Abel Gardey
1882 - 1957
Né le 21 novembre 1882 à Margouet-Meymes (Gers).
Député du Gers de 1914 à 1919.
Sénateur du Gers de 1924 à 1941.
Ministre de l'Agriculture du 3 juin 1932 au 18 décembre 1932.
Ministre de la Justice du 18 décembre 1932 au 31 janvier 1933.
Ministre du Budget du 26 octobre 1933 au 26 novembre 1933.
Il était du pays de d'Artagnan, mais s'il avait la faconde du pur et franc Gascon, il n'en avait pas l'enjouement. Son attitude était empreinte d'une gravité, d'une austérité même, que relevaient non sans malice ses adversaires politiques lorsqu'Abel Gardey officiait en qualité de rapporteur général de la commission des finances du Sénat.
Etudes de droit à Bordeaux, aboutissant au doctorat, il s'inscrit ensuite comme avocat à la cour d'appel de Paris. Il y fait des débuts remarqués.
La politique l'attire. Dès 1910, il est conseiller général du Gers, mais c'est en 1914 que se situent ses vrais débuts. C'est alors le 26 avril, qu'après une campagne mémorable, retentissante, riche de part et d'autre d'éloquence méridionale, il bat de justesse le député sortant de la circonscription d'Auch, Samalens, par 6.717 voix contre 6.402. Sa victoire, dit-on, fut ressentie comme le triomphe des vrais républicains.
A la Chambre, il s'inscrit au groupe républicain radical et radical-socialiste et il fait montre d'une activité presque fébrile. Ce trait le caractérise, du reste : toute sa vie, Abel Gardey fut un travailleur acharné. Il est, pour commencer, membre de trois commissions permanentes : celle de l'enseignement et des beaux-arts, celle des postes et télégraphes, celle du budget. II ne manquera pas non plus de participer à plusieurs commissions spéciales constituées pour des objets précis. Cependant, la commission essentielle, primordiale, est celle du budget.
Il est à relever, dès cette époque, l'intérêt porté par Abel Gardey aux questions agricoles.
C'est en 1919 seulement que naît le véritable Abel Gardey, docteur en matière de finances, lorsqu'à l'occasion d'une interpellation de Vincent Auriol au nom des socialistes sur la situation financière, il prononça le premier des nombreux discours retentissants qui devaient établir sa réputation. Dix-huit ans plus tard, en 1937, Abel Gardey, rapporteur général de la commission des finances du Sénat, et Vincent Auriol, ministre des Finances du gouvernement de front populaire auront d'autres affrontements.
Aux élections du 16 novembre 1919, faites à la représentation proportionnelle, Abel Gardey disparaît. Par manière de compensation, le Conseil général du Gers le porte - et une fois pour toutes - à sa présidence. En 1924, c'est enfin la revanche, et définitive. Il est élu sénateur par 483 voix sur 709 votants. Il s'inscrit au groupe de la gauche démocratique. Il arrive précédé d'une réputation flatteuse, mais il a l'habileté de n'en pas abuser. Le voilà membre de la commission de l'enseignement, également membre de la commission de législation civile et criminelle, enfin en 1926 membre de la commission des finances. Il reçoit d'abord en charge le rapport sur le budget des poudres, puis le budget de l'agriculture ; enfin, en 1931, il devient rapporteur général, quasiment inamovible, jusqu'à la chute de la IIIe République.
Abel Gardey intervient dans tous les domaines ; la simple énumération de ses rapports occupe, à chaque session, plusieurs colonnes du Journal officiel. Il faut donc se borner à ses interventions les plus marquantes : la délivrance obligatoire d'un livret de famille lors de la célébration du mariage, le principe de la déclaration obligatoire des revenus. En 1929, autre grande intervention, cette fois au nom de la commission de législation. L'appareil judiciaire avait été profondément transformé, essentiellement pour des raisons d'économie : Abel Gardey critique sévèrement, acerbement, ce bouleversement et réclame avec éclat un « vote de restauration » ; il entraîne le Sénat au point que Barthou déclare, sur le mode de la confidence, que le projet auquel il va donner son vote de sénateur n’offre plus guère de ressemblance avec celui qu'il avait présenté en tant que ministre de la Justice.
