N° 1199 tome I - Avis de Mme Michèle Delaunay sur le projet de loi de finances pour 2009 (n°1127)


INTRODUCTION 5

I.- LES CRÉDITS DU PROGRAMME « RAYONNEMENT CULTUREL ET SCIENTIFIQUE » 7

A. L’ARCHITECTURE BUDGÉTAIRE CONNAÎT UNE ÉVOLUTION EN 2009 7

B. LES CRÉDITS POUR LE RAYONNEMENT CULTUREL ET SCIENTIFIQUE MANQUENT D’AMBITION 10

1. Les crédits pour la francophonie et l’action culturelle sont éclatés entre différentes missions 10

2. Les moyens financiers accordés à la coopération culturelle et scientifique sont insuffisants 12

II.- LES RELATIONS FRANCO-ROUMAINES À TRAVERS LA COOPÉRATION CULTURELLE 17

A. LA FRANCE DISPOSE EN ROUMANIE D’UN CAPITAL DE CONFIANCE ET DE NOMBREUX RÉSEAUX D’INFLUENCE 17

1. Des liens historiques anciens et très étroits ont été noués 17

2. La France a soutenu l’entrée de la Roumanie dans l’Union Européenne 18

3. La Roumanie connaît une francophonie militante 19

4. L’ambassade de France dispose d’un réseau culturel structuré et dynamique 21

5. La coopération décentralisée démontre un grand dynamisme 24

B. LA FRANCE DOIT MODERNISER SON IMAGE AUPRÈS DES ROUMAINS 26

1. L’expertise française de la coopération technique doit être valorisée afin d’accompagner plus efficacement l’intégration européenne de la Roumanie 26

2. La récente signature du partenariat stratégique renforcera la coopération bilatérale franco-roumaine 29

3. La coopération universitaire et de recherche doit être développée avec une dimension européenne et francophone 30

4. La distribution de produits culturels francophones doit être améliorée 32

5. La coopération décentralisée gagnerait à être mieux structurée 34

6. La France devrait s’impliquer dans la modernisation du système de santé roumain 35

TRAVAUX DE LA COMMISSION 39

I.- AUDITION DU MINISTRE 39

II.- EXAMEN DES CRÉDITS 73

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 75

INTRODUCTION

Le « rayonnement culturel et scientifique de la France » est un enjeu que l’on peut qualifier de patrimonial pour notre pays. Il s’agit de s’interroger sur la place que nous voulons occuper sur tous les plans, éducatif, économique, politique, dans le concert des nations. Pour cela, la France doit renouveler sa stratégie d’influence.

Le contexte de rigueur budgétaire l’a déjà conduite ces dernières années à imposer de sévères économies à l’organisation de son réseau diplomatique. Pour autant, elle continue à tenir un discours universaliste et à afficher des ambitions qui cadrent mal avec la modestie des moyens alloués. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : de 1997 à 2007 le ministère des affaires étrangères et européennes a connu une réduction de ses effectifs de 11 % et une diminution, en termes réels, de ses moyens de fonctionnement et d’investissement de 21 % entre 2000 et 2008.

Notre mode de promotion de la culture française, via le centre culturel qui met à disposition des produits destinés à un public assez captif, n’est plus adapté à la réalité d’aujourd’hui où les biens culturels circulent plus facilement notamment grâce à Internet. Du moins, n’en représente-t-il qu’une fraction. Certaines institutions culturelles françaises, comme les musées ou les universités, mènent aujourd’hui des politiques internationales indépendantes des canaux diplomatiques.

Le rayonnement culturel et scientifique de la France n’est donc plus l’apanage des services de notre réseau diplomatique. Il passe aussi par d’autres vecteurs que nous ne devons pas manquer d’utiliser et de promouvoir. Tous ces éléments doivent conduire à réexaminer les moyens consacrés à l’action culturelle extérieure et à déterminer nos priorités.

Les crédits du programme « Rayonnement culturel et scientifique » donnent une image très partielle de la diplomatie culturelle de la France puisque les crédits destinés aux pays en voie de développement ou à la francophonie multilatérale n’y figurent pas. De même, il est paradoxal que le ministères des affaires étrangères et européennes perde toute maîtrise sur les crédits consacrés à l’audiovisuel extérieur alors que l’influence de la culture française est largement déterminée par sa présence dans les média internationaux.

