N° 1106 - Avis de Mme Ségolène Neuville sur le projet de loi autorisant la ratification de l'accord cadre entre la République française et le Royaume d'Espagne sur la coopération sanitaire transfrontalière (n°578)



N° 1106

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 juin 2013.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI autorisant la ratification de l’accord-cadre entre la République française et le Royaume d’Espagne sur la coopération sanitaire transfrontalière,

PAR Mme Ségolène NEUVILLE,

Députée.

——

Voir le numéro :

Assemblée nationale : 578.

I.- LES ACCORDS DE COOPÉRATION SANITAIRE TRANSFRONTALIÈRE ENTRE LA FRANCE ET SES VOISINS 9

A. LA COOPÉRATION SANITAIRE TRANSFRONTALIÈRE 9

1. Définition et illustration dans le domaine de la santé 9

2. Principe et contenu des accords de coopération sanitaire signés par la France avec l’Allemagne et la Belgique 10

a) L’accord franco-allemand 11

b) L’accord franco-belge 12

B. L’ACCORD CADRE ET L’ACCORD D’APPLICATION SUR LA COOPÉRATION SANITAIRE TRANSFRONTALIÈRE ENTRE LA FRANCE ET L’ESPAGNE 14

1. La coopération sanitaire entre la France et l’Espagne 14

2. Les dispositions des accords signés en 2008 15

a) Champ d’application 15

b) Cadre légal pour la conclusion de conventions locales de coopération sanitaire 16

c) Conditions d’interventions des établissements et personnels de santé dans un cadre transfrontalier 17

d) Prise en charge des soins dispensés dans l’un ou l’autre État 18

e) Entrée en vigueur 19

II.- LA COOPÉRATION SANITAIRE TRANSFRONTALIÈRE EN CERDAGNE 21

A. L’ENJEU DE L’ACCÈS AUX SOINS SUR LE TERRITOIRE CERDAN 21

1. Caractéristiques du plateau cerdan 21

2. Caractéristiques de l’offre sanitaire locale 23

3. Genèse d’un projet de santé commun 24

a) D’une coopération limitée avec la Fondation Hôpital de Puigcerdá… 24

b) … à la création d’un hôpital transfrontalier 25

B. LA CRÉATION D’UN RÉSEAU DE SOINS AUTOUR DU GROUPEMENT EUROPÉEN DE COOPÉRATION TERRITORIALE HÔPITAL DE CERDAGNE 28

1. La convention constitutive et les statuts du groupement 28

a) Le droit applicable 29

b) Les missions 30

c) La gouvernance 31

d) Les financements 34

2. La constitution d’un réseau de soins transfrontalier 35

C. L’HÔPITAL DE CERDAGNE, UN PROJET À LA CROISÉE DES CHEMINS 40

1. Des points de blocage demeurent… 41

a) Le contenu et les modalités des prestations de services assurées par les partenaires du Groupement Hôpital de Cerdagne 42

b) Le cadre juridique des mises à disposition de personnel 44

c) L’uniformisation des pratiques médicales 46

d) Les questions liées aux naissances et aux décès 47

2. … qui pourraient nécessiter une remise à plat de la gouvernance du Groupement Hôpital de Cerdagne 49

TRAVAUX DE LA COMMISSION 53

ANNEXE 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 61

ANNEXE 2 : HISTORIQUE DU PROJET D’HÔPITAL TRANSFRONTALIER 63

ANNEXE 3 : ORGANIGRAMME GROUPEMENT EUROPÉEN DE COOPÉRATION TERRITORIALE - HÔPITAL DE GERDAGNE 65

« La possibilité pour tous d’avoir un accès à des soins de qualité près de chez lui constitue un droit. »

Pierre Mauroy, ancien premier ministre, ancien président de la mission opérationnelle transfrontalière (1)

La question de l’accès aux soins et de l’organisation de l’offre de soins de proximité revêt une acuité particulière dans les bassins de vie transfrontaliers au sein de l’Union européenne. Bien que les personnes et les biens y circulent librement et que les échanges, en raison de conditions géographiques ou historiques, soient parfois plus fructueux de part et d’autre de la frontière qu’avec d’autres territoires au sein d’un même pays, l’organisation différente des systèmes de santé et de prise en charge des soins par l’assurance maladie constituent souvent des obstacles concrets à une optimisation des services offerts à la population.

Pour dépasser ces obstacles et faire des territoires frontaliers des « espaces-traits d’union », des « laboratoires d’expérimentation ‘grandeur réelle’ de la construction européenne » (2), des instruments juridiques existent.

Un accord a ainsi été signé en 2008 entre la France et l’Espagne afin de favoriser le développement de coopérations entre acteurs de santé français et espagnols dans les zones frontalières. Cet accord, qui reprend les dispositions d’accords antérieurs signés par la France avec l’Allemagne (3) ou la Belgique (4), a pour objet de faciliter la conclusion de conventions de coopération permettant aux professionnels de santé d’exercer de part et d’autre de la frontière et autorisant la prise en charge des patients quel que soit le lieu des soins.

Des conventions de coopération sanitaire, mises en place dans les Pyrénées antérieurement à la signature de cet accord, permettent déjà à des établissements de santé français et espagnols de renforcer leur connaissance mutuelle de l’état de santé de la population, de mutualiser leurs actions de formation, de confier la réalisation de certains actes (accouchements par exemple) à une structure en particulier située dans l’un ou l’autre des pays ou d’utiliser en commun certains équipements lourds.

C’est en Cerdagne, région frontalière du Languedoc-Roussillon et de la Catalogne, que l’on trouve la manifestation la plus aboutie de coopération sanitaire transfrontalière avec le développement d’un ambitieux projet de mise en réseau des équipements sanitaires des deux côtés de la frontière, articulé autour d’un hôpital transfrontalier situé à Puigcerdá, en Espagne. La création de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne, dont l’origine est elle aussi antérieure à la signature de l’accord de 2008 mais dont la mise en œuvre a connu une accélération concomitante, constitue une première au niveau européen.

Ce projet suscite donc de très nombreuses attentes, à la fois dans la population locale et chez les élus, mais également de la part des autorités sanitaires françaises et catalanes ainsi que de l’Union européenne, qui a financé le projet.

Ne nous y trompons pas, ce qui est à l’œuvre en Cerdagne ne concerne pas seulement l’amélioration de l’accès aux soins sur un territoire enclavé, bien que cela constitue néanmoins un objectif primordial. Ce projet joue en effet le rôle de laboratoire de la coopération transfrontalière pour toute l’Europe : une sorte de test grandeur nature des solutions, en matière d’offre de soins, que nous pourrions imaginer proposer à tous les citoyens européens vivant dans des zones frontalières.

Les régions frontalières représentent 20 % du territoire français, elles s’étendent sur 16 régions et 28 départements ; 10 millions de Français vivent à proximité d’un pays voisin (5). Or, les opportunités en termes de mutualisation des équipements sanitaires et d’optimisation de l’accès aux services de santé que recèlent les territoires transfrontaliers demeurent insuffisamment exploitées. De nombreux facteurs l’expliquent, au premier rang desquels la complexité à faire coïncider des modèles différents. Cela rend d’autant plus impératif un engagement fort des pouvoirs publics en faveur des projets de coopération transfrontalière, engagement qui semble jusqu’ici avoir globalement fait défaut, ainsi que le soulignait en juin 2010 une mission parlementaire sur la politique transfrontalière. Celle-ci pointait alors « l’absence de pilotage politique des zones frontalières » : « la France n’a pas pris la pleine mesure des atouts que constituent ces parties très spécifiques du territoire, qui restent trop souvent aux marges des préoccupations nationales » (6).

Comme en témoigne le délai qui sépare encore la première déclaration d’intention signée par la France et l’Espagne le 17 octobre 2005 de l’ouverture, que l’on espère néanmoins prochaine, de l’hôpital de Cerdagne, mener à bien de tels projets, nécessitant de concilier des visions et des organisations issues de systèmes de santé et de protection sociale différents, requiert beaucoup de temps, d’investissement et de diplomatie.

Aujourd’hui, l’objectif n’est pas encore atteint, de nombreuses questions continuent de se poser, que ce soit en termes organisationnels, juridiques, culturels ou linguistiques, et d’importants défis restent à relever pour assurer la pleine réussite de cet hôpital et faire en sorte qu’il accueille réellement en son sein personnel et patients venus des deux côtés de la frontière, conformément à l’ambition initiale qui lui a été assignée. Un soutien politique sans faille et une ligne de négociation claire avec nos partenaires catalans sont plus que jamais nécessaires pour atteindre cet objectif.

En se saisissant pour avis sur le projet de loi autorisant la ratification de l’accord franco-espagnol de 2008, la commission des affaires sociales a souhaité à la fois se pencher sur les ressorts de la coopération sanitaire transfrontalière, qui concerne potentiellement de nombreux territoires en France, et mettre en lumière un projet pionnier dans ce domaine à l’échelle européenne. Le présent rapport s’attache donc à décrire les principes directeurs énoncés dans l’accord de 2008 puis à analyser les conditions de mise en œuvre de la coopération sanitaire sur le plateau cerdan, en particulier au travers du projet d’hôpital transfrontalier.

I.- LES ACCORDS DE COOPÉRATION SANITAIRE TRANSFRONTALIÈRE ENTRE LA FRANCE ET SES VOISINS

A. LA COOPÉRATION SANITAIRE TRANSFRONTALIÈRE

1. Définition et illustration dans le domaine de la santé

La coopération transfrontalière, qui vise essentiellement à mettre en commun des moyens ou des solutions pour répondre à des besoins identiques exprimés des deux côtés d’une frontière, existait de manière informelle entre collectivités territoriales bien avant qu’un cadre juridique ne soit formalisé sous l’égide du Conseil de l’Europe avec la Convention de Madrid (1980). Bien qu’elle constitue souvent une réponse appropriée, en particulier sur des territoires partageant une même langue, une même culture ou soumis à des contraintes géographiques de même nature, la coopération transfrontalière reste une démarche complexe qui se heurte, notamment, à la variété des systèmes administratifs nationaux et des répartitions de compétences entre collectivités.

En matière de santé, la coopération sanitaire transfrontalière a pu prendre plusieurs formes. La mission opérationnelle transfrontalière (MOT) répertoriait ainsi en 2002 trois grands domaines de coopération : la prévention, les soins et la formation (7). Si la prévention est l’une des plus anciennes préoccupations aux frontières, ces dernières restant dans les esprits comme « le point d’arrivée des épidémies, un lieu qu’il faut contrôler », peu de projets se développent aujourd’hui dans ce secteur. D’après la MOT, les soins représentent en revanche désormais l’essentiel des actions de coopération sanitaire transfrontalière, avec pour objectif l’amélioration concrète de la prise en charge médicale de la population frontalière. Ces coopérations s’illustrent notamment dans le domaine :

– des urgences. Les territoires de montagne sont concernés de longue date par cet aspect de la coopération transfrontalière. Ainsi, les centres hospitaliers de la région d’Annecy, de la région autonome du Val d’Aoste et du canton du Valais coopèrent depuis longtemps dans le cadre d’un réseau d’alerte de secours en montagne ; les hôpitaux du Mont-Blanc, la caisse primaire d’assurance maladie locale et l’hôpital universitaire de Genève ont également passé un accord pour la prise en charge des patients polytraumatisés en urgence vitale. Mais la prise en charge des urgences dépasse désormais le strict cadre montagnard comme en témoigne la coopération entre équipes des services mobiles d’urgence et de réanimation (SMUR) belges et françaises qui peuvent être amenées à intervenir indifféremment sur la frontière entre le Nord-Pas-de-Calais et la Belgique en cas d’indisponibilité des équipes SMUR nationales ou l’intervention du SMUR du centre hospitalier de Wissembourg en Allemagne (8) ;

– et des consultations, via la mise à disposition de personnels et/ou de technologie. La MOT cite ainsi l’exemple de la mise à disposition des médecins radiologues belges dans les hôpitaux français dans le cadre d’une coopération entre le centre hospitalier du pays d’Avesnes (Nord), le centre hospitalier d’Hirson (Aisne) et le centre hospitalier de Chimay (Belgique).

On assiste également à des formes de coopération plus poussées, consistant en de véritables mises en réseau d’établissements, comme c’est le cas sur les versants français et italien de la riviera méditerranéenne. Le centre hospitalier La Palmosa de Menton et l’Agence sanitaire locale n° 1 d’Imperia (Italie) ont ainsi initié une démarche de coopération transfrontalière prévoyant la création d’une « communauté de santé transfrontalière » s’étendant sur tout l’est du département des Alpes-Maritimes en France et le Ligure di Ponente en Italie, bassin de vie regroupant plus de 180 000 habitants. La convention de coopération, signée le 18 février 2002, a permis un accès mutuel à certains services comme ceux de dialyse et d’imagerie médicale, mais a également abouti à la construction d’un centre de périnatalité transfrontalier (9) à Menton, ouvert le 29 septembre 2003, et à la création d’un institut de formation en soins infirmiers transfrontalier inauguré le 7 décembre 2012.

On notera à cet égard que, d’après la MOT, la formation constitue un autre secteur privilégié de la coopération sanitaire transfrontalière, qu’il s’agisse de formation initiale, de formation continue, de formation en langues ou de séminaires transfrontaliers.

2. Principe et contenu des accords de coopération sanitaire signés par la France avec l’Allemagne et la Belgique

Les accords-cadres et leurs accords d’application signés entre la France et l’Allemagne, la Belgique ou l’Espagne entre 2005 et 2008 contiennent des dispositions similaires qui poursuivent principalement trois objectifs :

– faciliter la coopération entre acteurs locaux dans les zones frontalières concernées en leur donnant capacité à conclure et mettre en œuvre directement des conventions locales de coopération ;

– favoriser l’accès aux soins transfrontaliers en permettant, par le biais de conventions locales entre organismes de sécurité sociale et établissements de santé, d’autoriser le remboursement des soins prodigués dans les zones frontalières sans autorisation préalable et de définir des modalités tarifaires ad-hoc ;

– renvoyer aux conventions locales le soin d’organiser l’intervention des professionnels de santé en-dehors de leurs établissements dans le cadre d’opérations transfrontalières, tout en imposant la souscription d’une assurance responsabilité civile par ces professionnels et leurs établissements dans le cadre des actions de coopération.

a) L’accord franco-allemand

L’accord-cadre signé entre la France et l’Allemagne à Weil am Rhein le 22 juillet 2005 (10) et l’arrangement administratif pris pour son application le 9 mars 2006 sont respectivement entrés en vigueur le 1er avril 2007 et le 1er mai 2007, permettant la signature de conventions de coopération sanitaire locales entre, d’un côté, l’agence régionale de l’hospitalisation, la direction régionale ou départementale des affaires sanitaires et sociales (11) et l’Union régionale des caisses d’assurance maladie, pour la France, et, de l’autre, les organismes assureurs et dispensateurs de soins correspondants pour l’Allemagne.

Le champ géographique de l’accord couvre, en France, les régions d’Alsace et de Lorraine, et, en Allemagne, les länder de Bade-Wurtemberg, de Rhénanie-Palatinat et de Sarre.

Si de nombreuses conventions locales de coopération préexistaient à cet accord (12), signalons quatre conventions conclues depuis dans le cadre de celui-ci :

– deux conventions sur l’aide médicale urgente signées le 10 février 2009, respectivement, avec le Bade-Wurtemberg et la Rhénanie-Palatinat. D’après les informations figurant sur le site internet de l’agence régionale de santé d’Alsace, ces conventions sont identiques sur le fond. Leur objectif est de formaliser et d’unifier les procédures de régulation entre les centres d’intervention français et allemands ainsi qu’à sécuriser les conditions d’intervention d’urgence dans la prise en charge pré-hospitalière. Concrètement, ces conventions permettent aux équipes de secours de la région voisine d’être appelées lorsque leur intervention permet un gain de temps rendu nécessaire par l’état médical de la victime, soit parce qu’elles se trouvent plus proches du lieu d’intervention, soit parce que leurs moyens de secours sont plus disponibles, ou plus appropriés. Ces équipes peuvent également être sollicitées en renfort lorsque les moyens déployés s’avèrent insuffisants. Le déclenchement des moyens se fait toujours par le centre de régulation des appels, le SAMU centre 15, côté français, et la direction des secours (Rettungsleitstelle, centre 144) côté allemand. En mission, les véhicules de secours français ou allemands sont habilités à intervenir de l’autre côté de la frontière ; faisant usage de leurs signaux optiques et sonores, ils sont considérés comme prioritaires. Lorsqu’ils interviennent dans le pays voisin pour une prise en charge pré-hospitalière d’un blessé ou d’un malade, les services de secours d’urgence ne sont en revanche autorisés à exercer que les actes pour lesquels ils sont habilités dans leur propre pays, le droit applicable en matière de responsabilité restant celui déterminé par leur droit national respectif ;

– une convention de coopération transfrontalière pour les grands brûlés entre l’agence régionale de l’hospitalisation d’Alsace, les organismes d’assurance maladie français et le centre des grands brûlés de la clinique de traumatologie de Ludwigshafen en Rhénanie-Palatinat (13). Cette convention vise à pallier un déficit d’offre de soins côté français dans la mesure où il n’y a pas de centre de grands brûlés en Alsace (le plus proche est celui du centre hospitalier régional de Metz-Thionville, avant celui de Paris ou de Lyon). La convention règle la question des prises en charge, du transport, de la facturation et du remboursement des soins. Elle aborde également les modalités de retour du patient en France, en lien étroit avec le service de chirurgie plastique et réparatrice du centre hospitalier universitaire de Strasbourg ;

– une convention transfrontalière de tiers payant avec l’école Oberlin de l’Epilepsiezentrum de Kork. Signée le 21 décembre 2011 entre l’agence régionale de santé d’Alsace, la caisse primaire d’assurance maladie du Bas-Rhin et le conseil d’administration de l’école Oberlin, cette convention permet aux parents français de ne plus faire l’avance des frais, qu’ils soient de transport, de scolarité ou de repas, lorsque leur enfant est pris en charge à l’école Oberlin de Kork. Comparable à un institut médico-éducatif (IME) de 150 élèves, l’école Oberlin est l’un des plus grands centres allemands spécialisés dans le traitement de l’épilepsie.

b) L’accord franco-belge

L’accord-cadre signé entre la France et la Belgique à Mouscron le 30 septembre 2005 (14) et l’arrangement administratif signé le même jour, s’inscrivent dans la continuité de l’accord franco-allemand précité et comprennent des dispositions identiques.

