Joseph Franceschi
1924 - 1988
FRANCESCHI (Joseph, Antoine, François)
Né le 15 janvier 1924 à Tunis
Décédé le 10 mars 1988 à Paris
Député du Val-de-Marne de 1973 à 1981 et de 1986 à 1988
Secrétaire d'Etat aux personnes âgées du 22 mai 1981 au 17 août 1982
Secrétaire d'Etat à la sécurité publique du 17 août 1982 au 23 juillet 1984
Secrétaire d'Etat aux retraites et aux personnes âgées du 23 juillet 1984 au 20 mars 1986
Né le 15 janvier 1924 à Tunis, dans une famille d’origine corse, Joseph Franceschi s’engage dès l’âge de 14 ans, en 1938, aux jeunesses socialistes de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO). Il participe au second conflit mondial, alors qu’il n’a que 19 ans, en s’engageant en 1943 dans les Forces françaises libres. Il arrive en France avec la division Leclerc et, démobilisé, devient instituteur. Son affectation est déterminante pour sa carrière politique : il obtient un poste dans le département de la Seine-et-Oise, à Alfortville, ville pour laquelle il dit avoir eu le coup de foudre, à son arrivée en métropole. Il poursuit, simultanément, des études supérieures, obtient deux licences, en lettres et en droit public, avant de soutenir un doctorat en sciences politiques. Professeur, Joseph Franceschi donne également des cours à la faculté de droit, comme chargé d’enseignement. En décembre 1947, il épouse Simone Dufour, union de laquelle naissent trois enfants.
Sa carrière politique commence en 1951, date à laquelle il est élu conseiller municipal d’Alfortville. Il devient, dans la foulée, adjoint au maire de la ville. Au scrutin de 1965, il mène la liste ; il est élu maire de la cité qui l’avait tant séduit vingt ans plus tôt. Très rapidement, il renforce son implantation locale et devient conseiller général du canton, le 1er octobre 1967, sous les couleurs de la Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS) que préside François Mitterrand, député de la Nièvre. En mars 1971, il est largement réélu maire d’Alfortville. C’est justement, fort de cet ancrage politique solide qu’il est candidat aux élections législatives dans la quatrième circonscription du Val-de-Marne, au mois de mars 1973. Cette partie du département regroupe les communes d’Alfortville, de Charenton-le-Pont, de Maisons-Alfort et de Saint-Maurice. Avec sa suppléante Claude Muller, comptable de profession et animatrice d’associations socioculturelles et d’éducation permanente, il est investi par le Parti socialiste et par le Mouvement des radicaux de gauche (MRG). Au premier tour de scrutin, la gauche se présente en ordre dispersé, puisque cinq candidats la représentent, de Lutte ouvrière jusqu’au Front progressiste. L’industriel Alain Griotteray, député sortant, qualifié par Joseph Franceschi de « député d’extrême droite », maire de Charenton-le-Pont, est fortement implanté ; son suppléant, René Nectoux, est conseiller général et maire d’une autre ville importante de la circonscription, Maisons-Alfort. Joseph Franceschi arrive en tête au premier tour de scrutin, avec 39,8% des voix. Il devance de peu le candidat communiste, avec 13 100 des 58 014 suffrages exprimés. Aussi est-il élu de justesse, la semaine suivante, en remportant le scrutin avec 50,2% des voix. Sa profession de foi a tenu en quelques lignes, autour du triptyque « pour une nouvelle politique – pour apporter plus de bonheur à nos concitoyens – pour mieux vivre, changer la vie ».
