Jean-Baptiste Treilhard
1742 - 1810
Député en 1789, membre de la Convention, député au Conseil des Cinq-Cents et à celui des Anciens, membre du Directoire, né à Brive (Généralité de Limoges) le 3 janvier 1742, mort à Paris (Seine) le 1er décembre 1810, fils de Jean Treilhard, avocat, et de Jeanne Lachèze, il étudia le droit et devint avocat au parlement de Paris (1761).
Protégé par Turgot, alors intendant à Limoges, il se vit confier plusieurs causes importantes, plaida pour l'archevêque de Paris contre les officiers de l'Hôtel de ville, pour les receveurs généraux du domaine, pour le procureur général, pour la ville de Brive contre les héritiers des vicomtes de Turenne, participa au mouvement de résistance contre le parlement Maupeou, se tint jusqu'en 1775 à l'écart du barreau, et fut nommé inspecteur général des domaines ; en même temps la maison de Condé le chargea de ses intérêts.
Elu, le 15 mai 1789, député du tiers aux états généraux par la ville de Paris, avec 116 voix, il prit une part active aux débats politiques, parla sur la réunion des trois ordres, se prononça pour une seule Chambre et pour le veto suspensif, fut membre du comité de constitution, du comité des pensions, du comité ecclésiastique, fit un rapport sur les biens des églises, proposa de surseoir à toute nomination de bénéfices, autre qu'à charge d'âmes, fut élu secrétaire, puis président de l'Assemblée, fit adopter les décrets relatifs au clergé et à la constitution civile, supprimer les ordres religieux et mettre leurs biens à la disposition de la nation. Il obtint l'annulation des collations et dispositions des cures, interpella l'évêque de Clermont au sujet du serment civique, parla sur l'arrêté du département de Paris relatif à la liberté des cultes, et, en 1791, lorsque les honneurs du Panthéon furent proposés pour Voltaire, rappela que le philosophe, dès 1764, avait prédit la Révolution :
« C'est donc à lui que nous la devons, s'écria-t-il, et c'est peut-être un des premiers pour lesquels nous devons les honneurs que vous destinez aux grands hommes qui ont bien mérité de la patrie. »
Après la session de la Constituante, Treilhard présida le tribunal criminel du département de Paris. Le 12 septembre 1792, il fut élu député de Seine-et-Oise à la Convention, le 7e sur 14, par 403 voix (681 votants). Il fit suspendre la vente des immeubles des émigrés, proposa d'accorder à Louis XVI un ou plusieurs conseils, parut d'abord favorable au principe de l'inviolabilité royale.
Il remplit durant une partie du procès Louis XVI (28 décembre 1792-10 janvier 1793) les fonctions de président de l'Assemblée. Il se prononça contre l'appel au peuple et répondit au 3e appel nominal :
« En consultant le plus grand intérêt de la République, que nous ne pouvons ni ne devons jamais perdre de vue, je pense, en mon âme et conscience, que la mesure la plus sage et la plus politique est, en déclarant que Louis a mérité la mort, de décréter un sursis qui laisse à la nation la faculté d'ordonner de sa personne suivant les circonstances et les intérêts du peuple français. Je vote pour la mort avec sursis. »
En mission en Belgique (22 janvier), il transmit à l'assemblée des détails sur la situation de l'armée, revint au bout de peu de temps, fut élu membre du comité de salut public, et se rendit dans les départements de la Dordogne et de la Gironde pour réprimer l'agitation produite par la proscription des Girondins. De Blaye, il écrivit à Goupilleau, membre du comité de sûreté générale, de lui envoyer un collègue « sociable », quand la mission de Bordas aura pris fin. A peine arrivé à Bordeaux (juin), il fut arrêté et subit une détention de quelques jours. On le remplaça le 20 juillet par Tallien. Jusqu'au 9 thermidor, Treilhard s'effaça le plus possible et ne prit la parole que sur des questions secondaires.
Il parut plus fréquemment à la tribune après la chute des Jacobins, s'associa aux mesures de réaction, proposa la ratification du traité conclu à Bâle avec l'Espagne, et fit décréter l'échange de la fille de Louis XVI contre les commissaires livrés par Dumouriez.
Passé, le 23 vendémiaire an IV, au Conseil des Cinq-Cents, comme l'élu de dix départements, il devint président de cette assemblée et prononça en cette qualité, le 1er pluviôse, un discours empreint d'un ardent républicanisme : « Haine, fit-il, haine éternelle à la royauté, ce fléau destructeur ! Ce n'est que par ce sentiment qu'un Français peut encore exister. Peuple, tu désires la paix ? Eh bien, haine à la royauté, c'est elle qui te donne la guerre. Tu éprouves des privations ? Eh bien, haine à la royauté, qui organisa la guerre civile et le massacre des républicains ! Représentants du peuple, recevez l’expression de mes sentiments. Que ne puis-je reculer les bornes de cette étroite enceinte ; que ne suis-je au milieu de tous mes concitoyens ! C'est en présence de tous les peuples, c'est dans le sein de l'humanité que je voudrais déposer mon serment : Je jure haine à la royauté ! »
Il parla sur les lois relatives aux émigrés, demanda la peine de mort contre les provocateurs à la royauté et au rétablissement de la Constitution de 1793, et fut désigné en 1796, par le Directoire, pour le poste de ministre de la Justice ; mais il n'accepta pas. Il fut nommé alors membre du tribunal de cassation, et presque aussitôt chargé de fonctions diplomatiques près la cour de Naples.
Il se disposait à accompagner Bonnier au congrès de Rastadt en qualité de ministre plénipotentiaire, quand il fut retenu par sa nomination aux fonctions de membre du Directoire, en remplacement de François de Neufchâteau (15 mai 1798). Treize mois plus tard, son élection fut annulée comme ayant eu lieu avant l'accomplissement de l'année pendant laquelle, en sortant du Corps législatif, tout représentant était inéligible au Directoire. Treilhard fut alors, de la part de ses ennemis, l'objet d'accusations passionnées.
Il accepta avec résignation le coup d'Etat du 18 brumaire, fut nommé, d'abord vice-président (4 avril 1800), puis président du tribunal d'appel de la Seine (1er janvier 1802), et entra la même année an Conseil d'Etat, où il présida, depuis 1808, la section de législation.
Grand officier de la Légion d'honneur le 25 prairial an XII, comte de l'Empire le 24 avril 1808, il reçut, le 30 mars 1809, le titre de ministre d'Etat. Lors de la proclamation de l'Empire, il avait été chargé de donner communication au Tribunat du sénatus-consulte organique du 28 floréal an XII; il prit une part importante à la rédaction du code civil, du code d'instruction criminelle, du code pénal et du code de commerce.
Date de mise à jour: mars 2020