Théophile Berlier

1761 - 1844

Informations générales
  • Né le 1er février 1761 à Dijon ( - Généralité de Bourgogne France)
  • Décédé le 12 septembre 1844 à Dijon (Côte-d'Or - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Présidence(s)

Présidence de l'Assemblée nationale
du 3 septembre 1795 au 24 septembre 1795
Présidence de l'Assemblée nationale
du 21 décembre 1798 au 19 janvier 1799

Mandat(s)

Régime politique
Révolution
Législature
Convention nationale
Mandat
Du 4 septembre 1792 au 26 octobre 1795
Département
Côte-d'Or
Groupe
Gauche
Régime politique
Révolution
Législature
Conseil des Cinq-Cents
Mandat
Du 17 octobre 1795 au 19 mai 1797
Département
Côte-d'Or
Groupe
Majorité
Régime politique
Révolution
Législature
Conseil des Cinq-Cents
Mandat
Du 14 avril 1798 au 26 décembre 1799
Département
Seine
Groupe
Majorité

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Membre de la Convention nationale et député au Conseil des Cinq-Cents, né à Dijon (Généralité de Bourgogne), le 1er février 1761, mort à Dijon (Côte d'Or), le 12 septembre 1844, il exerçait dans cette ville, avant la Révolution, la profession d'avocat.

Il adopta les principes nouveaux et fut élu membre du conseil général de la Côte-d'Or (1791) ; il faisait partie du directoire départemental lorsqu'il fut nommé député à la Convention nationale par le département de la Côte-d’Or, avec 282 voix sur 418 votants.

Il prit la parole pour la première fois dans le procès de Louis XVI, et s'attacha à démontrer que l'Assemblée avait le droit de juger le roi. La Convention ordonna l'impression de son discours sur cette question de savoir « si Louis pouvait et devait être jugé ». Lors des appels nominaux, Berlier vota contre l'appel au peuple, et pour la mort : « L'humanité gémit, mais ma conscience commande » dit-il, et contre le sursis.

Le 27 août 1793, il fut envoyé en mission à Dunkerque et y fit preuve d'un certain courage.

Revenu à Paris, il s'effaça jusqu'au 9 thermidor, et dix jours après cet événement, il rentra dans la politique active et fit un rapport sur l'organisation des comités de gouvernement. Cette prudente attitude inspira à un de ses biographes cette appréciation : « Esprit souple et délié, il fut spectateur tranquille des débats personnels de ses collègues jusqu'à la chute de Robespierre: il se montra courageux quand le danger fut passé. » Son rôle parlementaire se borna, en effet, durant la période la plus orageuse de la Révolution, à faire rendre des décrets particuliers, tantôt pour ajouter quelques dispositions nouvelles à la loi sur les successions, tantôt pour faire décider dans quelles conditions aurait lieu l'action civile, etc.

Envoyé une seconde fois dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, il put donner carrière à ses principes modérés; il écrivait de Calais, le 9 fructidor an II, au Comité de sûreté générale : « L'arrestation des gens qui avaient terrorisé le pays a rempli de joie tous les citoyens. » Il y institua aussi un tribunal destiné à juger les prévenus d'émigration, et, le 15 brumaire an III, mandait à la Convention : « Egalement ennemis de la domination des Capet et de celle de Robespierre, adversaires implacables des partisans des rois, et de cette autre espèce d'hommes qui, tyrans par essence, croyaient qu'il leur était permis d'asservir tous les autres au nom même du patriotisme, les citoyens de ces deux départements ne sont pas disposés à souffrir qu'il s'élève parmi eux quelques nouveaux dominateurs, au grand scandale de la vraie liberté. »

Rentré à l'Assemblée, il défendit, contre l'opinion de Lanjuinais, l'effet rétroactif de la loi du 17 nivôse sur les successions, fut nommé membre de la commission des lois organiques de la Constitution, se montra d'avis, dans la séance du 14 floréal an III (3 mai 1795), d'annuler les confiscations prononcées par les tribunaux révolutionnaires, et proposa, à la même séance, la suppression immédiate de ces tribunaux. Lorsque Sieyès eut soumis à l'Assemblée l'idée de son jury constitutionnaire, Berlier demanda la priorité pour le plan de la commission dont il était membre, fit adopter, au nom de cette même commission, un projet d'adresse au peuple français, et obtint qu'on levât le séquestre mis sur les biens des prêtres déportés.

Membre du Comité de salut public le 15 fructidor an III avec Daunou, Cambacérès et Larévellière-Lépeaux, il fut, le lendemain, 16, nommé président de la Convention, et répondit en cette qualité, à une députation de la section des Arcis, que « la Convention conserverait le pouvoir constituant jusqu'au moment ou le vœu du peuple serait légalement constaté. »

Berlier fut élu par les trois départements de la Côte-d’Or, du Nord et du Pas-de-Calais, député au premier Conseil des Cinq-Cents, le 25 vendémiaire an IV ; il opta pour la Côte-d'Or, qui lui avait donné 171 voix sur 335 votants, et apporta dans la nouvelle Assemblée le même esprit de conciliation. Il proposa de porter devant les juges ordinaires les affaires qui étaient attribuées d'office aux arbitres, et fit relever de la déchéance, en matière judiciaire, les citoyens qui s'étaient pourvus contre des arrêts des comités de la Convention ou des représentants.

A l'issue de la session, il fut attaché au bureau de consultation établi près le ministère de la justice, puis appelé par le Directoire aux fonctions de substitut du commissaire du gouvernement près la Cour de cassation (avocat général).

