM.

Mme Henriette Martinez a exposé que le département dont elle était l'élue, celui des Hautes-Alpes, semblait cumuler les handicaps au regard des critères de priorité pour l'équipement en TNT : c'est un département de montagne, au relief difficile ; il est frontalier avec l'Italie ; il est peu dense et ne comporte que quatre villes dont la population est supérieure à 4000 habitants. Dans plusieurs zones, pour le prix entier de la redevance, les habitants ne peuvent recevoir que trois chaînes, voire une seule. Elle a alors demandé comment les 175 communes du département autres que Gap, qui comporte près de 40 000 habitants, et peut-être Briançon, qui en a un peu plus de 10 000, allaient être traitées pour la réception des chaînes de la TNT, et si chaque foyer allait devoir se doter d'une antenne parabolique.

M. Dominique Baudis a répondu que le CSA avait été saisi par plusieurs élus des Hautes-Alpes, et qu'il avait bien constaté l'importance des zones d'ombre dans ce département. Pour lui, la TNT devrait être un instrument pour pouvoir y apporter au moins les chaînes gratuites.

M. Gilles Brégant a précisé que les critères de sélection des sites pour l'implantation prioritaire de la TNT étaient soit l'étendue de leur zone de couverture, soit encore qu'ils desservent une population d'au moins 50 000 habitants. Aucun site du département des Hautes-Alpes ne répond à ces critères ; aucune portion du département n'est donc concernée par la première phase d'équipement de 85 % de la population. En revanche, il est certain qu'il ne sera pas possible de s'en tenir à l'équipement de ces seuls 85 %. Il faudra donc trouver avec les opérateurs un dispositif permettant de faire venir la TNT dans les Hautes-Alpes.

M. Patrick Lemasle a souhaité savoir si une solution ne serait pas de transformer purement et simplement les émetteurs analogiques en émetteurs numériques : il suffirait ensuite de fournir gratuitement les adaptateurs aux usagers pour obtenir de façon immédiate une couverture peu coûteuse.

Il a ensuite demandé si le déploiement de la TNT n'aurait pas pour conséquence une moindre progression de la diffusion de la télévision par satellite.

M. Philippe Levrier a répondu que le basculement d'émetteurs de l'analogique vers le numérique était l'une des hypothèses de travail : elle ne peut pas valoir pour de très grands émetteurs couvrant de très nombreux usagers, comme la Tour Eiffel. En revanche, elle est parfaitement praticable pour de petits émetteurs, couvrant de l'ordre de 350 habitants ; un basculement concerté permet alors d'éviter aux chaînes les coûts d'une double couverture, analogique et numérique.

M. Dominique Baudis a fait valoir que l'intérêt premier de la TNT était l'élargissement de l'offre gratuite. Depuis quinze ans, aucune nouvelle chaîne gratuite nationale n'a été proposée aux téléspectateurs. Pour le public qui n'a accès ni à l'ADSL ni au satellite, c'est-à-dire environ les trois quarts de celui-ci, l'offre gratuite est extrêmement restreinte. Le succès de la TNT est évidemment à mettre en relation avec le fait qu'elle permet de passer de la réception de 5 à 17 chaînes gratuites.

Par ailleurs, elle permet aussi aux téléspectateurs hertziens d'avoir accès non plus à une chaîne payante, mais à onze. On peut en déduire que, du fait de l'accroissement de l'offre, la diffusion de la télévision payante va progresser grâce à la TNT. En revanche il est vraisemblable que la TNT, du fait de la nouvelle palette de choix qu'elle offre, va freiner l'équipement pour la réception satellitaire et les abonnements à la télévision par câble. Il faut aussi ajouter qu'en France, au contraire d'autres pays, la télévision payante n'avait pas beaucoup progressé : 25 % à 30 % des foyers seulement souscrivent des abonnements payants.

Le président Émile Blessig a déploré les difficultés pour les élus d'avoir accès à des informations solides pour répondre à l'impatience de leurs concitoyens. L'annonce a été faite que les chaînes de la TNT seraient accessibles à la quasi-totalité de la population d'ici la mi-2007. Les élus sont donc interpellés par leurs concitoyens sur la date effective d'arrivée de la TNT dans leur ville ou dans leur village. Or, ils se trouvent aujourd'hui dépourvus d'éléments pour répondre clairement.

Un tiers de la France se trouve en zone de partage de fréquences avec des États voisins. Or, pour cette zone, il n'y a tout simplement pas de calendrier prévisionnel de réception de la télévision numérique terrestre. Au cours de ses auditions, la Délégation a appris que dans certaines de ces régions, du fait de la pénurie de fréquences liée au partage, il faudra arrêter la diffusion analogique pour ouvrir la diffusion numérique. Quels éléments peuvent être fournis sur le calendrier de l'organisation de ce basculement ? En particulier le fonds d'accompagnement du numérique qui vient d'être créé pourra-t-il intervenir et comment ?

M. Dominique Baudis a d'abord observé que cette impatience, qu'il comprenait, était aussi la marque du succès de l'entreprise, conduite par le CSA dans un environnement d'abord extrêmement hostile. Il faut désormais gérer ce succès.

Le principe de l'équipement du territoire par phases est forcément producteur d'impatiences. Cependant le CSA n'est pas le seul intervenant dans ce dossier. Le Parlement dispose de pouvoirs qu'il peut utiliser s'il veut faire progresser la TNT. Le Gouvernement est un acteur clé : aujourd'hui, il conduit des négociations internationales sur la répartition des fréquences, où le CSA n'est pas représenté. Or, pour des raisons de pure mise en œuvre, pour tenir l'échéance de l'équipement de 85 % de la population en mars 2007, il faudrait que ces négociations internationales aboutissent dans les prochaines semaines. La Délégation pourrait s'informer sur leurs perspectives d'aboutissement. Le calendrier de la cinquième phase d'équipement, qui concerne 20 % de la population française, à qui l'on a promis la TNT en mars 2007, en dépend.

Enfin le CSA n'a jamais annoncé que la totalité du territoire serait équipé à la fin de 2007 ; il n'a non plus jamais présenté d'objectif au-delà de la desserte de 85 % de la population.

Après avoir exposé que des courriers officiels qui lui avaient été adressés envisageaient que la ville de Gap soit desservie par réseau terrestre d'ici la fin 2007 et que le reste du département des Hautes-Alpes le soit par diffusion satellitaire, Mme Henriette Martinez a déploré les conséquences que des informations officielles contradictoires faisaient peser sur la crédibilité de la parole des députés, dans un domaine où l'attente des citoyens est forte.

M. Patrick Lemasle a observé que cette situation valait également pour les autres équipements numériques : on présente aux citoyens des cartes flatteuses de couverture du territoire en ADSL ou en téléphonie mobile GSM, avant que ceux-ci ne constatent que leur habitation ou leur commune, pourtant située dans une zone cartographiée comme de desserte, n'a pas accès au service.

M. Patrice Martin-Lalande a alors indiqué que, à une question au Gouvernement qu'il avait posé le 27 octobre 2005, le ministre de la culture et de la communication, M. Renaud Donnedieu de Vabres, avait répondu que «85 % des Français doivent recevoir la TNT au printemps 2007 », que, pour ceux qui n'y auront pas accès à ce moment-là, «la solution technologique se présentera sous la forme d'une offre de satellite gratuite permettant d'assurer la réception partout sur le territoire national, et enfin que « au 31 décembre 2007, toute la population française devra recevoir la TNT». Il a alors demandé si la décision relative à cette offre satellitaire avait été prise et, sinon, quand il était prévu qu'elle le soit.

M. Dominique Baudis a répondu que le CSA ne pouvait porter plus que ses pouvoirs ne le lui permettaient. Le CSA met en œuvre la loi, avec les pouvoirs qui lui sont donnés. Il y a certainement la possibilité d'une diffusion satellitaire gratuite des chaînes de la TNT pour tous ; la technologie permet parfaitement aux auditeurs équipés pour la réception par satellite d'avoir accès également aux chaînes de la TNT ; la question est que les éditeurs et les diffuseurs acceptent que ces chaînes soient diffusées gratuitement par satellite.

En 2004, lors de la préparation du projet de loi relatif aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, le CSA avait proposé que soit institué un service d'antenne gratuit ; il avait demandé que les rapports entre chaînes de la TNT et diffuseurs satellitaires soient régis par le principe « must carry, must deliver », bref, que les diffuseurs satellitaires soient tenus d'acheminer gratuitement et en clair le signal. Cette proposition n'a pas été retenue par la loi du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle ; aujourd'hui elle n'oblige pas les opérateurs à donner aux foyers l'accès aux chaînes gratuites de la TNT par le satellite. L'ouverture de cet accès relève donc de la seule bonne volonté de chaque opérateur.

Or, aujourd'hui, les opérateurs n'ont pas forcément intérêt à organiser la diffusion gratuite des chaînes de la TNT ; nombre d'entre eux ne souhaitent pas forcément aller au-delà des 115 sites à équiper pour couvrir 85 % de la population.

Face à cette situation, le CSA, qui s'est battu pour faire naître la TNT et organiser son déploiement sur un territoire aussi étendu que possible, ne peut créer des obligations de service général de diffusion sans base légale. C'est au Parlement, s'il le souhaite, qu'il appartient de créer cette base légale, en introduisant dans la loi une telle obligation de service d'antenne. La discussion du projet de loi qui doit prochainement être déposé peut en constituer l'occasion.

M. Gilles Brégant a précisé que les conditions techniques de la diffusion numérique par satellite permettent sans la moindre difficulté la diffusion gratuite et en clair des chaînes de la TNT ; dès lors que la décision serait prise de le faire, le délai de réalisation pour que chaque foyer puisse les recevoir est de l'ordre de deux semaines ; et cela vaut depuis 2002. Les difficultés sont ailleurs. Elles concernent les droits d'auteur, les auteurs pouvant considérer qu'ils devraient être réévalués dans la mesure où le public susceptible d'être atteint par le satellite serait supérieur au public actuellement atteint par le réseau terrestre, analogique ou numérique. Elles concernent aussi les conditions de la concurrence : la diffusion gratuite des chaînes de la TNT par satellite viendra forcément faire concurrence à l'actuelle diffusion payante des bouquets satellitaires. Aujourd'hui, la situation reflète les positions des éditeurs et des diffuseurs : le multiplex R1, qui regroupe les chaînes publiques, est diffusé en clair sur le satellite ; en revanche quatre autres bouquets multiplex ont choisi d'embrouiller le signal de façon à ce qu'il ne puisse pas être capté par une antenne parabolique sans abonnement.