Abel Gardey intervient également, en 1931, lors de la discussion de la loi sur l'outillage national, la première en date des lois d'équipement.
Son œuvre maîtresse, ce sont ces rapports généraux qui s'échelonnent d'année en année. Dès 1931 on est en présence des maîtres-mots de la politique financière qu'Abel Gardey développera avec l'assentiment et l'appui de Joseph Caillaux : nécessité de l'équilibre budgétaire coûte que coûte, compression des dépenses.
Albert Lebrun, élu Président de la République après l'assassinat de Paul Doumer, appelle au pouvoir Herriot lequel, en souvenir des brillants rapports de naguère, choisit pour ministre de l'Agriculture Abel Gardey. Il n'eut pas le temps de mettre en pratique ses idées : le 14 décembre, Herriot est renversé sur la question des dettes de guerre. Le ministère Paul-Boncour qui lui succède ressemble comme un frère au précédent. Abel Gardey qui a troqué l'Agriculture contre la Justice lit au Sénat la déclaration du gouvernement qui n'a qu'une existence éphémère.
Entre-temps, Abel Gardey avait été réélu sénateur du Gers le 16 octobre 1932, par 558 voix sur 714 votants. Un cabinet Albert Sarraut est formé le 26 octobre 1933, où le ministère du Budget est confié à Abel Gardey, mais ce poste périlleux est, ô combien, éphémère, le gouvernement est renversé le 23 novembre! Dès 1934, il retrouve sa place à la commission des finances, dorénavant présidée par Caillaux, et sa charge de rapporteur général, qui lui permet de multiplier les avis, les avertissements, les mises en garde, les admonestations aux gouvernements qui défilent.
Et puis surviennent les élections d'avril et mai 1936 et le front populaire triomphant. Face à ce changement radical, l'attitude d'Abel Gardey est intéressante à observer car elle traduit, ou trahit, à merveille l'état d'esprit de ces radicaux associés bon gré mal gré au front populaire mais considérant ses développements avec une méfiance grandissante. Sa première réaction publique significative est exprimée, comme à l'ordinaire, dans son rapport général sur le budget de 1937 présenté par Vincent Auriol. Abel Gardey rejette sur le gouvernement la responsabilité de la situation actuelle : l'instabilité de la monnaie, l'insécurité sociale, le déficit budgétaire.
Le 17 juin 1937, ce gouvernement à direction socialiste en passe par où tous les gouvernements « bourgeois » ont passé : il demande à son tour au Parlement les pleins pouvoirs. C'est là qu'on l'attendait. Au Sénat, le 19, Abel Gardey mène une attaque en règle. La demande du gouvernement, déclare-t-il, met en jeu le fonctionnement régulier des institutions parlementaires.
Le cabinet démissionne. Il est remplacé par un cabinet Chautemps, à participation socialiste, lequel demande à son tour les pleins pouvoirs le 30 juin. Abel Gardey prononce un discours des plus sévères, sarcastique. Finalement, le gouvernement obtient les pleins pouvoirs. En janvier 1938, le front populaire se disloque : Chautemps déclare se passer du concours des communistes. Du coup, les socialistes se retirent du gouvernement. Intermède. Nouvel essai de Blum qui échoue une fois encore, au Sénat, où sa demande de pouvoirs spéciaux suscite un réquisitoire de la part d'Abel Gardey. Le Sénat repousse le projet par 214 voix contre 47. Le front populaire est mort.
