Armand, Marie, François, Pascal Marrast

1801 - 1852

Informations générales
  • Né le 5 janvier 1801 à Saint-gaudens (Haute-Garonne - France)
  • Décédé le 10 mars 1852 à Paris (Seine - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Présidence(s)

Présidence de l'Assemblée nationale
du 19 juillet 1848 au 26 mai 1849

Mandat(s)

Régime politique
Deuxième République
Législature
Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 23 avril 1848 au 26 mai 1849
Département
Haute-Garonne

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Membre du gouvernement provisoire et représentant en 1848, né à Saint-Gaudens (Haute-Garonne) le 5 juin 1801, mort à Paris le 10 mars 1852, il était encore en bas âge, lorsqu'il perdit son père, avoué à Saint-Gaudens. Sa mère dut prendre la direction d'une maison d'éducation de demoiselles à Saint-Sever (Landes), où Armand, son aîné, la suivit.

Ses études terminées sous la direction de l'abbé Lodès, il fut nommé régent au collège de Saint-Sever, entra en relations avec le général Lamarque, dont le neveu était dans sa classe, professa quelque temps (1824) la classe de quatrième au collège de Pont-Levoy (Loir-et-Cher) dont Germain Sarrut était le directeur, puis se rendit à Paris pour y chercher une situation meilleure. Le patronage de Kératry, de Laromignière et de Lamarque le fit entrer, comme maître d'études, au collège de Louis-le-Grand, où il se livra pendant quelque temps aux pratiques d'une dévotion austère, tout en prenant les grades de licencié et de docteur ès lettres, avec une thèse latine : De veritate, et une thèse en français : Est-ce aux poètes ou aux prosateurs qu'appartient la gloire d'avoir le plus contribué à former et à perfectionner le langue française ?

Chargé de la conférence de philosophie au lycée, il commença de montrer des idées libérales à l'avènement du ministère Martignac, et compromit sa carrière en prononçant un discours chaleureux (21 août 1827) sur la tombe de Manuel, et en prenant aussi une part active, avec la jeunesse des écoles, à la cérémonie des obsèques du célèbre député : il fut révoqué. Il tenta de rentrer dans le professorat par la voie de l'agrégation; mais on refusa de l'y admettre.

Il occupait les fonctions de précepteur du fils de M. Aguado, lorsque la révolution de Juillet éclata. Marrast s'associa au mouvement ; escomptant sans retard son dévouement, on dit qu'il sollicita alors une place de maître des requêtes au conseil d'Etat, ou de chef du secrétariat, puis de lecteur du roi Louis-Philippe. De hautes influences y mirent obstacle. Armand Marrast quitta alors la maison de M. Aguado, écrivit dans la Tribune, organe démocratique récemment fondé, des articles de littérature, ouvrit à l'Athénée des Arts un cours de philosophie, donna des leçons à l'Ecole de commerce, rédigea un journal grammatical, et publia, jour par jour, une réfutation du cours de Victor Cousin, dont l'influence n'avait pas été étrangère à ses mécomptes de candidat fonctionnaire.

Il passa bientôt de la rédaction littéraire de la Tribune à la rédaction politique, et se signala par de vives attaques contre le gouvernement ; les nombreuses poursuites qui lui furent intentées rendirent son nom populaire. En 1833, la Tribune ayant qualifié de « prostituée » la Chambre des députés, l'Assemblée cita à sa barre M. Lionne, gérant, MM. Armand Marrast et Godefroy Cavaignac, rédacteurs. Les deux écrivains soutinrent hardiment devant la Chambre les opinions qu'ils avaient émises la plume à la main, et Marrast s'écria en terminant sa défense : « On nous a beaucoup accusés, nous, d'avoir des principes subversifs... Subversifs de quoi ?... De ces choses, par exemple, que la France déteste. Oui, sans doute, c'est notre honneur, notre force et nos espérances ! Si, comme on l'a dit, nous étions purement et simplement des anarchistes, on ne nous aurait pas proclamés redoutables. Mais parce qu'on sait que nous nous appuyons sur des sentiments nationaux, on nous craint et on a raison; on nous calomnie, et on a raison encore, car, si le pays connaissait bien exactement nos intentions, le pouvoir nous craindrait bien plus encore. Mais patience!... » Ses derniers mots furent : « Si c'est une guerre contre la Tribune seule, elle est puérile ; si c'est contre la presse, vous y périrez! » Les débats fermés, on procéda à l'appel nominal pour le vote au scrutin secret : un certain nombre de députés libéraux et légitimistes se récusèrent, et finalement, par 256 voix contre 50, le gérant de la Tribune fut condamné à trois ans de prison et à dix mille francs d'amende.

L'année suivante (1834), impliqué dans le procès d'avril, Marrast fut arrêté et mis au secret à Sainte-Pélagie. Il parvint à s'évader avec vingt-sept de ses codétenus et passa en Angleterre, où il épousa miss Fitz-Clarence, petite-fille naturelle du roi George IV. « Ce mariage singulier d'un coryphée de la République avec une femme de royale origine, quoique du côté gauche, ne surprit point ceux qui connaissaient les ressources de son esprit insinuant... », écrivait un biographe conservateur. Après son mariage, il visita les principales villes d'Angleterre et d'Espagne ; il était à Barcelone lors du soulèvement contre Marie-Christine. De là, il rentra en France, quoique non gracié, et fut appelé, après la mort d'Armand Carrel, à la direction du National ; il la partagea d'abord avec Bastide, qui la lui abandonna entièrement en 1841, avec la responsabilité de l'appui que ce journal crut devoir prêter à la politique de Thiers sur la question des forts détachés. Cette attitude fut sévèrement jugée par la fraction la plus avancée du parti démocratique. Publiciste moins serré peut-être que Carrel, Marrast était plus fin et plus brillant.