La partie thématique du rapport est consacrée aux relations franco-roumaines. La Roumanie est sans conteste le pays le plus francophone et le plus francophile des pays d’Europe centrale. L’histoire, la proximité des langues, la volonté européenne et de partenariat avec la France de ce pays, le signalent à l’attention de notre politique. Il a paru intéressant de faire le point sur l’évolution de l’influence française en Roumanie un an après son adhésion à l’Union européenne et alors même que les deux États ont signé en février 2008 une déclaration de partenariat stratégique qui devrait conduire à un renforcement des relations bilatérales entre les deux pays.

Un déplacement en Roumanie a permis de constater que les Roumains sont très demandeurs de la présence de la France dans leur pays mais qu’ils souhaitent également voir évoluer nos modalités d’intervention pour que la culture française soit au cœur des enjeux scientifiques et contribue au développement de leur pays.

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe au 10 octobre la date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 97 % des réponses étaient parvenues à la rapporteure
pour avis.

Le ministère des affaires étrangères et européennes (MAEE) contribue à deux missions : une mission ministérielle intitulée « Action extérieure de l’État » et une mission interministérielle intitulée « Aide publique au développement ». Il pilote les trois programmes de la mission « Action extérieure de l’État », dont le montant global s’élève à 2,52 milliards d’euros de crédits de paiement.

Le programme « Action de la France en Europe et dans le monde » (1,615 milliard d’euros), soit 64 % des crédits de la mission, rassemble les moyens des services centraux et déconcentrés (160 ambassades bilatérales, 21 représentations permanentes auprès d’organisations internationales) qui assurent la conduite de l’action diplomatique de la France. Il assure le financement des contributions de la France aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix décidées par l’Organisation des nations unies (ONU), et contient les crédits de la coopération militaire et de défense.

Le programme « Français à l’étranger et affaires consulaires » (310 millions d’euros) a pour objet de fournir aux Français établis hors de France ou de passage à l’étranger les services des 230 postes du réseau consulaire. Il regroupe aussi les crédits relatifs aux bourses et à la prise en charge des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans le réseau de l’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger (AEFE). Il contribue également à la politique en matière de visas, conjointement avec le ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire.

Le programme « Rayonnement culturel et scientifique » (595 millions d’euros) permet la mise en œuvre de la coopération avec les pays développés dans les domaines culturel, audiovisuel, scientifique, technique et universitaire. L’animation de cette action est confiée aux services de coopération et d’action culturelle (SCAC). Elle s’appuie sur un réseau de 57 centres et instituts culturels français, 65 alliances françaises et 8 centres de recherche. Le programme gère aussi les crédits de l’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger (AEFE).

C’est la première année qu’est présentée une programmation pluriannuelle des crédits. Les crédits de paiement du ministère des affaires étrangères et européennes devraient progresser globalement de 3,6 % en 2009 pour aboutir à une progression de 4,8 % sur la période 2008-2011.

Au plan des effectifs, 15 866 « équivalents temps plein travaillés » (ETPT) sont inscrits dans le plafond d’emplois du ministère pour 2009.

À ces emplois, s’ajoutent les 3 220 ETPT des recrutés locaux des établissements à autonomie financière. Ces emplois ne figurent pas dans le plafond d’emplois puisqu’ils sont totalement ou partiellement autofinancés sur les ressources propres des établissements. Au total, on compte donc 19 086 ETPT en 2009, dont 8 722 ETPT de droit local (45,7 % des effectifs).

Pour 2009, le plafond d’emplois sera réduit de 206 ETPT, la masse salariale s’élevant à 1 031 millions d’euros, soit une augmentation de 0,57 % due intégralement à l’augmentation des contributions au Compte d’affectation spéciale (CAS) pensions.