A son arrivée à l’Assemblée nationale, Joseph Franceschi s’inscrit au groupe du parti socialiste et des radicaux de gauche. Il rejoint la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales du Palais-Bourbon, et y siège pour la durée de la législature. Au cours de son mandat, il dépose trois propositions de loi relatives à l’amélioration du sort des personnes âgées et des immigrés : volonté de création d’un secrétariat d’Etat au troisième âge ; amélioration de la pension des retraités ; garantie des droits des travailleurs immigrés. Le député socialiste de la quatrième circonscription du Val-de-Marne prend une part active à la délibération parlementaire sous toutes ses formes. Il pose quatre questions orales avec débat et sept questions au gouvernement. Au cours de ce mandat, entre 1973 et 1978, il intervient à l’occasion de vingt-huit discussions différentes, aux thèmes forts variés. A côté de préoccupations strictement urbaines, concernant les problèmes de logement en banlieue parisienne, exposées par le maire d’Alfortville le 18 mai 1973, et la publication des plans d’occupation des sols, en discussion le 20 décembre 1977, le législateur Joseph Franceschi se spécialise dans trois domaines.
Les questions liées à l’immigration reçoivent une attention toute particulière de la part du député du Val-de-Marne. Il est nommé rapporteur spécial du budget du ministère du travail, pour la discussion de tous les projets de loi de finances de la législature. Ainsi, à chaque reprise, il souligne les espoirs suscités par la création d’un secrétariat d’Etat aux immigrés, rappelant que l’action en leur faveur ne doit être « ni fragmentaire, ni désordonnée ». Le 4 novembre 1974 et le 4 novembre 1975, il encourage l’Etat à leur donner un statut social correspondant aux services qu’ils rendent. Il regrette aussi la disparité dans l’accroissement des crédits destinés au contrôle de l’immigration et à l’action sociale en faveur des travailleurs étrangers. L’égalité des droits sociaux, la formation professionnelle des immigrés, les accidents du travail préoccupent le député Franceschi, qui évoque ces questions très régulièrement, en élargissant leur problématique et la recherche de solution au traitement du regroupement familial et des foyers SONACOTRA. Le 29 avril 1976, il monte à la tribune dans la discussion du projet de loi tendant à renforcer la répression en matière de trafics et d’emplois irréguliers de main d’œuvre étrangère. Malgré le vote favorable que le groupe socialiste s’apprête à prononcer sur le texte précité, Joseph Franceschi qui s’efforce, dans sa ville, de réussir l’assimilation d’une forte communauté arménienne, regrette le champ d’application très limité des projets de loi soumis au Parlement en matière d’immigration, la persistance d’un régime qu’il qualifie de « répressif » et des interventions policières qu’il considère « arbitraires ». A ce sujet, il élargit ses critiques et développe ses pistes de réflexion sur les questions de logement, aussi bien dans la délibération sur les projets de loi de finances (PLF) pour le budget de l’équipement et du logement, que dans la discussion d’autres textes en lien direct avec le sujet. Le 29 avril 1976, alors que le texte d’initiative gouvernementale sur l’hébergement collectif est en discussion, il défend un amendement visant à rendre possible la réquisition du local d’habitation, en cas de fermeture par le propriétaire ou l’exploitant.
Le 19 février 1975, le Parti socialiste fait de Joseph Franceschi son rapporteur spécial pour les problèmes du troisième âge. Le maire d’Alfortville connaît bien ces problèmes pour avoir fait de leur traitement local un des axes majeurs de sa politique municipale. Aussi, le 26 mai 1977, deux mois après sa réélection à la mairie, s’engage-t-il dans la discussion du texte portant majoration des pensions de vieillesse de certains retraités. Il prône l’égalité totale entre les retraités sociaux d’avant et d’après 1975. Plus avant, il réagit au cours de la discussion générale du texte sur l’amélioration de la situation des conjoints survivants. Il fonde son argumentation sur la charte du troisième âge présentée par François Mitterrand aux élections présidentielles de 1974. Il s’élève alors contre la politique menée par le gouvernement Barre en ce domaine ; il condamne le caractère arbitraire de la limitation des ressources des veuves et l’ostracisme dont sont victimes les veuves des travailleurs non salariés. Le 27 avril 1977, alors que le gouvernement fait une communication sur son programme, Joseph Franceschi le questionne sur sa politique en faveur des personnes âgées. Il insiste sur la situation des retraités au regard de la fiscalité et le décalage entre la perception du revenu et du paiement de l’impôt y afférant. Il suggère, à cet égard, l’institution d’une allocation vieillesse unique d’un montant égal à terme au SMIC.
