Georges Pompidou
1911 - 1974
Président de la République du 20 juin 1969 au 2 avril 1974
POMPIDOU (Georges, Jean, Raymond)
Né le 5 juillet 1911 à Montboudif (Cantal)
Décédé le 2 avril 1974 à Paris
Député du Cantal de 1967 à 1969
Président de la République du 20 juin 1969 au 2 avril 1974
« Je n’ai de ma vie mis les pieds à l’Assemblée, même pas dans les tribunes », confie Georges Pompidou à Alain Peyrefitte, le 23 avril 1963, alors qu’il vient d’être nommé Premier ministre quelques jours plus tôt. Par la suite, il deviendra l’un des meilleurs orateurs du Palais-Bourbon, mais surtout au titre de chef du gouvernement. Il n’est député que pendant quinze mois, du 5 mars au 6 juin 1967 et du 23 juin 1968 au 15 juin 1969, date à laquelle il est élu président de la République. Encore faut-il préciser qu’il ne siège au Palais-Bourbon qu’à partir du 11 juillet 1968, au lendemain de sa démission de Matignon.
Rappelons brièvement que Georges Pompidou, petit-fils de paysan et fils d’instituteur, brillant sujet de la méritocratie républicaine, issu de l'Ecole normale supérieure (1931) et de l'agrégation de lettres (1934), marié le 29 octobre 1935 à Claude Cahour, père d’un fils adoptif prénommé Alain (né en 1942), s’est d’abord destiné à une carrière d’enseignant, professeur de lettres à Marseille au lycée Saint Charles, puis à Paris, au lycée Henri-IV. Mobilisé en 1940, au 141ème régiment d'infanterie alpine puis démobilisé après la bataille de France, il n’est entré en politique que par les hasards de l’histoire, par l’entremise de son ancien condisciple de khâgne René Brouillet, qui l’a fait entrer au cabinet du général de Gaulle, président du gouvernement provisoire, en septembre 1944. Au départ du général en janvier 1946, Georges Pompidou a été nommé adjoint d'Henri Ingrand, commissaire général au tourisme, puis est devenu, cette même année, maître des requêtes au Conseil d'Etat.
Sans adhérer au Rassemblement du Peuple Français, crée en 1947, il est resté proche des milieux gaullistes en animant notamment le Comité national d'études présidé par Gaston Palewski. Directeur de cabinet du général de Gaulle d’avril 1948 à 1953, il est ensuite parti vers les affaires privées, comme directeur de la banque Rothschild. Il n’est revenu en politique que pour diriger le cabinet du général de Gaulle, appelé à la présidence du Conseil en juin 1958. Nommé en février 1959 au Conseil constitutionnel, il a ensuite exercé plusieurs missions secrètes afin de résoudre le problème algérien, mais sans briguer aucun mandat électif ni aucune responsabilité gouvernementale. Sa nomination à Matignon, le 4 avril 1962, n’a pas été une totale surprise, car son efficacité était connue de tous, mais il semble l’avoir conçue comme un passage, une transition dans son cursus professionnel.
S’il se présente aux élections de mars 1967, c’est avant tout en tant que chef de la majorité présidentielle et de président du Comité d’action de la Vème République, dans le contexte difficile d’une poussée de la gauche, donnée favorite dans les sondages. L’histoire a notamment retenu de cette campagne la grande réunion du 31 janvier 1967 au Palais des sports, où Georges Pompidou attaque la gauche avec pugnacité, ainsi que les débats qui l’opposent à François Mitterrand, candidat dans la Nièvre, puis à Pierre Mendès France, candidat à Grenoble, les deux étant d’ailleurs élus avec la vague d’opposition qui déferle alors. Lui-même candidat dans la deuxième circonscription du Cantal, correspondant aux cantons de Riom et Saint-Flour, il insiste dans sa proclamation électorale sur son ancrage cantalien. S’il est évident que son suppléant Jean Sagette, maire de Neuvéglise et député sortant, exercera la réalité de la fonction, il promet néanmoins de mettre en place une permanence à Saint-Flour afin d’être en contact avec ses électeurs. Fort de son pouvoir de Premier ministre, il promet un programme de développement axé sur les communications avec Paris, sur les implantations industrielles, sur l’aide aux éleveurs et au tourisme thermal. Mais il rappelle aussi l’œuvre entreprise à l’échelon national en faveur de l’indépendance, de la paix en Algérie, de la stabilité politique et du progrès social. Il est facilement élu dès le premier tour avec 25 392 voix sur 40 792 exprimés, contre 6 600 à Maurice Montel, candidat pour la Défense des libertés républicaines, 4 198 au communiste Louis Taurant, 2 284 au centriste Richard Chaput et 1 963 à Gabriel Irondelle, candidat de la Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS). Notons que Jean Sagette n’avait été élu qu’au second tour en 1958, avec 19 492 voix sur 33 926 exprimés.
