N° 1383 - Rapport de M. Laurent Marcangeli sur la proposition de loi de M. Laurent Marcangeli et plusieurs de ses collègues sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports maritimes (809)




N
° 1383

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 septembre 2013

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports maritimes (n° 809)

PAR M. Laurent MARCANGELI

Député

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Voir le numéro : 809.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

TRAVAUX DE LA COMMISSION 7

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 7

II. EXAMEN DES ARTICLES 13

Article 1er : Accord de prévention des conflits 13

Article 2 (articles L. 1115-1 à L. 1115-12 du code des transports) : Dessertes prioritaires et prévisibilité du service 15

INTRODUCTION

Votée par la précédente majorité à l’initiative du Gouvernement de François Fillon, la loi du 21 août 2007 a permis d’assurer la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, essentiellement donc dans le transport ferroviaire, en cas de grève ou de perturbation prévisible. Cette continuité a été étendue au secteur aérien par la loi Diard du 19 mars 2012.

Le dispositif, communément – quoiqu’imparfaitement – désigné sous l’expression de « service minimum », consiste en un ensemble de dispositions du code des transports permettant aux entreprises de définir un plan de transport adapté aux moyens humains dont elles disposent et de renforcer le droit d’information des usagers. Ceci se traduit notamment par l’obligation pour les personnels de se déclarer grévistes quarante-huit heures à l’avance et de signifier la reprise du travail vingt-quatre heures auparavant, mais aussi par une prévention améliorée des conflits sociaux grâce à des accords-cadres liant employeurs et organisations syndicales représentatives des compagnies de transport de passagers.

En dépit des objections opposées lors des discussions parlementaires de ces deux textes, ce mécanisme a depuis prouvé son efficacité. Juste et proportionné, il a permis d’assurer le respect des libertés d’aller et venir et de travailler des usagers sans toutefois porter substantiellement atteinte au droit de grève des salariés ou des agents. On rappellera, pour mémoire, que le service public est gouverné traditionnellement par trois principes fondamentaux que sont l’égalité, l’adaptabilité et la continuité. L’action du Parlement au cours de la XIIIe Législature a précisément renforcé le respect de cet impératif de continuité sans lequel le bon fonctionnement de l’État, la bonne marche des institutions et, finalement, la cohésion nationale, ne peuvent durablement perdurer.

On peut toutefois regretter que l’évolution du droit, très attendue dans le secteur ferroviaire et précipitée par les grèves aéroportuaires de 2011 dans l’activité aérienne, soit demeurée « à l’ancre » pour ce qui concerne le transport maritime de passagers. Celui-ci est pourtant fondamentalement de même nature que les précédents, puisqu’il permet à des citoyens de la République française résidant sur des territoires insulaires de rallier le continent pour y exercer leur profession, y conclure leurs affaires ou profiter de leurs vacances, puisqu’il offre aux habitants du continent la possibilité de découvrir et d’apprécier les richesses des îles océaniques et méditerranéennes.

Or la desserte de certaines îles est fréquemment interrompue par des mouvements sociaux, certes parfaitement légitimes, mais qui se produisent dans un cadre juridique insuffisamment protecteur des intérêts des usagers. Irritante pour les individus, cette situation grève lourdement l’image et l’économie de territoires qui peuvent ainsi se trouver, du jour au lendemain et sans mode de déplacement alternatif, coupés du continent. Les professionnels et les acteurs de la vie économique locale ne manquent pas de s’émouvoir de ce sort, regrettant l’impuissance des pouvoirs publics à garantir à chacun la liberté d’aller et venir.

Ce déplorable état de fait a connu une publicité dans le monde entier lorsque les amateurs de sport de toutes les nations virent l’édition 2013 du Tour de France cycliste, dont le départ devait être donné à Porto-Vecchio, menacée par un préavis de grève opportunément déposé peu avant la date fatidique par les organisations syndicales de transport maritime de passagers assurant la liaison entre la Corse et le continent. Il est certain que cet épisode, largement médiatisé de par le prestige de l’événement menacé, aura causé un préjudice économique qui reste à chiffrer.