Joseph Franceschi devient aussi un spécialiste des questions liées à l’outre-mer, et notamment à la réflexion autour de la nationalité française dans le territoire français des Afars et des Issas, à l’ordre du jour des travaux de l’Assemblée nationale, à partir du 7 juillet 1976. Reprochant au gouvernement de soutenir, dans ce territoire, un gouvernement sans aucune légitimité, il souhaite vivement que ne soient pas hypothéquées les relations amicales entre la jeune République de Djibouti et la nation française. A partir du 13 décembre suivant, il prend une large part à la discussion du projet de loi relatif à l’organisation de la Nouvelle-Calédonie et ses dépendances. Les problèmes de statut rythment la délibération parlementaire, mais les thèmes sociaux sont relevés par le député du Val-de-Marne : la répression des travailleurs, la répartition des compétences peu favorable au territoire, l’administration locale surpuissante, l’ère du racket. Dans cette discussion, il obtient l’adoption de seize de ses amendements et d’un sous-amendement dont il est également l’auteur. C’est sur le plan de la stricte organisation territoriale que Joseph Franceschi obtient satisfaction : la publicité des résultats des travaux du Conseil de gouvernement est effective ; la responsabilité des conseillers de gouvernement devient réelle ; l’âge d’éligibilité est abaissé à vingt-et-un ans ; la protection de la compétence territoriale qui pourrait être mise en échec par des actes internationaux intervenant dans les domaines de sa compétence, sans qu’auparavant, elle ait été consultée, est effective. Vingt-neuf autres amendements sont repoussés. Le 14 décembre 1976, le député socialiste prend la parole dans la discussion du projet de loi relatif à l’organisation de Mayotte. Il met en garde les tentations du gouvernement de « concilier l’inconciliable ». La volonté de lier à tout jamais Mayotte à la métropole lui apparaît « un pari léger sur l’avenir ». Enfin, à quelques mois du terme de la législature, la question du territoire français des Afars et Issas revient en discussion, cette fois-ci sur le plan de son indépendance. Le député d’Alfortville intervient en séance publique le 2 juin 1977, en discutant des conditions d’accession à l’indépendance en cours de réalisation ; il propose au ministre de faire porter le débat sur la politique de coopération entre la France et la République de Djibouti.
Au cours de ce mandat, Joseph Franceschi traduit par ses votes son opposition à la politique gouvernementale. Le 12 avril 1973, il vote contre la déclaration de politique générale du gouvernement de Pierre Messmer, ainsi que, le 16 octobre suivant, le projet de loi constitutionnelle portant modification de l’article 6 de la Constitution, sur la réduction de la durée du mandat présidentiel. Sans surprise, il reste dans l’opposition, alors que Jacques Chirac présente son programme de gouvernement, le 6 juin 1974. Les grands votes de la législature 1973-1978 sont autant d’occasions pour le député socialiste d’exprimer son rejet des textes présentés : la réforme constitutionnelle portant révision de l’article 25 de la Constitution, visant à assouplir le régime de l’incompatibilité entre le mandat parlementaire et les fonctions gouvernementales, le 10 octobre 1974 ; la révision constitutionnelle modifiant l’article 7 de la Constitution, sur les règles de la campagne électorale des élections présidentielles, le 8 juin 1976 ; le programme du gouvernement de Raymond Barre, le 28 avril 1977. Seuls les textes relatifs à l’intervention volontaire de grossesse (IVG), le 28 novembre 1974, et au divorce, le 4 juin 1975, reçoivent son assentiment. Président de séance le 21 juin 1977, il ne prend pas part au vote du projet de loi relatif à l’élection des représentants à l’Assemblée des communautés européennes, comme c’est l’usage.
