N° 1431 tome VI - Avis sur le projet de loi de finances pour 2014 (n°1395)



N
° 1431

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2013

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2014 (n° 1395),

TOME VI

ÉCONOMIE

Commerce extérieur

PAR Mme Seybah Dagoma

Députée

——

Voir le numéro 1428 (annexe 21)

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

I. L’INTERNATIONALISATION, ENJEU STRATÉGIQUE 9

A. L’ÉQUILIBRE DU SOLDE EXTÉRIEUR, UN ENJEU MACRO-ÉCONOMIQUE ESSENTIEL, EN PARTICULIER POUR LES MEMBRES D’UNE UNION MONÉTAIRE 9

B. LE COMMERCE EXTÉRIEUR AU SERVICE DE LA CROISSANCE 11

C. L’INTERNATIONALISATION DES ENTREPRISES, CLEF DU COMMERCE EXTÉRIEUR 13

II. LE COMMERCE EXTÉRIEUR FRANÇAIS : DES ATOUTS, MAIS AUSSI DES FRAGILITÉS 15

A. UN DÉFICIT COMMERCIAL EN BAISSE 15

B. DES PERFORMANCES À L’EXPORT EN LIGNE AVEC CELLES DES AUTRES PAYS DÉVELOPPÉS EN 2012 16

C. LES CARACTÉRISTIQUES STRUCTURELLES DU COMMERCE EXTÉRIEUR FRANÇAIS ET LEUR ÉVOLUTION 18

1. Une spécialisation sectorielle qui s’accroît lentement 18

2. L’orientation géographique : un redéploiement encore trop limité vers les pays émergents 20

3. Une compétitivité-prix plutôt en amélioration 24

4. La structure des entreprises exportatrices : trop peu nombreuses, trop individualistes ? 25

a. Le nombre relativement limité d’exportateurs français, un problème ? 25

b. La concentration des volumes sur un petit nombre d’opérateurs 27

c. L’« individualisme » des exportateurs français 28

D. LA QUESTION PLUS GÉNÉRALE DE L’ATTRACTIVITÉ : UNE AFFAIRE DE PERCEPTION 28

1. Un exemple : la perception de la France en Suède 29

2. Les classements internationaux 30

III. L’EXEMPLE DE LA SUÈDE : COMMENT CONCILIER L’EXIGENCE SOCIALE ET ÉTHIQUE AVEC LA MONDIALISATION 33

A. UN MODÈLE SOCIAL ET SOCIÉTAL RÉFORMÉ MAIS PRÉSERVÉ 33

B. UN COMMERCE EXTÉRIEUR PUISSANT 35

C. LA CONSTRUCTION ASSUMÉE D’UNE IMAGE INTERNATIONALE DE LA SUÈDE 36

D. UN DISPOSITIF PUISSANT DE SOUTIEN À L’INTERNATIONALISATION DES ENTREPRISES, RÉCEMMENT RÉFORMÉ 37

1. Une agence unique pour l’accompagnement des exportateurs et l’accueil des investisseurs étrangers 37

2. Deux institutions financières spécialisées 38

3. Une politique très active de valorisation des secteurs et filières d’excellence de la Suède 39

IV. UN DISPOSITIF DE SOUTIEN À L’INTERNATIONALISATION DES ENTREPRISES EN COURS DE RÉFORME 41

A. DES OPÉRATEURS DE L’ÉTAT DE PLUS EN PLUS PROFESSIONNELS 41

1. Ubifrance 41

2. L’Agence française pour les investissements internationaux 43

B. L’AMONT : UNE MEILLEURE COORDINATION AU NIVEAU RÉGIONAL 44

1. Des régions et des collectivités impliquées à des niveaux et selon des modalités divers 45

2. Les chambres de commerce et d’industrie : une implication inégale 46

3. La coordination : une exigence continue des pouvoirs publics 46

4. Les plans régionaux pour l’internationalisation des entreprises, instruments novateurs de coordination des acteurs sous l’autorité des conseils régionaux 47

5. Les pôles de compétitivité, outils de fédération de l’offre des territoires à l’international 48

C. UN RÉSEAU INTERNATIONAL EN ORDRE DE BATAILLE 48

1. La diplomatie économique et les services extérieurs du Trésor 48

2. Le rôle irremplaçable des conseillers du commerce extérieur de la France 51

3. Le renforcement et la démocratisation du volontariat international en entreprise (VIE) 51

4. Les maisons de l’international 52

D. LES OUTILS DE FINANCEMENT : UN DISPOSITIF RATIONALISÉ ET RENFORCÉ 52

1. La création de la Banque publique d’investissement et le lancement de Bpifrance Export 52

a. Un instrument pour améliorer l’accès des exportateurs au capital-investissement 52

b. Une offre coordonnée : « Bpifrance Export » 53

2. Les produits : des outils plus puissants et plus adaptés 53

a. Le développement des produits traditionnels de la Coface 53

b. L’extension des garanties de la Coface 54

c. La suppression des doublons entre la Coface et la BPI 55

d. La simplification de l’offre de la BPI 55

e. La mobilisation des instruments d’aide liée 55

E. LA DÉTERMINATION DE PRIORITÉS STRATÉGIQUES 56

1. Les futurs champions de l’export 56

2. Les « familles » de produits et les pays-cibles 56

3. La politique de co-localisation 57

F. LE PROJET « FRANCE INTERNATIONAL » 58

V. COMMENT ALLER PLUS LOIN ? 61

A. DONNER UNE PRIORITÉ BUDGÉTAIRE AU COMMERCE EXTÉRIEUR 61

B. RENFORCER LE CIBLAGE DES ÉCONOMIES ÉMERGENTES 62

C. DÉVELOPPER UNE POLITIQUE D’IMAGE INTERNATIONALE DE LA FRANCE 65

D. AMÉLIORER ENCORE LA VISIBILITÉ DE L’OFFRE PUBLIQUE D’ACCOMPAGNEMENT 66

E. PRENDRE EN COMPTE LE DÉVELOPPEMENT DU COMMERCE EN LIGNE 67

F. POURSUIVRE L’ADAPTATION DES INSTRUMENTS DE FINANCEMENT ET DE GARANTIE 67

G. VALORISER LA PRIORITÉ AU COMMERCE EXTÉRIEUR DANS L’ORGANISATION INSTITUTIONNELLE 68

1. Remédier au manque de visibilité budgétaire du commerce extérieur 68

2. Donner du poids au commerce extérieur dans l’organigramme de l’État 72

TRAVAUX DE LA COMMISSION 73

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS DE LA RAPPORTEURE 75

INTRODUCTION

Après une décennie de dégradation quasi-continue, le solde de notre commerce extérieur s’est amélioré en 2012 et cette amélioration devrait se poursuivre en 2013. Le déficit sur la balance des biens s’est ainsi réduit de 74 milliards d’euros en 2011 à 67 milliards en 2012 et sera sans doute de l’ordre de 60 milliards en 2013. L’objectif fixé à la ministre du commerce extérieur, à savoir le retour à l’équilibre de la balance hors énergie en 2017, est donc en bonne voie d’être atteint. Hors énergie, le déficit constaté au premier semestre 2013 est en effet en chute de 40 % par rapport au premier semestre 2012 et ne représente plus que 5,6 milliards d’euros.

L’amélioration que nous observons ne résulte pas de facteurs exogènes sur lesquels nous n’avons pas de prise, comme le prix du pétrole ou le cours de l’euro. Bien au contraire, elle a été obtenue malgré une augmentation de la facture énergétique et elle résulte essentiellement du dynamisme de nos exportations vers les pays émergents et vers l’Amérique du Nord.

Ces résultats encourageants, nous les devons en grande partie à la mobilisation de l’ensemble des acteurs ainsi que du Gouvernement. Le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi a donné clairement la priorité à la compétitivité avec des mesures telles que le crédit d’impôt compétitivité-emploi.

Pour ce qui est de notre dispositif d’appui à l’export, il n’aura jamais été autant audité et réformé que depuis un an. Il évolue clairement vers plus de professionnalisme et plus de coordination pour les entreprises, plus d’adaptation des prestations et des produits financiers offerts à leurs besoins. Votre rapporteure salue en particulier le projet d’accompagnement renforcé et durable à l’export de 1000 PME et ETI, qui vise enfin à répondre spécifiquement à cette faiblesse de notre appareil productif qu’est l’insuffisance du nombre de nos entreprises intermédiaires.

Votre rapporteure souhaite appeler l’attention sur plusieurs enjeux de la politique du commerce extérieur qui devront sans doute être mieux pris en compte dans les années qui viennent.

Ses observations sont notamment fondées sur les éléments qu’elle a pu recueillir sur les politiques en la matière de certains de nos partenaires et concurrents européens, en particulier la Suède où elle s’est rendue. Car la Suède donne l’exemple pour le moins intéressant d’un pays qui a un très haut niveau d’exigences sociétales, un État social très développé dont elle assume le coût en termes de prélèvements obligatoires, et en même temps de très bonnes performances économiques, par rapport à la moyenne européenne, et en particulier commerciales. L’un des aspects les plus significatifs de l’expérience suédoise, c’est l’investissement massif que font les Suédois, depuis deux décennies, dans la valorisation de l’image internationale de leur pays. Cette politique de marque nationale est au cœur de l’action extérieure du pays et les politiques de rayonnement culturel et économique en découlent en quelque sorte.

Le développement d’une « marque France » est actuellement en cours de discussion. C’est effectivement, votre rapporteure en est convaincue, une mesure essentielle et il faudra se donner les moyens humains et budgétaires de bien la mettre en œuvre, en étant conscient que les moyens nécessaires devront être importants.

Par ailleurs, si nous devions dégager davantage de moyens pour notre dispositif d’appui, ce que souhaite votre rapporteure, il faudrait naturellement les affecter à son déploiement dans les pays émergents, qui représentent les deux tiers du potentiel mondial de croissance économique durant les cinq prochaines années, même s’ils pèsent encore bien peu dans notre commerce extérieur, toujours centré sur l’Europe à plus de 60 %.

Outre la poursuite de la mise en cohérence de notre dispositif d’appui à l’internationalisation des entreprises, plusieurs autres axes d’action semblent prometteurs, tels que la valorisation du commerce en ligne, qui est aussi un outil puissant de développement de l’export.

Il reste enfin des réflexions sur la valorisation de la mission de développement du commerce extérieur dans notre organisation institutionnelle. Avoir institué un ministère du commerce extérieur de plein exercice est certes très positif, mais dispose-t-il de relais suffisants dans les administrations de « Bercy » ? La question est légitime. En corollaire, la visibilité de la mission « commerce extérieur » dans le budget de l’État reste plus qu’insuffisante : il n’y a justement pas de « mission » ni même de « programme » au sens budgétaire qui y soit consacré.

Lorsqu’un pays est confronté à un déficit extérieur élevé, la conséquence classique est la dépréciation de sa monnaie, qui renchérit ses importations, appauvrit collectivement ses habitants, décourage les investisseurs étrangers (également appauvris), mais permet généralement, à terme, de revenir vers l’équilibre extérieur.

La France a fait, avec la majorité de ses partenaires européens, le choix de l’euro, justement pour mettre fin au cycle sans fin des dévaluations dites « compétitives », pour permettre le développement européen de ses entreprises en supprimant, dans la zone euro, les coûts et les incertitudes résultant des fluctuations monétaires, pour faciliter les circulations…

Mais il faut en accepter une conséquence : l’existence dans une zone monétaire de gros déséquilibres commerciaux peut la mettre en péril. La « crise de la zone euro » postérieure à la crise financière de 2008-2009 a eu un impact dramatique dans toute la zone et catastrophique dans certains États-membres : malgré des plans d’aide massifs, une forte récession parfois pendant plusieurs années consécutives, un chômage de masse, une forte baisse des revenus…

Cette crise a été principalement imputée à la dégradation des finances publiques de certains États-membres.

Mais si l’on regarde la situation avant-crise des États concernés, qui ont ensuite bénéficié de plans d’aide, on observe qu’avant 2008, certes la Grèce et le Portugal avaient déjà des finances publiques très dégradées, mais l’Espagne et Irlande étaient en excédent budgétaire (le solde public a été constamment excédentaire de 2003 à 2007 en Irlande, de 2005 à 2007 en Espagne), avec une dette publique modérée (équivalente en 2007 à 25 % du PIB pour l’Irlande et 36 % pour l’Espagne).

Il faut donc chercher une autre caractéristique commune entre ces économies. Le graphique ci-après présente l’évolution du solde extérieur courant, exprimé en pourcentage de leur PIB, de quelques pays développés significatifs, membres ou non de la zone euro, notamment ceux qui ont bénéficié de plans d’aide européens suite à la crise financière.

L’évolution des soldes des balances des transactions courantes de divers pays développés

(en % du PIB)

Source : élaboré à partie des données de la World Economic Outlook Database du FMI, octobre 2013.

On peut le constater, tous les pays de la zone euro qui ont été particulièrement frappés par la crise et ont dû demander un plan d’aide ont en commun une forte dégradation de leur balance extérieure courante dans les années ayant précédé la crise financière de 2008. En 2007, le déficit courant grec était proche de 15 % du PIB, ceux de l’Espagne et du Portugal atteignaient 10 % du PIB, celui de l’Irlande était plus faible mais cependant élevé (plus de 5 %). Autre point commun, si l’on excepte le Portugal, durablement abonné aux gros déficits extérieurs, ces pays avaient vu ce déficit se gonfler constamment et massivement depuis le début des années 2000 : de 5 points de pourcentage pour l’Irlande entre 2000 et 2007, de 6 points pour l’Espagne et de 7 pour la Grèce.

En fait, tous ces pays ont « vécu au-dessus de leurs moyens » avant la crise financière – c’est cela que traduit un déficit extérieur –, l’appartenance à la zone euro leur ayant permis d’accéder facilement au crédit, qui a servi pour les uns à financer un État inefficace et de plus en plus dépensier, pour les autres à entretenir par l’endettement privé des bulles spéculatives (en particulier immobilières).

La situation des autres grandes économies présentées sur ce graphique est également significative :

– on observe que les non-membres de la zone euro comme les États-Unis, émetteurs de ce qui reste la première monnaie mondiale, et le Royaume-Uni, dans une moindre mesure, peuvent se permettre d’avoir un déficit courant récurrent, souvent élevé (pour les États-Unis, il n’a jamais été inférieur à 2,6 % du PIB sur la période) ;

– tandis que l’Allemagne a vu son solde courant s’améliorer constamment aux débuts des années 2000 et accumule depuis 2006 des excédents qui ne sont jamais inférieurs à 6 % de son PIB, le solde de la France s’est au contraire dégradé de manière régulière de 2002 à 2012, tout en restant modéré – en tendance, on est passé en une décennie d’excédents de l’ordre de 1,5 % du PIB à des déficits de même ampleur. L’Italie a connu une évolution assez proche, mais avec un retour à l’équilibre plus net en 2012-2013 (lié à la récession sévère traversée par ce pays et à la politique de grande rigueur à laquelle il a été contraint).

Pendant dix ans jusqu’en 2012, les gouvernements successifs ont laissé le solde extérieur de notre pays se dégrader quasi-continûment. Certes cette dégradation n’a pas été massive comme chez certains de nos partenaires avant la crise financière, et la France a donc conservé la possibilité d’emprunter à des taux peu élevés, échappant aux manifestations les plus graves de la crise. Mais l’expérience de cette crise ne doit pas être perdue : aller vers le rétablissement de l’équilibre extérieur doit être au premier plan de nos priorités. D’autant que les efforts, contraints et douloureux, des autres États ont été considérables : en 2013, l’Irlande, l’Espagne, le Portugal, l’Italie et même la Grèce devraient équilibrer leur balance courante ou s’approcher de cet objectif.