L’objet de ce texte n’est en rien de faire obstacle à l’exercice légitime du droit de grève dans les entreprises. Cet exercice est simplement soumis à une obligation d’information préalable de l’employeur, qui permet à ce dernier de prévoir une organisation adaptée de l’activité du transport aérien et d’informer lui-même à l’avance un autre intervenant essentiel, le passager. C’est le respect dû à celui-ci qui inspire ainsi votre Rapporteur, comme il avait précédemment, du reste, déterminé les votes des parlementaires pour les lois de 2007 et 2012. La grève donc reste possible, mais l’activité assurée doit demeurer prévisible pour l’usager. En outre, la collectivité territoriale compétente définit des dessertes prioritaires correspondant aux besoins identifiés de la population.

Les résidents des territoires insulaires de la République ne sont pas des sous-citoyens parce qu’ils sont séparés par un bras de mer, quand d’autres le sont par le cours d’un fleuve ou par une chaîne de montagne. Pour ceux-ci, le droit français prévoit un service minimum dans les transports terrestres et aériens ; pour ceux-là, il tolère que la liberté d’aller et venir soit vidée de sa substance. Mettre un terme à cette violation conjointe des principes de continuité et d’égalité devant le service public apparaît comme une décision de bon sens et, plus encore, comme une obligation morale des représentants de la nation envers leurs mandants.

Il est donc non seulement souhaitable, mais encore nécessaire et urgent, de souscrire à cette proposition de loi.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné, le mercredi 18 septembre, la proposition de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports maritimes (n° 809).

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la Commission. Notre commission est saisie au fond de la proposition de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports maritimes, dont le groupe UMP a demandé l’inscription à l’ordre du jour de la séance publique le jeudi 3 octobre.

Nous devons tout d’abord désigner le rapporteur du texte. M. Laurent Marcangeli, qui vient de s’inscrire à notre Commission, s’est porté candidat, et je vous propose de le désigner.

La Commission nomme M. Laurent Marcangeli rapporteur.

Elle examine la proposition de loi n° 809, de M. Laurent Marcangeli, sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports maritimes.

M. le président Chanteguet. À l’expiration du délai de dépôt des amendements, lundi 16 septembre à neuf heures trente, aucun amendement n’avait été déposé.

M. Laurent Marcangeli, rapporteur. Je vous remercie de m’accueillir aujourd’hui au sein de votre commission dont je serai membre très brièvement puisque je suis d’ordinaire membre de la commission des affaires sociales. Je suis heureux de défendre cette proposition de loi dont le thème est particulièrement cher aux centaines de milliers d’insulaires que compte notre pays et dont je fais partie.

Le texte que j’ai déposé en mars dernier sur le bureau de l’Assemblée nationale porte sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports maritimes. Vous l’avez peut-être remarqué, il n’est que la déclinaison sectorielle de deux lois votées au cours de la précédente législature. La loi du 21 août 2007 a permis d’assurer la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, essentiellement donc dans le transport ferroviaire. Cette continuité a été étendue au secteur aérien par la loi Diard du 19 mars 2012.

L’opposition d’alors avait voté contre ces deux textes. Elle y avait vu une atteinte insupportable au droit de grève, une violation de la liberté contractuelle, une infraction directe aux droits sociaux garantis par la Constitution. Elle dénonçait l’aménagement de la continuité des services de transports, qu’elle estimait juridiquement contestable et politiquement injuste, au point d’en saisir le Conseil constitutionnel.

Je m’adresse aujourd’hui à cette ancienne opposition devenue majorité pour lui dire que les arguments d’hier ne sont plus recevables.

En effet, le Conseil constitutionnel, saisi de chacune des deux lois de 2007 et de 2012, a validé l’intégralité des dispositions adoptées par le Parlement – pas une virgule n’a été censurée, pas un mot n’a été retiré. Réglementer la continuité des services de transport est parfaitement conforme à la Constitution.

Mais si quelqu’un a complètement disqualifié les objections de l’opposition d’alors, mes chers collègues, c’est bien la majorité d’aujourd’hui.

Cette commission a examiné, au printemps dernier, deux textes relatifs au secteur des transports. Il y a eu la loi du 28 mai 2013 portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports, et la loi du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable. Si la réglementation adoptée en 2007 pour le rail et en 2012 pour l’aérien était si injuste, deux belles occasions de l’abolir se sont présentées coup sur coup à la majorité et au Gouvernement. Or, le ministre délégué aux transports n’en a pas éprouvé le besoin, non plus qu’aucun de nos collègues.