Mission /
Programme

LFI 2008

Évolution 2009/2008

PLF 2009

Évolution 2010/2009

PLF 2010

Évolution 2011/2010

PLF 2011

Évolution 2011/2008

Action extérieure de l'État

2 352,3

7,1 %

2 520,2

1,2 %

2 549,7

-1,1 %

2 522,4

7,2 %

Titre 2 1

782,5

2,3 %

800,3

1,0 %

808,3

0,4 %

811,4

3,7 %

Hors titre 2

1 569,9

9,6 %

1 719,9

1,3 %

1 741,5

-1,7 %

1 711,2

9,0 %

Action de la France en Europe et dans le monde

1 555,6

3,8 %

1 615,4

1,9 %

1 646,5

-2,5 %

1 605,2

3,2 %

Titre 2

499,3

4,9 %

524,0

1,2 %

530,5

0,8 %

534,5

7,0 %

Hors titre 2

1 056,3

3,3 %

1 091,43

2,3 %

1 116,0

-4,1 %

1 070,7

1,4 %

Français à l'étranger et affaires consulaires

310,8

-0,2 %

310,2

5,0 %

325,8

5,6 %

344,1

10,7 %

Titre 2

190,7

-1,1 %

188,5

0,8 %

190,1

0,2 %

190,4

-0,1 %

Hors titre 2

120,1

1,3 %

121,7

11,5 %

135,7

13,3 %

153,7

28,0 %

Rayonnement culturel et scientifique

486,0

22,3 %

594,6

-2,9 %

577,4

-0,7 %

573,1

17,9 %

Titre 2

92,5

-5,2 %

87,8

-0,2 %

87,6

-1,4 %

86,3

-6,7 %

Hors titre 2

393,5

28,8 %

506,8

-3,4 %

489,8

-0,6 %

486,8

23,7 %

Solidarité à l’égard des PVD *

2 088,5

-0,3 %

2 081,3

1,3 %

2 108,8

1,0 %

2 130,1

2,0 %

Titre 2

242,8

-4,9 %

230,8

-0,4 %

230,0

0,3 %

230,7

-5,0 %

Hors titre 2

1 845,7

0,3 %

1 850,5

1,5 %

1 878,8

1,1 %

1 899,4

2,9 %

TOTAL MAEE

4 440,8

3,6 %

4 601,6

1,2 %

4 658,5

-0,1 %

4 652,5

4,8 %

* PVD : pays en voie de développement

(1) Dépenses de personnel

Source : MAEE

Les principaux changements dans l’architecture budgétaire du ministère des affaires étrangères et européennes portent sur les cinq points suivants.

 La création du Centre de crise

Conformément au souhait du Président de la République, un Centre de crise a été créé. Opérationnel depuis juillet 2008, il est placé auprès du secrétaire général du ministère des affaires étrangères et européennes ; il regroupe les agents en charge de la sécurité des Français à l’étranger et ceux chargés de l’action humanitaire. Les crédits relatifs à la sécurité des Français sont donc transférés du programme « Français à l’étranger et affaires consulaires » au programme « Action de la France en Europe et dans le monde ».

Les crédits d’action humanitaire restent dans le programme « Solidarité à l’égard des pays en voie de développement » même si ce centre est appelé à en gérer une partie.

 Le transfert de contributions internationales techniques

Dans la poursuite du mouvement initié par la loi de finances pour 2008, une nouvelle série de contributions internationales à caractère technique, portées jusqu’à présent par le programme « Action de la France en Europe et dans le monde », sont transférées aux ministères compétents au fond, pour un volume total de 17 millions d’euros.

 Le transfert des crédits d’entretien immobilier

1,2 million d’euros sont transférés du programme « Action de la France en Europe et dans le monde » au nouveau programme 309 « Entretien immobilier de l’État » géré par France Domaine.

 Le transfert de compétences en matière de visas

Les crédits, en dehors des crédits de personnel, de l’action « Instruction des demandes de visa » du programme « Français à l’étranger et affaires consulaires » sont transférés au ministère de l’immigration de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire à raison de 2,6 millions de crédits d’équipement et d’informatique relatifs aux visas.

 Le transfert de l’audiovisuel extérieur

Le programme « Audiovisuel extérieur » est transféré à la direction du développement des médias à l’exception de la subvention à Canal France International (CFI), qui reste de la compétence du ministère des affaires étrangères et européennes et est rattachée au programme « Solidarité à l’égard des pays en voie de développement ».


