N° 2266 tome I - Avis de M. Jacques Krabal sur le projet de loi de finances pour 2015 (n°2234)



N
° 2266

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2014

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2015 (n° 2234)

TOME I

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

PRÉVENTION DES RISQUES
MÉTÉOROLOGIE

PAR M. Jacques KRABAL

Député

——

Voir les numéros : 2234, 2260 (Tome III, annexes 14 et 17).

SOMMAIRE

___

Pages

I. PROGRAMME N° 181 « PRÉVENTION DES RISQUES » : EXAMEN DES CRÉDITS DEMANDÉS POUR 2015 7

A. LA PRÉVENTION ET LA LUTTE EN MATIÈRE DE RISQUES NATURELS ET HYDRAULIQUES 9

1. Le fonds de prévention des risques naturels majeurs 9

2. La prévention des crues et inondations et la sécurité des barrages et des digues 15

B. LA PRÉVENTION ET LA LUTTE EN MATIÈRE DE RISQUES TECHNOLOGIQUES 22

1. Les plans de prévention des risques technologiques 22

2. La sûreté nucléaire et la radioprotection 25

C. LES POLITIQUES EN MATIÈRE DE SANTÉ ET D’ENVIRONNEMENT 30

1. Du PNSE II au PNSE III 30

2. La lutte contre le bruit 34

3. La gestion des déchets 36

II. PROGRAMME N° 170 « MÉTÉOROLOGIE » : EXAMEN DES CRÉDITS DEMANDÉS POUR 2015 41

A. LA STRUCTURE DU PROGRAMME ET LES CRÉDITS DEMANDÉS 41

B. UNE POSITION DOMINANTE MAIS FRAGILISÉE SUR LE MARCHÉ DES SERVICES D’INFORMATION MÉTÉOROLOGIQUE 45

C. POURSUIVRE LA MISE EN œUVRE DU CONTRAT D’OBJECTIFS ET DE PERFORMANCE ET LE RESSERREMENT DU MAILLAGE TERRITORIAL 48

EXAMEN EN COMMISSION 51

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 53

INTRODUCTION

Les deux programmes examinés par le présent avis ne représentent qu’une fraction des huit programmes constituant la mission « Écologie, développement et mobilité durables » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015.

Le programme n° 181 « Prévention des risques » traduit la volonté de l’État de mettre l’écologie et le développement durable au premier rang de ses priorités. C’est dans le cadre de ce programme que sont élaborées et mises en œuvre les politiques relatives : à la connaissance, l’évaluation, la prévention et la réduction des risques industriels et des pollutions chimiques, biologiques, sonores, électromagnétiques, radioactives ; à la connaissance, l’évaluation et la prévention des risques naturels (inondations notamment) et à la sécurité des ouvrages hydrauliques ; à l’évaluation et la gestion des sols pollués ; à la prévention et la gestion des déchets (prévention, valorisation et traitement) ; à l’évaluation des risques que présentent les organismes génétiquement modifiés (OGM) pour la santé et l’environnement.

Comme l’année dernière, le présent rapport est augmenté de l’examen des crédits dévolus au programme n° 170 « Météorologie ». Ce programme assure l’essentiel du soutien à l’établissement public Météo-France, une institution disposant d’une expertise reconnue au plan international mais engagée dans des évolutions structurelles liées à un environnement évolutif et de plus en plus concurrentiel.

Chacun sait que les pouvoirs publics ont aujourd’hui entrepris un effort de redressement des comptes sans précédent, représentant 50 milliards d'euros d’économies en trois ans (dont 21 milliards d'euros en 2015). L’État et ses agences assumeront, à eux seuls, une économie nette totale de près de 19 milliards d'euros, dont 7,7 milliards d'euros l’année prochaine.

Pourtant, les attentes de la société, les inquiétudes face à des menaces technologiques ou naturelles diffuses, imprévisibles et potentiellement catastrophiques, n’ont jamais été aussi fortes.

Dans ce contexte si difficile, votre rapporteur pour avis salue la sanctuarisation des crédits affectés à la prévention des risques et estime que le simple maintien de ces moyens d’intervention (crédits de paiement) suffit à lui seul à marquer la volonté politique de l’État de maintenir sa capacité d’anticipation, de prévention et de réponse opérationnelle au niveau le plus élevé.

Les crédits alloués au programme n° 181 dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015 s’établissent à 304 millions d’euros en autorisations d’engagement et 249 millions d’euros en crédits de paiement, c’est-à-dire respectivement – 20,4 % et – 0,1 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2014.

Le graphique ci-dessous présente l’évolution de ces moyens au cours des années récentes, en valeur absolue (échelle de gauche) et en proportion (échelle de droite) de l’ensemble des moyens affectés à la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (EDMD).

Le redressement des finances publiques s’est imposé, au cours des années récentes, comme une priorité de l’action de l’État et il conduit à devoir soumettre tous les départements ministériels à un effort budgétaire sans précédent, auquel la mission EDMD n'échappe pas. Dans ce contexte particulièrement contraint, votre rapporteur pour avis considère que la simple reconduction des crédits de paiement du programme n° 181 au niveau fixé par la loi de finances initiale pour 2014 constitue, à elle seule, une source de satisfaction. Quant à la diminution substantielle des autorisations d’engagement (– 78 millions d'euros), elle résulte, selon les informations qui lui ont été transmises, du réajustement des besoins de crédit pour les plans de prévention des risques technologiques (PPRT), sur la base du recensement effectué dans le cadre de la préparation du triennal 2015-2017.

Les moyens demandés sont destinés au financement des quatre actions qui structurent le programme, à savoir la prévention des risques technologiques et des pollutions (action n° 1), le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (action n° 9), la prévention des risques naturels et hydrauliques (action n° 10) et la gestion de l’après-mine et travaux de mise en sécurité, indemnisations et expropriations sur les sites (action n° 11).

L’essentiel des crédits sont affectés à l’action n° 1 (43,3 % du total des crédits de paiement), devant l’action n° 9 (23,8 %), l’action n° 11 (16,8 %) et l’action n° 10 (16,1 %). Le graphique ci-dessous, qui retrace la ventilation par action des crédits de paiement du programme n° 181, atteste de la relative stabilité de cette répartition au cours des exercices budgétaires récents.

La réduction des autorisations d’engagement du programme n° 181 est imputable, dans sa totalité, à une très forte diminution de ces autorisations sur l’action n° 1 (– 32,3 %), que compense partiellement leur augmentation au titre de l’action n° 10 (+ 6,1 %). Du point de vue des crédits de paiement, si les actions nos 9 et 11 bénéficient de la reconduction des moyens accordés en 2014 ou de leur légère augmentation, les actions nos 1 et 10 connaissent en revanche des évolutions opposées (– 2,3 % et + 6,1 %, respectivement).

La quasi-totalité des effectifs alloués pour la mise en œuvre de ce programme sont portés par le programme-support n° 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durable ». Le Gouvernement prévoit leur maintien sur le triennal 2015-2017 par rapport à l’année en cours, avec un plafond d’emploi fixé à 3 237 équivalents temps plein travaillé (ETPT) en 2015.

Les seuls effectifs inscrits au programme n° 181 sont ceux de l’Autorité de sûreté nucléaire, dont le schéma d’emploi augmente de 10 équivalents temps plein (ETP) par an sur ce même triennal — soit de 363 ETP en 2014 à 377 ETP en 2015, y compris le transfert de 4 ETP précédemment gérés par l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire.

La prévention des risques naturels en France s’appuie aujourd’hui sur des instruments juridiques d’échelon territorial – les plans de prévention des risques naturels prévisibles – et un instrument financier – le fonds de prévention des risques naturels majeurs.

● Les plans de prévention des risques naturels prévisibles. — Créés par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement (articles L. 562-1 et suivants du code de l’environnement) et ayant valeur de servitudes d’utilité publique, les plans de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN) se sont substitués aux diverses procédures préexistantes en matière de prévention des risques naturels (plans d’exposition aux risques, plans de surface submersible, périmètres de risque, etc.). Visant à maîtriser l’urbanisation dans les zones à risques et à réduire la vulnérabilité des populations et des biens existants, ils peuvent ainsi :

– proscrire toute construction nouvelle dans les espaces d’aléas très forts non urbanisés ou dans les zones susceptibles d’aggraver les risques (champs d’expansion de crue, par exemple) ;

– édicter des mesures pour adapter les constructions nouvelles à l’état des risques ;

– définir des mesures de construction visant à diminuer la vulnérabilité des édifices, ouvrages, espaces mis en culture ou plantés existants, dans la limite de 10 % de la valeur vénale ;

– définir des mesures générales de prévention, de protection et de sauvegarde à la charge des collectivités et des particuliers.

Les conditions d’élaboration des plans ont été codifiées aux articles R. 562-1 à R. 562-12 du code de l’environnement. Le plan est établi selon une procédure déconcentrée, à partir d’un cadre général de réflexions et de mesures ; il est modulable et adaptable selon les contextes locaux.

Les dispositions relatives à l’objet et au contenu des plans ont été modifiées par l’article 222 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (ci-après dénommée, loi « Grenelle II ») afin de tirer les conséquences des événements dramatiques du premier semestre 2010 (tempête Xynthia et inondations survenues dans le Var). Pour renforcer la sécurité juridique de ces plans, dont les modalités d’élaboration résultent en partie de circulaires interministérielles et de guides méthodologiques, il était notamment prévu que des décrets en Conseil d’État définiraient en tant que de besoin les modalités de qualification des aléas et des risques ainsi que les règles générales d’interdiction, de limitation et d’encadrement des constructions, de prescription de travaux de réduction de la vulnérabilité et d’information des populations dans les zones exposées aux risques définies par ces plans. Par ailleurs, la disposition frappant de caducité au bout de trois ans un plan rendu opposable par anticipation a été supprimée.

Le décret n° 2011-765 du 28 juin 2011 relatif à la procédure d’élaboration, de révision et de modification des plans de prévention des risques naturels prévisibles a ainsi permis la mise en œuvre de plusieurs dispositions figurant à l’article 222 précité de la loi « Grenelle II ». Il prévoit notamment que le plan doit être approuvé dans les trois ans suivant sa prescription, ce délai étant prorogeable une fois d’une durée maximale de dix-huit mois par arrêté motivé du préfet. En outre, le décret précise le champ de la procédure de modification des PPRN sans enquête publique, qui pourra notamment être utilisée pour rectifier une erreur matérielle, pour modifier un élément mineur du règlement ou de la note de présentation et pour modifier les documents graphiques délimitant les zones mentionnées aux 1° et 2° du II de l’article L. 562-1 du code de l’environnement (afin de prendre en compte un changement dans les circonstances de fait).

● Bilan des plans de prévention. — En 2000, seules deux mille communes étaient dotées d’un PPRN, sans compter les plans de surfaces submersibles (PSS) ; en décembre 2005, plus de cinq mille communes disposaient d’un PPRN approuvé (1) ; au 1er août 2014, 10 284 communes étaient couvertes par un PPRN approuvé (2) : l’objectif du Gouvernement d’une large diffusion de cet instrument a donc été atteint, grâce notamment à la forte mobilisation des préfets et des directions départementales des territoires (ex-directions départementales de l’équipement), des services régionaux et des administrations centrales de l’État. À cette même date (1er août 2014), un PPRN prescrit est en cours d’élaboration sur le territoire de 3 060 communes et 387 communes sans PPRN approuvé sont dotées d’un plan de surfaces submersibles.

L’objectif désormais fixé par le ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie – dans le cadre notamment de l’instruction ministérielle du 22 février 2012, fixant les priorités nationales pour 2012-2013 (3) – est de plus de 12 500 communes couvertes à terme par un PPRN approuvé – y compris, en particulier, 303 communes du littoral pour lesquelles un plan doit être établi avant 2014. (4) En outre, au-delà de cet objectif d’extension quantitative, les interlocuteurs rencontrés par votre rapporteur pour avis soulignent la nécessité que les PPRN les plus anciens soient révisés afin de prendre en compte l'amélioration des connaissances et l'évolution des critères d'élaboration et que d’autres soient élargis à des aléas supplémentaires présents sur un même territoire.

Le graphique ci-dessous, issu de la base de données GASPAR (Gestion assistée des procédures administratives relatives aux risques naturels et technologiques) retrace la production annuelle de ces documents de prévention au cours des années récentes (situation au 1er août 2014).

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE COMMUNES COUVERTES PAR UN PPRN

Le graphique ci-après présente une ventilation par type d’aléa. On constate notamment que le risque « inondation »  est intégré dans plus de 70 % des PPRN approuvés (soit environ 7 200 communes concernées), ce qui explique qu’il tienne une place prépondérante dans l’action administrative conduite par les préfets et leurs services et que votre rapporteur pour avis lui consacre quelques développements spécifiques ci-après.