C’est la meilleure preuve de la valeur de ces dispositions destinées à faciliter la vie des passagers sans obérer le droit de grève des personnels. Elles ont résisté à l’alternance et sont admises comme pertinentes, dorénavant, sur tous les bancs de l’hémicycle ainsi que dans le pays. Nous pouvons tous nous en féliciter car la France en sort renforcée.

J’en viens à la proposition d’étendre au transport maritime les dispositions en vigueur pour le ferroviaire et l’aérien. L’accord de prévention des conflits, l’information des usagers, les dessertes prioritaires en cas de mouvement social deviendraient applicables aux liaisons par bateau.

Mes chers collègues, je vous conjure de ne pas refuser au transport maritime ce que vous avez accepté pour le rail et l’aérien.

En droit, les parlementaires de gauche s’étaient opposés à la proposition de loi sur le transport aérien au motif qu’il s’agissait d’un service très majoritairement privé, sur lequel ne s’exerçaient guère d’obligations de service public justifiant un encadrement particulier du droit de grève. Je suis juriste de formation et, en toute bonne foi, c’était un argument qui pouvait s’entendre.

Mais ce n’est pas le cas ici : le présent texte ne concerne ni les croisiéristes ni les circuits internationaux. Le dispositif est limité aux îles du territoire national et européen dont la desserte justifie des obligations de service public. Cela figure dans le droit positif, à l’article L 5431-2 du code des transports et à l’article L 4424-19 du code général des collectivités territoriales. La collectivité compétente, en général le département mais pas toujours, peut « fixer des obligations de service public concernant les ports à desservir, la régularité, la continuité, la fréquence, la capacité à offrir le service et la tarification pour les services réguliers à destination des îles ou entre îles ». Cette prérogative particulière se double de financements spécifiques, engageant la solidarité de la nation, au titre du principe de continuité territoriale. Nous y sommes, je pense, tous attachés.

Voilà pour l’argument de droit. Mais je veux faire valoir aussi un argument de fait. Le territoire métropolitain s’est doté de règles, dont chacun se trouve satisfait, pour assurer que le train, le RER, l’avion se présentent à l’heure dite pour desservir des sites prioritaires. À défaut, il restait toujours des modes de déplacement alternatifs : l’automobile, le vélo, le covoiturage, l’avion en cas de grève ferroviaire, le train en cas de grève aérienne.

Mais l’habitant d’un territoire insulaire, si la liaison maritime est coupée, que peut-il faire ? Aucune voie ferrée, aucune route ne peut le mener sur le continent. S’il habite sur une île de taille suffisamment importante pour accueillir un aéroport, il pourra se déplacer par avion, moyennant un coût supérieur et, puisque nous sommes en commission du développement durable, un coût carbone faramineux. S’il réside sur une île de petite taille, que lui recommandez-vous : la brasse, le dos crawlé, le pédalo ?

Mes chers collègues, c’est précisément à la situation insulaire, celle dans laquelle la liberté d’aller et venir des citoyens est la plus précaire, que notre réglementation s’abstient de répondre aujourd’hui. Il est urgent de combler cette lacune pour remettre ces Français à égalité avec les autres, pour leur rendre la possibilité de se déplacer à leur guise.

La démarche des cosignataires du présent texte n’est pas punitive ; ils se sont bornés à transposer le droit existant. La loi n’intervient qu’en dernier ressort, en cas d’échec de la négociation d’entreprise, pour laisser un maximum d’espace à la démocratie sociale avant d’édicter des prescriptions impératives. En tant que rapporteur, je suis ouvert à tous les amendements – mais il n’y en a pas. En effet, rien ne serait pire, aucun signal ne serait plus déplorable en direction des territoires insulaires qu’un rejet franc et massif exprimé par une Assemblée dont la majorité des membres, j’en suis bien conscient, n’ont aucun problème d’ordre maritime dans leur circonscription.

Mes chers collègues, nous sommes députés de la nation. Il faut mettre un terme à une situation juridique qui affaiblit l’économie et la qualité de vie des territoires insulaires, grâce à un dispositif qui n’est rien d’autre que le droit commun.

