Armand, Guy, Simon de Coëtnempren de Kersaint
1742 - 1793
- Informations générales
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- Né le 20 juillet 1742 à Le Havre ( - Généralité de Rouen France)
- Décédé le 4 décembre 1793 à Paris (Département de Paris - France)
1742 - 1793
Député en 1791, membre de la Convention, né au Havre (Généralité de Rouen) le 20 juillet 1742, exécuté à Paris (Département de Paris) le 4 décembre 1793, il appartenait à une famille de chevalerie, et était fils du comte Gui-François de Kersaint (1707-1759), célèbre marin français.
Il débuta lui-même comme garde de marine en 1755 et gagna, sur l'Intrépide, aux côtés de son père, le grade d'enseigne de vaisseau. Devenu bientôt capitaine de vaisseau, à la suite d'un combat honorable et de deux croisières heureuses, il pénétra en 1782 dans la rivière de Surinam, et s'empara de Démérary, Esséquibo et Berbice. Distingué par son esprit et par sa bravoure, il avait conçu de hardis projets de réforme dans l'armement, l'arrimage et le doublage des vaisseaux, et avait imaginé un nouveau système de voilure.
Il adhéra aux principes de 1789, et attaqua les privilèges et l'existence même des deux premiers ordres dans un remarquable écrit intitulé le Bon Sens. En même temps, il traitait assidûment, dans le Journal de la Société, publié par Condorcet, Dupont de Nemours, etc., les sujets intéressant la marine militaire et l'administration. En raison de sa connaissance approfondie de ces matières, l'Assemblée constituante l'appela plusieurs fois dans son sein pour s'éclairer de ses conseils ; il lui présenta (novembre 1789) un plan de reconstitution entière de la marine, qui, à vrai dire, ne fut pas agréé par le comité. Mécontent, Kersaint en appela aux assemblées futures du peu de cas qu'on faisait de ses observations. Ecarté par le ministère du nombre des contre-amiraux nommés en mai 1791, il se jeta dans la politique active, fit partie, à la formation des clubs, de celui des Jacobins, le quitta, après les événements du Champ-de-Mars (17 juillet), pour entrer à celui des Feuillants, et s'affilia au parti de la Gironde.
Elu, le 4 octobre 1791, 3e député suppléant de Paris à l'Assemblée législative, par 262 voix sur 422 votants, il ne cessa de s'occuper des questions maritimes et coloniales, et entra à l'Assemblée comme titulaire, en remplacement de Monneron, démissionnaire, le 2 avril 1792. Il s'attacha aussitôt à faire prévaloir celles de ses idées qu'avait repoussées le comité de la Constituante, soit à la tribune, soit dans une série d'ouvrages qui se succédèrent rapidement : il se prononça notamment, d'accord avec Vergniaud, pour l'abolition des armements en course et la libre navigation commerciale de tous les peuples en temps de guerre. En politique, sans se montrer systématiquement hostile à la royauté, il opina généralement avec la majorité, fit la motion de mettre en accusation le marquis de Noailles, ambassadeur de France à Vienne ; proposa de retirer la garde du roi aux Suisses pour en charger la garde nationale ; attaqua vivement La Fayette et lui reprocha son attitude à propos des événements du 20 juin ; enfin il alla, le 23 juillet, jusqu'à engager l'Assemblée à prononcer la déchéance du roi. Ses opinions s'étaient considérablement accentuées, lorsqu'après avoir renouvelé, le 8 août, sa demande de déchéance en réclamant l'organisation d'un gouvernement provisoire, il prit une part directe à la journée du 10, et accepta ensuite d'être envoyé avec d'Antonelle et Péraldi à l'armée du centre : là, il provoqua l'adhésion du peuple aux événements qui venaient de s'accomplir, et se déclara ouvertement pour la République.
Réélu membre de la Convention, le 14 septembre 1792, par le département de Seine-et-Oise, le 12e sur 14, avec 500 voix (678 votants), il prit plusieurs fois la parole dans la nouvelle Assemblée, notamment sur l'organisation d'une force publique départementale, sur les représailles exercées par les émigrés, sur le camp de Paris dont il demanda la suppression, sur les récompenses à l'armée, etc.