Les retours d’expérience menés après les catastrophes des dernières décennies — c’est-à-dire, depuis 1999, les inondations de l’Aude, de la Bretagne, de la Somme, du sud-est de la France (Gard) et des littoraux vendéen et charentais — ont mis en évidence l’intérêt préventif des PPRN. Le rapport d’inspection interministérielle de retour d’expérience rédigé à la suite de la tempête Xynthia (28 février 2010) a notamment souligné la nécessité de prescrire des plans de prévention dans l’ensemble des territoires à risque important (littoral) et de réviser, le cas échéant, les plans existants, d’une part, et de faire en sorte que, dans les plans nouveaux ou révisés, l’urbanisation soit clairement interdite ou limitée en fonction de l’intensité de l’aléa (fort, moyen, faible) et non de l’urbanisation actuelle ou souhaitée, d’autre part. Le rapport public thématique de la Cour des comptes sur ce sujet, publié en janvier 2012, aboutit à des conclusions identiques.

Compte tenu du caractère essentiel de la concertation dans le processus d’élaboration des plans de prévention, celle-ci a fait l’objet de démarches et d’un séminaire associant toutes les parties prenantes en 2008, afin d’en améliorer la conduite. La circulaire du 3 juillet 2007 relative à la consultation des acteurs, la concertation avec la population et l’association des collectivités territoriales dans les PPRN a, quant à elle, donné un cadre d’action pour faciliter la conduite de cette démarche.

Afin de renforcer le cadre juridique applicable et de rendre plus cohérente l’élaboration des PPRN, des décrets en Conseil d'État sont actuellement en cours d’élaboration. Ils définiront les modalités de qualification des aléas et des risques, les règles générales d’interdiction, de limitation et d’encadrement des constructions, de prescription de travaux de réduction de la vulnérabilité, ainsi que d’information des populations dans les zones exposées aux risques définies par ces plans.

● Financement des PPRN. — Depuis 2000 et jusqu’au 1er septembre 2006, les moyens financiers consacrés à l’élaboration des plans ont été prélevés pour moitié sur le budget de l’État et pour moitié sur celui du fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM). Depuis le 1er janvier 2006 et jusqu’en 2012 (durée prolongée en 2009), le Fonds a pris en charge les trois quarts de la dépense ; depuis cette année, ce plafond de prise en charge représente la totalité de la dépense.

Le tableau ci-dessous récapitule le montant des crédits affectés à l’élaboration des plans et à l’information préventive au cours des dernières années, ainsi que leur répartition entre l’État et le fonds.

MODALITÉS DE FINANCEMENT DES PPRN (2007-2014)

(en millions d’euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014est

Part FPRNM

9,5

10,7 (a)

10,2

6,3

16,4

14,5

12,1

16

Part État

4,8

5,1

4,4

4,9

5,2

6,7

1,2

(a)  dont 1,5 million d’euros pour l’élaboration des PPRN retrait-gonflement des argiles (campagne 2008).

L'élaboration des plans, notamment dans les zones prioritaires telles que le littoral ou les secteurs définis par les stratégies régionales, implique aujourd'hui de prendre en compte de nouveaux outils et de nouvelles méthodes de travail et nécessite de mobiliser des moyens financiers importants. La récente augmentation de la part contributive du fonds, jusqu’à 100 % du financement des PPRN, doit permettre de maintenir la dynamique d'élaboration de ces plans jusqu'à la fin de 2016, tout en renforçant leur qualité.

● Le fonds de prévention des risques naturels majeurs. — L’existence du fonds de prévention des risques naturels majeurs est prévue par l’article L. 561-3 du code de l’environnement, issu de la codification de dispositions de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement. Son financement est issu, à titre principal, d’un prélèvement sur le produit des primes ou cotisations additionnelles relatives à la garantie contre le risque de catastrophes naturelles prévues à l’article L. 125-2 du code des assurances : le taux de ce prélèvement a successivement augmenté de 2 % en 1999 à 12 % depuis 2009.

Le tableau ci-après récapitule les recettes et les dépenses du fonds depuis 2010, ainsi que les prévisions pour 2013 et 2014.

Au cours des deux prochaines années, les dépenses prévisibles du fonds contribueront notamment à l’achèvement du programme de rachats ou d’expropriations mené à la suite de la tempête Xynthia, au financement des PAPI de la génération 2011-2015 et du plan « Submersions rapides » d’ici 2016, ainsi qu’à l’achèvement de la couverture des territoires à risque en plans de prévention des risques naturels. S’ajoutent à ces programmes des actions non prévisibles, comme la délocalisation de biens pour lesquels une menace grave est identifiée. Ces actions bénéficieront de financements du Fonds au-delà de 2014, bien que leur niveau de dépense ne puisse être aujourd’hui estimé.

La prévention des inondations s’appuie sur des actions réalisées directement par l’État, comme la prévision des crues sur le réseau relevant de sa compétence, l’élaboration des plans de prévention des risques naturels d’inondation et le contrôle de la sécurité des ouvrages hydrauliques. Cette prévention s’appuie également sur des actions d’incitation à l’égard de collectivités territoriales maîtres d’ouvrage, sous forme de programmes d’actions contractualisés de prévention des inondations. L’État est également conduit à agir en sa qualité de propriétaire de digues domaniales : il en assume la responsabilité et doit supporter les dépenses appelées par le maintien de la sécurité desdits ouvrages.

À la suite de la tempête Xynthia du 28 février 2010 et des crues du Var de juin 2010, plusieurs dispositions relatives à la prévention des inondations ont été inscrites dans la loi « Grenelle II ». Par ailleurs, le dispositif contractualisé a été récemment rénové à travers un nouvel appel à projets relatif aux programmes d’actions de prévention des inondations (PAPI) et un plan « Submersions rapides », lancés en février 2011.

Pour chacun de ces postes de dépense, la nature des actions engagées et les crédits affectés sont succinctement présentés ci-dessous.

● La prévision des crues. — L’État a fortement modernisé et renforcé ses actions de collecte et de diffusion de données au cours de la décennie passée. Les informations sont désormais envoyées aux acteurs de la sécurité civile (envois automatiques), aux collectivités territoriales — il s’agit de permettre aux maires, informés par l’intermédiaire des préfets, de prendre les dispositions nécessaires en matière d'organisation de la vie collective et des secours — et au public (information de vigilance « crues » mise à disposition sur le site Internet http://www.vigicrues.gouv.fr, relayée par les médias nationaux et locaux).

Les priorités pour la période 2013-2016 portent sur la poursuite de l'amélioration des dispositifs de traitement et collecte de données, de vigilance et d'alerte et la mise en œuvre du plan « Submersions rapides », en sus des missions obligatoires de l'État en matière de prévision et de vigilance « crues » dévolues aux services de prévision des crues (SPC), d’une part, et d'hydrométrie (mesures des niveaux et des débits dans les cours d'eau) dévolues aux unités d’hydrométrie (UH), d’autre part. Les moyens mobilisés en fonctionnement et en investissement pour permettre à ces services déconcentrés (SPC et UH) de s’acquitter de leurs tâches ont été de 11,8 millions d'euros en crédits de paiement en 2012, 9,1 millions d'euros en 2013, 11,7 millions d'euros en 2014 et devraient atteindre 11,2 millions d'euros en 2015.

Par ailleurs, l’appui technique de Météo-France et la coopération avec l’établissement dans les domaines de la prévision des crues, de l’impact du changement climatique sur les hydrosystèmes et autres sujets d’intérêt commun, font l'objet de conventions-cadres avec la direction générale de la prévention des risques du ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie. Les actions incluses dans ces conventions comprennent notamment un programme de modernisation des moyens d'observation de la pluie (radar et stations de mesure in situ).

● Les risques naturels d’inondation et la mise en œuvre de la directive « Inondations ». — Le nouveau dispositif d’évaluation et de gestion des risques d’inondation, issu de la directive 2007/60/CE relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation — dite directive « Inondations » — transposée en droit français dans le cadre de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 (articles L. 566-1 et suivants du code de l’environnement), vise à établir un cadre commun pour la maîtrise des conséquences des inondations sur la santé humaine, l’activité économique, le patrimoine culturel et l’environnement. Il doit permettre de développer une gestion des risques à une échelle hydrographique cohérente, au travers de stratégies locales adaptées, et se décompose en plusieurs phases successives, renouvelées tous les six ans : évaluation préliminaire des risques d’inondation (EPRI) ; identification des territoires à risque d’inondation important (TRI) ; pour les TRI, cartographie des surfaces inondables et des risques d’inondation (CSIRI) ; identification des stratégies locales et de leurs périmètres, au plus tard deux ans après l'identification des TRI ; plans de gestion des risques d’inondation (PGRI) fixant, à l'échelle du district hydrographique, les objectifs en matière de gestion des risques d'inondation et les mesures à mettre en œuvre pour les atteindre.

Par ailleurs, le législateur français a souhaité donner un cadre national à la politique de gestion des risques d’inondation, à travers l’élaboration d’une stratégie nationale de gestion des risques d’inondation fixant les grandes orientations et objectifs nationaux dans ce domaine (article L. 566-4 du code de l’environnement).

Stratégie nationale de gestion des risques d'inondation. — L’élaboration de la stratégie nationale constitue un enjeu majeur, dès lors que créer un cadre pour prioriser l’action publique doit permettre de mieux répartir les financements sur les actions les plus efficientes et d’agir sur les situations présentant une urgence particulière. Cette élaboration a été confiée à la commission mixte « Inondations », instance partenariale issue du Comité national de l’eau (CNE) et du Conseil d’orientation pour la prévention des risques naturels majeurs (COPRNM) : installée le 12 juillet 2011 et chargée du pilotage de la politique nationale de gestion des risques d’inondation, sa composition a été arrêtée de façon à assurer la représentation au niveau national de toutes les parties prenantes (collectivités, société civile, État) impliquées dans la gestion desdits risques.

La stratégie nationale a été présentée lors de la réunion de la commission mixte « Inondations » du 10 juillet 2014. Elle s’articule autour de trois objectifs : adapter notre façon de construire ; surveiller, prévoir et gérer la crise ; mieux informer le citoyen sur les risques d’inondation et favoriser la diffusion de kits d’attente des secours.

Évaluation préliminaire des risques d'inondation (EPRI). — La première évaluation préliminaire des risques d'inondation a été établie en 2011 et 2012 à l'échelle nationale, mais aussi à celle de chacun des quatorze districts hydrographiques. (5) Au niveau national, cette première évaluation a notamment permis d'établir que 17,1 millions d'habitants sont exposés à un risque d'inondation par débordement de cours d'eau — soit un habitant sur quatre — et plus de 9 millions d'emplois — soit un emploi sur trois. De même 1,4 million d'habitants et 850 000 emplois sont potentiellement concernés par une inondation par submersion marine.

Identification des territoires à risque d’inondation important (TRI). — Les TRI sont des périmètres composés d’un ensemble de communes où se situe une très forte concentration d’enjeux en termes d’emplois et de populations, qui nécessitent une action prioritaire en matière de prévention des inondations. Cette identification des territoires à enjeux permet de définir les priorités d’action dans le cadre de l’élaboration des plans de gestion à l’échelle de chaque district.

Le processus d’identification des TRI a débuté en 2012, sur la base de l'état des lieux homogène fourni par les EPRI. En étroite association avec les parties prenantes — au premier rang desquelles les collectivités territoriales — il a abouti à la fin de 2012 à la publication d’arrêtés préfectoraux dressant la liste des 122 territoires à risque important d’inondation.

Cartographie des surfaces inondables et des risques d’inondation. — Réalisée sur les territoires identifiés comme TRI, la cartographie des surfaces inondables et des risques d'inondation constitue le soubassement nécessaire à l’élaboration des plans de gestion des risques inondation (PGRI), prévus pour 2015, et à celle des stratégies locales.

Établie par les services de l’État en association étroite avec les parties prenantes, cette cartographie localise dans la zone inondable les enjeux ou paramètres retenus et évalue quantitativement les conséquences de trois scenarii d’inondation à probabilité faible (événements extrêmes), moyenne (centennale) ou forte : elle doit donc permettre d’établir un diagnostic fin de la vulnérabilité du territoire considéré face au risque d’inondation. Elle vise également à définir les objectifs de réduction des risques, à améliorer le porter-à-connaissance de l'État en matière de risque, à communiquer à destination du public ou encore à améliorer la cartographie pour la prévision des inondations.

Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, toutes les cartographies ont été réalisées sur les 122 territoires à risque important, quelques difficultés ponctuelles persistant dans trois territoires (Mayotte, Arcachon et Noirmoutier).

Stratégies locales de gestion des risques d’inondation (SLGRI) et Plans de gestion des risques d'inondation (PGRI). — L'identification des périmètres de stratégies locales de gestion des risques d'inondation ainsi que des PGRI à l'échelle des districts constituent les étapes suivantes de mise en œuvre de la directive.

