Joseph Fontanet
1921 - 1980
Né le 9 février 1921 à Frontenex (Savoie)
Décédé le 2 février 1980 à Paris
Député de la Savoie de 1956 à 1958
Fils d'un industriel d'Albertville, Joseph Fontanet est l'aîné d'une famille de huit enfants. Après ses études secondaires à l'institution des Chartreux à Lyon, il suit les cours des facultés de droit de Lyon et de Paris. Docteur en droit, il est également, à dix-huit ans, le plus jeune diplômé de l'Ecole des hautes études commerciales. Il milite dans les rangs de la Jeunesse étudiante chrétienne.
Réfractaire au Service du travail obligatoire durant l'Occupation, il rejoint le maquis de Savoie puis rallie les Forces françaises libres en Afrique du Nord après avoir été retenu prisonnier quatre mois en Espagne. Il s'engage dans une unité de chars de l'armée du général de Lattre, participe au débarquement à Fréjus le 25 août 1944 et à la campagne d'Allemagne, de janvier à mai 1945. Ses brillantes actions militaires lui valent d'être décoré de la Croix de guerre avec deux citations.
Dès la fin de la guerre, qu'il termine avec le grade de sous-lieutenant, Joseph Fontanet, catholique fervent, adhère tout naturellement au MRP Il est candidat sur la liste conduite par Jules Hyvrard en Savoie, aux élections à la seconde Constituante et aux législatives de 1946. Marié en 1947 à Hélène Pouliquen qui travaille au groupe parlementaire du MRP, il est élu, secrétaire général adjoint du mouvement en 1948.
Directeur de cabinet de Jules Catoire, secrétaire d'Etat à la Santé publique, il conduit, sans succès, la liste MRP aux élections législatives du 17 juin 1951 où il obtient 12 820 voix sur 102 986 suffrages exprimés. En octobre 1951, il est conseiller général du canton de Moûtiers, mandat qu'il conserve jusqu'en 1976. Le 12 juillet 1952, il est élu, au titre du groupe MRP de l'Assemblée nationale, conseiller de l'Union française, et devient secrétaire de cette assemblée en décembre 1953.
Joseph Fontanet conduit la liste du « Renouveau savoyard », présentée par le MRP, aux élections législatives du 2 janvier 1956. Elu député avec 21 159 voix sur 114 571 suffrages exprimés, il est nommé membre des Commissions des moyens de communication et du tourisme (1956-1957), de la presse (1956), de l'éducation nationale (1957) et de la Commission chargée d'enquêter sur les opérations électorales de La Réunion (1958).
Au cours de la dernière législature de la IVe République, Joseph Fontanet dépose trois propositions de loi ou de résolution relatives aux inondations dans les départements alpins et à l'organisation d'un système de bons d'essence à tarif réduit pour les touristes étrangers. Il vote la confiance à Guy Mollet (31 janvier 1956) qu'il soutient dans sa politique en Algérie et s'abstient lors du vote de confiance à Maurice Bourgès-Maunoury (12 juin 1957). Il se prononce en faveur de la ratification des traités instituant la Communauté économique européenne et l'Euratom (9 juillet) et pour les projets relatifs aux institutions de l'Algérie (novembre 1957, janvier 1958). Favorable à l'investiture de Pierre Pflimlin et à l'instauration de l'état d'urgence (13 et 16 mai), il vote la confiance au général de Gaulle, les pleins pouvoirs et la révision constitutionnelle (1" et 2 juin).
Sous la Ve République, Joseph Fontanet est réélu député dans la 3e circonscription de la Savoie en novembre 1958, mandat qui lui sera renouvelé lors des élections de 1962, 1967, 1968 et 1973. Il exerce des fonctions ministérielles durant la présidence de Valéry Giscard d'Estaing.
