Adrien, Etienne, Pierre de Gasparin

1783 - 1862

Informations générales
  • Né le 29 juin 1783 à Orange ( - Généralité de Provence - France)
  • Décédé le 7 septembre 1862 à Orange (Vaucluse - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Monarchie de Juillet - Chambre des députés
Législature
Ire législature
Mandat
Du 6 novembre 1830 au 31 mai 1831
Département
Vaucluse

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Député de 1830 à 1831, pair de France et ministre, né à Orange (Généralité de Provence, France) le 29 juin 1783, mort à Orange (Vaucluse) le 7 septembre 1862, fils du conventionnel Thomas Augustin de Gasparin et de Marie-Anne-Marguerite de Serre, il suivit la carrière militaire et fut attaché comme officier de cavalerie à l'état-major de Murat pendant la campagne de Pologne (1806); mais, forcé par une blessure reçue à Eylau de quitter le service, il rentra dans sa famille et se livra aux études agronomiques.

Les nombreux mémoires qu'il adressa aux sociétés des départements, ainsi qu'à l'Académie des sciences, lui valurent une certaine réputation d'agronome et d'économiste ; il traita notamment du Croisement des races (1810), de la Gourme des chevaux (1811), et obtint des récompenses à Lyon et à Paris pour ces travaux. On remarqua ensuite une étude de M. de Gasparin sur la Culture de la garance (1815), une Histoire de la ville d'Orange et de ses antiquités (1815), son Manuel de l'art vétérinaire (1817), où il résumait tout ce qu'il avait vu dans les dépôts de chevaux malades dont il avait eu l'inspection durant sa carrière militaire; son mémoire sur les Maladies contagieuses des bêtes à laine (1821), qui remporta le prix proposé par la Société royale d'agriculture; son Mémoire sur l'éducation des mérinos (1823), comparée à celle des autres races. Le Guide des propriétaires de biens ruraux affermés (1829) fut encore couronné par la Société royale d'agriculture.

Après 1830, M. de Gasparin qui, jusque-là, était resté dans les rangs de l'opposition, adhéra au gouvernement de Louis-Philippe, et se fit élire député du 2e collège de Vaucluse (Carpentras), le 6 novembre 1830, par 88 voix sur 152 votants et 208 inscrits, en remplacement de M. Duplessy, démissionnaire.

Mais il entra presque aussitôt dans l'administration, et ses occupations ne lui permirent pas de suivre les délibérations de la Chambre. Il fut chargé successivement, de 1831 à 1835, des préfectures de la Loire, de l'Isère et du Rhône. Il se trouvait à Lyon, en 1834, lorsque éclata la sanglante insurrection des mutuellistes. Le mutuellisme était l'association des ouvriers en soie et chefs d'atelier, réunis dans un but de mutuelle assistance. Par suite d'un ralentissement notable dans la fabrication lyonnaise, la situation des ouvriers était devenue cruelle. Une crise était imminente : une réduction sur le prix des peluches la précipita. Les ouvriers en peluche invoquèrent l'appui de leurs camarades des autres ateliers, et alors, obéissant au principe de solidarité, la société mutuelliste décida la suspension générale des métiers (12 février 1834): deux jours après, vingt mille métiers à Lyon étaient arrêtés. Aussitôt la terreur se répandit dans la ville; l'aristocratie industrielle, dont le Courrier de Lyon était l'organe, somma le pouvoir de prendre des mesures énergiques et de châtier « l'insolence » des ouvriers. M. de Gasparin, préfet du Rhône, répondit à cet appel avec un empressement d'autant plus vif, que le gouvernement voyait là une excellente occasion de livrer bataille au parti républicain et à la Société des Droits de l'homme, en les englobant dans l'affaire. Cependant les mutuellistes, pour la plupart indifférents aux questions politiques, ne luttaient que pour une question de salaire; après avoir fait des ouvertures d'accommodement, qui furent dédaigneusement repoussées, ils invoquèrent la médiation de l'autorité: M. de Gasparin répondit que le pouvoir n'avait pas charge d'intervenir dans les querelles industrielles. En présence de cette situation, plusieurs républicains lyonnais, de leur propre initiative, résolurent de s'interposer entre les fabricants et les mutuellistes. Ces derniers furent invités, en termes pressants, à reprendre les travaux interrompus, et MM. Baune, Jules Séguin, etc., coururent d'atelier en atelier pour y prêcher la résignation et le calme. Cédant à ces influences, le conseil exécutif des mutuellistes ordonna la reprise des travaux et fut obéi. Le 22 février 1834, tous les métiers battaient à Lyon comme à l'ordinaire; le calme était rentré dans laville. Mais on y apprit bientôt la loi nouvelle contre les associations, et le peuple se trouva rejeté dans la révolte. Se voyant directement menacés, les mutuellistes s'assemblèrent en tumulte, signèrent une protestation au nombre de 2,540, et jurèrent de ne « reculer devant aucun sacrifice pour la défense d'un droit qu'aucune puissance humaine ne saurait leur ravir ». De tous côtés, à la Croix-Rousse, à Saint-Just, à Saint-Georges, on s'encouragea à la résistance; mutuellistes tailleurs, cordonniers, chapeliers, ouvriers de toute espèce, membres de la Société des Droits de l'homme, tous étaient devenus soldats de la même cause. L'arrestation de plusieurs mutuellistes enflamma encore les esprits. Les sections furent en permanence, on adopta pour mot d'ordre: Association, résistance et courage. De son côté, M. de Gasparin, confiant dans les ressources militaires dont disposait l'autorité, laissa grandir l'insurrection, et dans une conférence avec le lieutenant général Aymard, M. Chégaray et autres, s'opposa à toute mesure préventive, telle que l'occupation de la place Saint-Jean par les troupes, qui eût interdit à la foule les approches du tribunal, au jour fixé pour le jugement des mutuellistes. Dans la nuit du 8 au 9 avril, les derniers ordres furent portés aux différents corps et Lyon devint un immense camp. Le lendemain, le sang coula; la ville était en pleine guerre civile. Stationnées sur les principaux quais, sur les principales places. les troupes faisaient feu de toutes parts. Le canon grondait. Sans armes, pour la plupart, les insurgés combattaient confusément, avec la rage du désespoir. Le 10 avril, la lutte devint furieuse; les obus volèrent comme sur un champ de bataille, et, tandis que le tocsin sonnait aux Cordeliers, soldats et ouvriers se poursuivirent jusque sur le faîte des maisons. Enfin, l'autorité l'emporta: Lyon avait été placée sous une juridiction purement militaire, la circulation avait été rigoureusement interdite, avec défense, sous peine de mort, aux habitants, d'entr'ouvrir leurs portes ou leurs fenêtres, et l'autorité civile avait eu la plus grande part à ces diverses mesures. Il en résulta que l'opposition démocratique accusa nettement le gouvernement et en particulier le préfet M. de Gasparin d'avoir par tous les moyens provoqué et exaspéré l'insurrection : « On a dit, écrivit Louis Blanc dans l'Histoire de dix ans, et c'est moins contre le lieutenant-général Aymard que contre M. de Gasparin que l'inculpation a été dirigée, on a dit que, pour ajouter à l'importance de sa victoire, le pouvoir avait prolongé volontairement le combat; que, dans ce but, il avait renoncé à des positions qui n'étaient point menacées ; que, résolu à terrifier Lyon et la France, il n'avait point empêché, le pouvant, des calamités superflues; que c'était pour rendre les républicains odieux aux propriétaires, qu'il avait déclaré la guerre aux maisons, abusé de l'incendie, imposé aux soldats une prudence féconde en désastres, et donné aux moyens de défense les proportions de sa haine plutôt que celles du péril. Quelque invraisemblables que soient, par leur gravité même, de pareilles accusations, qu'il n'est presque jamais possible d'appuyer sur une démonstration officielle, les faits, on doit le reconnaître, ne sont pas de nature à les démentir. »