Berlier ne resta à ce poste que pendant une année, et fut élu pour la seconde fois, le 25 germinal an VI, par les deux assemblées scissionnaires des électeurs de Paris, membre du Conseil des Cinq-Cents. Il en devint secrétaire (2 messidor), puis président (1er nivôse de l'année suivante), fit plusieurs rapports sur le régime de la presse, à l'égard de laquelle il proposa des dispositions pénales, appuya vivement la loi dite des otages proposée par Brichet (V. ce nom), soutint d'abord le maintien de la loi du 19 fructidor contre la presse, pour en demander ensuite le retrait, proposa encore que l'autorité exécutive fût investie du droit de former dans certains départements un conseil de guerre séparé de la division militaire, etc.

Quelques jours avant le 18 brumaire, Berlier jugea habile de se tenir à l'écart du mouvement politique, et se rendit à Dijon ; quand il fut de retour à Paris, il ne tarda point, après avoir fait effacer son nom d'une liste de proscription, à accepter de Bonaparte les fonctions de conseiller d'Etat, puis de président du conseil des prises.

Il prit dans le conseil d'Etat une part importante aux travaux de législation ; divers essais sur les droits à restituer aux enfants naturels ou nés hors mariage, sur l'adoption, sur la puissance ou protection paternelle, qu'il avait publiés sous la Convention, servirent de bases à des dispositions corrélatives, adoptées dans le Code civil. Ce fut aussi sur son rapport que furent rendues les lois relatives aux inscriptions hypothécaires.

Il fut nommé commandeur de la Légion d'honneur, lorsque cette institution fut organisée, et reçut plus tard le titre de comte de l'Empire.

En 1806, il eut à s'acquitter d'une mission en Belgique, relative à des détentions arbitraires exercées contre plusieurs citoyens.

Lors de la déchéance de Napoléon, et, bien qu'il eût reçu de l'empereur 60 000 francs de gratifications, plus un majorat d'un revenu annuel de 10 000 francs en terres situées dans la Poméranie suédoise, de 4 000 francs dans l'Illyrie, et enfin de quatre actions du canal de Languedoc (V. Germain Sarrut et Saint-Elme, Biographie des hommes du jour), Berlier fut un des fonctionnaires les plus empressés à adhérer à cette déchéance ; il remplit, pendant les Cent-Jours, les fonctions de secrétaire du gouvernement provisoire.

Il quitta ensuite la politique, échappa à la proscription de juillet 1815, mais fut atteint comme régicide, par la loi dite d'amnistie de janvier 1816, dut s'expatrier à Bruxelles, où il s'occupa de travaux historiques, littéraires et de jurisprudence.

La révolution de Juillet lui rouvrit les portes de la France. Il se fixa alors à Dijon, dont il devint conseiller municipal.

L'Institut l'admit au nombre de ses correspondants (Académie des sciences morales et politiques). Il vivait ainsi dans une sorte de retraite, quand les auteurs de la Biographie des hommes du jour, ayant à écrire, en 1838, une notice sur Berlier, eurent l'idée originale d'obtenir de lui-même des éclaircissements sur les « tergiversations » dont son existence politique leur semblait pleine. Berlier ne fit point de difficulté de leur répondre.

Sur la première question : Quels ont été les motifs de votre opinion dans le jugement de Louis XVI ? il s'expliqua en ces termes: « Quelle était la peine à infliger ? Ici j'avoue que celle de mort répugnait beaucoup à mon caractère et que le bannissement immédiat s'était d'abord offert à ma pensée, car quelque coupable que l'accusé fût à mes yeux, je sentais que les préjugés de son éducation royale, selon le droit divin, pouvaient justifier une atténuation de peine ; mais en considérant l'effervescence publique alors portée à son comble, je restai convaincu, comme je le suis encore aujourd'hui, qu'il eût été impossible de tirer ce grand accusé de prison, et de le conduire sain et sauf jusqu'aux frontières ; j'en jugeais même la simple tentative comme appelant inévitablement des résistances qui compromettraient beaucoup de vies autres que celles du roi, sans que la sienne fût sauvée... »

La deuxième question était plus délicate : Comment le titre de comte peut-il se concilier avec vos antécédents ? Berlier avoua dans sa réponse qu'il n'avait cédé qu'à l'intérêt personnel. il déclara qu'après avoir été « opposant » à l'institution de la Légion d'honneur, « plus particulièrement encore à l'hérédité et à l'établissement de l'Empire », il accepta cependant le titre de comte comme une conséquence inévitable des institutions impériales : « Tout cela s'est arrangé dans le cabinet de l'Empereur, j'ignore par qui ; j'y prenais très peu d'intérêt, et ne fus instruit qu' en recevant mes lettres patentes. Singulière destinée ! Je m'étais opposé à l'institution de la Légion d'honneur, et l'institution admise, je fus nommé commandant ; depuis, je m'étais opposé aux institutions héréditaires qui devaient amener la noblesse, et je fus nommé comte... Dira-t-on que je pouvais refuser le titre et renvoyer le brevet ? Sans doute ; mais le pouvais-je sans renoncer en même temps à mes places de conseiller d'Etat et de président du Conseil des prises ? Ces places me donnaient à moi et à ma nombreuse famille une existence honorable et une honnête aisance. Pouvais-je renoncer à ces avantages ?... Qu'est-ce, d'ailleurs, que le pays eût gagné à ma retraite ? Les choses en auraient-elles été autrement ?... etc. »

Date de mise à jour: août 2019