FONTANET (Joseph)
Né le 9 février 1921 à Frontenex (Savoie)
Décédé le 2 février 1980 à Paris
Député de la Savoie de 1958 à 1959 et de 1962 à 1969
Secrétaire d’Etat à l’Industrie et au commerce du 8 janvier au 16 novembre 1959
Secrétaire d’Etat au Commerce intérieur du 17 novembre 1959 au 23 août 1961
Ministre de la Santé publique et de la population du 24 août 1961 au 16 mai 1962
Ministre du Travail, de l’emploi et de la population du 22 juin 1969 au 5 juillet 1972
Ministre de l’Education nationale du 6 juillet 1972 au 27 mai 1974
Député du Mouvement républicain populaire (MRP) pour la Savoie sous la IVe République (de 1956 à 1958), conseiller général du canton de Moûtiers depuis 1951 (il est réélu sans interruption jusqu’en 1977), Joseph Fontanet se présente pour les élections législatives 1958 dans la seconde circonscription de la Savoie sous l’étiquette « Union pour une démocratie nouvelle », un large regroupement d’Indépendants et de partisans du MRP. La circonscription, située à l’Est du département, comporte une partie montagnarde et une partie urbaine autour d’Albertville. Rappelant qu’il a voté oui au référendum du 28 septembre 1958, il préconise la création « d’une grande force d’équilibre et de progrès capable d’être l’axe de la majorité parlementaire dont aura besoin le général de Gaulle ». Sa profession de foi rappelle son engagement pro-européen, ainsi que les convictions sociales propres à de nombreux démocrates-chrétiens ; il promet de défendre l’agriculture et de continuer l’effort entrepris pour la famille et le logement, thèmes qui lui sont chers. A l’issue du premier tour, Joseph Fontanet arrive largement en tête dans tous les cantons de sa circonscription, regroupant 40% des suffrages exprimés sur son nom, contre 18% pour le candidat communiste et 14% pour le candidat gaulliste de l’Union pour la nouvelle République (UNR). A la suite du retrait de tous les candidats, sauf le communiste, le candidat démocrate-chrétien l’emporte au second tour avec 71% des suffrages exprimés (malgré une forte abstention qui peut nuancer l’idée d’un bon report des voix de droite). Joseph Fontanet a aussi été un élu local reconnu et apprécié. Il préside le conseil général de la Savoie de 1964 à 1975, participe à l’application du Plan Neige, ainsi qu’au développement du tourisme dans la Tarentaise. A la tête du Conseil général, il donne une réelle impulsion à l’économie locale, et obtient notamment l’aboutissement du projet d’autoroutes alpines. Il est, de plus, un des créateurs du Parc national de la Vanoise, dont il préside le conseil d’administration de novembre 1963 à 1965. Il devient maire de Saint-Martin-de-Belleville (1965-1977) commune d’implantation de la station de ski de Val Thorens.
A l’image de deux autres démocrates-chrétiens, Robert Lecourt et Robert Buron, Joseph Fontanet entre au gouvernement Debré ; il est nommé secrétaire d’Etat à l’Industrie et au commerce le 8 janvier 1959. Le 17 novembre 1959, il devient secrétaire d’Etat au Commerce intérieur, fonction qui lui permet de contribuer à la modernisation de toutes les formes de commerce ; sa bonne gestion participe de la stabilisation économique et monétaire des premières années de la Ve République. Le 24 août 1961, il est nommé ministre la Santé publique et de la population. Joseph Fontanet parvient à faire augmenter de manière sensible les crédits dédiés aux équipements hospitaliers et mène une politique active en faveur des personnels hospitaliers, des infirmières notamment, ainsi qu’en faveur des familles. Dans le cabinet Pompidou formé le 15 avril 1962, il conserve son ministère mais démissionne, comme les autres ministres MRP du gouvernement le 16 mai 1962, à la suite de la conférence de presse du général de Gaulle au cours de laquelle ce dernier dénonce les dangers de l’intégration européenne et ironise sur le « volapük ». Joseph Fontanet justifie ce départ dans sa profession de foi pour les élections législatives de 1962. Il rappelle qu’il a contribué, en tant que ministre, à l’œuvre accomplie sous l’autorité du général de Gaulle mais explique pourquoi il n’a pu, il y a six mois, « conserver [ses] fonctions, lorsque le président de la République, sans avoir d’ailleurs consulté le gouvernement, a remis en cause, dans une conférence de presse, les principes de la politique d’unification européenne qu’avait inaugurée Robert Schuman et qui s’est poursuivie par la réalisation, couronnée de succès du Marché Commun ». Le député de la Savoie entend, par sa réélection, contribuer à la formation d’une majorité parlementaire cohérente s’appuyant sur le grand parti démocratique majoritaire qu’il appelle de ses vœux. Aux élections législatives, Joseph Fontanet est réélu député dès le premier tour avec plus de 60% des suffrages exprimés, bien que ces élections soient, au niveau national, une défaite pour le MRP qui perd 20 de ses 52 sièges en métropole. A l’issue de cet échec, le bureau général du MRP démissionne, ce qui permet à Joseph Fontanet d’accéder au secrétariat général du mouvement, dont Jean Lecanuet prend alors la présidence.