La rapporteure pour avis tient à souligner que le périmètre actuel du programme « Rayonnement culturel et scientifique » ne lui paraît pas satisfaisant, car les actions menées par la France pour encourager la diversité culturelle et promouvoir la langue française ne sont pas financées par la même mission selon qu’elles s’adressent à des pays éligibles à l’aide publique au développement, telle que définie par le comité d’aide au développement de l’OCDE, ou aux autres pays.

Le programme « Rayonnement culturel et scientifique » ne vise que les actions de coopération et d’action culturelle à destination des pays développés ou en transition alors que les actions au bénéfice des pays en voie de développement relèvent du programme « Solidarité à l’égard des pays en voie de développement ». Il convient aussi de souligner que les crédits affectés à la francophonie multilatérale, c’est-à-dire qui concourent au financement des institutions de la francophonie telle que l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) ou l’agence universitaire de la francophonie (AUF), ne figurent pas dans ce programme.

La rapporteure pour avis se félicite en revanche que les crédits de l’agence pour l’enseignement du français à l’étranger (AEFE) relèvent désormais du programme « Rayonnement culturel et scientifique », hormis les bourses dont bénéficient les enfants français comme il a été indiqué supra. Ce transfert permet une meilleure lisibilité de l’effort de la France en matière de diffusion de la culture française et de promotion de la langue française. L’AEFE assure le suivi et l’animation du réseau des établissements d’enseignement français à l’étranger. Ce réseau, présent dans 130 pays, compte 451 établissements homologués par le ministère de l’éducation nationale, dont 74 sont gérés directement par l’agence (établissements dits EGD) et 172 ont passé une convention avec elle (établissements dits conventionnés).

Le réseau scolaire français à l’étranger scolarise dans sa totalité 240 000 élèves dont 100 000 Français. Le réseau de l’AEFE, comprenant les 246 établissements EGD et conventionnés, scolarise 168 000 élèves dont 79 000 Français soit 47 %, 67 000 élèves non français originaires du pays où ils sont scolarisés et 22 000 étrangers qui ne sont pas originaires du pays où ils sont scolarisés (au total les élèves étrangers représentent 53 % de l’effectif scolarisé). Depuis deux ans, les effectifs d’élèves augmentent de près de 5 000 élèves à chaque rentrée scolaire. Cette augmentation témoigne de la forte attractivité du réseau scolaire français à l’étranger.

Un autre paradoxe doit être relevé quant aux crédits qui ne figurent pas dans le programme « Rayonnement culturel et scientifique » : il s’agit de ceux consacrés à l’audiovisuel extérieur alors qu’ils sont pourtant essentiels à la diffusion de l’influence française.

Il convient de rappeler que jusqu’à la loi de finances pour 2006 les crédits de l’audiovisuel extérieur relevaient du programme « Rayonnement culturel et scientifique ». À partir de 2007, ces crédits ont été rattachés à la mission interministérielle « Médias », les crédits relevant de l’audiovisuel extérieur étant sous la responsabilité du ministère des affaires étrangères tandis ceux consacrés à la chaîne d’information internationale (France 24) ont été placés sous la responsabilité du Premier ministre.

Pour 2009, la rapporteure pour avis déplore que le ministère des affaires étrangères perde tout pouvoir sur le financement de l’audiovisuel extérieur.

Cet état de fait s’explique par la réforme de l’audiovisuel extérieur de la France décidée par le président de la République à la fin de l’année 2007 dont les grands axes seraient les suivants :

− la création d’une société holding « Audiovisuel Extérieur de la France », dirigée par M. Alain de Pouzilhac et Mme Christine Ockrent, « chapeautant » les sociétés France 24, RFI et TV5 Monde ;

− une clarification des missions et des objectifs assignés à l’audiovisuel extérieur ;

− une offre éditoriale renouvelée et adaptée à la révolution numérique : France 24 se doit d’offrir un point de vue français sur l’actualité du monde, RFI doit assurer une mission d’information relative à l’actualité française et internationale et TV5 Monde doit se concentrer sur une mission de rayonnement du patrimoine audiovisuel francophone.