Donner une priorité forte au commerce extérieur ne répond pas seulement à une préoccupation « défensive » de conservation de la confiance des investisseurs étrangers, c’est aussi vraisemblablement une des principales opportunités de retour à la croissance pour notre pays.

Il faut en effet bien voir que, comme le solde extérieur rend plus ou moins compte de la différence entre ce qu’un pays produit et ce qu’il consomme, cela signifie qu’un pays qui voit ce solde s’améliorer de 8 points de pourcentage du PIB en 7 ans – cas de l’Allemagne entre 2000 et 2007 – a en moyenne sur la période plus d’un point de croissance annuelle de son PIB généré par ses échanges, toutes choses égales par ailleurs.

S’agissant de la France, le commerce extérieur a limité la dégradation conjoncturelle en 2012 en apportant une contribution positive au PIB français.

Et puisque la croissance de nos exportations en 2012 a été concentrée sur l’espace extra-européen et particulièrement l’Asie (+ 13,1 %) et les Amériques, alors qu’elle était quasi-nulle en Europe (+ 0,3 % sur l’Union européenne), on peut même soutenir que c’est le commerce avec le monde extra-européen et notamment les pays émergents qui nous a permis de limiter la récession en 2012.

Le tableau ci-après présente la contribution des échanges extérieurs à la croissance du PIB sur plusieurs années.

La contribution du commerce extérieur à l’évolution du PIB en volume

(en %)

2008

2009

2010

2011

2012

Prévision 2013

Prévision 2014

Solde extérieur des biens et services (contribution à la croissance du PIB en points)

- 0,3

- 0,5

0

0

1

0

0,1

Dont :

             

Exportations (contribution)

-0,1

- 3,3

2,2

1,4

0,6

0,3

1

Importations (contribution)

-0,3

2,8

- 2,2

- 1,4

0,3

- 0,3

- 0,9

PIB (taux de croissance)

- 0,1

- 3,1

1,7

2

0

0,1

0,9

Source : INSEE, Comptes nationaux, et Rapport économique, social et financier 2014.

Comme on peut le constater, la contribution positive du commerce extérieur à la croissance en 2012 était en rupture avec les contributions très négatives observées en 2008 et 2009.

En 2013 et 2014, il est prévu, dans les hypothèses économiques de la loi de finances, une faible contribution du commerce extérieur à la croissance.

Pour 2013, cette année restant marquée par le faible dynamisme des marchés étrangers durant l’hiver 2012-2013, les exportations françaises augmenteraient peu (+ 1,2 %). Dans un climat de faible croissance, il en serait de même pour les importations (+ 1 %) et, globalement, le commerce extérieur ne contribuerait pas à la croissance du PIB.

En 2014, on observerait tout à la fois une croissance beaucoup plus soutenue des exportations (+ 3,5 %), grâce au redémarrage de l’activité dans la zone euro à partir du deuxième trimestre 2013, au dynamisme de la demande mondiale (évalué à + 4,8 %) et à l’effet positif des mesures de compétitivité telles que le crédit d’impôt compétitivité-emploi (CICE), mais aussi des importations (+ 3 %), ceci donnant une légère contribution positive du commerce extérieur au PIB.

Il y a un dernier point dont on doit être parfaitement conscient quand l’on parle du commerce extérieur : il n’est pas possible d’en séparer les enjeux de ceux de l’internationalisation des entreprises.

Pour exporter durablement, il peut être nécessaire, pour une entreprise, de s’implanter à l’étranger.

Pour exporter, il faut aussi savoir importer, pour occuper les meilleures places dans la chaîne de production de la valeur ajoutée.

Pour exporter, il faut enfin attirer les investissements internationaux. En 2012, les filiales françaises de groupes étrangers ont assuré plus de 30 % du volume des exportations de biens de la France, alors que leur poids relatif est estimé (dans des données de l’OCDE pour 2008) à moins de 20 % dans la valeur ajoutée globale et moins de 15 % dans l’emploi.

Plus globalement, les groupes internationalisés, qu’ils soient français ou étrangers, sont à l’origine de plus de 75 % des volumes exportés en 2012.

En 2012, par rapport à 2011, le solde de la balance des biens s’est amélioré de 6,9 milliards d’euros, passant de 74 milliards à 67 milliards de déficit. L’amélioration est même de 13,4 milliards d’euros hors énergie, la balance énergétique ayant continué à se dégrader du fait d’un cours plus élevé du pétrole (le cours moyen du baril de Brent étant passé de 80 à 87 euros) et atteint un niveau record de déficit.

L’évolution de la facture énergétique, en lien avec le prix du pétrole et la parité euro/dollar

Source : « Résultats du commerce extérieur en 2012 », ministère du commerce extérieur, 7 février 2013.

Cette tendance favorable s’est poursuivie au 1er semestre 2013 : le déficit commercial s’est réduit de 16 % par rapport à la même période en 2012, passant de 35,8 milliards d’euros à 30 milliards. Sur la même période, le déficit hors matériel militaire et hors énergie est passé de 9,9 milliards d’euros à 5,6 milliards.

L’amélioration est également visible sur la balance des transactions courantes, qui inclut, outre les échanges de biens, ceux de services – sur lesquels la France obtient un excédent en hausse constante, désormais supérieur à 30 milliards d’euros par an –, les flux de revenus (des investissements, notamment) et les transferts courants (tels que les envois d’argent des travailleurs étrangers à leur famille).

Ce solde courant, qui avait continué à se dégrader en 2012, du fait d’une forte baisse de l’excédent sur les flux de revenus, supérieure à l’amélioration du solde commercial, devrait évoluer dans un sens plus favorable en 2013 : en comparaison 1er semestre 2013/1er semestre 2012, le déficit courant se réduit de 7 milliards d’euros, comme on peut le voir sur le tableau ci-après.

L’évolution du solde de la balance des transactions courantes et de ses composantes

(en milliards d’euros)

2008

2009

2010

2011

2012

S1 2012

S1 2013

Solde courant, dont :

- 33,7

- 25,1

- 25,5

- 35,2

- 44,4

- 26,3

- 19,4

Biens

- 59,4

- 43

- 53,5

- 76,6

- 70,6

- 38,2

- 31

Services

16,5

18,3

21,4

31,5

32,6

14,9

14

Revenus

33,4

32,8

38,5

45,1

29,7

15,2

17,5

Transferts courants

- 24,2

- 33,3

- 31,8

- 35,2

- 36,2

-18,1

- 19,9

Source : Banque de France.

Outre l’amélioration de notre solde extérieur, un autre élément satisfaisant doit être relevé en 2012 : la dégradation de nos performances à l’exportation par rapport à celles des autres pays développés paraît enrayée.

Le graphique ci-dessous le montre : en 2011 (par rapport à 2010), la croissance des exportations françaises était certes substantielle (plus de 9 %), mais inférieure à celle de nos principaux partenaires et de l’Union européenne dans son ensemble (où cette croissance était en moyenne de 13 %).

En 2012 (par rapport à 2011), la croissance des exportations s’est ralentie partout, mais la performance de la France est, à 3,9 % (sur onze mois), proche de la moyenne européenne (3,6 %).

La croissance des exportations des principaux pays européens en 2011 et 2012

Source : « Le chiffre du commerce extérieur, année 2012 », http://lekiosque.finances.gouv.fr.

Un autre indicateur intéressant est celui des parts de marché à l’export : si nos exportations augmentent moins vite que celles de nos concurrents, notre part de marché baisse, et vice-versa.

Sur le total du commerce mondial, la part de marché de la France a baissé continûment depuis dix ans et ce mouvement se poursuit en 2012. De 2002 à 2012, cette part est passée, sur le commerce global des biens en valeur, de 5,1 % à 3,1 %. Mais une évolution de même nature a concerné toutes les économies développées, même l’Allemagne, du fait de la montée des pays émergents, en particulier de la Chine, passée sur la même période de 5 % à 11,1 % de part du marché mondial.

Il est donc plus pertinent de se comparer aux autres économies développées, qui restent nos principaux partenaires et nos principaux concurrents tout à la fois.

Le graphique ci-après présente les parts de marché (biens et services) mondiales des principaux pays, mais rapportées non au total des exportations mondiales, mais à celui des exportations de l’OCDE (ou plutôt de ses 24 principales économies).

Les indications à droite du graphique correspondent à l’évolution de la part de marché en 2012 par rapport à 2011.

L’évolution sur le long terme des parts de marché en volume des grandes économies de l’OCDE, rapportées au total des exportations mondiales de l’OCDE, et cette évolution en 2012

(en %)

Source : « Résultats du commerce extérieur en 2012 », ministère du commerce extérieur, 7 février 2013.

Sur une décennie, on le voit, la position relative de la France s’est fortement dégradée (sa part de marché sur le total des exportations de l’OCDE étant passée de plus de 8 % à 6,3 %). Les parts de marché du Royaume-Uni et de l’Italie ont également diminué, tandis que l’Espagne se maintenait à peu près et que les deux grands « gagnants » étaient l’Allemagne et les États-Unis.

Mais sur la dernière année, la situation française est meilleure. En 2012, la France a quasiment stabilisé sa situation par rapport à 2011, ce qui n’est pas le cas de l’Italie et du Royaume-Uni.

Le graphique ci-après permet la décomposition sectorielle du solde de la balance des biens. Les soldes sont présentés en 2011 et 2012, ce qui montre leur évolution.

Les soldes sectoriels en 2011 et 2012

(pour chaque famille de produits, barre de gauche : 2011, barre de droite : 2012, en milliards d’euros)

Source : graphique élaboré à partir de données des Douanes et de la DG Trésor.

On peut l’observer, les évolutions des soldes sectoriels sont assez faibles entre 2011 et 2012.

Tout au plus peut-on relever l’augmentation de plusieurs soldes traditionnellement excédentaires, d’abord celui de l’aéronautique, qui passe de 17 milliards d’euros à 20 milliards – grâce aux ventes d’Airbus A320 dotés de la nouvelle motorisation NEO et A330 –, mais aussi ceux des industries agro-alimentaires, de la chimie et de la pharmacie.

S’agissant des secteurs déficitaires, la dégradation est forte entre 2011 et 2012 sur les produits pétroliers raffinés (on passe de 13 milliards à 18 milliards de déficit), mais le déficit se réduit sur l’automobile (de 8,2 milliards d’euros à 5,5 milliards), dans un contexte de très forte baisse du marché national (les immatriculations ont baissé de 13,3 % entre 2011 et 2012).

Sur le moyen terme, certaines évolutions rendent compte d’une spécialisation croissante de notre commerce ; c’est en particulier le cas avec l’aéronautique, dont l’excédent tend à augmenter depuis une décennie, même s’il y a des à-coups annuels. De 2003 à 2012, on est ainsi passé de 8 milliards à 20 milliards d’excédent dans ce secteur.

Le graphique ci-après montre l’évolution des flux d’exportations françaises vers les grandes zones géographiques depuis le premier trimestre 2008. Après un effondrement assez général de ces flux en 2009, année du paroxysme de la crise financière mondiale, on note que nos exportations :

– n’ont que mollement repris vers l’Europe, sans jamais revenir à leur niveau d’avant la crise financière, ce qui s’explique aisément par la crise spécifique de la zone euro depuis 2010 ;

– ont été un peu plus dynamiques vers le continent nord-américain depuis fin 2011 ;

– sont fin 2012 à un niveau supérieur de 20 % à celui de début 2008 vers l’Afrique et l’Amérique latine, et supérieur de 50 % vers l’Asie.

L’évolution trimestrielle des exportations françaises par zone de 2008 à 2012

(base 100 au 1er trimestre 2008)

Source : « Résultats du commerce extérieur en 2012 », ministère du commerce extérieur, 7 février 2013.

Il y a donc, c’est indéniable, un mouvement de redéploiement de notre commerce vers le monde émergent, et ce mouvement est encore plus marqué sur nos exportations que sur nos importations.

Cela se traduit par une amélioration générale de notre équilibre commercial avec les grandes aires émergentes, ce que montre le graphique ci-après, consacré à nos soldes bilatéraux avec les grandes régions du monde en 2008 et 2012 :

– de 2008 à 2012, nos soldes bilatéraux se sont améliorés avec le Proche et Moyen-Orient, l’Amérique latine, l’Afrique et même l’Asie-Océanie ;

– sur la même période, ils se sont dégradés avec l’Amérique du Nord et l’Europe ;

– nos excédents régionaux se trouvent dans le monde émergent : Proche et Moyen-Orient et Amérique latine ;

– notre déficit avec le reste de l’Europe (Union européenne et autres pays de l’Europe occidentale) a considérablement augmenté de 2008 à 2012 – passant de 32 milliards d’euros à 43 milliards – et est beaucoup plus élevé que notre déficit avec l’Asie-Océanie (26 milliards d’euros).

L’évolution des soldes bilatéraux (biens) de la France avec les grandes régions du monde entre 2008 et 2012

(en milliards d’euros)

Source : graphique élaboré à partir de réponses au questionnaire budgétaire.

Le graphique suivant illustre d’une autre manière la même réalité : en dehors de la Chine, nos principaux déficits bilatéraux soit sont observés avec nos grands partenaires européens et nord-américains, soit sont liés aux importations d’hydrocarbures (Norvège, Kazakhstan, Libye…). Quant à nos excédents bilatéraux, si le premier reste réalisé avec le Royaume-Uni, les autres se situent plutôt dans le monde émergent.

Les principaux déficits et excédents bilatéraux de la France (septembre 2012-août 2013)

Source : « Aperçu du commerce extérieur de la France (données de référence : août 2013) », Douanes.

Le commerce extérieur français a donc engagé un réel mouvement de redéploiement vers le monde émergent et le fait que c’est là que nous parvenons, de plus en plus souvent, à engranger des excédents commerciaux démontre que nous avons tout à y gagner.

Mais ce mouvement est-il suffisant ?

Les deux graphiques de la page suivante permettent de rapprocher deux distributions géographiques :

– sur le premier figure la distribution géographique des flux commerciaux (importations + exportations) de la France ;

– sur le second figure celle des gains de PIB nominal que l’on devrait enregistrer à court terme (de 2013 à 2018) selon les estimations du Fonds monétaire international (FMI). Ce document a été construit en faisant le delta entre le PIB en 2013 et le PIB prévisionnel pour 2018 et en voyant comment ce delta se répartit entre aires géographiques (en pourcentage du delta mondial de PIB) : cela montre la distribution géographique de la croissance économique en valeur (1) durant les cinq prochaines années.

La distribution géographique des échanges commerciaux de la France en 2012

Source : graphique élaboré à partir de réponses au questionnaire budgétaire.

La distribution géographique des gains prévisionnels de PIB nominal de 2013 à 2018 (en parité de pouvoir d’achat)

Source : graphique élaboré à partir d’extractions de la World Economic Outlook Database du FMI, données d’octobre 2013.

Même si la définition des aires géographiques est différente dans les deux graphiques, les sources l’étant, leur comparaison permet des constats flagrants :

– l’Europe représentera à peine plus du dixième de la croissance mondiale durant les cinq prochaines années, mais concentre encore plus de 60 % de notre commerce ;

– la seule Asie « en développement » concentrera 40 % de la croissance à court terme, et pourtant l’ensemble Asie-Océanie, plus vaste (il comprend aussi le Japon, l’Australie…), ne pèse encore que 14 % dans nos échanges extérieurs ;

– dans une moindre mesure, le constat est le même pour l’Amérique latine, qui reste marginale dans nos échanges (2 %) et représentera tout de même 8 % de la croissance mondiale dans les années qui viennent.