Au cours des deuxième et troisième législatures, Joseph Fontanet n’exerce pas de fonctions ministérielles. Il s’inscrit au groupe du Centre démocratique à l’Assemblée, groupe parlementaire visant à rassembler tous les démocrates-chrétiens. Il est membre jusqu’en 1966 de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Le député savoyard est très actif à l’Assemblée nationale. Il dépose deux propositions de loi qui font écho aux préoccupations de ses électeurs, tout en concernant aussi d’autres régions. La première (datant du 21 novembre 1963) concerne la gestion des usines hydroélectriques, la seconde (du 21 décembre 1966) vise à modifier la fiscalité des communes touristiques (en grand nombre en Savoie). Il intervient en outre, à plusieurs reprises, sur des questions d’équipement touristique. Pendant la deuxième législature, Joseph Fontanet prend aussi la parole sur des thèmes chers aux démocrates-chrétiens. Le 18 décembre 1962, prenant part à la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 1963, il s’inquiète de la faiblesse des mesures prises en faveur des exploitants agricoles. Un an plus tard, le 9 novembre 1963, au cours de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1963, il critique le fait que l’augmentation des prestations familiales soit inférieure à la hausse du coût de la vie. Il s’oppose au gouvernement, de même qu’une partie des démocrates-chrétiens, lors de plusieurs votes. S’il est favorable au Traité de l’Elysée, par conviction européenne, Joseph Fontanet s’oppose au projet de loi relatif à certaines modalités de la grève dans les services publics en juillet 1963 ; il vote aussi contre le projet de loi portant réforme de l’élection des conseillers municipaux (juin 1964), ainsi que contre le projet de loi de réforme du service national (26 mai 1965). Il intervient à plusieurs reprises sur des questions de politique extérieure, de manière assez critique. Le 10 juin 1964, prenant part au débat sur les questions orales relatives à la politique de coopération avec les pays de développement, il dénonce la répartition des crédits en fonction de motifs diplomatiques plus qu’économiques, et il préconise une action européenne concertée afin d’enrayer la « clochardisation » massive du Tiers-Monde. Le 9 novembre 1964, dans la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1965 sur les crédits militaires, il critique la contradiction entre la volonté du gouvernement de faire jouer à la France un rôle conforme à son passé et le refus de ce qui serait, selon lui, la condition d’accomplissement de cet objectif, c’est-à-dire la création d’une véritable Communauté européenne capable de se doter d’une force de dissuasion massive. Enfin, le 19 avril 1966, il prend part à la discussion sur la motion de censure déposée par les socialistes contre le retrait français du commandement intégré de l’OTAN. Le député de Savoie critique notamment le refus du gouvernement d’organiser un débat distinct sur le retrait de la France et rappelle le rôle dissuasif de la présence de troupes alliées sur le territoire français. Trente-quatre des cinquante-quatre membres du Centre démocratique, dont Joseph Fontanet, votent la motion de censure, qui ne recueille cependant que 137 voix.