Vient ensuite le gouvernement Daladier dont les deux ans de durée conduisent à la guerre, au gouvernement Reynaud et à la débâcle. Son premier geste est de réclamer pour son compte les pleins pouvoirs qui ont été refusés à Blum, et le premier geste du Parlement de les lui accorder à l'unanimité. L'accord de Munich est signé le 30 septembre. Dès le 4 octobre, le gouvernement demande une fois encore les pleins pouvoirs ; après un discours d'Abel Gardey qui prend acte de la « résolution du gouvernement de s'attaquer aux causes profondes du mal », ceux-ci lui sont accordés, au Sénat, par 286 voix contre 4. Jusqu'au souvenir du front populaire est effacé : en novembre, Paul Reynaud prend le portefeuille des Finances et, le 13, quarante-deux décrets-lois paraissent à l'Officiel, qui puisent dans l'arsenal des mesures de l'orthodoxie la plus éprouvée.
Abel Gardey eut encore l'occasion d'intervenir, en tant que rapporteur général, lors de l'examen du budget des services civils pour 1940, les dépenses militaires étant du domaine des pouvoirs spéciaux, et du collectif budgétaire pour 1939. Les événements prennent désormais de court le rapporteur général qui, comme chacun ou presque, vote le 10 juillet 1940 les pleins pouvoirs au gouvernement du maréchal Pétain.
Né le 21 novembre 1882 à Margouët-Meymes (Gers)
Décédé le 23 septembre 1957 à Pouylebon (Gers)
Député du Gers de 1914 à 1919 et de 1951 à 1956
(voir première partie de la biographie dans le dictionnaire des parlementaires français 1889-1940, tome V, page 1779)
Après la Libération, Abel Gardey se présente sans succès aux élections législatives du 10 novembre 1946 dans le département du Gers, sous l'étiquette radical-socialiste.
Il se porte à nouveau candidat à l'Assemblée nationale le 17 juin 1951, en tête de la liste du Parti républicain radical et radical socialiste, après une tentative infructueuse au Conseil de la République en novembre 1948.
Dans ses engagements électoraux, il se prononce pour le rétablissement du pouvoir régulateur de la seconde assemblée et le retour au scrutin uninominal majoritaire d'arrondissement. Il insiste sur le caractère fondamental de la notion de laïcité de l'Etat. Les problèmes de l'agriculture retiennent particulièrement son attention, eu égard à l'importance qu'ils revêtent dans sa circonscription électorale. Il dénonce la discordance des prix agricoles et des prix industriels, le déséquilibre du monde rural et les retards apportés à la lutte contre les calamités agricoles.
Il est, cette fois, élu, sa liste obtenant 21 150 voix sur 78 069 suffrages exprimés, soit 27,1 % du total. La liste du PCF (avec 22,7 % des suffrages) et celle de la S.FIO (avec 19,4 % des voix) emportant chacune un des deux autres sièges du département. Nommé membre de la Commission des finances, il dépose à ce titre seize rapports et quatre avis au cours de la législature. Il intervient à plusieurs reprises dans la discussion des projets de loi de finances. Au cours des débats portant sur le projet de loi relatif à l'exercice 1952, il émet des observations sur la gravité de la situation financière, l'amnistie fiscale et le déficit des sociétés nationales. L'année suivante, il insiste sur la nécessité de restaurer l'économie française par la lutte contre l'inflation, la balance du commerce extérieur et la réforme constitutionnelle.
Il intervient également en qualité de rapporteur dans la discussion du projet de loi relatif aux dépenses des ministères pour 1954, en ce qui concerne la justice. Il évoque, à cet égard, la diminution du personnel pénitentiaire, le regroupement des tribunaux et l'amélioration de la situation indemnitaire des magistrats.
Elu conseiller général du canton de Montesquiou en octobre 1951, Abel Gardey se présente sans succès aux élections sénatoriales du 19 juin 1955.
Il ne sollicite pas le renouvellement de son mandat de député, lors des élections législatives du 2 janvier 1956.
Retiré de la vie politique, Abel Gardey est mort à Pouylebon (Gers), le 23 septembre 1957.
Il était chevalier de la Légion d'honneur et titulaire de la Croix de Guerre 1914-1918.