Le président Émile Blessig a souhaité savoir si, dans le cas où la loi prévoirait une telle obligation de service d'antenne, la construction d'un réseau de diffusion terrestre des chaînes de la TNT serait encore utile.

Il a ensuite demandé si la solution satellitaire ne serait pas une solution pour les territoires frontaliers.

M. Philippe Levrier a répondu que la simplicité pour les utilisateurs du réseau TNT était un élément déterminant en faveur de celui-ci. La TNS ne vaut raisonnablement que pour les zones où l'on ne peut faire venir le réseau TNT à des coûts raisonnables.

Quant aux zones dites frontalières, la TNS est également une réponse, mais pas exclusive. Dans les grandes villes, où le taux de pénétration du câble est de 50 % environ, celui-ci est également une solution. Quant aux zones d'habitat dispersé, les téléspectateurs y sont demandeurs d'une solution qui soit dans la continuité du service actuel. Pour cette raison, le CSA considère qu'il est très important d'y faire venir le réseau TNT. Les négociations en cours avec les pays voisins ont donc un intérêt crucial. Ces négociations sont cependant difficiles : alors que la France est demandeuse de solutions pour la période de transition, ses partenaires sont demandeurs de solutions pour la période d'après l'arrêt définitif de la diffusion analogique : il faut donc être tout particulièrement attentif à ne pas concéder pour des besoins limités dans le temps des aménagements durables. C'est la raison pour laquelle il n'est pas exclu que les négociations n'aboutissent qu'avec la fin de la conférence régionale sur les radiocommunications qui va se tenir en mai et juin prochain.

M. Jean Diebold s'est inquiété des conditions de diffusion des chaînes de la TNT par l'instrument des réseaux câblés. Dans certaines villes, un effort important de câblage a été accompli. De ce fait nombre de foyers reçoivent désormais par le câble les chaînes gratuites, alors même qu'ils ne sont pas abonnés à des chaînes payantes ; comment ces foyers, qui n'ont plus forcément d'antenne de toit, pourront-ils recevoir les chaînes de la TNT ?

M. Dominique Baudis a répondu qu'en effet, lorsqu'un immeuble était câblé, il était prévu que le cablo-opérateur apporte aux foyers équipés mais non abonnés le service d'antenne c'est-à-dire les chaînes gratuites. Dès le lancement de la TNT, le CSA a donc demandé que ce service d'antenne inclue l'ensemble des chaînes de la TNT. La loi du 9 juillet 2004 n'a cependant imposé aux opérateurs que de faire des propositions commerciales aux gestionnaires des immeubles. Les opérateurs ont donc entrepris de faire des propositions où la diffusion des chaînes de la TNT était payante. Le CSA travaille en ce moment à des solutions équitables, qui égalisent les conditions d'accès à la TNT entre téléspectateurs câblés et téléspectateurs hertziens. Les câblo-opérateurs devraient prochainement proposer aux foyers câblés des adaptateurs leur permettant de recevoir ces chaînes, à des tarifs correspondants à ceux des adaptateurs pour la télévision hertzienne. Autrement le CSA verra, le cas échéant, à élaborer une recommandation.

Les foyers abonnés au câble reçoivent quant à eux automatiquement les chaînes de la TNT. Dans les deux cas la réception est évidemment subordonnée au fait que le foyer récepteur reçoive bien par le câble la télévision numérique et non pas la télévision analogique.

M. Patrick Lemasle a demandé si, au vu du succès de la TNT, on pouvait s'attendre à une augmentation du nombre de chaînes diffusées par ce réseau, et enfin si, du fait de la fusion en cours entre TPS et Canalsat, il était envisageable qu'il ne subsiste plus en France qu'un seul bouquet de télévision payante par satellite.

M. Dominique Baudis a répondu que les conditions techniques de la TNT permettaient la diffusion d'un nombre de chaînes gratuites supérieur aux 17 actuelles. Ce nombre de 17 est la résultante de deux facteurs. Le premier est que les études commandées par le CSA en vue du lancement de la TNT ont montré que le marché publicitaire permettrait difficilement d'assurer la vie de plus de 20 chaînes gratuites sans créer d'importants déséquilibres. Le second est que l'État avait projeté la création de cinq chaînes gratuites supplémentaires ; au lieu de quoi il n'a utilisé que deux canaux de plus, l'un pour permettre la diffusion d'une nouvelle chaîne, France 4, l'autre pour permettre à France 5 de ne plus partager son canal avec Arte, et donc d'accroître librement sa durée de diffusion.

Dans l'immédiat, devraient s'ajouter aux actuelles chaînes de la TNT les chaînes locales, qui aujourd'hui sont encore diffusées par le réseau de diffusion analogique. Dans chaque région, une chaîne gratuite de plus devrait ainsi s'ajouter aux chaînes actuelles. Enfin la TNT offre aussi la possibilité de s'abonner à 11 chaînes payantes.

La constitution d'une seule plate-forme de diffusion de télévision payante par satellite, par la fusion entre TPS et Canalsat, est tout à fait probable. La France ne ferait que rejoindre ses partenaires européens, où il n'y a plus, partout, qu'un seul opérateur satellitaire payant. Le CSA aura à émettre un avis ; il devra notamment, pour sa formulation, veiller à ce que cette fusion ne porte pas atteinte au pluralisme, et donc à ce que les chaînes hors bouquet puissent être commercialisées.

II.- AUDITION DE M. FRANÇOIS LOOS,
MINISTRE DÉLÉGUÉ À L'INDUSTRIE

(mercredi 20 juin 2006)

Le président Émile Blessig, accueillant M. François Loos, ministre délégué à l'industrie, a souligné que la conférence régionale des radiocommunications qui vient de s'achever à Genève revêtait une importance majeure pour la répartition des fréquences en Europe, et donc pour leur utilisation par les États et les opérateurs. L'un de ses enjeux concerne les éventuelles perspectives dégagées pour le développement de la TNT sur le territoire, notamment dans les zones de partage de fréquences. Il a demandé si, dans ces zones particulièrement encombrées, la conférence avait permis de dégager dans le spectre hertzien de la place pour faire coexister diffusion numérique et analogique comme dans le reste de la France, et, si oui, dans quelle mesure. Dans le cas contraire, vers quelle solution le Gouvernement se dirige-t-il pour permettre l'arrivée de la TNT aussi rapidement que possible dans ces zones ? Il a aussi souhaité savoir si les résultats de cette conférence ouvraient des perspectives nouvelles pour l'équipement en TNT des 15 % de la population non couverts par les cinq premières phases définies par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et si la conférence induisait des perspectives nouvelles en matière de téléphonie mobile.

M. François Loos, ministre délégué à l'industrie, rappelant que son ministère était le ministère de tutelle de l'Agence nationale des fréquences, a exposé que le secteur de l'audiovisuel a été ces dernières années le terrain d'une effervescence que peu d'autres secteurs ont connue : la télévision numérique, d'abord diffusée, vers la fin des années 1990, par le câble et le satellite, puis au début des années 2000, sur Internet, a permis d'améliorer la qualité et d'augmenter le nombre des programmes de télévision et a rendu possible l'interaction du spectateur avec le programme. En passant à la diffusion hertzienne, avec l'arrivée de la télévision numérique terrestre (TNT), la télévision numérique utilise désormais un bien national limité - le spectre - dont chaque utilisation doit être comptée. Cela justifie une intervention de l'État et une législation adaptée.

L'appellation « télévision numérique de terre » recouvre une évolution technologique qui étend le principe de la numérisation du signal à sa diffusion par voie terrestre. Outre les qualités d'image et de son reconnues au numérique, la TNT permet la multiplication du nombre de chaînes émises par voie hertzienne terrestre. Alors qu'en mode analogique six chaînes au plus peuvent être diffusées, en mode numérique les réseaux de fréquences autorisent aujourd'hui la réception d'une trentaine de services supplémentaires de télévision à vocation nationale. Un canal qui transportait jusqu'à aujourd'hui une chaîne analogique peut en TNT véhiculer cinq ou six chaînes en définition standard. La TNT permet ainsi aujourd'hui de recevoir 18 chaînes de télévision gratuites et 11 chaînes payantes, c'est-à-dire accessibles par abonnement.

Pour recevoir la TNT, il suffit d'acheter ou de louer un adaptateur numérique et de le relier à son téléviseur. C'est d'une très grande simplicité. Plusieurs modèles de décodeurs sont en vente actuellement dans les magasins spécialisés et dans les grandes surfaces, à partir de 50 euros environ. Il existe également sur le marché de plus en plus de téléviseurs avec adaptateur numérique intégré.

La TNT offre aussi d'autres avantages, dont celui de pouvoir transporter des informations numériques de nature diverse : images et sons mais aussi textes et données. Cela ouvre à la télévision numérique hertzienne les mêmes perspectives de services interactifs que ceux qui sont actuellement présents sur le câble et sur le satellite.

C'est la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 qui a introduit dans la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication les dispositions juridiques nécessaires au déploiement de la télévision numérique de terre. Cette loi a confié au CSA la mission de répartir les autorisations d'usage de la ressource radioélectrique entre les éditeurs, publics ou privés, de la TNT. Sur ces bases, le CSA a entrepris la planification du spectre de façon à permettre le déploiement de la télévision numérique terrestre sans perturber la diffusion des services de télévision en mode analogique. Le déploiement de la TNT a alors pu débuter le 31 mars 2005. À la fin du mois de mars 2006, soit un an après le lancement, 50 % de la population était couverte et plus de 2,5 millions de récepteurs ont été vendus. Depuis le 15 juin dernier, date du début de la phase III, la couverture de la TNT a été étendue à 58,5 % de la population métropolitaine. Elle devrait ensuite atteindre 66 % en octobre 2006 (phase IV) puis 70 % au 31 mars 2007 (phase V).

L'objectif est d'atteindre une couverture numérique hertzienne de 85 % avant la fin 2007. Cependant, dès avant la fin de l'année 2006, un bouquet satellitaire devrait permettre, moyennant l'équipement d'une parabole et d'un décodeur, de recevoir les 18 chaînes gratuites de la TNT sur tout le territoire.