M. Arnaud Leroy. Vous avez fait référence, monsieur le rapporteur, aux textes votés sous l’ancienne majorité. Je rappelle que certains élus, à l’époque, avaient déposé des amendements allant dans le même sens que la présente proposition de loi : ils avaient alors été rejetés.

Un premier point heurte les députés du groupe SRC : ce texte paraît dirigé contre la Société nationale Corse Méditerranée (SNCM). Par ailleurs, on a constaté, ces dernières années, une très forte accalmie des conflits sociaux dans les compagnies maritimes françaises : cela fait douter de l’utilité du dispositif proposé. Un accord de prévention des conflits a été signé en novembre 2012, et une convention de délégation de service public inclut en son article 22 la possibilité, justement, d’organiser un service minimum. Nous disposons donc des outils nécessaires au dialogue social et cette proposition de loi semble superfétatoire.

M. Jean-Marie Sermier. L’excellent travail de M. Laurent Marcangeli pose bien le problème. Et puisque nous examinons ce texte dans un climat apaisé, monsieur Leroy, chiche ! C’est justement parce que nous vivons une période calme que nous pouvons sereinement prendre des mesures à même de la faire durer. Si nous étions au cœur d’un conflit, on nous reprocherait de présenter un texte de circonstance.

Le groupe UMP soutient fermement cette proposition de loi, qui se situe dans la droite ligne des deux projets adoptés par la précédente majorité. Le présent texte étend le dispositif aux transports maritimes dans un souci d’équité entre les différents modes de transport et de compréhension vis-à-vis des insulaires dépendants de leur capacité de prendre ou non le bateau.

La proposition de loi vise trois objectifs : la mise en place d’un mécanisme de prévention des conflits, inspiré des lois précédentes ; la mise en place d’un parcours de desserte prioritaire avec des plages horaires ; enfin l’obligation pour le personnel de déclarer individuellement sa participation à un mouvement de grève.

Ce dispositif préserve à la fois le droit du travail de ceux qui ont besoin de prendre le bateau pour aller travailler, et le droit de grève de ceux qui souhaitent manifester leur mécontentement.

Voilà donc une véritable avancée pour le transport maritime, tout comme l’instauration du même dispositif l’avait été pour les transports terrestres et aériens. Nous espérons que la majorité des députés, au-delà de l’appartenance à tel ou tel parti, reconnaîtra l’utilité de cette proposition de la loi en la votant très sereinement.

M. le rapporteur. Deux points. D’abord, cher collègue Arnaud Leroy, en ce qui concerne la précédente législature, je regrette que ma famille politique ait rejeté alors certains amendements de l’opposition. Peut-être faudra-t-il ajouter ce léger manquement à l’inventaire dont on parle tant (Sourires). Ensuite, je m’inscris en faux contre l’idée que le texte serait dirigé contre la SNCM : il a pour seul objectif de protéger les usagers, d’encadrer le droit de grève et de promouvoir le dialogue social.

Vous soutenez que, dans un contexte d’accalmie sociale, cette proposition de loi n’est pas essentielle. Mais il n’est jamais trop tôt pour prendre une bonne décision et le moment me paraît venu – nous aurons l’occasion d’en débattre de façon plus complète en séance publique.

La Commission en vient à l’examen des articles.

Article 1er
Accord de prévention des conflits

L’article 1er se compose de dix alinéas non codifiés. Il prévoit qu’un accord de prévention des conflits doit être négocié dans les services publics de transport maritime dans un délai d’un an après la promulgation de la loi. À défaut, un décret en Conseil d’État fixerait la procédure applicable dans les entreprises.

Ces dix alinéas, répartis en deux paragraphes, reprennent la rédaction de deux dispositions adoptées à l’occasion des précédentes lois relatives à l’encadrement des mouvements sociaux dans le domaine des transports de passagers : l’article 2 de la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, et une partie de l’article 2 de la loi n° 2012-375 du 19 mars 2012 relative à l’organisation du service et à l’information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers et à diverses dispositions dans le domaine des transports (devenu l’article L. 1114-2 du code des transports). Leur objectif est d’organiser la négociation d’accords-cadres qui peuvent être engagés entre les employeurs et les organisations syndicales représentatives, ici dans les services publics de transports maritimes réguliers de personnes et de biens pour la desserte des îles visés à l’article L. 5431-1 du code des transports (1), afin de faire émerger une procédure de prévention des conflits sociaux.

