N° 2667 - Proposition de loi de M. Bernard Derosier visant à abroger l'article 4 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés




 

N° 2667

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 novembre 2005.

PROPOSITION DE LOI

visant à abroger l'article 4 de la loi n° 2005-158
du 23 février 2005 portant
reconnaissance de la Nation
et
contribution nationale en faveur des Français rapatriés,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Bernard DEROSIER, Jacques FLOCH, Jean-Marc AYRAULT, François HOLLANDE, Victorin LUREL, Jean-Paul BACQUET, Mme Hélène MIGNON, MM. Gérard BAPT, Jean GLAVANY, Mmes Odile SAUGUES, Christiane TAUBIRA, MM. Pierre COHEN, Alain NÉRI, Mme Patricia ADAM, MM. Jean-Marie AUBRON, Christian BATAILLE, Jean-Claude BEAUCHAUD, Jean-Pierre BLAZY, Serge BLISKO, Patrick BLOCHE, Jean-Claude BOIS, Maxime BONO, Augustin BONREPAUX, Pierre BOURGUIGNON, Mme Danielle BOUSQUET, MM. François BROTTES, Thierry CARCENAC, Mme Martine CARRILLON-COUVREUR, MM. Jean-Paul CHANTEGUET, Michel CHARZAT, Alain CLAEYS,
Mmes Marie-Françoise CLERGEAU, Claude DARCIAUX, M. Michel DASSEUX,
Mme Martine DAVID, MM. Marcel DEHOUX, Michel DELEBARRE, Jean DELOBEL, Michel DESTOT, Marc DOLEZ, François DOSÉ, René DOSIÈRE, Pierre DUCOUT, Jean-Pierre DUFAU, William DUMAS, Jean-Louis DUMONT, Yves DURAND, Mme Odette DURIEZ, MM. Claude EVIN, Laurent FABIUS, Albert FACON, Michel FRANÇAIX,
Mme Geneviève GAILLARD, M. Jean GAUBERT, Mme Nathalie GAUTIER, MM. Joël GIRAUD, Gaëtan GORCE, Alain GOURIOU, Mme Paulette GUINCHARD, MM. David HABIB, Mme Françoise IMBERT, MM. Eric JALTON, Serge JANQUIN, Jérôme LAMBERT, François LAMY, Jack LANG, Jean LAUNAY, Mme Marylise LEBRANCHU, MM. Gilbert LE BRIS, Jean LE GARREC, Jean-Marie LE GUEN, Bruno LE ROUX, Patrick LEMASLE, Michel LIEBGOTT, Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, MM. François LONCLE, Bernard MADRELLE, Christophe MASSE, Didier MATHUS, Didier MIGAUD, Arnaud MONTEBOURG, Henri NAYROU, Mmes Marie-Renée OGET, Chantal ROBIN-RODRIGO, MM. Bernard ROMAN, René ROUQUET, Patrick ROY, Michel SAINTE-MARIE, Pascal TERRASSE, Daniel VAILLANT, André VALLINI, Manuel VALLS, Alain VIDALIES

et les membres du groupe socialiste (1) et apparentés (2)

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Lors du débat à l'Assemblée nationale sur le projet de loi portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, l'adoption d'un amendement parlementaire portant article additionnel a dénaturé les objectifs initiaux de ce projet qui aurait dû faire consensus au sein de la représentation nationale. Cet amendement, sous-amendé en séance, devenu l'article 4 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 a été adopté contre l'avis des socialistes et sans qu'un débat préalable et approfondi ne puisse être mené. Son contenu n'est pas acceptable.

De façon anachronique et en contradiction avec les grands principes qui animent la démocratie française, le deuxième alinéa de cet article apparaît comme une reconnaissance de la colonisation française. Il dispose en effet que les programmes scolaires devront mettre l'accent sur le « rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord ».

Les auteurs de cet amendement ont volontairement ignoré la réalité de la colonisation. Cette initiative est révélatrice de l'incapacité de certains de nos compatriotes à faire face avec lucidité au passé colonial et à assumer les conséquences d'une décolonisation qui a engendré des relations difficiles avec les populations des anciennes colonies.

