Léon Damas

1912 - 1978

Informations générales
  • Né le 28 mars 1912 à Cayenne (Guyane - France)
  • Décédé le 22 janvier 1978 à Washington (Usa)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 4 janvier 1948 au 4 juillet 1951
Département
Guyane
Groupe
Socialiste

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1940 à 1958 (La documentation française)



Né le 28 mars 1912 à Cayenne (Guyane)
Décédé le 22 janvier 1978 à Washington (Etats-Unis d'Amérique)

Député de la Guyane de 1948 à 1951

Léon Damas est né le 28 mars 1912 à Cayenne (Guyane), dans une famille noire d'origines bourgeoises. Orphelin très jeune, il est recueilli par une tante, qui lui fait poursuivre ses études secondaires à Cayenne, puis au lycée Schœlcher de Fort-de-France (Martinique) où il est le condisciple d'Aimé Césaire, et, enfin, à partir de 1926, au lycée de Meaux (Seine-et-Marne). Après le baccalauréat (1928), Léon Damas fréquente la Faculté de droit de Paris, mais aussi l'Ecole des langues orientales et l'Institut d'ethnologie, tout en travaillant durement pour assurer sa subsistance comme débardeur aux halles, ouvrier manœuvre dans une usine de nickelage, plongeur dans un restaurant, barman à la « Boule blanche », dans le quartier Montparnasse, etc.

Quoiqu'il bénéficie, un temps, d'une bourse octroyée par le Conseil général de la Martinique, ces années très difficiles le marqueront très profondément : Léon Damas fonde notamment alors, avec Léopold Sédar Senghor et Aimé Césaire, le périodique de L'Etudiant noir dont le but est de « rattacher les Noirs à leur histoire, leurs traditions et leurs langues ». C'est alors qu'il découvre réellement le problème noir, auquel il consacrera sa vie : « Rendez-les moi, mes poupées noires / Qu'elles dissipent / L'image des catins blêmes marchandes d'amour / Qui s'en vont viennent/ Sur le boulevard de mon ennui... / ».

Le problème noir, pour Léon Damas, est d'abord l'histoire d'une aliénation culturelle, et il s'oriente donc vers la littérature, se liant avec André Breton, Robert Desnos, Audiberti et le groupe surréaliste. Ses premiers poèmes sortent en 1934 dans la revue Esprit et, en 1937, il fait paraître un recueil, sous le titre de Pigments, avec une préface de Robert Desnos : « Cri de protestation contre la politique d'assimilation que la France menait alors dans ses colonies, cet ouvrage est l'un de ceux où la révolte politique naissante du monde noir s'identifie à la contestation littéraire que constitue le surréalisme ».

Après Pigments, Léon Damas publiera jusqu'en 1966 une demi-douzaine de recueils dont Poèmes nègres sur des airs africains (1937). Il avait, en 1934-1935, été chargé d'une mission en Guyane par le Musée de l'Homme, et ce voyage lui inspirera un livre bilan, Retour de Guyane, publié en 1938, puis, plus tard, Veillées noires (1943). Ce sont ensuite, notamment, une Anthologie des poètes africains et antillais d'expression française (1947), Grafitti (1952), Black label (1956) et Névralgies (1966). Léon Damas est également en charge d'une collection auprès de plusieurs éditeurs parisiens, notamment chez Fasquelle et au Seuil (« Latitude française »).

Mobilisé en 1939, Léon Damas fait la campagne de France, puis dès l'armistice, reprend son action en faveur des Africains, des Guyanais et des Antillais surpris en France par la guerre et la défaite et dont la situation était tout particulièrement difficile. Entré dans les services de l'administration de la presse à Toulouse, puis à Lyon, il y organise la Résistance et sera arrêté par la Gestapo le 4 juillet 1943. Relâché, il reprend aussitôt son activité anti-allemande, notamment au sein des services de la radiodiffusion nationale.