L’orientation du commerce international des pays reste naturellement largement dictée par la géographie. À cet égard, il est normal qu’un pays européen comme la France commerce plutôt avec ses partenaires de l’Union et ses voisins du Proche-Orient et d’Afrique du Nord qu’avec l’Asie ou les Amériques, plus lointaines – d’autant que le développement des transports longue distance n’est pas très compatible avec les engagements climatiques.

Néanmoins, si la France veut tirer parti de la croissance rapide des pays émergents, il est clair qu’elle doit continuer et accentuer, à l’aide de politiques publiques volontaristes, le redéploiement de ses flux commerciaux dans leur direction.

La question des parts respectives de la compétitivité-prix et de la compétitivité-hors prix dans les résultats du commerce extérieur ne sera sans doute jamais tranchée définitivement tant les deux sont déterminantes : la qualité et l’image des produits, ainsi que la capacité des firmes d’un pays à se placer sur des créneaux mondiaux où elles ont peu de concurrents, sont bien sûr essentielles, mais, à produits égaux, le prix fait la différence… Ce qu’il faut surtout retenir, c’est que la compétition d’un pays tels que le nôtre ne se fait pas tant avec ceux dont les niveaux et les structures de coûts sont sans rapport avec les siennes – par exemple la Chine… – qu’avec les autres économies les plus développées.

La compétitivité-prix est la résultante de plusieurs facteurs :

– l’évolution des coûts, qui ne sont pas seulement ceux du travail – le coût de l’énergie, notamment, est également très important – ;

– l’évolution des taux de change réels, qui combine celle des taux de change nominaux et la prise en compte des différentiels d’inflation ;

– l’effort de marge des exportateurs, qui acceptent ou non de rogner leurs gains, sachant qu’une réduction de ces marges, si elle améliore à court terme la compétitivité-prix, pèse évidemment à moyen terme sur l’investissement et donc la compétitivité future.

La compétitivité-prix de la France s’améliore depuis la crise de 2008 en raison principalement de la dépréciation de l’euro. De 2008 jusqu’au 1er semestre 2013, le taux de change effectif réel de la France s’est déprécié de 5,4 %. Cette baisse en termes réels reflète avant tout la dépréciation de l’euro par rapport aux autres devises (l’euro s’est déprécié de 10,7 % par rapport au dollar et de 17,8 % par rapport au yen sur la période), mais également une moindre progression relative des prix à la consommation en France que chez ses principaux concurrents. Dans ce contexte, la compétitivité-coût de la France a progressé de 1,6 % depuis 2008.

Les principaux autres membres de la zone euro ont également connu depuis 2008 une amélioration de leur compétitivité-prix par rapport au reste de l’OCDE, liée à la dépréciation de l’euro, à l’effort de marge des exportateurs (dans le cas de l’Allemagne) ou à la maîtrise des coûts en rapport avec des réformes structurelles (en particulier dans le cas de l’Espagne).

Le nombre d’entreprises exportatrices de biens (recensées par les Douanes) ressort en augmentation en 2012 : il a atteint près de 120 000 durant cet exercice, contre 116 000 en 2011. Sur le plus long terme, ce nombre a fortement baissé de 2000 à 2009, passant de 132 000 à 116 000 (– 12 %), avant de fluctuer depuis lors.

La question du nombre des exportateurs est souvent mise en avant car on constate qu’en Allemagne il y aurait environ 350 000 entreprises exportatrices et en Italie plus de 200 000.

Ce type de comparaisons est toutefois difficile car posant des problèmes d’homogénéité des données. Il est signalé qu’en intégrant les exportateurs de services, dont le nombre est moins bien connu, on est sans doute à plus de 380 000 opérateurs à l’export en France (chiffre donné par l’INSEE pour 2010). De plus, la corrélation entre niveau des exportations et nombre des exportateurs n’est que partielle, comme on peut le constater sur les graphiques qui suivent.

L’évolution comparée des exportations et du nombre des exportateurs :

Le court terme

Le moyen terme

Source : Douanes françaises.

On voit qu’à court terme, d’une année sur l’autre, les variations du nombre d’exportateurs et du niveau des exportations peuvent être opposées. De manière générale, les variations des exportations sont beaucoup plus fortes et, certaines années, on a, comme en 2011, une forte hausse de l’export alors même que le nombre d’exportateurs se réduit.

Sur le plus long terme, les années 1990 ont été une période de forte croissance du nombre des exportateurs français qui a aussi été une période faste pour le commerce extérieur français, avec des exportations en forte hausse et des excédents commerciaux significatifs. Depuis 2000, la corrélation entre les deux courbes a beaucoup diminué.

Plusieurs personnes auditionnées par votre rapporteure ont estimé que, pour générer de gros volumes d’exportations, donc être efficace, une politique publique de l’export doit plutôt cibler les entreprises moyennes-grandes déjà exportatrices, mais faiblement, que chercher à tout prix à accroître l’effectif des exportateurs en amenant à l’export de très nombreuses petites ou très petites entreprises qui n’y sont pas nécessairement prêtes.

La concentration sur un petit nombre d’opérateurs est une autre caractéristique des exportations françaises. En 2012, les 1 000 premiers exportateurs de biens, soit 0,85 % du total, ont assuré 71,5 % du volume des exportations.

On entend souvent qu’en France, l’exportation reste surtout l’affaire des seules grandes entreprises, tandis qu’en Allemagne ce serait plutôt celle des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Mais il est vrai que la structure des économies est différente. Selon un des interlocuteurs de votre rapporteure, on compterait environ 1 200 ETI indépendantes (des grands groupes) en France, contre 6 000 en Allemagne. Le rapport de MM. Bentejac et Desponts (2) donne des chiffres un peu différents : environ 4 600 ETI en France, dont 500 indépendantes, contre 10 000 ETI en Allemagne ou au Royaume-Uni.

Cela dit, la concentration des exportations sur un petit nombre d’acteurs est-elle nécessairement incompatible avec de bonnes performances ? Cela reste à démontrer. L’exemple de la Suède, sur lequel on reviendra, montre qu’un pays peut engranger des excédents commerciaux considérables avec un commerce très concentré sur une poignée de grands groupes.

Les analyses sur le relativement faible nombre d’exportateurs français et le poids des grandes entreprises débouchent souvent sur le constat d’un « portage » à l’export insuffisant des PME par ces grandes entreprises.

Au niveau national, l’association « Pacte PME », constituée de grands donneurs d’ordres qui s’engagent à développer un nouveau type de relations avec leurs fournisseurs (les « achats partenariaux »), a rencontré un succès limité dans ses tentatives de développer le portage à l’international. Cela ne fait donc plus partie de ses priorités.

D’autres initiatives plus modestes se développement plus près du terrain. Par exemple, dans la région Pays-de-la-Loire, le programme « Alliance internationale » sollicite les grandes entreprises locales pour qu’elles acceptent d’apporter une aide à des PME (pour recueillir des informations sur tel ou tel pays, éventuellement se faire domicilier pour une mission, etc.).

Une autre illustration de l’« individualisme » des exportateurs français, comparés à leurs homologues allemands, est souvent donnée : les entreprises françaises ne sauraient pas ou ne voudraient pas « chasser en meute ».

Cela paraît au moins clair dans les manifestations commerciales internationales : à peu près tous les connaisseurs rapportent que l’ensemble des entreprises françaises présentes dans ces « salons » acceptent rarement de se regrouper dans un stand « France », pour autant qu’il y en ait un. Les secteurs économiques « nobles » ne veulent pas se mêler aux autres ; chaque région cultive sa spécificité… Les entreprises françaises semblent également moins aptes que leurs concurrentes allemandes ou italiennes à construire des offres coordonnées pour remporter des marchés complexes.

Comme on l’a indiqué, il n’est pas vraiment possible de séparer les analyses du commerce extérieur de celles portant plus généralement sur l’internationalisation des entreprises. Les atouts – et réciproquement les faiblesses – d’un pays pour attirer des investissements internationaux recoupent largement ses atouts pour réussir dans le commerce international. Car, de plus en plus, si des investisseurs s’implantent dans un pays, c’est pour en faire une base de production (ou de commandement, de recherche…) pour toute sa région.

C’est donc la question de l’attractivité qui est posée. Dans toutes les enquêtes, les points forts cités pour la France sont plus ou moins les mêmes : cadre de vie et savoir-faire (culture, luxe, gastronomie…), qualité de la recherche, créativité, qualification de la main d’œuvre, position centrale en Europe, niveau des infrastructures… Les points faibles aussi : fiscalité, rigidité du marché du travail, instabilité réglementaire, difficulté à attirer les talents, mauvaise maîtrise des langues étrangères…

Au cours de ses déplacements et de ses auditions, votre rapporteure a également entendu des observations intéressantes sur certaines caractéristiques du système français de production et d’innovation. Celui-ci aurait des points faibles en matière de marketing et de communication, ainsi que pour l’innovation incrémentale, c’est-à-dire l’amélioration progressive des produits sans chercher systématiquement le « saut technologique », et pour la capacité à faire travailler ensemble ingénieurs et créateurs – ce qui fait typiquement la force d’une marque comme Apple, par exemple.

Ce qu’il faut voir en tout état de cause, c’est la part de subjectivité qui s’attache à ces analyses. L’attractivité est largement une affaire de perception, d’image. Votre rapporteure a pu le constater lors de récents déplacements, notamment en Suède. L’analyse des principaux instruments de mesure de l’attractivité comparée, les fameux classements internationaux, le démontre plus encore.

D’après les analyses des diplomates français à Stockholm, la France bénéficie plutôt d’une image positive en Suède et plus généralement en Scandinavie, ce que votre rapporteure a également pu observer.

Les produits français sont réputés dans des secteurs tels que l’agro-alimentaire ou les produits de luxe. Pourtant, cet intérêt pour la France se traduit peu dans les comportements de consommation. Notre part de marché s’effrite tendanciellement dans tous les pays de la zone scandinave depuis plus de dix ans (3,5 % en 2012 contre 5 % en 2003), ce qui n’est le cas ni pour l’Allemagne, ni pour l’Italie – et ce recul concerne même des domaines traditionnels d’excellence française comme le vin. S’agissant du tourisme, malgré une image de romantisme et d’art de vivre bien ancrée, la France n’est que le 4ème pays de destination des Suédois.

La France n’est pas un partenaire commercial majeur de la Suède – voir infra –, car elle est perçue comme un pays « difficile » pour les affaires : il y a pêle-mêle, l’obstacle de la langue (les Suédois, eux, sont majoritairement anglophones…), le sentiment de perdre parfois son temps (manque de réactivité, retards…), la réputation de l’offre française d’être chère, peu flexible et mal suivie avec un service après-vente faible…

Les investisseurs en France apprécient notre large marché, le savoir-faire technologique, la créativité et l’implication des salariés français. Mais ils critiquent la lourdeur administrative et le manque de lisibilité de la fiscalité. Et si le coût du travail n’est pas en soi un problème, sont en revanche pointés le manque de flexibilité dans l’organisation du travail et surtout le climat social conflictuel – très différent de celui des pays scandinaves, caractérisé par une longue tradition de compromis avec des syndicats puissants et toujours prêts à négocier.

Surtout, l’image « économique » globale de la France apparaît simpliste, peu informée et souvent marquée par un biais défavorable. Nos grandes entreprises internationalisées ne sont généralement pas très connues (ou ne sont pas identifiées à la France). Par contre notre politique économique est souvent perçue négativement, comme protectionniste, interventionniste, dépensière – éventuellement aux dépens de tous les contribuables européens dans le cadre de la PAC, défendue par la France. La France est même souvent assimilée à l’Italie ou l’Espagne en termes de finances publiques. Les réformes françaises récentes (retraites, crédit d’impôt compétitivité-emploi, accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 et loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi…) sont peu reprises et mal comprises.

Il est possible que le poids de la presse économique anglo-saxonne – avec par exemple The Economist – dans les pays nordiques, très anglophones, contribue à cet état de fait.

Les classements internationaux sont à la mode dans tous les domaines et influent sans doute fortement sur la perception internationale des pays.

L’un des plus connus est celui de l’indice global de compétitivité du Forum économique mondial de Davos. Son édition de septembre 2013 place la France au 23ème rang (sur 148, mais derrière ses principaux partenaires), avec des points forts habituels – les infrastructures (4ème rang mondial), l’éducation, la main d’œuvre, l’innovation, l’introduction des nouvelles technologies… – et des points faibles non moins habituels – le marché du travail, la fiscalité…

Le point le plus discutable de ce classement réside dans la nature des données qu’il combine : certaines sont objectives, mais environ les deux tiers résultent de notes attribuées par des dirigeants d’entreprise à leur propre pays. En d’autres termes, un pays dont beaucoup de ses dirigeants ont une vision négative risque de se retrouver dégradé, ce qui contribue à entretenir cette vision négative…

D’autres classements se fondent toutefois sur des éléments plus objectifs, par exemple le classement « Doing Business » de la Banque mondiale, dont l’ambition est plus limitée : il compare la facilité à faire des affaires en combinant une dizaine d’indicateurs composites mais concrets (facilité à créer une société, à obtenir un permis de construire, à obtenir le paiement d’une dette, etc.) relatifs à l’environnement réglementaire de l’activité économique. Ces indicateurs sont confectionnés principalement à partir de données objectives (pour peu qu’elles soient homogènes entre les pays) : nombre de procédures, durée, coûts… Dans la dernière édition (2013), la France occupe le 34ème rang (sur 185), position assez médiocre parmi les économies développées. Cela dit, si ce classement est plus « objectif » que d’autres, son objet même, très circonscrit, en limite l’intérêt : la « facilité à faire des affaires » ne présume pas de la capacité des économies à connaître une croissance soutenue – sauf à admettre d’emblée la véracité des postulats ultra-libéraux selon lesquels la déréglementation est le moteur essentiel de la réussite économique. A fortiori, la déréglementation du monde des affaires ne garantit évidemment pas un développement durable et respectueux des équilibres sociaux et environnementaux.

Il n’en reste pas moins que les éléments subjectifs pèsent sans doute globalement très lourds dans l’attractivité des pays, avec de plus des effets cumulatifs dans la mesure où ces éléments subjectifs sont « objectivés » quand ils sont intégrés à des classements qui pèsent ensuite sur les perceptions des pays. Il est donc important, pour tout pays, de veiller à son « image économique ».

Votre rapporteure s’est rendue en Suède pour y observer la stratégie mise en œuvre pour la promotion de l’image du pays et plus généralement le dispositif de soutien à l’internationalisation des entreprises.

La Suède est en effet une référence qui peut être intéressante pour notre pays, car les deux pays ont en commun l’attachement à un modèle social exigeant et à des valeurs progressistes, ainsi qu’une volonté de promouvoir ces valeurs à l’international.

Mais les deux pays diffèrent aussi par leur positionnement par rapport à la mondialisation : celle-ci est manifestement beaucoup mieux acceptée en Suède comme une évolution allant de soi. Et les performances économiques du pays donnent effectivement le sentiment d’une insertion aisée dans l’économie mondiale :

– après la crise de 2008-2009, la reprise économique a été très forte (avec une croissance de 6,6 % en 2010 et 3,7 % en 2011) et, s’il y a eu un net ralentissement en 2012, il a été moins fort qu’ailleurs en Europe : la croissance a été de 0,8 % l’an dernier ;

– à 8,3 % en 2013, le taux de chômage est en deçà de la moyenne européenne et de la situation française, et le chômage a baissé de 2010 à 2012 ;

– la balance commerciale des biens et plus encore la balance des transactions courantes sont structurellement et fortement excédentaires (en 2013, l’excédent de la première devrait représenter 2,1 % du PIB et celui de la seconde, 6,3 % ; depuis 2000, l’excédent courant a toujours été supérieur à 4 % du PIB).

