N° 1732 - Rapport de M. Sébastien Pietrasanta sur le projet de loi , adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à la géolocalisation (n°1717)




N
° 1732

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 28 janvier 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET
DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI,
ADOPTÉ PAR LE SÉNAT APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLERÉE (n° 1717)

relatif à la
géolocalisation,

PAR M. SÉbastien PIETRASANTA

Député

——

Voir les numéros :

Sénat : 257, 284, 285 et T.A. 64 (2013-2014).

SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPAUX APPORTS DE LA COMMISSION 5

INTRODUCTION 7

I. UN RECOURS À LA GÉOLOCALISATION JUDICIAIRE AUJOURD’HUI TRÈS INCERTAIN, FAUTE DE CADRE JURIDIQUE SUFFISAMMENT PRÉCIS 8

A. UNE ABSENCE D’ENCADREMENT LÉGISLATIF DU RECOURS À LA GÉOLOCALISATION JUDICIAIRE… 8

B. … REMISE EN CAUSE PAR DEUX ARRÊTS RÉCENTS DE LA COUR DE CASSATION 9

II. AUTORISER LE RECOURS À LA GÉOLOCALISATION JUDICIAIRE, EN CONCILIANT LES NÉCESSITÉS DE L’ENQUÊTE ET LE RESPECT DE LA VIE PRIVÉE 12

A. LES DISPOSITIONS CONTENUES DANS LE PROJET DE LOI INITIAL 12

B. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR LE SÉNAT 14

C. LES AMÉLIORATIONS APPORTÉES PAR VOTRE COMMISSION 16

DISCUSSION GÉNÉRALE 19

EXAMEN DES ARTICLES 29

Article 1er(chapitre V [nouveau] du titre IV du livre Ier et art. 230-32 à 230-45 [nouveaux] du code de procédure pénale) : Définition des conditions et règles procédurales de recours par les officiers de police judiciaire à la géolocalisation en temps réel 29

Après l’article 1er 54

Article 2 (art. 67 bis-2 [nouveau] du code des douanes) : Extension aux agents des douanes des conditions et règles procédurales de recours à la géolocalisation en temps réel 57

Article 2 bis (article 706-161 du code de procédure pénale) : Participation de l’agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués au financement de la lutte contre la délinquance et la criminalité 59

Article 3 : Application outre-mer du projet de loi 61

TABLEAU COMPARATIF 63

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 73

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 83

PRINCIPAUX APPORTS DE LA COMMISSION

Au cours de sa réunion du mardi 28 janvier 2014, la commission des Lois a adopté le projet de loi (n° 1717) relatif à la géolocalisation, en lui apportant les principales modifications suivantes :

—  À l’article 1er, la commission des Lois a adopté, sur l’initiative conjointe de son rapporteur et de M. Hugues Fourage, des amendements identiques fixant à trois ans au moins, toutes infractions confondues, la durée minimale d’emprisonnement encouru pour ouvrir la possibilité de recourir aux opérations de géolocalisation en temps réel.

—  Tirant les conséquences, à ce même article, du rétablissement à trois ans de ce seuil d’emprisonnement, la Commission a réintroduit, sur l’initiative du rapporteur, la distinction entre les véhicules et parkings, dans lesquels il est possible de s’introduire pour un délit puni de trois ans de prison, et les autres lieux privés – qu’ils soient professionnels ou d’habitation –, lesquels nécessiteront pour pouvoir s’y introduire que l’enquête ou l’instruction porte sur un délit ou un crime puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement.

—  Sur l’initiative conjointe de son rapporteur et de M. Hugues Fourage, la Commission a également adopté, à l’article 1er, deux amendements identiques ramenant à quinze jours la durée initiale pendant laquelle une opération de géolocalisation peut être autorisée par le procureur de la République, avant d’être ensuite nécessairement soumise à une décision du juge des libertés et de la détention.

—  Sur proposition de M. Lionel Tardy, votre Commission a complété l’article 1er,afin de préciser que les agents susceptibles d’être requis pour l’installation des dispositifs techniques de géolocalisation pourront également l’être pour le retrait de ces mêmes dispositifs.

—  Toujours à l’article 1er, la Commission a adopté, sur proposition de son président, M. Jean-Jacques Urvoas, deux amendements. Alors que le premier vise à laisser à l’appréciation du juge des libertés et de la détention le soin de décider quelles informations non strictement nécessaires à la manifestation de la vérité peuvent ne pas apparaître dans la procédure, le second étend cette protection aux membres de la famille et aux proches des témoins ou des citoyens ayant apporté leur concours aux services d’investigations pour l’installation d’une balise.

—  Sur l’initiative de son rapporteur, la Commission a rétabli, à l’article 1er, une disposition supprimée par erreur au Sénat, précisant qu’en cas de contestation par la personne mise en cause du recours à la procédure dérogatoire du dossier distinct, le président de la chambre d’instruction statue par décision motivée – susceptible d’aucun recours – au vu des pièces de la procédure et de celles figurant dans ce dossier.

—  La Commission a également adopté des amendements de cohérence du rapporteur créant, au sein du code de procédure pénale, un nouvel article 230-45, lequel reprend, sans les modifier sur le fond, les dispositions figurant initialement à l’article 230-38 de ce même code, relatif à la géolocalisation des victimes et personnes disparues.

—  Sur l’initiative du président de la Commission, celle-ci a précisé, à l’article 2, que le recours à une opération de géolocalisation en temps réel par les agents spécialement habilités des douanes a pour seule finalité la « recherche et la constatation » d’un délit douanier – puni d’au moins trois ans d’emprisonnement –, réservant ainsi l’usage de cette technique par les douanes aux seules enquêtes de police judiciaire.

MESDAMES, MESSIEURS,

Votre Commission est aujourd’hui saisie, en première lecture après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif à la géolocalisation. Déposé par le Gouvernement le 23 décembre 2013, ce texte a été adopté par le Sénat en commission le 15 janvier 2014, puis en séance publique le 20 janvier dernier.

Il entend remédier à l’insécurité juridique provoquée par deux arrêts rendus, le 22 octobre 2013, par la chambre criminelle de la Cour de cassation, laquelle a invalidé les opérations de géolocalisation en temps réel réalisées sous le contrôle du procureur de la République, en considérant que ces opérations constituent une ingérence dans la vie privée, dont la gravité nécessite qu’elle soit exécutée sous le contrôle d’un juge.

Or, au terme d’une jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l’homme comme de la Cour de cassation, le ministère public n’est pas une « autorité judiciaire » présentant les garanties d’indépendance et d’impartialité requises à l’égard de l’exécutif comme des parties.

Dans ces conditions, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé que, si une mesure de géolocalisation en temps réel pouvait être mise en place sur autorisation et sous le contrôle du juge d’instruction – lequel est un magistrat du siège –, il en va autrement dans le cadre d’une enquête préliminaire ou de flagrance diligentée sous le contrôle du procureur de la République.

À la suite des arrêts du 22 octobre 2013 de la Cour de cassation, le ministère de la Justice a rédigé une dépêche demandant aux procureurs de la République de mettre fin à toutes les opérations de géolocalisation en temps réel menées par les forces de l’ordre dans le cadre des enquêtes, préliminaires ou de flagrance, conduites par le parquet.

L’arrêt soudain de ces opérations est d’autant plus dommageable que la géolocalisation constitue une technique d’enquête très fréquemment utilisée par les services de police, de gendarmerie et des douanes, en complément de la filature traditionnelle, afin de suivre en temps réel les déplacements d’un objet ou d’un véhicule détenu ou utilisé par une personne suspectée d’avoir participé à la commission d’infractions graves. Il est donc indispensable de répondre aux attentes des forces de l’ordre dans ce domaine.

Tel est l’objet du présent projet de loi, qui permettra la reprise rapide des opérations de géolocalisation dans un cadre juridique rénové, conciliant le respect de la vie privée et les nécessités de l’enquête.

Les articles 12 et 14 du code de procédure pénale définissent les missions de la police judiciaire. Ils prévoient, à ce titre, que celle-ci est, sous la direction et le contrôle du procureur de la République, chargée de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs.

L’article 41 du code de procédure pénale précise, à cet égard, que « le procureur de la République procède ou fait procéder à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions à la loi pénale. À cette fin, il dirige l’activité des officiers et agents de la police judiciaire dans le ressort de son tribunal ».

L’article 60-2 du code de procédure pénale dispose que, dans le cadre d’une enquête de flagrance, « sur demande de l’officier de police judiciaire, les organismes publics ou les personnes morales de droit privé (…) mettent à sa disposition les informations utiles à la manifestation de la vérité, à l’exception de celles protégées par un secret prévu par la loi, contenues dans le ou les systèmes informatiques ou traitements de données nominatives qu’ils administrent ».

L’article 77-1-1 du même code prévoit, pour sa part, qu’au stade de l’enquête préliminaire, « le procureur de la République ou, sur autorisation de celui-ci, l’officier de police judiciaire peuvent, par tout moyen, requérir de toute personne […] susceptible de détenir des documents intéressant l’enquête, y compris ceux issus d’un système informatique ou d’un traitement de données nominatives, de lui remettre ces documents ».

C’est sur le fondement de ces dispositions législatives que certains magistrats du parquet ont autorisé, sous leur contrôle, les officiers de police judiciaire à recourir, dans le cadre d’enquêtes préliminaires ou de flagrance, à un dispositif de géolocalisation.

Pour autant, aucune disposition législative ne définit aujourd’hui expressément le cadre juridique dans lequel il peut être recouru à cette technique, si bien que la question de sa validité a été posée aux différents stades de la procédure pénale, en ce qu’elle est susceptible de constituer une ingérence dans la vie privée de la personne soupçonnée d’avoir commis une infraction.

La Cour européenne des droits de l’homme (1) a indiqué, dans un arrêt Uzun contre Allemagne rendu en 2010, que le procédé de la géolocalisation ne méconnaissait pas en lui-même le droit au respect de la vie privée – lequel est garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme –, à condition cependant que la mesure de surveillance judiciaire par géolocalisation respecte deux conditions cumulatives :

—  elle ne peut être autorisée que pour des infractions particulièrement graves et uniquement si aucune autre mesure d’investigation, moins attentatoire à la liberté individuelle, n’est envisageable ;

—  elle doit être prévue par la loi, dans des termes suffisamment clairs pour indiquer à tous de manière suffisante en quelles circonstances et sous quelles conditions l’autorité publique est habilitée à y recourir.

Alors qu’aucune disposition législative particulière n’encadre aujourd’hui le recours à la géolocalisation en temps réel, la chambre criminelle de la Cour de cassation a été amenée à se prononcer sur la conformité de cette technique aux exigences posées par la Cour européenne des droits de l’homme en matière de protection du droit au respect de la vie privée.

En effet, les dispositions générales du code de procédure pénale relatives à la police judiciaire et au procureur de la République (2), qui sont aujourd’hui utilisées pour justifier le recours à la géolocalisation au cours d’une enquête préliminaire ou de flagrance, ont été remises en cause au double motif :

—  que ces dispositions ne prévoyaient ni les circonstances ni les conditions dans lesquelles une mesure de surveillance judiciaire par géolocalisation pouvait être mise en place ;

—  que la mesure en question était placée sous le seul contrôle du procureur de la République, lequel n’est pas « autorité judiciaire » au sens que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme donne à cette notion, en raison de ce qui serait son manque d’indépendance à l’égard du pouvoir exécutif et des parties.

Dans deux arrêts rendus le 22 octobre 2013, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé que, si une mesure de géolocalisation en temps réel d’un téléphone mobile pouvait être mise en place sur autorisation et sous le contrôle du juge d’instruction – lequel est un magistrat du siège –, il en va autrement dans le cadre d’une enquête préliminaire diligentée sous le contrôle du procureur de la République – celui-ci étant un magistrat du parquet –, dans la mesure où une telle technique constitue une ingérence dans la vie privée dont la gravité nécessite qu’elle soit exécutée sous le contrôle d’un juge.

Dans les deux affaires dont la Cour de cassation était saisie en octobre 2013, une enquête préliminaire avait été ouverte, pour l’une, du chef d’association de malfaiteurs en vue de la préparation d’actes de terrorisme, pour l’autre, du chef de trafic de stupéfiants. Dans ce cadre, les officiers de police judiciaire, autorisés par le procureur de la République, avaient adressé à des opérateurs de téléphonie des demandes de localisation géographique en temps réel des téléphones mobiles utilisés par les individus mis en cause. Dans la première des deux affaires, à la suite de l’ouverture d’une information judiciaire, le juge d’instruction avait fait procéder, par commission rogatoire, à de nouvelles mesures de géolocalisation des téléphones mobiles.

Les personnes mises en cause dans ces deux affaires avaient cependant présenté, devant la chambre de l’instruction, une requête aux fins d’annulation des mesures prévoyant leur géolocalisation et des actes subséquents, au motif du défaut de fondement légal de la mise en place d’un tel dispositif, tant au stade de l’enquête préliminaire qu’au stade de l’instruction préparatoire.

Alors que la chambre de l’instruction avait rejeté ces deux requêtes en nullité, la chambre criminelle de la Cour de cassation a adopté, pour sa part, une position plus nuancée. Elle a ainsi rappelé qu’au regard de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (3), la technique de la géolocalisation constituait une ingérence dans la vie privée dont la gravité nécessitait qu’elle soit exécutée sous le contrôle d’un juge.

Tirant les conséquences de ce postulat, la chambre criminelle de la Cour de cassation a estimé qu’au stade de l’information judiciaire, au cours de laquelle la surveillance judiciaire par géolocalisation est autorisée et effectuée sous le contrôle d’un magistrat du siège – en l’espèce un juge d’instruction –, répondait aux exigences de prévisibilité et d’accessibilité de la loi et se révélait, de surcroît, proportionnée au but poursuivi, eu égard à la gravité des faits dont le magistrat instructeur était saisi. Ainsi, l’article 81 du code de procédure pénale peut servir de fondement légal à une mesure de surveillance judiciaire par géolocalisation, pratiquée en exécution d’une commission rogatoire donnée par le juge d’instruction aux officiers de police judiciaire. Une telle solution n’est d’ailleurs pas inédite, la chambre criminelle ayant déjà eu l’occasion de juger en ce sens par le passé (4).

En revanche, la chambre criminelle de la Cour de cassation a considéré qu’une mesure de géolocalisation en temps réel ne pouvait être autorisée par le seul procureur de la République au stade de l’enquête préliminaire ou de flagrance, puisqu’au terme de la jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l’homme comme de la chambre criminelle de la Cour de cassation, le ministère public n’est pas une « autorité judiciaire » présentant les garanties d’indépendance et d’impartialité requises à l’égard de l’exécutif comme des parties et qu’il est partie poursuivante (5).

Il résulte, en effet, de la jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l’homme :

—  d’une part, qu’une « autorité judiciaire » au sens de l’article 5 § 3 de la Convention européenne des droits de l’homme (6) correspond à un juge ou à un magistrat habilité par la loi, auquel ne peut être assimilé, pour la Cour européenne des droits de l’homme, un magistrat du ministère public français ;

—  d’autre part, que le magistrat qui intervient en matière de protection de la liberté individuelle – qui comprend notamment le droit au respect de la vie privée – doit présenter les garanties requises d’indépendance à l’égard de l’exécutif et des parties, ce dernier critère excluant notamment qu’il puisse agir par la suite contre le requérant dans la procédure pénale, conditions que le magistrat du parquet ne remplit pas aux yeux de la Cour de Strasbourg.

Faisant application de cette jurisprudence, la chambre criminelle de la Cour de cassation a estimé que les articles 12, 14, 41, 60-2 et 77-1-1 du code de procédure pénale, en ce qu’ils confient à la police judiciaire le soin de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs sous le seul contrôle du procureur de la République, ne peuvent servir de fondement légal à la mise en place, sur seule autorisation d’un magistrat du parquet, d’une mesure de géolocalisation.

Cette position a été confirmée par la chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 19 novembre 2013, rappelant que « les dispositions légales relatives aux activités exercées par la police judiciaire sous la direction du procureur de la République ne confèrent pas le pouvoir de mettre en œuvre la mesure technique dite de “géolocalisation”, laquelle, en raison de sa gravité, ne peut être réalisée que sous le contrôle d’un juge ».

Par conséquent, le projet de loi relatif à la géolocalisation, dont votre Commission est aujourd’hui saisie, a pour objet de répondre à la jurisprudence de la Cour de cassation en définissant les modalités de l’intervention des magistrats du paquet et du siège dans les opérations de géolocalisation en temps réel.

*

* *

Sans revenir sur la législation existante concernant les techniques spéciales d’enquêtes, le présent projet de loi tend à lui apporter d’utiles compléments. Il comble, en effet, un vide juridique concernant les techniques dites de géolocalisation, un vide que votre rapporteur juge déraisonnable, dans la mesure où il fige un nombre important de procédures en cours.

Votre rapporteur tient, à cet égard, à saluer la rapidité avec laquelle le Gouvernement (7) a cherché à répondre à l’insécurité juridique provoquée dans les services de police et de gendarmerie par les arrêts de la Cour de cassation. Il tient également à souligner la qualité du travail effectué par le rapporteur du texte au nom de la commission des Lois du Sénat, M. Jean-Pierre Sueur, qui s’est efforcé de conforter et de préciser le dispositif sur plusieurs points.

Dans sa rédaction initiale, l’article 1erdu présent projet de loi prévoyait que le dispositif de la géolocalisation judiciaire en temps réel avait vocation à s’appliquer à toutes les infractions punies d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à trois ans ainsi que dans les enquêtes en recherche des causes de la mort, en recherche des causes de la disparition et en recherche d’une personne en fuite.

Dès le départ, le choix a été fait d’écarter l’hypothèse d’une limitation du champ d’application de la géolocalisation judiciaire à la seule criminalité organisée – visée à l’article 706-73 du code de procédure pénale –, limitation qui s’applique actuellement aux interceptions de correspondances décidées par le procureur de la République sur autorisation du juge des libertés et de la détention et pour les opérations de sonorisation et de fixations d’images décidées par le juge d’instruction.

Le projet de loi s’attache également à répondre à la jurisprudence de la Cour de cassation, en définissant les modalités de l’intervention des magistrats du paquet et du siège dans les opérations de géolocalisation judiciaire en temps réel. Dans le texte déposé sur le Bureau du Sénat, le Gouvernement n’a pas entendu soumettre systématiquement les opérations de géolocalisation en temps réel à l’autorisation préalable d’un juge du siège.

En effet, dans le cadre des enquêtes placées sous le contrôle du ministère public, l’article 1er prévoit l’intervention d’un magistrat du siège – en l’espèce le juge des libertés et de la détention – passé un certain délai. Ce dernier était initialement fixé à quinze jours.

Ainsi, les opérations de géolocalisation sont autorisées par le procureur de la République pour une certaine durée maximale – quinze jours dans le projet de loi initial –, avant d’être prolongées au-delà par le juge des libertés et de la détention. La prolongation est d’un mois renouvelable. Dans le cadre d’une instruction, l’autorisation est donnée par le juge d’instruction pour une durée de quatre mois renouvelables.

Qu’elle soit donnée par le procureur de la République ou par le juge d’instruction, l’autorisation doit être écrite. Toutefois, en cas d’urgence – définie comme un risque imminent de dépérissement des preuves ou d’atteinte grave aux personnes ou aux biens –, l’article 1er du projet de loi prévoyait, dans sa rédaction initiale, que les opérations de géolocalisation pouvaient être prescrites par un officier de police judiciaire après accord préalable donné par tout moyen par le procureur ou par le juge d’instruction.

Ce même article 1er encadre les différentes hypothèses, dans lesquelles les forces de l’ordre peuvent être contraintes de s’introduire dans un lieu privé afin d’installer un dispositif technique de géolocalisation. Dans sa rédaction initiale, le projet de loi prévoyait une gradation des garanties, correspondant, pour chaque type de lieu visé, au degré différencié d’atteinte à la vie privée.

Ainsi, l’intrusion dans un lieu privé tel qu’un véhicule ou un lieu destiné ou utilisé à l’entrepôt de véhicules, fonds, valeurs, marchandises ou matériel – c’est-à-dire le plus souvent un parking –, était subordonnée à l’autorisation écrite du magistrat ayant autorisé les opérations de géolocalisation, à savoir le procureur de la République dans le cadre d’une enquête judiciaire ou le juge d’instruction dans le cadre d’une information judiciaire.

En revanche, dès lors qu’il s’agissait de s’introduire dans un lieu privé autre qu’un véhicule ou un parking, seule une enquête ou une instruction sur des faits punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement pouvait justifier la mesure, sous réserve d’une autorisation écrite du procureur de la République ou du juge d’instruction selon la procédure concernée. Si l’intrusion intervient au sein d’un lieu d’habitation entre 21 heures et 6 heures, il faut une autorisation écrite du juge des libertés et de la détention.

Le projet de loi contient également des dispositions spécifiques concernant les victimes d’une infraction ainsi que les personnes disparues, pour lesquelles une opération de géolocalisation en temps réel peut s’avérer nécessaire. Dans la mesure où il s’agit de retrouver ces personnes et de leur venir en aide, mais non de rassembler des preuves à leur encontre, le Gouvernement a décidé de ne pas rendre applicable la procédure, instaurée à l’article 1er du projet de loi, à la géolocalisation en temps réel du téléphone portable, du véhicule ou de tout autre objet détenu par une victime ou une personne disparue. Le procureur de la République pourra, à cette fin, prescrire des opérations de géolocalisation dans le cadre des dispositions de droit commun du code de procédure pénale relatives au recueil des documents informatiques (8).

L’article 2 du présent texte instaure enfin un dispositif spécifique pour les agents des douanes spécialement habilités, en leur reconnaissant la possibilité de recourir, dans le cadre des enquêtes douanières, à un dispositif de géolocalisation en temps réel, dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités que celles prévues par l’article 1er du projet de loi pour les enquêtes judiciaires. Selon l’étude d’impact, il s’agit de permettre l’utilisation de la géolocalisation en temps réel dans deux hypothèses, que sont les infiltrations et les opérations de livraison surveillée (9).

Lors de l’examen du présent projet de loi, la commission des Lois du Sénat, sur l’initiative de son rapporteur, M. Jean-Pierre Sueur, a modifié le texte à trois égards.

En premier lieu, alors que le texte initial donnait aux forces de l’ordre la possibilité d’utiliser la géolocalisation pour des infractions punies d’au moins trois ans d’emprisonnement, la commission des Lois du Sénat a décidé de porter ce seuil à cinq ans. De la sorte, elle a rendu intitule la distinction qui était initialement faite entre les différents types de lieux privés et le quantum de peine encourue. Par conséquent, le Sénat a fait le choix de ne plus distinguer, en termes de procédure, les véhicules et parkings des autres lieux privés.