Une ordonnance du 19 avril 1834 récompensa M. de Gasparin de son zèle répressif en l'élevant à la pairie. Néanmoins il continua à administrer le département du Rhône jusqu'au 4 avril 1835, époque à laquelle il fut nommé sous-secrétaire d'Etat au ministère de l'Intérieur. Puis, lors de la formation du cabinet du 6 septembre 1836, il devint lui-même ministre de l'Intérieur. Il brilla peu à la tribune, dut prendre part à la discussion de la loi municipale que la Chambre vota sous son administration, et prépara un projet de loi sur les prisons projet que la dissolution du ministère dont il faisait partie l'empêcha de présenter. L'organisation des hospices, la législation des aliénés, le régime des prisons lui durent diverses modifications: il supprima ce qu'on appelait la « chaîne» des forçats, et ordonna leur transport au bagne dans des voitures fermées.

L'avènement du ministère du 15 avril rendit M. de Gasparin à la vie privée. A la Chambre des pairs, il appuya, d'ailleurs, de son vote et de sa parole ses successeurs au ministère. Quand « la coalition » eut renversé le cabinet présidé par M. Molé, aucun ministère ne put immédiatement se constituer, et après un mois de crise, le 31 mars 1839, le roi forma un « ministère de transition », dans lequel M. de Gasparin eut encore le portefeuille de l'Intérieur, avec l'intérim du Commerce et des Travaux publics. Ce cabinet dura jusqu'à l'affaire du 12 mai, suscitée par Barbès, Blanqui et Martin Bernard. Alors le maréchal Soult prit la responsabilité du pouvoir, et M. de Gasparin se tint éloigné des affaires. Le 29 juin 1840, il entra à l'Académie des sciences (section d'économie rurale).

La révolution de février 1848 le rendit définitivement à la vie des champs. M. Tourret, ministre de l'Agriculture, ayant obtenu de l'Assemblée constituante un décret qui créait un Institut national agronomique à Versailles, la direction en fut offerte au comte de Gasparin, qui la refusa. Plus tard, M. Schneider réussit à lui faire accepter ce poste. Mais l'Institut agronomique fut supprimé par un décret du 29 septembre 1852. Au commencement de 1852, l'Empereur put compter sur M. de Gasparin pour entrer au nouveau Sénat; mais après le décret du 22 janvier sur les biens de la famille d'Orléans, M. de Gasparin refusa définitivement le fauteuil qui lui était offert.

Outre les ouvrages déjà cités, ou lui doit encore: un Cours d'agriculture (1843-49), des Principes d'agronomie (1854), et un grand nombre de mémoires académiques. Il était membre de la Société centrale et du Conseil central d'Agriculture et président du Comité historique des arts et monuments.

Fait chevalier de la Légion d'honneur en 1831, officier en 1833, commandeur en 1834, il en devint Grand officier le 30 mai 1837.

Date de mise à jour: juin 2013