Dans le cadre de cette réforme, les crédits visant à financer les sociétés de l’audiovisuel extérieur de la France (France 24, TV5 Monde, RFI et la société holding récemment créée) ne font plus l’objet d’une répartition par sociétés. Le montant total des crédits, qui s’élève à 298,36 millions d’euros TTC, dont 233,1 millions d’euros issus du budget général (programme 115 « Audiovisuel extérieur de la France ») et 65,3 millions d’euros TTC issus du compte de la redevance (programme 844 « Contribution au financement d’Audiovisuel extérieur de la France »), est ainsi versé à la holding qui les répartit et les verse aux différentes entreprises concernées.

En 2009, le ministère des affaires étrangères ne participera donc plus au financement de l’audiovisuel extérieur.

 

LFI 2008

PLF 2009

Programme 185 :

« Rayonnement culturel et scientifique »

Titre 2 Dépenses de personnel

Autres titres

Total

Titre 2 Dépenses de personnel

Autres titres

Total

Action 1 : Animation du réseau

41 628

30 308

71 936

36 359

29 725

66 084

Action 2 : Langue et culture française, diversité linguistique et culturelle

37 169

33 538

70 707

37 485

23 131

60 616

Action 4 : Renforcement des échanges scientifiques, techniques et culturels

13 731

41 730

55 461

13 914

38 943

52 857

Action 5 : Service public d’enseignement à l’étranger

 

287 874

287 874

 

415 000

415 000

Total général Programme 185

(montant arrondi)

485 979

 

485 979

594 558

 

594 558

Source : ministère des affaires étrangères

Les crédits du programme progressent fortement en 2009 par rapport à 2008 passant de 485,9 millions d’euros à 594, 5 millions (soit une progression de 22,3 %) mais cette augmentation surprenante s’explique par une modification des règles juridiques applicables aux rémunérations des professeurs détachés auprès de l’AEFE. La subvention pour charge de service public à l’AEFE (qui n’inclut pas les bourses scolaires) s’établira à 415 millions d’euros en 2009 (288 millions en loi de finances pour 2008), du fait de l’obligation faite à l’Agence à compter du 1er janvier 2009 de payer la part patronale des charges de pensions des personnels qui lui sont détachés.

Les crédits de coopération culturelle représentent 91,8 millions d’euros, dont 7,285 millions pour le financement des deux opérateurs, CulturesFrance et CampusFrance, chargés du rayonnement de la France à l’étranger.

Quant aux dépenses de personnel elles devraient passer de 92,5 millions d’euros en 2008 à 87,8 millions d’euros en 2009 soit une diminution de 5,1 %, cette contraction des frais de personnel devant se poursuivre en 2010 et 2011 pour atteindre 86,3 millions d’euros en 2011 soit une réduction de 6,7 % sur la période 2008-2011.

Selon les normes fixées par la loi organique relative aux lois de finances, les crédits ouverts sur le titre 2 des dépenses de personnel sont assortis de plafonds d’autorisation d’emplois rémunérés par l’État.

Plafond des emplois autorisés dans la loi de finances initiale 2008

Programme

G 1 *

G 2 *

G 3 *

G 4 *

G 5 *

Total

185

Rayonnement culturel et scientifique

151

95

794

0

240

1 280

Total des emplois par le ministère

3 296

3002

3 368

746

5 660

16 072

 

Plafond des emplois autorisés dans la loi de finances initiale 2009

Programme

G 1 *

G 2 *

G 3 *

G 4 *

G 5 *

Total

185

Rayonnement culturel et scientifique

132

92

774

0

237

1 235

Total des emplois par le ministère

3 255

2 946

3 421

742

5 502

15 866

* G 1 : titulaires et contrats à durée indéterminée (CDI) de l’administration centrale - G 2 : titulaires et CDI à l’étranger - G 3 : contractuels contrats à durée déterminée (CDD) et VI - G 4 : militaires hors budget - G 5 : recruté locaux

