André Schock
1914 - 1973
SCHOCK (André, Louis)
Né le 22 avril 1914 à Saint-Ail (Meurthe-et-Moselle)
Décédé le 13 octobre 1973 à Clichy (Hauts-de-Seine)
Membre de la seconde Assemblée nationale constituante (Côte d’Ivoire)
Né le 22 avril 1922 à Saint-Ail, André Schock est le fils de Camille Constant Schock, ouvrier d’usine, et d’Anne-Marie Page, sans profession. Son père est tué au combat quelques mois plus tard, en septembre 1914, et sa mère quitte la Lorraine avec lui, devant l’avancée des troupes allemandes. Ils s’installent en Bretagne où le jeune André effectue ses études au lycée de Brest. Ses premiers contacts avec l’Afrique ont lieu en 1937 lorsqu’il part au Dahomey (actuel Bénin) comme employé de la Société commerciale de l’Ouest-Africain (SCOA). Lorsque la guerre éclate, il est mobilisé à sa demande et se rend à Dakar qu’il quitte clandestinement après sa démobilisation, en septembre 1940, pour se rendre dans la colonie britannique du Nigeria où il s’engage dans les Forces françaises libres (FFL). A partir de la mission FFL d’Accra, en Gold Coast (actuel Ghana), il organise à destination de l’Afrique occidentale française (AOF), restée fidèle au régime de Vichy, une propagande pour la France libre, un réseau de renseignements et d’évasion, surtout en Côte d’Ivoire voisine. Ces actions lui valent d’être condamné à mort par contumace par le tribunal militaire de Dakar. En juin 1943, quelques mois après le ralliement de l’AOF à la France libre, il rejoint le général de Gaulle en Angleterre où il est incorporé dans le Bureau central de renseignements et d’action (BCRA). Le 22 octobre 1943, il est parachuté en France, avec la mission de diriger, d’unifier la résistance militaire et de coordonner ses actions dans les huit départements de l’Est. Il organise, entre autres, des sabotages de locomotives dans les dépôts de Reims et de Nancy. Il a utilisé successivement plusieurs pseudonymes : Morvan, Voltigeur, Diagonale, Lenôtre. Arrêté par la Gestapo, le 28 janvier 1944, il est blessé en tentant de s’échapper mais il est repris, emprisonné à Fresnes, envoyé à Buchenwald, le 8 juin 1944, puis à Bergen-Belsen, le 11 avril 1945 où il sera délivré par les Anglais peu de temps après. Il est nommé Compagnon de la Libération par décret du 19 octobre 1945.
Devenu importateur en Côte d’Ivoire, il s’intéresse à la vie politique de la colonie, en relation avec l’Association des colons de Côte d’Ivoire, dirigée par Jean Rose. Il pose sa candidature à la première Assemblée nationale constituante devant le collège des citoyens, en octobre 1945, mais il n’arrive qu’en quatrième position - sur onze candidats - au premier tour avec 339 suffrages sur 2 802 exprimés. Il est battu par l’ancien gouverneur général François-Joseph Reste, avec une seule voix au second tour.
Il fait partie de la délégation de l’AOF à la deuxième session des Etats généraux de la colonisation qui se réunit à Paris, du 30 juillet au 24 août 1946. Cette rencontre, qui aurait dû se tenir à Abidjan en juin 1946, a été repoussée à cause des élections à la deuxième Assemblée constituante. Y domine une conception conservatrice de la colonisation, défendue par ailleurs dans le Manifeste colonial émanant d’organismes comme l’Académie des sciences coloniales, le Comité de l’Empire français ou la Ligue maritime et coloniale et les revues Marchés coloniaux et le Journal de la Marine marchande. Le Manifeste colonial prône, entre autres, le maintien de la double citoyenneté et du double collège.
Entre-temps, André Schock a été élu député à la deuxième Assemblée constituante, en juin 1946, comme « Indépendant », soutenu par le Mouvement républicain populaire (MRP), puis apparenté à cette formation. Au premier tour, il arrive deuxième sur six candidats, après le député sortant, François-Joseph Reste. Toutefois, il est parvenu à le devancer au deuxième tour en rassemblant 1 101 des 2 414 suffrages exprimés par le collège des citoyens. Il a bénéficié, en effet, d’une campagne menée par les milieux coloniaux locaux contre celui qui avait pris position officiellement en faveur de l’abrogation du travail forcé proposée par Félix Houphouët-Boigny.