Cet accord cadre s’applique dans le périmètre de quatre régions françaises : Champagne-Ardenne, Lorraine, Nord-Pas-de-Calais et Picardie. Il concerne treize arrondissements belges situés de la mer du Nord à la frontière luxembourgeoise (Veurne, Ieper, Kortrijk, Mouscron, Tournai, Ath, Mons, Thuin, Philippeville, Dinant, Neufchâteau, Virton et Arlon).

Comme le souligne le rapport du Sénat sur le projet de loi autorisant l’approbation de cet accord cadre (15), là aussi les acteurs locaux du domaine sanitaire n’ont pas attendu l’accord pour engager des coopérations concrètes dans un cadre transfrontalier, la frontière franco-belge concentrant même le plus grand nombre d’actions et de projets transfrontaliers en matière de santé. Ces coopérations se sont notamment traduites par la création d’un observatoire franco-belge de la santé (OFBS) constitué sous la forme d’un groupement européen d’intérêt économique et composé des principaux acteurs de l’assurance maladie et de l’offre de soins des deux côtés de la frontière. Outre de nombreuses coopérations hospitalières ponctuelles en cours ou en projet entre différents établissements de santé (16), il convient de souligner le développement de « zones organisées d’accès aux soins transfrontaliers » destinée à garantir la continuité des soins et la libre circulation des patients en réglant la question de la prise en charge des frais de santé. Le dispositif expérimental Transcards, d’abord mis en œuvre dans la zone de la Thiérache (150 000 habitants répartis de part et d’autre de la frontière, à la limite de l’Aisne et du Nord), permet ainsi l’utilisation de la carte vitale et de son équivalent belge, la carte SIS, dans les structures hospitalières situées dans ce périmètre. Dans les années qui ont suivi la signature de l’accord cadre, près de six « zones organisées d’accès aux soins transfrontaliers » regroupant, au total, une quarantaine d’établissements de soins, ont été créées, réalisant un maillage quasi intégral du territoire frontalier et garantissant aux patients des deux versants l’accès à une offre de soins transfrontalière sans entrave administrative ni financière.

Enfin, comme pour l’Allemagne, la coopération transfrontalière avec la Belgique s’est traduite par la signature d’une convention de partenariat sur l’aide médicale d’urgence. Signée le 20 mars 2007, cette convention a permis d’officialiser la collaboration déjà existante entre les services d’urgence français et belges en autorisant l’intervention des services médicaux d’urgence et de réanimation (SMUR) français sur le sol belge et, inversement, des SMUR belges sur le sol français. Son champ territorial s’étend sur toute la frontière franco-belge.

Signalons néanmoins que, formellement, l’accord de coopération sanitaire franco-belge n’est entré en application que depuis le 1er mars 2011 suite à la publication le 18 février 2011 de la loi adoptée par le Parlement fédéral belge autorisant son approbation.

B. L’ACCORD CADRE ET L’ACCORD D’APPLICATION SUR LA COOPÉRATION SANITAIRE TRANSFRONTALIÈRE ENTRE LA FRANCE ET L’ESPAGNE

1. La coopération sanitaire entre la France et l’Espagne

Comme aux autres frontières, la coopération avec l’Espagne est ancienne. L’établissement d’une ligne de frontière sur les crêtes du massif pyrénéen lors de la signature du traité des Pyrénées sur la Bidassoa en 1659 n’a jamais tari le flux des échanges entre les deux pays, qui a par ailleurs connu un regain important avec l’adhésion de l’Espagne à la Communauté économique européenne en 1986 et le développement de programmes de coopération transfrontaliers financés par des fonds européens.

Dans le domaine de la santé, toutefois, les actions de coopération mises en œuvre apparaissent moins nombreuses et plus ponctuelles que dans d’autres domaines ou sur d’autres territoires, comme à la frontière franco-belge. Il est toutefois difficile d’en juger précisément dans la mesure où l’administration centrale a indiqué à votre rapporteure ne pas procéder au recensement des initiatives prises en la matière au plan local ; si on peut penser que ces informations sont néanmoins collectées par les agences régionales de santé, il serait sans doute utile de les étudier et de les partager à l’échelle nationale (17).

 Concernant tout d’abord l’Andorre, un accord bilatéral permet la prise en charge de patients andorrans au sein d’établissements de santé français et une convention de coopération a été conclue entre l’hôpital d’Andorre et le centre hospitalier du Val d’Ariège, en 2006.

 Plus à l’est, comme nous le verrons dans la seconde partie de ce rapport, la coopération transfrontalière s’est formalisée récemment avec la signature de deux conventions. Une première convention a été signée en 2002 entre le centre hospitalier de Perpignan et l’hôpital Fondation de Puigcerdá pour la mise en œuvre des services d’urgence (orientation des patients vers l’hôpital catalan) suivie d’une convention de tiers-payant conclue en 2003 par l’assurance maladie pour la prise en charge des urgences et des accouchements concernant les ressortissants français réalisés à la fondation Hôpital de Puigcerdá.

Parallèlement à la signature de ces accords, était lancée en janvier 2003 la première étude de faisabilité en vue de la création d’un hôpital transfrontalier, projet qui constitue une première en termes de coopération transfrontalière aujourd’hui sur le point d’aboutir (voir l’historique du projet en annexe).

Enfin, on signalera également l’acquisition en commun en 2003 d’un PET SCAN (18) par l’hôpital de Perpignan via la constitution d’un groupement européen d’intérêt économique (GEIE) entre le centre hospitalier de Perpignan, le centre libéral de médecine nucléaire de Béziers et le centre de médecine nucléaire de Barcelone (CETIR) (19).

 Enfin, à l’ouest de la chaîne pyrénéenne, il existe également des coopérations ponctuelles, plus ou moins formalisées (plan de secours en montagne autour du Somport, complémentarité des services médicaux d’urgence et de réanimation et organisation de l’aide médicale urgente au Pays basque), pour lesquels l’entrée en vigueur de l’accord signé entre la France et l’Espagne en 2008 permettraient vraisemblablement de concrétiser ou d’approfondir les liens déjà tissés.

Alors que cet accord a déjà été formellement approuvé par l’Espagne en mars 2009, la finalisation par la France de la procédure de ratification est donc attendue par les acteurs de terrain afin de préciser ou confirmer les coopérations en cours et lancer de nouveaux projets.

2. Les dispositions des accords signés en 2008

La France et l’Espagne ont paraphé le 27 juin 2008 à Saragosse un accord-cadre de coopération sanitaire transfrontalière suivi d’un accord d’application signé le 9 septembre 2008 à Angers. Comme les accords franco-allemand et franco-belge les ayant précédé, ces accords renvoient à des conventions locales le soin de définir des régimes de prise en charge des soins et de participation des établissements et des professionnels de santé à des actions de coopération sanitaire de nature à favoriser l’accès aux soins transfrontaliers pour la population.

a) Champ d’application

L’article 2 de l’accord cadre définit les zones dans lesquelles celui-ci a vocation à s’appliquer soit :

– en France, les zones frontalières des régions Aquitaine, Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon ;

– et en Espagne, les zones frontalières des communautés du Pays basque, de Navarre, d’Aragon et de Catalogne.

L’exposé des motifs du projet de loi souligne en effet à juste titre que, dans certaines zones frontalières, notamment en montagne, la géographie des lieux et le réseau routier rendent parfois plus accessibles les installations sanitaires de l’un des deux pays aux habitants de la zone concernée. La coopération permet ainsi d’améliorer ou de compléter l’offre de soins, mais également d’éviter une duplication non justifiée des moyens sur un bassin de population donné ou de mutualiser ces mêmes moyens, notamment afin de répondre à des besoins temporaires, liés par exemple aux pics de fréquentation constatés sur certains sites touristiques.

Toutes les personnes résidant habituellement ou séjournant temporairement dans ces zones et bénéficiant de prestations de santé et maternité au titre de l’une ou l’autre des législations des deux États entrent dans le champ de l’accord.

b) Cadre légal pour la conclusion de conventions locales de coopération sanitaire

L’article 3 de l’accord cadre renvoie à la conclusion de conventions locales de coopération transfrontalière le soin d’organiser la « coopération entre des structures et ressources sanitaires situées dans la zone frontalière, qui peuvent faire partie d’un réseau de soins ». On soulignera que sont expressément prévus « la création et le financement d’organismes de coopération, d’établissements de santé transfrontaliers ou de structures communes ».

L’article 1er de l’accord d’application précise les personnes et autorités susceptibles de conclure ces conventions locales. Il vise pour la France les directions régionales ou départementales des affaires sanitaires et sociales ainsi que les agences régionales de l’hospitalisation (ARH), auxquelles se substituent désormais les agences régionales de santé (ARS), et les unions régionales des caisses d’assurance maladie (URCAM) ; pour l’Espagne, compétence est donnée aux « consejerias » ou « departamentos » compétents en matière de santé de chacune des communautés comprises dans le champ d’application de l’accord cadre.

Rappelons qu’en l’état actuel de la réglementation française, les conventions entre l’assurance maladie et des établissements de santé d’un autre État membre de l’Union européenne prévoyant des conditions de séjour et de prise en charge spécifiques ne peuvent être conclues qu’après autorisation conjointe des ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé (article R. 332-3 du code de la sécurité sociale). L’accord cadre simplifie donc le circuit de validation de ces conventions en autorisant les acteurs de terrain à conclure et mettre en œuvre directement ces conventions (20).

Enfin, s’ils ne sont pas spécifiquement mentionnés dans l’accord, notons qu’en vertu de l’article L. 6134-1 du code de la santé publique, les établissements publics de santé disposent d’ores et déjà de la faculté de « participer à des actions de coopération » et notamment de signer des conventions, y compris à un niveau international, avec des personnes de droit public et privé. Les conditions d’intervention des établissements et des personnels de santé dans un cadre transfrontalier doivent cependant être précisées par les conventions locales de coopération (cf. infra).

c) Conditions d’interventions des établissements et personnels de santé dans un cadre transfrontalier

L’article 3 de l’accord cadre prévoit qu’il appartient aux conventions de coopération de définir les conditions et modalités d’intervention des structures de soins, des organismes de sécurité sociale et des professionnels de santé dans le cadre d’actions de coopération transfrontalière, et dresse la liste, non exhaustive, des précisions susceptibles d’y être apportées. Ces dispositions sont elles-mêmes complétées par l’article 2 de l’accord d’application qui précise les éléments devant figurer dans les conventions de coopération selon que celles-ci portent :

– sur l’intervention transfrontalière des professionnels de santé ;

– sur l’organisation des secours d’urgence et du transport sanitaire des patients ;

– sur la garantie d’une continuité des soins incluant en particulier l’accueil et l’information des patients ;

– sur les critères d’évaluation et de contrôle de la qualité et de la sécurité des soins.

S’agissant de l’intervention des professionnels de santé, deux points doivent être relevés :

– l’article 4 de l’accord cadre prévoit tout d’abord que les autorités compétentes doivent prendre toutes les mesures nécessaires en vue de faciliter le franchissement de la frontière commune (par exemple, reconnaissance des véhicules d’urgence de l’autre pays et octroi d’une priorité) ;

– l’article 6 fixe quant à lui le droit applicable en matière de responsabilité médicale, qui est celui de l’État sur le territoire duquel les soins ont été prodigués en application de la règle classique lex loci delicti. Le même article impose en outre aux professionnels de santé français ainsi qu’aux établissements et structures susceptibles d’intervenir en Espagne dans le cadre d’actions transfrontalières de souscrire une assurance responsabilité civile couvrant les éventuels dommages qui pourraient être causés à cette occasion. D’après les informations fournies à votre rapporteure, il semblerait que la réciproque n’ait pas été exigée des personnels et établissements de santé espagnols susceptibles d’intervenir en France dans la mesure où ceux-ci seraient automatiquement couverts par l’État espagnol, sans qu’ils aient besoin de souscrire, en sus, une assurance responsabilité civile.

d) Prise en charge des soins dispensés dans l’un ou l’autre État

Les conventions locales de coopération sanitaire transfrontalières entre organismes d’assurance maladie et/ou établissements de santé français et étrangers permettent aux assurés sociaux, qu’ils résident à titre permanent ou temporaire dans la zone transfrontalière concernée, d’être pris en charge par les établissements de santé de l’État partenaire sans avoir à requérir d’autorisation préalable de leur caisse d’affiliation et de se faire rembourser les frais médicaux exposés dans des conditions propres à chaque convention et de nature à favoriser l’accès aux soins transfrontaliers.

L’article 5 de l’accord cadre stipule ainsi que les conventions de coopération prévoient la coordination nécessaire entre institutions compétentes pour assurer l’envoi des patients vers le lieu de leurs soins et la prise en charge de la dépense occasionnée. Il précise également que lorsqu’une autorisation préalable est requise, la coordination nécessaire doit être prévue pour que celle-ci soit délivrée automatiquement et que la dépense occasionnée soit prise en charge.

Rappelons qu’en l’absence de conventions de coopération, la prise en charge des frais médicaux exposés par des assurés d’un régime français dans un autre État membre de l’Union européenne nécessite en principe la présentation d’un document attestant l’ouverture de leurs droits en France (21). La portée de cette exigence a toutefois était précisée par la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne :

– s’agissant de soins ambulatoires, les assurés d’un État membre peuvent se faire rembourser les frais exposés dans un autre État membre sur la base des tarifs nationaux, sans autorisation préalable de leur caisse d’affiliation ;

– s’agissant des soins hospitaliers, ces derniers restent néanmoins soumis à l’obtention d’une autorisation préalable.

En ce qui concerne les modalités tarifaires de remboursement, l’article 5 de l’accord cadre et l’article 4 de l’accord d’application renvoient au « droit communautaire ou aux modalités spécifiques définies dans les conventions de coopération ». Ces dispositions peu explicites signifient que le remboursement des dépenses de soins peut être envisagé selon trois modalités :

– sur la base des tarifs du lieu de soins, en application du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale ;

– sur la base des tarifs du lieu d’affiliation, en application de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne ;

– ou sur la base de tarifs négociés dans le cadre des conventions locales de coopération sanitaire.

e) Entrée en vigueur

Aux termes de l’article 9 de l’accord cadre, celui-ci entre en vigueur au premier jour du deuxième mois suivant la date de la notification par l’État ayant accompli en dernier les formalités internes requises pour l’approbation de l’accord : en clair, l’Espagne ayant déjà ratifié l’accord en 2009, celui-ci devrait entrer en vigueur dans les deux mois suivant la promulgation du présent projet de loi (22).

L’article 3 de l’accord cadre prévoit que les conventions déjà existantes doivent se conformer à ses dispositions et donc, si nécessaire, être modifiées « dès que possible et au plus tard un an après la date d’entrée en vigueur de l’accord cadre » sous peine de ne plus produire d’effets (article 3 de l’accord d’application). Signalons également qu’aux termes de l’article 10 de l’accord cadre, qui détermine les modalités de dénonciation de celui-ci, une telle dénonciation ne remet pas en cause les conventions de coopération déjà mises en place.

Enfin, l’article 7 de l’accord cadre confie à une commission mixte intergouvernementale le soin d’en suivre l’application et d’en proposer d’éventuelles modifications, ainsi, le cas échéant, que d’en trancher les difficultés d’interprétation. Cette commission est également chargée d’élaborer un rapport annuel sur la mise en œuvre du dispositif de coopération.