En deuxième lieu, la commission des Lois du Sénat a renversé et par là-même simplifié la logique présidant à l’installation d’une balise de géolocalisation en cas d’urgence. Tandis que le projet de loi initial reposait sur une logique d’autorisation a priori du magistrat, le texte issu des travaux de la commission des Lois du Sénat a instauré une logique de contrôle a posteriori par le magistrat : en cas d’urgence, un officier de police judiciaire peut donc prendre spontanément l’initiative de poser une balise de géolocalisation, à condition toutefois d’en avertir immédiatement le procureur de la République et de recueillir l’accord écrit du magistrat compétent dans un délai maximal de douze heures.

En troisième lieu, dans le souci de protéger les témoins ou les citoyens qui apportent leur aide aux forces de police ou de gendarmerie pour l’installation d’une balise de géolocalisation, la commission des Lois du Sénat a complété le projet de loi par de nouvelles dispositions autorisant le juge des libertés et de la détention, en cas de criminalité organisée, à disjoindre du dossier principal de la procédure les éléments relatifs aux circonstances de la mise en place de la géolocalisation. En effet, l’obligation de verser au dossier toutes ces circonstances – que sont la date, l’heure, le lieu ainsi que les premières données de géolocalisation – est susceptible, dans certains cas, de faire peser un risque sur ces personnes.

Lors de l’examen en séance publique du présent projet de loi, le Sénat a adopté plusieurs amendements du Gouvernement, destinés à clarifier ou préciser les dispositions adoptées en Commission.

Tout d’abord, le Sénat a décidé d’élargir le champ d’application de la géolocalisation judiciaire, champ que la commission des Lois avait circonscrit aux seules infractions punies d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans. Sur l’initiative du Gouvernement, le Sénat a fait le choix d’une solution de compromis entre le texte initial et celui adopté en Commission, consistant à autoriser l’usage de la géolocalisation pour les délits contre les personnes, prévus par le livre II du code pénal et punis d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à trois ans, ainsi qu’à tout autre crime ou délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans.

Dans le prolongement de ces dispositions, le Sénat a adopté, avec un avis de sagesse de la commission des Lois et contre l’avis du Gouvernement, un amendement de M. Jacques Mézard, ayant pour objet de ramener de quinze à huit jours la durée initiale pendant laquelle une opération de géolocalisation peut être autorisée par le procureur de la République, avant d’être soumise ensuite à une décision du juge des libertés et de la détention.

Le Sénat a ensuite souhaité que soient renforcés les droits de la défense en cas de recours, par le juge des libertés et de la détention, à un dossier distinct, non joint à la procédure, dans le but de protéger les témoins ou les informateurs des services d’enquête. En cas de contestation de cette procédure par la personne mise en cause, le texte prévoit désormais que le président de la chambre de l’instruction puisse ordonner l’annulation de la géolocalisation en cas d’irrégularité dans la mise en place des opérations de localisation en temps réel ou de non-respect des conditions fixées par le législateur pour recourir à cette procédure dérogatoire. Il en ira de même si les informations ne figurant pas dans le dossier principal de la procédure s’avèrent indispensables à l’exercice des droits de la défense. Le Sénat a également introduit la possibilité, pour ce même président de la chambre d’instruction, d’ordonner le versement au dossier principal de la procédure des informations qui en avaient été initialement écartées, dès lors que la connaissance de ces dernières n’est pas ou plus susceptible de mettre en danger la vie ou l’intégrité physique d’une personne.

Toujours sur l’initiative du Gouvernement, le Sénat a également cherché à renforcer la sécurité juridique des procédures de géolocalisation mises en place en urgence. Une fois avisé par l’officier de police judiciaire, le magistrat se voit ainsi reconnaître la faculté d’ordonner immédiatement la main levée de la géolocalisation, comme en matière de garde à vue. Obligation est également faite au magistrat autorisant la poursuite de l’opération d’indiquer expressément, dans sa décision écrite, les circonstances de fait établissant l’existence d’un risque imminent de disparition des preuves ou d’atteinte grave aux personnes ou aux biens et ayant justifié l’intervention en urgence sur décision du seul officier de police judiciaire.

Enfin, à l’invitation du Gouvernement, le Sénat a complété le présent projet de loi par un nouvel article 2 bis, lequel vise à donner une base législative au financement par l’agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) de la protection des collaborateurs de justice, couramment appelés « repentis », et de leur famille.

Votre rapporteur tient à saluer la qualité du travail réalisé par le rapporteur de la commission des Lois du Sénat, M. Jean-Pierre Sueur, qui s’est efforcé de rechercher un équilibre entre les nécessités de l’enquête et la protection de la vie privée. Toutefois, à la suite des auditions qu’il a menées, votre rapporteur a souhaité apporter au projet de loi, outre des précisions rédactionnelles, deux modifications substantielles, destinées à renforcer encore cet équilibre.

En premier lieu, votre Commission, suivant l’avis de votre rapporteur, a élargi le champ d’application des opérations de géolocalisation judiciaire en temps réel. En effet, le compromis auquel est parvenu le Sénat conduit, dans le même temps, à exclure du champ de la géolocalisation en temps réel des délits punis de trois ans d’emprisonnement, ne constituant pas pour autant une atteinte aux personnes, mais pour lesquels une mesure de géolocalisation sera à l’évidence indispensable. Il en va ainsi, par exemple, pour les délits d’évasion d’un détenu ou de vol simple, tous deux punis de trois ans d’emprisonnement, en application respectivement des articles 434-27 et 311-3 du code pénal.

Considérant que la solution retenue par le Sénat reposait dès lors sur une définition trop restrictive du champ d’application de la géolocalisation, votre Commission a adopté, sur l’initiative conjointe de votre rapporteur et de M. Hugues Fourage, deux amendements identiques revenant à l’équilibre initial du présent projet de loi et fixant donc à trois ans au moins, toutes infractions confondues, la durée minimale d’emprisonnement encouru pour pouvoir recourir aux opérations de géolocalisation en temps réel.

Tirant les conséquences du rétablissement à trois ans de ce seuil d’emprisonnement, votre Commission a réintroduit, sur l’initiative de votre rapporteur, la distinction initialement faite par le projet de loi entre les véhicules et parkings, dans lesquels il sera possible de s’introduire pour un délit puni de trois ans de prison, et les autres lieux privés – professionnels et d’habitation –, lesquels nécessiteront que l’enquête ou l’instruction porte sur une infraction punie d’au moins cinq ans d’emprisonnement pour pouvoir s’y introduire.

En deuxième lieu, votre Commission, toujours suivant l’avis de votre rapporteur, s’est attachée à rééquilibrer, dans le respect de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, les modalités d’intervention respective des magistrats du paquet et du siège dans les opérations de géolocalisation. En effet, votre Commission ne s’est pas montrée convaincue par la solution retenue par le Sénat, consistant à prévoir l’intervention du juge des libertés et de la détention au bout de huit jours seulement.

Il ne fait aucun doute à votre rapporteur que la durée de quinze jours initialement retenue par le Gouvernement est compatible avec la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, laquelle a approuvée, dans son arrêt Uzun contre Allemagne, la possibilité de ne faire intervenir le contrôle d’un juge du siège qu’une fois passé le délai d’un mois après la mise en œuvre de la géolocalisation dans le cadre d’une enquête. Avant l’expiration de ce délai, il convient de reconnaître que la mesure peut être effectuée sous le contrôle du ministère public.

Par conséquent, votre Commission a adopté, sur l’initiative conjointe de votre rapporteur et de M. Hugues Fourage, deux amendements identiques ramenant à quinze jours la durée initiale pendant laquelle une opération de géolocalisation peut être autorisée par le procureur de la République, avant d’être soumise à une décision du juge des libertés et de la détention.

Lors de l’examen du présent texte, votre Commission a également adopté, sur proposition de son président, M. Jean-Jacques Urvoas, plusieurs amendements destinés à en améliorer la rédaction.

Ainsi, bien que souscrivant à l’économie générale du dispositif relatif au dossier distinct, auquel il pourra être recouru en matière de criminalité organisée pour protéger les témoins ou informateurs, votre Commission a estimé que la rédaction adoptée en première lecture par le Sénat, en limitant le contenu de ce dossier aux seules circonstances – lieu, date, heure et premières données – de l’installation du dispositif de géolocalisation n’offrait pas, en l’état, une protection complète de ces personnes.

Elle a, en conséquence, adopté un amendement de son président, laissant à l’appréciation du juge des libertés et de la détention le soin de décider quels éléments peuvent être versés dans le dossier distinct du dossier principal de la procédure, sous réserve que ces informations ne soient pas strictement nécessaires à la manifestation de la vérité.

Par ce même amendement, votre Commission a étendu cette protection qu’est la faculté de garder secrètes certaines informations non nécessaires à la manifestation de la vérité, aux membres de la famille ainsi qu’aux proches des témoins ou des citoyens ayant apporté leur concours aux services d’investigations pour l’installation d’une balise.

Enfin, votre Commission a jugé nécessaire de clarifier la rédaction de l’article 2 du présent projet de loi, afin d’éviter toute confusion entre le recours à la géolocalisation administrative et celui à la géolocalisation judiciaire au sein des services relevant de la direction générale des douanes et des droits indirects. Elle a donc adopté un amendement de son président, précisant que le recours à une opération de géolocalisation en temps réel avait pour seule finalité la « recherche et la constatation » d’un délit douanier – puni d’au moins trois ans d’emprisonnement –, réservant ainsi l’usage de cette technique aux seules enquêtes de police judiciaire.

DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa séance du mardi 28 janvier 2014, la Commission examine le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à la géolocalisation (n° 1717).

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Le projet de loi relatif à la géolocalisation a pour objet, à la suite de deux arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 22 octobre 2013, de concilier les impératifs de protection de la vie privée et la nécessité de diligenter certaines investigations dans l’urgence.

Les commentaires qui ont suivi les décisions de la Cour de cassation, s’agissant notamment de la qualification de l’autorité du procureur de la République, qui n’était pas jugée comme étant judiciaire, ont trop souvent oublié que cette observation portait non pas sur la conduite des investigations, mais sur les atteintes à la liberté, et que le projet de loi du Gouvernement, qui vise à conférer au procureur le droit de décider d’une mesure de géolocalisation, est conforme au droit et, surtout, à l’opportunité, car le procureur dirige les investigations et peut ainsi savoir en temps réel ce qui se passe.

Quant à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), il résulte notamment de l’arrêt Uzun contre Allemagne que la surveillance par géolocalisation est moins susceptible de porter atteinte au droit au respect de la vie privée que les autres méthodes de surveillance, notamment visuelles ou acoustiques ; en d’autres termes, la géolocalisation est nettement moins intrusive que les interceptions de sécurité – les « écoutes ».

M. Sébastien Pietrasanta, rapporteur. Notre Commission est donc saisie cet après-midi du projet de loi relatif à la géolocalisation, adopté en première lecture par le Sénat le 20 janvier dernier. Le Gouvernement a fait de l’aboutissement de ce projet de loi l’une de ses priorités en engageant la procédure accélérée sur ce texte et en faisant en sorte qu’il soit inscrit à l’ordre du jour de notre assemblée le 11 février prochain, durant une semaine réservée au Gouvernement.

La géolocalisation en temps réel est une technique d’enquête de plus en plus utilisée par les services de police, de gendarmerie et des douanes en complément de la filature traditionnelle, pour suivre en temps réel les déplacements d’un objet ou d’un véhicule détenu ou utilisé par une personne suspectée d’avoir participé à la commission d’infractions graves.

Les techniques de géolocalisation en temps réel sont aujourd’hui de deux ordres : le suivi dynamique, en temps réel, d’un terminal de télécommunication aux fins de localiser un téléphone portable et l’utilisation d’une balise GPS posée sur un objet ou, plus fréquemment, sur un véhicule afin de déterminer en temps réel la position d’un individu.

Ces dernières années, le recours à la géolocalisation a connu une croissance exponentielle : le nombre des balises posées, estimé à environ 4 600 en 2011, dépassait 5 500 en 2012, soit une croissance de près de 25 % en un an. Quant à la géolocalisation par des téléphones portables, le chiffre est passé d’une fourchette approximative de 1 000 à 3 000 utilisations en 2009 à 20 000 utilisations environ en 2013, dont 70 % seraient ordonnées au stade des enquêtes préliminaires.

À la lumière de ces données, la géolocalisation en temps réel est incontestablement devenue un outil indispensable au bon déroulement des missions d’investigation des services de police et de gendarmerie. Il est cependant problématique qu’aucune loi n’encadre aujourd’hui expressément le recours à cette technique. La question de la validité de celle-ci a été posée aux différents stades de la procédure pénale, dans la mesure où ce procédé peut constituer une ingérence dans la vie privée de la personne soupçonnée d’avoir commis une infraction.

Une première réponse a été apportée dès 2010 par la Cour européenne des droits de l’homme qui a indiqué, dans son arrêt Uzun contre Allemagne, que le procédé de la géolocalisation ne méconnaissait pas en lui-même le droit au respect de la vie privée garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, à condition cependant que la mesure de surveillance par géolocalisation respecte deux conditions cumulatives : elle ne peut être autorisée que pour des infractions particulièrement graves et uniquement si aucune autre mesure d’investigation, moins attentatoire à la liberté individuelle, n’est envisageable ; elle doit également être prévue par la loi dans des termes suffisamment clairs pour indiquer à tous de manière suffisante en quelles circonstances et sous quelles conditions l’autorité publique est habilitée à y recourir.

Plus récemment, la chambre criminelle de la Cour de cassation a été amenée à se prononcer sur la conformité de la géolocalisation en temps réel avec les exigences posées par la Cour européenne des droits de l’homme en matière de protection du droit au respect de la vie privée. Dans deux arrêts du 22 octobre 2013, la Cour de cassation a ainsi invalidé les opérations de géolocalisation en temps réel menées sous le contrôle du parquet, au double motif que les dispositions générales du code de procédure pénale relatives à la police judiciaire et au procureur de la République ne prévoyaient ni les circonstances ni les conditions dans lesquelles une mesure de surveillance judiciaire par géolocalisation pouvait être mise en place, et que la mesure en question était placée sous le seul contrôle du procureur de la République, lequel n’est pas une « autorité judiciaire » au sens que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme donne à cette notion, en raison de ce qui serait son manque d’indépendance à l’égard du pouvoir exécutif et des parties.

À la suite de ces deux arrêts, le ministère de la Justice a rédigé en urgence une dépêche demandant aux procureurs de la République de mettre fin à toutes les opérations de géolocalisation en temps réel menées par les forces de l’ordre dans le cadre des enquêtes préliminaires ou de flagrance conduites par le parquet.

L’objet même du texte dont nous débattons est de permettre la reprise rapide des opérations de géolocalisation en temps réel dans un cadre juridique rénové, conciliant le respect de la vie privée et les nécessités de l’enquête et définissant les modalités d’intervention des magistrats du parquet et du siège dans la conduite de ces opérations.

Sans bouleverser la législation existante, ce projet de loi tend à lui apporter d’importantes améliorations et clarifications. Il comble en effet le vide juridique créé en la matière par les arrêts rendus en octobre dernier par la Cour de cassation en matière de géolocalisation.

Je tiens à cet égard à saluer la rapidité avec laquelle le Gouvernement cherche à répondre à l’insécurité juridique dans laquelle les arrêts de la Cour de cassation ont plongé nos services de police et de gendarmerie.

Je voudrais également saluer la qualité du travail effectué par le rapporteur du texte au nom de la commission des Lois du Sénat, M. Jean-Pierre Sueur, qui s’est efforcé de conforter et de préciser le dispositif sur plusieurs points.

Ainsi, le Sénat a simplifié les conditions de recours à la géolocalisation en cas d’urgence, en autorisant l’officier de police judiciaire, en pareille situation, à prendre l’initiative du recours à la géolocalisation, à charge pour lui d’en informer le procureur ou le juge d’instruction par tout moyen. Il est prévu, dans ce cas, que l’autorisation écrite du magistrat compétent intervienne dans les douze heures.

Le Sénat a également reconnu au magistrat la faculté, en cas de criminalité organisée, de disjoindre du dossier principal de la procédure les circonstances de la mise en place de la géolocalisation, de manière à protéger les témoins ou les informateurs des services d’enquête. De fait, dans certains cas, l’obligation de verser au dossier toutes ces circonstances ferait peser un risque sur ces personnes.

Finalement, tel qu’il ressort des travaux du Sénat, le nouveau cadre juridique relatif à la géolocalisation en temps réel repose, à mes yeux, sur un équilibre satisfaisant entre les nécessités de l’enquête et la protection de la vie privée. C’est la raison pour laquelle je vous inviterai tout à l’heure à voter ce projet de loi, moyennant toutefois l’adoption de certains amendements qui sont le fruit de mes réflexions et des auditions que j’ai menées.

D’abord, il nous faut mieux définir le champ d’application de la géolocalisation en temps réel. Le texte adopté par le Sénat circonscrit le recours à cette technique aux délits contre les personnes punies d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à trois ans, ainsi qu’à tout autre crime ou délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans.

Le compromis auquel est parvenu le Sénat ne me semble pas satisfaisant à ce stade de la procédure parlementaire, car il repose sur une définition trop restrictive du champ d’application de la géolocalisation en temps réel et conduit à exclure du champ de la mesure des délits punis de trois ans d’emprisonnement ne constituant pas une atteinte aux personnes, mais pour lesquels une opération de géolocalisation sera à l’évidence indispensable.

Je n’en donnerai que deux exemples. Tout d’abord, nul ne peut nier qu’en cas d’évasion d’un détenu – délit puni, en application de l’article 434-27 du code pénal, de trois ans d’emprisonnement –, les services de police et de gendarmerie doivent pouvoir recourir à une opération de géolocalisation.

Par ailleurs, les représentants de syndicats de policiers que nous avons auditionnés ont démenti l’idée, avancée par certains, selon laquelle les techniques de géolocalisation ne devraient pas être utilisées pour des faits de vol simple – délit puni de trois ans d’emprisonnement aux termes de l’article 311-3 du code pénal. En effet, si un véhicule volé est soupçonné d’être utilisé pour commettre d’autres infractions, comme le trafic de stupéfiants au moyen de « go fast », les services d’investigation auront besoin, dans une enquête pour vol simple, de recourir à une mesure complémentaire de géolocalisation en temps réel.

Pour l’ensemble de ces raisons, je vous proposerai un amendement visant à fixer à trois ans au moins, toutes infractions confondues, la durée minimale d’emprisonnement encouru justifiant le recours aux opérations de géolocalisation en temps réel. Je note d’ailleurs que ce seuil de trois ans était celui qu’avait initialement retenu le Gouvernement dans son texte.

Il convient ensuite de mieux définir les conditions d’intervention des magistrats du parquet et du siège dans les opérations de géolocalisation en temps réel. En effet, dans sa rédaction issue des travaux du Sénat, le projet de loi dispose que le recours à la géolocalisation doit être décidé par le procureur de la République et que la décision de celui-ci doit ensuite être confirmée dans les huit jours par le juge des libertés et de la détention (JLD).

Dans sa rédaction initiale, le projet de loi fixait à quinze jours, au lieu de huit, la durée pendant laquelle une opération de géolocalisation pouvait être autorisée par le procureur de la République avant d’être soumise à une décision du JLD. Cette durée de quinze jours, qui correspond à celle de l’enquête de flagrance prolongée, en application de l’article 53 du code de procédure pénale, est suffisamment courte pour justifier que le parquet, qui fait partie de l’autorité judiciaire, comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel à de nombreuses reprises, puisse exercer des prérogatives particulières.

La solution initialement retenue par le Gouvernement était de surcroît équilibrée et conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, laquelle n’oblige pas le législateur à prévoir une autorisation d’un juge du siège préalablement à toute mesure de géolocalisation. La durée de quinze jours est très clairement compatible avec les décisions de la Cour, qui considère qu’un délai d’un mois est satisfaisant. Je vous proposerai donc un amendement ramenant à quinze jours la durée initiale pendant laquelle une opération de géolocalisation peut être autorisée par le procureur de la République avant d’être soumise à une décision du JLD.

Notre Commission est aujourd’hui saisie d’un texte important et particulièrement attendu par les services de police et gendarmerie, qui se trouvent aujourd’hui bien démunis pour recourir à la géolocalisation en temps réel et mener à bien leurs investigations. Je vous invite donc à adopter ce projet de loi modifié par les amendements que je viens d’évoquer.

M. Guillaume Larrivé. Je regrette la soudaineté de la jurisprudence de la Cour de cassation, qui a eu un effet très préjudiciable sur le quotidien opérationnel des forces de l’ordre. De fait, les arrêts du 22 octobre 2013 ont fragilisé les enquêtes en cours utilisant la géolocalisation et empêché les forces de police et de gendarmerie de recourir à cette technique pour de nouvelles enquêtes. Il est regrettable que l’entrée en vigueur de ces arrêts n’ait pas été différée, comme cela avait été le cas pour la garde à vue. D’une manière générale, un recours plus fréquent à l’entrée en vigueur différée permettait au législateur d’adapter plus sereinement le droit pour ne pas fragiliser les enquêtes en cours ou à venir.

Ensuite, je m’étonne que, sur un sujet aussi important pour la sécurité nationale, Mme la garde des Sceaux ne soit pas venue présenter devant la commission des Lois le projet de loi adopté par le Sénat et sa position sur ce texte.

Enfin, si le projet de loi va dans la bonne direction, l’Assemblée nationale n’en doit pas moins corriger les modifications du Sénat qui ne tiennent pas assez compte des exigences de la sécurité. Je suis pour ma part favorable, comme le rapporteur, au retour à un seuil de trois ans pour le quantum de la peine encourue justifiant, pour une enquête relative à une atteinte aux biens, le recours à la géolocalisation. Le délai de validation par le JLD d’une opération engagée sous le contrôle du procureur ne doit en outre pas être limité à huit jours.

Nous devrions pouvoir nous retrouver sur ce texte, même s’il est regrettable que nous soyons contraints de travailler dans une extrême urgence alors même que, sur le terrain, les forces de l’ordre ont été privées d’un outil très important par une jurisprudence hâtive.

M. Hugues Fourage. Je salue le travail du rapporteur, qui a procédé à des auditions très larges et enrichissantes en vue d’améliorer ce texte nécessaire. Il est un peu contradictoire, monsieur Larrivé, de déplorer que la Cour de cassation ait agi précipitamment et qu’elle n’ait pas différé l’entrée en vigueur de son arrêt. Il convient avant tout de souligner la rapidité avec laquelle le Gouvernement a répondu en proposant ce texte, dont la nécessité absolue a été soulignée par les forces de police et de gendarmerie auditionnées. Il convient par ailleurs de rappeler la qualité du procureur, qui a pour fonction de diriger les investigations.

Ce texte trouve un équilibre entre la nécessité de protéger la vie privée de nos concitoyens et celle d’assurer leur sécurité en donnant aux policiers et aux gendarmes les moyens de travailler le plus rapidement possible. Comme l’a dit le président, le système de géolocalisation est moins intrusif que l’écoute ou la vidéoprotection. Je rappelle également que le seuil applicable aux incriminations donnant lieu à écoutes téléphoniques est de deux ans. Je souscris donc pleinement, comme du reste le groupe SRC, aux deux propositions principales du rapporteur visant à revenir au seuil de trois ans fixé dans le texte initial et à allonger de huit à quinze jours le délai au-delà duquel le JLD devra intervenir. Les auditions ont, en effet, mis en lumière l’importance de ces dispositions pour le travail des policiers et des gendarmes et il convient de rétablir l’équilibre qui caractérisait le texte du Gouvernement avant son passage au Sénat.