En application de tels accords, l’exercice du droit de grève et le dépôt d’un préavis en ce sens ne peut intervenir qu’au terme d’une négociation préalable entre employeurs et organisations syndicales représentatives.

Le paragraphe II dénombre sept éléments contenus dans les accords-cadres :

– les conditions de la notification à l’employeur par une organisation syndicale représentative des motifs pour lesquels elle envisage de déposer un préavis de grève ;

– le délai, qui ne peut excéder trois jours, dans lequel l’employeur doit réunir les organisations syndicales représentatives auteurs de la notification ;

– la durée dont disposent ensuite l’employeur et les organisations syndicales ayant procédé à la notification, pour mener une négociation préalable à l’exercice du droit de grève, cette durée ne pouvant elle-même être supérieure à huit jours francs ;

– les informations que l’employeur doit réunir, en vue de favoriser la réussite de la négociation préalable et le délai dans lequel ces informations doivent être transmises ;

– les conditions dans lesquelles s’effectue la négociation préalable ;

– les modalités d’élaboration du relevé de conclusions de la négociation préalable et les informations qui y sont liées ;

– les conditions dans lesquelles les salariés sont informés des motifs du conflit, de la position des parties à la négociation préalable, ainsi que les conditions dans lesquelles les salariés reçoivent communication du relevé de conclusions de la négociation préalable.

Ces dispositions, qui visent à ménager un espace à la négociation pour prévenir les mouvements de grève, se révèlent plus proches de celles de la loi du 21 août 2007 que du texte du 19 mars 2012.

En effet, contrairement aux prescriptions applicables au secteur aérien qui prévoient que l’employeur et les organisations syndicales représentatives peuvent engager des négociations en vue de la signature d’un accord-cadre organisant une procédure de prévention des conflits – dispositif par conséquent facultatif –, la proposition de loi ordonne, comme la loi sur les transports terrestres de voyageurs, un engagement obligatoire de négociations. Les discussions se tiennent pendant une année au terme de laquelle, en cas d’échec, le pouvoir réglementaire acquiert la compétence d’édicter les règles applicables par décret en Conseil d’État.

Ce choix de la version la plus comminatoire s’explique par la nature des activités en cause : services publics souvent pour les transports maritimes et terrestres, activité concurrentielle de marché pour le secteur aérien. La proposition de loi fait, ainsi, explicitement référence au préavis de grève de l’article L. 2512-2 du code du travail, applicable aux agents publics, et non à un simple exercice du droit de grève tel qu’il se rencontre dans les entreprises privées.

Votre Rapporteur soutient fortement l’idée selon laquelle il appartient à l’État d’organiser des espaces de négociation au sein des entreprises exerçant des missions de service public, afin que la grève cesse de représenter l’expression principale et immédiate de l’activité syndicale. Une fenêtre d’opportunité est ouverte aux partenaires sociaux pour en fixer les modalités dans la concertation, tandis que le pouvoir réglementaire n’intervient qu’à titre subsidiaire et en cas d’échec. Il recommande, par conséquent, l’adoption de l’article 1er.

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En dépit d’un avis favorable du Rapporteur, la Commission rejette l’article 1er.

Article 2
(articles L. 1115-1 à L. 1115-12 du code des transports)

Dessertes prioritaires et prévisibilité du service

L’article 2 de la proposition de loi, composé de trente-deux alinéas, insère un nouveau chapitre V au titre Ier du livre Ier de la première partie du code des transports. Celui serait formé de douze articles successivement numérotés de L. 1115-1 à L. 1115-12.

Le nouvel article L. 1115-1 indique que les dispositions envisagées ne sont applicables qu’aux services publics de transports maritimes réguliers de personnes et de biens pour la desserte des îles visés à l’article L. 5431-1.

Le nouvel article L. 1115-2 tire les conséquences de l’organisation particulière du transport maritime régulier de personnes et de biens pour la desserte des îles, confié à une collectivité territoriale – en principe le département. Cette collectivité territoriale organisatrice de transport a compétence pour définir les dessertes prioritaires en cas de perturbation prévisible du trafic.