II.- LA COOPÉRATION SANITAIRE TRANSFRONTALIÈRE
EN CERDAGNE

A. L’ENJEU DE L’ACCÈS AUX SOINS SUR LE TERRITOIRE CERDAN

1. Caractéristiques du plateau cerdan

Situé aux confins des Pyrénées orientales et de la Catalogne, la Cerdagne est un territoire de 75 km de long environ, qui couvre une superficie d’un peu plus de 1 300 km² qui culmine à une altitude moyenne comprise entre 1 200 et 1 500 mètres (23). C’est un territoire faiblement peuplé, avec un peu moins de 33 000 habitants répartis à part quasi égale entre la France et l’Espagne (24), et particulièrement isolé. Desservi par un réseau routier de montagne, le plateau cerdan est relié, d’un côté, à Perpignan et, de l’autre, à Barcelone, villes qui se trouvent toutes deux à plus de 100 kilomètres de distance et deux heures de route. Les conditions climatiques difficiles en hiver rendent en outre cet accès routier parfois impraticable.

L’existence d’un accès ferroviaire depuis Perpignan, Barcelone et Toulouse ainsi que l’amélioration du réseau routier (25) a néanmoins contribué au développement du tourisme : on dénombre notamment onze stations de ski, neuf côté français (dont Font-Romeu qui compte 15 000 lits) et deux côté espagnol. Lors des pics de fréquentation en hiver et en été, la population peut ainsi atteindre 150 000 personnes.

Depuis sa partition entre la France et l’Espagne lors de la signature du traité des Pyrénées, le plateau cerdan est désormais divisé entre :

– Haute Cerdagne et Capcir, côté français, qui regroupent deux cantons (Mont-Louis et Saillagouse) au sein du département des Pyrénées Orientales et compte 36 communes ;

– et Basse Cerdagne, côté espagnol, qui s’étend sur les provinces de Lérida et de Gérone, au sein de la communauté autonome de Catalogne. Elle regroupe dix-sept communes ; parmi elles, la ville de Puigcerdá, capitale de la comarca de Cerdanya (26), est la plus importante municipalité, avec 8 800 habitants.

En dépit de cette séparation administrative, les habitants du plateau cerdan restent unis par une histoire, une langue et une culture communes. Aucune barrière physique ne sépare les communes de Bourg-Madame et de Puigcerdá. Le catalan est parlé des deux côtés de la frontière. L’isolement du territoire y a forgé une identité commune.

Le projet d’hôpital transfrontalier est le fruit de cette communauté de destin entre les deux versants, français et espagnol, du plateau cerdan. Son objectif : apporter une réponse globale en matière d’offre sanitaire, à la fois pour la population habitant à l’année sur le plateau et pour les résidents saisonniers, qui s’intègre dans un véritable réseau de soins commun.

Carte de la Cerdagne

Communes cerdanes de la province de Lleida (État espagnol).

Communes cerdanes de la province de Gérone (État espagnol).

Communes cerdanes de l’État français.

Communes traditionnellement rattachées à la Cerdagne, bien que faisant partie du Conflent.

Communes du Capcir (État français).

La Llagonne : commune traditionnellement rattachée au Capcir, bien que faisant partie du Conflent.

2. Caractéristiques de l’offre sanitaire locale

 La Cerdagne française bénéficie :

– d’un dispositif d’urgences (antenne du SMUR du centre hospitalier de Perpignan aux Escaldes),

– de la présence de médecins libéraux. Les médecins de ville sont aujourd’hui regroupés sur trois centres ou maisons de santé, et un pôle de consultations avancées offre des consultations spécialisées à la clinique Joseph Sauvy de Err ;

– de plusieurs établissements spécialisés dans le moyen séjour.

Le paysage sanitaire et médico-social du plateau cerdan est en effet l’héritier du développement à partir des années 1920 d’une offre sanitaire abondante (création de sanatoriums, de centres climatiques, etc.) liée aux bienfaits de son ensoleillement et de la sécheresse de l’air ambiant, qui se traduit encore aujourd’hui par un nombre important de centres de soins de suite et de rééducation ou de maisons d’enfants à caractère sanitaires spécialisées (MECSS) (27).

Le territoire ne dispose en revanche d’aucun service de chirurgie ni d’obstétrique (28). La première clinique chirurgicale se trouve à Prades (60 km, une heure de trajet) et les trois maternités du département sont à Perpignan. D’après les informations fournies par l’agence régionale de santé du Languedoc-Roussillon, plus de 85 % des séjours hospitaliers sont effectués à l’extérieur du territoire.

 Côté espagnol, la Fondation hôpital de Puigcerdá dispose de 30 lits de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) (29), d’un service d’urgences et d’un plateau technique (radiologie, scanner et laboratoire d’analyses médicales). Il s’agit d’un hôpital de petite taille et relativement vétuste qui sous-traite une partie de son activité à des prestataires extérieurs, notamment à la fondation Althaia et à l’hôpital de Manresa. Le nombre de séjours annuel est estimé à environ 1 900 (dont 120 concernent des patients français). Signalons également que la fondation Hôpital de Puigcerdá gère aussi un établissement médico-social, une résidence médicalisée pour personnes âgées d’une centaine de chambres (residencia).

Côté espagnol, la médecine de ville est structurée autour de « centres de soins primaires » (centro d’atencio primaria) où les médecins sont salariés : ces centres constituent un passage obligé avant une orientation vers une prise en charge hospitalière ou par un médecin spécialiste. On rappellera à cet égard que le système de santé catalan est inspiré du modèle beveridgien, séparant le financement de la fourniture des soins. Le principe est donc l’accès gratuit pour tous, et l’offre de soins est essentiellement publique (voir encadré ci-après).

Les villes proposant une offre de soins plus complète les plus proches sont situées à plus de 50 minutes de route : il s’agit de La Seu d’Urgell (58 km), de Berga (60 km) et de Manresa (100 km). 33 % des séjours hospitaliers des cerdans espagnols sont réalisés en dehors du territoire, dont une écrasante majorité au centre hospitalier de Manresa.

Système de santé catalan

Le système de santé catalan dépend de la Generalitat de Catalogne et est géré par le Servei Català de la Salut (CatSalut). Il garantit un droit aux soins de santé à toutes les personnes résidant en Catalogne. Ce droit établit des niveaux de couverture spécifiques, en fonction des conditions de chacun, et est attesté par la remise d’une carte de santé individuelle (TSI : targeta sanitària individual).

La « couverture générale de santé » est destinée aux personnes affiliées à l’Institut Nacional de la Seguretat Social (INSS), mais également aux citoyens qui ne disposent pas de couverture santé et qui ont demandé l’accès aux soins, ou aux mineurs résidant en Catalogne et ne relevant d’aucun autre système.

Les prestations assurées dans le cadre de la couverture générale de santé sont : les soins de médecine générale et de médecine spécialisée, les soins psychiatriques et de santé mentale, les services socio-sanitaires, la pharmacie (prise en charge à 60 % des médicaments prescrits en médecine générale), le transport sanitaire ordinaire et d’urgence, la rééducation et les greffes.

Cette couverture donne également droit aux prestations des programmes de santé publique, à la prise en charge des malades du sida et aux vaccins, entre autres programmes.

À noter que les retraités de l’INSS bénéficient de la pharmacie gratuite, comme les personnes de plus de 65 ans ou celles souffrant d’un certain niveau de handicap avéré et ne disposant d’aucune couverture.

Source : http://fr.culturpro.cat/ (site internet issu du programme POCTEFA – Programa operativo de cooperacion territorial Espana Francia Andorra, cadre de référence de tous les projets de coopération transfrontalière entre la France, l’Espagne et l’Andorre, pour la période de programmation 2007-2013 du FEDER)

3. Genèse d’un projet de santé commun

a) D’une coopération limitée avec la Fondation Hôpital de Puigcerdá…

Si les premiers contacts entre responsables de l’assurance maladie côté français et de CatSalut (service de santé catalan, cf. encadré ci-dessus) côté espagnol remontent à 1996, aucune solution n’avait alors pu être trouvée pour définir des modalités de financement des frais médicaux engagés au titre des patients français pris en charge par la fondation Hôpital de Puigcerdá. Aussi, de 1996 à 2002, l’hôpital a-t-il accueilli de fait la plupart des urgences concernant des patients français sans qu’aucun accord ne vienne régler la question de leur prise en charge, limitant par là même les flux de patients transfrontaliers (30).

Une convention a finalement été signée en 2002 par la fondation Hôpital de Puigcerdá avec le centre hospitalier de Perpignan et l’agence régionale de l’hospitalisation (ARH) du Languedoc-Roussillon afin de prévoir un remboursement des frais occasionnés au titre des urgences (avec effet rétroactif au 1er janvier 2001) et amorcer un début de coopération (formation des professionnels, suivi des patients). Puis une seconde convention a été signée, en 2003, entre l’hôpital et les organismes d’assurance maladie français sur un accord de tiers payant, formalisant les engagements précédents et permettant le remboursement des soins engagés par l’hôpital lors de la prise en charge des assurés sociaux des régimes français, pour toutes les urgences régulées par le centre 15 ainsi que pour l’obstétrique.

Ainsi, sur les quelque 350 accouchements annuels réalisés à Puigcerdá, une centaine concernerait désormais des parturientes françaises. Quant à la fréquentation des urgences, on estime à 10 % le nombre de patients français (31).

Dans ce contexte favorable aux relations entre les deux pays, mais également sous la pression de contraintes internes à chacun d’eux (32), la même année, était lancée la première étude de faisabilité en vue de la création d’un hôpital transfrontalier (33).

b) … à la création d’un hôpital transfrontalier

Une étape décisive dans la création de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne est franchie le 17 octobre 2005 avec la signature par le ministre français de la santé et son homologue de la Generalitat de Bercelone d’une première déclaration conjointe d’intentions sur la coopération dans le domaine de l’accès aux soins de proximité pour les patients de Cerdagne et du Capcir. La « lettre de mission » formalisée par la suite entre la Generalitat de Catalogne et la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS) assigne trois principes fondamentaux à la création de l’hôpital :

– la réalisation d’une structure véritablement transfrontalière, avec du personnel français et espagnol ;

– un accueil des patients dans les mêmes conditions qu’en France ;

– un accueil réciproque des patients espagnols dans les établissements de santé cerdans, notamment pour les soins de suite et de rééducation.

Le projet est cependant encore loin d’aboutir. Ainsi que le soulignent Séchet et Keerle (34), les aspects administratifs, réglementaires et financiers sont d’autant plus difficiles à résoudre que les écarts entre les systèmes de soins sont importants. En outre, alors que la déclaration d’intention du 17 octobre 2005 prévoyait que l’hôpital transfrontalier s’inscrirait dans le cadre du traité de Bayonne du 10 mars 1995, qui fixe les bases de la coopération transfrontalière entre collectivités territoriales françaises et espagnoles, on se rend compte en avril 2006 de l’impossibilité de bâtir un consortium interadministratif (35) chargé de gérer l’hôpital sur ce fondement, dans la mesure où la santé relève en France de la compétence de l’État et non des collectivités territoriales.

C’est dans ce contexte que va naître le projet d’accord franco-espagnol sur la coopération sanitaire transfrontalière. Au même moment, un nouvel instrument juridique de coopération est créé au niveau européen : le groupement européen de coopération territoriale (voir encadré ci-après).

S’ensuit une nouvelle déclaration d’intentions de collaboration entre le ministère de la santé français et le ministère de la santé de la Generalitat de Catalogne dans le domaine de la prise en charge sanitaire transfrontalière, signée le 17 mars 2007, dans laquelle les parties s’accordent à poursuivre le projet d’hôpital transfrontalier dans le cadre d’un groupement européen de coopération territoriale. La déclaration d’intentions définit le mode de gouvernance du futur groupement européen de coopération territoriale Hôpital de Cerdagne (GECT HC) et répartit les voix au sein du conseil d’administration ainsi que la participation de chaque pays au financement selon la clé de répartition suivante : 40 % pour la France, 60 % pour la Catalogne.

Le groupement européen de coopération territoriale

Dispositions applicables

Dans le cadre de la programmation 2007-2013 de la politique de cohésion, l’Union européenne a créé un nouvel instrument juridique visant à faciliter les démarches de coopération entre États membres : le groupement européen de coopération territoriale (GECT). Organisme doté de la personnalité juridique, il permet à des organismes issus d’États membres différents de mettre en œuvre des activités transfrontalières, transnationales et interrégionales.

Créé par le règlement (CE) n° 1082/2006 du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006, un tel groupement peut être composé d’États membres, de collectivités régionales, de collectivités locales et/ou d’organismes de droit public. Les membres d’un groupement doivent être situés sur le territoire d’au moins deux États membres.

Ses compétences sont fixées dans une convention de coopération qui, aux termes de l’article 8 du règlement précité, doit être conclue à l’unanimité de ses membres. La convention précise :

– le nom du groupement et le lieu de son siège ;

– l’étendue du territoire sur lequel il peut exécuter sa mission ;

– l’objectif spécifique et la mission du groupement, sa durée et les conditions de sa dissolution ;

– la liste de ses membres ;

– le droit applicable à l’interprétation et à l’application de la convention, qui est le droit de l’État membre où le groupement a son siège ;

– les modalités appropriées pour la reconnaissance mutuelle, y compris en vue du contrôle financier ;

– les procédures de modification de la convention.

Dans les limites de ses attributions, le groupement agit au nom et pour le compte de ses membres. Il possède ainsi la capacité juridique reconnue aux personnes morales par les législations nationales.

Il peut se voir confier soit la mise en œuvre des programmes cofinancés par l’Union européenne, soit toute autre action de coopération transfrontalière avec ou sans intervention financière européenne. Ses membres peuvent décider à l’unanimité de déléguer l’exécution de sa mission à l’un d’entre eux.

Le groupement arrête ses statuts sur la base de la convention. Aux termes de l’article 9 du règlement (CE) 1082/2006, ses statuts sont adoptés par ses membres statuant à l’unanimité ; ils contiennent, au minimum, toutes les dispositions de la convention ainsi que les éléments suivants :

– les modalités de fonctionnement des organes de direction du groupement et leurs compétences, ainsi que le nombre de représentants des membres dans les organes de direction concernés ;

– les procédures décisionnelles au sein du groupement ;

– la ou les langue(s) de travail ;

– les modalités de son fonctionnement, notamment en ce qui concerne la gestion de son personnel, les procédures de recrutement, la nature des contrats du personnel ;

– les modalités de la contribution financière des membres et les règles budgétaires et comptables applicables, y compris les règles financières, de chacun des membres du groupement vis-à-vis de ce dernier ;

– les modalités en matière de responsabilité des membres ;

– les autorités chargées de la désignation d’un organisme d’audit externe indépendant (les membres arrêtent un budget annuel prévisionnel qui fait objet d’un rapport annuel certifié par des experts indépendants. Les membres sont responsables financièrement au prorata de leur contribution en cas de dettes) ;

– les procédures de modification des statuts.

Propositions de réforme

En application de l’article 17 du règlement (CE) 1082/2006, la Commission européenne devait remettre, au plus tard le 1er août 2011, un rapport sur son application ainsi que, le cas échéant, des propositions de réforme.

Ce rapport, COM (2011) 462 final, paru le 29 juillet 2011, indique que 16 groupements ont d’ores et déjà été créés dans l’Union européenne et que 21 autres sont en préparation.

Le rapport tout en faisant état d’un niveau de satisfaction élevé quant à la création de cet instrument, soulève plusieurs difficultés pratiques dans sa mise en œuvre susceptibles de constituer un frein à son utilisation. Celles-ci ont notamment trait aux contrats des personnels. La commission estime à cet égard que les statuts des groupements pourraient indiquer la législation régissant les contrats d’emploi, législation qui pourrait être celle du lieu où il a son siège mais aussi de celui où d’autres organes statutaires du groupement sont situés et remplissent leurs missions.

Considérant plus globalement que certains points méritaient d’être clarifiés, la Commission européenne a soumis en octobre 2011 une proposition de modification du règlement. Le rapporteur de la commission du développement régional du Parlement européen, M. Joachim Zeller, a proposé que les groupements déjà créés puissent adapter leur statut pour bénéficier de la révision, et notamment des nouvelles dispositions prévues en matière de droit du travail applicable au personnel de ces groupements.

La proposition de règlement sur les groupements européens de coopération territoriale fait partie du paquet relatif à la politique de cohésion 2014-2020.

En décembre 2007, la mairie de Puigcerdá cède les terrains pour la construction de l’hôpital de Cerdagne ; la construction est approuvée par la Generalitat de Catalogne en 2008. Alors que les travaux débutent en février 2009, le projet se voit attribuer en mars de la même année un financement du Fonds européen de développement économique régional (FEDER) à hauteur de 60 % de son coût, soit 18,6 millions d’euros sur un total de 31 millions d’euros.