Tous les plans de gestion des risques d'inondation (PGRI) sont aujourd’hui finalisés ou en cours de finalisation. Ils seront mis à la consultation du public le 19 décembre 2014 dans le cadre de la grande consultation sur l'eau (directive-cadre sur l'eau), les inondations (directive inondations) et le milieu marin (directive-cadre stratégie pour le milieu marin), qui portera sur les PGRI, les schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) et les plans d'action pour le milieu marin (PAMM).

Pour ce qui concerne les PGRI ainsi que les stratégies locales, la circulaire du 14 août 2013 relative à l’élaboration des plans de gestion des risques d'inondation et à l'utilisation des cartes de risques pour les territoires à risque important d'inondation a été adressée à l'ensemble des préfets coordinateurs de bassin, préfets de région et préfets de département. Le guide méthodologique « Plans de gestion des risques d'inondation à l'échelle du district : des TRI aux stratégies locales », constituant l'annexe 6 de la circulaire précitée, encadre l’élaboration des plans et a donné aux préfets les premiers éléments de cadrage des stratégies locales. Quant à la note technique du 23 octobre 2014 relative aux éléments de cadrage pour l'élaboration des stratégies locales de gestion des risques d'inondation, elle doit permettre à l'ensemble des préfets de disposer d'un guide méthodologique plus précis concernant ces stratégies.

● Le contrôle de la sécurité des ouvrages hydrauliques. —L’amélioration de la sécurité et de l’efficacité des ouvrages de protection localisée constitue une autre priorité de l’action publique : si la responsabilité des ouvrages incombe au premier chef à leur gestionnaire, l’État est chargé de vérifier que le responsable remplit correctement ses obligations liées à la sécurité intrinsèque de ceux-ci. Depuis le décret n° 2007-1735 du 11 décembre 2007, la réglementation concernant la sécurité des ouvrages hydrauliques a été rénovée et complétée, s’appliquant désormais non seulement aux barrages, mais aussi aux digues de protection des populations contre les inondations.

En accompagnement de la nouvelle réglementation, le ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie a réorganisé ses services déconcentrés pour renforcer ses contrôles dans un domaine où la sécurité des personnes est en jeu. La responsabilité de ceux-ci est désormais confiée aux directions régionales de l’Environnement, de l’aménagement et du logement, sous l'autorité des préfets de département. (6) Ce nouveau dispositif, décrit dans une circulaire du 8 juillet 2010, a pris effet au 1er janvier 2011. Concomitamment, un programme de renforcement des effectifs par redéploiement interne au ministère a été engagé sur la période 2009-2013, appuyé sur un processus de formation ciblé et dédié à cette fonction de contrôle. À la fin de l’année 2013, les DREAL disposaient ainsi d’une centaine d’équivalents temps plein (macrogrades A et B) pour effectuer les contrôles sur l'ensemble des ouvrages hydrauliques (barrages et digues) — soit environ 300 ouvrages de classe A, 300 de classe B et 1 300 de classe C pour les barrages et 350 km de classe A, 2 500 km de classe B et 3 800 km de classe C pour les digues. (7)

Les DREAL peuvent également compter sur l’appui technique apporté par les spécialistes du réseau scientifique et technique du ministère (CEREMA) et de l'établissement public IRSTEA, en sus des compétences propres du service technique de l'énergie électrique, des grands barrages et de l'hydraulique (STEEGBH). À la fin de 2013, les services déconcentrés disposaient ainsi d’un appui supplémentaire estimé à une vingtaine d’équivalents temps plein.

Un premier recensement des digues réalisé par les services de l'État avait permis d’identifier environ 8 700 kilomètres de digues dont un tiers conditionne directement la sécurité de deux millions de personnes. Le recensement et la caractérisation exhaustifs de tous les ouvrages ne sont néanmoins pas encore terminés et un programme d’analyse approfondie des digues présentant les enjeux les plus importants, en termes de protection des populations, a été conduit. Les principaux problèmes rencontrés pour finaliser cette caractérisation tiennent d’une part aux difficultés liées à l'identification des responsables des ouvrages — ces responsables peuvent être soit multiples, soit malaisés à déterminer — et, d'autre part, au fait que ces responsables doivent assumer les dépenses liées à l'entretien ou à la réhabilitation desdits ouvrages — ce qu'ils ne sont pas toujours en mesure de faire, compte tenu des montants en jeu.

L’essentiel des moyens relatifs au contrôle des ouvrages hydrauliques est constitué par des moyens humains. Pour 2014, il est néanmoins prévu d’affecter 300 000 € de crédits à la poursuite de l’amélioration des fonctionnalités du système d’information des ouvrages hydrauliques et 500 000 € à l’amélioration des barrages et digues par les maîtres d’ouvrage, à l’information sur les risques liés à ces ouvrages et à l’accompagnement méthodologique et technique de l’État.

Plus récemment, la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite loi « MAPTAM », a attribué aux communes une compétence ciblée et obligatoire relative à la gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. Cette compétence sera exercée par les communes ou, en lieu et place des communes, par les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Les communes et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre pourront bien entendu déléguer cette compétence ou adhérer à des groupements de collectivités et, ce faisant, leur transférer ces compétences, assurant ainsi la conception et la réalisation des aménagements à des échelles cohérentes au plan hydrographique.

Si votre rapporteur pour avis ne conteste pas l’opportunité même de ce transfert de compétence, il s’inquiète néanmoins des charges financières ainsi transférées aux collectivités, dans un contexte de tension sur les finances locales et communales et de la capacité de la taxe affectée susceptible d’être créée par les collectivités intéressées à couvrir l’ensemble de ces charges.

● Les plans « Grands fleuves »— Dans le cadre de contrats de programmes inter-régionaux (CPIER) ou régionaux (CPER), les plans Loire, Meuse, Rhône, Seine et Garonne contribuent à la réalisation d’actions de prévention des inondations ainsi qu’à des études et travaux de renforcement des levées — voire de restauration du lit. Quelques anciens programmes d’actions de prévention des risques d’inondation en voie de clôture sont adossés à ces plans « Grands fleuves ».

Ces plans ont été dotés de moyens budgétaires à hauteur de 8,5 millions d’euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement en 2011, 11 millions d'euros en 2012 et 3 millions d'euros en 2013. Au total, les dotations de l'État (crédits budgétaires et fonds de prévention des risques naturels majeurs) sur les plans « Grands fleuves » se sont élevées à 287,6 millions d’euros sur la période 2007-2013 des CPIER.

● Les programmes d’actions de prévention des inondations. — Il faut ici rappeler que le Gouvernement avait décidé, à la fin de 2009, de rénover le dispositif des programmes d’actions de prévention des inondations (PAPI). Sur la période 2011-2016, l’État s’est ainsi engagé à financer les projets en cours et ceux qui seront labellisés à hauteur prévisionnelle de 350 millions d’euros (soit 50 millions d’euros par an) issus du FPRNM et de crédits budgétaires (programme de prévention des risques du ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie). Sur la base d’une évaluation partagée et en préfiguration de la mise en œuvre de la directive « Inondations » à l’horizon de 2015, un nouvel appel à projets « PAPI » a donc été officiellement lancé le 17 février 2011, avec la publication d’un cahier des charges décrivant les objectifs et les critères d’éligibilité du dispositif. Ses modalités d’application ont été précisées par la circulaire du 12 mai 2011 relative à la labellisation et au suivi des projets « PAPI 2011 » et opérations de restauration des endiguements « PSR » (NOR : DEVP1112697C).

L’objectif principal de ces nouveaux PAPI, élaborés dans un cadre partenarial avec les collectivités territoriales intéressées, consiste à promouvoir une gestion globale et équilibrée de la prévention du risque « inondation », à l’échelle d’un bassin de risque cohérent au regard de l’aléa et des particularités du territoire considéré. La labellisation PAPI valide une démarche globale et cohérente, déclinée en un programme d’actions pertinentes à l’échelle du périmètre du projet et visant à réduire les conséquences dommageables des inondations sur tout le territoire considéré. Des analyses coûts-bénéfices doivent permettre d’apprécier la pertinence des mesures et travaux du programme d’actions et aider les porteurs de projets dans leurs choix.

La labellisation est octroyée par la commission mixte « Inondations » (CMI) comprenant des élus, des représentants de l’État et de la société civile.

Au 1er août 2013, 66 projets de PAPI et opérations de confortement d’ouvrages de protection relevant du plan « Submersions rapides » (hors PAPI) ont été labellisés, pour un montant global contractualisé de 684 millions d'euros (dont 263 millions d'euros pour la part « État », financés en quasi-totalité par le fonds de prévention des risques naturels majeurs). Plus précisément :

– les PAPI ont été dotés, sur un plan budgétaire, de 4,8 millions d'euros en autorisations d’engagement et 3,8 millions d'euros en crédits de paiement en 2011 et de 3,7 millions d'euros en autorisations d’engagement et 4,1 millions d'euros en crédits de paiement en 2012. Le fonds de prévention des risques naturels majeurs a, quant à lui, mobilisé 19,3 millions d'euros en 2011 et 34,8 millions d'euros en 2012 en complément des crédits budgétaires ;

– pour ce qui concerne l’année 2013, 1 million d'euros de crédits budgétaires a été prévu pour assurer la contribution de l’État aux équipes d’animation et 2,5 millions d'euros supplémentaires seront apportés par extension du périmètre du fonds de prévention des risques naturels majeurs. Globalement, ce sont 71 millions d'euros qui ont été prévus au titre dudit fonds pour l’ensemble constitué par les labellisations PAPI et PSR et les plans « Grands fleuves » ;

– pour l’année 2014, 2 millions d'euros de crédits budgétaires sont prévus pour l’animation des PAPI et 100 millions d'euros pour l’ensemble constitué par les labellisations PAPI et PSR et les plans « Grands fleuves ».

● Le plan interministériel « Submersions rapides ». — À la suite des événements climatiques de 2010 (tempête Xynthia et crues du Var), le Gouvernement a élaboré un projet de plan de prévention des submersions marines et des crues rapides, qui a été présenté par la ministre chargée de l’écologie lors du conseil des ministres du 13 juillet 2010. Il s’agissait alors d’apporter dans l’urgence une réponse à des situations pouvant mettre en cause la sécurité des personnes : ces événements avaient en effet mis évidence la fragilité de certains ouvrages qui ont cédé ou ont été submergés par la mer ou par des crues torrentielles, inondant des zones urbanisées. Ils ont également montré la nécessité d’améliorer le dispositif de vigilance et d’alerte.

Le plan « Submersions rapides » (PSR) a été validé par le Premier ministre le 17 février 2011. Il couvre une série de risques — submersion marine, crue rapide ou inondation par ruissellement et rupture de digues — et se déploie selon quatre axes, eux-mêmes articulés en une soixantaine d’actions. L’axe consacré au renforcement des ouvrages de protection s’inscrit notamment dans le cadre de l’important travail de recensement entrepris par les services de l’État, qui vise à l’émergence d’une collectivité de propriétaires-gestionnaires aptes à prendre en charge le renforcement pérenne et l’entretien des ouvrages. L’objectif du PSR est de contractualiser des programmes globaux entre l’État et les collectivités et la question se trouve posée du renforcement de la capacité de ces collectivités à accéder aux ressources supplémentaires nécessaires pour assurer cet entretien.

Le PSR prévoit de consacrer de l’ordre de 500 millions d’euros de crédits (autorisations d’engagement) à différentes actions d’ici à la fin de 2016. De juillet 2011 à mai 2013, 16 projets de renforcement de digues (PSR hors PAPI) et 5 PSR inclus dans un PAPI ont été labellisés par la commission mixte « Inondations », pour un montant total de 112 millions d’euros, la participation de l'État s’élevant à 37,5 % de ce total. (8)

Issus de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, les articles L. 515-15 et L. 515-16 du code de l’environnement disposent que l’État « élabore et met en œuvre des plans de prévention des risques technologiques qui ont pour objet de délimiter les effets d'accidents susceptibles de survenir dans les installations figurant sur la liste prévue au IV de l'article L. 515-8 et qui y figuraient au 31 juillet 2003, et pouvant entraîner des effets sur la salubrité, la santé et la sécurité publiques directement ou par pollution du milieu. ». Ces plans délimitent un périmètre d’exposition aux risques en tenant compte de la nature et de l’intensité des risques technologiques décrits dans les études de dangers et des mesures de prévention mises en œuvre.