Fort de son expérience et très investi dans les débats, Joseph Franceschi devient vice-président de l’Assemblée nationale, du 2 avril 1977 au 5 avril 1978. Soutenu par les Radicaux de gauche et investi par le Parti socialiste, il est candidat à sa propre succession, à l’occasion des élections législatives du printemps 1978. Investi par le Parti républicain (PR) de François Léotard, le candidat de la majorité présidentielle, René Nectoux, inspecteur divisionnaire SNCF, conseiller général et maire de Maisons-Alfort, arrive en tête du premier tour, avec 500 voix d’avance sur Joseph Franceschi, qui obtient 28, 1% des voix. Seuls des onze candidats en lice le 15 mai, les deux hommes se retrouvent face-à-face au deuxième tour. Le député socialiste sortant, qui a gardé sa suppléante Claude Muller, est réélu avec 52,4% des voix, soit avec 33 057 des 63 084 suffrages exprimés. Le député a fondé sa campagne sur le travail accompli dans sa circonscription : un nouveau central téléphonique, la carte améthyste pour les personnes âgées, l’abandon du poste de péage sur l’autoroute A4 et l’achèvement du pont de Charenton. Le programme socialiste qu’il défend reprend les mesures arrêtées par la rue de Solferino, à l’occasion de ce scrutin législatif, et dont les mesures-phares sont la relance de la consommation populaire par l’augmentation du pouvoir d’achat, la nationalisation du secteur bancaire privé et de neuf grands groupes industriels, la lutte contre le chômage par la création massive d’emplois nouveaux, et la cinquième semaine de congés payés, ainsi que la semaine de travail ramenée progressivement à 35 heures.
A son retour à l’Assemblée nationale, après s’être réinscrit au groupe socialiste, Joseph Franceschi devient membre de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour la durée de la législature. Il appartient à deux commissions mixtes paritaires, comme suppléant, puis titulaire. Au cours de son mandat, il dépose six propositions de loi relatives à la retraite ou au troisième âge : majoration des pensions des retraités (22 juin 1978) ; modification du taux de la pension de réversion attribuée aux conjoints survivants des agents de la fonction publique (1er juillet 1978), ainsi que du régime général, des régimes alignés, des professions libérales, du régime agricole et des régimes spéciaux (17 octobre 1978) ; versement mensuel des rentes et des pensions de retraite (20 décembre 1978) ; réévaluation des prestations contributives et non contributives de vieillesse (20 décembre 1978) ; harmonisation des droits en matière de retraite (5 janvier 1979). En plus de deux questions au gouvernement, Joseph Franceschi intervient à quarante-sept reprises en séance publique. L’essentiel de ses prises de position concerne les départements et territoires d’outre-mer (DOM–TOM). Nommé délégué national du P.S. pour la coordination outre-mer, en mai 1979, le maire d’Alfortville est de tous les débats parlementaires touchant à la question. Au plan budgétaire, il prend la parole dans la discussion des collectifs 1979 et 1980 pour le ministère des départements et des territoires d’outre-mer. Le 15 novembre 1978, il déclare « insignifiant » le budget des DOM. Il s’étonne que les chômeurs ultramarins ne soient pas indemnisés. Le 31 octobre 1979, il regrette l’échec de la conférence interrégionale tenue aux Antilles en 1979, et s’interroge sur ce qu’il considère être « le mépris » du gouvernement vis-à-vis des collectivités territoriales d’outre-mer. Joseph Franceschi profite d’un grand texte de la législature, relatif aux questions d’outre-mer, pour porter la parole socialiste, longuement, à la tribune de l’Assemblée nationale. A cet effet, du 18 avril au 10 mai 1979, il défend six amendements dans la discussion du projet de loi modifiant les modes d’élection de l’assemblée territoriale et du conseil de gouvernement du territoire de la Nouvelle-Calédonie et ses dépendances. Quatre de ces amendements sont rejetés, le cinquième est finalement sans objet et le dernier est adopté, qui vise à la publicité des décisions prises dans le cadre de la réforme par les autorités du territoire. Joseph