La capacité de la Suède à obtenir de telles performances économiques et commerciales tout en préservant son niveau de vie, son modèle social, ses exigences sociétales, mérite que l’on s’y attarde, à l’heure où le moins disant social et fiscal est parfois présenté comme la seule réponse « réaliste » aux difficultés économiques.

La Suède a connu au début des années 1990 une grave crise économique, avec faillites bancaires, recul important du PIB, envolée de la dette publique, forte hausse du chômage, etc. Elle a su surmonter cette période très difficile grâce à de très importantes réformes structurelles, mais aussi une internationalisation accrue de son économie, facilitée, il est vrai, par une forte dépréciation de la monnaie nationale (3).

Un accord sur la négociation collective signé en 1997 (qui n’est plus en vigueur mais dont la philosophie a été conservée) a prévu que les négociations salariales devraient être engagées et conclues en premier dans le secteur économique le plus exposé à la concurrence internationale (de sorte que cette négociation serve de référence pour les autres secteurs). L’insertion accrue dans le commerce international a donc clairement été vue comme une solution de « sortie de crise » et prise en compte dans le mode de régulation sociale du pays. Et, de fait, la part des exportations dans le PIB est passée de 33 % en 1993 à 50 % aujourd’hui.

Par ailleurs, les très importantes réformes structurelles conduites n’ont pas empêché le pays de conserver un modèle social exigeant, dont il assume le financement :

– à 44,3 % en 2011 selon les statistiques de l’Union européenne, le taux de prélèvements obligatoires est légèrement plus élevé qu’en France. Les cotisations sociales stricto sensu sont également lourdes ; celles à la charge des employeurs représentent globalement plus de 31 % du salaire brut ;

– ceci permet de financer des prestations sociales généreuses, notamment pour la prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées et en matière familiale ; ainsi, le congé parental indemnisé atteint 16 mois (à partager obligatoirement entre les deux parents : chacun doit prendre au moins deux mois de congé) – la Suède fait d’ailleurs partie des pays européens dont la natalité reste assez satisfaisante, même si à cet égard sa performance est en deçà de celle de la France ;

– le niveau des salaires est élevé (en 2010, d’après les statistiques européennes, le salaire moyen dans l’industrie et les services était d’environ 9 % plus élevé en Suède qu’en France).

Un droit du travail protecteur est souvent présenté comme un obstacle à la réussite économique. Le droit suédois présente un certain nombre de points communs avec le nôtre et est vraisemblablement à peu près aussi « protecteur » ou aussi « rigide », selon le point de vue que l’on prend. Le contrat à durée indéterminée est la forme normale de la relation de travail et les contrats à durée déterminée sont réglementés – leur part dans l’emploi, 17 %, est sensiblement la même qu’en France. Le licenciement est encadré par de nombreuses règles : il doit avoir un motif, même s’il est moins précisé dans la législation suédoise que dans la législation française (il faut des « raisons objectives ») et n’est pas systématiquement communiqué au salarié (mais doit l’être à sa demande) ; il est notifié selon certaines formes (par écrit, avec remise en mains propres ou par envoi recommandé) ; un préavis qui peut atteindre six mois doit être respecté ; en cas de licenciement économique, le salarié bénéficie d’une priorité de réembauche ; les licenciements collectifs sont précédés obligatoirement de consultations des représentants du personnel et d’une notification administrative, ne peuvent avoir lieu qu’après examen des solutions alternatives et sont régis par des règles de priorité, etc. Bref, un ensemble de dispositions qui rappellent les nôtres.

D’ailleurs, d’après les personnes rencontrées sur place, les critiques des investisseurs suédois sur la France ne portent pas sur notre droit du travail à proprement parler, non plus que sur le coût du travail, mais sur la conflictualité des relations de travail. À cet égard le modèle suédois est sans doute assez différent du nôtre : le taux de syndicalisation reste très élevé et les conventions collectives jouent un rôle essentiel ; leur négociation peut être rude, mais, durant leur application, la « trêve sociale » est obligatoire.

Les expatriés français rencontrés à Stockholm ont confirmé à votre rapporteure la véracité d’un certain nombre de stéréotypes positifs sur la société suédoise : des relations de travail détendues et peu hiérarchisées, la priorité donnée à la vie personnelle et familiale, le partage des tâches ménagères dans les couples et le grand souci d’égalité entre les femmes et les hommes, un système scolaire centré sur l’épanouissement des enfants…

Les Suédois sont fiers de leur mode de vie et de leurs valeurs et les diplomates français à Stockholm ont observé que les diplomaties des deux pays s’accordaient souvent assez facilement sur une volonté commune d’avoir une dimension éthique (promotion des droits de l’homme, défense de l’environnement, etc.) dans les relations internationales.

La Suède est un pays profondément inséré dans le commerce international : on l’a dit, les exportations y représentent la moitié du PIB, contre à peine plus du cinquième dans le cas de la France. Ceci s’explique en grande partie par la différence de taille des populations – la Suède n’a que 9 millions d’habitants – et des économies : de manière générale, plus un pays est petit, moins ses entreprises peuvent se contenter de leur marché domestique et exportent donc ; plus, aussi, son économie est spécialisée, obligeant à des importations massives.

Mais, quelle que soit la cause de cette situation, elle a une conséquence évidente : aller à l’international est devenu naturel pour les Suédois. Et le libre-échange l’est aussi. Le sentiment dominant semble être qu’un « petit pays » n’a pas le choix : le protectionnisme et la « guerre commerciale » ne sont pas à sa portée. Dans ce contexte, des principes qui paraissent naturels et pleinement légitimes en France, comme la réciprocité nécessaire des mesures d’ouverture des marchés, trouvent peu d’échos en Suède.

Les exportations suédoises, comme les françaises, sont principalement le fait des grandes entreprises. Une dizaine de groupes assurent près du tiers des exportations de biens, qui sont concentrées sur quelques secteurs d’excellence (auxquels sont associés des marques à la notoriété mondiale) : les machines, les équipements de télécommunications, les produits métallurgiques et sidérurgiques, la chimie et la pharmacie, l’automobile, le papier… la Suède a su aussi se réorienter vers le commerce des services dans les années 2000.

Le commerce suédois reste très centré sur l’Europe, qui a ainsi absorbé 72,5 % des exportations du pays en 2012, avec un fort tropisme pour le reste de la Scandinavie, l’Allemagne et le Royaume-Uni. La France est pour la Suède un partenaire plus secondaire (notre pays représente un peu plus de 4 % des flux commerciaux suédois).

La promotion de l’image de la Suède (« nation branding ») est présentée par les officiels suédois comme centrale dans l’action extérieure du pays : en découlent la valorisation de la culture du pays et, en troisième position, la recherche de gains économiques grâce aux investissements étrangers et au commerce international. Les ambassades suédoises à l’étranger ont des plans de promotion qui doivent décliner les trois volets : image de la Suède ; valorisation de la culture suédoise ; relations économiques.

La stratégie suédoise d’image nationale a pris forme en 1995 avec la création du « Conseil pour la promotion de la Suède à l’étranger », qui regroupe des représentants des ministères des affaires étrangères, des entreprises, de l’énergie, des communications et de la culture, ainsi que les agences nationales concernées, essentiellement l’agence de promotion des exportations et des investissements internationaux en Suède (Business Sweden), l’Institut suédois (Svenska institutet) et l’office du tourisme suédois (Visit Sweden).

L’Institut suédois est l’organisme en charge de la mise en œuvre de cette politique d’image, auquel il consacre un peu moins du quart de son budget, qui équivaut à environ 45 millions d’euros (le reste de ce budget étant principalement utilisé à des programmes d’aide au développement et à des programmes de coopération dans l’aire de la Baltique). Il est également en charge de son évaluation, qui fait l’objet d’un rapport annuel, à partir des travaux de Visit Sweden (qui étudie notamment les commentaires faits sur Internet sur la Suède) et des ambassades suédoises à l’étranger.

Une plate-forme de communication sur le label « Suède » a été élaborée entre 2005 et 2007 (500 personnes ont, au travers des séminaires, travaillé à cette mise en place). Cette communication est centrée sur les valeurs, le mode de vie et les façons de penser des Suédois, le postulat étant que des valeurs uniques contribuent à créer un positionnement unique. Elle se décline sur plusieurs axes : innovation, créativité, durabilité (« sustainability ») et société. L’objectif central est d’associer à la Suède le qualificatif de « progressive » en anglais, qui signifie à la fois « progressif » et « progressiste » : il s’agit de dire que la Suède est attachée au progrès, mais un progrès inclusif, graduel, respectueux des personnes et de l’environnement. Ce concept central de progressisme est présenté comme incluant d’autres valeurs : l’ouverture, l’innovation, l’authenticité et l’attention aux autres (« care »).

Plusieurs grands groupes suédois utilisent également cette plate-forme pour communiquer des valeurs qui vont au-delà de l’image de marque de l’entreprise.

La Suède mise enfin sur son portail Internet officiel, « sweden.se » : il est partiellement accessible (à des degrés divers) dans une trentaine de langues et ce serait le 3ème portail national le plus visité au monde (plus de 14 millions de visites uniques par an). Il offre une gamme complète d’informations, allant des données de base sur la société suédoise à la vie économique et politique, en passant par l’actualité et la culture, mais aussi 1 600 photos qui peuvent être utilisées librement dans le cadre de campagnes à l’étranger.

Il est enfin à noter, à l’interne, que les programmes scolaires valorisent l’histoire économique du pays, sa contribution à de nombreuses innovations, ses grandes entreprises…

La Suède a fusionné depuis le 1er janvier 2013 les structures qui étaient les homologues d’Ubifrance et de l’AFII, l’une qui soutenait l’effort d’exportation des entreprises suédoises (Exportrådet), l’autre qui avait pour mission d’attirer des investisseurs étrangers (Invest in Sweden). La nouvelle agence Business Sweden a un statut sui generis, mi-public, mi-privé ; elle est codirigée par le ministère des affaires étrangères et une association patronale et son financement provient à parts égales de subventions publiques et de ressources propres (principalement la vente de services aux entreprises). L’objectif de cette double tutelle publique-privée est de profiter de l’appui de l’État et de la diplomatie suédoise pour accéder plus facilement à certains marchés, tout en appliquant les méthodes commerciales du privé.

D’après les indications des diplomates français à Stockholm, cette fusion répond moins à une analyse sur les synergies entre les métiers des deux agences préexistantes qu’à la recherche d’économies d’échelle et à une forme de sanction de la gestion d’Invest in Sweden. Il a été reproché à cet organisme un manque de résultats concrets et une gouvernance contestable, les statistiques de créations d’emplois censées rendre compte des résultats de son action ayant été gonflées… Fondamentalement, Invest in Sweden n’avait sans doute pas la taille critique nécessaire, avec un réseau international limité à cinq implantations (Brésil, Inde, Japon, Chine et États-Unis) et une seule implantation régionale en Suède (à Göteborg). Une cinquantaine d’agents d’Invest in Sweden ont donc été intégrés au nouvel organisme Business Sweden, dont les neuf dixièmes des effectifs viennent de l’autre agence préexistante, Exportrådet.

Dans un premier temps au moins, il a été décidé de préserver au sein de Business Sweden deux directions distinctes, l’une pour les exportations et l’autre pour l’accueil des investissements internationaux, avec un partage des fonctions supports et du réseau à l’international.

Business Sweden emploie 550 personnes :

– 500 pour la promotion des exportations et 50 pour les investissements internationaux ;

– 160 en Suède (130 au siège et 30 dans les 21 régions du pays) et 390 à l’étranger.

L’agence est présente dans 57 pays (ce qui est assez comparable à Ubifrance, présent dans 62 pays) et a aussi une vingtaine de bureaux régionaux en Suède.

Les subventions publiques annuelles à l’agence représentent l’équivalent de 31 millions d’euros environ (dont 25 millions pour la mission de promotion des exportations et 6 millions pour la mission d’accueil des investissements) et financent notamment un programme spécifique pour les TPE et petites PME (moins de 50 salariés). L’objectif est par ailleurs de développer la facturation de services d’accompagnement aux entreprises, car le financement public tend à diminuer depuis plusieurs années.

Deux institutions financières sont dédiées au soutien aux exportateurs :

– Exportkreditnämnden (EKN) est une agence publique qui offre différentes formes d’assurance-crédit aux exportateurs, avec la garantie explicite de l’État suédois.  Ses interventions sont limitées aux opérations à long terme (au-delà de 180 jours) ou hors OCDE. L’activité d’EKN doit être autofinancée sur le long terme ;

– Svensk Exportkredit (SEK) est une entreprise de droit privé, mais appartenant en totalité à l’État (sans toutefois bénéficier de sa garantie permanente). C’est une banque dédiée au financement de l’export, dont le mandat précise qu’elle intervient en complément des banques commerciales et obéit à des considérations purement commerciales. Sauf rares exceptions, les crédits de SEK sont accordés en cofinancement avec une banque commerciale – car en cas d’intervention sans cofinancement, il est lui difficile de démontrer que les conditions du prêt sont des conditions de marché et qu’il n’y a pas de concurrence déloyale. SEK dispose d’accords de coopération avec 40 banques commerciales suédoises et étrangères. La majorité des prêts octroyés par SEK font par ailleurs l’objet d’une demande de garantie auprès d’EKN, mais ce n’est pas une obligation.

D’après les éléments transmis par les services français à Stockholm, plus de la moitié de l’en-cours des crédits de SEK serait concentré sur ses dix premiers groupes clients.

Tous les ans, la promotion de la Suède est axée sur quelques secteurs, dans une optique au moins aussi culturelle qu’économique. Par exemple, en 2012, ces secteurs étaient la musique, la gastronomie, le cinéma, la mode et la littérature.

Par ailleurs, trois grands projets sectoriels plus durables ont été lancés :

– SymbioCare, consacré au secteur de la santé ;

– SymbioCreate, consacré aux industries créatives (film, musique, mode, jeux en ligne et design) ;

– SymbioCity, qui promeut la compétence et l’expérience suédoise du développement durable urbain.

Ces projets ont chacun leur site Internet, réalisé en anglais pour assurer sa diffusion internationale. Reposant sur une logique de réseau, ils sont conduits en coopération avec les entreprises, consultants, organisations et administrations des secteurs concernés ; par exemple, plus de 700 acteurs suédois feraient partie du réseau SymbioCity. Ces projets visent tout à la fois à valoriser l’excellence globale de la Suède et celle de ses entreprises dans ces secteurs. À cet égard, les slogans qui figurent sur la page d’accueil des sites SymbioCare et SymbioCity sont très significatifs : le premier définit son objet par la formule « Health by Sweden » et le second par la formule « Sustainability by Sweden ».

L’État s’est doté de deux opérateurs « généralistes » pour l’internationalisation des entreprises : Ubifrance, pour l’accompagnement des exportateurs, et l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII), pour l’accueil des investisseurs.

Il faut toutefois savoir que divers autres opérateurs spécialisés plus anciens subsistent, notamment pour soutenir les exportations du secteur agricole et agro-alimentaire (la société SOPEXA, l’association ADEPTA, l’établissement public FranceAgriMer), celles des biens et services culturels (Unifrance Film, Bureau export de la musique, Bureau international de l’édition française), celles de certains secteurs industriels (textile-habillement, cuir, bois-ameublement, horlogerie-bijouterie) où existent des comités professionnels de développement économique qui ont notamment une mission de promotion internationale.

