Henri d'Attilio
1927 - 2008
D’ATTILIO (Henri)
Né le 4 février 1927 à Châteauneuf-les-Martigues (Bouches-du-Rhône)
Décédé le 12 novembre 2008 à Marseille (Bouches-du-Rhône)
Député des Bouches-du-Rhône de 1988 à 1998
Sénateur des Bouches-du-Rhône de 1998 à 2004
Petit-fils d’immigrés italiens, Henri d’Attilio est né le 4 février 1927 à Châteauneuf-les-Martigues, dans les Bouches-du-Rhône. Il passe son brevet élémentaire et entre tôt dans la vie active. Il travaille, de 1942 à 1949, dans une cave vinicole de sa ville natale. Il entre ensuite chez Cinzano, qui fabrique des alcools renommés. Il y est délégué du personnel et rejoint les rangs de Force ouvrière, récemment créée. En 1953, tout comme son père avant lui, il devient conseiller municipal de Châteauneuf-les-Martigues, dont le maire est le socialiste Armand Audibert, élu en 1939 mais révoqué par Vichy en 1940 avant de retrouver son poste en 1944. Henri d’Attilio lui succède en 1970, tout en poursuivant sa carrière professionnelle au service des achats de l’Aérospatiale, à Marignane, où il travaille jusqu’en 1983. Il est réélu, toujours sous l’étiquette socialiste, en 1977, deux ans avant de devenir conseiller général des Bouches-du-Rhône, pour le canton de Marignane, puis conseiller régional, mandats qu’il occupe respectivement jusqu’en 1985 et 1986. Il commence son troisième mandat de maire en 1983. Sur le plan partisan, Henri d’Attilio devient en 1987 membre du Comité directeur de la Fédération socialiste des Bouches-du-Rhône.
C’est en 1988, alors que le Sud-Est connaît un retournement politique marquant la fin d’un cycle, qu’Henri d’Attilio entre dans la voie parlementaire, après un échec en 1978 comme suppléant de Michel Pezet, dans la 10e circonscription. Il se présente dans la 12e circonscription, nouvellement créée, des Bouches-du-Rhône, qui regroupe les cantons de Berre-l’Étang, Châteauneuf-Côte-Bleue, Marignane et Vitrolles. Il arrive en tête au premier tour du 5 juin, avec 16 925 voix (32 % des suffrages exprimés), devant le candidat du Front national (FN), Jean-Pierre Stirbois (25,8 %), et le candidat de l’Union pour la démocratie française (UDF) Laurens Deleuil (24,8 %) qui se retire, ce qui permet au socialiste de l’emporter avec 55,87 % des suffrages (30 842) au second tour, le 12 juin. Son suppléant est Serge Andreoni, médecin du travail et adjoint au maire de Berre-l’Étang, dont il dit : « Son dynamisme et son sens du contact le portent tout naturellement à participer à l’action de plusieurs associations caritatives, patriotiques, ou de défense et de promotion du patrimoine historique et culturel de la Provence et de la Corse ». Henri d’Attilio insiste, pendant la campagne, sur les questions liées à l’enseignement, à la formation des jeunes et aux équipements publics, qu’il considère comme « prioritaires », de même que sur les difficultés économiques des entreprises. Le ton change entre les deux tours ; il se présente ainsi comme « l’unique candidat républicain à défendre les valeurs essentielles de notre démocratie », face aux « thèses d’intolérance et d’exclusion » qu’il prête à Jean-Pierre Stirbois. Pour sa part, il invoque la justice, la fraternité et le progrès. En portant les couleurs de la majorité présidentielle, il veut unir toutes les forces de gauche et, au-delà, tous les démocrates. Au Palais-Bourbon, le nouveau député, membre du groupe socialiste, siège d’abord à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Il rejoint ensuite, en mai 1989, la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, puis en novembre la commission de la défense nationale et des forces armées, avant de retourner à la commission des lois. D’avril à juin 1990, il siège à la commission des finances et retrouve ensuite la commission des affaires culturelles. Dans l’hémicycle, ses préoccupations portent principalement sur l’industrie aéronautique et les problèmes économiques, avec une question au gouvernement, en décembre 1992. Tandis qu’il est réélu, une quatrième fois, maire de sa ville en 1989, et qu’il conserve son mandat départemental, Henri d’Attilio jouit d’une influence locale de plus en plus forte, notamment au sein de la fédération socialiste des Bouches-du-Rhône, ce que nombre d’observateurs constatent à l’approche du Congrès de Rennes de 1990. Ainsi apporte-t-il le soutien décisif de sa section à Laurent Fabius, alors qu’il serait plutôt chevènementiste, mais ce sont des considérations locales, en particulier sa rivalité avec Michel Pezet, qui lui dictent un tel choix.