Au sein du mouvement centriste, Joseph Fontanet joue un rôle crucial dans les années 1960. Partisan dès 1962 de la formation d’un grand parti centriste à vocation majoritaire, il participe en 1963 à la création du comité d’études et de liaison des démocrates français avec Jean Lecanuet, formation dont le but est de donner ensuite naissance à une grande formation démocratique, ni gaulliste, ni socialiste, incarnant la troisième voie recherchée par les centristes. Joseph Fontanet appartient à l’équipe de campagne de Jean Lecanuet pour l’élection présidentielle de 1965. Les bons résultats de ce dernier au premier tour (16% des suffrages exprimés) entraînent la naissance du Centre démocrate (CD), regroupement de tous les partis démocrates-chrétiens et libéraux ; Joseph Fontanet entre à son comité directeur ; le MRP s’efface de la scène politique. Cependant, les divisions au sein du Centre démocrate ne tardent pas à se faire sentir et Joseph Fontanet s’affirme, par opposition à Lecanuet, comme un des leaders de la droite du parti aux côtés de Jacques Duhamel. Les deux hommes sont de moins en moins réticents à une intégration dans la majorité. A partir de 1966, ils se rapprochent de la majorité gaulliste.
Aux élections législatives de 1967, Joseph Fontanet se présente sous l’étiquette du Centre démocrate. Sa profession de foi s’oppose à la fois au Parti communiste français (PCF) et à l’Union des démocrates pour la Ve République (UD-Ve), étiquette sous laquelle se présentent les gaullistes. Il refuse au nom de son mouvement de devenir, à l’image de ces gaullistes, « des inconditionnels, c’est-à-dire d’être d’accord d’avance avec tout ce que fera le gouvernement, de renoncer à notre devoir d’information, de proposition et de contrôle ». Le député savoyard demande une orientation plus dynamique et plus sociale en matière économique, plus démocratique en politique intérieure, plus européenne en politique extérieure, marquant par là-même sa fidélité aux grands thèmes démocrates-chrétiens. Joseph Fontanet arrive en tête à l’issue du premier tour avec 27% des suffrages exprimés, devant Marcel Rochaix pour le PCF (26%), Bernard de Poret, candidat gaulliste (20%), Emile Godet, candidat du Parti socialiste unifié ou PSU (12%) et, enfin, Alexis Borrel, candidat sans étiquette (13%). Bien que devancé par le communiste dans deux cantons au premier tour, Joseph Fontanet bénéficie du retrait de tous les autres candidats à l’exception de ce dernier. Le député démocrate-chrétien l’emporte facilement au second tour avec 54% des suffrages exprimés contre 45% à Marcel Rochaix, alors que les élections ont été mauvaises pour le Centre démocrate au niveau national.
Le député de la Savoie s’inscrit au groupe Progrès et démocratie moderne (PDM), nouveau groupe centriste qui remplace le Centre démocratique. Il est nommé à la commission des affaires culturelles familiales et sociales en 1967 et 1968. Dès le début de cette troisième législature, Fontanet et Jacques Duhamel se distancient du Centre démocrate, refusant de mener une politique d’opposition systématique au gouvernement. Certes, le 20 mai 1967, Fontanet vote la motion de censure déposée au cours de la discussion du projet de loi autorisant le gouvernement à prendre des mesures d’ordre économique et social. Il intervient dans le débat à cette occasion pour s’opposer à l’utilisation de l’article 38 de la Constitution par le gouvernement. Il appelle à une normalisation et à une libéralisation de la vie politique française. S’il condamne dans Le Figaro une mesure qui « accentue le style autoritaire du régime » (12 mai 1967), il minimise néanmoins la portée de son vote, qui relève plus d’un attachement aux prérogatives du Parlement que d’une opposition frontale au gouvernement. En juin 1967, Fontanet démontre son attachement à la famille, ainsi qu’un certain conservatisme, déposant une proposition de loi tendant à modifier la loi du 31 juillet 1920 sur l’avortement. Cette loi réprime la provocation à l’avortement ainsi que la propagande anticonceptionnelle. L’avortement y est défini comme un crime. Sa proposition du 22 juin 1967 vise à dissocier ce qu’il appelle « avortement criminel » et contraception, alors que les deux sont liés dans la loi du 31 juillet 1920. S’il rappelle l’importance de la famille et de l’éducation des époux, il se révèle néanmoins partisan d’une politique d’information en matière de contraception, tout en interdisant toujours la publicité ou propagande en faveur de cette dernière.