La télévision numérique terrestre permettra également le développement de nouveaux services : télévision sur mobiles et télévision haute définition. En matière de multimédia mobile, la France occupe le troisième rang mondial et le premier en Europe, avec 10 millions d'utilisateurs réguliers. La télévision mobile est déjà une réalité, qui rencontre aujourd'hui un franc succès en France. C'est une réalité sur les réseaux mobiles haut débit : la France est l'un des marchés les plus avancés d'Europe, avec plus de 93 % de la population couverte, des dizaines de chaînes déjà diffusées, plus de 2 millions de Français déjà équipés d'un mobile permettant de recevoir la télévision, dont près de 500 000 clients actifs. Cependant, il faut préparer dès maintenant l'avenir de la TV mobile, en complétant le modèle « point à point », fonctionnant comme une communication téléphonique, actuellement mis en œuvre par les opérateurs de télécommunications, par un modèle de « diffusion » qui correspond à celui de la télévision traditionnelle, beaucoup plus rationnel en termes d'utilisation du spectre, notamment pour les chaînes à forte audience. Quatre expérimentations de diffusion terrestre de télévision mobile ont eu lieu à Paris. Le Gouvernement est très attentif au retour d'expérience industriel, en ce qui concerne tant la qualité des différentes technologies qui sont utilisées que les usages observés et les modèles économiques développés. Le Forum de la télévision mobile, créé à l'initiative du ministère de l'industrie en novembre 2004, est maintenant une instance de réflexion sur ces nouveaux usages, au sein de laquelle coopèrent activement éditeurs de télévision et acteurs des télécommunications.

Par ailleurs, dans les prochaines années, des investissements importants et de nouvelles solutions technologiques seront nécessaires pour compléter la couverture du territoire, mieux pénétrer à l'intérieur des bâtiments et faire face à la pénurie de fréquences. Des travaux de recherche sont en cours pour explorer la diffusion de la télévision mobile d'une part sur les fréquences UMTS de la téléphonie mobile troisième génération et d'autre part par satellite. Un satellite devrait être opérationnel en 2008. L'Agence de l'innovation industrielle soutient ce projet. Dans l'immédiat, afin que la France, et plus largement l'Europe, conserve une longueur d'avance dans le développement de ces technologies, l'Agence proposera à ses partenaires européens que chaque État membre se dote d'au moins un réseau de télévision mobile selon la norme DVB-H, qui est une évolution de la norme DVB-T utilisée par la TNT. À travers un réseau « multi-ville », correspondant à un septième multiplex (« R7 » ou « M7 ») en cours de planification par le CSA, le lancement commercial d'un réseau de télévision mobile en DVB-H pourrait être effectif dans 15 grandes agglomérations françaises dès 2007. Ensuite, via le satellite, toute la France pourrait être couverte par un réseau de télévision mobile d'ici 2009.

Par ailleurs, depuis le début du mois de juin, des chaînes de télévision ont reçu l'autorisation du CSA d'expérimenter à Paris, Lyon et Marseille la télévision haute définition sur la TNT. Il s'agit d'une première mondiale pour une diffusion d'événements en direct avec les dernières technologies de compression (MPEG-4). Les images sont d'une qualité exceptionnelle par rapport aux normes actuelles. Un multiplex (« R5 ») est actuellement laissé vacant par la TNT ; il pourrait être mis à profit afin de lancer commercialement une offre de télévision numérique terrestre haute définition sur tout le territoire couvert par la TNT, dès 2007.

Conformément à l'objectif fixé par le Président de la République et rappelé lors de l'installation du Comité stratégique pour le numérique en mai dernier, un projet de loi permettant d'introduire la télévision haute définition et la télévision mobile sur la TNT sera prochainement soumis au Parlement. C'est un enjeu industriel majeur. En effet, les entreprises françaises maîtrisent toutes les technologies, à l'exception peut-être des téléviseurs haute définition. Les caméras, les régies, les encodeurs, les diffuseurs, les décodeurs, les terminaux de réception mobile, la création de nouveaux programmes, toutes ces technologies sont maîtrisées par des entreprises françaises, petites ou grandes, mais toutes innovantes, qui créent de nouveaux marchés, de la croissance et de l'emploi.

Le Gouvernement renforce son soutien aux efforts de recherche dans ce secteur, notamment à travers les pôles de compétitivité. Les pôles « Images et réseaux » en Bretagne, et « Cap Digital » (nouveau nom du pôle « Image, multimédia et vie numérique ») en Ile-de-France sont les deux pôles concernés par le sujet. Tous deux sont des pôles « à vocation mondiale », dont des premiers projets ont été financés dès la fin de l'année 2005 par le ministère de l'industrie.

Le ministre délégué à l'industrie a ensuite exposé que le développement de la TNT et des services innovants associés nécessite de nouvelles fréquences, disponibles sur tout le territoire. Or, les ondes ne s'arrêtent pas aux frontières : le partage du spectre hertzien entre pays voisins implique que la ressource en fréquences est plus rare pour les chaînes françaises dans les zones frontalières. C'est particulièrement vrai dans le Nord et l'Est de la France, où la TNT est plus difficile à introduire. Certaines régions de France - l'Alsace, par exemple - ont déjà eu du mal à être couvertes par les deux dernières chaînes analogiques, Arte et M6. Il ne pourra pas y avoir en Alsace coexistence des chaînes analogiques françaises et allemandes et de la TNT française. La France devra donc, pendant cette période de coexistence, avoir recours à des fréquences prêtées temporairement par ses voisins ; elle devra peut-être aussi envisager d'éteindre de manière anticipée la diffusion de l'analogique sur quelques sites. Entre 2006 et 2011, sur l'ensemble du territoire, l'analogique sera progressivement supprimé pour être remplacé par le numérique.

S'agissant de la conférence régionale des radiocommunications qui vient de s'achever, il convient de rappeler que l'adoption du plan de fréquences aujourd'hui en vigueur remonte à 1961, bien avant l'introduction du numérique. La CRR a remis à plat ce partage pour les 119 pays de l'Europe géographique, du Moyen-Orient et de l'Afrique. L'objectif principal de la France, lors de cette conférence, était d'obtenir un maximum de fréquences disponibles sur tout le territoire. La délégation française, conduite par l'Agence nationale des fréquences, a pleinement atteint cet objectif : elle a ainsi obtenu en UHF l'équivalent de huit multiplex, c'est-à-dire 48 chaînes numériques, sur la quasi-totalité du territoire, qui seront toutes utilisables lorsque toute la diffusion analogique sera arrêtée. Ce chiffre est à comparer avec la situation actuelle où seulement trois chaînes analogiques couvrent toute la France. S'ajoutent à ces huit multiplex un multiplex national en VHF pour la télévision numérique et deux pour la radio numérique.

Maintenant que le futur plan de fréquences qui va s'appliquer après l'extinction de l'analogique est établi, les discussions sur un plan transitoire, permettant de satisfaire les besoins de certaines régions déficitaires en fréquences, ont pu reprendre. En Alsace une solution a été trouvée pour le département du Haut-Rhin : il devrait être couvert pour l'essentiel par l'allumage de l'émetteur de Mulhouse, prévu lors de la « phase V » de la TNT, en mars 2007 ; les négociations ont pu aboutir sur le prêt d'une fréquence par la Suisse. Concernant le département du Bas-Rhin, où la situation est plus difficile, le CSA a annoncé le 10 mai dernier un plan fondé sur le basculement au numérique de plusieurs émetteurs analogiques de faible puissance. Une opération pilote devrait être menée fin 2006-début 2007 sur une zone réduite pour valider les modalités pratiques de l'opération. Le site de Niederbronn-les-Bains a été choisi pour cette expérimentation. Le basculement au tout numérique sera progressif, et se traduira d'abord par l'offre gratuite en qualité numérique des chaînes analogiques actuelles.

M. Serge Poignant a souhaité savoir si le réseau des antennes de téléphonie mobile ou de la TNT pourrait être utilisé pour la télévision mobile.

Le ministre délégué à l'industrie a répondu que les antennes de la TNT pourront en effet être utilisées pour la télévision mobile mais qu'elles ne le seront que dans une quinzaine de grandes villes. Hors des zones denses, aucun acteur économique ne lancera une opération d'équipement terrestre pour la couverture en télévision mobile. C'est le satellite qui sera lancé en 2008 qui assurera la couverture universelle.

M. Patrice Martin-Lalande a rappelé qu'il s'était déjà interrogé sur le choix de la diffusion hertzienne terrestre pour la diffusion de la télévision numérique. On pouvait être certain, lorsque ce choix a été fait, que la totalité du territoire ne serait pas couverte, l'absence de couverture concernant 15 % de la population. D'autres choix étaient donc envisageables, comme la télévision par Internet ou le satellite. Il est permis de se demander s'il n'aurait pas été préférable de s'engager d'emblée dans cette dernière voie, puisqu'il s'avère que seul le lancement d'un satellite rendra les chaînes de la TNT accessibles sur l'ensemble du territoire. Le choix du satellite aurait aussi permis un basculement plus rapide, libérant ainsi plus vite des fréquences et rendant possible de nouveaux services. Le ministère dispose-t-il des moyens d'établir une comparaison des coûts des deux options qui s'ouvraient, sachant que la TNT implique l'achat d'un adaptateur dont le prix moyen est de 50 euros, et que la parabole coûte tout au plus 100 euros.

Le ministre délégué à l'industrie a répondu que, techniquement, la réception par satellite nécessite une parabole, mais aussi, pour une bonne qualité d'image, que cette parabole soit située à l'extérieur des habitations. La TNT n'exige pas cela. L'utilisation d'un satellite est en revanche nécessaire pour l'achèvement de la couverture totale du territoire en télévision numérique, achèvement qui rendra seul possible l'extinction de l'analogique.

Sur le plan financier, la comparaison des deux options est difficile. On peut cependant signaler que la diffusion des chaînes de la TNT par voie satellitaire était possible sans que l'adoption d'une loi soit nécessaire. Si aucune chaîne n'a fait ce choix, c'est que les chaînes ont eu peur de na pas toucher assez de clients pour rentabiliser cet investissement. En revanche les chaînes ont bien été candidates à une diffusion numérique terrestre ; elles savaient qu'elles pouvaient compter sur un parc important.

M. Patrice Martin-Lalande a envisagé que le passage à la TNT soit accéléré, en aidant les utilisateurs à acquérir l'équipement nécessaire ; cela pourrait être financé en augmentant temporairement la redevance audiovisuelle pour dégager des moyens à cet effet.

Le ministre délégué à l'industrie a répondu que dans les quelques zones d'Alsace où pour déployer la TNT, il faudra éteindre l'analogique, l'État sera amené à aider les foyers à s'équiper. Pour autant, il n'y a pas de raison que l'État fournisse des adaptateurs à tous les particuliers. L'expérience conduite à Niederbronn-les-Bains permettra de déterminer des critères d'aide.