En 1993, Henri d’Attilio se présente de nouveau aux élections législatives, toujours dans la 12e circonscription, mais cette fois-ci, il fait liste commune avec Georges Batiget, maire de Rognac, en faveur d’une Alliance des Français pour le progrès, du nom, assez vague remarquaient nombre d’observateurs, des listes de la majorité présidentielle. Henri d’Attilio fait campagne sur les mêmes thèmes qu’en 1988. Au premier tour du 20 mars 1993, il arrive en deuxième position, avec 19,36 % des suffrages exprimés (11 282 voix), derrière le candidat du FN Bruno Mégret (27,53 %, soit 16 041 voix), mais devant le candidat Rassemblement pour la République (RPR) Raymond Leclerc (18,34%, avec 10 686 voix). A l’issue de ce premier scrutin, il lance : « 1er tour : l’avertissement ; 2e tour : le choix ». « Dans cette XIIe circonscription – comme dans l’ensemble du pays – le vote qui s’est exprimé dimanche dernier témoigne de l’angoisse et du mécontentement des Français face au chômage et aux problèmes de sécurité », précise sa profession de foi. Y figure aussi un tableau opposant sur plusieurs points les candidats en lice pour le second tour : Henri d’Attilio, « homme de terrain, natif de ce terroir, est le seul candidat présent au second tour capable de prendre en compte vos préoccupations ». Il s’oppose à Bruno Mégret qui « ne peut représenter que les forces d’exclusion et d’intolérance » – termes employés en 1988 pour Jean-Pierre Stirbois ; en outre le « leader n° 2 du Front National vit à Paris, son élection ne serait qu’un tremplin pour son parti ». Le candidat socialiste l’emporte d’une courte tête, avec 50,47 % des sujets exprimés (soit 29 255 voix) contre 49,53 %. Il est d’abord, à nouveau, membre de la commission des affaires culturelles, puis rejoint temporairement la commission de la production et des échanges, la commission de la défense nationale et des forces armées, la commission des lois et la commission des finances et la commission des affaires étrangères. Il intervient toujours essentiellement sur les questions liées à l’aéronautique avec une question au gouvernement sur Eurocopter en juin 1993, avril 1994 et octobre 1995. En juin 1996, il soutient lors de l’examen du projet de loi de programmation militaire 1997-2002, les programmes aéronautiques. En mars 1997, il intervient sur la proposition de loi portant création de l’établissement public industriel et commercial de l’étang de Berre (EPABerre).
Ayant obtenu un cinquième mandat municipal en 1993, Henri d’Attilio se représente à la députation en 1997. Âgé de 70 ans, il aurait préféré briguer un mandat au Sénat, mais compte tenu du contexte, qui a vu le FN prendre la tête de Marignane et de Vitrolles, en 1995 et 1997 – quelques mois avant les législatives –, il présente une nouvelle fois sa candidature, alors que la gauche méridionale tente de renforcer son offensive contre la poussée de l’extrême-droite, qui se confirme à chaque scrutin. La configuration de 1993 se reproduit : il arrive ainsi deuxième au premier tour du 25 mai, avec 31 % des suffrages exprimés (19 558 voix), derrière le conseiller régional FN Bruno Mégret (35,45 %, soit 22 353 voix), mais le candidat RPR Christian Rossi arrivant loin derrière, avec 13 %. Ce duel suscite un intérêt national. Henri d’Attilio, que l’on qualifie de « socialiste à la sauce provençale », volontiers comparé à Gaston Defferre, d’autant que sa campagne se déroule sous le patronage du sénateur defferriste Louis Philibert, se revendique sans ambages de ce « socialisme méridional et truculent » (Libération, 17 mai 1997) et annonce : « Le marketing, c’est pas mon truc. Moi, c’est la simplicité ». Il sort victorieux du second tour avec 54 % des suffrages exprimés (35 276) contre 46% des voix (soit 29 921) à son adversaire frontiste. Mais son mandat est de courte durée : comme il en a émis le souhait, il entre au Sénat en février 1998. Pour éviter une législative partielle, le gouvernement lui confie une mission sur l’« utilisation par les collectivités locales des nouvelles technologies de l’information et de la communication », auprès du secrétaire à l’Industrie, Christian Pierret. La mission venant à être prolongée, et suivant le code électoral, son suppléant, Vincent Burroni, le remplace. Henri d’Attilio se présente ainsi aux élections sénatoriales de septembre 1998, qu’il remporte. Au même moment, deux autres figures du socialisme des Bouches-du-Rhône font leur entrée au Sénat : Jean-François Picheral, maire d’Aix-en-Provence, et Jean-Noël Guérini, président du conseil général et maire du 2e secteur de Marseille. Lors de cet autre mandat parlementaire, membre du groupe socialiste du Sénat, Henri d’Attilio siège à la commission des affaires sociales. Il suit plusieurs dossiers (cumul des mandats, prévention de l’alcoolisme, fin de vie, reconnaissance du génocide des Arméniens…). Il vote la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité et le projet de loi constitutionnelle relative à l’égalité entre les hommes et les femmes (1999).
Cependant, alors qu’il remporte encore les municipales de mars 2001 à Châteauneuf-les-Martigues, de nombreuses rumeurs sur son état de santé circulent. Il finit par être de notoriété publique qu’Henri d’Attilio souffre de la maladie d’Alzheimer. La gestion de ses mandats devient de plus en plus difficile et il est victime, en 2002, d’une tentative d’escroquerie. Il est placé sous tutelle et déchu par conséquent de plein droit de son mandat en 2004, par décision du Conseil constitutionnel le constatant. Retiré de toute vie publique, Henri d’Attilio meurt le 12 novembre 2008 à Marseille.