Armand, Gaston Camus
1740 - 1804
Député à l'Assemblée constituante de 1789, membre de la Convention et député au Conseil des Cinq-Cents, né à Paris (Généralité de Paris, France), le 2 avril 1740, mort à Paris, le 2 novembre 1804, il étudia le droit dans sa jeunesse, et en particulier le droit canonique; il était, avant la Révolution, avocat du clergé de France au Parlement de Paris. L'électeur de Trêves et le prince de Salm le choisirent aussi pour leur conseiller.
La connaissance très étendue qu'il avait de l'antiquité classique, et sa traduction, la première qui parut, de l'Histoire des animaux d'Aristote, lui avaient ouvert, dès 1783, les portes de l'Académie des inscriptions et belles lettres.
La Révolution, dont il adopta avec ardeur les principes, fit de lui un homme politique. Connu parmi ses concitoyens pour ses principes libéraux, il fut, le 13 mai 1789, élu député du tiers aux Etats généraux par la ville de Paris, avec 718 voix, et, dès les premières séances, nommé secrétaire du bureau chargé de la vérification des pouvoirs. La salle d'assemblée de ce bureau ayant été fermée pour les préparatifs de la séance royale, Camus en enleva les papiers, se joignit à ses collègues réunis au Jeu de paume, et fut un des premiers à prêter le fameux serment.
Durant la session, Camus parut très souvent à la tribune de l'Assemblée constituante, et se fit remarquer par l'âpreté de ses attaques contre les inégalités sociales. À la fois janséniste austère et républicain enthousiaste, vrai disciple de Pascal, alléguant constamment des textes sacrés, il voyait dans l'Assemblée une sorte de concile : « nous sommes, dit-il, une convention nationale : nous avons assurément le pouvoir de changer la religion, mais nous ne le ferons pas ».
Le 1er juin 1790, il proposa la réduction de la liste civile, fit supprimer, sous des peines sévères, tous les titres de noblesse (30 juillet 1791), présenta divers projets de finance, dénonça le Livre rouge ou étaient inscrites les pensions payées par le Trésor royal, et collabora, pour la plus grande part à la constitution civile du clergé, qu'il appuya dans de nombreux discours (séances des 31 mai, 1er, 2, 7, 8, 9 et 11 juin 1790. V. le Moniteur officiel). Ce fut Camus qui poussa le plus à la réunion du Comtat Venaissin et qui fit enlever au pape les annates et les autres avantages pécuniaires qu'il avait en France. Il parla sur les pensions, sur le traitement des ecclésiastiques, sur les impôts, sur les assignats, sur la vente des biens nationaux, fit rendre un très grand nombre de décrets sur la responsabilité des municipalités quant à l'estimation des biens du clergé, sur la suppression des gouvernements militaires, etc.; fit hâter l'élaboration du projet de loi contre l'émigration, etc.
Le 14 août 1789, l'Assemblée avait fait de lui son archiviste : les archives ne se composaient alors que des originaux des pouvoirs des députés, des actes relatifs à la constitution, aux lois, des registres de l'Assemblée : plus tard, on y ajouta les inventaires du matériel des établissements scientifiques, les papiers de l'armoire de fer, les pièces du procès du roi, etc. C'est par l'initiative et le zèle de Camus que se forma ainsi, peu à peu, de divers éléments, le dépôt de nos Archives nationales.
Elu, le 5 septembre 1792, membre de la Convention « à la pluralité des voix », par le département de la Haute-Loire, il se mit en vue à la nouvelle assemblée par plusieurs propositions rigoureuses, fit réduire les pensions ecclésiastiques, demanda le décret d'accusation contre les ministres dilapidateurs, proposa et obtint la vente du mobilier des émigrés et des maisons religieuses, fit affecter le seizième de la vente des biens nationaux au paiement des dettes municipales, s'occupa de conservation « des monuments des arts et des sciences », et fut adjoint aux commissaires près « l'armée de la Belgique ».
Il était en mission lors du jugement de Louis XVI ; mais il écrivit, le 13 janvier 1791, qu'il votait la mort, sans appel et sans sursis.