Franceschi qualifie le texte de « projet hétéroclite et antidémocratique ». Il souligne la contradiction entre l’élimination des listes n’ayant pas obtenu 10% des suffrages et la représentation proportionnelle qui tend à la formation de partis multiples et indépendants. Une succession de textes liés à l’outre-mer pousse le député du Val-de-Marne et membre de la Commission des lois de l’Assemblée nationale à intervenir plus fréquemment encore. Le 30 mai 1979, nommé délégué national du PS à la coordination outre-mer, à la suite du congrès de Metz, il réagit au texte d’initiative gouvernementale modifiant le régime communal dans le territoire de la Polynésie française ; il s’agit pour lui d’un « projet sous-tendu par une conception inspirée du néo-colonialisme moderne », regrettant que le texte n’ait pas été soumis à l’assemblée territoriale de Polynésie. Le même jour, il prend la parole dans la discussion du projet de loi modifiant le régime communal dans le territoire de la Nouvelle-Calédonie. A ses yeux, ce projet porte atteinte aux compétences statutaires du territoire de la Nouvelle-Calédonie et à la spécificité des populations mélanésiennes antérieures aux communes. Les deux amendements dont il est l’auteur et qui visent précisément à maintenir les droits acquis des populations mélanésiennes en matière de terre et de droit personnel sont rejetés. Ses critiques sont toutes aussi vives, au sujet du projet de loi rendant applicables le code pénal et certaines dispositions législatives dans les territoires d’outre-mer, dont la discussion d’étend du 25 avril au 20 mai 1980. Il défend 20 amendements, tous rejetés, qui traduisent une volonté de réformer la justice ultramarine dans un plus grand respect des droits de l’homme. En ce sens, deux autres discussions, similaires sur le fond, s’engagent le 25 novembre suivant : l’une est consacrée, cette fois-ci, à l’applicabilité du code de procédure pénale et de certaines dispositions législatives dans les territoires d’outre-mer. A nouveau, il est très présent dans les débats et présente trente-et-un amendements : dix-sept d’entre eux sont rejetés, alors que quatorze restent sans objet. L’autre discussion, qui clôt le cycle des débats sur ce sujet, concerne les conditions d’application des dispositions du code pénal et de la législation relatives à l’enfance délinquante dans les territoires d’outre-mer. Si ses quatre sous-amendements sont rejetés, un des six amendements qu’il signe est adopté. Il vise à rendre obligatoire la présence d’assesseurs aux audiences foraines et en sections. Enfin, au terme de la législature, il monte à la tribune dans la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à l’aménagement foncier et à l’établissement rural dans le territoire de la Nouvelle-Calédonie et ses dépendances. Il démontre que la réforme foncière ne se pose pas en termes économiques, en raison du caractère sacré que les Mélanésiens ont avec leurs terres. Le député socialiste du Val-de-Marne suggère l’élaboration d’un nouveau droit foncier, tenant compte du droit civil et des règles coutumières.
Au cours de ce mandat, Joseph Franceschi inscrit son action parlementaire en opposant affirmé au gouvernement de Raymond Barre. Le 20 avril 1978, il vote contre sa déclaration de politique générale. Il repousse tout aussi vigoureusement le projet de loi relatif à l’aide aux travailleurs privés d’emploi, le 5 janvier 1979. Il renouvelle son approbation au texte relatif à l’interruption volontaire de grossesse, lorsqu’il arrive en deuxième lecture devant l’Assemblée nationale, le 29 novembre 1979. Il vote contre la réforme de la fiscalité directe locale, en deuxième lecture, le 18 décembre 1979. A l’image de la représentation nationale, il approuve la proposition de loi relative au viol et aux attentats à la pudeur, le 11 avril 1980. Le 20 novembre de la même année, il soutient et approuve le texte modifiant le code électoral, en vue de favoriser la participation des femmes aux élections municipales. En revanche, il rejette le projet de loi « sécurité et liberté », défendu par le garde des Sceaux Alain Peyrefitte, le 18 décembre suivant.