La révolution de février 1848, dont il ne fut pas le moins surpris, fit de Marrast un membre du gouvernement provisoire, où il eut d'abord, comme Louis Blanc, Flocon et Albert, le titre de secrétaire. Le 1er mars, il fut chargé de l'administration des biens de la liste civile, qu'il avait fait mettre sous séquestre. Le 9 mars, en remplacement de Garnier-Pagès, nommé ministre des Finances, il reçut les fonctions de maire de Paris, dans lesquelles le confirma, le 11 mai suivant, la Commission exécutive, et qu'il exerça jusqu'au 19 juillet. Dans les conseils du gouvernement, Armand Marrast fut un des membres les plus influents et les plus actifs de la majorité « modérée » et anti-socialiste. Comme maire de Paris, il modifia l'organisation des bureaux de l'Hôtel-de-Ville, défendit les propriétaires contre les réclamations des locataires pauvres, et combattit les insurrections de mai et de juin.

Elu, le 23 avril 1848, représentant à l'Assemblée constituante par quatre départements : la Haute-Garonne, avec 57 629 voix; la Sarthe, avec 70 338 voix (114 212 votants) ; les Basses-Pyrénées, avec 59 357 voix (90 262 votants, 116 890 inscrits) ; et la Seine, avec 229 166 voix (267 888 votants, 399 191 inscrits), il opta pour la Haute-Garonne et s'assit sur les bancs de la gauche non-socialiste. Il fut membre et rapporteur du comité de Constitution.

La majorité de l'Assemblée l'appela, le 12 juillet. à la présidence, à la place de Marie. Il dirigea, avec esprit et habileté, les travaux de la Constituante, proclama solennellement la Constitution, le 19 novembre 1848, sur la place de la Concorde, et, dans la séance du 20 décembre, déclara que « le citoyen Charles-Louis-Napoléon Bonaparte était élu président de la République française, depuis le présent jour jusqu'au deuxième dimanche du mois de mai 1852. » Il ajouta : « Aux termes du décret, j'invite le citoyen président de la République à vouloir bien se transporter à la tribune pour y prêter serment. » Il donna ensuite lecture de la formule du serment, et Louis-Napoléon Bonaparte ayant répondu en levant la main : « Je le jure ! » A. Marrast ajouta : « Nous prenons Dieu et les hommes à témoin du serment qui vient d'être prêté l'Assemblée nationale en donne acte, ordonne qu'il sera transcrit au procès-verbal, inséré au Moniteur, publié et affiché dans la forme des actes législatifs. »

Ce fut Marrast qui prononça la clôture de la session de l'Assemblée constituante (28 mai 1849), et qui installa le bureau provisoire de la Législative, dans les rangs de laquelle il ne fut point appelé à siéger.

Il avait voté :

- contre le rétablissement du cautionnement,
- pour les poursuites contre Louis Blanc et Caussidière,
- contre le rétablissement de la contrainte par corps,
- contre l'abolition de la peine de mort,
- pour l'amendement Grévy,
- contre le droit au travail,
- pour l'ordre du jour en l'honneur de Cavaignac,
- contre la proposition Rateau,
- contre l'interdiction des clubs, etc.

Armand Marrast, sorti de la vie politique, mourut trois ans plus tard à Paris dans une situation de fortune des plus modestes. « On l'accusait, a dit M. Jules Simon, d'avoir les allures et les goûts d'un marquis de l'ancien régime. Le marquis mit ses nippes dans une malle, la hissa sur un fiacre avec l' aide de son unique servante, et alla se cacher dans un petit appartement pour y apprendre à vivre de rien. »

Ses amis durent se cotiser pour lui élever un tombeau.

Esprit léger, incisif, caustique, Marrast apporta dans l'exercice des fonctions les plus graves un fonds de « gaminerie » qui ne le quitta jamais. Peu de jours après la révolution de février, lors de l'imposante cérémonie du défilé des gardes nationales et des régiments de l'armée de Paris, devant les membres du gouvernement provisoire, rangés sur une estrade qui avait été dressée devant l'Arc de Triomphe de l'Etoile, ses collègues ne furent pas médiocrement scandalisés de l'entendre, comme la fête se prolongeait outre mesure à son gré, s'écrier en donnant les marques extérieures d'un enthousiasme brûlant : Passez vite, s..... canailles ! Et la foule, abusée par le lyrisme de son geste, répondait par de nouvelles acclamations.

Les articles écrits par le directeur du National avec une verve mordante n'ont pas été réunis en volumes ; outre sa collaboration au National et à la Tribune, A. Marrast avait fourni des articles à Paris révolutionnaire, etc. Il est le principal auteur de la Galerie des Pritchardistes (1846).