Enfin, Atout France est l’agence de développement touristique de la France. Elle contribue à ce titre au rayonnement économique de notre pays et à sa balance des paiements. Cette agence a été constituée en 2009 sous la forme juridique d’un groupement d’intérêt économique (GIE), ce qui permet de faire travailler en synergie acteurs publics et privés (fédérations professionnelles, grandes entreprises du secteur…) et de susciter des cofinancements privés. Avec une subvention de l’État qui devrait s’élever à 31,2 millions d’euros en 2014, l’agence emploie plus de 400 personnes et entretient 35 bureaux dans 32 pays. Atout France a, selon les termes de la loi, une triple mission « de promotion du tourisme en France, de réalisation d’opérations d’ingénierie touristique et de mise en œuvre d’une politique de compétitivité et de qualité des entreprises du secteur » (à ce dernier titre, Atout France gère le classement hôtelier et l’immatriculation des opérateurs de voyages).

La réforme du dispositif public d’accompagnement des entreprises françaises à l’international, initiée en 2003, s’est traduite par un transfert progressif des activités de nature commerciale des services économiques des ambassades au nouvel opérateur Ubifrance. Le transfert des compétences d’appui à l’internationalisation des entreprises s’est déroulé entre 2009 et fin 2012.

Ubifrance emploie aujourd’hui près de 1 400 personnes, dont 850 à l’étranger, avec un budget qui a été en 2012, selon son compte financier, de 180 millions d’euros, dont un peu plus de 100 millions en provenance de subventions budgétaires, le reste provenant de ses ressources propres (vente de prestations).

À ce jour, Ubifrance est présent en nom propre dans 62 pays. En 2013, des bureaux ont été ouverts en Birmanie et au Kenya. Pour compléter ce dispositif, l’agence fait appel dans sept pays à un délégataire de service public implanté sur place. Cette couverture représente donc près de 70 pays qui couvrent 95 % de notre commerce extérieur.

Ubifrance est lié par le contrat d’objectifs et de performance (COP) qu’il signe tous les trois ans avec l’État. Les COP successifs ont commencé par donner principalement des objectifs quantitatifs d’activité à Ubifrance : monter des opérations collectives (salons) et conduire des actions d’accompagnement au bénéfice du plus grand nombre d’entreprises. Depuis 2009, l’agence a triplé le nombre d’accompagnements d’entreprises à l’international, atteignant 19 300 en 2012.

Le COP en vigueur pour la période 2012-2014 met l’accent sur la qualité des prestations d’Ubifrance aux entreprises et sur les résultats de son action en matière d’exportations. Dans cette nouvelle approche, l’agence doit veiller à ce que ses actions d’accompagnements se concrétisent en « courants d’affaires » (commandes ou contrats signés dans les deux ans suivant l’accompagnement). L’objectif fixé par le COP est le développement de 10 000 nouveaux courants d’affaires au bénéfice de 6 000 PME et ETI différentes en trois ans. Pour 2012, le nombre de courants d’affaires générés est estimé à 3 700, pour 2 500 entreprises accompagnées.

Sur 2012, 8 entreprises accompagnées sur 10 auraient identifié des contacts à potentiel avec lesquels elles n’avaient pas d’activité auparavant, 3 sur 10 auraient développé au moins un courant d’affaires dans les six mois après avoir bénéficié d’une prestation, ce ratio passant à 5 sur 10 en comptant les entreprises en cours de négociation d’un contrat au terme de ces six mois.

Les résultats d’Ubifrance sont également évalués par des sondages et entretiens auprès des bénéficiaires de ses prestations, ainsi que par des études économétriques (qui s’efforcent de comparer les performances à l’exportation des entreprises accompagnées par Ubifrance à celles d’un panel d’entreprises qui n’ont pas été accompagnées). Selon une étude réalisée en 2012 (4), « les accompagnements collectifs réalisés par Ubifrance sur la période 2007-2009 auraient produit près de 22 % d’exportations supplémentaires en valeur [pour les entreprises bénéficiaires]. Les accompagnements collectifs apparaissent parmi les plus rentables : 1 euro apporté par le contribuable rapporterait aux entreprises françaises près de 68 euros en 2008 et 43 euros en 2009 ».

L’Agence française pour les investissements internationaux (AFII) a été créée en 2001, en regroupant les réseaux en région et à l’international de la délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale (DATAR) avec ceux de la délégation aux investissements internationaux du ministère de l’économie. Elle a été chargée d’une double mission : prospecter les investisseurs internationaux et les accompagner en France ; mais aussi valoriser l’image économique de la France à l’étranger.

En 2012, d’après son compte financier, les ressources de l’AFII ont atteint 25,6 millions d’euros, essentiellement en provenance du budget de l’État (21,7 millions), le reste venant d’autres concours publics et de ressources propres. De ses origines, l’AFII a gardé une double tutelle et une double source de ses ressources budgétaires : les deux tiers sont octroyées par le ministère de l’économie, le reste par la DATAR.

L’AFII emploie environ 150 agents, dont une soixantaine à son siège, les autres à l’étranger. Cet effectif limité ne lui permet pas d’être directement présente partout (il y a 23 bureaux à l’étranger) : l’agence est donc représentée par des agents des services extérieurs du Trésor, qu’elle désigne comme correspondants, dans des pays tels que l’Afrique du sud, l’Australie et le Mexique.

L’AFII est également liée par un contrat d’objectifs et de performance (COP) conclu avec l’État pour la période 2012-2014 Ce document comprend des engagements dans de nombreux domaines. Il demande notamment à l’agence de détecter 1 000 nouveaux projets d’investissements par an – 1 147 ont été décomptés en 2012 – et d’en faire aboutir 300, d’organiser 550 visites d’entreprises étrangères en France – 559 réalisées en 2012 –, ou encore d’accompagner 75 projets effectifs d’installation en France de centres de R&D ou de quartiers généraux pan-européens – 60 projets accompagnés en 2012.

Le 9 janvier 2013, un nouvel objectif a été fixé à l’AFII par le Gouvernement, à atteindre d’ici 2017 : que la France accueille annuellement 1 000 investissements directs étrangers créateurs d’emplois – contre environ 700 actuellement –, dont 300 émanant d’entreprises encore non implantées sur notre sol.

Outres des indicateurs d’activité (plus que de résultats), la mesure des résultats de l’agence repose aussi largement sur le décompte des reprises médiatique de ses actions de promotion et de ses activités (avec des objectifs chiffrés). L’agence a en effet une importante activité de communication et de promotion :

– pour valoriser à l’étranger l’action du Gouvernement en faveur de l’attractivité de la France, elle produit et diffuse des argumentaires en plusieurs langues (une douzaine) qui présentent les réformes engagées (mesures du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, etc.) ;

– elle mène en 2012-2013, avec l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) et à l’aide d’une dotation budgétaire spécifique de 2 millions d’euros, une grande campagne de communication (« Say oui to France, say oui to innovation ») qui valorise l’innovation et la recherche françaises, mais aussi le positionnement de la France au centre de l’Europe et près de l’Afrique et du Moyen-Orient. Cette opération cible prioritairement les États-Unis et le Canada, dont le potentiel d’investissement reste élevé, qui ont un rôle prescripteur en matière d’innovation et où l’image de la France est souvent dégradée. La campagne couvre également la Chine, l’Inde et le Brésil, où les atouts de la France restent mal connus. Outre la campagne médiatique, diverses occasions de rencontres et d’échanges sont provoquées dans les pays cibles (rencontres avec des journalistes influents, voyages de presse, renforcement de la présence française dans les salons, conférences et forums…).

L’action de l’agence repose enfin sur de nombreux partenariats : elle a constitué un « Club AFII » avec des acteurs privés qui accompagnent les investisseurs étrangers dans leur démarche d’implantation en France (consultants, banques, compagnies d’assurance, sociétés d’ingénierie ou bureaux d’études, promoteurs d’immobilier d’entreprise…) ; elle anime des « clubs pays » regroupant les entreprises étrangères implantées en France selon leur origine géographique (six clubs de cette nature existent, destinés respectivement aux entreprises japonaises, coréennes, chinoises, indiennes, brésiliennes et russes) ; elle a passé des accords avec certaines agences étrangères qui sont ces homologues (en Chine, au Brésil, en Inde, tout récemment au Japon et en Indonésie). Globalement, le travail de cette agence doit être salué.

Les régions ont effectivement développé des dispositifs variés et parfois importants de soutien à l’internationalisation de leurs entreprises. Le rapport précité de MM. Bentejac et Desponts note ainsi que « chaque région a son propre schéma d’organisation et de répartition des missions de soutien à l’export, d’attractivité (…) et d’innovation, entre le conseil régional, la CCI régionale et des agences spécialisées, qui peuvent exercer une ou plusieurs de ces missions à la fois. On ne peut donc pas dégager de modèle général. En outre, les entités infrarégionales (départements, métropoles) ont aussi souvent leurs propres agences de développement ».

Les chiffres recueillis dans le cadre de ce rapport montrent un effort budgétaire très variable mais parfois très important des conseils régionaux, dont certains ont développé une présence internationale propre. On a par exemple, en 2012, un budget de plus de 3 millions d’euros pour l’Alsace et des implantations au Brésil, au Canada, aux États-Unis, en Chine et en Italie ; en Languedoc-Roussillon, un budget de près de 2 millions d’euros et une présence aux États-Unis, au Royaume-Uni, au Maroc, en Chine ; en Rhône-Alpes, avec l’agence régionale ERAI, une présence dans 21 pays… D’autres régions, comme la Bretagne, ont plus précocement joué la carte des synergies et préféré conventionner des relais existants à l’international, par exemple des bureaux d’Ubifrance.

Au total, les régions entretiendraient 94 implantations directes à l’étranger, y employant un peu moins de 200 personnes – ce sont des petites implantations, avec souvent un seul agent, qui peut être un volontaire international en entreprise (VIE). La moitié de ces agents dépendraient de la seule région Rhône-Alpes, par le biais de son opérateur ERAI, ce qui n’est pas sans poser quelques interrogations car cet organisme, surdimensionné, est amené à proposer ses services à des entreprises qui ne sont pas rhônalpines. Dans un souci de pragmatisme, Ubifrance a toutefois passé un accord avec ERAI pour que les deux organismes puissent travailler en synergie.

À l’échelon plus local, il ne semble pas exister de synthèse sur les multiples opérations qui sont montées, notamment dans le cadre de coopérations décentralisées, par des départements, des villes ou des intercommunalités. L’impact de ces coopérations décentralisées étant sans doute significatif, y compris sur notre commerce extérieur, il serait souhaitable qu’elles soient mieux recensées, connues et intégrées aux autres dispositifs – dans le respect de l’autonomie des choix des collectivités qui les conduisent, naturellement.

Globalement, les dépenses des collectivités territoriales pour l’internationalisation des entreprises et l’attractivité pourraient être de 80 millions à 105 millions d’euros.

Le constat fait pour les régions d’une implication inégale vaut aussi pour le réseau consulaire.

L’évaluation des moyens qu’il consacre à l’appui et au conseil au développement international des entreprises, qui fait partie de ses missions légales, est difficile. Ces moyens, selon le rapport de MM. Bentejac et Desponts, pourraient représenter environ 400 emplois et 27 à 32 millions d’euros par an (financés par l’impôt, donc après déduction des ressources tirées de la commercialisation de prestations). La plupart des acteurs s’accordent sur le caractère très inégal, en qualité et quantité, des prestations du réseau consulaire selon les ressorts de chambres.

Outre sa présence sur le territoire, le réseau consulaire est également actif à l’étranger, où sont constituées (par les entreprises françaises implantées localement, sur la base du volontariat) des chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger (CCIFE). Dans quelques pays où Ubifrance est absent, ces chambres bénéficient d’une délégation de service public pour exercer ses missions.

La question de la coordination de ces acteurs entre eux et avec les opérateurs de l’État s’est posée depuis une dizaine d’années. La réforme engagée en 2008 et la signature d’une convention à cinq (direction générale du Trésor, Ubifrance, Assemblée des chambres françaises de commerce et d’industrie-ACFCI, Union des chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger-UCCIFE et Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France-CNCCEF) ont posé les premières bases écrite d’un partenariat, que la Charte nationale de l’exportation, signée le 12 juillet 2011, et ses déclinaisons régionales ont tenté d’élargir et consolider. Cette charte, dont l’Association des régions de France (ARF), la Coface et OSEO ont aussi été signataires (outre les signataires de la convention de 2008) avait notamment pour ambition la mise en place de guichets uniques de l’export dans chaque région.

Les résultats de la démarche sont considérés comme peu satisfaisants. Depuis 2009, Ubifrance a développé une présence limitée sur le territoire national (22 délégués régionaux et 6 directeurs inter-régionaux).

La création de CCI-International, visant à établir un réseau reliant les CCI et les CCIFE, est parfois perçue comme une concurrence directe à l’encontre d’Ubifrance (qui serait contourné par l’adressage des candidats à l’export aux CCIFE). Durant la période 2009-2011, sur les 8 800 nouveaux exportateurs détectés par les CCI, seulement 3 500 auraient été traités par Ubifrance. Le réseau consulaire et l’agence n’ont toujours pas de système d’information commun permettant de mesurer leurs relations et de suivre les entreprises.

Ubifrance a également cherché à se rapprocher des régions et de leurs agences de développement, notamment en répondant à des appels d’offre pour être leur relais international dans tel ou tel pays. En 2012, puis de nouveau en 2013, des agents des régions ont été associés à la programmation des actions d’Ubifrance.

L’AFII a quant à elle contractualisé ses relations avec les régions au travers de conventions de coopération quinquennales. Cette coopération se traduit notamment par la mise en place d’une procédure de partage de l’information sur les projets d’investissements étrangers (par le « comité d’orientation et de suivi des projets étrangers »), des actions de prospection en commun avec les agences régionales en charge de l’attractivité et la mutualisation de certains moyens d’étude.

Le Président de la République et le nouveau Gouvernement ont cherché rapidement à relancer la nécessaire coordination des acteurs territoriaux de l’internationalisation des entreprises. Le choix a été fait de confier cette tâche de coordination aux régions.

La déclaration commune État-Régions pour la croissance et l’emploi du 12 septembre 2012, dite de l’Élysée, comprend notamment un engagement n° 3 : faire progresser de 10 000 le nombre de PME/ETI exportatrices à l’horizon de trois ans, afin de résorber le déficit commercial hors-énergie. Pour ce faire, la détection et le suivi des entreprises susceptibles de grandir à l’export sont confiés aux régions, en lien bien sûr avec les différents opérateurs.

Le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, en cours de navette parlementaire, confirme cette mission d’appui à l’internationalisation des entreprises donnée aux régions, en la mentionnant explicitement.

Dans le prolongement de leur stratégie de développement économique et d’innovation, les régions ont commencé à élaborer des plans régionaux pour l’internationalisation des entreprises (PRIE). Ces documents fixent une stratégie régionale et des objectifs et des actions associés et organisent sur le territoire régional le dispositif d’appui à l’export. Aujourd’hui, 10 PRIE ont été conclus, dans les régions Centre, Île-de-France, Midi-Pyrénées, Basse-Normandie, Pays-de-la-Loire, Rhône-Alpes, Limousin, Poitou-Charentes, Nord-Pas-de-Calais et Bretagne. Dans d’autres régions, les négociations devraient aboutit avant la fin de l’année 2013 : c’est le cas des régions Auvergne, Aquitaine, Haute-Normandie, Champagne-Ardenne, Lorraine et Franche-Comté.

À titre d’exemple, le plan adopté en Île-de-France vise à offrir un parcours totalement clair aux entreprises, avec une porte d’entrée (portail) unique et la garantie de se voir désigner un référent unique pour tout ce parcours, référent qui appartiendra aux services de l’un ou l’autre opérateur. Il clarifie les responsabilités des différents opérateurs sur les différentes phases du parcours.

Les pôles de compétitivité ont été conçus pour développer et fédérer l’offre des territoires dans leurs filières d’excellence.