À l’intérieur du périmètre d’exposition, les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) peuvent, en fonction du type de risques, de leur gravité, de leur probabilité et de leur cinétique :

– délimiter les zones dans lesquelles la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages, ainsi que les constructions nouvelles et l'extension des constructions existantes, sont interdites – ou subordonnées au respect de prescriptions relatives à la construction, à l'utilisation ou à l'exploitation ;

– délimiter à l'intérieur de ces zones des secteurs où, en raison de l'existence de risques importants d'accident à cinétique rapide présentant un danger grave pour la vie humaine, les propriétaires des biens concernés peuvent mettre en demeure la commune (ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme) de procéder à l'acquisition de leur bien, pendant une durée de six ans ou l’État déclarer l'expropriation d'utilité publique ;

– prescrire les mesures de protection des populations face aux risques encourus, relatives à l’aménagement, l’utilisation ou l’exploitation des constructions, des ouvrages, des installations et des voies de communication existant à la date d’approbation du plan, qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants et utilisateurs.

Adoptée à la suite de la catastrophe d’AZF (9), la loi du 30 juillet 2003 précitée, dite loi « Bachelot », donnait jusqu’au 31 juillet 2008 pour que soient élaborés et approuvés les 407 plans de prévention à réaliser (art. 81, al. 2). Au 1er août 2014, six ans après l’échéance initialement fixée, 406 plans avaient été prescrits (99,8 % du total) et 311 avaient été approuvés (76,4 % du total). Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, l’objectif du ministère chargé de l’écologie serait désormais d’approuver 90 % des PPRT d’ici la fin de cette année et 95 % d’ici la fin de 2015.

Le retour d’expérience des premiers PPRT approuvés a mis en évidence des difficultés liées au financement des mesures foncières et des travaux prescrits. Au cours des trois dernières années (2011-2013), plusieurs dispositifs ont donc été créés pour faciliter et accélérer l’instauration des plans de prévention des risques technologiques et les principales avancées ont concerné :

– la mise en place d’un dispositif de financement par défaut des mesures foncières en cas d’absence d’accord entre les parties ;

– la prise en charge des travaux prescrits aux riverains particuliers – possibilité de bénéficier d’un crédit d’impôt de 40 % avec un plafond fixé à 10 000 euros pour un célibataire et 20 000 euros pour un couple, qu’il convient impérativement de pérenniser – et l’institution d’une contribution des industriels et des collectivités au financement de ces travaux – à hauteur de 25 % chacun et en complément du crédit d’impôt précité, ce qui porte à 90 % au moins l’aide apportée aux particuliers pour la réalisation des travaux de mise en sécurité de leur logement.

La loi du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable a également introduit, dans ce domaine, un ensemble d’améliorations et de simplifications bienvenues, comme l’ouverture automatique du droit de délaissement dès l’approbation du PPRT, la limitation dans le temps de l’ouverture de ce droit, la prise en charge du coût de la limitation de l’accès aux biens faisant l’objet de mesures foncières ou de leur démolition dans le financement tripartite, la prise en compte du coût des diagnostics préalables dans le montant des travaux de protection donnant droit au crédit d’impôt et aux aides mentionnées ci-dessus ou encore la fixation d’un second plafond pour le montant des travaux obligatoires.

Il est néanmoins rapidement apparu que les particuliers ne pourraient pas mener à bien les travaux obligatoires sans un accompagnement professionnel. C’est pourquoi sept expérimentations, dénommées « programmes d'accompagnement aux risques industriels » (PARI), ont été lancées par le ministère et une vingtaine d’autres est en préparation avec l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), suivant des modalités légèrement différentes. Dans tous les cas, elles visent à faire accompagner chaque particulier par un opérateur du secteur du logement, depuis l’information jusqu’au constat d’achèvement des travaux, en passant par la réalisation de diagnostics visant à définir les travaux à réaliser, la demande de devis auprès des artisans, le montage des dossiers de financement et le suivi de la réalisation des travaux.

Au-delà de ces expérimentations, le rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable de juillet 2013 relatif à l’accompagnement des riverains des plans de prévention des risques technologiques souligne l’opportunité de mettre en place un accompagnement généralisé, dont le coût au plan national est estimé à environ 50 millions d’euros étalés sur dix ans.

Pour ce qui concerne les entreprises, aucun dispositif d’aide spécifique n’est prévu pour la réalisation des travaux nécessaires. On peut simplement rappeler qu’un groupe de travail réunissant au plan national des représentants des collectivités locales, d’associations de protection de l’environnement et des industriels a été chargé de présenter des propositions en matière de protection des employés des entreprises situées à proximité du site à l’origine du risque. Ce travail a abouti à des recommandations diffusées à l’été 2011, qui fixent une doctrine permettant d’affiner et de limiter les cas pour lesquels des travaux de renforcement sur le bâti industriel sont nécessaires, en prenant mieux en compte le fait que la protection des salariés des entreprises peut également être assurée par des mesures d’organisation et des plans de secours.

● Le contrôle de la sûreté nucléaire. — Conformément aux dispositions de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire (dite « loi TSN »), que l’ordonnance n° 2012-6 du 5 janvier 2012 a codifiées au titre IX du livre V du code de l’environnement, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) autorité administrative indépendante, est chargée au nom de l’État du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour protéger les travailleurs, les patients, le public et l’environnement des risques liés aux activités nucléaires civiles. (10)

L’Autorité de sûreté est aujourd’hui dirigée par un collège de cinq commissaires nommés par décret, à raison de trois (dont le président de l’Autorité) par le Président de la République, un par le Président de l’Assemblée nationale et un par le Président du Sénat. Le collège conduit la réflexion de l’Autorité en matière de contrôle dans le domaine de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, il définit la politique générale de l’institution et prend les décisions majeures qui sont requises. Le directeur général de l’Autorité, sous l’autorité du Président, organise et dirige les services centraux et les onze délégations territoriales. (11)

Le parc contrôlé est l’un des plus importants au monde. Il comprend un ensemble standardisé de 58 réacteurs qui produisent l’essentiel de l’électricité consommée en France, un réacteur de type EPR en construction à Flamanville, plusieurs réacteurs en démantèlement, ainsi que différentes installations du cycle du combustible, des usines et des équipements de recherche. L’Autorité de sûreté assure également le contrôle de plusieurs milliers d’installations ou d’activités où sont utilisées des sources de rayonnements ionisants à des fins médicales, industrielles ou de recherche. Elle contrôle le transport des matières radioactives, c’est-à-dire plusieurs centaines de milliers d’expéditions réalisées annuellement sur le territoire national.

L’Autorité est de surcroît chargée de la veille en radioprotection, ce qui la conduit – avec l’appui de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) – à organiser la surveillance radiologique de l’environnement et la surveillance des expositions des travailleurs et de la population aux rayonnements ionisants, comme par exemple les expositions médicales et les expositions au radon.

En 2013, l’Autorité de sûreté a réalisé 2 191 inspections sur les activités nucléaires civiles françaises, soit 712 inspections sur les installations nucléaires de base, 1 165 inspections dans le nucléaire de proximité — dont 57 % dans le domaine médical et 41 % dans celui de l’industrie ou de la recherche, 123 contrôles d’organismes et des laboratoires agréés et 131 inspections de transports de substances radioactives.

Par ailleurs, l’ASN analyse systématiquement les événements significatifs survenant dans les installations dont elle assure le contrôle. Elle s’assure que l’exploitant ou l’utilisateur a pris les dispositions appropriées pour corriger la situation et en éviter le renouvellement. En 2013, ont ainsi été déclarés à l’ASN 1 010 événements significatifs concernant les installations nucléaires de base, 51 événements significatifs concernant le transport de substances radioactives et la radioprotection pour le nucléaire de proximité et 708 événements significatifs concernant le nucléaire de proximité.

● La sûreté nucléaire en 2013 et 2014. — Les exploitants des installations nucléaires de base, les personnes responsables d’une activité utilisant ou mettant en œuvre des rayonnements ionisants et les employeurs de personnes exposées à ces rayonnements sont soumis par la réglementation à une obligation de déclaration de tout incident ou accident susceptible de porter atteinte à la santé des personnes, aux biens ou à l’environnement.

Afin de faciliter une juste perception de l’importance de ces événements par le public, les institutions et les médias, l’Autorité utilise l’échelle internationale de classement des événements nucléaires INES (International Nuclear and Radiological Event Scale). Les événements se produisant dans les installations nucléaires sont ainsi classés selon huit niveaux (de 0 à 7) suivant leur importance : les événements des niveaux 1 à 3 sont qualifiés « d’incidents », ceux des niveaux supérieurs (4 à 7) « d’accidents » ; quant aux événements sans importance du point de vue de la sûreté, ils sont classés au niveau 0 et qualifiés « d’écarts ».

Le tableau ci-dessous récapitule le nombre d’événements significatifs déclarés à l’Autorité de sûreté au cours des trois dernières années.

CLASSEMENT DES ÉVÉNEMENTS SIGNIFICATIFS SURVENUS DEPUIS 2011

Niveau

2011

2012

2013

REP

Autres installations
nucléaires

Transports

TOTAL

3 et plus

2

1

3

1

1

1

91

116

84

20

1

105

0

873

972

734

171

50

955

TOTAL

965

1 091

819

191

51

1 061

Source : ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie

En 2013, 1 061 événements significatifs, dont 153 relatifs à la radioprotection, ont donc été déclarés à l’Autorité de sûreté et classés sur l’échelle internationale – contre 1 091 événements en 2012 et 965 en 2011. (12)

L’événement de niveau 2 sur l’échelle INES, déclaré par EDF en avril 2013, concernait l’irradiation d’un travailleur lors de l’arrêt programmé du réacteur 4 de la centrale du Blayais et une note d’information  a été publiée sur le site internet de l’Autorité de sûreté nucléaire. (13)

Par ailleurs, un événement déclaré à l’Autorité de sûreté par le CEA en 2013, provisoirement classé au niveau 2 sur l’échelle INES, a en définitive été reclassé au niveau 1. Cet événement concernait l’exposition incidentelle d’un travailleur, lors d’une opération de tri de déchets et de gravats faiblement radioactifs. Après analyse du rapport de l’incident, il est apparu que la dose reçue ne dépassait pas la limite de dose réglementaire et un avis d’incident a également été publié sur le site internet de l’Autorité de sûreté. (14)

Au 30 juin dernier, 490 événements significatifs avaient été déclarés à l’Autorité de sûreté au titre de cette année et classés sur l’échelle INES (données temporaires à consolider).

CLASSEMENT DES ÉVÉNEMENTS SIGNIFICATIFS SURVENUS
AU 1ER SEMESTRE 2014

Niveau

REP

Autres installations nucléaires

Transports

TOTAL

3 et plus

2

1

35

9

44

0

323

99

24

446

TOTAL

358

108

24

490

Source : ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie

● Les questions ouvertes sur le financement dans les prochaines années. — En 2014, le budget de l’Autorité de sûreté s’est réparti sur cinq programmes, à savoir les programmes n° 181 « Prévention des risques » (59,2 millions d’euros de crédits de paiement, dont 40,7 millions d’euros au titre de la masse salariale [titre 2], 15,1 millions d’euros au titre des dépenses de fonctionnement des services centraux [titre 3], 1,5 million d’euros au titre des dépenses de fonctionnement des divisions territoriales [id.] et 1,6 million d’euros au titre des dépenses d’intervention [titre 6]), n° 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer », n° 333 « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées », n° 218 « Conduite et pilotage des politiques économique et financière » et n° 190 « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables ».

Le projet de loi de finance pour 2015 prévoit, au titre du programme n° 181, un accroissement des crédits du titre 2 de 0,2 million d'euros, un accroissement du plafond d’emplois de 363 à 375 équivalents temps plein travaillé et la reconduction des crédits hors titre 2. La dotation budgétaire du programme n° 181 attribuée à l’Autorité pour 2014 s’élèvera ainsi à 59,2 millions d'euros en crédits de paiement, soit 40,9 millions d’euros au titre de la masse salariale (titre 2), 16,7 millions d’euros au titre des dépenses de fonctionnement (titre 3), 0,2 million d’euros au titre des dépenses d’investissement (titre 5) et 1,5 million d’euros au titre des dépenses d’intervention (titre 6).

Dans le cadre de son avis n° 2014-AV-0214 du 17 octobre 2014 relatif au budget du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France pour les années 2015 à 2017, l’Autorité de sûreté nucléaire rappelle tout d’abord que les exigences sociétales en matière de sûreté nucléaire et de transparence augmentent régulièrement, ce qui conduit l’État à intensifier notablement son action dans ces domaines. Elle rappelle surtout que le dispositif de contrôle est confronté aujourd’hui à des enjeux de sûreté et de radioprotection sans précédent, notamment le nécessaire renforcement de la sûreté du parc nucléaire français à la suite de l’accident de Fukushima, le vieillissement des centrales nucléaires et l’instruction de la demande de prolongation de leur fonctionnement au-delà du quatrième réexamen de sûreté, la mise en fonctionnement du réacteur EPR sur le site de Flamanville, le développement du projet CIGEO et l’examen des options de sûreté, la montée en puissance de la problématique du démantèlement, les premiers réexamens de sûreté de plus d’une cinquantaine d’installations exploitées par le CEA et AREVA (usine de La Hague) ou encore la vigilance accrue qu’appelle l’augmentation continue des doses de rayonnements ionisants délivrées aux patients.