Le président Émile Blessig a souligné que la diffusion numérique apportait une plus-value considérable par le passage de 6 à 18 chaînes et le développement de services nouveaux.

Il s'est aussi réjoui de constater que le ministre annonçait les mêmes dates et les mêmes chiffres que le CSA. Cela est rassurant, étant donné que les données citées sont parfois contradictoires.

La question se pose de savoir quelles sont les évolutions législatives nécessaires. Par exemple, les 15 % de téléspectateurs résidant dans des zones non couvertes par la TNT devraient être desservis par un bouquet satellitaire comprenant 18 chaînes gratuites sans abonnement. Cela est-il possible dans le cadre législatif et réglementaire actuel ?

D'autre part, trois autorités sont compétentes en matière de communication numérique  : l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), le CSA et l'Agence nationale des fréquences. S'agissant de la télévision mobile de troisième génération, quelle est l'autorité de régulation compétente ? Et quelle sera l'autorité compétente pour la télévision mobile de quatrième génération, celle qui sera en mode diffusion ?

Le passage de 6 à 18 chaînes laissera disponibles quelques fréquences numériques. Les positions de l'ARCEP et du CSA sur le dividende numérique diffèrent. Quelle est celle du ministre ?

Par ailleurs, l'approche nationale est-elle la seule possible ? Des solutions transfrontalières ne pourraient-elles être envisagées ? Un pylône situé en Forêt Noire pourrait mieux desservir le territoire alsacien, par exemple.

Enfin quelle autorité assurera la coordination nécessaire pour organiser la transition de l'analogique vers le numérique dans les régions frontalières comme l'Alsace ?

Le ministre délégué à l'industrie a répondu qu'une loi était nécessaire pour fixer les règles du jeu. La question s'est posée à chaque apparition d'un média nouveau. S'agissant de la télévision mobile, il faudra décider si les attributions seront faites par bouquet ou par chaîne ; ce choix ne relève pas des compétences du CSA, mais de la loi.

Aujourd'hui l'autorité de régulation de la télévision mobile est le CSA. On peut imaginer que, dans l'avenir, une seule instance de régulation sera compétente pour tous les modes de communication. Mais cela suppose une révision en profondeurs des méthodes. Pour le moment, l'ARCEP vend des fréquences, tandis que le CSA en alloue.

L'extinction de la diffusion analogique créera un dividende numérique. Les fréquences disponibles pourraient être utilisées par des télévisions locales. Le téléphone mobile haut débit ou la télévision, mobile ou fixe, haut débit seraient d'autres utilisations possibles.

Il n'y a pas lieu d'exclure a priori des solutions transfrontalières. C'est juste une question de qualité technique aussi et de décision de l'éditeur. Lorsque le CSA accorde à une chaîne une autorisation d'émettre, il le fait en lui imposant de respecter l'obligation d'émettre sur la totalité du territoire national. C'est à cette chaîne de juger si, pour remplir cette obligation, utiliser des antennes situées à l'étranger offre des avantages techniques ou financiers. Jusqu'à présent, cela ne semble pas avoir été le cas.

Enfin s'agissant de la transition dans les régions frontalières, des discussions sont en cours entre le CSA, l'Agence nationale des fréquences et leurs homologues allemands, fédéraux et de Länder. Techniquement, il n'est pas nécessaire d'avoir deux adaptateurs différents pour recevoir les TNT française et allemande.

M. Patrice Martin-Lalande a rappelé que 75 % des téléviseurs vendus en France en 2005 n'avaient pas d'adaptateur intégré, et regretté que l'offre soit si inadaptée au regard de l'avenir. Il a ensuite demandé pourquoi le lancement du satellite destiné à assurer la couverture totale de la TNT avait pris du retard.

Le ministre délégué à l'industrie a d'abord précisé qu'il fallait différencier la diffusion par satellite des chaînes de la TNT, qui sera mise en œuvre à la fin de l'année 2006, et la diffusion de la télévision mobile, qui sera assurée par un satellite lancé en 2008.

S'agissant du premier point, la fusion entre CanalSat et TPS a occasionné un retard. Antérieurement à cette fusion, CanalSat devait diffuser au moyen du satellite Astra, et TPS au moyen du satellite Eutelsat. Il s'agit à présent de lever l'incertitude qui tient au fait que le Conseil de la concurrence pourrait prendre des mesures visant à éviter une situation de monopole. Les discussions sont en cours. Quoi qu'il en soit, la diffusion satellitaire des chaînes de la TNT sera assurée au début de l'année 2007.

Le président Émile Blessig a souhaité obtenir des précisions sur la date à laquelle sera disponible une carte indiquant les territoires couverts par la diffusion satellitaire. Il a ensuite demandé par qui, puisque la réception sera gratuite pour le téléspectateur, l'opérateur sera rémunéré.

Le ministre délégué à l'industrie a indiqué que ce sont les chaînes qui paient leur transporteur. Pour chacune des 18 chaînes, la diffusion hertzienne par TDF coûte environ 50 millions d'euros.

M. Patrice Martin-Lalande a souhaité évoquer la couverture du territoire en téléphonie mobile. S'il est vrai que la résorption des zones blanches est bien engagée, il reste beaucoup de zones où la qualité de transmission est très variable. Les communications passées depuis un véhicule en mouvement peuvent être interrompues. Ne faudrait-il pas, à un moment où 98 % de la population est couverte par la téléphonie mobile, instaurer une obligation d'itinérance plus exigeante, notamment sur les axes principaux de circulation ? Et pour cela, ne faudrait-il pas enfin définir ces axes ?

Le ministre délégué à l'industrie a répondu que deux dispositifs concouraient à l'amélioration des services à la population. D'une part, pour l'achèvement de la couverture du territoire, des accords ont été conclus entre les opérateurs et les conseils généraux concernés. C'est à ceux-ci qu'il appartient de définir les zones à équiper. Il est vrai que tous ne l'ont pas fait. D'autre part, le renouvellement des licences des opérateurs est subordonné à un accroissement de la couverture de la population ; il est demandé de la porter à 99  %. Enfin, une séance de questions orales avec débat a été consacrée à ce point au Sénat le 22 février 2006.

La responsabilité de délimiter les axes principaux de circulation incombe aux départements. Le ministre s'est dit prêt à rappeler cette obligation par voie de circulaire si cela est nécessaire.

Le président Émile Blessig a souligné que ce problème posait une fois de plus la question de la subsidiarité entre l'échelon local et l'échelon national. S'il est vrai qu'il appartient à chaque département de veiller à l'accès à la téléphonie mobile sur les itinéraires de grande circulation, l'échelon national doit veiller à la cohérence nationale. Il suffit qu'un département n'ait pas, sur un axe, la même opinion ou la même vigilance que ses voisins, et la continuité des dispositifs est rompue.

Le ministre délégué à l'industrie a considéré qu'il convenait d'examiner si une disposition d'ordre législatif était nécessaire pour faire avancer les choses.

III.- EXAMEN DU RAPPORT

Lors de sa réunion du mardi 19 décembre 2006, la Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a examiné le rapport d'information de M. Émile Blessig sur le déploiement de la couverture numérique sur le territoire (télévision numérique de terre, téléphonie mobile, internet haut débit).

Le président Émile Blessig, rapporteur, a exposé que la couverture numérique du territoire aura été le fil conducteur des travaux de la Délégation de l'Assemblée nationale à l'aménagement et au développement durable du territoire pendant la législature, de 2002 à 2006. La problématique des réseaux, qu'il ne faut pas confondre avec celle des contenus, qui relève d'une autre démarche, est en effet essentielle à l'attractivité des territoires : pour avoir les contenus, il faut les réseaux. C'est ainsi que le premier rapport qu'elle a élaboré (n° 443), en novembre 2002, confié à M. Nicolas Forissier, et intitulé Réduire la fracture numérique, concernait la desserte du territoire par la téléphonie mobile et par internet haut débit. La Délégation a continué à s'intéresser à la desserte en haut débit, évoquée notamment au sein du rapport n° 2439 intitulé Quatre enjeux pour les territoires. Le rapport présenté dresse un bilan de l'évolution de la couverture numérique dans ces deux domaines et s'interroge sur les conditions de la couverture du pays en télévision numérique de terre, et aux conséquences de cette nouvelle évolution numérique.

En 2002, personne n'aurait imaginé une couverture totale du territoire en internet haut débit et encore moins en très haut débit. La couverture haut débit sera achevée à 98 % fin 2007. Une nouvelle technologie hertzienne, le WiMax en est la cause. Ces réseaux WiMax fournissent aussi, notamment aux entreprises, du très haut débit.

Le réseau de la couverture du territoire en téléphonie mobile sera définitivement achevé en 2007. L'enjeu va être alors de le pérenniser pour y faire passer les téléphonies 3G, puis 4G, qui s'annoncent et qui feront passer l'image, le son, la télévision.

Après l'arrêt en 2011 de la diffusion télévisuelle analogique et son basculement au tout numérique, non seulement trente-six canaux numériques supplémentaires seront libérés, mais le nouveau plan de répartition international des fréquences va entrer en vigueur : plus de 100 canaux, à utiliser le plus intelligemment possible, pourraient être disponibles pour des services de tous ordres, télévision traditionnelle, mais aussi sur mobile, à la demande, ou encore services internet passant par voie hertzienne ; c'est la problématique du « dividende numérique ».

De plus, on voit déjà aujourd'hui se dessiner la « convergence numérique ». Les contenus vont tous pouvoir passer par des canaux autrefois séparés et spécialisés. Ainsi, non seulement le câble ou l'ADSL mais aussi le WiMax vont permettre de passer la télévision et les nouveaux services numériques.

Dans ces conditions, comment et à qui attribuer les fréquences ? Comment contrôler les contenus diffusés ? Comment définir et préserver des usages de service public ? Et quelles modalités de réglementation pour ce nouveau spectre ?

La couverture numérique d'un territoire est aussi vitale que sa desserte par la route ou le service postal : aujourd'hui, l'outil de la communication, l'outil des transferts de données est numérique. La couverture numérique prend désormais trois formes : la téléphonie mobile, l'internet à haut débit et à très haut débit, la télévision numérique. Avec l'évolution des technologies et la mise en évidence d'un « dividende numérique » dans les fréquences les plus faciles d'utilisation, du fait du passage de la diffusion analogique à la diffusion numérique de la télévision, ces outils convergent pour utiliser les mêmes normes de diffusion et les mêmes supports.