A l’Assemblée, où il est apparenté MRP, il est nommé membre de la commission des territoires d’Outre-mer, le 23 juillet 1946, et de la commission de l’amnistie en Algérie, le 20 août suivant. Il demande à interpeller le Gouvernement sur la politique qu’il entend suivre en Côte d’Ivoire, notamment en matière économique. Comme son initiative n’est pas suivie d’effet, il profite de la discussion générale sur le projet de loi portant ouverture et annulation de crédits sur l’Exercice 1946 pour la France d’Outre-mer, le 3 octobre 1946, pour intervenir. Ce sont ses deux seules interventions de député. Il ne dépose aucun texte. Porte-parole des milieux coloniaux qui l’ont envoyé au Palais-Bourbon, il rappelle les difficultés existantes pour acheminer les produits de Côte d’Ivoire vers la métropole, puis dénonce le manque d’équipement industriel, les moyens financiers - « ridicules » au regard des besoins - consentis à la Caisse centrale de la France d’Outre-mer, et surtout le manque de coordination entre les services du ministère et ceux du Haut-commissaire de l’Afrique occidentale française (AOF). L’incurie de l’administration, dit-il, est particulièrement visible en ce qui concerne l’insuffisance de main-d’oeuvre car les recommandations ministérielles du 11 mai 1946, pour pallier les conséquences de l’abolition du travail forcé, n’ont pas eu d’effet en Côte d’Ivoire. Sans proposer qu’on en revienne au recrutement forcé, il insiste pour qu’on développe les moyens de s’en passer. A cette dénonciation d’une « situation catastrophique » due à la politique gouvernementale, le ministre de la France d’Outre-mer, Marius Moutet, répond, dans une intervention plus générale, que le député « retarde » : il y a assez de main-d’oeuvre en Côte d’Ivoire, les ouvriers y sont mieux payés qu’auparavant, la capacité d’évacuation des produits est semblable à celle de l’avant-guerre et il faut seulement refaire un équipement qui s’est usé.
André Schock ne se représente pas aux élections ultérieures qui ont lieu, d’ailleurs, dans le cadre du collège unique. En revanche, il devient conseiller de l’Union française au titre de l’Assemblée nationale, de 1948 à la fin de 1951, puis y siège en tant que représentant de la Haute-Volta jusqu’en 1953. Membre de la commission de défense de l’Union française, de la commission spéciale d’étude du chemin de fer du Dahomey-Niger en 1949, il participe également à la commission de l’instruction (1949-1950), à la commission de politique générale (1950), à la commission de l’agriculture, de l’élevage, des chasses, des pêches et des forêts (1949-1953), à la commission du plan, de l’équipement, et des communications (1949-1953), et à l’inter-commission chargée des questions foncières et domaniales (1953). Pendant les premières années, il est particulièrement actif au sein de cette instance dont il devient l’un des secrétaires en 1949. Il dépose de nombreuses propositions de résolution, ainsi que des rapports : neuf en 1949, dix en 1950, deux dans chacune des années suivantes. Bien que la plupart porte sur des questions économiques et sur l’équipement des territoires d’Outre-mer, ils concernent aussi d’autres sujets, à l’instar de la création de « jeux de l’Union française » permettant d’organiser des compétitions sportives régulières entre ses différentes composantes (28 octobre 1952). En se réclamant toujours du MRP, André Schock intervient fréquemment dans les débats, parfois en tant que rapporteur de commission. Si ses préoccupations demeurent d’ordre économique, à l’instar de la question des prix obtenus pour leurs produits par les planteurs européens et africains dans un contexte de concurrence internationale (24 mai 1950), elles sont également politiques. Ainsi, à la suite d’événements politiques survenus en Côte d’Ivoire, en décembre 1949 et en janvier 1950, il attaque violemment le Rassemblement démocratique africain (RDA) et plusieurs de ses dirigeants, Félix Houphouët-Boigny et Gabriel d’Arboussier, pour leur apparentement au parti communiste. Il semble avoir sous-estimé l’ampleur des mouvements de décolonisation ; au retour d’un voyage d’études aux Indes françaises, il affirme que les Etablissements français resteront dans l’Union française (L’Aube du 12 décembre 1949). Il est moins présent dans les discussions en 1952 et 1953.
A la fin de son mandat, il retrouve le secteur privé en devenant directeur de l’Ecole des ventes aux Forges de Strasbourg. Il meurt le 13 octobre 1973. Il était commandeur de la Légion d’honneur et titulaire de multiples décorations : croix de Guerre 1939-1945, médaillé de la Résistance, Military-Cross (Grande-Bretagne), croix de Guerre (Belgique), officier de l’Ordre de la Couronne (Belgique).
Près d’un quart de siècle après sa mort, la ville de Nancy lui a rendu hommage en donnant le nom d’André Schock à l’une des rues de la ville.