L’Autorité prend acte des trente emplois supplémentaires qui lui sont attribués sur la période 2015-2017 et de la stabilité de son budget de fonctionnement pour la même période et « apprécie l’effort consenti par le Gouvernement dans un contexte budgétaire extrêmement contraint. » Elle constate néanmoins que l’essentiel de ses besoins et de ceux de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) en emplois (renfort de 95 emplois pour l’ASN et de 65 emplois pour l’IRSN) et en crédits supplémentaires (accroissement de 21 millions d'euros pour l’ASN et de 15 millions d'euros pour l’IRSN), exposés dans l’avis du 6 mai 2014, demeure. Elle reste donc, dans ces conditions, « préoccupée par l’insuffisance des mesures budgétaires au regard des enjeux auxquels la France doit faire face dès maintenant en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection. Elle renouvelle donc sa demande de réforme du financement du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection afin de doter le dispositif dual composé de l’ASN et de l’IRSN d’un financement adapté et adaptable aux enjeux, reposant à la fois sur le budget de l’État et sur une contribution annuelle des exploitants nucléaires, fixée par le Parlement. »

Pour ce qui concerne l’IRSN, Mme Dominique Le Guludec, auditionnée le 16 octobre 2013 par la commission du développement durable en qualité de candidate aux fonctions de présidente du conseil d’administration de l’Institut, répondait à votre rapporteur pour avis que « la coupe budgétaire de vingt millions d’euros que nous subissons [dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014] est conjoncturellement soutenable. Nos investissements dans le réacteur Cabri, à Cadarache, touchent à leur terme cette année, et nous ne ressentirons les coûts de fonctionnement qu’en 2016 (…). Mais il ne faudra pas que cette diminution des ressources perdure, sauf à mettre en péril nos capacités de recherche qui conditionnent la valeur de notre expertise (…). Nous aurons besoin de maintenir notre niveau de compétence quelles que soient les options retenues pour le bouquet énergétique de demain, qu’il s’agisse de bâtir de nouvelles installations ou d’accompagner les équipements en fin de vie. »

Votre rapporteur pour avis s’inquiète donc de l’impact des décisions budgétaires du triennal 2015-2017 sur l’évolution des capacités opérationnelles de l’ASN et de l’IRSN dans les prochaines années, alors que ces deux acteurs centraux de la sûreté nucléaire auront à débuter très prochainement l’examen approfondi des conditions d’une prolongation à cinquante ans de la durée d’exploitation du parc nucléaire d’EDF.

● Contenu et bilan du PNSE II. — Le premier plan national « Santé-environnement » (PNSE I), prévu par la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, avait permis de faire émerger dans le débat public la question des interactions entre la santé et l’environnement et la nécessité d’une prise en compte appropriée par l’ensemble de la société. (15)

Conformément aux engagements pris lors du Grenelle de l’environnement, le Gouvernement a adopté en conseil des ministres, le 24 juin 2009, un deuxième plan national pour la période 2009-2013 (PNSE II). Ce plan, dont l’actualisation tous les cinq ans est prévue par la loi du 9 août 2004 précitée, s’inscrit dans la continuité des actions portées par le premier plan et dans la stratégie européenne de l’Organisation mondiale de la santé, réaffirmée lors des conférences de Londres (1999) et Budapest (2004). Il s’est décliné en 58 mesures concrètes dotées, pour chacune d’entre elles, d’un pilote identifié, de partenaires associés et d’indicateurs de suivi. Il comprenait notamment douze mesures phares, parmi lesquelles la réduction de 30 % des concentrations en particules fines de moins de 2,5 µm dans l’air ambiant à l’horizon 2015, la réduction de 30 % des émissions dans l’air et dans l’eau de six substances toxiques (mercure, arsenic, hydrocarbures aromatiques polycycliques, benzène, perchloroéthylène, polychlorobiphényles) à l’horizon 2013, l’étiquetage des produits de construction et des produits émetteurs de substances dans l’air intérieur, la surveillance de la qualité de l’air dans trois cents crèches et écoles, le suivi des écoles construites sur des sols potentiellement pollués, la protection de cinq cents captages d’eau prioritaires et la gestion des points noirs environnementaux.

Le PNSE II a fait l’objet d’une évaluation conjointe par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR) et le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), dans le cadre d’un rapport remis en juillet 2013 et publié en mai 2014. Les auteurs de ce rapport estiment que « sans le deuxième plan national santé–environnement, plusieurs mesures de réduction des facteurs environnementaux pour la santé n’en seraient vraisemblablement pas à leur niveau actuel de maturité », citant la qualité de l’air intérieur, l’exposition aux perturbateurs endocriniens, l’exposition des jeunes enfants à certains polluants dans les écoles, la prise en compte de l’hypersensibilité aux facteurs environnementaux, les nanomatériaux ou la biosurveillance.

Concernant le périmètre du plan, le rapport note que le plan interfère avec plusieurs politiques publiques existantes ayant pour objet la réduction des facteurs de risques environnementaux, comme celles portant sur les émissions de polluants dans l’air et dans l’eau, la gestion des sols pollués, l’exposition au bruit et au radon, etc. En vue du troisième plan, les trois organismes appellent à sa nécessaire simplification : « Le plan doit apparaître comme la clé de voûte de la santé environnementale en rassemblant les actions qui lui sont propres, et, de façon non détaillée, des actions relevant de politiques publiques spécifiques. » Ils recommandent de « donner la priorité, en tant que facteurs de risques environnementaux, aux agents physiques et chimiques ».

Par ailleurs, constatant un manque de coordination entre les trois catégories de programme de recherche, ils appellent à intégrer, dès la conception du prochain plan, la stratégie et les besoins dans ce domaine.

Concernant l’implication des échelons territoriaux, via la déclinaison en plans régionaux santé–environnement, le rapport d’évaluation note que 23 régions disposent d’un plan opérationnel, « la majorité d’entre eux faisant preuve d’une vitalité exemplaire ». « Une gouvernance locale associant toutes les parties prenantes a pu s’épanouir, via le binôme ARS-DREAL » note le rapport, qui appelle à élargir les groupes régionaux santé environnement à l’ensemble des collectivités locales et en particulier aux villes, en raison de leurs rôles dans les domaines de l’urbanisme et des transports.

En fin de rapport, douze recommandations sont formulées en vue du troisième plan. On y trouve notamment le souhait d’associer régulièrement le ministère chargé de la recherche à ce pilotage lors des décisions stratégiques qui définissent les actions à mener et de réunir les ministères concernés sous la présidence du Premier ministre, chaque année, au printemps, dans le cadre de la préparation de la conférence environnementale pour la transition écologique.

● Vers le PNSE III. — Un projet de PNSE III, couvrant la période 2014-2018, a été soumis à la consultation du public, du 26 septembre au 17 octobre derniers, et devrait être discuté à la mi-novembre à l'Institut Pasteur, lors du volet de la conférence environnementale consacré à la santé environnementale.

Le Gouvernement entend, avec ce document, « changer de paradigme dans le pilotage de la politique publique en santé–environnement », en se fondant sur la notion « d’exposome », qui prend en compte les expositions réelles aux polluants, « à la fois en considérant la totalité des voies d’exposition à un polluant ou une nuisance et, quand c’est possible, les interactions entre polluants ». Il s’agit de consolider les progrès déjà accomplis, mais aussi de « proposer une nouvelle approche de la santé environnementale, à la fois plus forte, plus positive et plus ancrée sur les territoires ».

Le plan comprend une trentaine de mesures, ordonnées en cinq grands chapitres.

– Le changement de paradigme dans le pilotage de la politique publique en santé–environnement passera par l’établissement d’un « corpus d’indicateurs permettant d’obtenir une vision globale et intégrée de l’historique des expositions aux agents chimiques, physiques et infectieux ». La direction générale de la prévention des risques et la direction générale de la santé seront les pilotes de ce chantier, qui nécessitera l’expertise de l’ANSES et de l’INERIS.

Un autre axe important sera l’amélioration de la connaissance des expositions des populations, en exploitant notamment les programmes de biosurveillance ELFE et ESTEBAN.

– Le volet « Prévention générale et collective » porte en premier lieu sur l’air intérieur, qui « constitue un axe fort de progrès en santé–environnement ». Pour cela, le gouvernement propose de « mettre en œuvre le plan de qualité de l’air intérieur » annoncé en octobre 2013. (16)

S’agissant de la qualité de l’air extérieur, le document reprend plusieurs mesures intégrées dans le projet de loi sur la transition énergétique, notamment l’élaboration du plan national de réduction des émissions polluantes atmosphériques (PREPA), prévue pour mi-2015 en application de la future directive sur les plafonds d’émission, et la création de zones de restriction de circulation pour certaines collectivités de plus de cent mille habitants. Le plan évoque des actions pour réduire les émissions polluantes du chauffage au bois et des activités agricoles.

Le Gouvernement propose également de « développer la diffusion de l’information visant à favoriser la prise en compte de la qualité de l’air et de ses impacts sanitaires, notamment sur les personnes vulnérables (jeunes enfants…), dans les projets d’aménagement et d’urbanisme (installation de crèches, écoles, etc. vis-à-vis d’axes à fort trafic routier), notamment dans le cadre du porté à connaissance de l’État lors de l’élaboration des documents d’urbanisme ».

Pour ce qui concerne la qualité de l’eau, les mesures proposées incluent l’élaboration d’un plan « micropolluants » intégrant les plans sur les résidus de médicaments dans les eaux et les PCB, la surveillance de quatre familles de substances émergentes prioritaires identifiées dans les milieux aquatiques et les captages d’eau destinés à la consommation humaine (nitrosamines, perchlorates, parabènes, phtalates et bisphénol A), la réalisation d’un suivi post-AMM (autorisation de mise sur le marché) systématique pour les produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives pour lesquelles il n’existe pas de méthodes d’usage courant en France et pour lesquelles le seuil de quantification est inférieur à la « concentration avec effet » établie par l’INERIS en appui à la mise en œuvre de la directive-cadre sur l’eau et le réexamen anticipé des AMM concernées sur la base des résultats de ce suivi, la promotion de la mise en place de plans de sécurité sanitaire de l’alimentation en eau potable par les collectivités ou encore l’élaboration d’un second plan d’actions national sur l’assainissement non collectif pour la période 2014-2018.

Les risques émergents (nanomatériaux, perturbateurs endocriniens, radiofréquences, lignes hautes et très hautes tension et ondes lumineuses) sont également abordés. Le projet de plan prévoit par exemple de réaliser des campagnes de mesures des nanomatériaux à l’extérieur et l’intérieur des sites de fabrication et d’étudier le devenir de ces nanomatériaux, dans une approche du cycle de vie incluant le vieillissement et la phase « déchet ».

– Le volet « Prévention individuelle et ciblée » vise à réduire le risque de cancer lié à l’exposition à l’amiante, au radon, à « comprendre et agir sur l’ensemble des facteurs environnementaux impliqués dans l’obésité et les maladies métaboliques », à « mieux connaître et mieux maîtriser l’environnement à risque allergique » ou encore à protéger les populations contre les nuisances sonores. Ce dernier objectif passe en particulier par la résorption des points noirs du bruit, qui a pour « problématique principale » de dégager des « ressources pérennes pouvant alimenter ces actions et pouvant bénéficier à l’ensemble des gestionnaires ».

Sont également abordés la santé reproductive, la protection des personnes vulnérables (contre les perturbateurs endocriniens et les LED bleues), les sols pollués et la légionellose.

– Au titre du volet « Mieux lutter contre les inégalités environnementales territoriales de santé », le Gouvernement propose de « mieux caractériser les inégalités environnementales et territoriales de santé », à travers une plateforme commune et des « méthodologies de référence au niveau national pour la caractérisation des inégalités environnementales déclinables localement, tenant compte des situations de vulnérabilité des populations ». Des études multi-expositions sur plusieurs territoires pourraient également être lancées. Il s’agit de prendre en compte le fait que « la distribution de la dégradation de l’environnement n’est pas homogène en France », certaines zones géographiques ayant « un environnement particulièrement impacté par des activités humaines actuelles ou passées ».

Le Gouvernement veut en particulier « tester sur la base du volontariat, la mise en place de quelques études d’impact sur la santé à l’échelle d’un quartier permettant d’intégrer au mieux les enjeux sanitaires et environnementaux ». Il souhaite également « promouvoir le développement d’outils à usage de l’ensemble des intervenants permettant d’intégrer, dans les projets d’aménagement et les documents de planification, la santé par une approche globale de l’ensemble de ses déterminants (économiques, environnementaux et sociaux) ».

Le volet porte également sur la pollution au chlordécone, avec le lancement d’un troisième plan.