À l'issue du présent rapport, le rapporteur propose des conclusions dans les trois domaines suivants : la pérennisation du réseau de téléphonie mobile sur tout le territoire, l'impératif d'une couverture totale du territoire en internet haut débit, un déploiement maîtrisé de la TNT. S'y ajoutent deux questions subsidiaires mais très importantes sur le fond, qui sont apparues au fil de l'examen de ces trois domaines, la gestion du dividende numérique et l'adaptation de l'organisation de l'État à la « convergence numérique ».

La pérennisation du réseau de téléphonie mobile passe d'abord par l'achèvement de l'équipement des « zones blanches ». Pour les rares sites de la phase I de cet achèvement pour lesquels il n'a pas encore été entrepris de travaux, des solutions au cas par cas doivent être trouvées. Si l'étude des dossiers faisait apparaître que des efforts disproportionnés sont demandés à certaines collectivités du fait de leurs caractéristiques, alors, dans ces cas, la solidarité doit trouver à s'appliquer : c'est la question de la péréquation.

La continuité de la desserte en téléphonie mobile sur le réseau routier structurant, c'est-à-dire non seulement les autoroutes mais l'essentiel de l'ancien réseau routier national, désormais confié aux départements, doit être assurée. L'obligation imposée aux opérateurs de publier des cartes de leurs zones blanches est un bon outil pour la résorption des incohérences. Le cas échéant, le calendrier de résolution des incohérences pourrait faire l'objet d'un avenant supplémentaire à la convention du 15 juillet 2003.

Le réseau de couverture du territoire en téléphonie mobile doit pouvoir porter les progrès futurs de celle-ci. Les fréquences utilisées pour les prochaines générations de téléphonie mobile ne doivent pas rendre ce réseau obsolète ou insuffisant. Les populations des territoires les moins denses ou les plus difficiles doivent avoir accès aux services qu'elles vont offrir. Pour cela il faut dans l'avenir que continuent à être attribuées à la téléphonie mobile des fréquences permettant de faire passer les communications dans leur nouvelle définition (3G, 4G) sans qu'il soit besoin de construire des relais supplémentaires : autrement dit, une partie du dividende numérique issu des progrès technologiques et des négociations internationales sur les fréquences hertziennes doit être attribuée à la téléphonie mobile point à point.

La couverture de toutes les habitations en internet haut débit est une question d'équité. Dans la mesure où seuls 1 % des foyers ne pourront pas être couverts dans des conditions commerciales, la solidarité nationale doit apporter son concours à leur couverture. Le Fonds national de soutien au déploiement du haut débit doit venir appuyer la résorption de la couverture des zones blanches du haut débit lorsque celle-ci n'est pas possible par le seul jeu du marché. De ce point de vue, l'ambition du Gouvernement d'assurer partout l'arrivée du haut débit à la mairie et à un autre point de chaque commune est un objectif minimal : les technologies hertziennes actuelles, notamment le WiMax dont les licences ont été attribuées cet été, permettent de faire mieux. Chaque fois que l'État interviendra, il devra rechercher, en concertation avec les opérateurs et les collectivités territoriales, la couverture de l'ensemble de la population du village-centre, et travailler sur les conditions d'équipement des hameaux et maisons isolées.

Par ailleurs, partout où cela est possible, il faut travailler à ouvrir l'accès à la concurrence, source de diminution des prix et d'émulation en matière de services offerts. Pour cela, la pluralité des solutions techniques est aussi une opportunité.

Enfin, la décentralisation a abouti, dans le domaine des réseaux numériques, à une certaine confusion : si les régions et les départements ont souvent pris la responsabilité des grands réseaux de desserte, la desserte fine, celle qui mène le réseau jusqu'à chaque maison, est souvent laissée aux communes et à leurs groupements, qui n'ont pas les ressources d'ingénierie humaine nécessaires. Il faut donc que dans chaque région il y ait un chef de file pour coordonner les interventions des autres collectivités et être leur relais auprès des opérateurs.

L'obligation de transport gratuit du signal pour l'utilisateur, autrement dit le principe « must carry, must deliver » doit s'appliquer à l'ensemble des modes de diffusion de toutes les chaînes en clair de la TNT. L'action en ce sens du CSA pour les réseaux câblés, ainsi que les modifications introduites par le Sénat pour le satellite et la télévision mobile personnelle au sein du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur doivent être approuvées.

Des solutions doivent aussi être recherchées pour la diffusion de la télévision numérique par l'ADSL ; aujourd'hui, certaines chaînes hertziennes analogiques refusent à des opérateurs ADSL le droit de les diffuser, même à des conditions économiques fonctionnelles.

Dans les zones de partage de fréquences, où l'accès à des télévisions analogiques étrangères est la contrepartie d'un accès très restreint aux chaînes analogiques nationales, et où vivent 15 % de la population, une concertation avec les pouvoirs publics étrangers devra être organisée pour faire coïncider les dates du basculement définitif de la diffusion hertzienne vers le numérique des deux côtés de la frontière.

Les responsabilités des divers organismes d'État (ANFR, CSA) dans l'organisation du basculement sont aujourd'hui difficiles à appréhender ; pour les territoires concernés, cela rend le suivi très compliqué ; ces responsabilités doivent donc être précisées. L'État devra aussi désigner un interlocuteur unique pour les autorités étrangères et l'information des élus sur les modalités du basculement.

Le projet de loi sur la modernisation de la diffusion audiovisuelle et la télévision du futur institue un fonds d'aide à l'équipement en télévision numérique. C'est une question d'équité et de solidarité. En l'état actuel du projet de loi, les catégories y ayant accès sont les foyers dispensés du paiement de la redevance audiovisuelle. Des barèmes réalistes devront être fixés et le coût d'ensemble évalué et provisionné. Ce fonds interviendra d'abord pour aider à l'acquisition d'adaptateurs. Il devra pouvoir aider également le petit nombre de foyers qui ne pourront recevoir les chaînes numériques gratuites que par le satellite. Enfin, il devra aussi pouvoir intervenir pour aider le passage au numérique des foyers dont le câble constitue le seul mode d'accès à la télévision gratuite.

En 2001, l'extinction de la télévision analogique et le basculement au tout-numérique va créer un important dividende numérique, c'est-à-dire une forte augmentation des fréquences utilisables. Ce dividende numérique doit être équitablement partagé entre services et opérateurs. Il n'a vocation à être réservé ni à de seuls services de télévision, ni aux éditeurs actuels de programmes. Il va être à la source de services nouveaux qui vont se construire grâce à son existence, et dont on ne connaît pas l'étendue aujourd'hui. Par ailleurs, parmi les services utilisateurs de fréquences, il y a des services publics, comme la sécurité civile, l'aviation civile, les armées ; Le dividende numérique doit aussi pouvoir leur permettre d'avoir des outils plus efficaces. Le spectre des fréquences est un bien public, et son abondance nouvelle est le fruit de l'action de l'État et des progrès de la technologie. Autant il est légitime que des usages différents soient soumis à des régimes différents, autant sa répartition entre les usagers doit pouvoir souplement évoluer, en fonction de l'intérêt public et sous le contrôle du Parlement.

Enfin, la « convergence numérique », qui permet de faire passer les mêmes contenus, et notamment la télévision, par des réseaux autrefois spécialisés (radio, télévision, téléphone mobile, câble, ADSL) pose la question de l'instance de la régulation des ressources, et tout particulièrement des ressources hertziennes : l'organisation actuelle de régulation de la ressource hertzienne, partagée entre les trois organismes que sont l'Agence nationale des fréquences, qui représente l'autorité régalienne, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, qui loue des fréquences aux opérateurs de télécommunications, et le CSA, qui les alloue moyennant un contrôle du contenu, devra sans doute être modifiée. Des dispositions juridiques nouvelles devront être élaborées pour, au-delà du jeu des forces du marché, garantir l'accès équitable des territoires aux services numériques, la continuité de la production de contenus audiovisuels de qualité et l'efficacité des outils de service public.

Le président Émile Blessig a conclu son propos en remarquant qu'aucun des membres de la Délégation n'aurait pu imaginer en 2002 une transformation où l'on est passé, dans le temps d'une législature, d'une situation où des services spécifiques étaient rendus par des opérateurs spécifiques et diffusés par des canaux séparés à une convergence où l'ensemble des opérateurs se trouvent devant les mêmes possibilités de proposer l'intégralité des mêmes produits et services à la population.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Jean Launay a jugé le rapport présenté intéressant et utile, même s'il arrive en fin de législature ; on peut espérer qu'il pèsera, par la qualité de ses diagnostics, sur les discussions futures dans les domaines qu'il aborde.

Il a ensuite exposé que la problématique de l'extension de la couverture numérique sur le territoire, téléphonie mobile, internet haut débit et TNT, rejoignait une problématique ancienne : il y a 15 ans encore, il y avait des aides publiques, accordées le plus souvent par les départements, au profit de collectivités locales dont les habitants ne recevaient pas la deuxième ou la troisième chaîne et qui finançaient pour eux l'installation de réémetteurs. En revanche, la différence aujourd'hui est que la population de ces collectivités n'accepte plus les délais qui ont existé par le passé entre l'équipement des zones facilement couvertes par les opérateurs et celui des territoires peu denses ou montagneux, les plus coûteux à couvrir.

Il a ensuite demandé au rapporteur comment il envisageait que s'exerce la péréquation des coûts d'équipement de ces territoires, qui a souvent manqué jusqu'ici : en matière de WiMax, il semble que ce sont déjà les régions qui s'engagent.

Il a aussi souhaité savoir quelle serait l'autorité qui pourra attribuer à la téléphonie mobile le droit d'accéder aux fréquences du dividende numérique, dans quelles conditions on pourrait conserver le spectre des fréquences dans le domaine public et comment on pourrait faire vivre un contrôle parlementaire de leur affectation.

Après avoir enfin jugé que le rapport présenté était un rapport utile qui permettrait de fonder de bonnes décisions dans l'avenir, il a exposé que les députés de la Délégation membres du groupe socialiste voteraient en faveur des conclusions proposées par le rapporteur.

M. André Chassaigne s'est réjoui de la continuité du suivi de l'évolution de la couverture numérique du territoire que manifestait la présentation de ce rapport final, après que la Délégation ait commencé ses travaux sous la présente législature par un rapport sur la couverture en téléphonie mobile et internet haut débit ; un tel suivi de premières propositions n'est pas toujours organisé. Saluant ensuite l'objectivité du constat formulé, il a jugé que le rapport était un document qui permettait d'y voir plus clair et qui serait utile pour l'action. Il a exposé que, au nom de son groupe, il voterait en faveur des conclusions proposées.