M. Patrice Verchère. Le groupe UMP tend à saluer ce projet de loi répondant aux deux arrêts récents de la Cour de cassation qui ont censuré le recours à la géolocalisation dans le cadre d’une enquête menée par le procureur de la République et entraîné une vraie paralysie de l’action des forces de police et de gendarmerie. On peut regretter avec M. Larrivé que, malgré l’urgence, Mme la garde des Sceaux ne soit pas venue nous présenter le texte. Toujours est-il que le projet de loi initial permet de répondre à cette paralysie. Malheureusement, le texte modifié par le Sénat restreint trop les prérogatives du procureur de la République et rend encore trop compliqué le recours à la géolocalisation en temps réel. Je rappelle que le projet de loi initial avait été jugé équilibré par les magistrats eux-mêmes.

Nous sommes prêts, pour notre part, à voter ce texte moyennant certaines modifications. Monsieur le rapporteur, vos amendements visant à rétablir les dispositions du projet de loi initial répondent à nos inquiétudes. Il nous semble en effet souhaitable de rétablir le délai maximum de quinze jours initialement prévu pour l’intervention du JLD, qui a été ramené à huit jours par le Sénat. Pour permettre aux officiers de police judiciaire de travailler, peut-être faudrait-il d’ailleurs également rétablir par amendement le délai de 48 heures dont disposeront les magistrats pour prescrire, en cas d’urgence, la poursuite des opérations, délai que le Sénat a réduit à 12 heures.

M. Éric Ciotti. Je tiens à mon tour à souligner l’utilité de ce texte. Les arrêts du 22 octobre 2013 de la chambre criminelle de la Cour de cassation ont fragilisé de nombreuses enquêtes et soulevé de nombreuses inquiétudes dans les services d’investigation, qui ont été brutalement privés d’un outil, dont le rapporteur a souligné le rôle de plus en plus important pour l’élucidation de nombreuses affaires. Je salue donc le dépôt de ce texte par le Gouvernement. Il est urgent de combler le vide juridique existant pour consolider les enquêtes et rendre aux enquêteurs des outils d’investigation performants, à la hauteur de l’exigence de leurs missions.

Je soutiens également les amendements présentés par le rapporteur, qui visent à rétablir l’équilibre caractérisant le texte initial. Les modifications du Sénat ne sont en effet pas opportunes. Il faut ainsi pouvoir recourir à la géolocalisation pour les délits passibles de peines supérieures à trois ans de prison, plutôt que cinq, et permettre l’intervention du procureur de la République dans un délai compatible avec les nécessités de l’enquête – quinze jours me paraissant à cet égard un délai opportun.

Mme Axelle Lemaire. Je salue moi aussi le travail accompli par le rapporteur et l’objectif poursuivi par ce texte qui permet de fixer un cadre juridique pour le recours à la géolocalisation en définissant à la fois cet instrument et son champ d’application.

Toutefois, monsieur le rapporteur, j’aimerais comprendre pourquoi vous souhaitez revenir sur l’équilibre trouvé au Sénat entre les parlementaires et la garde des Sceaux s’agissant du seuil de cinq ans d’emprisonnement ? En effet, la fixation d’un tel seuil exprimait bien le choix de réserver le recours à la géolocalisation à des enquêtes ayant un lien avec la criminalité organisée. Abaisser ce seuil à trois ans permettra le recours à une telle technique pour des délits à caractère plus individuels comme l’évasion, les menaces de mort, le harcèlement sexuel aggravé, la non-présentation d’enfant avec circonstances aggravantes, le vol simple, sans qu’il y ait nécessairement de lien avec la criminalité organisée. Je m’interroge donc sur la constitutionnalité au regard des exigences de la Cour européenne des droits de l’homme qui conditionne le recours à la géolocalisation à la commission de crimes particulièrement graves.

M. Lionel Tardy. Compte tenu du vide juridique laissé en octobre dernier par les arrêts de la Cour de cassation, il est nécessaire d’examiner ce projet de loi en urgence, contrairement à d’autres textes pour lesquels celle-ci ne semble pas justifiée – je pense en particulier au projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale.

Le travail du Sénat a été constructif et les principaux points posant problème ont été soulevés – certains le seront à nouveau ici, avec d’autres propositions. Je me réjouis notamment que le délai sans approbation préalable, en cas d’urgence, ait été réduit et je souhaite qu’il le reste. Le parallèle avec la loi de programmation militaire existe et je ferai la même remarque liminaire : nous traitons ici d’atteintes à la vie privée. Ces atteintes doivent être très limitées, encadrées et proportionnées. Certaines affaires nous invitent en effet à une prudence et une vigilance extrêmes. J’ai donc déposé un amendement pour satisfaire les attentes légitimes de nos concitoyens à cet égard.

M. Pascal Popelin. Certaines interrogations subsistent quant au respect des droits et des libertés. J’exprimerai donc certaines convictions qui me conduisent à soutenir cet indispensable projet de loi.

La première est que la mise en œuvre d’un cadre légal ne peut, par principe, être plus attentatoire à notre État de droit et à notre démocratie que l’absence ou l’insuffisance de règles autour d’une pratique existante, car ce vide est générateur de dérives et d’abus et il fait peser une instabilité et une fragilité juridiques sur les procédures engagées. En définissant strictement les conditions du recours aux techniques de géolocalisation, qui ne repose actuellement sur aucun fondement clair, ce projet de loi ne fait pas reculer le droit à la vie privée ; il apporte, au contraire, les garanties nécessaires au respect des libertés individuelles.

Ma deuxième conviction est que notre devoir de législateur nous oblige à bâtir des lois aussi adaptées que possible aux réalités de notre temps. Force est de constater qu’en matière de lutte contre la délinquance et la criminalité, il nous faut sans cesse mettre notre droit en conformité avec des méthodes de plus en plus sophistiquées. Ce projet de loi y concourt. C’est donc un texte de cohérence, de complément, dont la vocation première est de donner aux forces de l’ordre les moyens de mieux protéger les Français, dans la droite ligne de toutes les lois que nous avons adoptées depuis le début de la législature dans le domaine de la sécurité.

Je ne doute pas que nous saurons conforter le juste équilibre entre l’indispensable protection des droits de nos concitoyens et le nécessaire approfondissement des moyens d’investigation à disposition des autorités, à partir de la version améliorée par le Sénat et sur laquelle le groupe SRC propose deux amendements similaires à ceux du rapporteur.

Il faut en effet revenir à la version initiale proposée par le Gouvernement, ainsi que le font apparaître les nombreuses auditions réalisées et la convergence des interventions d’acteurs issus d’horizons divers : mieux vaut fixer le délai à quinze jours plutôt qu’à huit et prendre en compte les délits sanctionnés par trois ans de prison plutôt que se limiter à ceux qui font encourir une peine de cinq ans.

Sans esprit de polémique et sans faire de « jurisprudence-fiction », monsieur Larrivé, je regrette moins les arrêts de la Cour de cassation que la position de votre groupe sur le projet de réforme constitutionnelle relatif à l’indépendance judiciaire : si nous avions pu faire adopter cette réforme, il n’y aurait probablement pas eu matière à ce que la Cour de cassation prenne la décision qu’elle a prise.

M. Alain Tourret. Je m’interroge sur le contenu de ce texte et ai été séduit par l’argumentation d’Axelle Lemaire. Il faut trouver un équilibre entre les besoins des forces de police et de gendarmerie et la protection des droits et libertés individuels. Or, je crains que chaque fois qu’il y a des techniques nouvelles, on ne les utilise au détriment de ces derniers et de la vie privée.

Je souhaite que le fragile équilibre trouvé au Sénat soit préservé. L’utilisation de techniques telles que la géolocalisation doit être limitée à tout ce qui concerne la criminalité. J’ai du mal à comprendre qu’on y recoure pour des vols simples.

Nous avons un bloc de protection assurée par la chambre criminelle de la Cour de cassation et la Cour européenne des droits de l’homme ; nous ferions bien de nous en inspirer et ne pas encourir des risques d’inconstitutionnalité. Ce débat rejoint celui que nous avons eu sur la garde à vue la semaine dernière. Je ne suis pas sûr que même pour les délits commis en bande organisée, nous évitions de tels risques, selon les entretiens que j’ai eus avec la Chancellerie. Je vous appelle donc à faire le maximum pour respecter les libertés individuelles et la vie privée et ne pas faire droit systématiquement aux revendications des forces de police et de gendarmerie.

M. Philippe Houillon. Je suis favorable à ce texte, mais je souhaite que le rapporteur nous éclaire sur un point. Le huitième alinéa de l’article 1er précise que la décision du procureur de la République, du juge des libertés et de la détention ou du juge d’instruction n’a pas de caractère juridictionnel – ce qui est déjà discutable, notamment s’agissant du JLD – et qu’elle n’est susceptible d’aucun recours. Or, à partir du moment où certaines autorisations ne peuvent intervenir que dans certaines conditions, il me semble nécessaire qu’il y ait une possibilité de recours – ne serait-ce que par le système de droit commun des nullités, qui entraîne la nullité de la procédure dans l’hypothèse où l’autorisation a été donnée sans respecter ces conditions.

M. Guy Geoffroy. J’estime aussi ce texte opportun et il serait bon qu’il puisse donner lieu à un consensus. Je salue d’ailleurs la conversion de nos collègues de la gauche à l’égard de l’intérêt que peut représenter le Sénat : il y a quelques jours encore, j’avais cru comprendre qu’il ne méritait pas tant de louanges !

Cela dit, je me réjouis que le rapporteur propose un amendement tendant à revenir au délai de quinze jours pour permettre au procureur de la République d’autoriser une opération de géolocalisation, sachant qu’il n’est nullement question de mettre ne serait-ce qu’un doigt dans l’engrenage pouvant conduire à déliter, même involontairement, les droits fondamentaux auxquels nous sommes tous attachés.

Mais j’ai du mal à comprendre le grand écart que fait le Gouvernement, s’agissant des alinéas 12, 13 et 14 de l’article 1er concernant les cas d’urgence, entre son texte initial – prévoyant que le magistrat disposerait d’un délai de quarante-huit heures pour prescrire la poursuite des opérations – et celui issu du Sénat avec son accord – réduisant le délai à douze heures –, sans que la majorité envisage de prendre position sur ce point.

J’ai eu des entretiens non seulement avec des policiers et des « parquetiers », mais aussi avec des juges du siège, qui m’ont fait part de leurs interrogations à ce sujet et de l’utilité de prévoir une durée plus longue, celle de douze heures paraissant trop brève, notamment lors des week-ends, pour sécuriser à la fois la protection des droits fondamentaux et la possibilité de mettre un terme à des manœuvres délictuelles ou criminelles. Monsieur le rapporteur, quel est votre avis à cet égard ? À défaut d’une position nous permettant d’espérer une modification d’ici à l’examen en séance publique, je déposerai sans doute, en vue de la réunion prévue par l’article 88 de notre Règlement, un amendement tendant à prévoir un délai de vingt-quatre, trente ou trente-six heures, sachant que trente heures serait un compromis à mi-chemin entre ce que le Gouvernement avait proposé à l’origine et ce qu’il a accepté au Sénat.

M. Sergio Coronado. Si certains de nos collègues regrettent la jurisprudence de la Cour de cassation, je déplore pour ma part que le Conseil supérieur de la magistrature ait jugé qu’il n’y avait pas lieu d’infliger de sanction à l’encontre du procureur dans l’affaire dite des « fadettes ». Ces questions d’atteinte aux libertés, du respect de la vie privée ou du secret des sources sont très importantes. Il faut trouver un équilibre entre la sécurité des biens et des personnes et le respect des libertés fondamentales.

Je regrette aussi que nous ne puissions disposer d’explications du Gouvernement sur certaines modifications qu’il a acceptées au Sénat. L’équilibre trouvé par la Haute assemblée sur ce texte est intéressant et si j’avais été sénateur, je n’aurais sans doute pas voté comme le groupe écologiste. Les remarques d’Axelle Lemaire sur la gravité des infractions visées sont justifiées : notre groupe écologiste est très attaché à une juste définition de celles pouvant faire l’objet d’une géolocalisation ; ses amendements tendront donc à conforter l’équilibre trouvé au Sénat.

M. le rapporteur. Je ne reviendrai pas sur la question de la durée minimale d’emprisonnement encouru pour pouvoir recourir aux opérations de géolocalisation, qui sera débattue à l’occasion de l’examen des articles.

S’agissant du délai de douze heures prévu en cas d’urgence, le Sénat a fait une avancée. Lorsque nous avons auditionné les représentants de la police, ils nous ont expliqué qu’il était difficile d’obtenir instantanément des autorisations du procureur de la République pour réaliser des opérations de géolocalisation telles que la pose de balises dans des stations-service. Le Sénat a donc prévu la possibilité d’une initiative spontanée de l’officier de police judiciaire (OPJ) donnant lieu à une autorisation a posteriori du procureur dans un délai de douze heures, alors que le texte initial prévoyait que l’OPJ devait avoir une autorisation préalable du procureur, donnée par tout moyen, notamment de façon verbale, laquelle devait être confirmée par écrit dans un délai de quarante-huit heures. Cette mesure va dans le sens de ce que demandaient les syndicats de police et de ce que vous souhaitez, monsieur Geoffroy.

M. Guy Geoffroy. Merci de cette précision. Reste qu’il serait plus raisonnable de prévoir un délai de vingt-quatre heures par exemple, au lieu de douze heures, pour permettre au procureur de donner son autorisation.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il faut faire confiance à l’OPJ et nous avons tous le souci de ne pas entraver son action en raison d’une difficulté à joindre le parquet.

La Commission en vient à l’examen des articles du projet de loi.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
(chapitre V [nouveau] du titre IV du livre Ier et art. 230-32 à 230-45 [nouveaux]
du code de procédure pénale)

Définition des conditions et règles procédurales de recours par les officiers
de police judiciaire à la géolocalisation en temps réel

Le présent article complète le titre IV « Dispositions communes » du livre Ier « De l’exercice de l’action publique et de l’instruction » du code de procédure pénale, par treize nouveaux articles 230-32 à 230-45 réunis dans un chapitre V intitulé « De la géolocalisation ».

Les articles 230-32 à 230-45 introduits par le présent article dans le code de procédure pénale tendent à préciser les conditions et règles permettant de recourir, dans une enquête ou une information judiciaire, à un dispositif technique de géolocalisation en temps réel.

Ces articles s’inspirent, dans leur rédaction, des dispositions prévues par les articles 706-96 et suivants du code de procédure pénale pour les sonorisations et fixations d’images et les articles 706-102-1 et suivants du même code relatifs à la captation des données informatiques.

Article 230-32 : définition du champ d’application et de l’objet de la géolocalisation

L’article 230-32 du code de procédure pénale autorise expressément le recours à la géolocalisation en temps réel, laquelle est définie comme l’utilisation de « tout moyen technique destiné à la localisation en temps réel, sur l’ensemble du territoire national d’une personne, d’un véhicule ou de tout autre objet, sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur ».

Comme le précise l’étude d’impact qui accompagne le présent projet de loi, cette définition recouvre, en pratique, deux techniques de géolocalisation en temps réel, que sont respectivement :

—  le suivi dynamique, en temps réel, d’un terminal de télécommunication aux fins de localiser un téléphone portable ;

—  l’utilisation d’une balise GPS, posée sur un objet ou plus fréquemment sur un véhicule, aux fins de déterminer la position en temps réel d’un individu.

Ainsi définie, la géolocalisation peut être mise en œuvre, aux termes du nouvel article 230-32 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue des travaux du Sénat en première lecture, par un officier de police judiciaire ou, sous la responsabilité de ce dernier, par un agent de police judiciaire, sous réserve que cette opération soit exigée par les nécessités d’une enquête ou d’une instruction relative à :

—  tout crime ou délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans ;

—  un délit contre les personnes, prévu par le livre II du code pénal et puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à trois ans.

Dans sa rédaction initiale, l’article 230-32 fixait à trois ans au moins, toutes infractions confondues, la durée minimale d’emprisonnement encouru pour pouvoir recourir aux opérations de géolocalisation en temps réel, l’étude d’impact qui accompagne le présent projet de loi précisant notamment que « ce seuil de trois ans d’emprisonnement encouru permettait d’intégrer à la réforme une partie significative des infractions traitées par les juridictions – hors contentieux routier –, tout en la réservant à des faits d’une certaine gravité » (10).

Cependant, lors de l’examen en première lecture du présent projet de loi, la commission des Lois du Sénat ne s’est pas montrée convaincue par l’équilibre ainsi défini par le projet de loi initial, jugeant notamment « ce seuil de trois ans trop bas, dans la mesure où il incluait des infractions telles que les vols simples, pour lesquelles une mesure de géolocalisation pourrait paraître disproportionnée, au regard des exigences conventionnelles posées par la Cour européenne des droits de l’homme » (11).

La commission des Lois du Sénat a justifié un relèvement de trois à cinq ans du seuil de peine encourue pour recourir à un dispositif de géolocalisation en temps réel par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, cette dernière ayant rappelé, dans son arrêt Uzun contre Allemagne en date du 2 septembre 2010 (12), la nécessité que les infractions justifiant le recours à une mesure de géolocalisation soient d’une particulière gravité. En l’espèce, les faits sur lesquels portait l’enquête des autorités allemandes étaient très graves, consistant en « plusieurs tentatives de meurtre d’hommes politiques et de fonctionnaires par des attentats à la bombe ».

Or, le rapporteur au nom de la commission des Lois du Sénat a estimé que, dans le respect de la jurisprudence précitée de la Cour de Strasbourg, le seuil de cinq ans était mieux adapté, permettant ainsi de viser l’ensemble de la délinquance organisée ainsi que les vols commis avec une circonstance aggravante. Par conséquent, le Sénat a adopté, en commission, un amendement de son rapporteur, M. Jean-Pierre Sueur, réservant les opérations de géolocalisation aux seuls crimes ou délits punis d’une peine d’emprisonnement égale ou supérieure à cinq ans.

Cependant, lors de l’examen en séance publique, le Sénat a adopté, avec un avis favorable de la Commission, un amendement du Gouvernement, distinguant le seuil de peine justifiant l’usage de la géolocalisation en fonction de la nature de l’infraction en cause. Ainsi, le nouvel article 230-32 du code de procédure pénale exige désormais un seuil de trois ans de peine d’emprisonnement encourue pour les seuls délits contre les personnes et de cinq pour tous les autres crimes ou délits.

L’exposé sommaire de l’amendement du Gouvernement, dont est issue la nouvelle rédaction de l’article 230-32 du code de procédure pénale, indiquait qu’« exiger un seuil de cinq ans pour tous les délits soulevait d’importantes difficultés, car il interdirait la géolocalisation dans des cas où elle serait à l’évidence indispensable, et où elle a du reste déjà été utilisée par le passé, notamment en cas de menaces de mort ou d’évasion, délits punis de trois ans d’emprisonnement aux termes des articles 222-17 et 434-27 du code pénal. Dans de tels cas, la géolocalisation peut en effet paraître tout à fait justifiée, pour empêcher l’auteur des menaces de les mettre à exécution ou pour retrouver la personne évadée ».

La solution adoptée par le Sénat, sur l’initiative du Gouvernement, présente l’avantage de pouvoir recourir à la géolocalisation en temps réel pour les infractions d’harcèlement sexuel aggravé et de non-représentation aggravée d’enfants mineurs, délits contre les personnes qui sont punis de trois ans d’emprisonnement en application respectivement des articles 222-33, 227-9 et 227-10 du code pénal.

En outre, contrairement aux règles encadrant les interceptions de correspondance dans le cadre de l’enquête préliminaire ou des sonorisations et fixations d’image dans le cadre de l’instruction, l’article 230-32 ne limite pas le champ d’application de la géolocalisation en temps réel aux seuls crimes et délits visés par l’actuel article 706-73 du code de procédure pénale et considérés comme constitutifs de la « criminalité organisée » (13).

Cependant, le compromis auquel est parvenu le Sénat conduit, dans le même temps, à exclure du champ de la géolocalisation en temps réel des délits punis de trois ans d’emprisonnement, ne constituant pas pour autant une atteinte aux personnes, mais pour lesquels une mesure de géolocalisation sera à l’évidence indispensable.

Il en va ainsi, par exemple, pour l’évasion d’un détenu, qui est un délit puni, en application de l’article 434-27 du code pénal, de trois d’emprisonnement. Votre rapporteur reste convaincu de la nécessité pour les services enquêteurs de pouvoir recourir, en pareille situation, à une opération de géolocalisation.

Le vol simple, délit puni, aux termes de l’article 311-3 du code pénal, de trois d’emprisonnement, ne peut davantage être exclu du champ d’application de la géolocalisation judiciaire. En effet, dès lors qu’il est soupçonné qu’un véhicule volé est utilisé pour commettre d’autres infractions – comme le trafic de stupéfiants en matière de « go fast » –, les services d’investigation auront besoin, dans une enquête pour vol simple, de recourir à une mesure complémentaire de géolocalisation en temps réel.

Considérant que la solution retenue par le Sénat reposait sur une définition trop restrictive du champ d’application de la géolocalisation, votre Commission a adopté, sur l’initiative conjointe de votre rapporteur et de M. Hugues Fourage, deux amendements identiques fixant à trois ans au moins, toutes infractions confondues, la durée minimale d’emprisonnement encouru pour pouvoir recourir aux opérations de géolocalisation en temps réel.

Enfin, le nouvel article 230-32 autorise le recours à la géolocalisation en temps réel dans trois hypothèses supplémentaires, que sont respectivement, aux termes des articles 74, 74-1 et 74-2 du code de procédure pénale, les enquêtes ou informations judiciaires en recherche des causes de la mort ou de blessures graves, en recherche des causes d’une disparition ou en recherche d’une personne en fuite. Comme l’a souligné M. Jean-Pierre Sueur, « il s’agit en effet de cas graves dans lesquels il est souvent nécessaire d’agir le plus rapidement possible avec des moyens efficaces » (14).

Article 230-33 : définition de la durée des opérations de géolocalisation et de l’autorité judiciaire compétente pour les ordonner

Le nouvel article 230-33 du code de procédure pénale définit les autorités compétentes pour autoriser une opération de géolocalisation en temps réel.

Dans le cadre d’une enquête dirigée par le parquet – enquête de flagrance, enquête préliminaire, enquête en recherche des causes de la mort, des causes d’une disparition ou d’une personne en fuite –, le 1° de l’article 230-33 prévoit un système d’autorisation mixte, en confiant en premier lieu au procureur de la République le soin d’autoriser une opération de géolocalisation en temps réel mais ce, uniquement pour une durée maximale limitée, dans la rédaction issue des travaux du Sénat, à huit jours consécutifs et non renouvelables.