La nouvelle phase de la politique des pôles de compétitivité (2013-2018) met en particulier la priorité sur leur développement à l’international. Le dernier rapport d’évaluation de la politique des pôles montre que le nombre de collaborations formalisées avec les clusters étrangers a connu une forte croissance sur la période 2008-2011. Chaque pôle a cité en moyenne 4,8 collaborations en 2011 contre 1,9 en 2008, soit un total de 340 collaborations avec des clusters étrangers. Il est désormais demandé aux pôles de se fixer des objectifs spécifiques en matière d’internationalisation et de définir des indicateurs de résultats dans ce domaine.

L’action économique fait partie des missions de nos diplomates. Traditionnellement, elle est plus particulièrement assurée, dans les ambassades, par les agents des services économiques, qui proviennent principalement de la direction générale du Trésor. Ubifrance a été développé par le transfert des personnels de ces services qui s’occupaient plus spécifiquement du soutien aux exportateurs, mais le réseau des services économiques qui subsiste, pour les missions « régaliennes », représente presque 700 agents (y compris les attachés spécialisés provenant des ministères de l’agriculture et de l’écologie et du développement durable, de la direction générale de l’aviation civile, de la Banque de France et de l’INPI), dont plus de la moitié contribuent directement aux actions en faveur des entreprises. Ce réseau reste géographiquement plus étendu que celui des opérateurs Ubifrance et AFII : 132 implantations dans 111 pays. Les crédits budgétaires le finançant seront proches de 92 millions d’euros en 2014.

Plus particulièrement, le ministre des affaires étrangères a souhaité renforcer l’implication de tout le réseau diplomatique dans le redressement économique de la France. C’est dans cette optique qu’a été élaboré le plan d’action pour la diplomatie économique, qui a été présenté à l’occasion de la Conférence des ambassadeurs du 27 août 2012.

La « diplomatie économique », politique transversale qui passe surtout par des mesures d’organisation, n’a pas de traduction budgétaire significative, même si on doit signaler la création cette année d’une douzaine de postes de volontaires internationaux à profil économique.

Selon plusieurs personnes entendues par votre rapporteure, la diplomatie économique vaut principalement par l’effet de mobilisation qu’elle entraîne. Elle amène aussi des personnalités de haut rang (ambassadeurs, personnalités politiques nommées représentant spécial…) à s’impliquer sur des dossiers économiques, ce qui peut faciliter leur bonne issue.

Globalement, le ministère des affaires étrangères évalue à 600 équivalents temps plein sa contribution à l’action économique (il ne s’agit pas d’emplois identifiés, mais de l’estimation de la part de l’activité des diplomates qui est consacrée à cette action).

Un an après, on peut faire un état des lieux du déploiement des principales mesures institutionnelles du plan d’action pour la diplomatie économique :

– une direction des entreprises et de l’économie internationale a été créée au ministère des affaires étrangères, le 1er mars 2013 ;

– sept ambassadeurs pour les régions ont été nommés. Il s’agit de personnalités mises à disposition des présidents de région qui le souhaitent pour favoriser le rapprochement entre leur collectivité, leurs entreprises et le réseau diplomatique, l’objectif étant de mieux soutenir leurs initiatives et de promouvoir leurs atouts, dont les pôles de compétitivité, à l’étranger ;

– neuf représentants spéciaux (5) ont été nommés pour favoriser le développement de la relation économique avec des pays stratégiques ;

– il a été décidé qu’un « conseil économique » devait être mis en place dans chaque ambassade de France dans un pays où sont réalisés au moins 50 millions d’euros d’exportations françaises. Sur les 126 postes concernés, 95, au 19 août 2013, avaient mis en place cette instance. La circulaire relative à ces conseils prescrit qu’ils réunissent autour de l’ambassadeur les services concernés de l’ambassade et un éventail représentatif des milieux d’affaires français dans le pays ; ils doivent en principe être composés d’une quinzaine de membres au plus. Il ressort des comptes rendus des conseils économiques que la composition mixte publique-privée a été intégrée, avec la présence généralisée de représentants d’entreprises, de conseillers du commerce extérieur de la France et de représentants des chambres de commerce et d’industrie françaises locales ;

– la rédaction d’un volet économique dans les plans stratégiques des ambassades a été systématisée à partir du début de l’année 2013. Ces plans répondent désormais à un format prédéfini. À fin juillet 2013, 38 plans d’actions avaient été élaborés selon ce nouveau format et validés par le ministère.

L’analyse de certains de ces plans montre une réelle volonté de s’attacher à des actions concrètes et de se fixer des objectifs précis. Il y a également un souci de s’inscrire dans les axes de la politique définie par le ministère du commerce extérieur.

Par exemple, le plan élaboré par notre ambassade au Maroc s’inscrit dans la démarche des « familles de produits » en privilégiant deux de ces « familles » (« mieux vivre en ville » et « mieux se nourrir »), pour lesquelles il mentionne des actions précises (telles que la présence d’un pavillon français dans des salons professionnels marocains ou l’organisation d’événements thématiques) et des axes de travail (tels que le développement des éco-cités et des villes vertes ou la sensibilisation des autorités marocaines à la nécessité d’adopter un cadre législatif transparent et sécurisé en matière de partenariat public-privé afin d’attirer des investisseurs français).

L’évolution des pratiques en matière de visas constitue une autre avancée concrète et rapide qui favorisera le rayonnement économique de la France, même si elle a aussi d’autres objectifs. On peut notamment signaler les instructions adressées fin mars 2013 à l’ensemble des consulats pour faciliter les déplacements des hommes d’affaires, universitaires, scientifiques, chercheurs, artistes et touristes qui ont la France pour destination privilégiée ou récurrente. Il s’agit d’augmenter le recours aux visas « de circulation », qui permettent des entrées multiples pour des séjours de trois mois au plus. Le nombre de visas de circulation délivrés a augmenté de 11,5 % entre les trois premiers semestres de 2012 et la même période de 2013 : cette nouvelle orientation a donc eu des effets immédiats.

Plus généralement, la priorité à l’économique se manifeste dans la manière de faire évoluer nos relations au plus haut niveau avec certains pays. Par exemple, en avril 2013, la France et le Vietnam ont décidé d’instituer un dialogue économique annuel de haut niveau – pour la première occurrence, celui de notre ministre du commerce extérieur et d’un vice-premier ministre vietnamien. L’accord de partenariat stratégique signé ensuite avec ce pays, le 25 septembre 2013, accorde la priorité à la coopération dans les domaines de l’économie, du commerce et des investissements.

Les « conseillers du commerce extérieur de la France » (CCEF) sont une institution très originale qui a traversé l’histoire avec une remarquable continuité, puisque leur création remonte à 1898.

Au nombre aujourd’hui de 4 300, ils sont choisis pour leur compétence et leur expérience à l’international, souvent dans les communautés d’affaires expatriées, et nommés pour trois ans par décret du Premier ministre. Ils assurent leurs missions bénévolement, voire en payant de leur poche…

Leur nombre et leur implantation dans le monde des affaires de nombreux pays en font d’abord des auxiliaires essentiels de la mission de « veille » qui est celle de tous les services économiques internationaux. Par ailleurs, ils organisent ou contribuent à organiser des événements (colloques, salons…) et peuvent aussi accompagner individuellement des entreprises.

Le dispositif du volontariat international en entreprise (VIE) se situe à la rencontre des politiques de l’emploi et de l’internationalisation, ce qui explique sans doute que les régions, notamment, décident souvent de le financer. Il permet en effet aux jeunes une expérience professionnelle rémunérée (même si c’est à un niveau généralement inférieur aux salaires de marché) à l’étranger, avec de bonnes chances d’embauche ultérieure dans l’entreprise d’accueil (de l’ordre de 70 % selon Pôle emploi). Quant aux entreprises, elles disposent ainsi d’un représentant sur place à faible coût.

Le Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi du 6 novembre 2012 fixe l’objectif de « développer le nombre de VIE de 25 % en trois ans et en démocratiser l’accès, tant pour les PME et ETI, que pour des profils plus diversifiés de jeunes diplômés » (décision n° 16).

L’objectif est d’atteindre le nombre de 9 000 VIE en poste en 2015. On est effectivement passé de 7 074 VIE en poste en décembre 2011 à 7 399 un an plus tard et 7 671 en octobre 2013, mais le développement du dispositif semble parfois freiné par des problèmes d’obtention de visa – problèmes qui résultent souvent de la difficulté des citoyens des pays d’accueil à obtenir des visas français, ce qui entraîne des mesures de rétorsion.

Le Gouvernement souhaite, par ailleurs, démocratiser le dispositif en le rendant accessible à des jeunes moins diplômés, sachant qu’actuellement 90 % des VIE ont un niveau « Bac + 5 » au moins (bien qu’officiellement il n’y ait pas de condition de diplôme). Un nouveau dispositif, le « VIE Pro », a été instauré en vue d’intégrer l’opportunité d’un VIE dans les cursus de licence professionnelle. Une première phase d’expérimentation a été lancée avec plusieurs universités volontaires à la rentrée 2013/2014 dans quelques secteurs ciblés tels que le tourisme, les transports, la logistique, le BTP et la grande distribution : dans les cursus concernés, les étudiants seront au moins pendant six mois sous statut de VIE.

La Coface a été créée en 1946 pour assurer les risques courus par les exportateurs. C’est aujourd’hui une entreprise commerciale classique qui continue à gérer pour le compte de l’État plusieurs procédures qui constituent ce que l’on appelle les « garanties publiques », tout en ayant son activité propre d’assurance-crédit, développée dans le monde entier (66 pays).

L’activité « garanties publiques » est devenue assez marginale pour la Coface, puisqu’elle génère seulement, dans ses comptes propres, un chiffre d’affaires d’environ 60 millions d’euros, qui correspond à la rémunération par l’État de cette gestion pour compte de tiers. En termes de moyens humains, c’est un peu plus de 300 des 4 400 collaborateurs de la Coface qui travaillent pour cette activité.

La Coface gère actuellement quatre procédures publiques (une cinquième étant en extinction) :

– l’assurance-crédit consiste à couvrir les exportateurs contre le risque d’interruption de leur contrat et les banques contre le risque de non remboursement des crédits à l’exportation octroyés à un acheteur étranger ; l’en-cours total garanti par la Coface dans le cadre de cette garantie s’élevait fin 2012 à 63,9 milliards d’euros (– 0,4 % par rapport à 2011) ;

– la garantie de change couvre le risque de change pendant la négociation des contrats à l’étranger ; l’en-cours global garanti est passé de 1,9 milliard d’euros fin 2011 à 0,97 milliard fin 2012 ; l’exercice 2012 a vu une baisse du nombre d’entreprises ayant eu recours à cette garantie (96 contre 118 en 2011) ;

– la garantie du risque exportateur recouvre deux types de garantie, à destination des banques qui financent les exportateurs : la garantie des cautions qu’elles émettent et la garantie des prêts de préfinancement qu’elles accordent dans l’attente du règlement des contrats ; l’en-cours global des deux procédures s’élevait mi-2013 à 1,8 milliard d’euros ;

– l’assurance-prospection est réservée aux entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 500 millions d’euros ; il s’agit en pratique d’une sorte d’avance qui couvre les dépenses de prospection commerciale et n’a à être remboursée que si elles débouchent sur des ventes. Les budgets accordés ont augmenté de 226 millions d’euros en 2011 à 265 millions en 2012 et l’on est passé, de fin 2011 à fin 2012, de 7 500 à 9 225 entreprises bénéficiaires (en stock), notamment grâce au développement d’un produit simplifié destiné aux petites entreprises, l’ « assurance-prospection premiers pas » (A3P).

La conception de l’assurance-prospection fait qu’elle est toujours déficitaire, entraînant une charge budgétaire pour l’État, qui apporte sa garantie à la Coface et doit donc couvrir les déficits. En revanche, l’assurance-crédit publique génère d’importants excédents et les autres dispositifs sont proches de l’équilibre. En 2012, la sommation d’un résultat positif de 318 millions d’euros pour l’assurance-crédit, d’un déficit de 104 millions d’euros pour l’assurance-prospection et de petits soldes positif ou négatifs sur les autres procédures a conduit à un excédent technique global de 193 millions d’euros sur l’ensemble des garanties publiques. Les dépenses budgétaires au titre des appels en garantie de la Coface sur les procédures déficitaires sont tendanciellement en nette augmentation : 82,5 millions d’euros en 2010 ; 99,6 millions en 2011 ; 116,4 millions en 2012 ; peut-être 128,2 millions en 2014 (prévision budgétaire).

La loi de finances rectificative de décembre 2012 comprenait plusieurs mesures de renforcement des dispositifs de la Coface.

C’est ainsi, notamment, que la garantie « pure et inconditionnelle » à 100 % (au lieu de 95 %) de la Coface a été généralisée pour l’assurance-crédit dans l’aéronautique (aux hélicoptères et avions courts et moyen-courriers), afin d’assurer la compétitivité de programmes comme SuperJet (projet franco-italo-russe) et ATR. La signature du décret d’application le 24 mai 2013 a permis de l’appliquer déjà à la vente de 33 appareils.

Le décret d’application portant sur la mise en place de la garantie rehaussée de refinancement a été signé le 30 juillet 2013. Il vise à faciliter l’accès aux liquidités de long terme pour les banques commerciales qui mettent en place des crédits-export assurés par la Coface, en faisant bénéficier d’une garantie à 100 % les investisseurs apportant ces liquidités. L’objectif est de répondre à la crise de liquidité des banques et à leur retrait du crédit-export consécutif aux nouvelles exigences prudentielles. Le prospectus définitif de la Coface présentant l’ensemble des caractéristiques du produit a été publié le 3 octobre 2013. Il est donc désormais pleinement disponible et pourrait trouver à s’appliquer sur un prochain contrat du chantier naval STX. La réussite économique de ce produit dépendra évidemment de l’attitude des banques commerciales, selon qu’il les amènera ou non à revenir vers le crédit-export.

Il faut enfin rappeler que la France dispose de deux instruments d’aide bilatérale liée, qui permettent donc, outre leur objet principal d’aide au développement, d’appuyer les entreprises françaises à l’international : la Réserve pays émergents (RPE), qui intervient sous forme de prêts, et le Fonds d’étude et d’aide au secteur privé (FASEP), qui intervient sous forme de dons.

La RPE, dotée dans le projet de loi de finances pour 2014 de 360 millions d’euros (autorisations d’engagement), contribue au financement de projets d’infrastructure, avec un retour d’au moins 70 % pour nos entreprises.

Le FASEP, doté l’an prochain de 19 millions d’euros, permet de financer des études de faisabilité en amont de projets d'investissement, des prestations d’assistance technique, de formation ou de coopération institutionnelle, ainsi que des dispositifs de soutien au secteur privé. Ce positionnement en amont des projets entraîne de bons retours pour les entreprises françaises, l’orientation d’une étude préalable vers telle ou telle solution technique influençant de fait le choix des entreprises ensuite chargées de la réalisation du projet.

La seule augmentation du nombre d’exportateurs, en amenant à l’export de manière indifférenciée le plus grand nombre d’entreprises, ne constitue pas un objectif satisfaisant : les volumes générés peuvent être faibles, certaines entreprises ne sont pas prêtes et se cassent les dents, d’autres font quelques ventes ponctuelles puis renoncent…

Le Gouvernement a donc choisi de privilégier une stratégie sélective : pour générer des volumes importants et durables d’exportations, il faut parier sur des entreprises déjà assez développées, innovantes, mais qui n’ont pas encore réalisé leur potentiel international. Cela n’empêchant pas d’ailleurs de continuer l’appui de base à tous les candidats à l’exportation : selon une analogie entendue par votre rapporteur, un ministre chargé des sports doit à la fois soutenir la diffusion du sport populaire et détecter et former des champions…

C’est le sens de la décision n° 14 du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi : « assurer un accompagnement personnalisé à l’international pour 1 000 ETI et PME de croissance dans le cadre de la BPI ».