Aux élections présidentielles de 1981, la victoire de François Mitterrand est pour Joseph Franceschi l’aboutissement heureux du travail parlementaire mené dans l’opposition. Si ce n’est l’amitié que François Mitterrand porte au maire d’Alfortville, la spécificité et la légitimité que le parlementaire socialiste a acquises dans le domaine du troisième âge expliquent aussi sa nomination au poste de secrétaire d’Etat à la solidarité nationale, chargé des personnes âgées, dans le gouvernement de Pierre Mauroy. Fondée sur la volonté de progrès et de justice sociale du nouveau pouvoir, sa campagne législative qui suit revêt aussi un caractère local. Accompagné de son suppléant René Rouquet, électromécanicien, Joseph Franceschi arpente la quatrième circonscription du Val-de-Marne, et décline ce qui, pour les socialistes, sera au fondement du « vivre mieux, autrement et ensemble ». Investi par le PS et soutenu par le Mouvement des radicaux de gauche (MRG), l’Association écologique du Val-de-Marne, le Parti socialiste unifié (P.S.U.) et le Mouvement des démocrates, Joseph Franceschi arrive en tête des six candidats en lice au premier tour du scrutin législatif, avec 42,3% des voix. L’ancien député Alain Griotteray, maire de Charenton-le-Pont, et candidat de la majorité sortante, ne recueille que 2 000 voix de moins que le maire et conseiller général d’Alfortville. Au second tour, le candidat socialiste triomphe, avec 56,8% des suffrages exprimés. Il conserve ses fonctions ministérielles dans le deuxième cabinet Mauroy, constitué au mois de juin 1981.
Ancien président du groupe parlementaire d’études sur les problèmes du troisième âge, Joseph Franceschi demandait la création d’un secrétariat d’Etat aux personnes âgées depuis plusieurs années. Sur ces questions, il a voulu démontrer l’exemplarité de sa ville, commune de 38 000 habitants, en mettant en place une politique originale de logement et d’animation pour les personnes âgées, avec des résidences de plein centre-ville parfaitement intégrées à la vie de quartier. Si sa présence, comme ministre, au Palais-Bourbon est d’abord limitée par celle de Nicole Questiaux, ministre d’Etat chargée de la solidarité nationale, Joseph Franceschi acquiert plus d’indépendance dans la défense du budget de la solidarité nationale, pour l’année 1982. Il fonde son argumentation sur la nécessaire solidarité envers les retraités et les personnes âgées. Pour éviter l’exclusion sociale des personnes âgées, il prône l’augmentation du minimum vieillesse, la majoration des pensions des assurés sociaux et l’augmentation du taux de réversion des petites pensions. Il souligne la situation difficile des personnes âgées dépendantes et observe la réduction des blocages résultant de la lourde récupération de l’aide sociale sur les successions. Il expose enfin ses ambitions en matière de projets, à l’image de la création de petites unités d’accueil intégrées à la vie collective, la création de petits équipements de quartier et de résidences pour hébergement temporaire ou la préparation de plans gérontologiques départementaux.