La convention constitutive du groupement européen de coopération territoriale Hôpital de Cerdagne est finalement signée le 26 avril 2010. La création du Groupement doit permettre d’initier la constitution d’un réseau de santé transfrontalier, parallèlement à la poursuite de la restructuration de l’offre de soins en Haute Cerdagne.

La construction de l’hôpital s’étant achevée au printemps 2012 après trois années de travaux, l’établissement est désormais en cours d’équipement, phase qui devrait s’achever en septembre 2013. Techniquement, l’hôpital pourrait donc ouvrir ses portes à l’automne 2013, mais de nombreux obstacles juridiques se dressent encore sur le chemin.

B. LA CRÉATION D’UN RÉSEAU DE SOINS AUTOUR DU GROUPEMENT EUROPÉEN DE COOPÉRATION TERRITORIALE HÔPITAL DE CERDAGNE

1. La convention constitutive et les statuts du groupement

La convention de coopération sanitaire transfrontalière et de constitution du groupement européen de coopération territoriale Hôpital de Cerdagne (ci-après appelé Groupement) a été signée à Puigcerdá le 26 avril 2010, pour la France, par la ministre chargée de la santé, la directrice générale de l’agence régionale de santé du Languedoc-Roussillon et le représentant du directeur général de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) et, pour la Catalogne, par le président de la Generalitat, M. José Montilla.

La convention comprend onze articles qui, conformément au règlement (CE) 1082/2006, précisent l’objet et la mission du Groupement, définissent son mode de gouvernance et précise le droit applicable (qui est le droit de l’État membre où le Groupement a son siège). Elle est complétée par trois annexes : la première fixe les statuts du Groupement ; la deuxième dresse la liste des communes comprises dans son domaine territorial (36) ; la troisième arrête le projet commun de santé de Cerdagne.

Notons d’emblée, qu’en dépit de son intitulé qui tend à la placer dans la lignée de l’accord de coopération sanitaire transfrontalière franco-espagnol (37), la convention ne reprend aucune des dispositions qu’est censée contenir une convention locale de coopération sanitaire transfrontalière telle que définie par l’article 3 de l’accord cadre et l’article 2 de l’accord d’application de 2008 (38). La convention procède en réalité uniquement du règlement (CE) 1082/2006 et a pour seul objectif la constitution du Groupement.

a) Le droit applicable

L’article 2 de la convention stipule que le siège du Groupement est fixé à Puigcerdá, en Catalogne. Il en résulte que « le droit applicable pour l’interprétation et l’application de la présente convention est le droit de l’État et de la communauté autonome espagnols » (article 9) (39).

Cette précision, qui aura de nombreuses répercussions sur la gestion concrète du Groupement, figure à de nombreuses reprises dans la convention et les statuts qui y sont annexés :

– il est ainsi précisé à l’article 10 que le contrôle administratif, budgétaire et financier doit être réalisé conformément aux dispositions du droit de l’État et de la communauté autonome espagnols applicables ; ce même article prévoit néanmoins que l’autorité espagnole chargée de ce contrôle informe ses homologues en France et pourra être saisie par les autorités de contrôle compétentes sur le territoire français (40) ;

– l’article 9 des statuts dispose qu’en dehors des cas où la compétence juridictionnelle est définie par le droit de l’Union européenne, la juridiction compétente pour le règlement des différends auxquels le Groupement est partie est la juridiction espagnole (paragraphe 1). Le paragraphe 3 de ce même article ouvre néanmoins la possibilité pour les citoyens d’exercer leur droit de recours devant les juridictions nationales à l’encontre des membres du Groupement en ce qui concerne : les décisions administratives relatives aux activités menées ; l’accès à des services dans leur langue propre, l’accès à l’information. Notons à cet égard que non seulement tous les actes du Groupement doivent être rédigés dans les trois langues officielles de son domaine territorial, l’espagnol, le catalan et le français, mais que chaque usager devra être pris en charge dans la langue officielle qu’il aura choisie, tant pour ce qui est la communication orale qu’écrite (article 10 des statuts) ;

– l’article 31 des statuts précise que le poste de directeur, qui entre dans la catégorie des cadres supérieurs, est régi par un contrat de travail de haute direction réglementé par le décret royal 1382/1985. Plus largement, l’article 41 des statuts indique que le Groupement peut disposer de son propre personnel embauché sous contrat et que les contrats et les rapports de travail seront régis par le droit espagnol. Des alternatives sont néanmoins prévues : les missions du Groupement peuvent être effectuées par un personnel propre à ses membres, moyennant des formules de détachement convenues au cas par cas, ou par le personnel d’autres organismes publics et privés, en vertu des accords et des alliances stratégiques que ces organismes établissent avec le Groupement et réciproquement, conformément à la législation en vigueur ;

– l’article 42 des statuts indique enfin que le régime de passation des marchés publics de biens et de services est assujetti aux règles du droit espagnol.

b) Les missions

L’objet et les missions du Groupement sont définis à l’article 4 de la convention. Le paragraphe 1 de cet article assigne pour mission principale « la construction, la mise en service et la gouvernance d’un hôpital transfrontalier, général et cantonal (…) qui prendra en charge les patients sur [son] territoire ». Cet article fixe la capacité de l’hôpital à « 64 lits, pouvant aller jusqu’à 74 ».

Ce paragraphe précise également que le Groupement a un autre objet qui est de « contribuer au développement du projet commun de santé du territoire » élaboré par CatSalut (le service catalan de santé) et l’agence régionale de santé (ARS) du Languedoc-Roussillon. Ce projet, qui figure en annexe III de la convention, comporte « les principales orientations de la planification sanitaire transfrontalière de l’espace franco-catalan ».

Le paragraphe 2 de l’article 4 dresse plus précisément la liste des missions du Groupement, qui diffèrent selon les phases de réalisation du projet d’hôpital transfrontalier (construction et mise en service d’une part, fonctionnement d’autre part). On retiendra surtout, en ce qui concerne la phase de fonctionnement de l’hôpital de Cerdagne, que le Groupement aura pour mission :

– la prestation de services de prise en charge ambulatoire ;

– la prestation de services de prise en charge hospitalière ;

– la prestation de services de santé mentale ;

– la promotion et le développement de programmes de prévention en matière de santé ;

– l’activité de formation et de recherche liée à l’activité sanitaire.

Pour mener à bien sa mission, il disposera de divers moyens juridiques. Dans la liste de ses attributions fixée par l’article 5 des statuts, on retiendra ainsi :

– l’acquisition, la possession, la location, le recueil, l’échange et l’aliénation de biens meubles et immeubles, ainsi que les droits réels sur eux ;

– la passation de contrats, la demande de garanties et de prêts directs destinés à financer des investissements et à assumer ses obligations ;

– la création d’entités avec ou sans personnalité juridique propre placées sous son contrôle ;

– l’embauche de personnel, la passation de contrats de travaux, de services et de fournitures ;

– la collaboration avec des structures publiques et privées, qu’elles soient espagnoles ou françaises, moyennant des accords ou contrats ;

– la capacité d’ester en justice et d’agir au nom et pour le compte de ses membres  (41).

c) La gouvernance

Aux termes de l’article 4 de la convention, la gouvernance de l’hôpital fait expressément partie des missions du Groupement.

L’article 6 de la convention renvoie cependant aux statuts, adoptés à l’unanimité, le soin de déterminer les modalités de fonctionnement et de financement du Groupement.

L’article 4 desdits statuts confie ainsi la gouvernance du Groupement au conseil d’administration et au directeur, chacun pour ce qui le concerne.

L’article 11 des statuts fixe quant à lui la liste des organes de direction que sont le conseil d’administration,  le conseil consultatif, la présidence, la vice-présidence, le bureau exécutif et le directeur et répartit leur composition selon la proportion suivante : 60 % de membres représentant le Gouvernement de Catalogne ; 40 % de membres représentant la République française.

● Le conseil d’administration

Le conseil d’administration est l’organe décisionnel du Groupement. L’article 13 des statuts arrête ses fonctions, parmi lesquelles : donner l’orientation générale des missions du Groupement, approuver les modes de gestion des services, proposer les participations financières qui incombent aux partenaires, approuver les comptes et voter le budget, approuver les règlements internes, d’organisation et de fonctionnement des diverses activités, approuver les conditions générales d’accès aux postes de travail et aux fonctions de direction, nommer et révoquer le directeur, approuver les accords de partenariat et tous types d’accords de coopération, élargir les activités du Groupement et approuver la modification des statuts.

Le conseil d’administration se réunit en session ordinaire au moins deux fois par an (article 14 des statuts). Les décisions y sont prises à la majorité simple des conseillers présents sous réserve du quorum (la moitié des conseillers plus un) et de la présence d’au moins un membre représentant chaque partenaire. Toutefois, pour certaines décisions importantes (approbation de plans stratégiques, création d’organismes ad hoc, cession à des structures externes des missions confiées au conseil d’administration), une majorité des trois quarts est requise. Enfin, un vote à l’unanimité est nécessaire pour le transfert ou la fermeture du Groupement, l’élargissement ou la révocation de ses membres et la modification des statuts (article 16 des statuts).

Les membres du conseil d’administration sont nommés pour quatre ans renouvelables. Leur liste ainsi que celle des membres des autres organes figure en annexe du présent rapport.

La présidence et la vice-présidence du Groupement sont exercées en alternance tous les deux ans par la Catalogne et par la France (article 26 des statuts).

● Le bureau exécutif

Le bureau exécutif s’occupe de la gestion quotidienne du Groupement ; il constitue le « bras armé » du conseil administration, auquel ce dernier peut déléguer certaines missions. Ses attributions propres sont fixées par l’article 30 des statuts ; il lui appartient, globalement, d’« adopter des dispositions et mesures appropriées pour que le Groupement soit organisé au mieux » et d’« assurer les fonctions de relation et de coordination opérationnelle entre le [Groupement] et les administrations compétentes dans les matières relatives à la coopération transfrontalière ». On notera également que figure, entre autres, dans ses attributions la responsabilité de :

– formuler au conseil d’administration des propositions de programmes d’orientation, de stratégies et de plans pluriannuels d’action ;

– approuver la structure organisationnelle du Groupement ;

– définir le régime des fonctions, du personnel et des rémunérations, ainsi que les accords et les conventions collectives du travail ;

– formuler une proposition de nomination du directeur ;

– nommer et révoquer les titulaires des postes de direction ;

– réviser et approuver l’inventaire du patrimoine ;

– approuver la passation de contrats de travaux, de services et de fourniture et résoudre les questions incidentes à ces contrats ;

– opérer en tant qu’organe contractant ;

– approuver l’élaboration conjointe de projets ou d’actions communes dans le cadre des programmes et aides européennes ;

– approuver les opérations de crédit ;

– établir les critères d’ordonnancement des paiements ;

– constituer des commissions ou comités.

 Le conseil consultatif

Le Conseil d’État ayant indiqué qu’il n’était pas possible pour les élus locaux de siéger au sein du conseil d’administration du Groupement, ces derniers ne pouvant en être membres dans la mesure où les collectivités qu’ils représentent n’ont pas de compétence en matière de santé (42), les statuts ont prévu la création d’un conseil consultatif de quatorze membres, huit pour la partie catalane et six pour la partie française, ces derniers se répartissant de la façon suivante : trois personnalités qualifiées et trois représentants des collectivités locales (article 18). Les membres du conseil consultatif sont nommés pour une durée de quatre ans.

Le conseil consultatif est obligatoirement saisi des sujets ayant trait à l’organisation territoriale de santé et aux orientations budgétaires, mais il peut également être saisi sur tout sujet par le conseil d’administration. Les avis du conseil consultatif sont des avis simples dont les statuts du Groupement prévoient qu’ils sont communiqués au conseil d’administration mais non que ce dernier doit y apporter une réponse, ce qui limite très concrètement son champ d’action.

 Le directeur

Aux termes de l’article 31 des statuts, le directeur du Groupement « applique les décisions du conseil d’administration et du bureau exécutif ». Comme n’importe quel directeur d’hôpital, il est chargé de l’intendance et du bon fonctionnement de l’hôpital (43). À la lecture des fonctions attachées au poste de directeur, poste qui correspond à un emploi de la haute fonction publique espagnole et donc réservé à un catalan, on constate néanmoins que le directeur jouit d’une position stratégique au sein du Groupement dans la mesure où il dispose d’un pouvoir de proposition très large vis-à-vis du bureau exécutif, du président ou du conseil d’administration : il est notamment chargé d’élaborer la proposition de structure organisationnelle du Groupement, de préparer les dossiers qui, par le biais du président et du bureau exécutif, doivent être soumis à l’approbation du conseil d’administration, et d’élaborer les propositions de règlements d’organisation et de fonctionnement du Groupement.

On notera que si les statuts font référence à la vice-présidence du conseil administration (article 27), ils ne font aucunement mention de l’existence d’un poste de directeur adjoint.

d) Les financements

 L’article 35 des statuts fixe les ressources du Groupement. Outre la mention du produit des emprunts contractés, de son patrimoine et d’éventuels subventions, dons ou legs, il ressort des dispositions de cet article que :

– pour les dépenses d’investissement, il doit bénéficier des apports de ses membres afin de financer la conception et la construction de l’hôpital pour un montant de 31 millions d’euros qui, après déduction de tout financement communautaire, doit être financé à 40 % par l’assurance maladie française et à 60 % par la Generalitat de Catalogne ;

– en fonctionnement, les ressources du Groupement seront constituées des gains issus des remboursements des prestations de services sanitaires effectués dans le cadre de ses missions. L’article 35 précise que ces prestations seront prises en charge sur la base de tarifs identiques, quels que soient l’origine ou le régime d’affiliation des patients. CatSalut prendra ainsi en charge les prestations de service effectuées pour ses assurées et l’assurance maladie française prendra en charge les prestations de services sanitaires réalisées pour ses assurés dans des conditions précisées dans un « accord technique » entre le Groupement et l’assurance maladie. Le paragraphe 3 de ce même article indique que cet accord définira les modalités de prise en charge, de facturation et de participation financière des assurés.

Toutefois, en vertu de l’article 35 paragraphe 4, une répartition provisoire du financement est mise en place pour les cinq années budgétaires suivant la mise en service de l’Hôpital de Cerdagne, cinq années pendant lesquelles l’assurance maladie financera le Groupement à hauteur de 40 % du montant des charges de l’hôpital inscrit au budget prévisionnel, et ce, quelle que soit la fréquentation de l’hôpital par des patients français. En effet, il est précisé qu’une « dotation » sera versée par l’assurance maladie, en sus de la prise en charge des prestations afférentes aux patients français, afin d’atteindre la « quote-part » ainsi prévue.

À l’issue de la période transitoire, le conseil d’administration pourra déterminer à l’unanimité un nouveau modèle de financement dans le respect toutefois du principe selon lequel la contribution française au budget de l’hôpital de Cerdagne correspond à la part des prestations réalisées par l’hôpital remboursées aux assurés sociaux des régimes français.

 En droit interne, l’article 48 de la loi n° 2009-1646 du 24 décembre 2009 de financement de la sécurité sociale pour 2010 a rendu possible la participation de la France au financement de l’hôpital transfrontalier en modifiant le code de la sécurité sociale afin de donner à l’assurance maladie la faculté de traiter le remboursement des dépenses de soins des patients relevant d’un régime de sécurité sociale français soignés dans un hôpital situé dans un autre État dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités que si les soins avaient été prodigués dans un hôpital français. Cet article prévoit :

– d’une part, de comptabiliser dans une ligne spécifique de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) les dépenses de soins des patients relevant d’un régime français de sécurité sociale pris en charge dans un hôpital situé en dehors du territoire français ;

– d’autre part, de donner une base légale au versement à l’hôpital des sommes dues au titre des soins dispensés à ces patients que doit effectuer la caisse primaire d’assurance maladie désignée comme « caisse pivot » pour le compte de l’ensemble des régimes d’assurance maladie (44). La caisse primaire de Perpignan a été désignée « caisse pivot » par arrêté du ministre de la santé en date du 1er février 2011.

2. La constitution d’un réseau de soins transfrontalier

Aux termes du troisième considérant de la convention constitutive du Groupement, les parties signataires désirent exprimer leur volonté de coopérer afin d’« ouvrir au plus vite un hôpital transfrontalier à Puigcerdá en vue de la mise en place d’un futur réseau sanitaire transfrontalier franco-catalan ». Aussi la construction de l’hôpital de Cerdagne et la constitution du Groupement s’inscrivent-elles dans un projet de coopération sanitaire transfrontalière plus large comprenant la mise en place d’un véritable réseau de soins transfrontalier. Le projet commun de santé de territoire de Cerdagne indique ainsi qu’au-delà de la reconnaissance de l’hôpital transfrontalier comme établissement de premier recours pour toute la population cerdane, « il s’agit d’organiser une réponse territoriale qui s’appuie sur le savoir-faire professionnel des établissements de santé du plateau notamment du côté français et de faire émerger des filières de prise en charge qui permettront d’améliorer les niveaux de réponse apportés de part et d’autre de la frontière ».