L’information essentielle à retenir pour le programme « Rayonnement culturel et scientifique » est la suppression de 45 emplois équivalent temps plein (ETP) lié à une diminution des emplois contractuels (sur l’exercice budgétaire précédent le programme avait déjà perdu 60 postes). La rapporteure pour avis tient à faire part de son inquiétude face aux réductions de postes successives qui ont été imposées au ministère des affaires étrangères et européennes. Elle voudrait ici citer un extrait du livre Blanc sur « La politique étrangère et européenne de la France 2008-2020 » qui souligne les dangers de poursuivre une politique toujours plus drastique de réduction d’effectifs :

« Elle n’en estime pas moins nécessaire de faire-valoir que le MAEE a d’ores et déjà fourni une contribution importante aux efforts accomplis ces dernières années, avec une réduction de ses effectifs de 11 % entre 1997 et 2007 et, ce qui est peut-être plus grave, une réduction en termes réels de ses moyens de fonctionnement et d’investissement de 21 % entre 2000 et 2008. Avec la nécessité d’un réseau dense, la montée des contributions aux organisations internationales, qui sont deux conditions de la présence de la France dans le monde, ses moyens d’action et d’intervention reculent continûment. On ne peut réduire indéfiniment ces effectifs et ces moyens sans remettre en cause les ambitions européennes et internationales assignées à notre action extérieure. »

La rapporteure pour avis déplore que les moyens accordés pour la promotion de la culture française et en faveur de la diversité culturelle et linguistique ne soient pas à la hauteur des ambitions affichées. Elle constate avec regret que les ambitions assignées par le Gouvernement au programme relatif au rayonnement culturel et scientifique sont en contradiction avec les moyens alloués pour traduire concrètement ces objectifs par des actions de terrain.

Quelques exemples permettent de mesurer l’ampleur de ce décalage. L’attention de la rapporteure pour avis a tout d’abord été attirée sur la situation délicate de l’AEFE même si elle figure parmi les priorités de la politique de rayonnement culturel de la France.

 Les difficultés financières de l’Agence pour l’enseignement du français à l'étranger (AEFE)

Dans sa lettre de mission, le ministre des affaires étrangères et européennes s’est vu assigner par le Président de la République l’objectif de présenter un plan de développement de l’enseignement du français à l’étranger. Dans ce cadre, une commission sur l’avenir de l’enseignement français à l’étranger a été chargée de définir des orientations susceptibles d’assurer la pérennité et la qualité de ce réseau. Cette commission, composée des différents acteurs impliqués dans l’enseignement français à l’étranger et présidée par un diplomate M. Yves Aubin de la Messuzière, a remis son rapport au ministre des Affaires étrangères et européennes le 7 juillet 2008. Les résultats de cette consultation ne sont pas encore connus mais il semble difficile que l’AEFE puisse assumer de nouvelles missions alors qu’elle rencontre des difficultés pour faire face financièrement à ses prérogatives actuelles.

Il convient de rappeler qu’en 2006, les crédits publics affectés à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger ont été diminués de 2 millions d’euros alors que dans le même temps l’AEFE a vu ses compétences élargies puisqu’elle est maintenant responsable de la maintenance de son parc immobilier. Aucune dotation n’ayant été prévue à ce titre, elle a dû prélever les crédits nécessaires sur son fonds de roulement.

Cette situation s’est reproduite en 2008 fragilisant la situation financière de l’agence qui a dû à nouveau ponctionner sur ses réserves financières.

Le fonds de roulement comptable est passé de 56,77 millions au 31 décembre 2006 à 15,4 millions au début de l’année 2008 ce qui équivaut à 12 jours de fonctionnement.

Il n’est pas certain que les moyens alloués pour 2009 suffisent à assainir la situation. L’augmentation de 123,7 millions d’euros au titre du programme Rayonnement culturel et scientifique permettra de couvrir une dépense de 120 millions d’euros pour la couverture des cotisations patronales de pensions civiles du personnel détaché de l’Éducation nationale, le complément soit 3,7 millions d’euros devant servir à couvrir l’augmentation de la masse salariale et à financer le déficit de fonctionnement constaté en 2008.