Il a ensuite souligné l'insuffisante maîtrise publique en matière de réseaux numériques : ce domaine est marqué par un grand nombre d'intervenants, publics et privés, qui mènent parfois des politiques différentes et se renvoient souvent les responsabilités. Ainsi, pour la réalisation du plan de résorption des zones blanches de la téléphonie mobile, les départements n'ont pas tous été très allants ; quand ils ont accepté de financer les pylônes nécessaires, ce sont les communes qui n'ont pas toujours été capables de fournir le terrain de l'implantation ou les opérateurs qui ont été bien lents à y installer leurs équipements ; des solutions rationnelles d'utilisation des pylônes existants ont buté sur des questions de prix, obligeant à reprendre toute la procédure sur d'autres sites ; les compétences n'ont pas toujours été là non plus : les problèmes d'ingénierie locale sont récurrents. Au bout du compte, du fait de cet émiettement, on aboutit à rendre les usagers mécontents et à des retards de 18 mois à 2 ans sur des annonces fermement proclamées.

M. Patrice Martin-Lalande s'est réjoui que la Délégation ait pris le parti de faire le point sur une question que son évolution permanente rend redoutable : lors de réunions avec les futurs usagers sur l'arrivée du haut débit par exemple, on est parfois obligé d'avouer une absence totale de maîtrise des données. Dans ces conditions d'évolution, il est difficile de prendre des options. Il est donc intéressant qu'on essaie, au niveau national, de poser des points de repère.

En matière de téléphonie mobile, il faut cesser de considérer que le taux de couverture du territoire de chaque opérateur fait partie de ses arguments face à la concurrence. Les opérateurs vont avoir d'autres priorités que la couverture des zones les moins peuplées. Il faut donc qu'une couverture intégrale du territoire se base sur l'actuel maillage du réseau 2G et l'accroissement des zones de mutualisation et d'itinérance.

En revanche, le rythme actuel de réalisation du plan de résorption paraît bon ; cependant, les polémiques sur l'influence des émissions hertziennes sur la santé, qui gênent parfois la bonne implantation des pylônes, doivent être traitées par un vrai discours scientifique : moins de pylônes, ce sont des émissions plus fortes et des conséquences aujourd'hui mal connues sur la personne qui a le téléphone à l'oreille.

M. Patrice Martin-Lalande a conclu que le travail présenté allait permettre d'ouvrir un débat dont on a aujourd'hui besoin.

Le président Émile Blessig, rapporteur, a répondu que la répartition des fréquences entre les utilisateurs et la détermination des modalités de cette répartition étaient du ressort de l'État. Au nom de l'État, la répartition est effectuée par l'Agence nationale des fréquences (ANFR). Cette répartition est aujourd'hui l'objet d'intenses pressions entre opérateurs de télévision et de téléphonie. Il est impératif que la téléphonie mobile puisse avoir sa part du dividende numérique si c'est la condition pour qu'on n'ait pas à construire de nouveaux pylônes sur les territoires.

Le suivi effectué par la Délégation tout au long de la législature, avec l'audition régulière des acteurs de référence du secteur, ARCEP, CSA, ANFR, montre bien à quel point, sur ces nouvelles technologies, il faut réfléchir à l'équipement des zones sur lesquelles le marché ne peut suffire, et notamment les zones rurales ; en 2003, on s'est rendu compte qu'on ne pourrait couvrir le territoire en téléphonie mobile qu'en recourant à la mutualisation des équipements entre opérateurs, à l'itinérance, le signal des uns passant alors sur les équipements des autres, et aux financements européens. Aujourd'hui, le débat change de nature : à partir du moment où le territoire est maillé, on peut réfléchir aux contenus et aux services qui peuvent être distribués.

La Délégation a alors adopté, à l'unanimité, les conclusions présentées par le rapporteur.

CONCLUSIONS ADOPTÉES PAR LA DÉLÉGATION

Dans une civilisation caractérisée par la mobilité des hommes, des informations et des marchandises, la couverture numérique d'un territoire est aussi vitale que sa desserte par la route ou le service postal : aujourd'hui, l'outil de la communication, l'outil des transferts de données est numérique.

La couverture numérique prend désormais trois formes : la téléphonie mobile, l'internet à haut débit et à très haut débit, la télévision numérique. Avec l'évolution des technologies et la mise en évidence d'un « dividende numérique » dans les fréquences les plus faciles d'utilisation, du fait du passage de la diffusion analogique à la diffusion numérique de la télévision, ces outils convergent, pour utiliser les mêmes normes de diffusion et les mêmes supports.

Cette convergence rend d'autant plus nécessaire de veiller à l'équipement équitable des territoires.

Veiller à cette équité a été le fil qui a guidé la Délégation tout au long de la législature. À l'issue du présent rapport, elle a adopté les conclusions suivantes.

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L'indispensable pérennisation du réseau de téléphonie mobile sur tout le territoire.

1. Concernant l'achèvement de l'équipement des zones blanches, pour les rares sites de la phase I de cet achèvement pour lesquels il n'a pas encore été entrepris de travaux, des solutions au cas par cas doivent être trouvées. Si l'étude des dossiers faisait apparaître que des efforts disproportionnés sont demandés à certaines collectivités du fait de leurs caractéristiques, alors, dans ces cas, la solidarité doit trouver à s'appliquer.

2. La continuité de la desserte en téléphonie mobile sur le réseau routier structurant, c'est-à-dire incluant l'ancien réseau routier national désormais confié aux départements, doit être assurée. Pour ce faire, le groupe de travail regroupant collectivités locales et opérateurs sous l'autorité du ministère délégué à l'aménagement du territoire paraît un cadre adéquat pour d'abord établir la liste des incohérences, puis travailler à leur résolution. L'obligation imposée aux opérateurs de publier des cartes de leurs zones blanches est un bon outil. Le cas échéant, le calendrier de résolution des incohérences pourrait faire l'objet d'un avenant supplémentaire à la convention du 15 juillet 2003.

3. Le réseau de couverture du territoire en téléphonie mobile, si difficilement achevé, doit pouvoir porter les progrès futurs de celle-ci. Les fréquences utilisées pour les prochaines générations de téléphonie mobile ne doivent pas rendre ce réseau obsolète ou insuffisant. Les populations des territoires les moins denses ou les plus difficiles doivent avoir accès aux services qu'elles vont offrir. Pour cela il faut dans l'avenir que continuent à être attribuées à la téléphonie mobile des fréquences permettant de faire passer les communications dans leur nouvelle définition (3G, 4G) sans qu'il soit besoin de construire des relais supplémentaires : autrement dit, une partie du dividende numérique issu des progrès technologiques et des négociations internationales sur les fréquences hertziennes doit être attribuée à la téléphonie mobile point à point.

*

L'impératif d'une couverture totale du territoire en internet haut débit.

4. La couverture de toutes les habitations en internet haut débit est une question d'équité. Dans la mesure où seuls 1 % des foyers ne pourront pas être couverts dans des conditions commerciales, la solidarité nationale doit apporter son concours à leur couverture. Le Fonds national de soutien au déploiement du haut débit doit venir appuyer la résorption de la couverture des zones blanches du haut débit lorsque celle-ci n'est pas possible par le seul jeu du marché. De ce point de vue, l'ambition du Gouvernement d'assurer partout l'arrivée du haut débit à la mairie et à un autre point de chaque commune est, de l'avis de la Délégation, un objectif minimal : les technologies hertziennes actuelles, notamment le WiMax dont les licences ont été attribuées cet été, permettent de faire mieux. Chaque fois que l'État interviendra, il devra rechercher, en concertation avec les opérateurs et les collectivités territoriales, la couverture de l'ensemble de la population du village-centre, et travailler sur les conditions d'équipement des hameaux et maisons isolées.

Par ailleurs, partout où cela est possible, il faut travailler à ouvrir l'accès à la concurrence, source de diminution des prix et d'émulation en matière de services offerts. Pour cela, la pluralité des solutions techniques est aussi une opportunité.

Enfin, pour chaque territoire donné, il faut qu'une collectivité puisse être chef de file pour coordonner les interventions des collectivités et être leur relais auprès des opérateurs.

*

Un déploiement maîtrisé de la TNT

5. L'obligation de transport gratuit du signal pour l'utilisateur, autrement dit le principe « must carry, must deliver » doit s'appliquer à l'ensemble des modes de diffusion de toutes les chaînes en clair de la TNT. L'action en ce sens du CSA pour les réseaux câblés, les modifications introduites par le Sénat au sein du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur pour le satellite et la télévision mobile personnelle doivent être approuvées.

Des solutions doivent aussi être recherchées pour la diffusion de la télévision numérique par l'ADSL ; aujourd'hui, certaines chaînes hertziennes analogiques refusent à des opérateurs ADSL le droit de les diffuser, même à des conditions économiques fonctionnelles.

6. En zone de partage de fréquences, où l'accès à des télévisions analogiques étrangères est la contrepartie d'un accès très restreint aux chaînes analogiques nationales, une concertation avec les pouvoirs publics étrangers devra être organisée pour faire coïncider les dates du basculement définitif de la diffusion hertzienne vers le numérique des deux côtés de la frontière.

Les responsabilités dans l'organisation du basculement des divers organismes d'État (ANFR, CSA) doivent être précisées.

L'État devra aussi désigner un interlocuteur unique pour les autorités étrangères et l'information des élus sur les modalités du basculement.

7. Le projet de loi sur la modernisation de la diffusion audiovisuelle et la télévision du futur institue un fonds d'aide à l'équipement en télévision numérique. Une fois établies les catégories y ayant accès, des barèmes réalistes devront être fixés et le coût d'ensemble évalué et provisionné. Ce fonds devra aussi pouvoir intervenir pour aider le passage au numérique des foyers dont le câble constitue le seul mode d'accès à la télévision gratuite. Dans les zones de partage de fréquences, la date de référence pour l'ouverture des crédits du fonds devrait être, lorsqu'elle intervient avant l'extinction définitive de l'analogique en France, la date de l'extinction de la diffusion analogique par les pays riverains.