Il devint secrétaire de la Convention. Mais, le 3 décembre 1792, il fut accusé d'intelligence avec Louis XVI, à l'occasion d'une lettre de lui trouvée dans l'armoire de fer ; il réussit à se disculper, en prouvant que cette lettre avait pour objet d'éloigner du roi « les prêtres, les magistrats, les financiers, en un mot, tous les intrigants ». Le 1er janvier 1793, il fut promu au grade de vice-amiral, et, le même jour, il fit à la Convention un long rapport concluant à l'armement immédiat de trente vaisseaux et de vingt frégates, ainsi qu'à la construction de vingt-cinq vaisseaux et à l'adoption de toutes les mesures qu'exigeait la guerre maritime imminente. Son rapport se terminait par la demande de création d'un comité de sûreté générale.
Depuis ce moment, Kersaint, qui s'était lié de plus en plus intimement avec les Girondins, s'appliqua à lutter contre l'autorité de la Commune ; cette attitude provoqua contre lui de nouvelles accusations. Il s'en montra violemment irrité et pencha davantage du côté de la modération. Il opina avec force contre la mort, dans le procès du roi, et dit : « Je vais motiver mon dernier avis, car je ne me crois pas appelé à prononcer une sentence. Si j'étais juge, je voterais par clémence et non par haine car c'est ainsi seulement que j'espérerais d'être le véritable interprète d'une nation généreuse. Comme législateur, l'idée d'une nation qui se venge ne peut entrer dans mon esprit : l'inégalité de cette lutte le révolte. Cependant, je crois que Louis est coupable ; je vote pour la réclusion jusqu'à la paix. »
Puis, se séparant définitivement de la majorité de la Convention, il répéta son vote le 18 janvier et ajouta : « Je veux épargner un crime aux assassins en me dépouillant de mon inviolabilité ; je donne ma démission, et je dépose les motifs de cette résolution entre les mains du président. » Deux jours après, la Convention en entendit la lecture : « Citoyen président, écrivait Kersaint, ma santé, depuis longtemps affaiblie, me rend l'habitude de la vie d'une assemblée aussi orageuse que la Convention impossible. Mais ce qui m'est plus impossible encore, c'est de supporter la honte de m'asseoir dans son enceinte avec des hommes de sang, alors que leur avis, précédé de la terreur, l'emporte sur celui des gens de bien ; alors que Marat l'emporte sur Pétion. Si l'amour de mon pays m'a fait endurer la honte d'être le collègue des panégyristes et des promoteurs des assassinats du 2 septembre, je veux au moins défendre ma mémoire du reproche d'avoir été leur complice, et je n'ai pour cela qu'un moment ; demain il ne sera plus temps. Je rentre dans le sein du peuple ; je me dépouille de l'inviolabilité dont il m'avait revêtu ; prêt à lui rendre compte de toutes mes actions, et sans crainte et sans reproche, je donne ma démission de député à la Convention nationale. » Cette lettre exaspéra l'Assemblée : Choudieu demanda qu'on appliquât à Kersaint la loi qui déclarait infâmes et traîtres à la patrie ceux qui désertaient leur poste. Mais la demande d'arrestation fut écartée : on se borna à appeler Kersaint à la barre de la Convention : il y vint, refusa de se rétracter, répéta au contraire en les aggravant les termes de sa démission, et, après avoir été un instant, par le zèle d'amis imprudents, candidat, concurremment avec Monge, au ministère de la Marine, prit le parti de se dérober aux poursuites qui le menaçaient.
Il refusa de quitter la France, se tint caché pendant quatre mois, au bout desquels il fut découvert, arrêté le 2 octobre 1793 à Ville-d'Avray, et conduit à l'Abbaye. Condamné à mort par le tribunal révolutionnaire, il fut exécuté.
Kersaint a laissé de nombreux ouvrages, parmi lesquels :
- Institutions navales, ou premières vues sur les classes et l'administration de la France, considérée dans ses rapports maritimes ;
- Moyens proposés à l'Assemblée nationale pour rétablir l'ordre et la paix dans les colonies (1792) ;
- Discours sur l'organisation de l'artillerie et de l'infanterie de la marine ;
- Discours sur l'organisation provisoire du service de mer, etc.