Le projet commun de santé de territoire identifie plus particulièrement neuf filières dont il détaille la future organisation (45), mais il cite surtout en exemple la création d’une filière gériatrique, d’une filière rééducation et d’une filière pédiatrique (voir cartographie ci-après).

Carte des établissements impliqués dans le réseau de soins transfrontalier

(filières gériatrique, rééducation et pédiatrique)

Source : Ministère de la santé, dossier de presse, avril 2010, Hôpital de Cerdagne.

La création d’un réseau de soins transfrontalier permettant de créer, côté français, un pôle gériatrique et un pôle pédiatrique ouverts aux patients espagnols, a permis de motiver les acteurs sanitaires de Haute Cerdagne dans un contexte de restructuration importante de l’offre de soins. Si, pour la filière gériatrique, le projet est bien avancé, avec la constitution du pôle sanitaire cerdan entre l’UGECAM Languedoc Roussillon (46), l’association Joseph Sauvy et le Groupement Hôpital de Cerdagne, l’avènement d’un pôle pédiatrique reste à ce jour encore très incertaine.

 La constitution du groupement de coopération sanitaire (GCS) Pôle sanitaire cerdan

Dans la perspective de la mise en place d’une filière gériatrique et d’une filière de rééducation dans le cadre du projet commun de santé du territoire de Cerdagne, a été signée le 22 avril 2012 la convention constitutive du groupement de coopération sanitaire (GCS) Pôle sanitaire cerdan, sur la base d’un partenariat établi entre :

– l’UGECAM Languedoc-Roussillon, qui assure la gestion d’un centre de soins de suite et de réadaptation fonctionnelle et d’un centre de rééducation professionnelle aux Escaldes fournissant des soins de suite et de rééducation (SSR) polyvalents adultes en hospitalisation complète ;

– l’association Joseph Sauvy (47), qui gère une maison de santé médicale à Err (EPHAD Joseph Sauvy) développant des activités de soins de suite et de réadaptation (SSR), notamment en direction des personnes âgées polypathologiques dépendantes ou à risque de dépendance, en hospitalisation complète ;

– et le Groupement Hôpital de Cerdagne. Ce dernier, bien que « membre à part entière » du pôle sanitaire cerdan, doit essentiellement « intervenir en tant que soutien financier de la dimension immobilière de l’objet du groupement de coopération sanitaire » (48), la couverture des frais de fonctionnement de ce dernier étant partagée à parts égales entre l’UGECAM et l’association Joseph Sauvy (article 13.2.2 de la convention constitutive).

Le pôle sanitaire cerdan est en effet avant tout issu d’un rapprochement entre les deux structures de l’UGECAM et de l’association Joseph Sauvy qui s’est traduit par la mise en œuvre d’une offre de soins commune et la relocalisation des établissements gérés par les deux partenaires. L’ensemble des autorisations de soins détenues par ces établissements ont ensuite été rassemblées sous l’égide du groupement de coopération sanitaire dans l’objectif de « mettre en place une filière gériatrique et une filière rééducation, avec la constitution d’équipes franco-catalanes intervenant des deux côtés de la frontière » (préambule de la convention constitutive). Ayant le statut d’établissement de santé privé d’intérêt collectif (ESPIC), le groupement de coopération sanitaire sera ainsi titulaire des autorisations suivantes : médecine, soins de suite et de réadaptation gériatriques et polyvalents, unité de soins de longue durée (USLD), cette dernière correspondant à une création d’activité. L’exploitation de ces autorisations aura lieu sur un nouveau site en construction à Err dont la livraison est prévue pour 2014. D’après les informations fournies à vos rapporteure, le site regroupera :

– 10 lits de médecine à orientation gériatrique ;

– 3 lits de soins palliatifs ;

– 2 places d’hôpital de jour ;

– 20 lits de soins de suite et de rééducation gériatrique ;

– 37 lits de soins de suite et de rééducation polyvalents ;

– 15 lits d’unité de soins de longue durée.

La convention constitutive du groupement de coopération sanitaire prévoit expressément que celui-ci gère l’intervention d’une équipe médicale de coopération sanitaire gériatrique mobile au sein de l’hôpital de Cerdagne ainsi qu’au domicile des patients de l’hôpital et l’accueil des patients de l’hôpital de Cerdagne dans le cadre des autorisations dont il dispose.

Alors que la prise en charge des patients français par la fondation Hôpital de Puigcerdá (pour les urgences et la maternité) ou par le futur hôpital de Cerdagne se fait directement et sans avance de frais par l’assurance maladie, aucune convention n’est intervenue entre les gestionnaires du système de santé catalan et le groupement de coopération sanitaire pour prévoir des dispositions équivalentes permettant la prise en charge des patients espagnols dans le cadre de traitements mis en œuvre sur le territoire français par le pôle sanitaire cerdan.

Dans la mesure où le groupement de coopération sanitaire constitue un volet important du projet de santé du territoire et doit intervenir en complémentarité avec l’hôpital de Cerdagne, il conviendrait que les membres du Groupement Hôpital de Cerdagne, et tout particulièrement CatSalut, se saisissent rapidement de cette question, avant l’ouverture du futur hôpital. Il pourrait à cet égard être opportun d’étudier la faisabilité d’une expérimentation sur le plateau cerdan d’un dispositif similaire à celui du projet Transcards mis en œuvre sur la frontière franco-belge, projet permettant le remboursement des frais de santé engagés dans les établissements de santé français et belges, sur la base de la réglementation et des tarifs en vigueur dans le pays d’exécution des soins, quel que soit le régime de rattachement du patient.

 La création encore incertaine d’un pôle pédiatrique en Haute Cerdagne

Aux termes du projet médical de territoire annexé à la convention constitutive du Groupement Hôpital de Cerdagne, la constitution d’une filière pédiatrique devait permettre de faire émerger une garde pédiatrique 24h/24 avec une astreinte mutualisée sur le plateau cerdan ainsi qu’une offre de consultations pédiatriques organisée, d’un côté, au centro d’atencio primaria de Puigcerdá et, de l’autre, au sein d’un pôle pédiatrique à créer côté français. Ce pôle pédiatrique aurait dû être le fruit d’une coopération entre deux établissements, les maisons d’enfants Les tout-petits à Bourg-Madame et La Perle cerdane à Osséja (49). La création d’un groupement de coopération sanitaire était là aussi envisagée mais la mésentente entre les acteurs français de ce projet a remis en cause l’architecture initialement envisagée.

D’après les informations fournies à votre rapporteure, en dépit de la prudence des partenaires catalans sur ce volet du projet médical de territoire (50), la conception d’un nouveau projet, susceptible de bénéficier d’un financement dans le cadre de la prochaine programmation du FEDER, est actuellement à l’étude.

 La complémentarité des services d’urgence et l’organisation de la permanence des soins

Votre rapporteure souhaite évoquer pour finir l’organisation de la gestion des urgences et de la permanence des soins, qui est appelée à jouer un rôle crucial dans le maillage du territoire et l’orientation des patients vers l’hôpital de Cerdagne et qui doit en outre donner lieu à la création d’une maison médicale de garde à Bourg-Madame.

S’agissant des urgences, les deux dispositifs de régulation, le SEM 061 côté catalan et le SAMU 15 côté français, avec leurs antennes respectives à Puigcerdá et à Err, seront reliés à l’hôpital de Cerdagne et chaque centre régulera sur son territoire. Des protocoles de régulation et d’intervention doivent néanmoins être formalisés par le SAMU et le SME afin d’uniformiser les pratiques.

En ce qui concerne la permanence des soins, elle mobilise aujourd’hui côté catalan 11 médecins à temps plein répartis sur deux « centres d’attention primaire » situés à Puigcerdá et Bellver. La permanence des soins fonctionne en Catalogne tous les jours de la semaine de 21h à 9h, le samedi et le dimanche 24 h sur 24, dans les locaux de l’hôpital de Puigcerdá.

Côté français, 21 médecins (14 en équivalent temps plein) participent à la permanence des soins sur deux secteurs de permanence : Bourg-Madame et Font-Romeu/Les Angles. La permanence des soins y fonctionne tous les jours de la semaine de 20h à 8h, le samedi de 12h à 20h et le dimanche de 8h à 20h.

Dans le cadre du projet de territoire, une maison de santé pourrait également voir le jour à Bourg-Madame et être ainsi amenée à jouer un rôle dans la complémentarité ville / hôpital. Un lien pourrait en effet être formalisé entre la future maison de santé et le GECT permettant à l’avenir :

– la gestion d’un dossier médical partagé ;

– la mutualisation de la permanence des soins (51) ;

– et la participation des médecins de Bourg-Madame aux consultations ouvertes à l’hôpital de Cerdagne.

C. L’HÔPITAL DE CERDAGNE, UN PROJET À LA CROISÉE DES CHEMINS

Beaucoup d’espoirs ont été fondés sur la création de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne. Or, aujourd’hui, la population comme les artisans du projet côté français s’interrogent. Ses promoteurs de longue date, au premier rang desquels le président du conseil régional du Languedoc-Roussillon et sénateur Christian Bourquin, et les élus des cantons de Mont-Louis et de Saillagouse doutent.

Alors que la construction des bâtiments est achevée et l’équipement en cours, les modalités concrètes de fonctionnement de l’hôpital doivent être définies. Quelles seront-elles ? Nul ne le sait encore. Mais il est certain qu’il ne pourrait qu’être préjudiciable à l’ensemble du projet que le fonctionnement de l’hôpital se révèle inéquitable pour l’une ou l’autre des parties. Il n’est en effet dans l’intérêt de personne de faire de l’hôpital de Cerdagne un hôpital purement catalan, où il n’y aurait pas plus de patients français qu’il n’y en a aujourd’hui à l’hôpital de Puigcerdá. La Catalogne ne saurait en particulier financer à elle seule le fonctionnement de cet hôpital, dont le budget prévisionnel s’élève à 20 millions d’euros par an, sans compter qu’en cas d’abandon de l’objectif de coopération transfrontalière, les fonds versés par le FEDER devraient être remboursés.

C’est pourtant un risque qui, à l’heure actuelle, n’est pas nul. Nous avons précédemment analysé les fondements juridiques du groupement européen de coopération territoriale Hôpital de Cerdagne (GECT HC) et décortiqué son organisation, laquelle laisse apparaître un déséquilibre flagrant entre les parties dans la gouvernance du projet. S’il ne s’est pas fait sentir dans les phases précédentes de réalisation de l’hôpital, qui ont été menées en parallèle par la France et la Catalogne, il est apparu clairement à votre rapporteure lors des auditions qu’elle a menées sur place (52) que ce déséquilibre initial risquait désormais de remettre en question l’avenir du projet.

Comment garantir la venue de patients français à l’hôpital de Cerdagne, en dehors du strict cadre des urgences et de la maternité ? Comment concrétiser juridiquement l’engagement pris dans le cadre de la convention constitutive du Groupement de faire fonctionner l’hôpital avec des équipes franco-catalanes ? Comment achever la mise en réseau des équipements sanitaires du plateau cerdan et permettre aux patients espagnols d’accéder aux installations situées en Haute Cerdagne ? Autant de questions dont les réponses détermineront le succès ou l’échec de l’hôpital de Cerdagne en tant qu’hôpital transfrontalier.

1. Des points de blocage demeurent…

La question de la fréquentation par les patients français du futur hôpital de Cerdagne est centrale et a été posée d’emblée lors de l’élaboration du projet. Tous les documents préparatoires attestent en effet de la volonté des parties de créer des conditions propices à l’accueil des patients français à l’hôpital de Cerdagne : utilisation de la langue française, mise en place d’équipes soignantes franco-catalanes, inscription de l’hôpital dans un réseau de soins transfrontalier, orientation des patients vers les structures de l’hôpital dans le cadre de la permanence des soins et des urgences régulées par le centre 15.

Rappelons néanmoins qu’en France, le libre choix des patients est un principe fondamental : il ne suffira donc pas d’afficher un souhait, mais bien de trouver les moyens de concrétiser les engagements qui ont été pris dans le recrutement des personnels, dans les relations à nouer avec les médecins généralistes présents sur le plateau, dans l’élaboration de référentiels de qualité et la mise au point de protocoles de soins communs, etc., afin de gagner la confiance des Cerdans et faire en sorte que le recours à l’hôpital de Cerdagne devienne une évidence pour la population.

Parmi l’ensemble de ces éléments, la présence de médecins et, plus généralement, de personnels soignants français au sein de l’hôpital transfrontalier apparaît aux yeux de votre rapporteure comme un élément fondamental de cette relation de confiance. Or, le dispositif qu’il est projeté d’instaurer pour le fonctionnement des services de l’hôpital n’apparaît pas à même de leur garantir une place suffisante. Le recours à des prestations de service globales mises en œuvre par les différents partenaires du Groupement et la mise à disposition de personnel par ces mêmes partenaires soulèvent en effet de nombreuses interrogations.

a) Le contenu et les modalités des prestations de services assurées par les partenaires du Groupement Hôpital de Cerdagne

Dans une décision datant de mars 2012, le conseil d’administration du GECT HC a acté le principe du recours à des partenariats avec des « entités sanitaires ou des professionnels de santé libéraux » (53) pour assumer les missions de soins incombant à l’hôpital de Cerdagne, le Groupement ne gardant en propre que les compétences de gestion et de direction de l’hôpital. Une même logique a également été retenue pour les services généraux et logistiques. Cette décision correspond notamment au souhait de la Generalitat de Catalogne de ne pas recruter de personnel sous statut public (54) dans une période de crise imposant aux administrations de réduire leurs dépenses. L’objectif est donc de confier à des organismes ou établissements partenaires la gestion de certains services de l’hôpital par le biais de conventions de prestations de services, permettant la mise à disposition de personnel auprès de l’hôpital de Cerdagne. Les établissements partenaires visés sont en premier lieu : la fondation Hôpital de Puigcerdá et la fondation Althaia côté catalan, le centre hospitalier de Perpignan et le pôle sanitaire cerdan côté français.

Bien que non formalisée, une première répartition des tâches a été esquissée entre les partenaires du Groupement : la fondation Hôpital de Puigcerdá souhaite prendre en charge au sein de l’hôpital de Cerdagne les activités de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) élargies ou « activités troncales » (55) qu’elle assure aujourd’hui et pour lesquelles elle dispose déjà de personnel ; le centre hospitalier de Perpignan doit pour sa part s’occuper des activités de radiologie, il est d’ailleurs chargé dès à présent de gérer l’équipement matériel de l’hôpital de Cerdagne dans le cadre de cette mission.

À l’heure de traduire juridiquement ces différents engagements, votre rapporteure estime néanmoins que plusieurs préalables devraient être examinés afin de garantir une répartition équitable des activités de l’hôpital entre les différents partenaires.

En effet, numériquement, les activités de MCO représentent l’essentiel des activités de l’hôpital : si ces activités, voire d’autres activités corollaires, sont assumées par la fondation Hôpital de Puigcerdá, qui emploie aujourd’hui uniquement des personnels catalans, comment pourra-t-on aboutir à la constitution d’équipes de soins franco-catalanes ? Le maire de Puigcerdá, président de la fondation Hôpital de Puigcerdá, s’est engagé, lors de son audition par votre rapporteure, à recruter des personnels français. Toutefois, quand bien même la fondation embaucherait des personnels français (notamment pour remplacer les départs), il apparaît impossible d’imposer un « quota » minimum de personnel français, le droit de l’Union européenne prohibant les distinctions fondées sur l’origine des salariés. Par ailleurs, la fondation recruterait ces personnels sous statut espagnol : le droit du travail applicable, la définition des conditions du travail, la rémunération et les avantages sociaux relèveraient donc du droit local, ce qui constitue un obstacle supplémentaire au recrutement de salariés français, eu égard aux écarts en termes de droits que cela pourrait entraîner pour les personnes intéressées. Enfin, cette option ne saurait évidemment être retenue pour tous les personnels relevant du statut de la fonction publique hospitalière.

Ainsi que le fait valoir le maire de Puigcerdá, le Groupement envisage également de faire bénéficier des médecins spécialistes français de ses nombreux box de consultations en les invitant à y organiser des consultations avancées. Outre le fait que d’un point de vue juridique, cette proposition nécessite la création d’un cadre contractuel ad hoc (56), on ne peut pas vraiment comparer personnel permanent de l’hôpital et médecins assurant ponctuellement des consultations, même si cette initiative reste à favoriser.