Une fois passé ce délai, la poursuite des opérations de géolocalisation est soumise à l’autorisation expresse d’un magistrat du siège, en l’espèce le juge des libertés et de la détention, à la requête du ministère public, pour une durée d’un mois renouvelable, dans les mêmes conditions de forme et de durée. Dès lors que ces conditions – nécessité de l’enquête, seuil infractionnel, etc. – sont réunies, le renouvellement d’un mois peut être ordonné par le magistrat autant de fois qu’il le juge nécessaire à la manifestation de la vérité. Cette durée renouvelable d’un mois est d’ailleurs cohérente avec celle prévue, aux termes de l’article 706-95 du code de procédure pénale, pour les interceptions de communications téléphoniques dans le cadre de l’enquête préliminaire ou de flagrance (cf. tableau ci-dessous).

Lors de l’examen du présent projet de loi, la commission des Lois du Sénat a adopté un amendement de clarification de son rapporteur, précisant que les opérations de géolocalisation devraient être autorisées pour une durée de huit jours consécutifs et non pour des périodes successives équivalant à une durée totale de huit jours.

De surcroît, dans sa rédaction initiale, le 1° de l’article 230-33 fixait à quinze jours au lieu de huit la durée pendant laquelle une opération de géolocalisation pouvait être autorisée par le procureur de la République, avant d’être soumise par la suite à une décision du juge des libertés et de la détention. L’étude d’impact qui accompagne le présent projet de loi soulignait, à cet égard, que « cette durée de quinze jours, qui équivaut à celle de l’enquête de flagrance prolongée (15), est suffisamment courte pour justifier que le parquet, qui fait partie de l’autorité judiciaire comme l’a rappelé le Conseil Constitutionnel à de nombreuses reprises, puisse exercer des prérogatives particulières (16) » (17).

Le rapporteur au nom de la commission des Lois du Sénat avait également estimé que la solution initialement retenue par le Gouvernement était « équilibrée et conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme », laquelle « n’oblige pas le législateur à prévoir une autorisation d’un juge du siège préalablement à toute mesure de géolocalisation » (18).

Lors des débats en séance publique, le rapporteur et président de la commission des Lois du Sénat, M. Jean-Pierre Sueur, a très clairement rappelé que « la durée de quinze jours […] est compatible avec les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme, puisque celle-ci considère qu’un délai d’un mois est satisfaisant ».

En effet, dans son arrêt Uzun contre Allemagne en date du 2 septembre 2010 (19), la Cour de Strasbourg a constaté s’agissant de la législation allemande que « d’après l’article 163 f § 4 du code de procédure pénale, (…) lorsque la surveillance systématique d’un suspect dépasse une durée d’un mois, elle doit en fait être ordonnée par un juge [du siège]. La Cour se félicite de ce renforcement de la protection du droit d’un suspect au respect de sa vie privée ». Comme l’a rappelé M. Jean-Pierre Sueur, « est ainsi approuvée la possibilité de ne faire intervenir le contrôle judiciaire d’un juge du siège que passé un certain délai [un mois en l’espèce] après la mise en œuvre de la mesure dans le cadre d’une enquête. Avant l’expiration de ce délai, la mesure peut être effectuée sous le contrôle du procureur de la République » (20).

De la même manière, la ministre de la Justice, Mme Christiane Taubira, a souligné que « la Cour européenne des droits de l’homme n’ayant pas elle-même fixé de délai, [le Gouvernement a] choisi la durée de quinze jours, parce qu’il [lui] a paru cohérent de se régler sur le délai en vigueur pour l’enquête de flagrance prolongée » (21).

Cependant, lors de l’examen en séance publique du présent article, le Sénat a adopté, avec un avis de sagesse de la commission des Lois et contre l’avis du Gouvernement, un amendement de M. Jacques Mézard, ayant pour objet de ramener de quinze à huit jours la durée initiale pendant laquelle une opération de géolocalisation peut être autorisée par le procureur de la République, avant d’être soumise ensuite à une décision du juge des libertés et de la détention.

Lors de l’examen du présent article, votre Commission ne s’est toutefois pas montrée convaincue par la solution retenue par le Sénat et ce, pour plusieurs raisons.

En premier lieu, la durée de quinze jours initialement retenue par le Gouvernement est très clairement compatible avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, laquelle a approuvée, dans l’arrêt précité Uzun contre Allemagne, la possibilité de ne faire intervenir le contrôle d’un juge du siège qu’une fois passé le délai d’un mois après la mise en œuvre de la mesure dans le cadre d’une enquête. Avant l’expiration de ce délai, il convient de reconnaître que la mesure peut être effectuée sous le contrôle du ministère public.

En second lieu, cette durée de quinze jours répond à une véritable exigence d’efficacité opérationnelle dans la conduite des investigations. En effet, l’étude d’impact qui accompagne le présent projet de loi estime que près de huit demandes de géolocalisation en temps réel sur dix s’effectueront dans la limite des quinze jours initialement prévus par le présent projet.

Par conséquent, dans le respect de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, votre Commission a adopté, sur l’initiative conjointe de votre rapporteur et de M. Hugues Fourage, deux amendements identiques ramenant à quinze jours la durée initiale pendant laquelle une opération de géolocalisation peut être autorisée par le procureur de la République, avant d’être soumise à une décision du juge des libertés et de la détention.

Dans le cadre d’une instruction ou d’une information judiciaire pour recherche des causes de la mort ou des causes d’une disparition, le 2° de l’article 230-33 confie au juge d’instruction le soin d’autoriser, pour une durée de quatre mois renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée, une mesure de géolocalisation en temps réel. Cette durée maximale de quatre mois, laquelle pourra être renouvelée tant que les conditions justifiant la mesure seront réunies, est identique à celle aujourd’hui prévue aux termes de l’article 100-2 du code de procédure pénale pour les interceptions de communication téléphoniques réalisées dans le cadre d’une information judiciaire.

Dans tous les cas, la décision du procureur de la République, du juge d’instruction ou du juge des libertés et de la détention, doit être écrite ; elle ne constitue cependant pas un acte juridictionnel et n’est donc susceptible d’aucun recours.

Le tableau figurant ci-dessous compare le champ d’application et la durée des techniques spéciales d’enquête ainsi que les autorités compétentes pour les ordonner.

CHAMP D’APPLICATION, DURÉE ET AUTORITÉS JUDICIAIRES RESPONSABLES
DES TECHNIQUES SPÉCIALES D’ENQUÊTE

Techniques spéciales d’enquête

Infractions concernées

Durée de la mesure

Autorité judiciaire responsable de la mesure

Interceptions de correspondances émises par la voie des télécommunications

(art. 100 à 100-7 du code de procédure pénale)

Infractions relevant de la criminalité organisée visées par l’article 706-73 du code de procédure pénale

Durée maximale d’un mois, renouvelable une fois seulement

Juge des libertés et de la détention (JLD), saisi par le procureur de la République, dans le cadre d’une enquête de flagrance ou d’une enquête préliminaire

Infractions pour lesquelles la peine encourue est égale ou supérieure à deux ans d’emprisonnement

Durée maximale de quatre mois, renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée

Juge d’instruction, dans le cadre d’une information judiciaire

Sonorisation et fixation d’images de certains lieux ou véhicules

(art. 706-96 à 706-12 du code de procédure pénale)

Infractions relevant de la criminalité organisée visées par l’article 706-73 du code de procédure pénale

Durée maximale de quatre mois, renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée

Juge d’instruction, après avis du Procureur de la République

Juge des libertés et de la détention (JLD), en cas d’intervention dans un lieu d’habitation entre 21 heures et 6 heures

Captation des données informatiques

(art. 57-1, 76-3, 97-1 et 706-102-1 à 706-102-9 du code de procédure pénale)

Infractions relevant de la criminalité organisée visées par l’article 706 73 du code de procédure pénale

Durée maximale de quatre mois, renouvelable une fois seulement dans les mêmes conditions de forme

Juge d’instruction, après avis du Procureur de la République

Juge des libertés et de la détention (JLD), en cas d’intervention dans un lieu d’habitation entre 21 heures et 6 heures

Géolocalisation en temps réel d’un véhicule ou de tout autre objet

(art. 230-32 à 230-44 du code de procédure pénale)

Infractions contre les personnes pour lesquelles la peine encourue est égale ou supérieure à trois ans d’emprisonnement

et

Toute autre infraction pour laquelle la peine encourue est égale ou supérieure à cinq ans d’emprisonnement

et

Recherche des causes de la mort ou de blessures graves, des causes d’une disparition ou d’une personne en fuite

Durée maximale non renouvelable de huit jours consécutifs

Dans le cadre d’une enquête préliminaire ou de flagrance, procureur de la République

Puis, durée maximale d’un mois, renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée

Puis, juge des libertés et de la détention (JLD)

Durée maximale de quatre mois, renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée

Juge d’instruction, dans le cadre d’une information judiciaire

Article 230-34 : encadrement des hypothèses d’introduction dans un lieu privé afin d’installer un dispositif dédié de géolocalisation

Le nouvel article 230-34 du code de procédure pénale tend à encadrer les hypothèses, où il est nécessaire de s’introduire dans des lieux privés pour installer ou retirer un dispositif technique de géolocalisation en temps réel, en l’espèce une balise GPS.

Dans sa rédaction initiale, cet article prévoyait une gradation des garanties, correspondant, pour chaque type de lieu visé, au degré différencié d’atteinte à la vie privée.

Dans l’hypothèse la plus fréquente, consistant à s’introduire « dans des lieux privés destinés ou utilisés à l’entrepôt de véhicules, fonds, valeurs, marchandises ou matériel [c’est-à-dire le plus souvent un parking] ou dans un véhicule situé sur la voie publique ou dans de tels lieux, à l’insu ou sans le consentement du propriétaire ou de l’occupant des lieux ou du véhicule, ou de toute personne titulaire d’un droit sur celui-ci », l’introduction était, au préalable, subordonnée à l’autorisation écrite du magistrat ayant autorisé les opérations de géolocalisation, à savoir le procureur de la République dans le cadre d’une enquête judiciaire ou le juge d’instruction dans le cadre d’une information judiciaire.

En revanche, dès lors qu’il s’agissait de s’introduire dans un lieu privé autre que ceux visés ci-dessus et que les lieux d’habitation, comme un local professionnel par exemple, seule une enquête ou une instruction sur des faits punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement pouvait justifier la mesure, sous réserve d’une autorisation écrite du procureur de la République ou du juge d’instruction selon la procédure concernée.

S’agissant des lieux d’habitation, lesquels font l’objet d’une protection étroite du Conseil constitutionnel (22), l’article 230-34 instaurait, dans sa rédaction initiale, une distinction entre les procédures visées. Dans le cadre d’une enquête judiciaire, l’autorisation de s’introduire dans un lieu d’habitation était délivrée, par écrit, par le juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le procureur de la République. En revanche, dans le cadre d’une instruction, cette autorisation était délivrée, par écrit, par le juge d’instruction ou, si l’intrusion au sein du domicile intervenait entre 21 heures et 6 heures, par le juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le juge d’instruction.

Enfin, le dernier alinéa de l’article 230-34, qui n’a pas été modifié par le Sénat lors de l’examen en première lecture du présent article, entend exclure de toute possibilité d’intrusion le cabinet ou le domicile d’un avocat, les locaux d’une entreprise de presse, le cabinet d’un médecin, d’un avoué ou d’un huissier, le bureau et le domicile d’un parlementaire ou d’un magistrat. En effet, les articles 56-1, 56-2 et 56-3 ainsi que 100-7 du code de procédure pénale, auxquels le présent article renvoie, prévoient que ces professions ou fonctions bénéficient déjà d’une protection particulière en matière de perquisitions.

CONDITIONS D’AUTORISATION DES INTRUSIONS DANS DES LIEUX PRIVÉS
POUR LA MISE EN PLACE D’UN DISPOSITIF DÉDIÉ DE GÉOLOCALISATION

(Projet de loi initial)

Nature de la procédure

Entrepôts, véhicules sur voie publique ou dans des entrepôts

Lieux privés autres que les entrepôts et les lieux d’habitation (locaux professionnels)

Lieux d’habitation

Cabinet, bureau ou domicile des avocats, journalistes, médecins, notaires, huissiers, parlementaires et magistrats

Enquête judiciaire

Infractions punies d’au moins trois ans

Infractions punies d’au moins cinq ans

Infractions punies d’au moins cinq ans

Interdit

Décision du procureur de la République

Décision du procureur de la République

Décision du juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République

Information judiciaire

Infractions punies d’au moins trois ans

Infractions punies d’au moins cinq ans

Infractions punies d’au moins cinq ans

Interdit

Décision du juge d’instruction

Décision du juge d’instruction

Décision du juge d’instruction ou, en cas d’introduction de nuit, décision du juge des libertés et de la détention, saisi par le juge d’instruction

Le rapporteur de la commission des Lois du Sénat a cependant estimé que le dispositif initialement retenu pour encadrer les différentes hypothèses d’intrusion dans des lieux privés et présenté dans le tableau ci-dessus « n’échappait pas à une certaine complexité justifiée cependant par la nécessité d’écarter tout risque d’atteinte disproportionnée à la vie privée » (23). En outre, en portant de trois à cinq ans d’emprisonnement le seuil de peine encourue justifiant un éventuel usage de la géolocalisation en temps réel, la commission des Lois, sur l’initiative de son rapporteur a rendu intitule la distinction qui était initialement faite entre les différents types de lieux privés – autres que d’habitation – et le quantum de peine encourue.

Par conséquent, le Sénat a fait le choix de ne plus distinguer, en termes de procédure, les « lieux privés destinés ou utilisés à l’entrepôt de véhicules, fonds, valeurs, marchandises ou matériel » des « autres lieux privés hors habitation », la condition d’une infraction punie d’au moins cinq ans d’emprisonnement pour les d’atteintes aux biens et de trois ans d’emprisonnement pour les atteintes aux personnes s’appliquant à l’ensemble de ces locaux.

En revanche, dès lors que l’installation d’un dispositif de géolocalisation exige l’intrusion dans un lieu d’habitation, le respect du principe de l’inviolabilité du domicile nécessite le maintien de conditions procédurales spécifiques. Ainsi, en pareil cas, il revient à un magistrat du siège – juge d’instruction ou juge des libertés et de la détention selon la procédure visée – d’autoriser par écrit l’intrusion dans un lieu d’habitation. De la même manière, les garanties protégeant de toute intrusion les locaux de professions ayant accès à des données sensibles ont été maintenues.

CONDITIONS D’AUTORISATION DES INTRUSIONS DANS DES LIEUX PRIVÉS
POUR LA MISE EN PLACE D’UN DISPOSITIF DÉDIÉ DE GÉOLOCALISATION

(Texte adopté par le Sénat)

Nature de la procédure

Véhicules sur voie publique ou dans
un lieu public et lieux privés autres que les lieux d’habitation

Lieux d’habitation

Cabinet, bureau ou domicile des avocats, journalistes, médecins, notaires, huissiers, parlementaires et magistrats

Enquête judiciaire

Décision du procureur de la République

Décision du juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République

Interdit

Information judiciaire

Décision du juge d’instruction

Décision du juge d’instruction ou, en cas d’introduction de nuit (entre 21 heures et 6 heures), décision du juge des libertés et de la détention, saisi par le juge d’instruction

Interdit

Cependant, tirant les conséquences du rétablissement, à l’article 230-32 du code de procédure pénale, d’un seuil d’emprisonnement encouru de trois ans, toutes infractions confondues, pour procéder à une géolocalisation en temps réel, votre Commission a adopté deux amendements de votre rapporteur réintroduisant la distinction initialement faite par le projet de loi entre :

—  d’une part, « les lieux privés destinés ou utilisés à l’entrepôt de véhicules, fonds, valeurs, marchandises ou matériel », dans lesquels il sera possible de s’introduire dans le cadre d’une enquête ou d’une information judiciaire relative à un délit puni de trois ans d’emprisonnement ;

—  d’autre, les autres lieux privés – professionnels et d’habitation –, lesquels nécessiteront que l’enquête ou l’instruction porte une infraction punie d’au moins cinq ans d’emprisonnement pour pouvoir s’y introduire.

Article 230-35 : définition des conditions dérogatoires de mise en œuvre des opérations de géolocalisation en cas d’urgence

Le présent article insère également, dans le code de procédure pénale, un nouvel article 230-35, ayant pour objet de définir des règles procédurales dérogatoires pour la mise en œuvre d’opérations de géolocalisation en cas d’urgence, laquelle peut résulter soit « d’un risque imminent de dépérissement des preuves », soit « d’un risque imminent d’atteinte grave aux personnes ou aux biens ».

Afin d’adapter la législation aux nécessités opérationnelles résultant de certaines situations urgentes, tout en conservant aux autorisations la forme nécessaire à l’exercice des droits de la défense, l’article 230-35 prévoyait, dans sa rédaction initiale, que les opérations de géolocalisation pouvaient être mises en place ou prescrites directement par un officier de police judiciaire après accord préalable du magistrat compétent, cet accord pouvant être donné par tout moyen – y compris oralement. Cette autorisation préalable pouvait également porter sur l’intrusion dans un lieu privé pour la pose d’une balise : le véhicule, le garage ainsi que le local d’habitation.

Cet article 230-35 accordait également au magistrat ayant autorisé l’usage de la géolocalisation – procureur de la République ou juge d’instruction suivant la procédure visée –, un délai de quarante-huit heures pour confirmer, par écrit, la poursuite des opérations. À défaut d’une telle autorisation dans ce délai, il était mis fin à la mesure.

Le président et rapporteur de la commission des Lois du Sénat, M. Jean-Pierre Sueur, a cependant estimé que, « dans un certain nombre de circonstances, le maintien d’un accord préalable, même obtenu par tout moyen, en cas d’urgence, pouvait s’avérer incompatible avec la vitesse d’exécution requise par l’installation d’une balise » (24).

Par conséquent, sur son initiative, le Sénat a adopté un amendement tendant à préserver, dans les situations d’urgence, une marge d’initiative spontanée de l’officier de police judiciaire, en lui permettant de poser une balise sans avoir recueilli au préalable l’accord d’un magistrat. Celui-ci devra, en revanche, en être avisé a posteriori par tout moyen – notamment par fax ou par téléphone –, tout comme dans le cas du placement en garde à vue. En contrepartie, l’autorisation écrite du magistrat devra désormais intervenir dans un délai maximal de douze heures, et non de quarante-huit heures comme le prévoyait initialement le projet de loi. Cette possibilité ne sera ouverte à l’officier de police judiciaire qu’en cas de risque imminent de dépérissement des preuves ou d’atteinte grave aux personnes ou aux biens.

Enfin, la solution retenue par le Sénat prévoit qu’en cas d’introduction en urgence dans un lieu d’habitation afin d’y installer une balise, un accord préalable, donné par tout moyen, du juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République, ou du juge d’instruction, selon qu’il s’agisse d’une enquête ou d’une information judiciaire, restera nécessaire. Si, dans le cadre d’une instruction, cette intrusion doit intervenir la nuit, entre 21 heures et 6 heures, l’officier de police judiciaire devra recueillir au préalable l’autorisation du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le juge d’instruction.

MISE EN PLACE EN URGENCE D’UNE OPÉRATION DE GÉOLOCALISATION

Nature de la procédure

Opération de géolocalisation en urgence, sans intrusion dans un lieu d’habitation

Opération de géolocalisation en urgence, avec intrusion dans un lieu d’habitation

Opération de géolocalisation en urgence, avec intrusion dans un lieu d’habitation la nuit, entre 21 heures et 6 heures

Enquête judiciaire

1) Pouvoir d’initiative de l’officier de police judiciaire.

2) Information immédiate et par tout moyen du procureur de la République ou du juge d’instruction.

3) Délai de 12 heures laissé au magistrat pour prescrire, par décision écrite, la poursuite de l’opération.

Accord préalable, donné par tout moyen,
du juge des libertés et de la détention,
saisi par le procureur de la République

Information judiciaire

Accord préalable, donné par tout moyen, du juge d’instruction

Accord préalable, donné par tout moyen, du juge des libertés et de la détention, saisi par le juge d’instruction

Lors de l’examen en séance publique du présent article, le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement destiné à assurer la sécurité juridique des procédures de géolocalisation mises en place en urgence et ce, à deux égards ;

—  d’une part, l’article 230-35 prévoit désormais que, lorsqu’il est avisé de la décision prise d’initiative par le seul officier de police judiciaire, le magistrat – procureur de la République ou juge d’instruction – doit pouvoir immédiatement ordonner la main levée de la géolocalisation, comme en matière de garde à vue ;

—  d’autre part, ce même article fait obligation au magistrat autorisant dans les douze heures la poursuite de l’opération de géolocalisation d’indiquer expressément, dans sa décision écrite, les circonstances de fait établissant l’existence d’un risque imminent de disparition des preuves ou d’atteinte grave aux personnes ou aux biens et ayant justifié l’intervention en urgence sur décision du seul officier de police judiciaire.

Votre Commission a adopté un amendement de votre rapporteur, destiné à clarifier la rédaction de ces dispositions, sans les modifier sur le fond.

Article 230-36 : définition des catégories d’agents susceptibles d’être requis pour l’installation des dispositifs techniques de géolocalisation

À l’instar des dispositions prévues à l’article 706-99 du code de procédure pénale en matière de sonorisation et de fixation d’images, le nouvel article 230-36 du code de procédure pénale définit les catégories d’agents auxquelles le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire commis par lui ou autorisé par le procureur de la République pourront avoir recours pour l’installation des dispositifs techniques de géolocalisation.

Dans cette perspective, l’article 230-36 prévoit que pourra être requis « tout agent qualifié d’un service, d’une unité ou d’un organisme placé sous l’autorité ou la tutelle du ministre de l’Intérieur et dont la liste est fixée par décret ». Il s’agit essentiellement, selon le ministère de l’Intérieur, du RAID, du groupe d’intervention de la police nationale (GIPN) et du groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN).

Le recours exclusif à des agents d’organismes placés sous l’autorité ou la tutelle du ministre de l’Intérieur permettra de garantir la déontologie des agents chargés des installations des dispositifs de géolocalisation et limitera le risque de détournement de la procédure de géolocalisation.

Sur proposition de M. Lionel Tardy, votre Commission a complété ce nouvel article 230-36 du code de procédure pénale, afin de préciser que ces agents pourront également être requis pour le retrait – et non pour la seule installation – des dispositifs techniques de géolocalisation.

Article 230-37 : principe du contrôle des opérations de géolocalisations par le magistrat les ayant autorisées

Le respect de l’objet et de la finalité des opérations d’installation d’un dispositif technique de géolocalisation est garanti par le premier alinéa du nouvel article 230-37 du code de procédure pénale, qui prévoit que l’ensemble de ces opérations sont conduites sous le contrôle du magistrat qui les a autorisées ou a autorisé leur poursuite.

Par ailleurs, si d’autres infractions venaient à être découvertes grâce aux opérations de géolocalisation, le second alinéa de cet article 230-37 précise que « le fait que ces opérations révèlent des infractions autres que celles visées dans la décision de ce magistrat ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes ».