En conclusion, la situation du réseau d’établissements sous la responsabilité de l’AEFE n’est pas aussi bonne que veut bien le laisser croire le ministère des affaires étrangères.

 La rationalisation du réseau des établissements culturels

La situation des établissements culturels ne porte pas non plus à l’optimisme sur le dynamisme de la présence française à l’étranger.

Comme le souligne M. Adrien Gouteyron dans son rapport d’information présenté au Sénat, sur « l’action culturelle de la France à l’étranger », la diplomatie culturelle est en crise. Crise de sens et d’identité, issue d’une confusion entre une culture au service de la diplomatie, dans la constitution d’une sorte de « club » informel des amis de la France, et une diplomatie au service de la culture, dans une démarche de soutien des artistes à l’international. Elle souffre d’une absence de stratégie.

Ce projet de budget ne semble pas avoir pris toute la mesure des décisions annoncées lors du conseil de modernisation des politiques publiques du 4 avril 2008. Il a en effet été annoncé que la France, sans renoncer à l’universalité de son réseau à l’étranger, devait le moduler pour s’adapter aux perspectives géostratégiques. Il est ainsi prévu de transformer une trentaine d’ambassades en « poste de présence diplomatique » à format allégé ; de revoir l’importance des moyens attribués aux ambassades les mieux dotées et de renforcer l’échelon de pilotage régional pour mutualiser certaines fonctions (un seul poste de conseiller social par exemple pour une zone géographique).

Le réseau culturel devra aussi être réorganisé en affirmant tout d’abord le rôle prééminent accordé à trois agences qui exerceront la diplomatie d’influence à l’étranger, le Quai d’Orsay se recentrant sur la fonction de pilotage stratégique en laissant une large autonomie de gestions à ces agences.

Cette diplomatie publique d’influence à l’étranger sera assumée par l’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger (AEFE), CulturesFrance, transformée en agence de service public chargée de la coopération et des partenariats culturels, et la création d’un nouvel opérateur chargé de la mobilité internationale regroupant les fonctions de promotion, de l’assistance technique, de l’expertise internationale françaises à l’étranger et de valorisation à l’étranger du système d’enseignement supérieur français, actuellement assurées par plusieurs intervenants (les attributions actuelles de CampusFrance seraient ainsi élargies).

Sur le terrain, le réseau culturel sera aussi rationalisé en fusionnant des services de coopération et des centres culturels au sein d’un seul établissement, doté de la plus large autonomie administrative, budgétaire et financière. L’objectif recherché en créant ces futurs « EspacesFrance », est de faciliter leur autofinancement et d’inciter au développement de partenariats public-privé.

Sous couvert de rationaliser le réseau culturel, 19 centres culturels ont été fermés de 2000 à 2006 et ce mouvement va se renforcer. La situation des centres et instituts culturels dans l’Europe des 15 fait l’objet d’une série d’interrogations récurrentes depuis plusieurs années. La fluidité des échanges culturels à l’intérieur de notre continent, la diffusion de l’information par Internet, la mobilité accrue des artistes, des étudiants et des chercheurs, ont en effet paru remettre en cause le modèle traditionnel du centre culturel. Dans le même temps, la carte de nos établissements s’est sensiblement rétractée dans cette région, ramenant leur nombre à 31, voire 28 avec la fermeture programmée de Turin, Rostock et Edimbourg, à un niveau comparable à celui des réseaux culturels allemand ou italien.

L’objectif affiché du ministère des affaires étrangères est par ailleurs d’obtenir un taux d’autofinancement des établissements de 62,5 % d’ici 2011 contre 55 % actuellement.

L’administration centrale du ministère considère que, compte tenu du contexte budgétaire très restreint, les SCAC doivent avant tout rechercher des cofinancements auprès de partenaires publics et privés. Des cofinancements innovants devraient être envisagés, à l’instar de ceux mis en œuvre par d’autres pays. Ainsi, le mécanisme des fondations associant des partenaires privés à l'action publique pourrait permettre d’éviter de nouvelles fermetures d’établissements et de remobiliser un encadrement parfois plus concentré sur la survie financière des établissements que sur le rayonnement culturel.