À son retour nommé membre du comité du salut public, il proposa de mander Dumouriez à la barre, pour y rendre compte de sa conduite, et fit voter que cinq commissaires seraient envoyés à l'armée avec le pouvoir de suspendre et de faire arrêter les généraux suspects. Camus fut lui-même un de ces commissaires ; mais devancé par Dumouriez, il fut arrêté avec ses collègues et livré aux Autrichiens. D'abord transférés à Mons, où était le quartier général du prince de Cobourg, les commissaires de la Convention furent avertis par le colonel baron de Mack, depuis général, qu'ils étaient retenus on otages pour la reine et son fils, et que leurs têtes en répondaient, qu'ils eussent à l'écrire à la Convention.
« Nous sommes ici hors des terres de la République ; nous n'avons aucun avis à donner à la Convention ».
Mack leur répondit qu'ils n'étaient point là pour délibérer et que la République n'existait pas.
« Et vous en particulier, monsieur Camus, vous pourriez être un peu plus réservé ; votre tête pourrait n'être pas très ferme sur vos épaules, Songez que vous êtes ici en notre pouvoir.
- Oui, dit Camus, et libre dans vos fers. »
Détenu par la suite à Maëstricht, Coblentz, Koenigingratz et Olmütz, Camus occupa ces loisirs forcés en traduisant paisiblement le Manuel d'Epictète, jusqu'à l'échange des cinq commissaires à Bâle contre la fille de Louis XVI, depuis duchesse d'Angoulême, après 33 mois de captivité.
Camus entra, comme ancien conventionnel, le 23 vendémiaire an IV, au Conseil des Cinq-Cents, et devint, le 24 frimaire de la même année, membre de l'Institut où il donna lecture de plusieurs dissertations et de travaux importants. Ce fut dans la séance du 12 nivôse que Camus et ses collègues Quinette, Bancal, Lamarque firent leur entrée dans la salle du Conseil, au milieu de la plus vive émotion. Tous les députés se levèrent ; une foule de membres, dit le Moniteur, se pressèrent autour d'eux, les embrassèrent, et les conduisirent au bureau du président (c'était Treilhard), qui les salua au nom de l'assemblée. Camus obtint la parole à son tour et souleva d'unanimes applaudissements :
« Le bonheur si longtemps attendu de revoir nos collègues, s'écria-t-il, est troublé uniquement par le regret de n'avoir pas participé à vos immenses travaux. La renommée les publie, et leur bruit, malgré l'épaisseur des murailles dont nous étions environnés, a pénétré dans nos retraites obscures... »
Camus devint président du Conseil des Cinq-Cents et participa très activement encore à ses délibérations, surtout en matière d'administration et de finances. Il quitta l’Assemblée le 1er prairial an V.
Il n'avait cessé de témoigner la plus constante sollicitude pour le dépôt des archives; aussi, après avoir refusé le poste de ministre des Finances que lui offrit le Directoire, accepta-t-il, le 4 thermidor an VIII, le poste et le titre de « garde des archives générales ».
Il s'était prononcé nettement contre l'établissement du gouvernement consulaire, et il montra toujours à l'égard de Bonaparte la plus ferme indépendance. Camus se renferma d'ailleurs, strictement, à partir de cette époque, dans ses travaux littéraires et dans l'accomplissement rigoureux de ses devoirs d'archiviste.
On lui doit le classement méthodique des papiers des diverses assemblées parlementaires de la Révolution et la rédaction d'excellentes tables analytiques, pour les procès-verbaux de ces assemblées
Camus était encore en fonctions à l'époque de sa mort, survenue en 1804, à la suite d'une attaque d'apoplexie (Daunou lui succéda comme archiviste.)
II a laissé un grand nombre d'écrits et d'ouvrages d'érudition, parmi lesquels :
- Code matrimonial (1770) ;
- Lettres sur la profession d'avocat (1772) ;
- plusieurs dissertations imprimées dans les Mémoires de l'Institut ;
- un Voyage dans les départements nouvellement réunis (1803), etc., etc.
Camus avait été nommé, le 27 ventôse an IX, membre du conseil général de l'administration des hospices de Paris.
Date de mise à jour: juin 2020