Une telle disposition validant les procédures incidentes existe d’ores et déjà en matière de perquisitions (articles 76 et 706-93 du code de procédure pénale), de visites de véhicule (article 78-2-2) et de sonorisation de véhicule ou de domicile (article 706-96). En effet, il est certes indispensable que les opérations menées avec un autre but que celui pour lequel le magistrat les a autorisées soient frappées de nullité, afin que les enquêteurs ne puissent détourner la mesure de son objet. Mais il importe également que cette nullité ne soit pas étendue aux autres infractions que les opérations de géolocalisation ont pu incidemment révéler sans que l’objet de la mesure ait été détourné par les enquêteurs.

Article 230-38 : application des règles procédurales de droit commun aux opérations de géolocalisation d’un terminal de télécommunication, d’un véhicule ou de tout autre objet détenu par la victime ou une personne disparue

Dans sa rédaction initiale, le nouvel article 230-38 du code de procédure pénale définissait les règles procédurales ayant vocation à s’appliquer aux opérations de géolocalisation en temps réel d’un terminal de télécommunication, d’un véhicule ou de tout autre objet détenu par la victime d’une infraction ou une personne disparue.

Dans un souci de cohérence, votre Commission a adopté un amendement de votre rapporteur supprimant l’article 230-38 relatif aux victimes, en vue de l’insérer à la fin du nouveau chapitre V relatif à la géolocalisation du titre IV du livre Ier du code de procédure pénale (cf. infra).

Article 230-39 : principe de l’établissement de procès-verbaux pour chaque opération d’installation d’un dispositif technique de géolocalisation

Introduit par la commission des Lois du Sénat, sur l’initiative de son rapporteur, le nouvel article 230-39 du code de procédure pénale dispose qu’un « procès-verbal de chacune des opérations de mise en place du dispositif technique et des opérations d’enregistrement des données de localisation » est dressé par l’officier de police judiciaire. Ce procès-verbal devra mentionner « la date et l’heure auxquelles l’opération a commencé et celles auxquelles elle s’est terminée ». Par ailleurs, les enregistrements des données informatiques seront placés sous scellés fermés.

Ces dispositions, qui ont leur équivalent en matière d’interceptions téléphoniques, de sonorisation de véhicule ou de domicile et de captation de données informatiques aux termes respectivement des articles 100-4, 706-100 et 706-102-7 du code de procédure pénale, permettront aux magistrats saisis du dossier de vérifier la validité du déroulement des opérations de géolocalisation et de garantir la bonne conservation des données enregistrées, à des fins probatoires.

Article 230-40 : principe de l’établissement de procès-verbaux transcrivant les données de localisation utiles à l’enquête

Également issu d’un amendement du rapporteur au nom de la commission des Lois du Sénat, le nouvel article 230-40 du code de procédure pénale définit l’utilisation qui est faite des données de localisation enregistrées dans le cadre de la procédure de géolocalisation instaurée par le présent projet de loi. Dans cette perspective, cet article prévoit expressément que « l’officier de police judiciaire décrit ou transcrit, dans un procès-verbal qui est versé au dossier, les données qui sont utiles à la manifestation de la vérité ».

Ces dispositions, qui ont leur équivalent en matière d’interceptions téléphoniques, de sonorisation de véhicule ou de domicile et de captation de données informatiques aux termes respectivement des articles 100-5, 706-101 et 706-102-8 du code de procédure pénale, sont destinées à « assurer une certaine uniformité dans la rédaction des dispositions relatives aux diverses techniques spéciales d’enquête » (25).

Elles permettent, en outre, d’assurer la conformité du dispositif avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui en matière de sonorisation de véhicule ou de domicile avait considéré que, si « l’article 706-101 nouveau du code de procédure pénale limite aux seuls enregistrements utiles à la manifestation de la vérité le contenu du procès-verbal, établi par le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire commis par lui, qui décrit ou transcrit les images ou les sons enregistrés, (…) le législateur a nécessairement entendu que les séquences de la vie privée étrangères aux infractions en cause ne puissent en aucun cas être conservées dans le dossier de la procédure » (26).

En prévoyant expressément que ne pourront être conservées, dans le dossier de la procédure, que les seules données utiles à la manifestation de la vérité, conformément à la réserve d’interprétation formulée en 2004 par le Conseil constitutionnel, le nouvel article 230-40 permet de concilier le respect de la vie privée avec l’efficacité des moyens d’enquête, en interdisant tout détournement de la procédure à des fins autres que le recueil d’indices ou de preuves sur les infractions ayant justifié le recours à la mesure de géolocalisation.

Articles 230-41 à 230-43 : possibilité, en matière de criminalité organisée, de ne pas verser au dossier de la procédure les modalités d’installation d’un dispositif de géolocalisation

Lors de l’examen du présent article par le Sénat, son rapporteur s’est montré attaché à la prise en compte de « l’hypothèse où une balise serait installée par, ou grâce à l’aide, soit d’un informateur, soit d’un citoyen ou d’un témoin désireux de venir en aide aux forces de l’ordre ». En pareil cas, « l’apparition dans le dossier de la procédure des modalités (lieu, date et heure) de cette installation les mettrait en grave danger, les malfaiteurs pouvant alors aisément découvrir l’identité de l’informateur ou du témoin » (27).

Afin de répondre à ces situations susceptibles de mettre gravement en danger la vie ou l’intégrité physique d’une personne, la commission des Lois du Sénat a adopté, sur proposition de son rapporteur, un amendement instaurant, aux articles 230-41 à 230-43 du code de procédure pénale, une procédure similaire à celle prévue aux articles 706-58 et suivants de ce même code pour les témoignages anonymes.

Ainsi, dans sa rédaction issue des travaux du Sénat en première lecture, le nouvel article 230-41 prévoyait que, si la connaissance de la date, de l’heure, du lieu ou du moyen technique de géolocalisation est susceptible de mettre gravement en danger la vie ou l’intégrité physique d’une personne, sans pour autant que ces informations soient utiles à la manifestation de la vérité, le juge des libertés et de la détention puisse, sur requête motivée faite à tout moment par le juge d’instruction, autoriser par décision motivée que ces éléments, ainsi que les premières données de localisation, n’apparaissent pas dans le dossier principal de la procédure.

Ces données ont alors vocation à être inscrites dans un autre procès-verbal, lui-même versé dans un dossier distinct. Seule est jointe au dossier principal de la procédure la décision du juge des libertés et de la détention de ne pas faire apparaître la date, l’heure, le lieu où le moyen technique destiné à la localisation en temps réel est mis en place ainsi que les premières données de localisation.

Toutefois, votre Commission a estimé que la rédaction proposée par le Sénat, en limitant le contenu de ce dossier distinct aux seules modalités – lieu, date, heure et premières données – d’installation du dispositif technique de géolocalisation n’était pas en mesure d’assurer une protection absolue des témoins et informateurs.

Elle a, en conséquence, adopté un amendement de son président, M. Jean-Jacques Urvoas, laissant à l’appréciation du juge des libertés et de la détention le soin de décider quels éléments peuvent être versés dans le dossier distinct du dossier principal de la procédure, sous réserve que ces informations ne soient pas strictement nécessaires à la manifestation de la vérité. Il convient, en effet, de faire confiance aux magistrats, garants des libertés individuelles, pour rechercher et constater les infractions, sans mettre en danger la vie ou l’intégrité physique des personnes accordant leur concours aux forces de sécurité dans leurs missions d’investigations.

Par ce même amendement, votre Commission a étendu cette protection qu’est la possibilité de garder secrètes certaines informations non nécessaires à la manifestation de la vérité, aux membres de la famille ainsi qu’aux proches des témoins ou des citoyens aidant la police ou la gendarmerie pour l’installation d’une balise. En effet, comme le rappelle l’exposé des motifs de cet amendement, « la criminalité organisée n’hésite pas à se livrer à des représailles à l’encontre de l’environnement familial de ces individus ou à formuler des menaces qui constituent autant de moyens de pression nuisant à la manifestation de la vérité ».

En revanche, comme le Sénat l’avait envisagé, votre Commission a réservé cette possibilité offerte au juge des libertés et de la détention de ne pas faire apparaître dans le dossier principal de la procédure certaines informations aux seules infractions relevant de la criminalité organisée mentionnées à l’article 706-73 du code de procédure pénale.

Les infractions relevant de la criminalité organisée visées
par l’article 706-73 du code de procédure pénale

L’article 706-73 du code de procédure pénale énumère les crimes et délits considérés comme relevant de la criminalité et de la délinquance organisée, pour lesquels la procédure applicable à l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement comporte des règles spéciales destinées à permettre une répression efficace.

Ces crimes et délits sont les suivants :

1° crime de meurtre commis en bande organisée prévu par le 8° de l’article 221-4 du code pénal ;

2° crime de tortures et d’actes de barbarie commis en bande organisée prévu par l’article 222-4 du code pénal ;

3° crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-40 du code pénal ;

4° crimes et délits d’enlèvement et de séquestration commis en bande organisée prévus par l’article 224-5-2 du code pénal ;

5° crimes et délits aggravés de traite des êtres humains prévus par les articles 225-4-2 à 225-4-7 du code pénal ;

6° crimes et délits aggravés de proxénétisme prévus par les articles 225-7 à 225-12 du code pénal ;

7° crime de vol commis en bande organisée prévu par l’article 311-9 du code pénal ;

8° crimes aggravés d’extorsion prévus par les articles 312-6 et 312-7 du code pénal ;

bis Délit d’escroquerie en bande organisée prévu par le dernier alinéa de l’article 313-2 du code pénal ;

9° crime de destruction, dégradation et détérioration d’un bien commis en bande organisée prévu par l’article 322-8 du code pénal ;

10° crimes en matière de fausse monnaie prévus par les articles 442-1 et 442-2 du code pénal ;

11° crimes et délits constituant des actes de terrorisme prévus par les articles 421-1 à 421-6 du code pénal ;

12° délits en matière d’armes et de produits explosifs commis en bande organisée, prévus par les articles L. 2339-2, L. 2339-3, L. 2339-10, L. 2341-4, L. 2353-4 et L. 2353-5 du code de la défense ainsi que par les articles L. 317-2, L. 317-4 et L. 317-7 du code de la sécurité intérieure ;

13° délits d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d’un étranger en France commis en bande organisée prévus par le quatrième alinéa du I de l’article 21 de l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France ;

14° délits de blanchiment prévus par les articles 324-1 et 324-2 du code pénal, ou de recel prévus par les articles 321-1 et 321-2 du même code, du produit, des revenus, des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° à 13° ;

15° délits d’association de malfaiteurs prévus par l’article 450-1 du code pénal, lorsqu’ils ont pour objet la préparation de l’une des infractions mentionnées aux 1° à 14° et 17° ;

16° délit de non-justification de ressources correspondant au train de vie, prévu par l’article 321-6-1 du code pénal, lorsqu’il est en relation avec l’une des infractions mentionnées aux 1° à 15° et 17° ;

17° crime de détournement d’aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport commis en bande organisée prévu par l’article 224-6-1 du code pénal ;

18° crimes et délits punis de dix ans d’emprisonnement, contribuant à la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs entrant dans le champ d’application de l’article 706-167 ;

19° délit d’exploitation d’une mine ou de disposition d’une substance concessible sans titre d’exploitation ou autorisation, accompagné d’atteintes à l’environnement, commis en bande organisée, prévu à l’article L. 512-2 du code minier, lorsqu’il est connexe avec l’une des infractions mentionnées aux 1° à 17°.

Sur le modèle de l’article 706-60 du code de procédure pénale en matière de témoignages anonymes, le nouvel article 230-42 de ce code garantit le respect des droits de la défense, en reconnaissant à la personne mise en examen ou au témoin assisté, la possibilité de contester devant le président de la chambre d’instruction le recours à cette procédure dérogatoire et de demander l’annulation de la géolocalisation afférente et ce, dans un délai de dix jours à compter de la date à laquelle il lui en a été donné connaissance.

Lors de l’examen en séance publique du présent article, le Sénat a adopté, sur proposition du Gouvernement, un amendement permettant au président de la chambre de l’instruction d’ordonner l’annulation de la géolocalisation en cas d’irrégularité dans la mise en place des opérations de localisation en temps réel ou de non-respect des conditions fixées à l’article 230-41 du code de procédure pénale (cf. supra). Il en ira de même si les informations ne figurant pas dans le dossier principal de la procédure s’avèrent indispensables à l’exercice des droits de la défense.

Par l’adoption de cet amendement du Gouvernement, le Sénat a également introduit, à l’article 230-42 du code de procédure pénale, la possibilité, pour le président de la chambre d’instruction, d’ordonner le versement au dossier principal de la procédure des informations qui en avaient été initialement écartées, dès lors que la connaissance de ces dernières n’est pas ou plus susceptible de mettre en danger la vie ou l’intégrité physique d’une personne.

Votre Commission a, pour sa part, adopté deux amendements. Le premier de son président, M. Jean-Jacques Urvoas, tire les conséquences, à l’article 230-42 du code de procédure pénale, de l’extension à l’article 230-41 de ce même code de la protection offerte aux membres de la famille et aux proches des personnes ayant apporté leur concours aux services d’investigations pour la pose d’une balise.

Le second de son rapporteur précise qu’en cas de contestation du recours à cette procédure dérogatoire par la personne mise en examen ou le témoin assisté, le président de la chambre d’instruction statue par décision motivée – susceptible d’aucun recours – au vu des pièces de la procédure et de celles figurant, en application de l’article 230-41, dans le dossier distinct. Cette disposition avait été supprimée par erreur lors de l’examen en séance publique au Sénat.

Enfin, le nouvel article 230-43 du code de procédure pénale fait obstacle à ce qu’une condamnation puisse être prononcée sur le seul fondement des éléments recueillis dans le dossier distinct. Cette règle est cependant écartée, si le président de la chambre d’instruction a ordonné que les informations initialement gardées secrètes soient par la suite versées au dossier principal de la procédure (cf. supra).

En définitive, par cette procédure de dossier distinct, très fortement inspirée de celle du témoignage anonyme déjà inscrite à l’article 706-58 du code de procédure pénale, il s’agit bien de protéger non seulement les témoins ou les citoyens qui auraient aidé la police pour l’installation d’une balise, et à titre accessoire des informateurs, mais également les membres de leur famille ainsi que leurs proches.

Article 230-44 : principe de la destruction des enregistrements des données de localisation

À l’image des dispositions actuellement prévues à l’article 706-102 du code de procédure pénale en matière de sonorisation et de fixation d’images et à l’article 706-102-9 du même code en matière de captation de données informatiques, le nouvel article 230-44 du code de procédure pénale définit le sort des enregistrements conservés sous scellés.

Il est ainsi précisé que « les enregistrements des données de localisation sont détruits, à la diligence du procureur de la République ou du procureur général, à l’expiration du délai de prescription de l’action publique ». Le dernier alinéa de l’article 230-44 prévoit qu’il sera dressé procès-verbal de l’opération de destruction.

Article 230-45 : application des règles procédurales de droit commun aux opérations de géolocalisation d’un terminal de télécommunication, d’un véhicule ou de tout autre objet détenu par la victime ou une personne disparue

Issu d’un amendement de votre rapporteur, le nouvel article 230-45 du code de procédure pénale reprend, sans les modifier sur le fond, les dispositions figurant initialement à l’article 230-38 de ce même code.

Cet article concerne les cas où les services enquêteurs souhaitent localiser en temps réel le terminal de télécommunication, le véhicule ou tout autre objet de la victime d’une infraction ou d’une personne disparue, afin de la retrouver.

Comme l’a souligné le rapporteur au nom de la commission des Lois du Sénat, « dans la mesure où il ne s’agit pas de rassembler des preuves contre elle mais de lui venir en aide, le cadre juridique protecteur des libertés mis en place par le présent projet de loi ne s’appliquera pas » (28).

Par conséquent, les opérations de géolocalisation en temps réel, réalisées dans l’intérêt de la victime d’une infraction ou de la personne disparue, pourront être menées, comme elles le sont aujourd’hui, dans le cadre des pouvoirs ordinaires de réquisition du procureur de la République ou du juge d’instruction.

Lors de l’examen en séance publique, le Sénat a adopté, sur proposition du Gouvernement, un amendement de réécriture de ces dispositions, précisant que la procédure de géolocalisation, instaurée par le présent projet de loi à l’encontre des personnes soupçonnées d’avoir commis une infraction, n’a pas vocation à s’appliquer dès lors qu’il s’agit de localiser en temps réel, non seulement la victime d’une infraction avec son téléphone, mais également une personne disparue ou un objet appartenant à la victime et qui lui aurait été dérobé – par exemple, un véhicule muni d’un « traqueur ».

*

* *

La Commission examine les amendements identiques CL21 du rapporteur et CL3 de M. Hugues Fourage.

Ces amendements font l’objet de sous-amendements respectivement identiques entre eux : les sous-amendements CL42 et CL44 de M. Lionel Tardy, CL47 et CL19 de M. Sergio Coronado, CL43 et CL45 de M. Lionel Tardy, CL46 et CL48 du même auteur.

M. le rapporteur. Le texte adopté par le Sénat circonscrit le recours à la géolocalisation aux délits contre les personnes punis d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à trois ans ainsi qu’à tout autre crime ou délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans.

Le compromis auquel est parvenu le Sénat ne me semble pas satisfaisant à ce stade de la procédure parlementaire : il manque de visibilité pour le magistrat et repose sur une définition trop restrictive du champ d’application de la géolocalisation en temps réel. Il conduit en effet à exclure du champ de la mesure des délits punis de trois ans d’emprisonnement ne constituant pas une atteinte aux personnes mais pour lesquels une opération de géolocalisation sera à l’évidence indispensable.

Or peuvent être punis de trois ans d’emprisonnement les menaces de mort, le harcèlement sexuel aggravé, l’évasion d’un détenu ou la non-représentation aggravée d’enfant. S’agissant de l’évasion d’un détenu, il est pertinent, encore une fois, qu’un gendarme ou un service de police puisse recourir à la géolocalisation. De même, si un véhicule volé est soupçonné d’être utilisé pour commettre d’autres infractions, comme le trafic de stupéfiants en matière de « go fast », les services d’investigation auront besoin, dans une enquête pour vol simple, de recourir à une mesure complémentaire de géolocalisation en temps réel.

Nous devons faire confiance aux magistrats comme aux OPJ pour agir avec discernement. Ramener à trois ans au moins, toutes infractions confondues, la durée minimale d’emprisonnement encouru pour pouvoir recourir aux opérations de géolocalisation en temps réel permettrait de répondre aux attentes des forces de l’ordre.

M. Hugues Fourage. Je souscris pleinement à l’argumentaire du rapporteur.

M. Lionel Tardy. S’agissant des sous-amendements CL42 et CL44, l’expression « tout autre objet » concerne, si j’ai bien compris, les objets connectés. Nous sommes conscients que, compte tenu du développement de ceux-ci, le projet de loi a laissé une grande marge de manœuvre aux forces de l’ordre. Mais celle-ci est peut-être un peu trop grande : si je ne crois pas qu’il faille réduire ces objets aux voitures, aux autres moyens de transport ou aux téléphones portables, cette extension de la géolocalisation doit donner lieu à plus de précaution. Il ne faudrait pas qu’on puisse suivre n’importe quel objet, comme par exemple un objet connecté lié à la santé des individus.

Je propose donc que les catégories d’objets visés soient définies par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). À défaut, elles pourraient être fixées par arrêté, comme le prévoit le sous-amendement de repli CL43. La transparence sur ce sujet est la meilleure des solutions, sachant qu’il ne s’agit pas de restreindre le champ du texte.

M. le rapporteur. Avis défavorable à ces sous-amendements. Il convient de faire confiance aux magistrats, garants des libertés individuelles, pour mettre en œuvre avec discernement et responsabilité les mesures de géolocalisation.

De plus, un décret dressant la liste des objets pouvant être géolocalisés pourrait constituer un obstacle à l’avancement de certaines enquêtes, compte tenu du nombre croissant d’objets pouvant donner lieu à une telle opération au vu des évolutions technologiques.

M. Sergio Coronado. Les sous-amendements CL47 et CL19 reposent sur les mêmes arguments que ceux de M. Tardy. Il est nécessaire que la liste des objets pouvant donner lieu à une géolocalisation soit fixée par décret en Conseil d’État, sinon par arrêté, après consultation de la CNIL. Cela tombe sous le sens.

Par ailleurs, si le progrès technique a pour conséquence que la plupart des objets ont vocation à devenir connectés, certains pourraient concerner des données de santé ou d’autres types de données nécessitant des précautions particulières.

À cet égard, le fait que l’autorisation soit donnée par un magistrat ne constitue pas une garantie suffisante, d’autant qu’il n’y a pas de possibilité de recours contre la décision de procéder à une géolocalisation, comme l’a fait remarquer notre collègue Philippe Houillon.

M. Philippe Houillon. Monsieur le rapporteur, je pense aussi qu’il faut faire confiance aux OPJ et aux magistrats, mais a fortiori la confiance existe lorsqu’il y a les garde-fous que constituent les voies de recours. Or je n’ai pas eu de réponse sur ce point.

M. Hugues Fourage. Il s’agit de géolocalisation, non d’accès à des données médicales.

Par ailleurs, il faut être pragmatique : on a toujours un temps de retard sur les moyens auxquels la délinquance peut avoir recours. Si on fixe la liste des objets pouvant donner lieu à une géolocalisation, on fige le dispositif et il faudra chaque fois le modifier pour tenir compte des nouvelles évolutions technologiques. Donnons aux forces de l’ordre les moyens de faire leur travail !

Enfin, n’oublions pas qu’au bout de quinze jours, l’opération de géolocalisation est soumise au contrôle du JLD.

M. Lionel Tardy. On sait que, demain, d’innombrables objets fixes seront connectés. Limitez au moins le texte aux objets mobiles ! En sa rédaction actuelle, la portée du texte est trop large.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Nous en restons bien sûr à l’examen des amendements déposés, dont aucun n’opère cette distinction.

M. Sergio Coronado. S’il s’agit, monsieur le rapporteur, de ne pas être dépassés par l’ingéniosité des délinquants, choisissez, dans les deux options qui vous sont proposées, celle de l’arrêté. Sur le fond, notre collègue Fourage explique que nous avons toujours un temps de retard sur les criminels. Mais c’est parce que la France, État de droit, prend le temps de réfléchir à ce que doivent être les meilleures dispositions législatives. C’est la contrainte que s’impose un État respectueux des conventions internationales dont il est signataire. On ne fait pas confiance a priori : on encadre, on mesure – et on a suffisamment d’expérience pour savoir que des abus sont possibles. Ce dont il s’agit ici, c’est préserver l’équilibre entre la protection des biens et des personnes d’une part, le respect des libertés fondamentales d’autre part.