Un vivier de 4 400 entreprises de croissance, susceptibles de bénéficier de cet accompagnement personnalisé, a été identifié. L’accompagnement des 1 000 bénéficiaires se réalisera de manière progressive avec un objectif de 250 entreprises pour 2013, 600 pour 2014 et 1 000 pour 2015. Il sera individualisé et durable.

Le 3 décembre 2012, la ministre du commerce extérieur a présenté sa stratégie : le choix fait est de concentrer les efforts de structuration et de promotion de l’offre française autour de 4 « familles » de produits et de services correspondant à la demande mondiale et dans lesquelles la France dispose d’une offre compétitive : « mieux se nourrir », « mieux se soigner », « mieux communiquer » et « mieux vivre en ville ». Cette stratégie sectorielle est couplée avec une stratégie territoriale qui privilégie 47 pays (6) cibles. Pour chacune des « familles », des pays cibles ont été identifiés, en fonction de la taille de leur marché et de leur potentiel d’importation à échéance de 5 et 10 ans.

Des personnalités du monde économique ont été nommées « fédérateurs » des « familles ».

De l’avis de personnes auditionnées par votre rapporteure, la démarche des « familles » a d’abord l’avantage de mettre en lumière les points forts de la France et de contribuer à la délivrance à l’international d’un message simple et positif, ce que nous ne savons pas toujours faire. Les impacts en termes de communication des politiques publiques sont trop souvent négligés, alors qu’ils sont bien réels.

Des actions concrètes ont aussi été engagées. C’est ainsi que des projets ont été identifiés par le réseau des services économiques et Ubifrance et font l’objet d’un accompagnement particulier.

Dans le domaine du « mieux se soigner », on peut citer le projet de fourniture d’équipements pour un nouvel hôpital à Can Tho au Vietnam et les projets de construction et d’équipement, voire de gestion, de plusieurs centres hospitalo-universitaires en Algérie. Par ailleurs, une initiative a été prise pour la Chine et la Russie et le sera très prochainement pour le Brésil : la création de « clubs santé » réunissant des entreprises françaises du secteur présentes sur place et des représentants des administrations.

Dans le domaine du « mieux vivre en ville », sont suivis des projets d’éco-quartiers en Chine et au Maroc. Le ministère du commerce extérieur a également lancé, le 26 juillet 2013, un appel à projets pour la réalisation d’un simulateur en trois dimensions, afin de mettre en valeur l’offre de la France en matière de ville durable. Il s’agit de réaliser une maquette virtuelle, à l’échelle d’un quartier ou d’une ville, qui permette de référencer le maximum d’entreprises françaises du secteur. Un label a également été élaboré pour fédérer l’offre française : Vivapolis.

Dans le domaine du « mieux se nourrir », un comité stratégique pour l’Asie a été mis en place le 14 janvier 2013. Il comprend des groupes de travail par filière, présidés par des chefs d’entreprise. Le comité a présenté le 24 juillet 2013 des propositions très concrètes, par exemple le renforcement des moyens humains dédiés aux questions sanitaires et phytosanitaires au sein du service économique régional de Pékin.

Le développement des co-localisations constitue maintenant un élément important de la stratégie de la France vis-à-vis des pays de la rive sud de la Méditerranée.

La décision annoncée en décembre 2012 de construire près d’Oran une usine automobile Renault en joint-venture avec l’État algérien s’inscrit dans cette démarche. Cette usine sera d’abord tournée vers le marché algérien et Renault a obtenu une clause d’exclusivité de trois ans sur les accords d’implantations industrielles automobiles avec le concours de fonds publics, freinant ainsi l’arrivée de ses concurrents. Plus généralement, la France et l’Algérie ont fait état de leur volonté de construire des partenariats, qui concerneront aussi la formation et les compétences, et pas seulement la production, dans plusieurs domaines : automobile, pétrochimie, pharmacie, matériaux de construction et agro-alimentaire.

Durant l’été 2013, une alliance stratégique a été conclue avec la Tunisie a été conclue pour favoriser les alliances entre entreprises françaises et tunisiennes de la famille « mieux communiquer ».

Dans le cadre de la modernisation de l’action publique, le comité interministériel (CIMAP) du 17 juillet 2013 a pris plusieurs décisions pour aller plus loin dans la fédération des acteurs de l’internationalisation :

– une marque commune « France International » va être mise en place avant la fin de l’année en cours ;

– un portail Internet unique proposera la palette des prestations et des financements et donnera accès à un annuaire interactif des partenaires de l’export ;

– un réseau social dédié à la « communauté française de l’export » sera également créé ;

– un numéro de l’international permettra d’orienter les entreprises vers le meilleur interlocuteur et la prestation la plus adaptée ;

– une plate-forme de mise en relation entre PME et sociétés de négoce international est prévue, les professionnels privés de l’export étant ainsi intégrés à la démarche ;

– un système sera élaboré pour labelliser les entreprises susceptibles de bénéficier d’une procédure d’obtention de visas accélérée pour leurs clients et leurs salariés.

Par ailleurs, le rapprochement des opérateurs se poursuivra, sous l’égide de la bannière « France International » et en s’inspirant des préconisations du rapport (7) établi par MM. Alain Bentejac et Jacques Desponts dans le cadre de la mission qui leur a été confiée :

– un rapprochement sera opéré entre l’AFII et Ubifrance et fait actuellement l’objet d’une étude de préfiguration ;

– pour ce qui est du volet agro-alimentaire, les différents ministres concernés ont adressé un courrier commun aux directeurs généraux d’Ubifrance et de la SOPEXA, leur demandant de formuler en commun, avant la fin octobre, des propositions ;

– le partenariat sera renforcé entre les services et entreprises publics et les organismes tiers de l’export (CCI, agences régionales de collectivités locales, consultants privés…). S’agissant en particulier de la coordination et du partage des rôles entre le réseau des CCI et Ubifrance, il semble que de manière générale on se dirige – et cela ressort notamment dans les premiers PRIE élaborés – vers le schéma suivant : le réseau des chambres se concentrerait sur les prestations destinées aux primo-exportateurs et entreprises souhaitant exporter (accueil, informations générales, éventuellement offre d’opérations collectives, telles que la participation à des foires et salons), tandis qu’Ubifrance serait plus spécialisé sur l’accompagnement dans la durée des PME et ETI à fort potentiel, qui ont besoin de prestations « sur mesure » fondées sur une très bonne connaissance des différents marchés étrangers.

Le commerce extérieur ne bénéficie pas d’une priorité budgétaire actuellement, ce qui, dans le contexte budgétaire que nous connaissons, signifie des réductions de moyens, qui concernent notamment les opérateurs.

S’agissant d’Ubifrance, la subvention budgétaire proposée dans le projet de loi de finances pour 2014 s’élève à 97,8 millions d’euros, en recul de 5,7 % sur celle figurant dans la loi de finances pour 2013 (cependant, compte tenu de l’effet des mesures de gel de crédits, le recul effectif devrait être moindre). Le plafond d’emplois de l’agence, qui était de 1 418 équivalents temps plein en 2012, a été ramené à 1 393 en 2013 et sera de 1 385 en 2014 selon le projet de loi de finances.

Entre 2012 et 2014, l’AFII verra ses subventions de fonctionnement (et hors campagne de promotion) effectives (après mise en réserve) diminuer de 4 %, pour atteindre 20 millions d’euros. Le résultat de l’exercice 2013 devrait être légèrement déficitaire (environ 0,3 million d’euros), après un exercice 2011 excédentaire (0,7 million d’euros) et un exercice 2012 tout juste en équilibre. Le plafond d’emplois, qui était de 148 en 2012, a été porté à 152 en 2013, mais serait réduit à 150 en 2014.

Votre rapporteure est bien consciente de la nécessité absolue de maîtrise des dépenses publiques. Cependant, plusieurs éléments lui paraissent justifier un plaidoyer pour une priorité budgétaire au commerce extérieur et à l’internationalisation des entreprises :

– c’est à raison que le Gouvernement s’est fixé un objectif ambitieux de réduction de notre déficit extérieur, car notre pays ne pouvait pas continuer sur la pente de déficit qu’il suivait ;

– le développement de nos relations économiques avec les parties les plus dynamiques du monde, où sera concentré l’essentiel de la croissance de demain, est nécessaire pour bénéficier aussi de cette croissance ;

– les dépenses publiques liées au commerce extérieur et plus généralement à l’internationalisation sont en fait assez limitées et même des augmentations significatives en pourcentage ne représentent pas des sommes considérables ;

– l’effet de levier (retour en flux d’export pour un euro public dépensé) est élevé sur nombre de ces dispositifs, ce qui signifie qu’en termes économiques ils tendent à s’autofinancer, car susciter des flux d’export et donc de production, c’est créer ou préserver des emplois et des entreprises, donc générer des revenus qui seront soumis à impôts et cotisations sociales…

– les quelques éléments de comparaison dont on dispose conduisent à penser que la France met en général moins d’argent dans ces politiques que ses principaux concurrents.

En effet, il ressort de données, il est vrai parcellaires et non homogénéisées, transmises par le ministère du commerce extérieur ou recueillies au cours des auditions, que :

– le Royaume-Uni – pays intéressant puisque sa population et son PIB sont très voisins de ceux de la France – consacrerait un budget équivalent à environ 275 millions d’euros à la seule fonction « export » de son agence UKTI, qui s’occupe à la fois de la promotion des exportations et de l’accueil des investisseurs. UKTI emploie plus de 2 300 personnes, dont plus de 400 s’occuperaient d’attractivité et d’investissements. Cela représente des moyens publics doubles de ceux octroyés à Ubifrance et à l’AFII. Cela dit, il semble que les missions d’UKTI s’étendent aux grands contrats, y compris d’armement, qui ne relèvent pas en France d’Ubifrance ;

– en Suède, on l’a dit, le financement public annuel de Business Sweden, qui cumule les missions d’Ubifrance et de l’AFII, dépasse les 30 millions d’euros ; de plus, l’Institut suédois consacre une dizaine de millions d’euros à la promotion de l’image nationale, dont le seul équivalent relatif en France semble être l’action de promotion de l’AFII. Le rapport des populations entre la Suède et la France étant de un à sept et celui des PIB de un à six, l’effort relatif du budget suédois sur les organismes nationaux d’accompagnement des exportateurs et des investisseurs semble être au moins le double de l’effort français ;

– la comparaison avec le dispositif allemand est difficile, car il repose largement sur les Länder et les chambres de commerce. Au niveau fédéral, l’agence GTAI, qui s’occupe à la fois de commerce et d’investissement, a un budget modeste (une vingtaine de millions d’euros), mais les chambres de commerce à l’étranger – qui emploient 1 700 salariés dans 85 pays – sont également subventionnées directement par le ministère fédéral de l’économie, de même que la fédération allemande des foires et salons, dont le nom indique bien la mission.

Si des moyens supplémentaires devaient être attribués à nos opérateurs, ce que souhaite votre rapporteure, ils devraient aller prioritairement au renforcement de leur présence dans les pays émergents. Comme on l’a vu, dans les années qui viennent, la croissance des richesses, donc celle des flux commerciaux, ne sera pas en Europe.

Les réseaux des opérateurs à l’international ont commencé à intégrer cette réalité : ainsi qu’on peut le voir sur les graphiques qui suivent, les réseaux des acteurs du soutien à l’export sont déjà moins « euro-centrés » que notre commerce extérieur, puisque seuls 31% des 850 agents d’Ubifrance en poste à l’étranger et 22 % des 310 agents opérationnels des services économiques du Trésor qui sont en charge de l’appui aux entreprises et aux grands projets (d’autres faisant de la veille stratégique et du suivi de la situation des pays) travaillent en Europe, alors que celle-ci représente encore plus de 60 % de notre commerce extérieur.

Pourtant, force est de constater qu’Ubifrance, par exemple, n’est présent directement que dans cinq pays d’Afrique subsaharienne (Afrique du sud, Angola, Cameroun, Côte d’Ivoire et Kenya), auxquels s’ajoutent trois pays où il représenté par un délégataire de service public (République démocratique du Congo, Madagascar et Nigeria). De même, la présence directe de l’agence est limitée à cinq pays latino-américains, auxquels s’ajoutent deux pays pris en charge à travers une délégation de service public.

Il reste donc, de toute évidence, des opportunités commerciales qui sont mal couvertes. Au demeurant, Ubifrance a l’intention d’ouvrir prochainement des bureaux au Congo, au Ghana et au Sénégal. Quelques moyens supplémentaires permettraient certainement de compléter utilement ce réseau.

La répartition géographique des personnels d’Ubifrance à l’étranger

Source : graphique élaboré à partir de données d’Ubifrance.

La répartition géographique des agents des services économiques chargés de l’appui aux entreprises et aux grands projets (fin 2012)

Source : graphique élaboré à partir de données de la direction générale du Trésor.

Quant au réseau de l’AFII, beaucoup plus petit (environ 90 personnes hors de France), il reste également beaucoup plus centré sur l’Europe et l’Amérique du Nord, d’où proviennent encore, de fait, la grande majorité des investissements dans notre pays.

La répartition géographique des agents de l’AFII à l’étranger (septembre 2013)

Source : graphique élaboré à partir de données de l’AFII.

Hors d’Europe occidentale, l’AFII n’est présente directement (elle peut aussi être présente indirectement en étant représentée par des agents des services économiques) que dans un nombre limité de pays : Canada, États-Unis, Brésil, Russie, Turquie, Israël, Émirats Arabes Unis, Inde, Singapour, Chine, Corée du Sud et Japon. L’AFII n’a donc d’antennes que dans une poignée de pays émergents, les plus grands, et est absente de pays majeurs tels que, par exemple, le Mexique, l’Afrique du Sud, l’Indonésie ou le Vietnam. Or, un soutien plus important à cette structure nous paraît opportun.

Votre rapporteure a été impressionnée par les moyens que la Suède a consacrés à la construction d’une image internationale, et ce avec des résultats indéniables.

Le 30 janvier 2013, le Gouvernement a lancé une mission de réflexion et de concertation destinée à mettre en lumière les enjeux et les moyens de mise en œuvre d’une « marque France ». La présidence en a été confiée à M. Philippe Lentschener. Cette mission a remis un rapport d’étape le 28 juin, préalable à une consultation nationale et à la production d’un rapport définitif.

L’objectif était d’identifier le « récit économique » de la France – en partant du constat que notre récit national est pour l’heure politique, culturel, social, mais guère économique – et de définir les meilleurs moyens de le partager.

Le rapport d’étape de la mission identifie trois valeurs qualifiées de typiquement françaises : l’amour des gestes et des savoir-faire ; la capacité à penser, imaginer et initier, de sorte qu’en France on ne se contente pas de créer des produits, mais on leur donne du sens et on imagine le monde qui va avec ; l’art de la surprise, la liste des inventions françaises étant impressionnante. Un concept fédérateur est dégagé : « la France est un multiplicateur de valeur ».

Le rapport comporte ensuite un ensemble très complet de préconisations pour la mise en œuvre de la marque France et d’actions qui pourraient être menées pour améliorer l’image de notre pays et partager son récit économique. Il y a par exemple la proposition de faire évoluer nos programmes scolaires, qui actuellement valorisent peu l’histoire économique et technologique de la France, qui est pourtant brillante. Ou encore la proposition de faire de l’accueil (des personnes arrivant de l’étranger) une priorité nationale, en reconnaissant son rôle fondamental dans le rayonnement du pays et ses retombées économiques.