En octobre 1967, le dépôt par le groupe Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS) d’une nouvelle motion de censure contre les ordonnances du gouvernement en matière politique et sociale contribue à la division des centristes. Jean Lecanuet appelle à voter la censure, car le groupe PDM l’a déjà votée quatre mois plus tôt. Plusieurs députés du groupe, autour de Jacques Duhamel et Joseph Fontanet, ne veulent pas voter cette motion. Georges Pompidou consulte Jacques Duhamel et obtient que dix centristes seulement votent la censure et 31 s’abstiennent. Joseph Fontanet ne la vote pas, ce qui marque sa rupture définitive avec Jean Lecanuet. Ainsi, le 5 décembre 1968, le député savoyard figure parmi les trois députés centristes qui acceptent de voter le budget alors que tous les autres députés PDM votent contre. Le Centre démocrate et le groupe PDM suivent alors des trajectoires divergentes ; le premier entre dans une logique de vive opposition au gouvernement alors que le PDM rejoint progressivement la majorité, tout en devenant de plus en plus puissant. En mai 1968, le vote par la majorité du PDM de la motion de censure contre le gouvernement Pompidou, y compris Joseph Fontanet, surprend mais il témoigne davantage d’une volonté de changement que d’une opposition franche au gouvernement, comme tendraient à le suggérer les propos de Jacques Duhamel à cette occasion.
Aux élections législatives anticipées de juin 1968 qui suivent la dissolution de l’Assemblée nationale, Joseph Fontanet se présente à nouveau dans la deuxième circonscription de Savoie et doit justifier pendant sa campagne sa position envers la majorité gaulliste. S’il dénonce dans sa profession de foi la violence comme moyen d’action (se distanciant ainsi clairement du mouvement de Mai 68), il ne manque néanmoins pas de critiquer un gouvernement qui, selon lui, « a trop cru détenir seul la vérité (…) et n’a pas assez prêté l’oreille aux avertissements des élus et des organisations syndicales et professionnelles ». Il appelle à la fin de l’utilisation des pleins pouvoirs par le gouvernement afin d’associer le Parlement et les organisations professionnelles à l’élaboration des mesures politiques et sociales. Malgré ces critiques adressées au gouvernement, Joseph Fontanet souhaite que le Centre devienne « l’aile marchante » d’une large majorité nationale. Arrivé premier à l’issue du premier tour avec 28% des suffrages exprimés devant le candidat communiste, Marcel Rochaix (25% des suffrages exprimés), le député sortant l’emporte au second tour avec 52% des suffrages. Ces élections sont aussi l’occasion, au niveau national, de nombreuses ententes entre centristes et gaullistes au second tour afin de barrer la route à la gauche, ce qui contribue à leur rapprochement.
Joseph Fontanet s’inscrit à nouveau au groupe Progrès et démocratie moderne et rejoint la commission des affaires culturelles, familiales et sociales en 1968 (il est renouvelé en 1969). En juillet, il intervient dans le débat sur la ratification des ordonnances sur la sécurité sociale. Ce débat est l’occasion d’une collaboration réelle entre les députés et le gouvernement, qui accepte la discussion de plus d’une centaine d’amendements (Joseph Fontanet en dépose un avant de le retirer). Le député savoyard vote le projet de loi d’orientation de l’enseignement supérieur le 10 octobre 1968, ainsi que le projet de loi relatif à l’exercice du droit syndical dans les entreprises le 4 décembre suivant. Pour le référendum de 1969, le PDM se prononce pour le non à une forte majorité de 22 contre 5. Fontanet figure parmi ces cinq opposants au « non » ; il annonce dans la presse qu’il votera blanc.