M. Lionel Tardy. L’équilibre trouvé au Sénat me paraît convenable. Il a permis de modérer et d’encadrer certains points du texte. Pourquoi vouloir défaire tout cela ? Les sous-amendements identiques CL46 et CL48 visent à maintenir la règle permettant le recours à la géolocalisation pour des crimes et délits punis de cinq ans d’emprisonnement, avec cependant une exception – car je comprends l’argument avancé par la garde des Sceaux : un délit prévu par le livre II du code pénal mérite que l’on abaisse cette durée à trois ans.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission rejette successivement les sous-amendements CL42 et CL44, CL47 et CL19, CL43 et CL45, et CL46 et CL48.

Elle adopte ensuite les amendements identiques CL21 et CL3.

En conséquence, les amendements CL5 et CL6 de M. Lionel Tardy, l’amendement CL17 de M. Sergio Coronado et l’amendement CL7 de M. Lionel Tardy tombent. 

La Commission examine ensuite les amendements identiques CL10 de M. Lionel Tardy et CL18 de M. Sergio Coronado.

M. Lionel Tardy. L’amendement CL10 reprend un amendement défendu au Sénat par notre collègue sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam. Comme elle, je considère que se passer de l’approbation préalable d’un juge peut être acceptable pour des enquêtes de flagrance ou en cas d’urgence, mais pas dans le cadre d’enquêtes préliminaires ordinaires.

M. Sergio Coronado. Nous considérons également que le contrôle a priori s’impose dans les enquêtes préliminaires.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Dans l’arrêt Uzun contre Allemagne, la Cour européenne des droits de l’homme a demandé l’approbation de la mesure de géolocalisation par un juge du siège non pas immédiatement, mais à un certain stade de la procédure ; le rôle du procureur de la République n’était donc pas remis en cause. Elle a également validé le fait que l’intervention du juge pouvait intervenir dans le délai d’un mois ; or je vous proposerai dans un instant de fixer ce délai à quinze jours. Je rappelle par ailleurs que la procédure de géolocalisation a lieu, dans la plupart des cas, dans le cadre des enquêtes préliminaires, qui ne donnent pas nécessairement lieu à l’ouverture d’une information judiciaire. En conséquence, les procureurs de la République sont parfaitement fondés à ordonner une telle mesure et il ne convient pas de les déposséder de cette prérogative.

La Commission rejette ces amendements.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL9 de M. Lionel Tardy

M. Lionel Tardy. Si nous sommes réunis ce soir, c’est que la Cour de cassation et la Cour européenne des droits de l’homme ont estimé que l’intervention d’un magistrat du siège était nécessaire. Son intervention à l’issue d’un délai de huit jours donne-t-elle une garantie suffisante ? C’est en tout cas mieux qu’après quinze jours, mais ne faudrait-il pas la prévoir dès la mise en œuvre de la géolocalisation ? Je vous renvoie à ce sujet aux craintes, peu rassurantes, exprimées par le bâtonnier de Paris. Le scandale « Prism » a entraîné une méfiance justifiée. Ce délai doit être le plus court possible.

M. le rapporteur. Avis défavorable. La Cour européenne des droits de l’homme a validé le fait que l’intervention du juge pouvait intervenir dans le délai d’un mois, et je vais vous soumettre, dans un instant, un amendement posant le principe que l’autorisation d’un magistrat du siège doit avoir lieu dans un délai de 15 jours. La jurisprudence de la Cour de Strasbourg sera ainsi respectée.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques CL4 de M. Hugues Fourage et CL22 du rapporteur.

M. Pascal Popelin. Ces amendements visent à rétablir la durée de quinze jours initialement prévue par le projet de loi pour permettre au procureur de la République d’autoriser une mesure de géolocalisation, avant l’intervention du juge des libertés et de la détention (JLD) passé ce délai. Cette durée apparaît plus opérationnelle, sans pour autant être excessive.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’amendement CL8 de M. Lionel Tardy tombe. 

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL23, CL26 et CL24, les amendements de conséquence CL25 et CL27 et l’amendement rédactionnel CL28, tous du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL11 de M. Lionel Tardy. 

M. Lionel Tardy. L’alinéa 9 traite de la mise en place ou du retrait des balises. L’amendement tend, dans un souci d’harmonisation, à ce que le retrait soit mentionné à chaque fois que l’installation est évoquée.

M. le rapporteur. Ce serait inscrire dans la loi l’autorisation de retirer des balises dont la loi empêche qu’elles aient été posées. En effet, le nouvel article 230-34 du code de procédure pénale exclut de toute possibilité d’intrusion le cabinet ou le domicile d’un avocat, les locaux d’une entreprise de presse, le cabinet d’un médecin, d’un avoué ou d’un huissier, le bureau et le domicile d’un parlementaire ou d’un magistrat, toutes professions ou fonctions qui bénéficient d’une protection particulière en matière de perquisitions. Étant donné l’interdiction expresse de s’introduire dans ces locaux professionnels protégés en vue d’y installer un dispositif technique de géolocalisation, il serait étrange, sinon incohérent, de préciser qu’il est également interdit de s’y introduire pour retirer un tel dispositif qui, par définition, n’aurait pu être installé qu’en violation de la loi. Je vous invite donc à retirer l’amendement, sur lequel j’émettrai, sinon, un avis défavorable.

M. Lionel Tardy. Je retire l’amendement.

L’amendement CL11 est retiré.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL29, CL30 et CL31 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CL20 de M. Lionel Tardy. 

M. Lionel Tardy. L’amendement est défendu.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement. 

La Commission est saisie de l’amendement CL12 de M. Lionel Tardy. 

M. Lionel Tardy. Le débat a permis de préciser les phases de la procédure, mais il reste à préciser la dernière étape, celle du retrait des balises. L’amendement vise à ce que cette intervention soit entourée des mêmes précautions que leur installation.

M. le rapporteur. L’amendement est intéressant mais inutile, car les services enquêteurs souhaiteront nécessairement récupérer les dispositifs, coûteux, qui ont été installés. Cependant, dans certaines situations, il sera très compliqué de récupérer une balise – si un véhicule est à l’étranger pendant plusieurs mois par exemple. Par ailleurs, les trois types de dispositifs – balises magnétiques, balises munies d’une batterie et balises dites « en dur » – outre qu’elles ont toutes une durée de vie limitée, peuvent à tout moment être désactivées à distance par les services enquêteurs, sur autorisation et sous le contrôle du magistrat. Donc, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL32 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement tend à transférer les dispositions de l’article 230-38 du code de procédure pénale à la fin du chapitre V relatif à la géolocalisation.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL49 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je propose d’étendre à la famille de la personne, contre laquelle des représailles pourraient s’exercer, la protection prévue par l’article 706-58 du code de procédure pénale. Faisant confiance au juge, protecteur des libertés individuelles, je suggère également, sans fixer de liste au préalable, de laisser à l’appréciation du juge des libertés et de la détention le soin de décider quels éléments peuvent être versés dans le dossier distinct du dossier principal de la procédure, afin que les sources ne soient pas dévoilées.

M. le rapporteur. Tout ce que présente le président Urvoas allant dans le bon sens, j’émets un avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CL50 de M. Jean-Jacques Urvoas et CL33 du rapporteur tombent. 

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL34 du rapporteur.

Puis, suivant l’avis favorable du rapporteur, elle adopte l’amendement de conséquence CL53 de M. Jean-Jacques Urvoas.

Elle adopte ensuite successivement l’amendement rédactionnel CL35, l’amendement de précision CL38 et l’amendement rédactionnel CL36 du rapporteur.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, elle adopte l’amendement CL52 de M. Jean-Jacques Urvoas.

Puis elle adopte l’amendement CL37 du rapporteur visant à corriger une erreur du Sénat.

La Commission examine ensuite l’amendement CL39 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement tend à reprendre à l’article 230–45 du code de procédure pénale les dispositions figurant initialement à l’article 230–38.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 1ermodifié.

Après l’article 1er

La Commission est saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 1er.

Elle examine l’amendement CL15 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Par cet amendement, nous proposons que, pour la bonne information du Parlement, le rapport annuel de politique pénale recense les recours à la géolocalisation par les services d’enquête, les moyens employés et le nombre de demandes adressées aux opérateurs de télécommunications. Mme la garde des Sceaux a donné son accord aux sénateurs qui avaient évoqué cette possibilité ; il serait utile que cette disposition figure dans le texte.

M. le rapporteur. Le rapport annuel du ministre de la Justice sur l’application de la politique pénale est de portée générale. Il n’est pas conçu pour faire la liste exhaustive de tous les actes d’enquête et il ne paraît pas opportun d’y faire apparaître les informations relatives à la seule géolocalisation. Cette question pourrait toutefois être rediscutée. Je vous invite donc à retirer l’amendement, que vous pourriez déposer à nouveau en séance publique, afin d’obtenir de la garde des Sceaux l’engagement que vous appelez de vos vœux. Enfin, le contrôle de l’application des lois appartient au premier chef au Parlement, qui peut retravailler cette question.

M. Sergio Coronado. Je retire l’amendement.

L’amendement CL15 est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL1 de M. Lionel Tardy et CL16 de M. Sergio Coronado. 

M. Sergio Coronado. Par l’amendement CL16, nous proposons de revenir sur l’article 20 de la loi de programmation militaire qui a suscité un vif débat. La rédaction de cet article a été contestée, notamment pour ce qui concerne les informations qui pourront être collectées par les services – il permet par exemple aux agents habilités d’avoir accès à tous les documents stockés dans un service de « nuage » souscrit par un internaute. L’article ne tient pas suffisamment compte de l’évolution du monde numérique, qui a pour effet que le contenant est désormais tout aussi porteur d’information que le contenu. Aussi proposons-nous par l’amendement CL16 de préciser cet article en remplaçant la collecte de tout type d’informations, y compris le contenu des conversations et les correspondances privées, par la collecte, habituelle, des seules données de localisation et de celles concernant l’auteur, le destinataire, la durée et la date des communications.

M. Lionel Tardy. L’amendement CL1 vise à revenir sur l’article 20 de la loi de programmation militaire, dont l’adoption, un fameux vendredi matin où je fus le seul à intervenir, est passée quasi inaperçue, mais qui a ensuite fait couler beaucoup d’encre. En témoignent non seulement la pétition qui a réuni les signatures de plusieurs dizaines de milliers de citoyens sur Internet, mais aussi les craintes exprimées par la Ligue des droits de l’homme, la CNIL et le Conseil national du numérique – excusez du peu ! Après l’échec de notre saisine du Conseil constitutionnel, l’entrée en vigueur de cet article est prévue pour le 1er janvier 2015 ; il n’est donc pas trop tard pour le réécrire, car la mobilisation qu’a suscitée cet article ne peut être balayée d’un revers de main. Votre homologue du Sénat et vous-même, monsieur le président, n’avez pas ménagé vos efforts pour essayer de rassurer. Mais, quelle que soit votre bonne foi, mon inquiétude n’est pas dissipée. Je partage votre méfiance à l’égard des expressions non restrictives, comme cet « y compris » par lequel on entend limiter la liste des données pouvant être interceptées. C’est l’élément le plus inquiétant, et je l’avais dit en séance le 29 novembre dernier sans recevoir de réponse réelle. Je me félicite de constater que nos collègues écologistes, qui n’ont pas dit un mot dans l’hémicycle lors d’une séance où je me suis senti bien seul, demandent eux aussi la réécriture de l’article ; mieux vaut tard que jamais. Je souhaite vivement que notre Commission saisisse l’occasion qui lui est donnée d’améliorer ces dispositions controversées par un examen attentif qui a fait défaut jusqu’à présent.

M. le rapporteur. Alors que l’encre de la loi de programmation militaire est à peine sèche, il faudrait donc la modifier et revenir sur l’équilibre qu’elle a permis de définir. Lors des débats parlementaires, le Gouvernement a pris l’engagement de soumettre au Parlement, dès cette année, une loi sur les services de renseignement. Ce texte permettra de mener à bien une réflexion d’ensemble. Le nouvel article L. 246-1 du code de la sécurité intérieure étend les capacités d’accéder aux données de connexion à l’ensemble des services de renseignement et pour tous les motifs liés à la défense des intérêts fondamentaux de la nation. Je m’étonne que, par cet amendement co-signé par Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, vous souhaitiez exclure de ces motifs le contre-espionnage économique et la prévention de la criminalité organisée ; ce serait un recul. L’amendement conduirait également, monsieur Tardy, à nier à Tracfin et à la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières leur qualité de membres de la communauté du renseignement. Enfin, l’article 20 de la loi de programmation militaire concerne l’accès non pas aux contenus, mais au contenant. Pour ces raisons, avis défavorable aux deux amendements.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Ces amendements sont source de confusion : nous traitons ici de la géolocalisation judiciaire pratiquée sous le contrôle d’un juge, alors que la loi de programmation militaire traite de la géolocalisation à des fins de police administrative. Cela devrait suffire à justifier un rejet.

Sur le fond, je répète une fois encore que l’on s’intéresse non pas aux contenus, mais aux seules données de connexion. La loi de programmation militaire n’a modifié ni l’article L. 241-1 du code de la sécurité intérieure, qui protège le secret des correspondances, ni les articles 226-1 et suivants du code pénal, qui protègent la vie privée. Ne troublons donc pas les esprits, qui le sont déjà suffisamment. Enfin, si nous avons prévu des éléments sur le patrimoine économique, en matière de géolocalisation administrative, c’est par souci de parallélisme des formes avec la loi du 10 juillet 1991, qui valide ce motif pour les interceptions de sécurité.

La Commission rejette successivement les amendements CL1 et CL16.

Article 2
(art. 67 bis-2 [nouveau] du code des douanes)

Extension aux agents des douanes des conditions et règles procédurales
de recours à la géolocalisation en temps réel

Le présent article insère, dans la section VII du chapitre IV du titre II du code des douanes relative aux techniques spéciales d’enquêtes douanières, un nouvel article 67 bis-2, lequel reconnaît expressément la possibilité de mettre en place un dispositif technique de géolocalisation en temps réel dans le cadre d’une enquête douanière.

Selon l’étude d’impact accompagnant le présent projet de loi, un tel dispositif serait utile aux agents des douanes dans le cadre d’opérations d’infiltration, afin de renforcer la sécurité de l’agent infiltré en suivant ses déplacements, et de livraisons surveillées, lesquelles consistent, pour les douaniers, à suivre le parcours de marchandises prohibées jusqu’à leur destinataire, afin d’identifier les filières criminelles. Si les opérations d’infiltration sont rares, les douanes mettent en place, chaque année, environ 500 opérations de livraison surveillée dans des affaires de stupéfiants, de produits dopants, de contrefaçon, d’armes ou de cigarettes.

Le présent article propose d’autoriser le recours à la géolocalisation en temps réel par les agents des douanes dans un nouvel article 67 bis-2, lui-même inséré au sein de la section VII du chapitre IV du titre II du code des douanes relative aux techniques spéciales d’enquêtes douanières, que sont notamment les opérations de surveillance et d’infiltration (article 67 bis) et les opérations de « coups d’achat » (article 67 bis-1).

Ainsi, la mise en œuvre des opérations de géolocalisation sera réservée aux seuls agents des douanes spécialement et individuellement habilités par le ministre chargé des douanes dans des conditions fixées par décret. Comme le précise l’étude d’impact, « en pratique, ces conditions seront les mêmes que celles prévues par le décret n° 2004-976 du 15 septembre 2004 (29) qui fixe les règles d’habilitation des agents des douanes réalisant des opérations de surveillance et d’infiltration et des opérations de coups d’achats ».

Ainsi habilités, les agents des douanes pourront, aux termes du nouvel article 67 bis-2, mettre en œuvre « tout moyen technique destiné à la localisation en temps réel, sur l’ensemble du territoire national, d’une personne à l’insu de celle-ci, d’un véhicule ou de tout autre objet, sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur », sous réserve que cette opération soit exigée par les nécessités de l’enquête douanière relative à un délit douanier (30) puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à trois ans.

La mise en œuvre par les agents des douanes, sous le contrôle de l’autorité judiciaire, des opérations de géolocalisation en temps réel prévues par le présent article s’inscrira résolument dans le cadre des pouvoirs de police judiciaire qui leur sont dévolus et ce, dans le respect de la jurisprudence du Tribunal des conflits, lequel a rappelé, dans un arrêt du 17 décembre 2012 (31), que « les agissements de fonctionnaires des douanes commis lors de la constatation dinfractions au code des douanes et de la recherche de leurs auteurs relèvent de lexercice de la police judiciaire ».

Toutefois, votre Commission a jugé nécessaire de clarifier la rédaction du présent article, afin d’éviter toute confusion entre le recours à la géolocalisation administrative et celui à la géolocalisation judiciaire au sein des services relevant de la direction générale des douanes et des droits indirects. Elle a donc adopté un amendement de son président, M. Jean-Jacques Urvoas, précisant que le recours à une opération de géolocalisation en temps réel, en application du présent article, avait pour seule finalité la « recherche et la constatation » d’un délit douanier puni d’au moins trois ans d’emprisonnement, réservant ainsi l’usage de cette technique aux seules enquêtes de police judiciaire.

Enfin, les modalités de contrôle de ces opérations de géolocalisation par le procureur de la République et par le juge des libertés et de la détention seront les mêmes que celles prévues pour les autres enquêtes judiciaires par le chapitre V du titre IV du livre Ier du code de procédure pénale, créé par l’article premier du présent projet de loi (cf. supra), à une exception près : il n’est pas prévu que ces opérations puissent être réalisées dans le cadre de l’instruction, ce qui est justifié par l’absence de relations entre le juge d’instruction et les services de douanes administratives.

*

* *

L’amendement CL51 de M. Jean-Jacques Urvoas est retiré.

La Commission examine l’amendement CL54 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il existe, au sein de la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI), un service de renseignement, la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), lequel n’a aucune compétence judiciaire. Cet amendement tend à éviter toute confusion entre les tâches de police administrative et de police judiciaire au sein des services relevant de la DGDDI.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL13 de M. Lionel Tardy. 

M. Lionel Tardy. L’amendement tend à harmoniser avec l’article 1er les durées des peines d’emprisonnement encourues pour procéder à une géolocalisation : si le seuil de trois ans est justifié pour les délits contre les personnes et le délit d’évasion, il ne l’est pas pour les délits douaniers. Je propose donc pour ces derniers un seuil de cinq ans de prison.

M. le rapporteur. Avis défavorable, puisque la Commission a retenu, à l’article 1er, la durée de trois ans comme seuil d’emprisonnement encouru pour que les services d’enquête puissent recourir à une mesure de géolocalisation dans le cadre d’une enquête judiciaire.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de précision CL40 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 2 modifié.

Article 2 bis
(article 706-161 du code de procédure pénale)

Participation de l’agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués au financement de la lutte contre la délinquance et la criminalité

Issu d’un amendement du Gouvernement, adopté en séance publique par le Sénat, avec un avis favorable de la commission des Lois, le présent article complète le troisième alinéa de l’article 706-161 du code de procédure pénale, afin de donner une base législative au financement par l’agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) de la protection des collaborateurs de justice, couramment appelés « repentis », et de leur famille.

L’article 706-161, que le présent article propose de modifier, est issu de la loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale, adoptée à l’initiative de votre Commission (32). Cette loi avait un double objet, qui était de simplifier, d’une part, les procédures de saisie et confiscation pénales, dans le respect des droits des justiciables, et d’améliorer, d’autre part, les conditions de gestion des biens saisis, dans l’intérêt de l’État, mais aussi des justiciables et des victimes. Dans cette perspective, la loi précitée du 9 juillet 2010 a créé un nouvel établissement public, l’AGRASC, dont les missions sont définies aux articles 706-159, 706-160 et 706-161 du code de procédure pénale, ces trois articles formant le titre XXX du livre IV de ce code.

L’une des principales missions de cette agence est, aux termes de l’article 706-160 du code de procédure pénale, d’assister les juridictions pour la saisie, la gestion et le recouvrement des biens complexes, nécessitant pour leur gestion ou leur valorisation des actes d’administration.

L’article 706-161 de ce même code complète les missions dévolues à l’AGRASC, en lui faisant notamment obligation, à son troisième alinéa, de veiller « à l’abondement du fonds de concours recevant les recettes provenant de la confiscation des biens mobiliers ou immobiliers des personnes reconnues coupables d’infraction en matière de trafic de stupéfiants ». Or, cette disposition aujourd’hui insuffisante pour permettre à l’agence de financer les charges relatives aux « repentis » et à leur famille.

En effet, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a introduit, dans le code de procédure pénale, un article 706-63-1, lequel permet aux personnes ayant commis ou tenté de commettre des infractions, dans le cadre de la criminalité organisée, de bénéficier d’un véritable régime de protection, sous réserve qu’elles apportent leur concours à la justice. Une commission nationale spécialisée est chargée, sur réquisitions du procureur de la République, de définir les mesures de protection et de réinsertion accordées à chaque personne concernée et de veiller au respect des obligations fixées aux « repentis ».

Or, pour entrer en vigueur, ces dispositions nécessitaient, aux termes de l’article 706-63-1 du code de procédure pénale, la publication d’un décret en Conseil d’État, lequel n’est pas paru à ce jour. Lors des débats en séance publique au Sénat, la garde des Sceaux a indiqué que la Chancellerie travaillait, depuis la fin de l’année 2012, à la rédaction de ce décret, qui a été soumis au Conseil d’État.

Or, lors de cet examen par le Conseil, celui-ci a indiqué qu’un éventuel financement par l’AGRASC du régime de protection des « repentis » et de leur famille, dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée, ne pouvait être inscrit par voie réglementaire, faute de base législative suffisante.

Le présent article complète donc le troisième alinéa de l’article 706-161 du code de procédure pénale pour prévoir que l’AGRASC « peut également verser à l’État des contributions destinées à participer au financement de la lutte contre la délinquance et la criminalité ». Ce faisant, il donne un fondement législatif, autorisant l’AGRASC à mobiliser les fonds qu’elle gère en provenance des saisies et confiscations des avoirs criminels en vue de financer les charges relatives aux « repentis » et à leur famille.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL14 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Sur le fond, je ne suis pas défavorable à l’article 2 bis, introduit au Sénat par voie d’amendement gouvernemental. Mes objections sont de forme. Outre que cet article n’a pas fait l’objet d’étude d’impact qui nous aurait permis d’en savoir plus sur une mesure dont la garde des Sceaux a expliqué qu’elle était attendue depuis longtemps, il a tout du cavalier législatif. Voilà pourquoi mon amendement vise à le supprimer.

M. le rapporteur. Avis défavorable car le lien de cet article avec la géolocalisation judiciaire en temps réel est double : l’objectif commun de renforcement significatif des moyens destinés à lutter contre la criminalité et la préoccupation commune de protection des sources. Ainsi, le projet de loi prévoit la mise en place, sur le modèle du témoignage anonyme, d’un « dossier secret » en matière de géolocalisation, afin de protéger des témoins ou des citoyens qui auraient aidé la police pour l’installation d’une balise GPS. L’article répond enfin à une demande urgente des praticiens : bien que créé par la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, le régime de protection des « repentis » n’est toujours pas mis en œuvre faute de décret d’application.