A la suite de l’attentat sanglant de la rue des Rosiers, survenu à Paris le 17 août 1982, Joseph Franceschi est nommé le même jour secrétaire d’Etat à la sécurité publique, auprès du ministre d’Etat, ministre de l’intérieur et de la décentralisation. Ce changement de portefeuille peut paraître surprenant, tant les affectations ministérielles sont différentes. Mais c’est oublier que Joseph Franceschi a aussi acquis une réputation de spécialiste de la sécurité au sein du PS et, plus particulièrement auprès de François Mitterrand. En effet, le maire d’Alfortville a organisé la sécurité du candidat socialiste au cours des deux campagnes présidentielles de 1974 et de 1981. A ce titre, sa proximité avec François Mitterrand s’est renforcée. D’ailleurs, au cours de la campagne de 1981, il fut le seul, avec François de Grossouvre, à ne jamais quitter le député de la Nièvre dans ses déplacements. Cependant, la mission confiée à Joseph Franceschi et menée à son terme n’a pas été toujours facile, en raison de la volonté du candidat de toujours arriver dans les réunions électorales, très fortement fréquentées, par la porte opposée à la tribune, et ce dans le but de fendre la foule sur une longue distance. Par ailleurs, sur un plan plus général, Joseph Franceschi, très attaché à ses origines corses, a gardé de nombreux amis dans l’île. Il a compris très tôt l’engrenage de la violence et les mécanismes du terrorisme insulaire. Fin connaisseur du Proche-Orient, vice-président du groupe d’amitié parlementaire France-Israël, il est sensible aux difficultés que pose le maintien de la sécurité en milieu urbain, notamment par ses fonctions de maire d’une banlieue populaire. Son changement de portefeuille, s’il apparaît donc fondé, va s’avérer un choix discutable. Les relations entre le secrétaire d’Etat et son ministre de tutelle Gaston Defferre sont mauvaises, le titulaire de la place Beauvau percevant la nomination de son collègue Franceschi comme une réduction au pire, au mieux comme un dédoublement inefficace de l’activité du « premier flic de France ». Joseph Franceschi prend de nombreuses initiatives, à commencer par se présenter comme « l’ami des policiers », auxquels il souhaitait redonner « confiance et enthousiasme ». Il fait entrer dans son cabinet le « super-flic » Robert Broussard, spécialiste de la lutte contre le grand banditisme et les prises d’otages. Chargé plus particulièrement de la lutte antiterroriste, le secrétaire d’Etat rencontre Abou Iyad, le 27 décembre 1982, l’un des principaux dirigeants de l’Organisation de libération de la Palestine (O.L.P.).
C’est à la suite des manifestations de policiers, en juin 1983, jusque sous les fenêtres du garde des Sceaux, que les relations entre Joseph Franceschi et Gaston Defferre se dégradent. Reconnu pour sa réputation « d’homme à poigne », le secrétaire d’Etat à la sécurité publique quitte cependant son poste en juillet 1984, alors que Pierre Mauroy présente la démission de son troisième gouvernement. Il n’a pu améliorer sensiblement les relations difficiles entre le pouvoir et la police. Il est devenu, au fil des mois, un facteur de division dans une police déjà peu unie, un rouage apparemment inutile entre un ministre de l’intérieur à nouveau préoccupé par les questions policières, et un directeur général de la police nationale puissant et efficace. Laurent Fabius, nommé premier ministre, propose à Joseph Franceschi de reprendre ses anciennes fonctions ministérielles et de rejoindre son équipe au poste de secrétaire d’Etat chargé des retraités et des personnes âgées, auprès de la ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale, Georgina Dufoix. Dans le gouvernement du plus jeune premier ministre des trois dernières Républiques, Joseph Franceschi remplit sa tâche, en souhaitant devenir « le Léo Lagrange du troisième âge ». A cet égard, il lance un vaste plan de rénovation des hospices.
Avec les élections législatives du 16 mars 1986, Joseph Franceschi, réélu conseiller général du canton d’Alfortville-Nord l’année précédente, après avoir été reconduit à la mairie en mars 1983, est de nouveau candidat dans le Val-de-Marne. Vice-président du Conseil général, il mène la liste présentée par le Parti socialiste, le M.R.G. et l’Alliance écologique. Sur douze élus, seuls trois socialistes sortent victorieux de ce scrutin dans lequel une large part de proportionnelle a été introduite. Aux côtés du maire d’Alfortville, Laurent Cathala, maire de Créteil, et Paulette Nevoux, conseillère municipale de Chennevières, font leur entrée à l’Assemblée nationale. L’ancien ministre s’inscrit au groupe socialiste et retrouve la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Au cours de cette brève législature marquée par la cohabitation, il dépose une proposition de loi tendant au regroupement des consultations électorales, le 22 décembre 1987. Auparavant, il est intervenu à quatre reprises en séance publique, au cours de l’année 1986, sur des sujets dont il est devenu le spécialiste. Le 8 juillet 1986, il soutient l’exception d’irrecevabilité soulevée par Pierre Joxe, dans la discussion du projet de loi relatif à la Nouvelle-Calédonie. Il regrette la diminution de l’autonomie des régions, et défend la spécificité de la Nouvelle-Calédonie au sein de la communauté nationale. Dans ce débat, il fait trois rappels au règlement, et dépose sept amendements qui sont tous rejetés. Le 26 novembre suivant, il monte à la tribune, au nom du groupe socialiste, dans la discussion générale du projet de loi de programme, adopté par le Sénat, relatif au développement des départements d’outre-mer, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte. Il raille l’objectif électoraliste de la loi défendue par le ministre des D.O.M.-T.O.M., Bernard Pons. Il souligne l’insuffisance des moyens financiers, s’interroge sur le minimum vieillesse dans les D.O.M. et considère les zones franches comme un « gadget ». Il voit enfin dans le projet de loi le risque d’un réveil des tentations séparatistes.