Enfin, sur un tout autre plan, le Groupement peut-il être réduit à accepter une prestation de services globale, sans avoir à juger du niveau et de la qualité des personnels mis à disposition, alors même que sa responsabilité pourrait être engagée à l’occasion des soins prodigués ? À cette question, il est répondu qu’une commission d’accréditation des professionnels de santé sera mise en place afin de garantir la sélection, la formation et la bonne pratique médicale des professionnels. Lors de la réunion du bureau exécutif du 21 mars 2013 au cours de laquelle ces questions ont été évoquées, la France, par la voix de ses représentants, a clairement indiqué que cette solution était insuffisante, dans la mesure où, si elle permettait d’écarter un professionnel, elle n’autorisait pas à en nommer un et ne garantissait donc en rien la participation de professionnels français à l’ensemble des activités du Groupement. Votre rapporteure ne peut que rejoindre ce constat.

Dans l’attente d’une prochaine réforme du statut des groupements européens de coopération territoriale susceptible d’assouplir les conditions de recrutement des salariés (voir encadré plus haut), la partie française souhaite que soit étudiée une alternative consistant en la création d’une nouvelle société créée par le Groupement Hôpital de Cerdagne pour gérer l’hôpital et son personnel.

La partie catalane s’est pour l’heure opposée à cette solution et, d’après les informations recueillies lors des auditions, aurait rédigé des projets de conventions cadres prévoyant le recours à des prestations de services consistant à déléguer par « bloc » à un seul partenaire la globalité d’une activité. Ainsi, pour reprendre l’exemple du MCO, cette activité serait entièrement confiée à la fondation Hôpital de Puigcerdá, de même que les urgences, les analyses médicales et la pharmacie à usage intérieur, maximisant ainsi les bénéfices en termes d’emplois susceptibles d’être retirés de l’organisation du nouvel hôpital par la fondation (57). Le centre hospitalier de Perpignan se verrait quant à lui confier uniquement la responsabilité du service de radiologie et partagerait celle du service d’hémodialyse avec la fondation Althaia, chargée par ailleurs de la santé mentale, sans que les modalités de cette répartition ne soient clairement explicitées. Enfin, le pôle sanitaire cerdan serait en charge des fonctions support, c’est-à-dire des activités de restauration, d’entretien des locaux et des jardins et de nettoyage du linge. S’agissant des activités de soins constituant le cœur de métier du groupement de coopération sanitaire, sa compétence en matière de rééducation serait également réaffirmée mais, en l’absence d’accord de prise en charge signé avec les services de santé et d’assurance maladie catalans, on peut s’interroger sur la portée concrète de cette attribution.

Enfin, de nouveaux éléments, jusqu’à présent non communiqués au bureau exécutif, ont été portés à la connaissance de votre rapporteure lors de son déplacement. Le maire de Puigcerdá a ainsi indiqué vouloir maintenir les médecins généralistes du centro d’atencio primaria dans les locaux actuels de la fondation et a fait part de son intention de voir déléguer à un prestataire unique la gestion des admissions, prestataire qui devrait « naturellement » être celui appelé à gérer l’activité MCO… Ces éléments, qui n’ont été confirmés par aucune décision officielle du Groupement, témoignent néanmoins de l’ascendant pris par la partie catalane sur ce dossier ; ils forment un contraste saisissant avec le flou dans lequel sont maintenus les partenaires français quant aux modalités de leur participation au fonctionnement de l’hôpital (58), au risque de déstabiliser leur propre organisation.

Pour votre rapporteure, une telle répartition des tâches, et en particulier l’octroi d’une exclusivité de la prestation MCO à la Fondation hôpital de Puigcerdá, au détriment de la partie française, est inacceptable et ne pourrait que signer la fin de la coopération transfrontalière. Des propositions alternatives doivent être étudiées de toute urgence sous peine de voir l’ouverture de l’hôpital durablement compromise.

b) Le cadre juridique des mises à disposition de personnel

La mise à disposition de personnel par les partenaires du Groupement soulève en outre un certain nombre de questions juridiques. D’après les informations transmises par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, de l’emploi et du travail (DIRECCTE) du Languedoc-Roussillon, la mise à disposition ne pose pas en elle-même de difficultés en termes de droit du travail. Ainsi, tout en restant employés de leur établissement d’origine, les personnels mis à disposition par le biais de conventions de prestations de service seraient réputés agir dans le cadre de la mission du Groupement et se retrouveraient donc placés sous l’autorité fonctionnelle et hiérarchique du directeur et soumis au règlement intérieur de l’hôpital de Cerdagne.

Il conviendrait toutefois que les conventions de mise à disposition contiennent des dispositions claires sur le cadre juridique dans lequel les personnels sont amenés à intervenir et sur le droit applicable : en effet, en l’absence de précision, la DIRECCTE a confirmé à votre rapporteure que ce serait bien le droit local (espagnol et/ou catalan) qui serait la référence, même si, en vertu du règlement (CE) n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (dit Rome I), les salariés doivent pouvoir réclamer l’application des dispositions qui leurs sont les plus favorables.

En outre, une fois ce postulat posé, toutes les questions ne sont pas résolues pour autant, en particulier s’agissant de mises à disposition en cascade. En effet, si dans le cadre d’une coopération entre le pôle sanitaire cerdan et l’un de ses membres, en l’occurrence le Groupement, la mise à disposition ne doit, en théorie, pas poser de problème, elle concerne néanmoins des personnels qui, par définition, sont déjà mis à la disposition du pôle sanitaire par les membres du groupement de coopération sanitaire (l’UGECAM d’un côté, l’association Alfred Sauvy de l’autre). Là encore, ce contexte particulier nécessiterait que soit explicité clairement dans les conventions à quelle direction les personnels obéissent en fonction de leur cadre de travail.

D’autres questions concrètes se posent également concernant les personnels statutaires de la fonction publique hospitalière. Dans le cadre d’un accident du travail survenu à l’occasion d’une prestation de soins réalisée à l’hôpital de Cerdagne, quelle sera la procédure applicable ? Quelle autorité (employeur ou directeur du Groupement) décidera de l’imputabilité ou non de l’accident au service ? La commission de réforme se réunira-t-elle ?

Il en va de même pour les questions de responsabilité civile. Rappelons que l’article 6 de l’accord-cadre de coopération sanitaire transfrontalière de 2008 précise, d’une part, que c’est le droit local qui s’applique et, d’autre part, que les professionnels et établissements de santé français sont tenus de souscrire une assurance responsabilité civile pour exercer en Espagne dans le cadre d’actions de coopération transfrontalière. Quel sera le coût de cette assurance ? S’agissant des médecins, ce coût devra-t-il être assumé individuellement par chacun d’entre eux ? En cas de mise en jeu de la responsabilité des soignants, quelles seront les règles applicables ? Rappelons qu’en France, les médecins de la fonction publique hospitalière bénéficient, en l’absence de faute personnelle détachable du service, de la protection de leur établissement qui supporte la responsabilité civile des actes qu’ils pratiquent. Comment cette protection fonctionnera-t-elle dans le cadre d’une prestation de service exécutée en Espagne : le Groupement sera-t-il considéré comme responsable ou bien l’établissement employeur ? La question est d’autant plus délicate si l’on se place dans le cadre spécifique de l’activité de radiologie, qui doit être mise en œuvre par le centre hospitalier de Perpignan selon des modalités qui impliqueront la réalisation d’actes par téléradiologie (59).

Il apparaît impératif de pouvoir apporter des réponses claires et précises à toutes ces questions afin que les personnels impliqués soient pleinement informés du cadre juridique et des conditions de travail dans lesquelles ils seront amenés à intervenir. Notons à cet égard que la question de la langue n’est pas non plus anodine : le Groupement ayant trois langues officielles, les personnels devront-ils nécessairement pouvoir s’exprimer dans ces trois langues ? Une telle exigence constituerait vraisemblablement un obstacle de taille pour tous les postulants hors plateau cerdan.

c) L’uniformisation des pratiques médicales

Un autre facteur clé de la réussite du projet transfrontalier réside dans la qualité des réponses qui seront apportées à la population locale en termes d’offre de soins : en clair, il est essentiel de garantir la qualité des prestations sanitaires afin de faire de l’hôpital de Cerdagne un établissement de référence. L’uniformisation des protocoles de soins constitue un élément primordial de cette démarche non seulement pour les patients mais également pour la communauté médicale qui doit s’accorder sur une pratique.

 Dans cette perspective, la constitution d’une « commission des processus cliniques » a été annoncée lors du bureau exécutif du 21 mars dernier. Celle-ci aura pour mission d’homologuer, de coordonner et de garantir la qualité de l’activité médicale. Peu de précisions ont toutefois été données tant sur la composition de cette commission que sur ses modalités de travail. Or, les médecins côté français, notamment ceux que votre rapporteure a rencontrés au centre hospitalier de Perpignan, insistent sur le « besoin d’une formalisation extrêmement précise » de ce qui est attendu de chacun des intervenants. Qu’en est-il par ailleurs de la commission médicale d’établissement ? La « commission des processus cliniques » en fera-t-elle office ou une structure ad-hoc sera-t-elle créée ? Autant de questions sans réponse à ce jour. Enfin, la question de la formation des personnels, qui doit également contribuer à uniformiser les modes opératoires, ne semble pas non plus avoir été abordée.

 Des interrogations ont également été soulevées lors des auditions sur la divergence des pratiques en matière de pharmacie. Le pôle sanitaire cerdan, qui est lui-même en train de créer un groupement de coopération sanitaire de moyens afin de gérer une pharmacie à usage intérieur, a ainsi relevé lors de son audition l’existence de réglementations différentes en France et en Espagne en matière de médicaments. Les listes de produits et dispositifs pharmaceutiques bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) ne se recoupent pas nécessairement, et les recommandations en termes d’utilisation et de prescription peuvent également diverger. Plusieurs exemples concrets ont été donnés à votre rapporteure. Un travail sur les référentiels pharmaceutiques doit donc également être engagé dans le but d’éliminer les médicaments qui ne seraient pas communs ou de mettre au point un système d’alerte en cas de prescription d’un médicament ne disposant pas d’équivalent d’un côté ou de l’autre de la frontière.

Se pose également la question du lieu de délivrance des médicaments : les ordonnances prescrites à l’hôpital de Cerdagne pourront-elles être exécutées indifféremment en France et en Espagne et ce, sans incidence pour le remboursement des patients ?

d) Les questions liées aux naissances et aux décès

Ces questions ont été soulevées, entre autres, par le sénateur-maire François Calvet.

 Dans la plupart des législations nationales, les déclarations de naissance doivent être recueillies par un officier de l’état civil local, y compris lorsqu’il s’agit de ressortissants étrangers. Toutefois, lorsque la loi locale ne s’y oppose pas, comme c’est le cas en Espagne, la déclaration de naissance peut également être reçue par l’officier de l’état civil consulaire territorialement compétent : celui-ci établit aussitôt l’acte de naissance et le conserve dans ses registres. La déclaration doit être faite dans les quinze jours suivant l’accouchement, délai porté à trente jours hors d’Europe ainsi que dans certains pays européens, dont l’Espagne.

Ainsi, d’après les informations transmises par le consulat général de Barcelone, pour les enfants français qui naîtront à l’hôpital de Cerdagne, comme pour les enfants qui naissent aujourd’hui à la fondation Hôpital de Puigcerdá, les naissances pourront être déclarées au consulat général sur présentation du certificat d’accouchement, de la preuve de la nationalité française d’un des parents, et, éventuellement, du livret de famille, sous réserve que la déclaration ait lieu dans le délai de trente jours précité (60).

En revanche, si la déclaration est établie après ce délai de trente jours, l’acte de naissance fera alors l’objet d’une transcription en vertu de l’article 7 du décret n° 62-921 du 3 août 1962 modifiant certaines règles relatives aux actes de l’état civil. La transcription consiste à porter sur les registres consulaires français un acte de l’état civil concernant un ressortissant français et dressé par l’autorité locale dans les formes usitées dans le pays étranger. La demande de transcription doit être accompagnée :

– de la copie de l’acte de naissance étranger et sa traduction ;

– d’un justificatif de nationalité française pour l’un des parents au moins ;

– du livret de famille pour mise à jour ;

– et, pour les enfants nés hors mariage, d’une copie de l’acte relatif à la reconnaissance souscrite par le père, lorsque ce dernier est français.

Dans le cas de l’hôpital de Cerdagne, il est envisagé que la réalisation de ces formalités soit en outre simplifiée et dématérialisée. Notons que la mairie de Bourg-Madame facilite déjà les démarches en remettant aux familles des formulaires pré-remplis. D’après ses propres estimations, le consulat général de Barcelone reçoit en moyenne entre cinq et dix actes de naissance par mois.

 S’agissant de la nationalité des enfants nés à Puigcerdá, rappelons que la possession de la nationalité française par un enfant dépend non pas du fait qu’il soit né ou non en France mais de la situation de ses parents au regard de cette même nationalité. Ainsi, un enfant, qu’il soit né en France ou à l’étranger, est français de naissance, c’est-à-dire par filiation, si au moins l’un de ses parents est français (61).

En revanche, lorsque les deux parents sont étrangers, l’enfant né et résidant en France acquiert la nationalité française à partir de l’âge de 13 ans, sous réserve de remplir certaines conditions d’âge et de durée de résidence. La question qui se pose dans le cas de la naissance à Puigcerdá d’un enfant de parents étrangers résidant en France est donc celle des conditions d’acquisition par ce dernier de la nationalité française. En effet, alors que celle-ci peut être considérée comme quasi-automatique lorsque l’enfant est né et réside en France, son obtention pourrait être compliquée par une naissance sur le sol espagnol. Il s’agit, certes, d’un cas d’école, mais sur lequel néanmoins les services compétents devraient se pencher afin d’éviter d’éventuels imbroglios juridiques.

 S’agissant des déclarations de décès, une procédure similaire aux naissances est applicable : un acte de décès local est établi que l’officier de l’état civil consulaire territorialement compétent peut transcrire, en relation avec la famille, de manière à pouvoir apposer la mention du décès sur l’acte de naissance français du défunt.

 La question du transfert des corps des personnes décédées à l’étranger est en revanche plus complexe. Celle-ci est régie par les dispositions de l’accord de Strasbourg du 26 octobre 1973 sur le transport international des corps des personnes décédées, accord qui prévoit un certain nombre de spécifications techniques applicables aux cercueils utilisés pour procéder au transport des corps. Ainsi, aux termes de l’article 6 de cet accord, le cercueil doit être constitué :

– soit d’un cercueil extérieur en bois dont l’épaisseur des parois ne doit pas être inférieure à 20 mm et d’un cercueil intérieur en zinc soigneusement soudé ou en toute autre matière autodestructible ;

– soit d’un seul cercueil en bois dont l’épaisseur des parois ne doit pas être inférieure à 30 mm, doublé intérieurement d’une feuille de zinc ou de tout autre matière autodestructible.

Or, ces spécifications rendent les cercueils incompatibles avec la plupart des appareils de crémation et empêchent en conséquence de satisfaire les dernières volontés des défunts désirant être incinérés. En effet, pour des raisons sanitaires, le droit français n’autorise pas à procéder à l’ouverture des cercueils afin de transférer le corps dans d’autres cercueils susceptibles de faire l’objet d’une crémation.

L’accord de Strasbourg précise néanmoins dans son article 2 que ses dispositions constituent des « conditions maximales exigibles » pour l’expédition du corps d’une personne décédée mais laissent ouverte la possibilité pour les États parties de s’« accorder des facilités plus grandes par application soit d’accords bilatéraux, soit de décisions prises d’un commun accord dans des cas d’espèce, notamment lorsqu’il s’agit de transfert entre régions frontalières ».

D’après les informations fournies à votre rapporteure, un projet de convention bilatérale serait actuellement en préparation afin de régler le cas du transport des corps des ressortissants français décédés à l’hôpital de Cerdagne de manière à permettre à ces derniers d’être incinérés en France. La future convention devrait porter à la fois sur les spécifications techniques afférentes aux cercueils ainsi que sur les conditions d’intervention des opérateurs funéraires français sur le territoire espagnol. Il semblerait toutefois pour l’heure que ce texte n’en soit qu’au stade de la réflexion et n’ait pas encore fait l’objet de discussions bilatérales.

2. … qui pourraient nécessiter une remise à plat de la gouvernance du Groupement Hôpital de Cerdagne 

Alors que l’ambition aujourd’hui affichée est celle d’une ouverture prochaine de l’hôpital de Cerdagne, on ne peut que s’étonner à la lecture des points qui précèdent du décalage qui existe entre cette attitude volontariste et l’état réel d’impréparation du passage à la phase opérationnelle du Groupement. Bien qu’il soit techniquement possible de mettre l’hôpital en service à l’automne, cela n’en semble pas moins irréaliste au regard des divergences qui se font jour sur la conduite du projet.