Lors des élections présidentielles, Fontanet, Duhamel et une partie du PDM achèvent leur ralliement à la majorité. Ils soutiennent la candidature de Georges Pompidou alors que le Centre démocrate présente Alain Poher. Joseph Fontanet demande par voie d’une lettre ouverte à ce dernier de se retirer. Le ralliement à Georges Pompidou couronne une évolution commencée plusieurs années auparavant, dès 1963 et le congrès de la Baule, date à laquelle Joseph Fontanet lui-même est convaincu par l’inéluctabilité du fait majoritaire et par la nécessité de se rattacher à la majorité gaulliste. Georges Pompidou se rapproche des centristes par la conclusion d’un contrat avec ceux-ci, leur donnant ainsi l’espoir de pouvoir enfin former « l’aile marchante » de la nouvelle majorité. Entre les deux tours de l’élection présidentielle, Joseph Fontanet, Jacques Duhamel et deux autres membres du PDM annoncent la transformation des Cercles Démocratie et progrès, clubs de réflexion créés en 1967, en une nouvelle formation politique le Centre démocratie et progrès (CDP), désormais ancré dans la majorité ainsi renouvelée. Fontanet en est le vice-président (1969-1974).
La nomination de Joseph Fontanet le 22 juin 1968 comme ministre du Travail, de l’emploi et de la population, ainsi que l’entrée de deux autres membres du CDP, dans le gouvernement Chaban-Delmas (René Pleven à la Justice et Jacques Duhamel à l’Agriculture) ne fait que couronner plusieurs années de rapprochement. Exercée du 22 juin 1969 au 5 juillet 1972, cette fonction ministérielle joue un rôle central dans le programme de « Nouvelle Société » élaboré par Jacques Chaban-Delmas. Il mène des réformes sociales d’envergure, parmi lesquelles figurent la transformation du SMIG en SMIC, la mensualisation des salaires, le développement de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE), la loi sur la formation continue des salariés, le renforcement de la sécurité dans le travail et la protection des délégués syndicaux. Il obtient enfin le vote d’une loi proclamant l’égalité, à travail analogue, entre salaires masculins et féminins. Dès 1970, Joseph Fontanet entre en conflit avec Valéry Giscard d’Estaing, alors ministre de l’Economie et des finances, sur sa réforme de l’allocation de salaire unique. Au Palais-Bourbon, Joseph Fontanet est remplacé par Georges Peizerat, son suppléant.
La fin du gouvernement Chaban-Delmas en juillet 1972 marque celle de l’ouverture et de la prééminence des ministres CDP. Certes, le parti conserve au sein du gouvernement Messmer ses trois portefeuilles, René Pleven aux Sceaux, Jacques Duhamel aux Affaires culturelles et Joseph Fontanet à l’Education nationale, mais ils sont contrebalancés par le retour des gaullistes historiques. Joseph Fontanet est ministre de l’Education nationale du 6 Juillet 1972 jusqu’au mois de mai 1974, un ministère moins central dans le projet des démocrates-chrétiens et ambigu du fait de leur sensibilité sur l’enseignement « libre ». Joseph Fontanet tente une réforme globale de l’enseignement primaire et secondaire. Il souhaite réorganiser les classes du premier cycle selon le principe des groupes de niveau par matière. La réforme rencontre une franche opposition et n’est jamais mise en œuvre. Le ministre lance de plus le programme de gratuité de l’enseignement du second degré, valorise l’enseignement technique et prévoit un plan accéléré de nationalisation des établissements d’enseignement secondaire. Il crée le Diplôme d’études universitaires générales (DEUG), qui unifie et transforme le diplôme sanctionnant la fin du premier cycle au bout de deux ans.