 Les bourses accordées aux étudiants étrangers

La rapporteure pour avis tient aussi à appeler l’attention sur la situation des bourses accordées aux étudiants étrangers. Alors que le Gouvernement affiche l’ambition de renforcer l’attractivité universitaire de la France force est de constater que les efforts financiers déployés sont très en deçà des ambitions affichées. Le nombre de boursiers s’est élevé à 18 393 en 2007 alors que 22 437 étudiants avaient reçu une bourse en 2002. Les crédits globaux atteignent 91 millions d’euros mais seulement 17,4 millions sur le programme « Rayonnement culturel et scientifique ».

La situation est d’autant plus préoccupante que Campusfrance, agence qui devait travailler à renforcer la mobilité universitaire n’a toujours pas de statut juridique définitif. Elle ne dispose pas non plus d’antennes régionales dans les universités pour faciliter l’accueil des étudiants étrangers. Il est aussi paradoxal de constater que CampusFrance qui devrait à terme regrouper l’activité de France Coopération internationale en plus d’Egide et des CROUS se voit attribuer des moyens publics en diminution en 2009 (subventions du MAEE et du ministère chargé de l’enseignement supérieur atteignant 3,1 millions d’euros en 2009 contre 3,3 millions en 2008).

La situation du deuxième opérateur CulturesFrance n’est pas beaucoup plus satisfaisante. Lui aussi n’a toujours pas vu sa situation juridique clarifiée, son statut d’association ayant été critiqué à plusieurs reprises par la Cour des comptes. Quant à sa situation financière si elle peut paraître meilleure que celle de CampusFrance, ses subventions ministérielles (MAEE et ministère de la Culture) passant de 15,9 millions d’euros à 18,6 millions de 2008 à 2009, il faut garder à l’esprit qu’il s’agit d’une extension de compétences. Son périmètre d’action doit en effet être renforcé : il devrait reprendre des activités aujourd’hui assurées par la direction de l’Audiovisuel extérieur du MAEE dans le domaine du film documentaire. C’est pourquoi de nouveaux moyens lui sont dédiés pour 2009, CulturesFrance devant être bénéficiaire d’un transfert de 4 ETP et de crédits supplémentaires de 2,9 millions d’euros.

II.- LES RELATIONS FRANCO-ROUMAINES À TRAVERS LA COOPÉRATION CULTURELLE

Les liens privilégiés entre la France et la Roumanie sont anciens et ont permis de créer entre les deux nations un véritable climat de confiance.

Quelques repères historiques permettent de mesurer l’ancienneté de ces liens.

Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les relations franco-roumaines se sont intensifiées, principalement grâce aux nombreux commerçants et intellectuels français qui ont voyagé dans les Principautés roumaines. Par ailleurs, à partir du XVIIIe siècle, le français a été intensément utilisé dans les Principautés roumaines.

À partir de 1830 environ, et dans une large mesure durant la première moitié du XXe siècle, la classe politique ainsi que les intellectuels ont été largement francophones et francophiles.

Au XIXe siècle, la majorité des étudiants roumains font leurs études à Paris, adoptant ainsi des idées modernes de renouvellement politique et social. Dès le début du XIXe siècle, pendant les guerres russo-turques qui se déroulaient sur le territoire de la future Roumanie, l’aristocratie locale entre en contact, par le biais des Russes, avec la langue et la culture françaises.

Puis l’éveil de la conscience nationale roumaine se traduit notamment par deux poussées indépendantistes, vers 1820 puis vers 1848. C’est finalement avec l’appui de Napoléon III, qui intervient en ce sens lors du traité de Paris de 1856, que la Moldavie et la Valachie obtiennent la reconnaissance de leur union en un État unique, la Roumanie. Le nouvel État est officiellement reconnu en 1861 par les puissances européennes et les Ottomans, l’indépendance étant formellement proclamée le 10 mai 1877. De même, pendant la Première guerre mondiale, c’est un général français, Henri Berthelot, qui contribue de manière décisive à la reconstruction de l’armée roumaine.

Ce compagnonnage franco-roumain se poursuit au siècle suivant : ainsi, la constitution roumaine de 1923 est largement inspirée du modèle français de la IIIRépublique.