Cet engagement toujours affirmé aux côtés du peuple noir afro-américain pousse, après le second conflit mondial, Léon Damas vers l'action plus proprement politique. Après le rejet du projet de Constitution par le référendum du 5 mai 1946, Léon Damas et son ami René Jadfard mènent en Guyane une campagne politique très active culminant lors des élections du 10 novembre 1946 pour la première législature de la IVe République. A cette occasion, René Jadfard, candidat de la S.F.I.O., réunit 3 372 voix sur 6 521 suffrages exprimés et s'empare du siège jusque-là détenu par Gaston Monnerville : la validation des résultats du scrutin ne sera pourtant votée que très tardivement, le 17 juin 1947.

Aux côtés du nouveau député de la Guyane, Léon Damas devient alors une des principales figures politiques de Cayenne et est notamment appelé à prononcer un important discours, le 21 juillet 1947, devant la statue de Victor Schœlcher, lors de la commémoration du centenaire de l'abolition de l'esclavage. Mais René Jadfard décède brutalement dans un accident d'avion le 10 novembre 1947, et Léon Damas se présente donc tout naturellement, au nom du Mouvement de la renaissance guyanaise, aux élections complémentaires du 4 janvier 1948. Avec 3 847 voix sur 6 935 suffrages (mais 11 841 électeurs inscrits), il est élu. Il s'inscrit alors au Parti socialiste S.F.I.O.

Léon Damas est, à l'Assemblée, nommé membre des Commissions des moyens de communication (1948), de la marine marchande et des pêches (1949) et des territoires d'outre-mer (1950-1951). Membre de la Commission chargée d'enquêter sur les incidents très graves survenus en Côte d'Ivoire (1950), il en dépose le rapport, le 21 novembre 1951. Enfin, il est nommé juré à la Haute Cour de justice (1948-1949) et devient secrétaire du Groupe interparlementaire socialiste. Mais la situation de la Guyane est alors des plus difficiles et Léon Damas lui consacre l'essentiel de son activité parlementaire. Il écrira notamment, en 1949, sous le titre La Guyane, martyre de l'oubli : « La Guyane malheureuse et pitoyable souffre d'une incompréhension, d'une indifférence et d'un mépris immérités. Navrante réalité que ce pays à reconstruire à partir de zéro, dans l'intérêt même de la France ! Un pays qui ne ressemble à aucun autre pays français, un pays sans moyens de transport intérieurs, sans communication directe avec la France... ».

Dans l'immédiat, Léon Damas dépose quatorze textes, pour la plupart relatifs aux problèmes de la Guyane : sa proposition de loi du 20 décembre 1949 vise à supprimer le territoire de l'Inini, jusque-là directement géré par l'administration. Sa proposition de résolution du 5 mai 1950 invite le gouvernement à créer en Guyane un Bureau forestier, et celle du 16 mai suivant, à créer un « Institut français d'Amérique tropicale ». Il intervient en outre largement dans les débats parlementaires, et notamment, le 11 juillet 1949, à propos de la délimitation des circonscriptions électorales dans les départements d'outre-mer.

Favorable à la nationalisation des écoles des houillères (14 mai 1948), Léon Damas soutient le Plan Marshall (7 juillet), la formation du Conseil de l'Europe (9 juillet 1949) et celle du pacte de l'Atlantique (26 juillet). Enfin, il est favorable au projet de réforme électorale instituant le scrutin de liste majoritaire départemental à un tour avec apparentements (7 mai 1951). Léon Damas sollicite le renouvellement de son mandat lors des élections du 17 juin 1951 pour la deuxième législature, mais neuf candidats sont en présence pour l'unique siège de la Guyane : avec seulement 725 voix sur 5 928 suffrages exprimés, le député sortant n'arrive qu'en quatrième position, et perd son siège au profit d'Edouard Gaumont, candidat R.P.F., qui recueille 2 099 voix. Il revient alors exclusivement à ses activités d'écrivain, de journaliste et de conférencier. Pourtant, à nouveau candidat aux élections législatives du 2 janvier 1956, il enregistre un progrès certain de son audience, recueillant 1 752 voix sur 7 671 suffrages exprimés, mais n'est pas élu.