Aux élections législatives de 1973, Joseph Fontanet affronte la concurrence d’un autre candidat centriste dans sa circonscription, Sixte de Menthon, le fils cadet de François de Menthon, présenté par le Mouvement réformateur. Ce dernier ne recueille que 8% au premier tour contre 41% à Joseph Fontanet mais c’est un symptôme du divorce profond entre les différents partis centristes. Joseph Fontanet l’emporte au deuxième tour face au communiste Marcel Rochaix (44%), avec 56% des suffrages exprimés. Le CDP sort affaibli des élections, ce qui diminue sa capacité à infléchir la politique gouvernementale. Dans le deuxième gouvernement Messmer formé le 2 avril 1973, Joseph Fontanet est maintenu à l’Education nationale et reste comme l’un des deux seuls ministres CDP avec Bernard Stasi (aux DOM-TOM). Il rentre dans une attitude de quasi-opposition au gouvernement, tout en y figurant. Il affirme ainsi dans la presse que « la politique budgétaire était en opposition avec non seulement tout ce que ressent le pays, mais avec les engagements mêmes que nous avons pris ». Il menace même de démissionner comme l’avaient fait les ministres MRP en 1962. Dans le troisième gouvernement Messmer (27 février-27 mi 1974), Joseph Fontanet, toujours chargé de l’Education, est le seul ministre CDP.
Le centre se divise à nouveau à l’occasion des élections présidentielles de 1974. Le Centre réformateur de Jean Lecanuet se rallie à Valéry Giscard d’Estaing, et ce dans l’espoir d’une large ouverture au centre. Le CDP avec Joseph Fontanet, choisit de soutenir Jacques Chaban-Delmas tout en laissant la liberté de vote à son groupe parlementaire. Les relations très tendues entre Valéry Giscard d’Estaing et Joseph Fontanet quand ils étaient tous deux ministres permettent d’expliquer, au moins partiellement, le choix en faveur de Jacques Chaban-Delmas. A l’issue du premier tour et de l’échec de Jacques Chaban-Delmas, le CDP se rallie à Valéry Giscard d’Estaing. Aucun ministre CDP ne figure néanmoins dans le gouvernement de Jacques Chirac. Cet échec marque la fin de la carrière de Joseph Fontanet.
Joseph Fontanet tente de retrouver son poste de député lors d’une élection partielle en septembre 1974, provoquée par la démission de son suppléant, Georges Peizerat, mais il est battu au second tour par le socialiste Maurice Blanc qui recueille 59% des suffrages exprimés. En 1975, l’ancien ministre lance le Club de Paris et publie un ouvrage Le Social et le Vivant. Une nouvelle logique politique (Plon, 1977), dans lequel il expose sa vision de la politique. Il se retire néanmoins des affaires publiques, ne se représentant pas aux élections cantonales de 1976 et abandonnant son mandat municipal en 1977. Il ne se représente pas non plus aux élections législatives de 1978, à l’occasion desquelles la circonscription passe à droite avec l’élection du candidat du Rassemblement pour la République (RPR) Michel Barnier. Il tente le lancement d’un grand quotidien du soir, J’Informe, sans succès : le quotidien ne paraît que du 19 septembre au 17 décembre 1977. En janvier 1979, Joseph Fontanet est nommé membre du directoire et directeur général de la Société d’études et de réalisation pour les équipements collectifs (SODEREC), société dont la mission consistait à élargir l’activité du Crédit mutuel en fournissant une gamme complète d’ingénieries techniques et financières pour les collectivités locales.
Ainsi en retrait, Joseph Fontanet meurt à l’hôpital Laennec, le 2 février 1980, dans des circonstances dramatiques : en effet, dans la nuit du 31 janvier au 1er février, alors qu’il venait de se garer devant son immeuble dans le 16e arrondissement, il est visé par le tir d’un pistolet de calibre 11,43. La fuite du meurtrier et l’absence de témoin n’ont jamais permis d’élucider l’affaire, malgré les revendications d’individus disant appartenir à un groupuscule révolutionnaire d’extrême gauche.
Homme à la réputation intègre, Joseph Fontanet a été l’une des figures marquantes de l’histoire du mouvement démocrate-chrétien puis du centrisme.