– S’agissant, en dernier lieu, du renforcement de la dynamique en santé environnement dans les territoires et afin de faciliter la déclinaison du plan national en plans régionaux, l’administration sera chargée d’élaborer une instruction nationale et de mettre en place des outils de suivi. Elle devra également promouvoir les initiatives locales d’actions en santé environnementale, dites ILASE, à l’échelle communale ou intercommunale, lesquelles pourront être soutenues financièrement par des appels à projet régionaux.

La politique publique de lutte contre le bruit repose sur un ensemble de d’instruments et de dispositifs visant à répondre à trois objectifs fondamentaux :

– informer le public, en publiant les éléments d’analyse et de diagnostic pertinents et en associant les acteurs intéressés à l’élaboration des solutions envisagées (consultations publiques pour les plans de prévention du bruit dans l’environnement, enquêtes publiques pour les plans d’exposition au bruit et les plans de gêne sonore) ;

– prévenir les effets du bruit sur les populations, en imposant des prescriptions constructives plus contraignantes au voisinage d’infrastructures de transports terrestres bruyantes (classement sonore), en limitant l’urbanisme au voisinage des aérodromes (plans d’exposition au bruit) ou encore en s’assurant que les nouvelles constructions offriront à leurs occupants un confort acoustique se rapprochant le plus possible des préconisations de l’OMS (réglementation acoustique du bâtiment) ;

– identifier et traiter les situations les plus préoccupantes, en recensant les « points noirs » de bruit (travaux d’analyse et de suivi des observatoires départementaux du bruit, cartes de bruit et plans de gêne sonore) et en mettant œuvre des solutions adaptées (aides à l’insonorisation, réduction du bruit à la source dans le cadre des plans de prévention du bruit dans l’environnement, etc.).

Au titre des actions visant à informer le public et prévenir les effets du bruit, le ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie a mobilisé le programme n° 181 à hauteur de 1,6 million d'euros en crédits de paiement en 2013 et 1 million en 2014 et prévoit un montant équivalent en 2015.

Quant aux actions d’identification et de traitement des situations les plus préoccupantes, elles s’inscrivent depuis 2009 dans le cadre du plan « Bruit » de l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie. Celle-ci a mis en place un fonds de concours destiné à financer des aides à l’insonorisation à proximité des points noirs de bruit du réseau routier national, doté à hauteur de 23,5 millions d'euros. Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, des résultats significatifs auraient été obtenus :

– en 2013, 2,7 millions d'euros en crédits de paiement ont été mobilisés, qui ont permis de résorber 488 points noirs de bruit ;

– en 2014, 4,7 millions d'euros en crédits de paiement sont mobilisés et devraient permettre de résorber 730 points noirs ;

– en 2015, le reliquat du fonds de concours de l’Agence devrait permettre la réalisation d’opérations d’une ampleur équivalente.

Il n’en reste pas moins que ces efforts doivent être encore prolongés et amplifiés et qu’un certain nombre de dysfonctionnements, parfois liés à l’insuffisance des moyens engagés, doivent être regrettés.

Dysfonctionnement du fonds d’aide à l’insonorisation des riverains des aéroports :
le cas de l’Île-de-France

« En Île-de-France, [plusieurs centaines d’emplois sont menacés] à cause des dysfonctionnements du fonds local d’aide à l’insonorisation des riverains des aéroports (…). Ce fonds, destiné à subventionner les travaux d’isolation phonique des logements affectés par le bruit des avions, est aujourd’hui à sec. Résultat : une dizaine d’entreprises de menuiserie et d’isolation ont déjà mis la clé sous la porte. Et plusieurs dizaines d’autres vont suivre, si aucune solution n’est trouvée dans les prochaines semaines. « On est en train de nous décapiter, c’est honteux », lâche le patron d’une PME implantée près de l’aéroport de Roissy (…).

« Tout avait pourtant fonctionné sans problème pendant plus de vingt ans. Créés en 1992, les fonds (un par région aéroportuaire) sont alimentés par une taxe versée par les compagnies aériennes, sur le principe du pollueur-payeur, à hauteur de plus de 60 millions d’euros par an au début des années 2000. L’argent est ensuite géré par les aéroports, qui instruisent les demandes des riverains. Vu le poids des plateformes de Roissy et d’Orly, le fonds géré par le groupe Aéroports de Paris (ADP) représente à lui seul plus de 70 % des recettes. En Ile-de-France, les travaux sont assurés par une centaine d’entreprises sélectionnées par les bureaux d’études agréés par ADP.

« Tout dérape à partir de début 2012. La ministre de l’Écologie de Nicolas Sarkozy, Nathalie Kosciusko-Morizet, décide que les travaux seront désormais remboursés à 100 %, au lieu de 80 %, jusqu’à la fin 2013, et étend le dispositif à l’aéroport d’affaires du Bourget. L’année suivante, sous François Hollande, l’exécutif prolonge le « bonus 100 % » d’un an et élargit la zone concernée autour de Roissy, ce qui ajoute 30 000 logements éligibles. Ces mesures provoquent un doublement des demandes de travaux. Or, dans le même temps, le gouvernement baisse le montant de la taxe, plafonnée à 49 millions d’euros à l’échelle nationale. « Une décision prise sous l’aimable pression d’Air France », premier contributeur de la taxe, déplore Jean-Pierre Blazy, député et maire PS de Gonesse (Val-d’Oise), près de Roissy.

« Vu le boom des dossiers et la baisse des ressources, il aurait fallu mettre en place un système de tri des dossiers. Mais c’est le contraire qui s’est produit. « ADP nous a mis une pression énorme pour qu’on embauche afin d’accélérer le rythme des travaux », témoignent plusieurs chefs d’entreprise. « L’impulsion était politique. La décision d’ouvrir les vannes a été prise par Nathalie Kosciusko-Morizet, car l’élection présidentielle de 2012 approchait, puis a été maintenue sous la gauche à cause des municipales », décrypte une source administrative proche du dossier. Résultat : en Ile-de-France, l’argent s’épuise à vue d’œil. Fin 2013, c’est la panique. Un document confidentiel d’ADP, que Libération s’est procuré, montre que si tous les travaux validés avaient été effectués, le dispositif francilien serait en déficit de 48,6 millions d’euros ! Or, ADP a l’interdiction de plonger les comptes du fonds dans le rouge. Après avoir accéléré, l’exécutif décide alors un blocage aussi total que brutal. La commission chargée d’instruire les dossiers en amont, qui se tient normalement tous les trimestres, ne s’est pas réunie depuis décembre 2013. Du coup, plus de 20 000 dossiers s’entassent chez ADP. Quant aux projets déjà validés, « il risque de ne plus y avoir d’argent pour les payer d’ici quelques semaines », confie une source proche du gouvernement.

« Pour les entreprises les plus dépendantes d’ADP, la situation devient catastrophique. « J’ai déjà licencié 12 salariés sur 16, et je n’ai plus qu’un seul chantier à faire », s’alarme un patron de PME. « Je peux tenir jusqu’à mi-novembre. Après, je mets la clé sous la porte », ajoute un autre. Tous dénoncent l’attitude d’ADP, qui ne les aurait prévenus du blocage qu’à la mi-2014. « Ils nous ont alors dit de nous démerder et de trouver de nouveaux marchés. Mais ils auraient pu le faire avant de nous tirer une balle dans le genou », lâche un chef d’entreprise concerné. ADP assure qu’il a « anticipé la situation » en « transmettant aux autorités compétentes l’intégralité des informations financières ».

« La gestion du dossier a été calamiteuse », résume Françoise Brochot, secrétaire générale de l’Association de défense contre les nuisances aériennes (Advocnar). Le député PS Jean-Pierre Blazy a proposé plusieurs mesures pour tenter de « remettre en route la machine » (…). « Vu les conséquences pour les riverains et les entreprises, il faut résoudre le problème au plus vite », plaide-t-il. Sauf que l’exécutif, qui a commandé et reçu un rapport sur le sujet au printemps, prend son temps. Au cabinet du nouveau ministre des Transports, Alain Vidalies, on assure travailler sur « des mesures et une méthode afin de résorber ces retards, […] qui seront présentés prochainement ».

Source : Y. Philippin, « Plan d’insonorisation : le BTP crie au scandale », Libération, 14 octobre 2014.

On n’esquissera ici qu’un bilan rapide de la mise en place des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) prévues par la loi « Grenelle II ». Il s’agit de la filière des déchets d’activités de soins à risques infectieux perforants des patients en auto-traitement (article 187), de celle des déchets ménagers pouvant présenter un risque significatif pour la santé et l’environnement (article 198), de celle des déchets d’ameublement (article 200) et de celle des bouteilles de gaz destinées à un usage individuel (article 193).

● La filière REP des déchets perforants d’activités de soins à risques infectieux. — Conformément à l’engagement n° 249 du Grenelle de l’environnement, l’article L. 4211-2-1 du code de la santé publique, créé par l’article 30 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 et modifié par l’article 187 de la loi « Grenelle II », prévoit la mise en place d’une filière REP pour les déchets d’activités de soins à risques infectieux perforants des patients en auto-traitement (dits DASRI).

En amont, la filière repose sur la mise à disposition à titre gratuit, par les producteurs de médicaments et de dispositifs médicaux, de collecteurs dans les officines de pharmacie et les pharmacies à usage intérieur, de sorte que les patients en auto-traitement puissent se défaire en toute sécurité de leurs déchets perforants.

En aval, la filière suppose l’organisation de la collecte, de l’enlèvement et du traitement des déchets concernés. Le décret n° 2011-763 du 28 juin 2011 prévoit ainsi que la mise en place du dispositif de collecte de proximité, l’enlèvement et le traitement des déchets sont à la charge des producteurs de médicaments et de dispositifs médicaux et que ces producteurs peuvent s’acquitter de leurs obligations en mettant en place des systèmes individuels agréés ou en ayant recours à des éco-organismes. En l’absence d’un tel dispositif sur une partie du territoire, les officines de pharmacie, les pharmacies à usage intérieur et les laboratoires de biologie médicale doivent accepter les déchets que leur remettent les patients en auto-traitement.

Le lancement opérationnel de la filière est effectif depuis qu’un éco-organisme collectif, l’association DASTRI, a été agréé par un arrêté en date du 12 décembre 2012. (17) On estime qu’environ 1 200 tonnes de DASRI – y compris les boîtes normalisées utilisées pour la collecte – seront ainsi collectées sélectivement dans les officines tous les ans, puis détruites par incinération.

● La filière REP des déchets diffus spécifiques ménagers. — En application de l’engagement n° 250 du Grenelle de l’environnement, l’article L. 541-10-4 du code de l’environnement, créé par l’article 127 de la loi du 27 décembre 2008 et modifié par l’article 198 de la loi « Grenelle II » susmentionnées, prévoit la mise en place d’une filière REP pour les déchets ménagers issus de produits chimiques pouvant présenter un risque significatif pour la santé et l’environnement (dits « déchets diffus spécifiques ménagers » ou DSS). (18)

Les modalités d’application de cet article ont été fixées par le décret n° 2012-13 du 4 janvier 2012 relatif à la prévention et à la gestion des déchets ménagers issus de produits chimiques pouvant présenter un risque pour l’environnement, publié au Journal officiel du 6 janvier suivant. À l'instar des dispositions applicables aux autres filières REP, le décret prévoit que la gestion de ces déchets est assurée par les metteurs sur le marché, qui peuvent s’acquitter de leurs obligations à travers la mise en place de systèmes individuels approuvés ou le recours à des éco-organismes agréés. Il est précisé par un arrêté d’application du 16 août 2012, qui dresse la liste exhaustive des produits visés par la filière.

Un éco-organisme collectif (Eco-DDS) a été agréé par un arrêté en date du 9 avril 2013, sur la base du cahier des charges défini par un arrêté du 15 juin précédent et pour les catégories 3 à 10 visées au III de l’article R. 543-228 du code de l’environnement. Pour les metteurs sur le marché qui souhaiteraient mettre en place un système individuel pour répondre à leurs obligations plutôt que d’adhérer à l’éco-organisme – ou parce que leurs catégories de produit ne sont pas couvertes par ledit agrément –, un cahier des charges d’approbation est en cours de finalisation.

Les déchets diffus spécifiques des ménages représentent chaque année de l’ordre de 43 000 tonnes de déchets, dont 32 % sont collectés séparément dans les déchetteries. Les services du ministère chargé de l’écologie estiment que la mise en place de cette filière permettra, dès cette année, une économie de 21 millions d'euros pour les collectivités territoriales ; en tenant compte de l’augmentation progressive de la part collectée sélectivement, l’économie réalisée à terme se monterait à environ 56 millions d'euros.