Le nouvel article L. 1115-3 précise le précédent : différents niveaux de service sont définis dans les dessertes prioritaires en fonction de l’importance de la perturbation. Il s’agit d’éviter l’attribution d’une priorité maximale à l’ensemble des sites, qui aboutirait à une négation du droit de grève dont bénéficient les agents. La jurisprudence du Conseil constitutionnel souligne, en effet, que les restrictions apportées à une liberté fondamentale sont toujours excessives lorsqu’elles acquièrent un caractère général et absolu, même si elles répondent à un objectif d’intérêt général. Le niveau minimal de service doit toutefois suffire à protéger, notamment, la liberté d’aller et venir et la liberté du commerce et de l’industrie. Il correspond à la couverture des besoins essentiels de la population et des besoins particuliers des personnes à mobilité réduite. Il doit également garantir l’accès au service public de l’enseignement les jours d’examens nationaux.

Le nouvel article L. 1115-4 transcrit pour le secteur maritime le II de l’article 4 de la loi du 21 août 2007. Il prévoit que la collectivité territoriale organisatrice, si elle exerce l’activité en régie, ou l’entreprise en cas de délégation du service public, élabore un plan de transport et un plan d’information des usagers. Le nouvel article L. 1115-5 intègre ces deux documents, le cas échéant, au contrat de service public conclu par la collectivité territoriale organisatrice avec l’entreprise de transport maritime, adaptant ainsi le III de l’article 4 de la loi du 21 août 2007. Quant au nouvel article L. 1115-6, comme le IV du même article de la loi du 21 août 2007, il prévoit que le représentant de l’État est tenu informé par la collectivité territoriale organisatrice de transport maritime de la définition des dessertes prioritaires et des niveaux de service attendus.

Les nouveaux articles L. 1115-7 et L. 1115-8 transposent dans le domaine maritime les dispositions de l’article 5 de la loi du 21 août 2007 qui sont relatives à l’accord collectif de prévisibilité du service applicable en cas de perturbation prévisible du trafic : ce document établit les affectations des personnels non-grévistes dans la perspective d’un service minimum desservant les sites prioritaires préalablement identifiés. En cas de grève, les personnels assujettis informent le chef d’entreprise, au plus tard quarante-huit heures avant de participer à la grève, de leur intention de se joindre au mouvement social. Celui qui a déclaré son intention de participer et qui, finalement, renonce, communique sa décision à son employeur au plus tard vingt-quatre heures avant l’heure prévue. Le non-respect de cette obligation engage la responsabilité disciplinaire de l’agent, car il attente à la bonne planification des liaisons entre les dessertes prioritaires.

Les nouveaux articles L. 1115-9 et L. 1115-10 proclament un droit d’information des usagers et de la collectivité organisatrice sur le volume de service assuré en cas de perturbation du trafic. Cette information doit être gratuite, précise, fiable et effectuée dans les meilleurs délais – vingt-quatre heures avant le début de la perturbation pour le passager, immédiatement pour la collectivité. Il s’agit de la transcription de l’article 7 de la loi du 21 août 2007 et de l’article L. 1114-7 du code des transports créé par la loi du 19 mars 2012.

Le nouvel article L. 1115-11 sanctionne l’entreprise de transports en cas de défaut d’exécution dans la mise en œuvre du plan de transports adapté ou du plan d’information des usagers. Elle est contrainte, sur décision de la collectivité territoriale organisatrice de transports, au remboursement total des titres de transports aux usagers en fonction de la durée d’inexécution de ces plans. Cette disposition, qui correspond à l’article 9 de la loi du 21 août 2007, n’existe pas dans le secteur aérien en raison de l’absence d’obligation de service public pesant sur la grande majorité des transporteurs. Il en va de même du nouvel article L. 1115-12 selon lequel l’acquéreur d’un billet ou d’un abonnement correspondant à un service non accompli a droit à être remboursé des frais engagés.

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Contrairement à l’avis du Rapporteur, la Commission rejette l’article 2.

Le rejet des deux articles vaut rejet de l’ensemble de la proposition de loi.

© Assemblée nationale