La Chancellerie travaille, depuis la fin de l’année 2012, à la rédaction de ce décret, qui a été soumis au Conseil d’État. Celui-ci a indiqué qu’un éventuel financement par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) du régime de protection des « repentis » et de leur famille, dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée, ne pouvait être inscrit par voie réglementaire, faute de base législative suffisante. En donnant un fondement législatif, qui autorise l’AGRASC à mobiliser les fonds qu’elle gère en provenance des saisies et confiscations des avoirs criminels en vue de financer les charges relatives aux « repentis » et à leur famille, l’article 2 bis du projet de loi garantit une publication très rapide de ce décret d’application, dix ans après l’adoption par le Parlement d’un tel régime de protection des « repentis ».

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL41 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 2 bis modifié.

Article 3
Application outre-mer du projet de loi

Le présent article, lequel a été réécrit à la suite de l’adoption par la commission des Lois du Sénat d’un amendement de son rapporteur, M. Jean-Pierre Sueur, énumère expressément les collectivités d’outre-mer dans lesquelles l’article 1er du présent projet de loi a vocation à s’appliquer.

En effet, en matière de droit pénal et de procédure pénale, une mention expresse est nécessaire pour l’application de la loi dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Dans sa rédaction initiale, le présent article disposait seulement que l’article premier du présent projet de loi est applicable « sur l’ensemble du territoire de la République ».

*

* *

La Commission adopte l’article 3 sans modification.

M. Guy Geoffroy. Je voterai ce texte, et j’ai bon espoir d’en être récompensé par la compréhension dont pourrait faire l’objet l’amendement à l’alinéa 14 de l’article 1er que je défendrai lors de la réunion prévue par l’article 88 du Règlement et en séance publique.

La Commission adopte à l’unanimité l’ensemble du projet de loi modifié.

*

* *

En conséquence, la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le projet de loi (n° 1717) relatif à la géolocalisation, dans le texte figurant dans les documents annexés au présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF

Dispositions en vigueur

___

Texte du projet de loi

___

Texte adopté par la Commission

___

 

Projet de loi relatif à la géolocalisation

Projet de loi relatif à la géolocalisation

 

Article 1er

Article 1er

 

Le titre IV du livre Ier du code de procédure pénale est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

(Alinéa sans modification)

 

« Chapitre V

(Alinéa sans modification)

Code de procédure pénale

« De la géolocalisation

(Alinéa sans modification)

Art. 74 à 74-2 et 80-4. – Cf. annexe

« Art. 230-32. – Si les nécessités de l’enquête ou de l’instruction relative à un crime ou à un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans ou, s’il s’agit d’un délit prévu par le livre II du code pénal, d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à trois ans ou à des procédures prévues aux articles 74 à 74-2 et 80-4 l’exigent, tout moyen technique destiné à la localisation en temps réel, sur l’ensemble du territoire national, d’une personne à l’insu de celle-ci, d’un véhicule ou de tout autre objet sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur peut être mis en place par l’officier de police judiciaire, ou sous sa responsabilité par l’agent de police judiciaire, ou prescrit sur réquisitions de l’officier de police judiciaire, dans les conditions et selon les modalités prévues au présent chapitre.

« Art. 230-32. – Il peut être recouru à tout moyen technique destiné à la localisation en temps réel, sur l’ensemble du territoire national, d’une personne à l’insu de celle-ci, d’un véhicule ou de tout autre objet sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur, si cette opération est exigée par les nécessités :

   

« 1° D’une enquête ou d’une instruction relative à un crime ou à un délit puni d’un emprisonnement d’au moins trois ans ;

   

« 2° D’une procédure d’enquête ou d’instruction de recherche des causes de la mort ou de la disparition prévue aux articles 74 à 74-1 et 80-4 ;

   

« 3° D’une procédure de recherche d’une personne en fuite prévue par l’article 74-2.

   

« La géolocalisation est mise en place par l’officier de police judiciaire, ou sous sa responsabilité par l’agent de police judiciaire, ou prescrite sur réquisitions de l’officier de police judiciaire, dans les conditions et selon les modalités prévues au présent chapitre. »

amendements identiques
CL21 et CL3

 

« Art. 230-33. – Les opérations mentionnées à l’article 230-32 sont autorisées :

« Art. 230-33. – (Alinéa sans modification)

Art. 74 à 74-2. – Cf. annexe

« 1° Dans le cadre d’une enquête de flagrance, d’une enquête préliminaire ou d’une procédure prévue aux articles 74 à 74-2, par le procureur de la République, pour une durée maximale de huit jours consécutifs. À l’issue de ce délai de huit jours consécutifs, ces opérations sont autorisées par le juge des libertés et de la détention à la requête du procureur de la République, pour une durée maximale d’un mois renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée ;

« 1° 

… maximale de quinze jours consécutifs. À l’issue de ce délai, ces …

amendements identiques
CL4 et CL22

Art. 74, 74-1 et 80-4. – Cf. annexe

« 2° Dans le cadre d’une instruction ou d’une information pour recherche des causes de la mort ou des causes de la disparition mentionnées aux articles 74, 74-1 et 80-4 par le juge d’instruction pour une durée maximale de quatre mois renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée.

« 2° (Sans modification)

 

« La décision du procureur de la République, du juge des libertés et de la détention ou du juge d’instruction est écrite. Elle n’a pas de caractère juridictionnel et n’est susceptible d’aucun recours.

 

Art. 59. – Cf. annexe

« Art. 230-34. – Lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’information l’exigent, le procureur de la République ou le juge d’instruction, selon les distinctions prévues à l’article 230-33, peut, aux seules fins de mettre en place ou de retirer le moyen technique mentionné à l’article 230-32, autoriser par décision écrite l’introduction, y compris hors les heures prévues à l’article 59, dans des lieux privés ou dans un véhicule situé sur la voie publique ou dans de tels lieux, à l’insu ou sans le consentement du propriétaire ou de l’occupant des lieux ou du véhicule, ou de toute personne titulaire d’un droit sur ceux-ci.

« Art. 230-34. – Dans les cas mentionnés aux 1° et 2° de l’article 230-33, lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’instruction l’exigent, le procureur de la République ou le juge d’instruction peut, aux seules fins de mettre en place ou de retirer le moyen technique mentionné à l’article 230-32, autoriser par décision écrite l’introduction, y compris en dehors des heures prévues à l’article 59, dans des lieux privés destinés ou utilisés à l’entrepôt de véhicules, fonds, valeurs, marchandises ou matériel, ou dans …

amendements CL23, CL26,
CL24 et CL25

 

« Si le lieu privé est un lieu d’habitation, l’autorisation est, au cours de l’enquête, délivrée par décision écrite du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le procureur de la République ; au cours de l’instruction, et si l’opération doit intervenir en dehors des heures prévues à l’article 59, cette autorisation est délivrée par décision écrite du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le juge d’instruction.

« S’il s’agit d’un lieu privé autre que ceux visés au premier alinéa du présent article, cette opération ne peut intervenir que lorsque l’enquête ou l’instruction est relative à un crime ou un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement. Toutefois, si ce lieu privé est un lieu d’habitation, l’autorisation est, au cours de l’enquête, délivrée par décision écrite du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le procureur de la République. Au cours de l’instruction, si …

amendements CL27 et CL28

Art. 56-1 à 56-3. – Cf. annexe

Art. 100–7. – Cf. annexe

« La mise en place du moyen technique mentionné à l’article 230-32 ne peut concerner les lieux visés aux articles 56-1 à 56-3 ni le bureau ou le domicile des personnes visées à l’article 100-7.

(Alinéa sans modification)

 

« Art. 230-35. – En cas d’urgence résultant d’un risque imminent de dépérissement des preuves ou d’atteinte grave aux personnes ou aux biens, les opérations mentionnées à l’article 230-32 peuvent être mises en place ou prescrites par un officier de police judiciaire. Celui-ci en informe immédiatement, par tout moyen, le procureur de la République ou le juge d’instruction, suivant les distinctions énoncées aux articles 230-33 et 230-34. Ce magistrat peut alors ordonner la mainlevée de la géolocalisation.

« Art. 230-35. – 

… d’instruction, dans les cas mentionnés aux ….

amendement CL29

Art. 59. – Cf. annexe

« Toutefois, si l’introduction dans un lieu d’habitation est nécessaire, l’officier de police judiciaire doit recueillir l’accord préalable, donné par tout moyen, du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le procureur de la République dans les cas prévus au 1° de l’article 230-33, et du juge d’instruction dans les cas prévus au 2° du même article ; dans ces derniers cas, si l’introduction doit avoir lieu hors les heures prévues à l’article 59, il doit recueillir l’accord préalable du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le juge d’instruction.

… moyen :

   

« 1° dans les cas prévus au 1° de l’article 230-33, du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le procureur de la République ;

   

« 2° dans les cas prévus au 2° du même article, du juge d’instruction ou, si l’introduction doit avoir lieu en dehors des heures prévues à l’article 59, du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par le juge d’instruction.

amendement CL30

 

« Ce ou ces magistrats disposent d’un délai de douze heures pour prescrire, par décision écrite, la poursuite des opérations. À défaut d’une telle autorisation dans ce délai, il est mis fin à la géolocalisation. Dans les cas prévus au premier alinéa, l’autorisation comporte l’énoncé des circonstances de fait qui établissaient l’existence du risque mentionné à ce même alinéa.

… de fait établissant l’existence du risque imminent mentionné …

amendement CL31

 

« Art. 230-36. – Le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire commis par lui ou autorisé par le procureur de la République peut requérir tout agent qualifié d’un service, d’une unité ou d’un organisme placé sous l’autorité du ministre de l’intérieur et dont la liste est fixée par décret en vue de procéder à l’installation des dispositifs techniques mentionnés à l’article 230-32.

« Art. 230-36. – 

… l’installation et au retrait des dispositifs …

amendement CL20

 

« Art. 230-37. – Les opérations prévues au présent chapitre sont conduites sous le contrôle du magistrat qui les a autorisées ou qui a autorisé leur poursuite.

« Art. 230-37. – (Sans modification)

 

« Le fait que ces opérations révèlent des infractions autres que celles visées dans la décision de ce magistrat ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes.

 

Art. 74–1 et 80–4. – Cf. annexe

« Art. 230-38. – Le présent chapitre n’est pas applicable lorsque les opérations de géolocalisation en temps réel ont pour objet la localisation d’un équipement terminal de communication électronique, d’un véhicule ou de tout autre objet dont le propriétaire ou le possesseur légitime est la victime de l’infraction sur laquelle porte l’enquête ou l’instruction ou la personne disparue au sens des articles 74-1 ou 80-4, dès lors que ces opérations ont pour objet de retrouver la victime, l’objet qui lui a été dérobé ou la personne disparue.

« Art. 230-38. – Supprimé

amendement CL32

Art. 60-1, 60-2, 77-1-1, 77-1-2, 99-3 et 99-4. – Cf. annexe

« Dans les cas prévus au présent article, les opérations de géolocalisation en temps réel font l’objet de réquisitions conformément aux articles 60-1, 60-2, 77-1-1, 77-1-2, 99-3 ou 99-4.

 
 

« Art. 230-39 (nouveau). – L’officier de police judiciaire dresse procès-verbal de chacune des opérations de mise en place du dispositif technique et des opérations d’enregistrement des données de localisation. Ce procès-verbal mentionne la date et l’heure auxquelles l’opération a commencé et celles auxquelles elle s’est terminée.

« Art. 230-39. – (Sans modification)

 

« Les enregistrements sont placés sous scellés fermés. 

 
 

« Art. 230-40 (nouveau). – L’officier de police judiciaire décrit ou transcrit, dans un procès-verbal qui est versé au dossier, les données enregistrées qui sont utiles à la manifestation de la vérité.

« Art. 230-40. – (Sans modification)

Art. 706–73. – Cf. annexe

« Art. 230-41 (nouveau). – Lorsque, dans une instruction concernant l’un des crimes ou délits entrant dans le champ d’application de l’article 706-73, la connaissance de ces informations est susceptible de mettre gravement en danger la vie ou l’intégrité physique d’une personne et qu’elle n’est pas utile à la manifestation de la vérité, le juge des libertés et de la détention, saisi à tout moment par requête motivée du juge d’instruction, peut, par décision motivée, autoriser que la date, l’heure et le lieu où le moyen technique destiné à la localisation en temps réel est mis en place ainsi que les premières données de localisation n’apparaissent pas dans le dossier de la procédure.

« Art. 230-41. – Lorsque, dans une instruction concernant l’un des crimes ou délits entrant dans le champ d’application de l’article 706-73, la connaissance de ces informations est susceptible de mettre gravement en danger la vie ou l’intégrité physique d’une personne, des membres de sa famille ou de ses proches, le juge des libertés et de la détention, saisi à tout moment par requête motivée du juge d’instruction, peut, par décision motivée, autoriser que n’apparaissent en procédure que les informations strictement nécessaires à la manifestation de la vérité.

amendement CL49

 

« La décision du juge des libertés et de la détention qui ne fait pas apparaître la date, l’heure et le lieu où le moyen technique destiné à la localisation en temps réel est mis en place est jointe au dossier de la procédure. La date, l’heure et le lieu ainsi que les premières données de localisation sont inscrits dans un autre procès-verbal, qui est versé dans un dossier distinct du dossier de la procédure, dans lequel figure également la requête prévue au premier alinéa. Ces informations sont inscrites sur un registre coté et paraphé, qui est ouvert à cet effet au tribunal de grande instance.

« La décision du juge des libertés et de la détention mentionnée au premier alinéa du présent article est jointe au dossier de la procédure. Les informations qui ne sont pas strictement nécessaires à la manifestation de la vérité sont inscrites dans un autre procès-verbal, qui est versé dans un dossier distinct du dossier de la procédure, dans lequel figure également la requête du juge d’instruction prévue au premier alinéa du présent article. Ces informations …

amendements CL34, CL53,
CL35 et CL38

 

« Art. 230-42 (nouveau). – La personne mise en examen ou le témoin assisté peut, dans les dix jours à compter de la date à laquelle il lui a été donné connaissance du contenu de la géolocalisation réalisée dans les conditions de l’article 230-41, contester, devant le président de la chambre de l’instruction, le recours à la procédure prévue à cet article. S’il estime que les opérations de géolocalisation n’ont pas été réalisées de façon régulière, que les conditions prévues à l’article 230-41 ne sont pas remplies ou que les informations mentionnées à ce même article sont indispensables à l’exercice des droits de la défense, le président de la chambre de l’instruction ordonne l’annulation de la géolocalisation. Toutefois, s’il estime que la connaissance de ces informations n’est pas ou n’est plus susceptible de mettre gravement en danger la vie ou l’intégrité physique d’une personne, il peut également ordonner le versement au dossier de la requête et du procès-verbal mentionnés au second alinéa de l’article 230-41. S’il estime la contestation justifiée, il ordonne l’annulation de la géolocalisation. 

« Art. 230-42. – 

contenu des opérations de géolocalisation réalisées dans le cadre de l’article 230-41 …

amendement CL36

… physique des membres de sa famille ou de ses proches, il peut également ordonner le versement au dossier de la requête et du procès-verbal mentionnés au second alinéa de l’article 230-41. Le président de la chambre de l’instruction statue par décision motivée qui n’est pas susceptible de recours au vu des pièces de la procédure et de celles figurant dans le dossier mentionné au deuxième alinéa de l’article 230-41.

amendements CL52 et CL37

 

« Art. 230-43 (nouveau). – Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement des éléments recueillis dans les conditions prévues à l’article 230-41, sauf si la requête et le procès-verbal mentionnés au second alinéa de ce même article ont été versés au dossier en application de l’article 230-42. 

« Art. 230-43. – (Sans modification)

 

« Art. 230-44 (nouveau). – Les enregistrements de données de localisation sont détruits, à la diligence du procureur de la République ou du procureur général, à l’expiration du délai de prescription de l’action publique.

« Art. 230-44. – (Sans modification)

 

« Il est dressé procès-verbal de l’opération de destruction. »

 

Art. 74–1 et 80–4. – Cf. annexe

 

« Art. 230-45. – Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables lorsque les opérations de géolocalisation en temps réel ont pour objet la localisation d’un équipement terminal de communication électronique, d’un véhicule ou de tout autre objet, dont le propriétaire ou le possesseur légitime est la victime de l’infraction sur laquelle porte l’enquête ou l’instruction ou la personne disparue au sens des articles 74-1 ou 80-4, dès lors que ces opérations ont pour objet de retrouver la victime, l’objet qui lui a été dérobé ou la personne disparue.

Art. 60-1, 60-2, 77-1-1, 77-1-2, 99-3 et 99-4. – Cf. annexe

 

« Dans les cas prévus au présent article, les opérations de géolocalisation en temps réel font l’objet de réquisitions conformément aux articles 60-1, 60-2, 77-1-1, 77-1-2, 99-3 ou 99-4. »

amendement CL39

 

Article 2

Article 2

 

La section 7 du chapitre IV du titre II du code des douanes est complétée par un article 67 bis-2 ainsi rédigé :

(Alinéa sans modification)

Art. 230-33 à 230-38. –  Cf. supra art.1er

« Art. 67 bis-2. – Si les nécessités de l’enquête douanière relative à un délit douanier puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à trois ans l’exigent, tout moyen technique destiné à la localisation en temps réel, sur l’ensemble du territoire national, d’une personne à l’insu de celle-ci, d’un véhicule ou de tout autre objet, sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur, peut être mis en place ou prescrit par les agents des douanes habilités par le ministre chargé des douanes dans des conditions fixées par décret, sur autorisation, dans les conditions et sous les réserves prévues aux articles 230-33 à 230-38 du code de procédure pénale, du procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel la mise en place du moyen technique est envisagée ou du juge des libertés et de la détention de ce tribunal. »

« Art. 67 bis-2. – Si les nécessités de l’enquête douanière relative à la recherche et à la constatation d’un délit …

amendement CL54

… conditions et selon les modalités prévues par le chapitre V du titre IV du livre Ier du code …

amendement CL40

 

Article 2 bis (nouveau)

Article 2 bis

Art. 706–161. – L’agence fournit aux juridictions pénales qui la sollicitent les orientations ainsi que l’aide juridique et pratique utiles à la réalisation des saisies et confiscations envisagées ou à la gestion des biens saisis et confisqués.

Le troisième alinéa de l’article 706-161 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :

(Alinéa sans modification)

Elle peut mener toute action d’information ou de formation destinée à faire connaître son action et à promouvoir de bonnes pratiques en matière de saisie et de confiscation.

   

L’agence veille à l’abondement du fonds de concours recevant les recettes provenant de la confiscation des biens mobiliers ou immobiliers des personnes reconnues coupables d’infraction en matière de trafic de stupéfiants.

« L’agence peut également verser des contributions à l’État destinées à participer au financement de la lutte contre la délinquance et la criminalité. »

« L’agence peut également verser à l’État des contributions destinées …

amendement CL41

Elle peut informer les services compétents et les victimes, à leur demande ou à son initiative, sur les biens qui sont restitués sur décision de justice, afin d’assurer le paiement de leurs créances, notamment fiscales, douanières, sociales ou de dédommagement.

   

L’agence met en œuvre un traitement de données à caractère personnel qui centralise les décisions de saisie et de confiscation dont elle est saisie quelle que soit la nature des biens, ainsi que toutes les informations utiles relatives aux biens visés, à leur localisation et à leurs propriétaires ou détenteurs.

   

L’agence établit un rapport annuel d’activité, comprenant notamment un bilan statistique, ainsi que toute réflexion et toute proposition visant à l’amélioration du droit et des pratiques en matière de saisie et de confiscation.

   
 

Article 3

Article 3

 

L’article 1er de la présente loi est applicable dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.

(Sans modification)

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

Art. 56-1, 56-2, 56-3, 59, 60-1, 60-2, 74, 74–1, 74–2, 77-1-1, 77-1-2, 80–4, 99-3, 99-4, 100-7 et 706-73

Code de procédure pénale

Art. 56-1. – Les perquisitions dans le cabinet d’un avocat ou à son domicile ne peuvent être effectuées que par un magistrat et en présence du bâtonnier ou de son délégué, à la suite d’une décision écrite et motivée prise par ce magistrat, qui indique la nature de l’infraction ou des infractions sur lesquelles portent les investigations, les raisons justifiant la perquisition et l’objet de celle-ci. Le contenu de cette décision est porté dès le début de la perquisition à la connaissance du bâtonnier ou de son délégué par le magistrat. Celui-ci et le bâtonnier ou son délégué ont seuls le droit de consulter ou de prendre connaissance des documents ou des objets se trouvant sur les lieux préalablement à leur éventuelle saisie. Aucune saisie ne peut concerner des documents ou des objets relatifs à d’autres infractions que celles mentionnées dans la décision précitée. Les dispositions du présent alinéa sont édictées à peine de nullité.

Le magistrat qui effectue la perquisition veille à ce que les investigations conduites ne portent pas atteinte au libre exercice de la profession d’avocat.

Le bâtonnier ou son délégué peut s’opposer à la saisie d’un document ou d’un objet s’il estime que cette saisie serait irrégulière. Le document ou l’objet doit alors être placé sous scellé fermé. Ces opérations font l’objet d’un procès-verbal mentionnant les objections du bâtonnier ou de son délégué, qui n’est pas joint au dossier de la procédure. Si d’autres documents ou d’autres objets ont été saisis au cours de la perquisition sans soulever de contestation, ce procès-verbal est distinct de celui prévu par l’article 57. Ce procès-verbal ainsi que le document ou l’objet placé sous scellé fermé sont transmis sans délai au juge des libertés et de la détention, avec l’original ou une copie du dossier de la procédure.

Dans les cinq jours de la réception de ces pièces, le juge des libertés et de la détention statue sur la contestation par ordonnance motivée non susceptible de recours.

À cette fin, il entend le magistrat qui a procédé à la perquisition et, le cas échéant, le procureur de la République, ainsi que l’avocat au cabinet ou au domicile duquel elle a été effectuée et le bâtonnier ou son délégué. Il peut ouvrir le scellé en présence de ces personnes.

S’il estime qu’il n’y a pas lieu à saisir le document ou l’objet, le juge des libertés et de la détention ordonne sa restitution immédiate, ainsi que la destruction du procès-verbal des opérations et, le cas échéant, la cancellation de toute référence à ce document, à son contenu ou à cet objet qui figurerait dans le dossier de la procédure.

Dans le cas contraire, il ordonne le versement du scellé et du procès-verbal au dossier de la procédure. Cette décision n’exclut pas la possibilité ultérieure pour les parties de demander la nullité de la saisie devant, selon les cas, la juridiction de jugement ou la chambre de l’instruction.

Les dispositions du présent article sont également applicables aux perquisitions effectuées dans les locaux de l’ordre des avocats ou des caisses de règlement pécuniaire des avocats. Dans ce cas, les attributions confiées au juge des libertés et de la détention sont exercées par le président du tribunal de grande instance qui doit être préalablement avisé de la perquisition. Il en est de même en cas de perquisition au cabinet ou au domicile du bâtonnier.

Art. 56-2. – Les perquisitions dans les locaux d’une entreprise de presse, d’une entreprise de communication audiovisuelle, d’une entreprise de communication au public en ligne, d’une agence de presse, dans les véhicules professionnels de ces entreprises ou agences ou au domicile d’un journaliste lorsque les investigations sont liées à son activité professionnelle ne peuvent être effectuées que par un magistrat.