Votre rapporteure s’est longuement interrogée sur les raisons d’un tel décalage et y voit la manifestation d’une inadéquation des statuts du Groupement au contexte de coopération transfrontalière dans lequel il s’inscrit. Avec 60 % des voix au conseil d’administration et le droit local comme cadre juridique de référence, la partie catalane exerce de fait le leadership du projet et estime pouvoir projeter dans l’hôpital de Cerdagne une organisation qui cadre parfaitement, d’une part, avec son modèle sanitaire et, d’autre part, avec les attentes de sa population et de ses élus, aussi bien en termes de soins que d’emploi. La partie française, avec 40 % des voix seulement, ne semble aujourd’hui capable que de freiner ou de bloquer les initiatives de son partenaire qui ne seraient pas conformes à ses intérêts. Toutefois, en l’absence de conflit ouvert, les uns continuent à avancer des propositions qui ne sont certes pas acceptées formellement mais qui contribuent à entretenir le sentiment que le projet avance.

Votre rapporteure considère pour sa part que si l’on ne parvient pas à surmonter les points de blocage précédemment listés en trouvant un équilibre acceptable pour les deux parties, la France n’aura d’autre choix que de remettre en question les fondements mêmes du Groupement.

En effet, comme nous l’avons vu plus haut, les statuts de celui-ci organisent la minorité de la partie française qui n’est représentée qu’à hauteur de 40 % au sein de ses instances. Cette répartition initiale des voix et des financements, dont la justification trouve péniblement son origine dans la répartition de la population cerdane – et donc, potentiellement, de la future patientèle de l’hôpital – entre la France et l’Espagne et qui procède peut-être plus prosaïquement de la volonté du précédent Gouvernement de limiter le coût du projet pour l’assurance maladie, apparaît aujourd’hui comme un très mauvais calcul. Elle maximise in fine la participation financière de la France tout en minimisant sa capacité à peser sur les décisions qui doivent être prises. Stratégiquement, c’est une erreur fondamentale de ne pas avoir établi une répartition à 50/50 plaçant les deux partenaires sur un pied d’égalité.

C’est ainsi que l’on se retrouve aujourd’hui dans une situation où la partie catalane, qui dispose de la majorité des voix au conseil d’administration, est en position de force pour décider de la future organisation de l’hôpital et où, la partie française doit se contenter de retarder ces décisions lorsque celles-ci semblent moins servir l’intérêt du projet transfrontalier que celui des partenaires catalans qui y participent.

Considérant en outre qu’à l’heure actuelle, la présidence du Groupement est assurée par la directrice générale de l’agence régionale de santé du Languedoc-Roussillon et celle du bureau exécutif par un catalan et que le directeur de l’hôpital est un fonctionnaire catalan hiérarchiquement dépendant du président du bureau exécutif, on comprend bien que le projet est très largement « verrouillé » par la partie catalane.

Ainsi, le Groupement, à la fois du fait de ses statuts et en raison d’une sorte de corrélation fonctionnelle entre direction de l’hôpital et direction du Groupement, fonctionne en réalité plus comme une dépendance des services de santé de Catalogne que comme un organisme transfrontalier. La partie catalane souhaiterait d’ailleurs entériner en droit cette situation de fait en modifiant ses statuts afin d’en faire officiellement un démembrement de CatSalut. Il s’agit là d’une demande réitérée à plusieurs reprises lors des auditions menées par votre rapporteure.

Alors que le dernier conseil d’administration s’est tenu le 28 septembre 2012, le report sine die de la réunion qui devait avoir lieu fin mai pour approuver le contenu des conventions que le Groupement doit conclure avec ses partenaires est révélateur du dysfonctionnement de la gouvernance. La partie catalane semble en effet tenir pour acquis ces projets alors même que leur contenu apparaît clairement inacceptable pour la partie française qui n’a aujourd’hui d’autre choix que de refuser de les entériner. Tout se passe comme si la partie catalane menait à bien le projet d’hôpital transfrontalier comme étant le sien propre, tout en comptant néanmoins sur les financements et les compétences de la partie française.

C’est pourquoi votre rapporteure considère qu’il appartient à la représentation nationale qui, depuis deux ans, autorise à l’occasion du vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale, l’octroi de 8 millions d’euros pour le fonctionnement du futur hôpital, de s’interroger sur les conditions de mise en œuvre du projet. Alors que les élus que nous sommes sont témoins au quotidien des difficultés qu’éprouvent les hôpitaux publics français à assumer leurs missions avec les budgets dont ils disposent, comment pourrions-nous accepter que la France ne bénéficie pas d’un juste retour dans le cadre du financement de l’hôpital transfrontalier ?

Si tel ne pouvait être le cas, seules deux solutions pourraient être envisagées : revoir les statuts du Groupement afin de permettre aux parties contractantes de disposer du même nombre de voix au sein du conseil d’administration et de contribuer à part égale au financement de l’hôpital, ou se retirer du projet. La première éventualité est d’autant plus envisageable pour la France qu’elle n’entraînerait, selon toute vraisemblance, aucun surcoût, le budget initial de 20 millions d’euros paraissant surestimé.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Mme la présidente Catherine Lemorton. Hormis pour les traités européens et les accords de défense, il est rarissime qu’une commission se saisisse pour avis d’un projet de loi autorisant la ratification d’un accord international, ces textes étant systématiquement renvoyés à la Commission des affaires étrangères.

J’ai pourtant souhaité, à la demande de notre collègue Ségolène Neuville, que notre commission se saisisse pour avis du projet de loi autorisant la ratification de l’accord-cadre entre la République française et le Royaume d’Espagne sur la coopération sanitaire transfrontalière. J’ai répondu d’autant plus favorablement à cette demande que je suis moi-même élue d’une région frontalière avec l’Espagne.

La mise en place d’un hôpital transfrontalier à Puigcerdá, dans la partie catalane de la Cerdagne est un exemple concret de la coopération entre la France et l’Espagne qui illustre la pertinence de la coopération transfrontalière mais également les difficultés pratiques, parfois insoupçonnées, qu’elle engendre.

En application de l’article 128 du règlement de notre assemblée, je vous rappelle que les traités ou accords internationaux dont la ratification est demandée ne peuvent être amendés, l’Assemblée ne pouvant que conclure à l’adoption, au rejet ou à l’ajournement du projet de loi autorisant sa ratification. Enfin, je vous indique que ce projet de loi sera discuté en séance publique le jeudi 27 juin au matin.

Mme Ségolène Neuville, rapporteure pour avis de la Commission des affaires sociales. En 2008, la France et l’Espagne ont signé un accord cadre en vue de favoriser le développement de coopérations entre les acteurs de santé français et espagnols dans les zones frontalières. Cet accord, reprenant les dispositions d’accords préalablement signés entre la France et l’Allemagne, et entre la France et la Belgique, a pour objet de faciliter la conclusion de conventions de coopération permettant à des professionnels de santé d’exercer de part et d’autre de la frontière et autorisant la prise en charge des patients quel que soit le lieu où sont dispensés les soins.

Des conventions de coopération sanitaire antérieures à cet accord permettent déjà aux établissements français et espagnols de faire en sorte que les patients puissent être pris en charge dans un hôpital situé de l’autre côté de la frontière de leur pays. Néanmoins c’est en Cerdagne, territoire de montagne frontalier entre les Pyrénées Orientales et la Catalogne, que l’on trouve la manifestation la plus aboutie de coopération sanitaire transfrontalière, à savoir le premier hôpital transfrontalier européen dont la construction est d’ores et déjà achevée.

Si notre commission s’est saisie pour avis du projet de loi autorisant la ratification de l’accord franco-espagnol de 2008, c’est qu’elle souhaite à la fois étudier les ressorts de la coopération sanitaire transfrontalière, qui concerne potentiellement de nombreux territoires, et mettre en lumière un projet pionnier à l’échelle européenne. Outre son rôle en matière d’amélioration de l’accès aux soins dans un territoire enclavé, cet hôpital est en effet un véritable laboratoire de coopération transfrontalière pour toute l’Europe : il constitue un test grandeur nature.

La France avait déjà signé en 2005 des accords de coopération avec la Belgique et l’Allemagne en vue d’instaurer des coopérations hospitalières ponctuelles. Ainsi, par exemple, l’accord franco-allemand permet de soigner en Allemagne les grands brûlés d’Alsace et organise l’aide médicale d’urgence en facilitant le transport de personnes par le SAMU ou le SMUR français vers un hôpital situé de l’autre côté de la frontière. Et l’inverse est également possible. Des coopérations ponctuelles ont également été mises en place entre la France et l’Espagne, notamment au Pays Basque ou dans les Pyrénées orientales. Ainsi, en 2003, l’assurance maladie a signé avec l’hôpital de Puigcerdá une convention aménageant le tiers payant afin de permettre aux Français résidant sur la zone frontalière d’aller se faire soigner en Espagne sans en avancer les frais.

Afin d’aller plus loin, l’accord-cadre conclu le 27 juin 2008 à Saragosse et son accord d’application, signé le 9 septembre 2008 à Angers, renvoient à des conventions locales le soin de définir les régimes de prise en charge des soins et de participation des professionnels de santé et des établissements à des actions de coopération sanitaire dans les régions Aquitaine, Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, pour la France, et dans les communautés du Pays basque, de Navarre, d’Aragon et de Catalogne du côté espagnol.

Cette coopération permet d’éviter la duplication non justifiée de moyens sur un bassin de population. En effet, en période de budget contraint, ce qui est le cas de l’Espagne comme de la France, il serait totalement injustifié de financer des établissements hospitaliers des deux côtés de la frontière.

Des conventions pourront désormais être passées directement, en France, par les agences régionales de santé (ARS) et les unions régionales des caisses d’assurance maladie (URCAM), et en Espagne, par les départements de santé des communautés. Je rappelle qu’en l’absence de tels accords, les ministères sont seuls compétents pour conclure ces conventions. Celles-ci pourront contenir les modalités d’intervention des structures de soins, organismes de sécurité sociale et professionnels de santé, définir l’organisation des secours d’urgence, du transport sanitaire des patients et de la continuité des soins et déterminer les critères d’évaluation et de contrôle de la qualité et de la sécurité des soins ainsi que les conditions de prise en charge des patients dans les établissements de santé français et espagnols.

Le premier établissement transfrontalier européen se trouve donc en Cerdagne. Le plateau cerdan est un territoire de montagne situé à une altitude comprise entre 1 200 et 1 500 mètres et entouré de sommets culminant à près de 3 000 mètres. Il est relié d’un côté à Perpignan et, de l’autre, à Barcelone, villes toutes deux situées à plus de 100 km, ce qui représente, s’agissant de routes de montagne, entre 1 heure 30 et deux heures de trajet. Ce territoire compte 33 000 habitants, dont 56 % d’Espagnols et 44 % de Français.

L’offre de soins, du côté français, est assurée par une antenne du SMUR de l’hôpital de Perpignan et un certain nombre de médecins libéraux et de centres de soins de suite et de rééducation. Mais la clinique chirurgicale la plus proche se trouve à Prades, à une heure de route, et la maternité est à Perpignan, à près de deux heures de route. C’est sans doute la raison pour laquelle 85 % des séjours hospitaliers sont effectués à l’extérieur du territoire.

Les patients espagnols, quant à eux, peuvent se rendre à la fondation Hôpital de Puigcerdá, mais c’est un hôpital de petite taille et vétuste qui ne dispose que de trente lits de MCO (médecine, chirurgie, obstétrique), d’un service d’urgence et d’un plateau technique. D’ailleurs 33 % des séjours hospitaliers des cerdans espagnols sont réalisés en dehors du territoire.

Bien que les patients français, depuis la convention signée en 2003 entre l’hôpital espagnol de Puigcerdá et l’assurance maladie, bénéficient du tiers payant dans le cadre des urgences et des soins obstétriques, seulement 10 % des patients des urgences sont français, et sur 350 accouchements annuels réalisés à la maternité, une centaine seulement concerne des femmes françaises.

Cette situation a amené les gouvernements français et espagnol, en 2005 et en 2007, à faire des déclarations d’intentions en vue d’aboutir à un projet d’hôpital transfrontalier sous la forme d’un groupement européen de coopération territoriale (GECT). La seconde déclaration d’intention a défini le mode de gouvernance du futur groupement et réparti les voix au sein du conseil d’administration ainsi que la participation de chaque pays au financement suivant la clé de répartition suivante : 40 % pour la France et 60 % pour l’Espagne.

Le nouvel hôpital, construit entre 2009 et 2012 sur le territoire espagnol, a nécessité un investissement de 31 millions d’euros, dont un peu plus de 18 millions provenant du Fonds européen de développement économique régional (FEDER).

L’hôpital pourrait fonctionner dès l’automne 2013, mais il subsiste de nombreux obstacles sur lesquels je souhaite vous alerter.

Tout d’abord, le siège du Groupement est situé sur le territoire espagnol. C’est donc le droit espagnol qui s’applique, notamment le droit du travail. Sauf que le droit français est plus favorable et qu’en théorie, chaque salarié a le droit de choisir le droit qui lui est le plus favorable.

Quels sont les organes de gouvernance du Groupement ? Le conseil d’administration, dont je vous rappelle que 60 % des membres sont espagnols, et le directeur de l’hôpital qui, conformément aux statuts, est un haut fonctionnaire de la fonction publique espagnole. Quant au conseil consultatif, il est composé d’élus locaux mais il ne joue qu’un rôle consultatif.

Comment sera financé l’hôpital ? Dans la mesure où son activité est encore mal connue, il sera financé, au moins pour les cinq premières années de son fonctionnement, par une dotation globale – ce qui, à nos yeux de Français, est très original. Son budget annuel est évalué à 20 millions d’euros, soit 12 millions pour la Catalogne et 8 millions pour la France.

Qui travaillera à l’hôpital transfrontalier ? Si le Groupement emploie directement les personnels, le droit espagnol s’applique, ce qui pose un réel problème. Il a donc été décidé d’adopter un système de prestations de services consistant à mettre des personnels à la disposition de l’hôpital transfrontalier. Ce système, en vigueur en Catalogne, pose un certain nombre de difficultés, notamment en termes de responsabilité. Dans certains cas il pourra s’agir de mises à disposition par un organisme rassemblant déjà deux structures de soins : dans ces conditions, il sera difficile de savoir qui dirige les salariés.

Les Catalans ont prévu de confier à la fondation Hôpital de Puigcerdá tout le secteur MCO – qui regroupe, je le répète, la médecine, la chirurgie et l’obstétrique. Mais dans un hôpital, presque tous les actes relèvent de l’un de ces trois domaines ! Il reste la radiologie – celle-ci sera confiée à l’hôpital de Perpignan – et la logistique, à savoir le ménage et la restauration, qui sera confiée à un groupement de coopération sanitaire français. Cela signifie que les soignants seront catalans tandis que les personnels chargés de la cuisine et du ménage seront français.

Qui ira se faire soigner à l’hôpital de Cerdagne ? Comme vous le savez, les patients français ont le libre choix de se faire soigner là où ils le souhaitent. Feront-ils le choix de l’hôpital transfrontalier si tous les personnels soignants sont espagnols, si aucun protocole de soins commun n’est élaboré – ce qui est encore le cas aujourd’hui, le projet médical n’ayant pas progressé – et s’il n’existe pas de liens avec les médecins libéraux français exerçant sur le territoire de Cerdagne ? Si la situation n’évolue pas, nous verrons se reproduire la situation constatée à l’hôpital actuel de Puigcerdá, qui ne compte que 10 % de patients français dans les services d’urgence et 6 % de Français parmi les patients qui effectuent des séjours hospitaliers.

Un certain nombre d’incertitudes persistent donc.

Tout d’abord, à quelle direction les personnels devront-ils obéir en cas de mises à disposition en cascade ?

En matière de responsabilité, nous savons que les personnels soignants français qui exerceront en territoire espagnol devront souscrire une assurance civile particulière. Mais quel établissement sera responsable en cas de plainte ? Qui sera responsable lorsqu’une plainte sera déposée à l’encontre d’un radiologue français envoyé par l’hôpital de Perpignan ? En France, en l’absence de faute grave, l’établissement public protège son agent. Dans le cas de l’hôpital de Cerdagne, cette responsabilité incombera-t-elle au Groupement ou à l’établissement qui a mis le praticien à sa disposition ?

S’agissant de l’uniformisation des pratiques médicales, la création d’une commission a été annoncée en mars 2013 mais elle n’a pas commencé ses travaux. On peut s’en étonner quand on sait que l’hôpital devait ouvrir à l’automne 2013.

Comment seront prescrits les médicaments qui n’ont pas reçu la même autorisation de mise sur le marché en Espagne et en France ? Les ordonnances délivrées par l’hôpital de Cerdagne seront-elles valables dans toutes les pharmacies, du côté espagnol comme du côté français, et seront-elles prises en charge immédiatement ?

Enfin, quelle langue devront parler les personnels dans un hôpital qui reconnaît trois langues officielles : l’espagnol, le catalan et le français ? Les documents seront rédigés dans les trois langues, mais faudra-t-il recruter des personnels qui parleront espagnol, catalan et français ? Certes, en Cerdagne, tout le monde parle catalan, mais trouvera-t-on les ressources, en matière de personnels, sur le seul territoire cerdan ? C’est une autre question que nous devons nous poser.