● La filière REP des déchets d’éléments d’ameublement. — En application de l’engagement n° 251 du Grenelle de l’environnement, l’article L. 541-10-6 du code de l’environnement – créé par l’article 200 de la loi « Grenelle II » – prévoit la mise en place d’une filière REP pour les déchets d’éléments d’ameublement. L’entrée en vigueur de l’obligation définie par cet article, initialement prévue le 1er janvier 2011, a été reportée au 1er janvier 2012 par l’article 28 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

Les conditions d’application de l’article L. 541-10-6 précité ont été précisées par le décret n° 2012-22 du 6 janvier 2012 relatif à la gestion des déchets d’éléments d’ameublement, publié au Journal officiel du 8 janvier 2012. Il fixe les conditions de collecte, d’enlèvement et de traitement de ces déchets ainsi que l’organisation qui devra être mise en place pour parvenir à l’objectif de réutilisation et de recyclage fixé pour la fin de l’année 2015 — soit un taux de réutilisation et de recyclage de 45 % pour les déchets d’éléments d’ameublement ménagers et de 75 % pour les déchets d’éléments d’ameublement professionnel.

Deux éco-organismes ont été agréés, à ce jour, sur la base du cahier des charges défini par un arrêté du 15 juin 2012 : il s’agit d’Eco-Mobilier (gestion des déchets d’éléments d’ameublement ménagers des catégories 1 à 10 et des déchets d’éléments d’ameublement professionnels des catégories 1 à 3 de l’article R. 543-240 du code de l’environnement) et de Valdélia (gestion des déchets d’éléments d’ameublement professionnels des catégories 5 à 10). Comme pour les déchets diffus spécifiques ménagers, un cahier des charges est en cours de finalisation à l’attention des metteurs sur le marché qui souhaiteraient mettre en place un système individuel pour répondre à leurs obligations plutôt que d’adhérer aux éco-organismes.

La quantité des déchets d’éléments d’ameublement générée en une année a été estimée à 2,7 millions de tonnes, dont 20 % de déchets de mobiliers professionnels. Outre l’intérêt, pour les collectivités territoriales, du transfert d’une partie du financement de la gestion de ces déchets aux metteurs sur le marché compte tenu du coût actuel de leur gestion (de l’ordre de 400 millions d'euros par an à terme), la mise en place de la filière REP doit permettre d’atteindre de meilleurs résultats en termes de valorisation énergétique et de valorisation matière des déchets de meubles – pour ce qui concerne les matelas et les mousses et textiles constituant les sièges et canapés. À l’heure actuelle, près de 40 % de ces déchets d’éléments d’ameublement vont en effet encore en décharge.

● La filière REP des bouteilles de gaz à usage individuel. — L’article L. 541-10-7 du code de l’environnement, créé par l’article 193 de la loi « Grenelle II », prévoit que les metteurs sur le marché de bouteilles de gaz destinées à un usage individuel les assortissent d’une consigne ou d’un système équivalent et qu’ils prennent en charge la gestion des déchets issus de ces bouteilles.

Le décret n° 2012-1538 du 28 décembre 2012, relatif à la mise en place d’une consigne ou d’un système de reprise équivalent des bouteilles de gaz destinées à un usage individuel et à la gestion des déchets de bouteilles de gaz, a été publié au Journal officiel du 30 décembre 2012. Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, les cahiers des charges d’approbation des systèmes individuels et d’agrément des systèmes collectifs y afférents sont en cours de finalisation et seront prochainement soumis à la consultation des parties prenantes.

Au-delà de ces cas particuliers, nos collègues Jean-Jacques Cottel et Guillaume Chevrollier se sont récemment essayés à une appréciation d’ensemble du mouvement d’extension des filières REP qui s’est opéré au cours des dernières années. (19) Leur excellent rapport formule une série de recommandations, comme la modification du périmètre de certaines filières existantes ou le renforcement du contrôle de l’État sur les éco-organismes. Les rapporteurs en appellent également à une véritable régulation de ces éco-organismes, dans un but de simplification et de clarification du rôle et des pouvoirs des différents opérateurs publics du secteur des déchets.

Le programme n° 170 « Météorologie » représente le financement des attributions de l’État en matière de prévision et de recherche météorologiques et climatiques, confiées à l’établissement public administratif Météo-France.

Les priorités de l’État dans ce domaine d’activité sont doubles :

– une très forte attention est portée à la sécurité des personnes et des biens. L’État a confié à Météo-France une mission particulière dans ce domaine, dans un contexte où des événements climatiques extrêmes et dangereux frappent le territoire national à intervalles réguliers. Les événements des dernières années, qu’il s’agisse d’aléas météorologiques (tempêtes, submersions marines, inondations, etc.) ou d’événements dont la gestion ou les impacts dépendent des conditions météorologiques (dispersion de polluants après la catastrophe Fukushima, sécurité aéronautique après l’explosion du volcan islandais Eyjafjallajökull), ont confirmé l’ampleur des besoins de la société vis-à-vis des informations et des avertissements météorologiques. À ce titre, des actions sont nécessaires pour préserver les infrastructures existantes de la chaîne opérationnelle de Météo-France et pour améliorer encore la prévision et son intégration à la chaîne d’alerte ;

– la connaissance des climats passés et futurs est devenue centrale pour les politiques publiques, en particulier dans une logique de développement durable et dans un souci d’adaptation au changement climatique. À ce titre, il appartient à Météo-France de concevoir, développer et promouvoir des services climatiques adaptés aux besoins, dans un cadre tant national qu’international.

● Périmètre et structure du programme n° 170. — Les crédits inscrits au programme n° 170 assurent exclusivement le financement des attributions de l’État en matière de prévision et de recherche météorologiques et climatiques, confiées à l’établissement public à caractère administratif Météo-France. L’établissement reçoit également une subvention du programme n° 193 « Recherche spatiale » – au titre de la contribution française aux programmes de satellites opérationnels développés et exploités par l’organisation intergouvernementale EUMETSAT, qui est chargée des systèmes de satellites météorologiques opérationnels européens (et au sein de laquelle la France est représentée par Météo-France) – ainsi qu’une subvention versée par la direction générale de la prévention des risques (programme n° 181 « Prévention des risques ») – au titre de l’entretien et de la modernisation du réseau d’observation hydrométéorologique (radars et stations automatiques d’observation au sol).

Météo-France intervient, dans un cadre conventionnel, en faveur des services de l’État en charge des transports (maritimes, terrestres et aériens), de la sécurité civile, de la prévention des risques naturels, de la défense nationale et de la sécurité nucléaire. Il est notamment l’opérateur désigné par l’État comme prestataire de service météorologique à la navigation aérienne dans l’espace aérien français, au sens des règlements « Ciel unique européen ». Météo-France exerce également une activité commerciale auprès des professionnels et du grand public, financée par les recettes y afférentes et faisant l’objet d’une comptabilité analytique distincte.

Le pilotage du programme n° 170 est assuré par la direction de la Recherche et de l’innovation qui, au sein du ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie, assure la tutelle scientifique, administrative et financière de l’établissement. Ce programme est structuré en deux actions, dans le cadre d’une maquette inchangée depuis plusieurs années.

L’action n° 1 « Observation et prévision météorologiques » correspond à la mission principale de l’opérateur et mobilise l’essentiel des infrastructures, moyens techniques et compétences dont il dispose : observation et prévision des évolutions de l’atmosphère, de l’océan superficiel et du manteau neigeux, conservation de la mémoire du climat et analyse des évolutions constatées, diffusion des informations produites, formation des personnels civils et militaires spécialistes en météorologie, etc.

L’action n° 2 « Recherche dans le domaine météorologique » comprend toutes les activités de Météo-France destinées à l’amélioration des techniques d’observation, de connaissance et de modélisation de l’atmosphère et de ses interactions avec les autres milieux naturels et les activités humaines. Lors de son audition, le 29 février 2012, par la Commission du développement durable, le président-directeur général de Météo-France François Jacq déclarait sur ce point : « Nos priorités en matière de recherche sont de deux ordres. Nous voulons en premier lieu progresser encore dans ce qui constitue, comme l’a constaté l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, le domaine d’excellence de Météo-France : la compréhension de la physique de l’atmosphère et la pertinence de nos modèles. Nous souhaitons ainsi parvenir à mieux cerner des phénomènes dont nous maîtrisons encore mal la prévision – brouillard, grêle, précipitations intenses… L’amélioration de la modélisation passe aussi par des campagnes de mesures sur le terrain ; aussi participerons-nous, par exemple, au programme de recherche HyMeX de recueil de données d’observation, avec une vingtaine d’autres acteurs européens.

« Dans la continuité, notre deuxième grand champ de recherche est le climat. Nous avons pour objectif d’affiner nos modèles afin d’obtenir des représentations de l’atmosphère de plus en plus réalistes – mais je ne puis faire de promesses sur l’échéance exacte à laquelle on peut s’attendre à ce que ces programmes aient des retombées pratiques. Notre autre objectif est d’améliorer la « descente d’échelle » – autrement dit les prévisions locales – par des scénarios permettant de régionaliser les climats. »

La connaissance des climats passés et futurs est en effet devenue centrale pour de nombreuses politiques publiques, en particulier dans une logique de développement durable et dans un souci d’adaptation au changement climatique. Il s’agit donc pour l’opérateur de concevoir, développer et promouvoir des services climatiques adaptés aux besoins, dans un cadre tant national qu’international.

● Exécution budgétaire pour l’année 2014. — Pour ce qui concerne l’exécution budgétaire du programme au 31 août 2014, les autorisations d’engagement et crédits de paiement consommés à cette date correspondent aux trois premiers trimestres de la subvention pour charges de service public versée à Météo-France, l’engagement et le paiement du quatrième trimestre étant intervenus au début du mois octobre. Il faut également rappeler que, par rapport aux 208,3 millions d'euros de crédits votés dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2014, une réserve de précaution de 4,3 millions d'euros a été constituée au moment de la programmation budgétaire initiale et qu’une annulation de 8,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement par la loi de finances rectificative n° 2014-891 du 8 août 2014. 

● Crédits demandés pour l’année 2015. — Les crédits demandés pour l’année 2015 se montent à 205,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sur le seul titre 3 (– 1,2 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2014), dont 183,2 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au titre de l’action n° 1 (89 % du total) et 22,6 millions d’euros au titre de l’action n° 2 (11 % du total).

Les montants prévus pour 2015 se situent donc à un niveau très proche de celui atteint dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2012 (206,8 millions d'euros), après une augmentation de près de 10 millions d'euros en 2013 liée au financement d’un nouveau supercalculateur.

 

Ensemble
du marché

Marché
grand public

Marché professionnel

Taille du marché

65 millions €

25 millions €

40 millions €

CA Météo-France

38,6 millions €

17,8 millions €

20,8 millions €

Part de marché Météo-France

59 %

71 %

52 %

CA Météo-France + filiales

44,1 millions €

17,8 millions €

26,3 millions €

Part de marché MF + filiales

68 %

71 %

66 %

● Une position dominante sur le marché « grand public ». — Les services proposés par Météo-France à destination du grand public relèvent soit de « kiosques » téléphoniques traditionnels (services audiotel), soit de services consultables par Internet ou sur des téléphones mobiles.

– Les kiosques téléphoniques traditionnels tendent à disparaître progressivement depuis une dizaine d’années. Cette situation reflète l’évolution des habitudes de consommation et un contexte marqué par la progression de la qualité des bulletins météorologiques télévisés, le développement des sources d’information gratuites sur Internet, la généralisation des mobiles et le déclin corrélatif de la téléphonie résidentielle. La part de marché de Météo-France apparaît stable sur ce secteur (environ 85 %) depuis 2004, le seul concurrent significatif étant MétéoConsult (part de marché avoisinant les 10 %).

Les gestionnaires du programme n° 170 au sein du ministère chargé de l’écologie estiment que la baisse du nombre d’appelants du kiosque est appelée à se poursuivre dans les années à venir, les seules incertitudes portant sur le rythme de cette décroissance et l’existence ou non à terme d’une population d’appelants résiduelle — en d’autres termes, la question d’une valeur résiduelle du marché non nulle en fin de période. (20)

– Depuis 2000, les services Internet jouent inversement un rôle significatif dans les activités de l’établissement – comme pour l’ensemble des entreprises et des services publics. Le marché des espaces publicitaires ayant véritablement pris son essor à partir de 2004, l’établissement a pu atteindre dès 2005 l’équilibre entre ses recettes et ses coûts de fonctionnement sur ce segment et les années suivantes ont permis de prolonger cette forte croissance de ses recettes publicitaires.

Météo-France est aujourd’hui l’acteur de référence des sites d’information consacrés à la météorologie avec une part d’audience de 37 %, la Chaîne Météo/MétéoConsult se situant vers 21 % et les autres acteurs ayant chacun moins de 5 % de part de marché. Ce marché connaît depuis 2008 une croissance soutenue, comprise entre 5 et 12 % par an, même si la crise économique actuelle a pu occasionner des ralentissements ponctuels marqués.