Ces perquisitions sont réalisées sur décision écrite et motivée du magistrat qui indique la nature de l’infraction ou des infractions sur lesquelles portent les investigations, ainsi que les raisons justifiant la perquisition et l’objet de celle-ci. Le contenu de cette décision est porté dès le début de la perquisition à la connaissance de la personne présente en application de l’article 57.

Le magistrat et la personne présente en application de l’article 57 ont seuls le droit de prendre connaissance des documents ou des objets découverts lors de la perquisition préalablement à leur éventuelle saisie. Aucune saisie ne peut concerner des documents ou des objets relatifs à d’autres infractions que celles mentionnées dans cette décision.

Ces dispositions sont édictées à peine de nullité.

Le magistrat qui effectue la perquisition veille à ce que les investigations conduites respectent le libre exercice de la profession de journaliste, ne portent pas atteinte au secret des sources en violation de l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et ne constituent pas un obstacle ou n’entraînent pas un retard injustifié à la diffusion de l’information.

La personne présente lors de la perquisition en application de l’article 57 du présent code peut s’opposer à la saisie d’un document ou de tout objet si elle estime que cette saisie serait irrégulière au regard de l’alinéa précédent. Le document ou l’objet doit alors être placé sous scellé fermé. Ces opérations font l’objet d’un procès-verbal mentionnant les objections de la personne, qui n’est pas joint au dossier de la procédure. Si d’autres documents ou objets ont été saisis au cours de la perquisition sans soulever de contestation, ce procès-verbal est distinct de celui prévu par l’article 57. Ce procès-verbal ainsi que le document ou l’objet placé sous scellé fermé sont transmis sans délai au juge des libertés et de la détention, avec l’original ou une copie du dossier de la procédure.

Dans les cinq jours de la réception de ces pièces, le juge des libertés et de la détention statue sur la contestation par ordonnance motivée non susceptible de recours.

À cette fin, il entend le magistrat qui a procédé à la perquisition et, le cas échéant, le procureur de la République, ainsi que la personne en présence de qui la perquisition a été effectuée. Il peut ouvrir le scellé en présence de ces personnes. Si le journaliste au domicile duquel la perquisition a été réalisée n’était pas présent lorsque celle-ci a été effectuée, notamment s’il a été fait application du deuxième alinéa de l’article 57, le journaliste peut se présenter devant le juge des libertés et de la détention pour être entendu par ce magistrat et assister, si elle a lieu, à l’ouverture du scellé.

S’il estime qu’il n’y a pas lieu à saisir le document ou l’objet, le juge des libertés et de la détention ordonne sa restitution immédiate, ainsi que la destruction du procès-verbal des opérations et, le cas échéant, la cancellation de toute référence à ce document, à son contenu ou à cet objet qui figurerait dans le dossier de la procédure.

Dans le cas contraire, il ordonne le versement du scellé et du procès-verbal au dossier de la procédure. Cette décision n’exclut pas la possibilité ultérieure pour les parties de demander la nullité de la saisie devant, selon les cas, la juridiction de jugement ou la chambre de l’instruction.

Art. 56-3. – Les perquisitions dans le cabinet d’un médecin, d’un notaire ou d’un huissier sont effectuées par un magistrat et en présence de la personne responsable de l’ordre ou de l’organisation professionnelle à laquelle appartient l’intéressé ou de son représentant.

Art. 59. – Sauf réclamation faite de l’intérieur de la maison ou exceptions prévues par la loi, les perquisitions et les visites domiciliaires ne peuvent être commencées avant 6 heures et après 21 heures.

Les formalités mentionnées aux articles 56, 56-1, 57 et au présent article sont prescrites à peine de nullité

Art. 60-1. – Le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire peut, par tout moyen, requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique qui sont susceptibles de détenir des documents intéressant l’enquête, y compris ceux issus d’un système informatique ou d’un traitement de données nominatives, de lui remettre ces documents, notamment sous forme numérique, sans que puisse lui être opposée, sans motif légitime, l’obligation au secret professionnel. Lorsque les réquisitions concernent des personnes mentionnées aux articles 56-1 à 56-3, la remise des documents ne peut intervenir qu’avec leur accord.

À l’exception des personnes mentionnées aux articles 56-1 à 56-3, le fait de s’abstenir de répondre dans les meilleurs délais à cette réquisition est puni d’une amende de 3 750 €.

À peine de nullité, ne peuvent être versés au dossier les éléments obtenus par une réquisition prise en violation de l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

Art. 60-2. – Sur demande de l’officier de police judiciaire, intervenant par voie télématique ou informatique, les organismes publics ou les personnes morales de droit privé, à l’exception de ceux visés au deuxième alinéa du 3° du II de l’article 8 et au 2° de l’article 67 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, mettent à sa disposition les informations utiles à la manifestation de la vérité, à l’exception de celles protégées par un secret prévu par la loi, contenues dans le ou les systèmes informatiques ou traitements de données nominatives qu’ils administrent.

L’officier de police judiciaire, intervenant sur réquisition du procureur de la République préalablement autorisé par ordonnance du juge des libertés et de la détention, peut requérir des opérateurs de télécommunications, et notamment de ceux mentionnés au 1 du I de l’article 6 de la loi 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, de prendre, sans délai, toutes mesures propres à assurer la préservation, pour une durée ne pouvant excéder un an, du contenu des informations consultées par les personnes utilisatrices des services fournis par les opérateurs.

Les organismes ou personnes visés au présent article mettent à disposition les informations requises par voie télématique ou informatique dans les meilleurs délais.

Le fait de refuser de répondre sans motif légitime à ces réquisitions est puni d’une amende de 3 750 €.

Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, détermine les catégories d’organismes visés au premier alinéa ainsi que les modalités d’interrogation, de transmission et de traitement des informations requises.

Art. 74. – En cas de découverte d’un cadavre, qu’il s’agisse ou non d’une mort violente, mais si la cause en est inconnue ou suspecte, l’officier de police judiciaire qui en est avisé informe immédiatement le procureur de la République, se transporte sans délai sur les lieux et procède aux premières constatations.

Le procureur de la République se rend sur place s’il le juge nécessaire et se fait assister de personnes capables d’apprécier la nature des circonstances du décès. Il peut, toutefois, déléguer aux mêmes fins, un officier de police judiciaire de son choix.

Sauf si elles sont inscrites sur une des listes prévues à l’article 157, les personnes ainsi appelées prêtent, par écrit, serment d’apporter leur concours à la justice en leur honneur et en leur conscience.

Sur instructions du procureur de la République, une enquête aux fins de recherche des causes de la mort est ouverte. Dans ce cadre et à ces fins, il peut être procédé aux actes prévus par les articles 56 à 62, dans les conditions prévues par ces dispositions. À l’issue d’un délai de huit jours à compter des instructions de ce magistrat, ces investigations peuvent se poursuivre dans les formes de l’enquête préliminaire.

Le procureur de la République peut aussi requérir information pour recherche des causes de la mort.

Les dispositions des quatre premiers alinéas sont également applicables en cas de découverte d’une personne grièvement blessée lorsque la cause de ses blessures est inconnue ou suspecte.

Art. 74-1. – Lorsque la disparition d’un mineur ou d’un majeur protégé vient d’intervenir ou d’être constatée, les officiers de police judiciaire, assistés le cas échéant des agents de police judiciaire, peuvent, sur instructions du procureur de la République, procéder aux actes prévus par les articles 56 à 62, aux fins de découvrir la personne disparue. A l’issue d’un délai de huit jours à compter des instructions de ce magistrat, ces investigations peuvent se poursuivre dans les formes de l’enquête préliminaire.

Le procureur de la République peut également requérir l’ouverture d’une information pour recherche des causes de la disparition.

Les dispositions du présent article sont également applicables en cas de disparition d’un majeur présentant un caractère inquiétant ou suspect eu égard aux circonstances, à l’âge de l’intéressé ou à son état de santé.

Art. 74-2. – Les officiers de police judiciaire, assistés le cas échéant des agents de police judiciaire, peuvent, sur instructions du procureur de la République, procéder aux actes prévus par les articles 56 à 62 aux fins de rechercher et de découvrir une personne en fuite dans les cas suivants :

1° Personne faisant l’objet d’un mandat d’arrêt délivré par le juge d’instruction, le juge des libertés et de la détention, la chambre de l’instruction ou son président ou le président de la cour d’assises, alors qu’elle est renvoyée devant une juridiction de jugement ;

2° Personne faisant l’objet d’un mandat d’arrêt délivré par une juridiction de jugement ou par le juge de l’application des peines ;

3° Personne condamnée à une peine privative de liberté sans sursis supérieure ou égale à un an, lorsque cette condamnation est exécutoire ou passée en force de chose jugée.

Si les nécessités de l’enquête pour rechercher la personne en fuite l’exigent, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance peut, à la requête du procureur de la République, autoriser l’interception, l’enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications selon les modalités prévues par les articles 100, 100-1 et 100-3 à 100-7, pour une durée maximale de deux mois renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée, dans la limite de six mois en matière correctionnelle. Ces opérations sont faites sous l’autorité et le contrôle du juge des libertés et de la détention.

Pour l’application des dispositions des articles 100-3 à 100-5, les attributions confiées au juge d’instruction ou à l’officier de police judiciaire commis par lui sont exercées par le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire requis par ce magistrat.

Le juge des libertés et de la détention est informé sans délai des actes accomplis en application de l’alinéa précédent.

Art. 77-1-1. – Le procureur de la République ou, sur autorisation de celui-ci, l’officier de police judiciaire, peut, par tout moyen, requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique qui sont susceptibles de détenir des documents intéressant l’enquête, y compris ceux issus d’un système informatique ou d’un traitement de données nominatives, de lui remettre ces documents, notamment sous forme numérique, sans que puisse lui être opposée, sans motif légitime, l’obligation au secret professionnel. Lorsque les réquisitions concernent des personnes mentionnées aux articles 56-1 à 56-3, la remise des documents ne peut intervenir qu’avec leur accord.

En cas d’absence de réponse de la personne aux réquisitions, les dispositions du second alinéa de l’article 60-1 sont applicables.

Le dernier alinéa de l’article 60-1 est également applicable.

Art. 77-1-2. – Sur autorisation du procureur de la République, l’officier de police judiciaire peut procéder aux réquisitions prévues par le premier alinéa de l’article 60-2.

Sur autorisation du juge des libertés et de la détention saisi à cette fin par le procureur de la République, l’officier de police peut procéder aux réquisitions prévues par le deuxième alinéa de l’article 60-2.

Les organismes ou personnes concernés mettent à disposition les informations requises par voie télématique ou informatique dans les meilleurs délais.

Le fait de refuser de répondre sans motif légitime à ces réquisitions est puni conformément aux dispositions du quatrième alinéa de l’article 60-2.

Art. 80-4. – Pendant le déroulement de l’information pour recherche des causes de la mort ou des causes d’une disparition mentionnée aux articles 74 et 74-1, le juge d’instruction procède conformément aux dispositions du chapitreIer du titre III du livreIer. Les interceptions des correspondances émises par la voie des télécommunications sont effectuées sous son autorité et son contrôle dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 100 et aux articles 100-1 à 100-7. Les interceptions ne peuvent excéder une durée de deux mois renouvelable.

Les membres de la famille ou les proches de la personne décédée ou disparue peuvent se constituer partie civile à titre incident. Toutefois, en cas de découverte de la personne disparue, l’adresse de cette dernière et les pièces permettant d’avoir directement ou indirectement connaissance de cette adresse ne peuvent être communiquées à la partie civile qu’avec l’accord de l’intéressé s’il s’agit d’un majeur et qu’avec l’accord du juge d’instruction s’il s’agit d’un mineur ou d’un majeur protégé.

Art. 99-3. – Le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire par lui commis peut, par tout moyen, requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique qui sont susceptibles de détenir des documents intéressant l’instruction, y compris ceux issus d’un système informatique ou d’un traitement de données nominatives, de lui remettre ces documents, notamment sous forme numérique, sans que puisse lui être opposée, sans motif légitime, l’obligation au secret professionnel. Lorsque les réquisitions concernent des personnes mentionnées aux articles 56-1 à 56-3, la remise des documents ne peut intervenir qu’avec leur accord.

En l’absence de réponse de la personne aux réquisitions, les dispositions du deuxième alinéa de l’article 60-1 sont applicables.

Le dernier alinéa de l’article 60-1 est également applicable.

Art. 99-4. – Pour les nécessités de l’exécution de la commission rogatoire, l’officier de police judiciaire peut procéder aux réquisitions prévues par le premier alinéa de l’article 60-2.

Avec l’autorisation expresse du juge d’instruction, l’officier de police peut procéder aux réquisitions prévues par le deuxième alinéa de l’article 60-2.

Les organismes ou personnes concernés mettent à disposition les informations requises par voie télématique ou informatique dans les meilleurs délais.

Art. 100-7. – Aucune interception ne peut avoir lieu sur la ligne d’un député ou d’un sénateur sans que le président de l’assemblée à laquelle il appartient en soit informé par le juge d’instruction.

Aucune interception ne peut avoir lieu sur une ligne dépendant du cabinet d’un avocat ou de son domicile sans que le bâtonnier en soit informé par le juge d’instruction.

Aucune interception ne peut avoir lieu sur une ligne dépendant du cabinet d’un magistrat ou de son domicile sans que le premier président ou le procureur général de la juridiction où il réside en soit informé.

Les formalités prévues par le présent article sont prescrites à peine de nullité

Art. 706-73. – La procédure applicable à l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement des crimes et des délits suivants est celle prévue par le présent code, sous réserve des dispositions du présent titre :

1° Crime de meurtre commis en bande organisée prévu par le 8° de l’article 221-4 du code pénal ;

2° Crime de tortures et d’actes de barbarie commis en bande organisée prévu par l’article 222-4 du code pénal ;

3° Crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-40 du code pénal ;

4° Crimes et délits d’enlèvement et de séquestration commis en bande organisée prévus par l’article 224-5-2 du code pénal ;

5° Crimes et délits aggravés de traite des êtres humains prévus par les articles 225-4-2 à 225-4-7 du code pénal ;

6° Crimes et délits aggravés de proxénétisme prévus par les articles 225-7 à 225-12 du code pénal ;

7° Crime de vol commis en bande organisée prévu par l’article 311-9 du code pénal ;

8° Crimes aggravés d’extorsion prévus par les articles 312-6 et 312-7 du code pénal ;

8° bis Délit d’escroquerie en bande organisée prévu par le dernier alinéa de l’article 313-2 du code pénal ;

9° Crime de destruction, dégradation et détérioration d’un bien commis en bande organisée prévu par l’article 322-8 du code pénal ;

10° Crimes en matière de fausse monnaie prévus par les articles 442-1 et 442-2 du code pénal ;

11° Crimes et délits constituant des actes de terrorisme prévus par les articles 421-1 à 421-6 du code pénal ;

12° Délits en matière d’armes et de produits explosifs commis en bande organisée, prévus par les articles L. 2339-2, L. 2339-3, L. 2339-10, L. 2341-4, L. 2353-4 et L. 2353-5 du code de la défense ainsi que par les articles L. 317-2, L. 317-4 et L. 317-7 du code de la sécurité intérieure ;

13° Délits d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d’un étranger en France commis en bande organisée prévus par le quatrième alinéa du I de l’article 21 de l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France ;

14° Délits de blanchiment prévus par les articles 324-1 et 324-2 du code pénal, ou de recel prévus par les articles 321-1 et 321-2 du même code, du produit, des revenus, des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° à 13° ;

15° Délits d’association de malfaiteurs prévus par l’article 450-1 du code pénal, lorsqu’ils ont pour objet la préparation de l’une des infractions mentionnées aux 1° à 14° et 17° ;

16° Délit de non-justification de ressources correspondant au train de vie, prévu par l’article 321-6-1 du code pénal, lorsqu’il est en relation avec l’une des infractions mentionnées aux 1° à 15° et 17° ;

17° Crime de détournement d’aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport commis en bande organisée prévu par l’article 224-6-1 du code pénal ;

18° Crimes et délits punis de dix ans d’emprisonnement, contribuant à la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs entrant dans le champ d’application de l’article 706-167 ;

19° Délit d’exploitation d’une mine ou de disposition d’une substance concessible sans titre d’exploitation ou autorisation, accompagné d’atteintes à l’environnement, commis en bande organisée, prévu à l’article L. 512-2 du code minier, lorsqu’il est connexe avec l’une des infractions mentionnées aux 1° à 17° du présent article.

Pour les infractions visées aux 3° , 6° et 11° , sont applicables, sauf précision contraire, les dispositions du présent titre ainsi que celles des titres XV, XVI et XVII.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

• Ministère de la Justice

– Mme Marie-Suzanne Le Quéau, directrice des affaires criminelles et des grâces.

• Ministère de l’Intérieur

Direction centrale de la police judiciaire

– Mme Mireille Ballestrazzi, directrice ;

– M. Vincent Le Beguec, chef de la division des études et de la prospective ;

– Mme Stéphanie Cherbonnier, commissaire de police.

Direction générale de la gendarmerie nationale

– M. Simon-Pierre Baradel, général, sous-directeur de la police judiciaire.

• Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL)

– M. Hervé Machi, directeur des affaires juridiques, de l’expertise et des affaires internationales ;

– M. Émile Gabrier, adjoint au chef de service des affaires juridiques.

• Conférence des procureurs de la République

– M. Robert Gelli, président, procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nanterre.

• Union syndicale des magistrats

– M. Christophe Régnard, président.

• Syndicat de la magistrature

– Mme Françoise Martres, présidente ;

– Mme Sophie Combes, secrétaire nationale.

• Syndicat national Force ouvrière des magistrats (FO magistrats)

– Mme Béatrice Brugère, secrétaire générale adjointe.

• Syndicat des commissaires de la police nationale

– M. Christophe Cordier, conseiller technique ;

– M. Georges Salinas, adjoint au directeur de la brigade de recherche et d’intervention, préfecture de police de Paris.

• Syndicat indépendant des commissaires de police (SICP)

– M. Jean-Paul Mégret, secrétaire national ;

– M. Thierry Huguet, membre du bureau national.

• Syndicat des cadres de la sécurité intérieure (SCSI)

– M. Carlos Garcia, secrétaire national ;

– Mme Sabrina Rigolle, chargée de mission.

• Synergie officiers

– M. Francis Nebot, secrétaire national ;

– Mme Isabelle Trouslard, conseillère technique.

• Alliance police nationale

– M. Laurent Laclau, délégué national.

• Union SGP-Unité Police-FO

– M. Henri Martini, secrétaire général ;

– M. Nicolas Comte, secrétaire général-adjoint.

• UNSA Police

– M. Philippe Capon, secrétaire général ;

– M. Christophe Bonvalet, secrétaire national.

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1 () CEDH, 2 septembre 2010, n° 35623/05, Uzun contre Allemagne.

2 () Articles 12, 14, 41, 60-2 et 77-1-1 précités du code de procédure pénale.

3 () Article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :

« 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

« 2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »

4 () Cass. Crim., 22 novembre 2011, n° 11-84.308.

5 () CEDH, 10 juillet 2008, Medvedyev contre France ; CEDH, 23 novembre 2010, Moulin contre France.

6 () Article 5 § 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :

« Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure. La mise en liberté peut être subordonnée à une garantie assurant la comparution de l’intéressé à l’audience. »

7 () Le présent projet de loi a été déposé le 23 décembre 2013 sur le Bureau du Sénat et le Gouvernement a décidé d’engager, en application de l’article 45 de la Constitution du 4 octobre 1958, la procédure accélérée.

8 () Articles 60-1, 60-2, 77-1-1, 77-1-2, 99-3 ou 99-4 du code de procédure pénale.

9 () Les opérations de livraison surveillée permettent de suivre une marchandise frauduleuse jusqu’à son destinataire.

10 () Cf. étude d’impact, p. 17.

11 () Rapport (n° 284, session ordinaire de 2013-2014) de M. Jean-Pierre Sueur, au nom de la commission des Lois du Sénat, sur le projet de loi relatif à la géolocalisation, p. 22.

12 () CEDH, 2 septembre 2010, n° 35623/05, Uzun contre Allemagne.

13 () Ces infractions, caractérisées soit par la commission d’actes en bande organisée (meurtres, tortures et actes de barbarie, enlèvement et séquestration, etc.), soit par la particulière gravité des faits (terrorisme, proxénétisme, trafic de stupéfiants, etc.), sont soumises à des règles de procédure particulières permettant aux enquêteurs et aux autorités judiciaires de disposer de moyens d’enquête et de contrainte adaptés à la nature des faits.

14 () Rapport (n° 284, session ordinaire de 2013-2014) précité, p. 22.

15 () En application de l’article 53 du code de procédure pénale.

16 () Cf. notamment CC, décision n° 93-326 DC du 11 août 1993, Loi modifiant la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme du code de procédure pénale, considérant n° 5, CC, décision n° 97-389 DC, 22 avril 1997, Loi portant diverses dispositions relatives à l’immigration, considérant n° 61 et CC, décision n° 2010-80 QPC, 17 décembre 2010, M. Michel F., considérant n° 11.

17 () Cf. étude d’impact, p. 18.

18 () Rapport (n° 284, session ordinaire de 2013-2014) précité, p. 23.

19 () CEDH, 2 septembre 2010, n° 35623/05, Uzun c/ Allemagne.

20 () Rapport (n° 284, session ordinaire de 2013-2014) précité, p. 15.

21 () Cf. compte rendu intégral des débats de la séance du lundi 20 janvier 2014 au Sénat, disponible à l’adresse suivante : http://www.senat.fr/seances/s201401/s20140120/s20140120_mono.html.

22 () Cf. notamment CC, décision n° 90-281 DC du 27 décembre 1990, Loi sur la réglementation des télécommunications.

23 () Rapport (n° 284, session ordinaire de 2013-2014) précité, p. 24.

24 () Rapport (n° 284, session ordinaire de 2013-2014) précité, p. 25.

25 () Rapport (n° 284, session ordinaire de 2013-2014) précité, p. 26.

26 () CC, décision n° 2004-492 DC, Loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, considérant n° 65.

27 () Rapport (n° 284, session ordinaire de 2013-2014) précité, p. 27.

28 () Rapport (n° 284, session ordinaire de 2013-2014) précité, p. 26.

29 () Décret n° 2004-976 du 15 septembre 2004 fixant les conditions d’habilitation des agents des douanes visés aux articles 67 bis et 67 bis-1 du code des douanes.

30 () Les délits douaniers figurent aux articles 414 à 429 et 459 du code des douanes.

31 () Tribunal des conflits, 17 décembre 2012, n° 12-03877, Mme X contre ministère du Budget.

32 () Cette proposition de loi relative à la saisie et la confiscation en matière pénale a été déposée sur le Bureau de l’Assemblée nationale, le 12 novembre 2008, par MM. Jean-Luc Warsmann et Guy Geoffroy.