Votre rapporteure soutient pleinement la démarche de la marque France, dont ses auditions ont démontré l’intérêt, tout en faisant ressortir quelques enjeux pratiques qui sont essentiels :

– la construction de la marque France exigera un budget très conséquent, notamment pour assurer la protection internationale de la marque, du nom de domaine qui lui sera associé, et aussi des dénominations voisines de sorte qu’elles ne soient pas détournées ;

– l’image internationale de la politique économique de la France semblant souvent médiocre, il y a certainement toute une action de communication institutionnelle à conduire : produire des documents pédagogiques, simples, positifs pour présenter nos réformes, et ce bien sûr en plusieurs langues ; traduire systématiquement les sites Internet institutionnels en anglais ; veiller à ce que tous les acteurs de nos réseaux à l’étranger, notamment les conseillers du commerce extérieur, puissent accéder facilement à des ressources de communication institutionnelle…

Beaucoup a déjà été fait pour que l’offre publique d’accompagnement à l’international soit plus claire (pour les entreprises), mais, comme le montrent les décisions du CIMAP du 17 juillet dernier, du chemin reste à parcourir.

Un débat a été ouvert sur l’opportunité de rapprocher, voire fusionner les opérateurs Ubifrance et AFII, certains suggérant d’y ajouter Atout France. Il existe déjà entre ces opérateurs des habitudes de travail ensemble dans les implantations à l’étranger, des collaborations lorsque l’expertise particulière d’une des agences est nécessaire et des synergies de moyens (partage de locaux, de systèmes informatiques…).

Jusqu’où faut-il aller au-delà ?

Les uns font valoir que les métiers des différentes agences ne sont pas les mêmes et qu’une fusion mettrait en cause les cultures professionnelles qu’elles ont développées.

Les autres observent que la plupart de nos partenaires ont procédé à la fusion de leurs agences chargées de l’export et de l’investissement, et rappellent que les métiers en cause sont de même nature (chasse à l’information, organisation d’événements, démarchage, conseil…) et que les synergies sont fortes dans l’objet même des actions : pour « vendre » un territoire de France à des investisseurs potentiels, il faut maintenant vendre son éco-système, donc la qualité de ses entreprises, et alors pourquoi ne pas « vendre » celles-ci aussi à l’export ; le client potentiel démarché pour rencontrer un exportateur français est aussi un investisseur potentiel en France ; le touriste étranger d’aujourd’hui est l’acheteur de produits français de demain, voire l’investisseur ; le développement du tourisme d’affaires exige des compétences d’ingénierie touristique et est nécessaire au rayonnement économique général…

Il reste enfin l’enjeu de lisibilité et de simplicité du dispositif pour ses utilisateurs.

Cet enjeu reste également présent au niveau des territoires, où la démarche de coordination par les PRIE en est à ses débuts.

Plusieurs questions restent donc ouvertes et devront être tranchées dans les prochains mois.

Le commerce en ligne est en développement rapide et c’est sans doute un outil très efficace de développement de l’export, qui de surcroît ne coûte aucun argent public. Les entreprises qui proposent leurs produits en ligne reçoivent en effet des commandes de l’étranger sans avoir à les solliciter et souvent sans les chercher particulièrement. Cela pose d’ailleurs, semble-t-il, des problèmes particuliers, pour le moment non pris en charge, quand ces exportateurs « malgré eux » sont des petites voire de très petites entreprises : ces opérateurs n’ont aucune connaissance des moyens pratiques d’expédier des produits à l’international à un coût raisonnable, ni des formalités douanières.

À cet égard, il serait opportun que soit mis en place un dispositif d’information basique et d’aide sur les questions de fret et de formalités douanières.

Par ailleurs, puisque le fait de proposer ses produits sur Internet génère des achats étrangers, accroître le nombre d’entreprises vendant sur Internet pourrait faire partie des objectifs de la politique du commerce extérieur, avec des actions de communication adaptées. Le taux d’entreprises françaises qui vendent en ligne, soit 14 % en 2012, reste inférieur à la moyenne européenne (16 %) et à ceux de pays tels que l’Allemagne (24 %) ou le Royaume-Uni (21 %).

Nos principaux concurrents disposent souvent d’institutions financières publiques spécialisées dans le financement de l’export, ce qui permet de remédier aux défaillances de l’offre des banques commerciales dans ce domaine et d’exercer sur ces banques une pression concurrentielle pour qu’elles prennent leur part du financement du commerce extérieur, et ce dans des conditions favorables aux exportateurs.

En France, la constitution de la BPI permet de renforcer l’offre publique en direction des PME. Si un rapprochement opérationnel entre la BPI et la Coface a été effectué à travers Bpifrance Export, la gestion des garanties publiques a été laissée à la Coface, notamment parce que le niveau des en-cours assurés, s’ils avaient dû être transférés à la BPI, aurait déséquilibré son bilan. De plus, confier la gestion de l’assurance-crédit publique à une grande entreprise d’assurance-crédit privée a aussi sa cohérence.

Dans ce contexte institutionnel, les principales voies de progrès à court terme concernent les produits. La BPI a notamment identifié quelques défaillances de marché qui pourraient justifier l’élargissement de l’offre publique à de nouveaux produits financiers. Des réflexions sont par exemple en cours sur un éventuel produit de couverture du besoin en fonds de roulement dans des opérations d’exportation, via la cession des créances, liée à un préfinancement du ou des marchés.

Le commerce extérieur a actuellement une visibilité très faible dans la procédure budgétaire. Les choix de nomenclature opérés pour la présentation des moyens que l’État consacre (plus ou moins directement) à la promotion du commerce extérieur ont pour double conséquence :

– de rendre très difficile l’identification et la sommation de ces flux, qui permettraient d’évaluer globalement le degré de priorité attaché au commerce extérieur ;

– de limiter le contrôle parlementaire exercé dans le cadre budgétaire sur cette mission de l’État qu’est la promotion de notre commerce extérieur.

En effet, s’il y a un ministère du commerce extérieur, il n’existe pas dans la nomenclature budgétaire de « mission » qui y soit dédiée.

On rappelle que, selon la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, « une mission comprend un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie », tandis qu’« un programme regroupe les crédits destinés à mettre en œuvre une action ou un ensemble cohérent d’actions relevant d’un même ministère et auquel sont associés des objectifs précis, définis en fonction de finalités d’intérêt général, ainsi que des résultats attendus et faisant l’objet d’une évaluation ». Chaque programme constitue une enveloppe limitative de crédits : c’est à ce niveau qu’est donnée l’autorisation budgétaire et les dotations mentionnées dans les documents budgétaires à un niveau inférieur au programme ne présentent en droit qu’un caractère indicatif. Quant à la mission, c’est l’unité de vote : il est voté au Parlement, durant le débat budgétaire, sur chaque mission.

L’identification d’une « mission » au sens budgétaire emporte donc des conséquences très importantes pour la visibilité des moyens d’une politique et de ses enjeux et pour le contrôle parlementaire : une mission, cela signifie des documents budgétaires la présentant (tels que les projets annuels de performances, ou « bleus », et les rapports annuels de performances qui rendent compte de l’exécution budgétaire), des objectifs et indicateurs budgétaires propres, la présentation obligatoire du montant global des crédits afférents – permettant les comparaisons avec les années précédentes et les autres missions –, des débats parlementaires spécifiques (en commission puis en séance dans les deux assemblées)…

Or, la nomenclature budgétaire actuelle ne comporte aucune mention du « commerce extérieur », ni en tant que mission, ni en tant que programme, ni même en tant que dotation de niveau inférieur.

On a une mission « Économie », qui comprend notamment un programme « Développement des entreprises et du tourisme », lui-même subdivisé en « actions » dont les intitulés ne sont pas toujours très explicites. Parmi ces actions, celle intitulée « Développement international des entreprises » correspond en fait exclusivement au financement budgétaire d’Ubifrance, tandis que l’action « Financement des entreprises et attractivité du territoire » correspond pour l’essentiel à deux objets : le financement du fonctionnement de l’AFII et une mesure nouvelle en 2014, une dotation de 25 millions d’euros pour abonder les fonds de garantie de la BPI. Enfin, les crédits figurant à l’action « Développement du tourisme » ont pour objet principal le financement d’Atout France.

Un autre programme de la mission « Économie », le programme « Stratégie économique et fiscale », comprend à son tour une action « Développement international de l’économie française » qui couvre le fonctionnement du réseau international de la direction du Trésor (il s’agit à plus de 80 % de crédits de rémunérations).

D’autres moyens budgétaires qui concourent à l’appui à nos entreprises se trouvent sur d’autres missions : le FASEP, qui a été évoqué supra, est inscrit sur le programme « Aide économique et financière au développement » de la mission « Aide publique au développement », et la Réserve pays émergents émarge sur le programme « Prêts à des États étrangers, de la Réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d’infrastructure » de la mission « Prêts à des États étrangers ».

Quant à la participation de l’État au financement des mécanismes gérés par la Coface (couverture des déficits sur certaines garanties publiques, principalement l’assurance-prospection), elle apparaît dans les crédits évaluatifs du programme « Appels en garantie de l’État » de la mission « Engagements financiers de l’État », action « Développement international de l’économie française ».

Il faut enfin rappeler que le principal régime d’assurance garanti par la puissance publique que gère la Coface, l’assurance-crédit, génère en fait un excédent structurel. Régulièrement, la Coface opère donc des reversements à l’État, lesquels, pour 2014, sont évalués à 500 millions d’euros. C’est au fin fond du fascicule budgétaire dit des « Voies et moyens », qui comporte l’évaluation des recettes budgétaires, que l’on doit chercher la ligne « Reversements de la Coface » parmi les recettes « diverses »… Cette évaluation n’est par nature l’objet d’aucun débat ni vote parlementaire.

L’existence de ces très importants reversements amène d’ailleurs MM. Bentejac et Desponts, dans leur rapport, à observer que les dispositifs de soutien à l’internationalisation des entreprises gérés par la direction générale du Trésor sont en fait globalement autofinancés, comme il ressort du tableau ci-dessous, les bénéfices sur les garanties publiques suffisant notamment à couvrir la Réserve pays émergents, le FASEP et Ubifrance…

Les dernières observations de votre rapporteure porteront sur l’organisation des services de l’État, qui, peut-être, ne valorise pas assez la fonction d’internationalisation des entreprises.

On peut ainsi relever que :

– la tutelle des chambres de commerce et d’industrie étant exercée par la direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services (DGCIS), le ministère du commerce extérieur n’a pas de levier administratif sur les CCI, alors qu’elles ont un rôle essentiel pour l’appui à l’export et que justement l’insuffisance de pilotage de leur action dans ce domaine est souvent relevée ;

– il en est de même s’agissant d’Atout France, également sous la tutelle de la DGCIS ;

– c’est même le cas pour l’AFII, qui n’est pas non plus sous la tutelle du ministère du commerce extérieur ;

– le reliquat des agents des services économiques extérieurs qui restent postés dans les régions est souvent un peu « noyé » dans les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE), certains considérant qu’il serait préférable de les rattacher directement aux secrétariats généraux pour les affaires régionales (SGAR).

Une réflexion sur ces aspects d’organisation administrative serait donc utile.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

À l’issue de l’audition du 6 novembre 2013, en commission élargie, de Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur, M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, Mme Sylvia Pinel, ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme, et Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique (8), la commission des affaires étrangères examine, pour avis, les crédits pour 2014 du commerce extérieur inscrits sur la mission « Économie », sur le rapport de Mme Seybah Dagoma.

Suivant l’avis de la rapporteure, la Commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie », tels qu’ils figurent à l’état B annexé à l’article 44.

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS DE LA RAPPORTEURE

- Ministère des affaires étrangères : M. Gunnar Oom, secrétaire d’État au commerce extérieur, et ses collaborateurs, notamment Mme Kerstin Nordlund-Malmegård, chef du service de la promotion à l’international, et M. Håkan Hjort, sous-directeur chargé de la promotion de l’image de la Suède à l’international

- Commission des affaires économiques du Riksdag : M. Jonas Eriksson, vice-président, membre du Parti écologique, M. Krister Örnfjäder, député, membre du Parti social-démocrate, et M. Kent Persson, député, membre du Parti de gauche

- Riksdag-groupe d’amitié : Mme Cecilia Brinck, députée, membre de la commission des lois et présidente du groupe d’amitié France-Suède

- Association des exportateurs suédois : M. Göran Norén, vice-président et chef du service de la politique industrielle de la Confédération suédoise des entreprises, et M. Ingvar Krook, secrétaire général

- Business Sweden : M. Bengt-Åke Ljudén, directeur général adjoint et chef du service chargé des investissements étrangers en Suède, et Mme Cecilia Schartau, directrice des affaires publiques

- Institut suédois : M. Henrik Selin, directeur général adjoint et chef du service du dialogue interculturel, M. Joakim Norén, directeur de l’unité de soutien, et leurs collaborateurs

- « Équipe de France de l’export » : Son Exc. Jean-Pierre Lacroix, ambassadeur de France, et ses collaborateurs de l’ambassade et du service économique régional, M. Nicolas de Moucheron, directeur régional d’Ubifrance, M. Jean-Charles Bardon, directeur régional d’Atout France, M. Gilles Debuire, directeur régional de l’AFII, Mme Kristina Hulteberg, directrice de la chambre de commerce française en Suède, et M. Frédéric Laziou, conseiller du commerce extérieur de la France

Mission « Marque France » : M. Philippe Lentschener, président

Banque publique d’investissement : M. Alain Renck, directeur de BPI France Export, et M. Jean-Baptiste Marin-Lamellet, directeur des relations institutionnelles

Direction générale du Trésor : M. Raphaël Bello, chef du service des affaires bilatérales et de l’internationalisation des entreprises, et M. Eric David, sous-directeur du financement international

Comités professionnels de développement économique (CPDE) : M. Hervé Buffet, délégué général adjoint du Comité professionnel de développement de l’horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie, de l’orfèvrerie et des arts de la table-Francéclat, Mme Clarisse Reille, directrice générale du Comité de développement et de promotion de l’habillement-DEFI, M. Audoin de Gouvion Saint-Cyr, secrétaire général du Comité professionnel de développement économique des industries françaises de l’ameublement et du bois-CODIFAB, M. Jean-Luc Archambault, président de Lysios, et M. Jean-Philippe Daniel, directeur associé de Lysios

Association Pacte PME : M. Emmanuel Leprince, directeur général

Ubifrance : M. Christophe Lecourtier, directeur général, et M. Julien Ravalais-Casanova, chargé des affaires institutionnelles

Comité national des conseillers du commerce extérieur : M. Bruno Durieux, président

Coface : M. Christophe Viprey, directeur des garanties publiques

Agence française pour les investissements internationaux (AFII) : M. David Appia, président, et M. Bertrand Buffon, chef de cabinet

Fédération e-commerce et vente à distance (FEVAD) : M. Marc Lolivier, délégué général, M. Yann Rivoallan, cofondateur et directeur commercial de The Other Store, et Mme Emmanuelle Garault, directrice des affaires institutionnelles d’eBay pour la France, l’Espagne et le Portugal

Famille « Mieux se nourrir » : Mme Marie-Anne Cantin, fédératrice

CCI International : M. Jean-François Gendron, président de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Nantes-Saint Nazaire, M. Dominique Brunin, délégué général CCI International-UCCIFE, et M. Jérôme Pardigon, directeur des relations institutionnelles à CCI France

Collectif Ethic sur l’étiquette : Mme Maïté Errecart, M. Yves Huguet (association Léo Lagrange) et Mme Fanny Gallois (Peuples solidaires)

Agence régionale de développement de la région Île-de-France : Mme Sabine Enjalbert, directrice générale

Atout France : M. Christian Mantei, directeur général, et M. Gérard Bornier, secrétaire général.

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