*

Gérer sereinement et équitablement le dividende numérique

8. En 2001, l'extinction de la télévision analogique et le basculement au tout-numérique vont créer un important dividende numérique, c'est-à-dire une forte augmentation des fréquences utilisables. Ce dividende numérique doit être équitablement partagé entre services et opérateurs. Il n'a vocation à être réservé ni à de seuls services de télévision, ni aux éditeurs actuels de programmes. Il va être à la source de services nouveaux qui vont se construire grâce à son existence et dont l'étendue n'est pas connue aujourd'hui. Par ailleurs, parmi les services utilisateurs de fréquences, il y a des services publics, comme la sécurité civile, l'aviation civile de météorologie nationale ; le dividende numérique doit aussi pouvoir leur permettre d'avoir des outils plus efficaces. Le spectre des fréquences est un bien public, et son abondance nouvelle est le fruit de l'action de l'État et des progrès de la technologie. Autant il est légitime que des usages différents soient soumis à des régimes différents, autant sa répartition entre les usagers doit pouvoir souplement évoluer en fonction de l'intérêt public et sous le contrôle du Parlement.

*

Adapter l'organisation de l'État à la « convergence numérique »

9. La « convergence numérique », qui permet de faire passer les mêmes contenus, et notamment la télévision, par des réseaux autrefois spécialisés (câble, ADSL, téléphone mobile) pose la question de l'instance de la régulation des ressources hertziennes : l'organisation actuelle de régulation de la ressource hertzienne, partagée entre les trois organismes que sont l'Agence nationale des fréquences, l'ARCEP et le CSA devra sans doute être modifiée. Des dispositions juridiques nouvelles devront être élaborées pour, au-delà du jeu des forces du marché, garantir l'accès équitable des territoires aux services numériques, la continuité de la production de contenus audiovisuels de qualité et l'efficacité des outils de service public.

ANNEXES

1. ENTRETIENS DU RAPPORTEUR

Le 13 juin 2006

- M. Jean Rozat, Directeur général, et Mme Muriel Guidoni, Déléguée aux relations institutionnelles, Arte France.

Le 20 septembre 2006

- M. François Rancy, Directeur général de l'Agence nationale des fréquences.

Le 28 novembre 2006

- Participation au colloque « Convergence numérique, convergence juridique » organisé par le Conseil d'État, où sont intervenus notamment MM. Paul Champsaur, Président de l'ARCEP, et Dominique Baudis, Président du CSA.

Le 2 décembre 2006

- M. Alain Cote, Conseiller pour l'innovation numérique de la région Alsace.

Le 6 décembre 2006

- M. Simon Barry, Secrétaire général du Comité stratégique pour le numérique.

Le 7 décembre 2006

- M. François Rancy, Directeur général de l'Agence nationale des fréquences.

2. CODE GÉNÉRAL DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
(extraits)

CHAPITRE V
RÉSEAUX ET SERVICES LOCAUX DE TÉLÉCOMMUNICATIONS

Article L. 1425-1

I. - Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, deux mois au moins après la publication de leur projet dans un journal d'annonces légales et sa transmission à l'Autorité de régulation des communications électroniques, établir et exploiter sur leur territoire des infrastructures et des réseaux de communications électroniques au sens du 3º et du 15º de l'article L. 32 du code des postes et communications électroniques, acquérir des droits d'usage à cette fin ou acheter des infrastructures ou réseaux existants. Ils peuvent mettre de telles infrastructures ou réseaux à disposition d'opérateurs ou d'utilisateurs de réseaux indépendants. L'intervention des collectivités territoriales et de leurs groupements se fait en cohérence avec les réseaux d'initiative publique, garantit l'utilisation partagée des infrastructures établies ou acquises en application du présent article et respecte le principe d'égalité et de libre concurrence sur les marchés des communications électroniques.
   Dans les mêmes conditions qu'à l'alinéa précédent, les collectivités territoriales et leurs groupements ne peuvent fournir des services de communications électroniques aux utilisateurs finals qu'après avoir constaté une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des utilisateurs finals et en avoir informé l'Autorité de régulation des communications électroniques. Les interventions des collectivités s'effectuent dans des conditions objectives, transparentes, non discriminatoires et proportionnées.

L'insuffisance d'initiatives privées est constatée par un appel d'offres déclaré infructueux ayant visé à satisfaire les besoins concernés des utilisateurs finals en services de communications électroniques.

II. - Lorsqu'ils exercent une activité d'opérateur de communications électroniques, les collectivités territoriales et leurs groupements sont soumis à l'ensemble des droits et obligations régissant cette activité.

Une même personne morale ne peut à la fois exercer une activité d'opérateur de communications électroniques et être chargée de l'octroi des droits de passage destinés à permettre l'établissement de réseaux de communications électroniques ouverts au public.

Les dépenses et les recettes afférentes à l'établissement de réseaux de communications électroniques ouverts au public et à l'exercice d'une activité d'opérateur de communications électroniques par les collectivités territoriales et leurs groupements sont retracées au sein d'une comptabilité distincte.

II. - L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes est saisie, dans les conditions définies à l'article L. 36-8 du code des postes et communications électroniques, de tout différend relatif aux conditions techniques et tarifaires d'exercice d'une activité d'opérateur de communications électroniques ou d'établissement, de mise à disposition ou de partage des réseaux et infrastructures de communications électroniques visés au I.

Les collectivités territoriales, leurs groupements et les opérateurs de communications électroniques concernés lui fournissent, à sa demande, les conditions techniques et tarifaires faisant l'objet du différend, ainsi que la comptabilité retraçant les dépenses et les recettes afférentes aux activités exercées en application du présent article.

IV. - Quand les conditions économiques ne permettent pas la rentabilité de l'établissement de réseaux de communications électroniques ouverts au public ou d'une activité d'opérateur de communications électroniques, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent mettre leurs infrastructures ou réseaux de communications électroniques à disposition des opérateurs à un prix inférieur au coût de revient, selon des modalités transparentes et non discriminatoires, ou compenser des obligations de service public par des subventions accordées dans le cadre d'une délégation de service public ou d'un marché public.

V. - Les dispositions du I relatives aux obligations de publicité et à la nécessité de constater une insuffisance d'initiatives privées, ainsi que le deuxième alinéa du II, ne sont pas applicables aux réseaux établis et exploités par les collectivités territoriales ou leurs groupements pour la distribution de services de radio et de télévision si ces réseaux ont été établis avant la date de promulgation de la loi nº 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.

CHAPITRE VI : COMMUNICATION AUDIOVISUELLE

Article L. 1426-1

Les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, dans les conditions prévues par la loi nº 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, éditer un service de télévision destiné aux informations sur la vie locale et diffusé par voie hertzienne terrestre ou par un réseau n'utilisant pas des fréquences assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel.

La collectivité territoriale ou le groupement conclut avec la personne morale à laquelle est confié le service un contrat d'objectifs et de moyens définissant des missions de service public et leurs conditions de mise en œuvre, pour une durée comprise entre trois et cinq ans. Ce contrat est annexé à la convention conclue avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel.

3. Recommandation du CSA relative
au service antenne sur les rÉseaux cÂblés numÉriq
UES

(Assemblée plénière du 21 mars 2006)

Depuis le lancement de la TNT gratuite et conformément aux dispositions de l'article 34-1 de la loi du 30 septembre 1986, les câblo-opérateurs proposant une offre en mode numérique ont progressivement adapté leurs offres commerciales d'accès au "service antenne", afin d'en étendre le périmètre aux chaînes gratuites de la TNT, dans les zones où les réseaux sont numérisés.

Toutefois, l'attention du Conseil supérieur de l'audiovisuel a été appelée sur les conditions et délais de mise en œuvre de ce "service antenne élargi", ainsi que sur les tarifs proposés par certains câblo-opérateurs pour la location de l'adaptateur.

Ces difficultés de mise en œuvre sont d'autant plus dommageables que les foyers raccordés ne disposent, le plus souvent, d'aucun autre moyen d'accès aux chaînes gratuites de la TNT, pour deux motifs principaux :

- les adaptateurs permettant la réception des chaînes gratuites de la TNT via un réseau câblé sont nécessairement distincts des adaptateurs permettant la réception de

graphique
s mêmes chaînes par voie hertzienne terrestre via l'antenne râteau, puisque les câblo-opérateurs utilisent la norme DVB-C et non la norme DVB-T ;

- certains câblo-opérateurs reprennent en crypté les signaux des chaînes en clair de la TNT, instaurant ainsi un monopole de fait en faveur de leurs adaptateurs.

I - RAPPEL DU CADRE JURIDIQUE

A travers l'article 34-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004, le législateur a entendu garantir aux foyers situés dans des habitats collectifs, qui ne sont plus raccordés à une antenne râteau mais connectés à un réseau de câblo-distribution, la réception des chaînes hertziennes gratuites normalement reçues dans la zone, sans être contraints de s'abonner à une offre de chaînes payantes.

Au-delà de cette disposition spécifique, la capacité des foyers raccordés à un réseau câblé d'accéder effectivement et dans des conditions financières satisfaisantes aux chaînes hertziennes gratuites, analogiques ou numériques, est susceptible de se rattacher à différents principes ou dispositions de la loi du 30 septembre 1986 :

- la liberté de communication constitue un principe constitutionnel, rappelé à l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986 ; dans sa décision de principe n° 86-217 DC du 18 septembre 1986, le Conseil constitutionnel a explicité ce principe en considérant "que la libre communication des pensées et des opinions, garantie par l'article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, ne serait pas effective si le public auquel s'adressent les moyens de communication audiovisuelle n'était pas à même de disposer, aussi bien dans le cadre du secteur public que dans celui du secteur privé, de programmes qui garantissent l'expression de tendances de caractères différents dans le respect de l'impératif d'honnêteté de l'information ; qu'en définitive, l'objectif à réaliser est que les auditeurs et les téléspectateurs qui sont au nombre des destinataires essentiels de la liberté proclamée par l'article 11 de la Déclaration de 1789 soient à même d'exercer leur libre choix sans que ni les intérêts privés ni les pouvoirs publics puissent y substituer leurs propres décisions, ni qu'on puisse en faire les objets d'un marché" ; il en résulte que l'ensemble des téléspectateurs doivent être en mesure de recevoir l'offre télévisée la plus large possible, sans être pénalisés par le choix de raccordement à un réseau ;

- l'extinction rapide de la diffusion hertzienne par voie analogique constitue un impératif, inscrit dans les engagements internationaux de la France (3) et conforme à la bonne utilisation des fréquences, dont le CSA est chargé en application de l'article 22 de la loi de 1986 ; le législateur a notamment subordonné cette extinction à l'équipement des foyers pour la réception numérique (4); à ce titre également, il importe que les foyers raccordés à des réseaux câblés aient effectivement accès aux chaînes en clair de la TNT, qui incluent la reprise intégrale et simultanée, en mode numérique, des chaînes hertziennes analogiques ;

- aux termes de l'article 22 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA est chargé d'assurer une bonne réception des signaux, ce qui implique notamment que les signaux des chaînes hertziennes en clair soient effectivement diffusés en clair dans leur zone de diffusion et ne fassent pas l'objet d'un cryptage qui ne serait pas justifié par des raisons impérieuses.