Chef d’une majorité amoindrie, contesté au sein même de la majorité par René Capitant et ses amis, Georges Pompidou reste néanmoins à Matignon. Inscrit le 3 avril 1967 au groupe d’Union démocratique pour la Vème République et nommé membre de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales, il est chargé dès le 6 avril de former son quatrième Gouvernement, ce qui l’oblige évidemment à céder son mandat de député à son suppléant Jean Sagette, le 6 mai 1967. S’il intervient à maintes reprises dans l’hémicycle au cours de la législature, c’est pour présenter sa déclaration de politique générale (18 et 20 avril 1967), pour évoquer la mémoire du chancelier allemand Konrad Adenauer (19 avril 1967), pour défendre le projet de loi autorisant le gouvernement à prendre des mesures d’ordre économique et social (18 mai, 7 et 14 juin 1967) ainsi que le projet de loi de finances pour 1968 (10 novembre 1967), et surtout pour combattre les motions de censure déposées par la gauche (19-20 mai, 9 juin et 10 octobre 1967, 23-24 avril et 21-22 mai 1968).
Sa deuxième candidature intervient dans le contexte de la crise de 1968, qui a provoqué un malaise très sérieux entre le président de la République et le chef du gouvernement, le premier accusant le second d’avoir « tout lâché » et d’avoir été « passif », si l’on en croit le témoignage d’Alain Peyrefitte. Lors de la séance parlementaire du 14 mai 1968, il est pourtant venu à l’Assemblée afin d’expliquer la position du Gouvernement face aux étudiants. Décidé à donner sa démission pour n’avoir pas été informé du voyage présidentiel à Baden, il est finalement resté à la tête d’un gouvernement remanié le 31 mai sous l’influence directe de l’Elysée. C’est donc par «fidélité au Cantal» que le Premier ministre, qui se sait en sursis, se représente devant ses électeurs. Chose rare, il joint à sa proclamation électorale un tableau récapitulatif de tous les avantages qu’il a pu obtenir pour sa circonscription lors de son précédent mandat, et ce grâce à sa présence à Matignon. Il énumère par ailleurs les mesures de son gouvernement qui ont favorisé les agriculteurs du Cantal. En outre, il justifie sa nouvelle candidature par le « devoir national », c'est-à-dire la nécessité de « barrer la route au communisme totalitaire et à l’anarchie » afin de « défendre la République. » Ce langage de peur sociale et de dramatisation, qui dénonce la « folie de quelques professionnels du désordre » et la « conjuration » contre le régime, est de nature à convaincre l’électorat conservateur des campagnes cantaloues.
Il est réélu encore une fois dès le premier tour, avec 30 129 voix (sur 37 616 exprimés), soit presque 5 000 voix de plus qu’un an plus tôt, contre le communiste Louis Taurant, son seul adversaire, qui ne recueille que 7 487 suffrages, bien moins que le total des gauches en 1967. Inscrit au groupe de l’Union des démocrates pour la République (11 juillet 1968), dont il deviendra bientôt le président d’honneur, nommé à la Commission des affaires étrangères (13 juillet 1968), il n’interviendra jamais à la tribune, se tenant en réserve de la République. Dès la rentrée, il installe boulevard Latour-Maubourg, à Paris, une petite équipe chargée de lui construire un destin présidentiel. Ebranlé à l’automne par l’affaire Markovic, il annonce en janvier 1969, depuis Rome, qu’il serait éventuellement candidat à la succession du général de Gaulle. Elu président de la République avec 58,21 % des suffrages exprimés, il adresse le traditionnel message présidentiel à l’Assemblée, qu’il quitte officiellement le jour-même, 25 juin 1969. Son suppléant, le docteur Pierre Raynal, maire de Chaudes-Aigues, accomplira la fin de son mandat.
On sait dans quelles circonstances tragiques s’achèvent la carrière et la vie de Georges Pompidou, victime de la maladie de Waldenström, décédé le 2 avril 1974 dans son appartement de l'île Saint-Louis. Parlementaire par devoir et par nécessité, il n’aura jamais exercé pleinement sa fonction de député, lui qui était pourtant un orateur et un « debater » de grand talent.