– La situation du marché des mobiles se caractérise, quant à elle, par trois grandes tendances : les technologies et standards évoluent rapidement et favorisent l’émergence de solutions innovantes, tant en termes de services — par exemple, les services d’information géolocalisés — que de modèles économiques — par exemple, les portails multiservices proposés par certains fabricants de terminaux ; le rapport de force entre opérateurs, éditeurs et fabricants de terminaux reste au désavantage des éditeurs de services (21) ; le marché des services d’information semble encore à la recherche d’un modèle économique viable — les modèles économiques « payants » (à l’acte ou à l’abonnement, de type services vocaux surtaxés ou services payant de messagerie) sont déclinants et ne sont pas remplacés, le modèle publicitaire s’impose mais peine à se développer en valeur.

Sur ce segment de marché, Météo-France occupe une position dominante, tant pour ce qui concerne les services Internet — le site http://france.meteofrance.com/ figure régulièrement dans les vingt-cinq premiers sites français dans le panel Mediamétrie/NetRating, avec en moyenne plus de 1,3 million de visiteurs uniques par jour — que pour les téléphones portables — plus de 6,5 millions de téléchargements de l’application correspondante, sous divers systèmes d’exploitation.

● Une position contestée sur le marché des services aux professionnels. — Le marché français des prestations météorologiques aux professionnels était estimé à environ 40 millions d’euros en 2011. Au cours de la période 2005-2011, la croissance des recettes professionnelles de Météo-France a été plus lente que la croissance d’ensemble du marché, avec pour conséquence une érosion de la part de marché de l’établissement de l’ordre de dix points depuis 2005. Une inversion de tendance a néanmoins été observée en 2012 et confirmée en 2013.

Parmi les principaux concurrents de l’établissement, la montée en puissance de MeteoGroup doit être notée : cette société d’origine hollandaise, rachetée par son partenaire britannique Press Associate puis par un fonds américain, a établi des filiales dans la plupart des pays européens – y compris en France, après avoir abordé le marché français via sa filiale belge – et couvre tous les segments de marché. De très petites sociétés de météorologie généralistes parviennent à maintenir ou développer une activité de services, comme PréviMétéo ou Agate. D’autres acteurs cultivent des niches, comme Rhea (hydrologie urbaine), Novimet (traitement du signal radar) ou Climpact (analyse de météo sensibilité). Par ailleurs, sur le segment des études, de nouvelles sociétés dédiées à la modélisation atmosphérique se sont développées comme Aria Technologies, Numtech, MeteoDyn, Météo Stratégie ou GlobeOcean (météorologie marine).

Deux tendances principales caractérisent l’évolution du comportement et des attentes des clients, quel que soit le secteur concerné. La première est la banalisation de l’information de base et la recherche de solutions innovantes intégrant une expertise propre au client ; ce mouvement est renforcé par une pression concurrentielle croissante et la diversification des supports d’information. La seconde est l’intérêt croissant pour des solutions de mobilité, induit par un usage diversifié des moyens de diffusion et des supports de communication.

Les recettes commerciales de Météo-France issues de sa clientèle professionnelle se sont élevées à 20,2 millions d'euros en 2013 et représentent désormais plus de 50 % du chiffre d’affaires total de l’établissement. À l’intérieur de cette composante, la situation des différents secteurs apparaît très contrastée :

– comme partout en Europe, le secteur des médias est le premier marché pour les prestataires de service d’information météorologique, mais c’est aussi le plus mature et le plus soumis à la concurrence : on rappellera, à ce propos, que France Télévisions s’approvisionne, pour ses antennes nationales, auprès d’un fournisseur différent depuis le début de l’année 2014. Dans ce contexte, Météo-France anticipe une décroissance en valeur de ses ventes ;

– le secteur de l’énergie est fortement « météo-sensible » dans toutes ses composantes (production, transport, distribution, consommation, trading, off-shore pétrolier, réseaux de chauffage et de climatisation, etc.) et cet aspect est appelé à se renforcer avec la montée en puissance des énergies renouvelables. Il s’agit d’une clientèle prioritaire pour Météo-France et l’opérateur prévoit donc, dans les prochaines années, d’enrichir régulièrement la liste des prestations qu’il propose ;

– les assureurs utilisent traditionnellement les produits de Météo-France à des fins de vérification. Plus récemment, est apparue la tendance à intégrer la prévision météorologique dans les politiques de prévention, afin de peser sur le coût des sinistres et d’apporter un service supplémentaire aux assurés. L’opérateur considère que ces pratiques se développeront encore dans les années à venir ;

– des contrats-cadres ont été mis en place, au cours des dernières années, avec les grands groupes du bâtiment et des travaux publics, ainsi que des services Internet spécialisés pour les PME du secteur. Même s’il existerait encore une marge de progression vers les nombreuses filiales géographiques et thématiques des grands opérateurs, l’érosion du chiffre d’affaires de Météo France constatée en 2013 sur ce segment économique devrait se poursuivre en 2014, du fait de la crise du secteur ;

– les gestionnaires de réseaux routiers et autoroutiers font partie des grands utilisateurs de services d’information météorologique, en particulier pour la viabilité hivernale. L’offre de Météo-France a déjà beaucoup évolué et devrait continuer de le faire, en allant vers des outils d’aide à la décision ;

– dans le secteur de l’agriculture, Météo-France a mis en place des partenariats avec des acteurs techniques du domaine, afin d’apporter des solutions de services intégrés aux utilisateurs.

● Perspectives 2014 et 2015. — Le contexte de déclin accentué des services téléphoniques (avec des conditions météorologiques peu favorables en début d’année) et de forte concurrence sur le marché des professionnels devrait rendre difficile l’atteinte de l’objectif de recettes commerciales initialement fixé, soit 35 millions d'euros pour l’exercice 2014. Ce contexte amène aussi à envisager avec beaucoup de prudence les années suivantes avec, en particulier, une nouvelle baisse attendue des recettes commerciales en 2015.

● Contenu et mise en œuvre du COP 2012-2016. — La préparation du contrat d’objectifs et de performance (COP) entre l’État et l’établissement public couvrant la période 2012-2016 a été l’occasion de passer en revue la stratégie générale du programme et d’identifier les objectifs à poursuivre dans un contexte où la demande de la puissance publique en matière de météorologie va croissant. Les orientations stratégiques définies par l’État pour Météo-France dans le cadre de ce COP 2012-1016 sont notamment les suivantes :

– mettre l’accent sur les missions de sécurité pour améliorer encore l’appui à la puissance publique, en particulier dans les domaines de la prévention, de l’anticipation et de la gestion des risques et dans celui du soutien aux forces armées ;

– être un prestataire de référence dans le Ciel unique européen en renforçant la compétitivité économique des services rendus et en accroissant leur pertinence et leur performance grâce à un programme de recherche et développement spécifique ;

– développer les services climatiques pour répondre aux besoins des politiques d’adaptation au changement climatique ;

– assurer la qualité scientifique, technique et opérationnelle en renforçant la place de la recherche et de l’innovation et en les plaçant au cœur de la stratégie ;

– mener une politique d’investissement pour disposer d’infrastructures (observation, système d’information) de qualité, gage d’efficacité et de fiabilité des prévisions.

Ces orientations impliquent de mettre à niveau ou de renforcer les infrastructures tant dans le domaine de l’observation que des systèmes d’information, et de moderniser certains moyens cruciaux comme les radars du réseau national, qui sont une des bases pour les actions engagées dans le cadre du plan national sur les submersions rapides. Elles imposent aussi de progresser sur la prévision numérique et d’en faire bénéficier tous les usagers en développant à la fois la prévision probabiliste qui permet de mieux apprécier les incertitudes, et les modèles à maille fine pour l’aéronautique et la sécurité des personnes. (22) Elles requièrent enfin de développer les services climatiques pour proposer aux divers acteurs des scenarii régionalisés à même de les guider dans leurs choix d’aménagement ou d’investissement.

Les bilans intermédiaires effectués début 2013 et début 2014 ont souligné le respect global du plan de marche fixé par le contrat et ont confirmé la pertinence des orientations assignées pour les prochaines années.

● La réorganisation territoriale de Météo-France. — Le COP 2012-2016 mentionne également la nécessité de réussir la réforme de l’organisation territoriale de l’établissement, en réduisant son réseau territorial pour déboucher sur un mode d’organisation plus efficace et concentrer les moyens au sein d’entités dotées d’une taille critique.

Il faut ici rappeler que, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques et à la suite d’un audit des services réalisé en 2007, le Conseil de modernisation des politiques publiques s’était prononcé en faveur d’un « allègement progressif des implantations départementales [de Météo-France] compte tenu des évolutions technologiques, qui ne rendent plus aussi utile un maillage très fin ». Les contrats d’objectifs et de performance successifs (2009-2011, 2012-2016) ont intégré cette demande, tout en tenant compte :

– des contraintes techniques liées à l’exercice des missions de l’établissement (missions de sécurité des personnes et des biens au service de la sécurité civile, nécessités de gestion du réseau d’observation, suivi climatologique, particularités météorologiques locales) ;

– des contraintes sociales liées à la mise en œuvre de cette réforme, qui suppose une importante mobilité fonctionnelle et géographique des agents.

Une analyse a tout d’abord été conduite en 2009 dans chaque direction interrégionale, afin de déterminer comment mener au mieux la réorganisation en fonction des particularités de chaque implantation. Les critères pris en compte ont été, d’une part, des éléments techniques relatifs à l’activité de chaque centre et à la reprise de ses activités après fermeture du centre, et, d’autre part, les contraintes de mobilité pour les agents concernés par la fermeture.

Les fermetures ont commencé en 2012 et doivent se poursuivre jusqu’en 2016, avec un réseau territorial cible constitué de 55 implantations métropolitaines (contre 108 implantations avant la réforme). En dépit de ce resserrement du réseau, Météo-France conservera le réseau territorial le plus dense parmi ses homologues européens, qui ont tous déjà effectué des évolutions dans ce sens. (23)

Pour la période 2014-2016, trois listes ont été définies – comprenant respectivement 6 centres (2014), 8 centres (2015) et 6 centres et 2 stations (2016). Les procédures de concertation sont aujourd’hui achevées et les arrêtés fixant la liste des unités restructurées pour lesquelles est ouverte la prime de restructuration de service ont été publiés (fermetures 2014 et 2015) ou sont en cours de signature (fermetures envisagées en 2016).

En matière sociale, un examen approfondi des situations individuelles du personnel a été mené. Un projet dénommé « Accompagnement individuel de la réorganisation territoriale » a été mis en place dès avril 2009 au sein de l’établissement. Les premières étapes ont consisté en la réalisation d’entretiens individuels en 2009 et 2010, qui ont permis de disposer de la meilleure appréciation possible des contraintes pesant sur les agents concernés par les fermetures de centres. Ces entretiens ont été poursuivis depuis lors, afin d’apporter au personnel tous les éléments d’information nécessaires et de construire avec chaque agent un nouveau parcours professionnel. Les services du ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie ont indiqué à votre rapporteur pour avis qu’à l’été 2014, la totalité des agents concernés par les fermetures 2012, 2013 et 2014 ont pu trouver une solution acceptable et près de la moitié des agents des centres fermant en 2015 et 2016 disposent déjà de solutions – en dépit de la contestation du processus global de réorganisation par les représentants du personnel.

Ce resserrement du réseau territorial dans des centres de plus grande taille critique s’accompagne de la mise en place d’une nouvelle organisation de la prévision météorologique selon deux niveaux (national et interrégional) – et non trois comme précédemment : le troisième niveau (échelon territorial) aura ainsi vocation à se concentrer sur la prévision-conseil répondant aux besoins des utilisateurs.

EXAMEN EN COMMISSION

Dans le cadre de la commission élargie, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné pour avis, sur les rapports pour avis de MM. Jacques Krabal, Michel Lesage, François-Michel Lambert, Guillaume Chevrollier, Rémi Pauvros, Jacques Alain Bénisti et Jean-Christophe Fromantin, les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (voir compte rendu officiel de la commission élargie du jeudi 6 novembre  2014, sur le site Internet de l’Assemblée nationale) (24).

*

* *

À l’issue de la commission élargie, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a délibéré sur les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Le Président Jean-Paul Chanteguet. Nous en venons à l’examen par notre commission des crédits demandés au titre de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Je rappelle que MM. Jacques Krabal, Michel Lesage, François-Michel Lambert et Rémi Pauvros, émettent un avis favorable, que MM. Guillaume Chevrollier et Jacques Alain Bénisti émettent quant à eux un avis défavorable à l’adoption des crédits et que M. Jean-Christophe Fromantin propose de s’abstenir.

La commission a alors donné un avis favorable à l’adoption des crédits relatifs à la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Commissariat général au développement durable (CGDD)

© Assemblée nationale