II - PRÉCONISATIONS DU CSA

Il ressort de l'ensemble des textes précités que la réception des chaînes en clair de la TNT par les foyers raccordés doit être assurée dans les meilleures conditions, ce qui signifie notamment que ces foyers ne doivent pas être contraints de souscrire un contrat de location d'adaptateur auprès des câblo-opérateurs.

En conséquence, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, sur le fondement des articles 1er, 22 et 34-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, demande à l'ensemble des câblo-opérateurs, dans un délai maximum de trois mois à compter de la publication de la présente recommandation, de se conformer aux préconisations suivantes.

1. Les conditions commerciales proposées aux gestionnaires d'immeubles

L'article 34-1 de la loi du 30 septembre 1986, introduit par la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004, prévoit que l'offre commerciale faite au titre du service antenne "ne prend en compte que les frais d'installation, d'entretien et de remplacement du réseau".

Avant l'intervention de la loi de 2004, les câblo-opérateurs proposaient déjà aux gestionnaires d'immeubles un service antenne, en mode analogique ou numérique selon les réseaux, qui était limité aux chaînes hertziennes analogiques en clair. Or, l'ajout des chaînes en clair de la TNT ne saurait représenter qu'un coût marginal. En conséquence, dans l'hypothèse où le tarif proposé pour le service antenne incluant les chaînes en clair de la TNT serait supérieur à celui précédemment pratiqué pour le service antenne sans ces chaînes, les câblo-opérateurs devraient fournir au CSA, à sa demande, les éléments justifiant cette augmentation au regard des dispositions précitées de l'article 34-1 de la loi de 1986. 

2. La question de l'adaptateur

Les câblo-opérateurs devront opter pour l'une des trois solutions suivantes :

- soit reprendre en l'état les signaux hertziens terrestres de ces chaînes, diffusés en clair, ce qui  permettrait aux téléspectateurs de ne pas se soucier de la nature du réseau auquel ils sont raccordés (antenne râteau ou réseau câblé) pour recevoir les chaînes gratuites de la TNT ; jusqu'à l'extinction de l'analogique, une telle solution obligerait toutefois certains câblo-opérateurs soit à transporter le même service trois fois (en SECAM analogique, en DVB-T et en DVB-C numériques), soit à remplacer leur parc de décodeurs ;

- soit distribuer les chaînes gratuites de la TNT en DVB-C non crypté et retenir pour ces signaux un profil de signalisation qui complétera le document établissant « les services et le profil de signalisation pour la diffusion de la télévision numérique de terre" élaboré au sein de la commission technique d'experts de la télévision numérique réunie sous l'égide du Conseil supérieur de l'audiovisuel, ce qui permettra la mise sur le marché d'adaptateurs DVB-C ou d'adaptateurs bi-standard DVB-C et DVB-T à un prix qui devrait être équivalent à celui des adaptateurs TNT ;

- soit offrir aux foyers concernés ou à leurs gestionnaires d'immeubles la mise à disposition de l'adaptateur contre le dépôt d'une caution ou pour un prix d'achat d'un montant correspondant aux seuls frais d'acquisition et de mise en place.

Fait à Paris, le 21 mars 2006

Pour le Conseil supérieur de l'audiovisuel,

Le Président

Dominique BAUDIS

4. LETTRE AU RAPPORTEUR DE M. FRANÇOIS LOOS,
MINISTRE DÉLÉGUÉ À L'INDUSTRIE

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5. LEXIQUE

Bit/s (bit par seconde) : unité élémentaire de débit de données sur un support de transmission.

Les débits actuels les plus courants s'expriment en kilobits, mégabits et gigabits par seconde (Kbit/s, Mbit/s, Gbits/s). Chaque préfixe multiplicateur vaut mille fois le précédent, ou plus exactement 1024 fois, le bit participant d'un système de numération binaire où les chiffres »ronds sont non pas des puissances de 10, mais de 2. En conséquence, 1Kbit/s vaut 1024 bit/s, 1 Mbit/s vaut 1024 Kbit/s, soit de l'ordre de 1 million de bit/s, 1 Gbit/s vaut 1024 Mbit/s, de l'ordre de 1 milliard de bit/s.

DSL (Digital Subscriber Line) : système de liaison numérique par fil. La liaison numérique permet l'utilisation simultanée sur la même ligne de fréquences différentes pour le transport des données et du signal voix. Les données et le signal voix peuvent ainsi circuler simultanément sur la même ligne sans interférer.

Il y a plusieurs types de liaisons DSL. L'ADSL ou Asymmetric Digital Subscriber Line est une liaison numérique à débit asymétrique : le terme « asymétrique » signifie que le débit descendant vers l'abonné est beaucoup plus important que le débit montant (venant de l'abonné). Le VDSL (very high big rate DSL) est une liaison ADSL à très haut débit. Le SDSL (Symmetric Digital Subscriber Line) est une liaison DSL symétrique, c'est-à-dire que le débit montant est égal au débit descendant.

DVB-T (Digital Video Broadcasting - Terrestrial, soit en français, Diffusion Vidéo Numérique - Terrestre) : système de radiodiffusion hertzienne numérique destiné à une utilisation audiovisuelle sur terminal fixe. C'est la norme de la TNT.

DVB-H (Digital Video Broadcasting - Handheld, en français Diffusion Vidéo Numérique - Portable) : système de radiodiffusion hertzienne numérique destiné à une réception audiovisuelle sur terminal mobile. C'est la norme qui est en train de s'imposer pour la télévision sur récepteur mobile.

Diffusion hertzienne : diffusion par le moyen des ondes, c'est-à-dire par la propagation, dans l'air ou l'espace, d'une vibration du champ électrique et magnétique. Les ondes sont définies par leur longueur (longueur d'onde) ou encore leur fréquence, c'est-à-dire le nombre de fois que le phénomène se reproduit pendant une unité de temps donnée. Les fréquences sont définies en hertz (symbole: Hz), du nom du physicien allemand Heinrich Rudolf Hertz. Un hertz correspond à une oscillation par seconde. Un mégahertz (MHz) correspond à un million de hertz et un gigahertz (GHz) à 1000 MHz, c'est-à-dire à un milliard de hertz.

Les fréquences les plus couramment évoquées dans le présent rapport d'information sont les fréquences VHF (very high frequency) (très hautes fréquences,) qui vont de 30 MHz à 300 MHz et dont la longueur d'onde est métrique (10 m à 1 m), les fréquences UHF (ultra high frequency) (ultra hautes fréquences) qui vont de 300 MHz à 3 GHz et dont la longueur d'onde est décimétrique (1 m à 10 cm) et les fréquences SHF (super high frequency) (super hautes fréquences, de 3 GHz à 30 GHz et dont la longueur d'onde est centimétrique (10 cm à 1 cm).

Fréquences : cf diffusion hertzienne

MPEG 1, 2, 4... : normes de compression pour la vidéo numérique, élaborées par le groupe MPEG ou Moving Picture Expert Group. Ce groupe développe des standards internationaux de compression, décompression, traitement et codage d'images animées et de données audio.

MPEG-2 est la norme de seconde génération (1994) ; elle définit les aspects compression de l'image et du son et le transport à travers des réseaux pour la télévision numérique. Ce format est utilisé pour la diffusion de la télévision numérique aussi bien en réseau hertzien (TNT) que par satellite, câble, ou réseau de télécommunications (ADSL).

MPEG-4, norme introduite en 1998, est, contrairement à MPEG-2 capable de compresser non seulement les données destinées à la télévision numérique mais aussi toutes les nouvelles applications multimédias :téléchargement sur internet, multimédia sur récepteur mobile, radio numérique, jeux vidéos, télévision et supports haute définition. MPEG-4 a aussi enrichi les contenus multimédia, en ajoutant notamment le support pour lagestion des droits numériques et plusieurs types d'interactivités.

Multiplex : unité de contrôle centrale informatisée qui compile les divers services et programmes radio acheminés en un flux numérique homogène de données, et les conditionne techniquement pour la transmission.

T-DAB (terrestrial digital audio broadcasting, radiodiffusion audionumérique terrestre ) : procédure de transmission terrestre numérique hertzienne de signaux radio ; c'est la norme européenne de radio numérique.

WiFi : technologie de réseau informatique sans fil. Mise en place pour fonctionner en réseau interne, elle est désormais aussi déployée en extérieur pour permettre l'accès à l'internet haut débit. Le nom Wi-Fi correspond initialement au nom donné à la certification délivrée par l'organisme chargé de maintenir l'interopérabilité entre les matériels répondant à la norme 802.11.

WiMax (Worldwide Interoperability for Microwave Access) : groupe de normes définissant les connexions à haut débit par voie hertzienne. C'est également un nom commercial pour ces normes, comme l'est WiFI pour la norme 802.11.

6. LES GÉNÉRATIONS DE TÉLÉPHONIE MOBILE

Génération

Acronyme

Intitulé

Fréquences allouées

1G

Radiocom 2000

Radiocom 2000 France Telecom, Ligne SFR analogique

Bande UHF,
414 à 431 MHz

2G

GSM

Global System for Mobile Communication

Gamme de fréquences des 900 MHz

2,5G

GPRS

General Packet Radio Service

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2,75G

EDGE

Enhanced Data Rate for GSM Evolution

id

3G

UMTS

Universal Mobile Telecommunications System

1885-2025 MHz
et 2110-2200MHz

3,5G (3G+)

HSDPA

High Speed Downlink Package Access

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4G

OFDM

Orthogonal Frequency Division Multiplexing

7. CARTES DES COUCHES DE FRÉQUENCES
OBTENUES PAR LA FRANCE A L'ISSUE DE LA CRR-06

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Source : Agence nationale des fréquences

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1 () Un lexique des prinicpaux termes et abréviations techniques figure en annexe au présent rapport.

2 () Le chiffre cité pour les programmes gratuits est tantôt de 18, tantôt de 17. Cette divergence vient du fait que LCP AN et Public Sénat, qui se partagent le canal de La Chaîne parlementaire, fonctionnent de façon autonome l'une de l'autre. Il y a bien 17 canaux.

3 () Dans le cadre de la Conférence régionale des radiocommunications et de la communication de la Commission européenne du 24 mai 2005 proposant de fixer au début de l'année 2012 la date de suppression totale de l'analogique dans tous les Etats membres de la Communauté européenne.

4 () Cf. article 127 de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004.