Joseph Franceschi consacre ses dernières interventions au domaine sociétal. Le 6 décembre 1986, il défend le préservatif, en souhaitant développer la facilité de leur achat à l’aide de distributeurs automatiques. Il veille ainsi à ce que les pharmacies n’en aient pas le monopole de vente et à ce que l’interdiction de leur publicité commerciale soit supprimée. Au cours de l’année 1987, rapporteur d’une proposition de loi tendant à faciliter les opérations de vote des personnes aveugles et non voyantes qui ne viendra pas en discussion, il prend aussi la parole dans la discussion du projet de loi relatif à l’organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l’incendie et à la prévention des risques majeurs, le 8 juillet. Il propose huit amendements, les défend, mais ne peut éviter que cinq d’entre eux soient rejetés, et que les trois autres perdent leur objet initial. Tous visaient à un meilleur encadrement de cette organisation par l’Etat et les collectivités locales. Par ailleurs, le 8 octobre 1987, il est l’auteur de deux amendements au projet de loi adopté par le Sénat, tendant à la création d’un Institut national de l’enseignement, de la recherche, de l’information et de la prévention sur les toxicomanies, relatif à la lutte contre le trafic et l’usage des stupéfiants et modifiant certaines dispositions du code pénal. Joseph Franceschi souhaite limiter la portée de la réforme concernant la confusion des peines aux cas dans lesquels certaines infractions à la législation sur les stupéfiants sont en concours avec un crime.
Au cours de cette législature, le député socialiste du Val-de-Marne manifeste son opposition au gouvernement de Jacques Chirac. Le 9 avril 1986, il vote contre la déclaration de politique générale du premier ministre ; quelques mois plus tard, le 20 novembre, il approuve certes l’article unique du texte gouvernemental autorisant la ratification de l’Acte unique européen. Mais le 7 avril 1987, il rejette à nouveau la déclaration de politique générale du gouvernement, cependant que le 7 mai suivant, il vote pour le projet de loi sur l’autorité parentale.
Joseph Franceschi n’est pas candidat à sa succession aux élections législatives du printemps 1988, à la suite de la réélection de François Mitterrand à la présidence de la République. Malade, il disparaît le 10 mars de cette année-là, alors que la législature n’est pas terminée. Les socialistes perdent la circonscription au renouvellement législatif. Jean-Jacques Jégou, conseiller général U.D.F. et maire du Plessis-Trévise, est élu député, avec 52,5% des voix, le 12 juin 1988.
Joseph Franceschi aura été le meilleur connaisseur des problèmes liés au troisième âge au sein du Parti socialiste de François Mitterrand, comme il fut aussi un précurseur en matière de sécurité publique. Il était l’auteur d’un certain nombre d’ouvrages tels que Les Groupes de pression dans la défense de l’enseignement public (1964), Alfortville : sociologie humaine et politique (1971), Un demi-siècle de consultations électorales dans la circonscription de Charenton (1973), et Alfortville : cartes, photos, documents (1985).