Quelle est la marge de manœuvre de la France ? Comme vous l’avez compris, notre pays est minoritaire au sein des instances décisionnelles du Groupement. La France, si elle n’est pas d’accord avec telle ou telle décision, ne peut que retarder le processus. Mais alors que la construction de l’hôpital est terminée depuis presque un an et que dès la fin du mois d’août, il sera totalement équipé – avec scanner et IRM –, la date de son ouverture n’est pas fixée puisque les conventions de prestations de service qui ont été rédigées par les Espagnols, ne sont, à ce jour, pas encore signées par les Français. Ce qui devait être un beau projet européen risque donc de n’être qu’un nouvel hôpital espagnol.

Il n’est pas question pour nous de remettre en cause l’accord de coopération sanitaire passé entre la France et l’Espagne mais de nous interroger sur le bien-fondé du financement de la France – à hauteur de 8 millions d’euros par an je le rappelle – si le projet n’est pas sérieusement réorienté vers un hôpital réellement transfrontalier.

Comment sortir de cette impasse ? Il faut, à mon sens, remettre en cause la gouvernance actuelle, répartie à hauteur de 60 % pour l’Espagne et de 40 % pour la France, ce qui ne permet pas à la France de peser sur les décisions et l’empêche de participer réellement au projet.

Ce test grandeur nature devrait permettre d’anticiper les problèmes susceptibles de ralentir les futurs projets de coopération sanitaire transfrontalière et de réfléchir à leur mode de gouvernance. Aux dires des personnes que nous avons auditionnées, la répartition 60/40 a été choisie en fonction du prorata de la population – 44 % de Français contre 56 % d’Espagnols – mais personne n’avait compris que cela poserait des problèmes de gouvernance.

Ces précisions apportées, je ne souhaite naturellement pas remettre en cause l’accord-cadre de coopération et je demande à la Commission de donner un avis favorable à l’adoption du projet de loi autorisant sa ratification.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je vous remercie d’avoir mis en lumière des questions qui se poseront pour toutes les structures transfrontalières qui seront mises en place à l’avenir. Cela étant, il n’est pas question pour nous, en effet, de revenir sur la ratification de l’accord.

M. Gérard Sebaoun. Je vous remercie, madame la rapporteure pour avis, pour la clarté de votre propos sur un sujet que nous avions mal anticipé et qui montre qu’une idée vertueuse peut générer des problèmes d’une grande complexité. Votre analyse grandeur nature nous a permis de prendre conscience de toutes ces difficultés, que les autorités françaises ont mal appréhendées. Pourtant, la coopération a vocation à perdurer, voire à se développer, afin d’optimiser les moyens mis à la disposition des patients.

Comme vous, je pense que nous ne devons pas remettre en cause l’accord franco-espagnol mais faire preuve de vigilance. Vous nous avez indiqué des pistes de travail et nous vous en remercions. Le groupe socialiste vous suivra et donnera un avis favorable à l’adoption du projet de loi.

M. Jean-Pierre Door. Je vous remercie à mon tour, madame la rapporteure pour avis, de nous avoir éclairés sur ces sujets relevant de la programmation 2007-2013 du FEDER.

L’accord-cadre entre la France et l’Espagne va dans le bon sens, car la mutualisation de moyens pour renforcer l’accès aux soins est un atout pour les populations frontalières.

Les questions que vous avez soulevées sont tout à fait justifiées, mais elles trouveront sans doute réponse dans le temps. Ainsi, nous reparlerons de la contribution de 8 millions d’euros de la France à l’occasion de l’examen d’une prochaine loi de financement de la sécurité sociale.

Quoi qu’il en soit, le groupe UMP approuve la ratification de l’accord sur la coopération sanitaire franco-espagnole.

M. Élie Aboud. Madame la présidente, le projet de loi sera-t-il examiné par l’Assemblée nationale selon la procédure d’examen simplifiée ou fera-t-il l’objet d’un débat en séance publique ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il sera examiné suivant la procédure d’examen simplifiée, sauf si le président d’un groupe, le Gouvernement, le ou la présidente de la commission saisie au fond, en l’occurrence Mme Elisabeth Guigou, présente une demande en conférence des présidents.

M. Élie Aboud. Madame la rapporteure, vous connaissez bien la cartographie médicale et sociale de la région et vous avez posé les vraies questions. Cela étant, notre groupe approuve la ratification de l’accord entre la France et l’Espagne.

Vous n’avez pas abordé la question de la ventilation des patients admis à l’hôpital transfrontalier. C’est un point important, surtout au regard des sommes que notre pays engage dans cette affaire. Je souhaite pour ma part qu’en cas de complications, les patients français conservent le libre choix du lieu où ils seront transférés.

Savez-vous, madame, que les médecins du plateau cerdan, à Osséja, Font-Romeu, Bourg-Madame, souscrivent une assurance responsabilité civile professionnelle espagnole, moins chère que celle qui leur est proposée de notre côté de la frontière ? Ce point doit également être clarifié.

La télémédecine a été gravée dans le marbre par la « loi HPST » : a-t-elle sa place dans la coopération franco-espagnole ?

En ce qui concerne le financement par une dotation globale, je pense pour ma part qu’il n’existait pas d’autre solution pour un hôpital de ce type à vocation transfrontalière.

Enfin, la nouvelle structure entrera-t-elle dans le cadre de l’attribution des équipements lourds par l’agence régionale de santé, au détriment des autres établissements de la région ?

Mme la rapporteure pour avis. Je vous remercie pour vos commentaires qui laissent entendre que vous avez compris les enjeux de ce dossier.

Avant de résoudre le problème du libre choix pour les patients de leur transfert en cas de complications, il convient de savoir vers quelle structure de soins se dirigeront les patients français car aujourd’hui ils consultent peu les médecins espagnols actuellement en poste à l’hôpital de Puigcerdá. Or, en l’état actuel du dossier, les patients seraient pris en charge quasi exclusivement par les médecins espagnols qui exercent déjà dans cet hôpital. Nous nous poserons la question du libre choix des patients lorsque le nombre de praticiens français et espagnols sera équilibré. Pour faire face à la pénurie de spécialistes, il est prévu que des médecins français de l’hôpital de Perpignan ou de la clinique de Prades puissent venir dispenser des consultations. Cela rendra service à la population, mais ne résoudra pas le problème de la prise en charge des patients hospitalisés par des personnels soignants espagnols.

Les médecins de Cerdagne ont souscrit une assurance responsabilité civile, mais ce n’est pas le cas des médecins de l’hôpital de Perpignan. Les radiologues, par exemple, devront souscrire une assurance responsabilité civile supplémentaire.

L’usage de la télémédecine est prévu pour la radiologie. Les manipulateurs en radiologie devront a fortiori recevoir une formation plus complète puisqu’ils seront amenés à réaliser seuls certains examens avant de transmettre les images à Perpignan. Mais ils ne sont pas encore recrutés et dans la mesure où nous ne connaissons pas le système d’information qui sera mis en place, l’hôpital de Perpignan ne peut pas avancer sur ce dossier.

Non, cher collègue, le fait d’accorder une IRM à l’hôpital transfrontalier ne privera pas les autres établissements puisqu’il dispose d’un budget sacralisé. Cette question ne se posera pas pendant les cinq premières années de son fonctionnement. Il n’y aura donc aucune concurrence, en matière d’équipements, entre l’hôpital transfrontalier et les autres hôpitaux de la région Languedoc-Roussillon.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article unique du projet de loi autorisant la ratification de l’accord-cadre entre la République française et le Royaume d’Espagne sur la coopération sanitaire transfrontalière.

ANNEXE 1
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Ø Auditions à Paris :

– M. Olivier Ray, conseiller auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, Mme Marisol Touraine,

– M. Stéphane Mantion, conseiller général des établissements de santé à la Direction générale de l’offre de soins (DGOS), ministère des affaires sociales et de la santé ;

– Mme Martine Aoustin, directrice générale de l’agence régionale de santé (ARS) du Languedoc-Roussillon ;

– M. Jean-Yves Le Quellec, directeur de l’offre de soins et de l’autonomie à l’ARS du Languedoc-Roussillon.

Ø Auditions en Cerdagne :

– M. René Bidal, préfet des Pyrénées-Orientales ;

– Mme Alice Coste, sous-préfète de Prades.

• Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) du Languedoc-Roussillon

– Mme Géraldine Morillon-Bofill, responsable de l’unité territoriale des Pyrénées-Orientales.

• Centre hospitalier de Perpignan

– Mme Brigitte Rouvet, directrice financière ;

– Mme Anne-Marie Monier, directrice adjointe chargée des ressources humaines ;

– Mme Sylvie Marty, directrice adjointe chargée des moyens opérationnels ;

– Dr. Jean-René Mauras, vice-président de la commission médicale d’établissement ;

– Dr. Philippe Smadja, chef du service de l’imagerie médicale ;

– M. Rémi Ahfir, ingénieur biomédical.

Pôle sanitaire cerdan

– Mme Rose de Montella, présidente de l’Association Joseph Sauvy ;

– M. Marc Etienne, président de l’UGECAM ;

– M. Yves Barbe, directeur de l’Association Joseph Sauvy et administrateur du pôle sanitaire cerdan ;

– M. Xavier Bourdin, directeur du pôle sanitaire cerdan.

Elus locaux de Cerdagne

Basse Cerdagne

– M. Albert Piñeira Brosel, maire de Puigcerdá, président de la fondation Hôpital de Puigcerdá.

Haute Cerdagne et Capcir

– M. Jean-Jacques Fortuny, maire de Bourg-Madame ;

– M. Georges Armengol, maire de Saillagouse, conseiller général ;

– Mme Suzanne Delieux, maire de Porta, conseillère régionale.

•  Groupement européen de coopération territoriale Hôpital de Cerdagne

– M. Josep Pifarre i Paredero, membre du conseil d’administration, directeur d’unité de la région sanitaire des Hautes Pyrénées et Aran, CatSalut ;

– M. Francesc Brosa i Llinares, membre du conseil d’administration et du bureau exécutif, directeur adjoint de CatSalut ;

– M. Jean-Yves Le Quellec, membre du conseil d’administration et du bureau exécutif, directeur de l’offre de soins et de l’autonomie de l’ARS Languedoc-Roussillon ;

– Mme Catherine Barnole, membre du bureau exécutif, déléguée territoriale adjointe des Pyrénées-Orientales de l’ARS Languedoc-Roussillon ;

– M. Victoria Peralta, directeur général de l’Hôpital de Cerdagne ;

– Mme Manon Marrel, directrice des admissions.

ANNEXE 2
HISTORIQUE DU PROJET D’HÔPITAL TRANSFRONTALIER

2003 : signature le 10 janvier d’un protocole d’accord entre la Generalitat de Catalogne et le Conseil régional du Languedoc Roussillon puis lancement en juillet de l’étude de faisabilité pour la création d’un hôpital commun transfrontalier dans le cadre du projet Interreg III et de l’Eurorégion.

2005 : signature le 17 octobre d’une déclaration conjointe d’intention entre le ministère de la santé et des solidarités de la République française et le ministère de la santé de la Generalitat de Catalogne dans le domaine de la prise en charge sanitaire transfrontalière en vue de l’accès à l’assistance de proximité des patients de Cerdagne et du Capcir.

2006 : création au niveau européen d’un nouvel instrument de coopération transfrontalière : le groupement européen de coopération territoriale (GECT), défini par le règlement (CE) n° 1082/2006

2007 : signature le 19 mars d’une charte d’intentions par laquelle les ministres français et catalan de la santé s’engagent à créer un groupement européen de coopération territoriale, encadrer et gérer le projet d’hôpital transfrontalier.

Réunion en octobre à Paris au cours de laquelle sont arrêtées les participations financières des deux parties pour la construction de l’hôpital. La France prendra en charge 40 % du montant de la construction du nouvel hôpital de Cerdagne, et la Catalogne 60 %, une fois déduits les fonds versés dans le cadre du FEDER.

Au mois de décembre, la mairie de Puigcerdà cède les terrains pour la construction de l’hôpital de Cerdagne.

2008 : Le gouvernement de la Generalitat de Catalogne autorise la construction de l’hôpital de Cerdagne (juillet).

2009 : Début des travaux de construction en février et annonce en mars par l’Autorité de gestion du programme de coopération territoriale Espagne – France – Andorre 2007-2013 (POCTEFA) d’une subvention européenne pour la construction de l’hôpital de Cerdagne à hauteur de 60 % de son coût global.

2010 : Signature le 26 avril de la convention constitutive du Groupement Européen de Coopération Territoriale – Hôpital de Cerdagne (GECT-HC).

2012 : fin des travaux de construction de l’hôpital de Cerdagne.

2013 : fin de l’équipement de l’hôpital. Ouverture prévue pour l’automne.

ANNEXE 3
ORGANIGRAMME GROUPEMENT EUROPÉEN DE COOPÉRATION TERRITORIALE - HÔPITAL DE GERDAGNE

CONSEIL D’ADMINISTRATION

       
 

14 membres

STATUTS

PERSONNALITÉS

Catalogne

1

Le conseiller du ministère de la santé ou la personne qu’il délègue

M. Boi RUIZ, conseiller de la santé

 

1

Le directeur du service catalan de la santé

M. PADROSA i Macias, directeur de CatSalut

 

6

Six personnes du Ministère de la santé dont un membre du gouvernement de l’Espagne

M. Francesc BROSA i LLINARES, directeur Adjoint de CatSalut,
M. Carles JAUME i FERNANDEZ, représentant du gouvernement espagnol à Girone
M. Ramon MOLINER i SERRA, président du conseil comarcal de Cerdagne
M. Albert PINIERA i BROSEL, maire de Puigcerdá
M. Josep PIFARRE i PAREDERO, directeur d’unité de la région sanitaire des Hautes Pyrénées et Aran (CatSalut)
Mme Eva SANCHEZ BUSQUES, directeur des patrimoines et des investissements

France

4

Quatre représentants du gouvernement de la république française

M. Jean-Yves LE QUELLEC, directeur de l’offre de soins et de l’autonomie à l’ARS du Languedoc-Roussillon
M. Stéphane MANTION, chef de projet affaires européennes et des relations internationales de la direction générale de l’offre de soins
Mme LABLAME, chef de division des affaires communautaires et internationales de la direction de la Sécurité Sociale
M. LAVAL, trésorier du centre hospitalier de Perpignan

 

1

Le directeur de l’agence régionale de santé de Languedoc Roussillon

Mme Martine AOUSTIN, directrice générale de l’ARS du Languedoc Roussillon,

 

1

Un représentant de la CNAMTS

M. CASTELLETTA, directeur de la caisse primaire d’assurance maladie des Pyrénées-Orientales

La présidence du CA est exercée alternativement tous les 2 ans par le gouvernement de la Catalogne en la personne nommée par le conseiller du ministère de la santé
du Gouvernement parmi les représentants du CA, et pour la République française en la personne nommée par le directeur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins
parmi les représentants du CA

CONSEIL CONSULTATIF

       
 

14 membres

STATUTS

PERSONNALITÉS

Catalogne

8

Huit membres désignés par le ministère de la santé parmi les membres de collectivités locales et personnes qualifiées

M. Jaume ADSERA PUIG, membre du conseil de la santé de Cerdagne
M. Alfons CASAMAJOR i CARRERA, maire de Ger
M. Antoni LARA SAEZ, président de l’assemblée locale de la croix rouge de la Cerdagne
M. Joan POUS i PORTA, membre du conseil de la santé de Cerdagne
M. Xavier PORTA POUS, maire de Bellver de Cerdagne
Mme Silvia ORRIOLS i PALMERO, maire de Llivia
M. Isidre RIBERA i GRAU, maire d’Alp
Dr Enric SUBIRATS BAYEGO, médecin

France

3

Personnalités qualifiées désignées par le ministre de la santé sur proposition du directeur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins

M. François CALVET, sénateur maire du Soler
Mme Rose DE MONTELLA, présidente de l’Association Joseph Sauvy
poste vacant (suite au décès du Dr Montané)

 

3

Représentants des collectivités locales :

Maire de Bourg Madame

M. Jean-Jacques FORTUNY, maire de Bourg-Madame

 

 

Conseiller général du canton de Saillagouse

M. Georges ARMENGOL, conseiller général du canton de Saillagouse

 

 

Conseiller régional de Languedoc-Roussillon

Mme Suzanne DELIEUX, conseillère régionale du Languedoc-Roussillon

       

BUREAU EXÉCUTIF

       

Catalogne

3

 

M. Francesc BROSA i LLINARES

 

 

 

Mme Eva SANCHEZ BUSQUES

 

 

 

M. Francesc FERNANDEZ i ENRICH

France

2

 

M. Jean-Yves LE QUELLEC

 

 

 

Mme Catherine BARNOLE, déléguée territoriale adjointe des Pyrénées-Orientales de l’ARS du Languedoc-Roussillon

       

DIRECTION GÉNÉRALE

       

Catalogne

 

 

M. Victoria PERALTA, directeur général

France

 

 

poste vacant

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