Car ce texte est une injonction faite aux historiens d'écrire et à l'école de la République d'enseigner une histoire officielle afin de reconnaître le caractère bénéfique de la politique de colonisation française notamment en Afrique du Nord. La présence française outre-mer s'est étalée sur plusieurs siècles et a eu des effets divers. Certes cette présence a engendré des avancées dans le domaine des infrastructures, des équipements publics et autres, réalisées par le travail des travailleurs français et de ceux issus de ces territoires, mais il est difficile, a priori, de ne les voir que sous leurs seuls aspects positifs et cela ne peut justifier en soi la colonisation. En tout état de cause, il n'appartient pas au législateur d'en décider.

En outre, cette affirmation marque un mépris inacceptable à l'égard des populations des pays autrefois colonisés auxquelles il n'était pas reconnu la qualité de citoyen. Cela ne manquera pas de rejaillir sur toutes les personnes issues de l'immigration originaires de ces anciennes colonies, contredisant ainsi les politiques d'intégration.

Or, depuis juin 1999, les autorités françaises ont marqué leur volonté de reconnaître à l'histoire algérienne de la France et à la guerre d'Algérie, sa place dans l'histoire nationale, d'abord par sa reconnaissance officielle par l'Assemblée nationale par un vote à l'unanimité, puis par l'ouverture des archives trente ans après les faits et enfin par l'inscription de la guerre d'Algérie dans les programmes scolaires nationaux. Alors que le fait colonial est reconnu dans toutes ses manifestations même les plus brutales et les plus récentes, l'article 4 de la loi du 23 février 2005 semble un étrange revirement.

L'enseignement dispensé dans les écoles de la République doit être exemplaire et donner aux jeunes français une mémoire afin de bâtir leur avenir. Il serait indigne pour l'ensemble de la Nation de passer sous silence les exactions et les répressions policières dans les territoires colonisés comme sur le territoire métropolitain, de mentir par omission en oubliant la torture et les massacres. Or, n'avancer que le rôle positif de la présence française outre-mer et particulièrement en Afrique du Nord, sonne comme une justification de la difficulté qu'a eu la République française à reconnaître le principe de libre détermination des peuples.

De la même manière, dans son refus de regarder lucidement le passé, cet article remet en cause les avancées du travail de mémoire que la France a fait sur l'esclavage et le commerce triangulaire.

Cette disposition de la loi a déjà provoqué d'importantes réactions au sein de l'ensemble des pays concernés par la colonisation française alors que nous devons œuvrer à une réconciliation pérenne des peuples. Elle menace l'élaboration et la signature d'un indispensable traité d'amitié franco-algérien qui devrait permettre à nos deux peuples de devenir, demain, le moteur de la coopération euro-méditerranéenne comme l'a été le couple franco-allemand dans la construction européenne, après pourtant trois guerres meurtrières en 80 ans, grâce au traité d'amitié signé le 22 janvier 1963 entre la France et l'Allemagne.

L'article 4 est de ce point de vue une initiative qui met en cause l'image et le rayonnement de la France.

Tels sont les motifs pour lesquels nous vous demandons d'abroger l'article 4 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

L'article 4 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés est abrogé.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-119537-5
ISSN : 1240 - 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 2667 - Proposition de loi visant à abroger l'article 4 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés (M. Bernard Derosier)

1 () Ce groupe est composé de : Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux, MM. Jean-Marie Aubron, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Eric Besson, Jean-Louis Bianco, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Michel Charzat, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mme Claude Darciaux, M. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Jean Delobel, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Julien Dray, Tony Dreyfus, Pierre Ducout, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Mme Odette Duriez, MM. Henri Emmanuelli, Claude Evin, Laurent Fabius, Albert Facon, Jacques Floch, Pierre Forgues, Michel Françaix, Mme Geneviève Gaillard, M. Jean Gaubert, Mmes Nathalie Gautier, Catherine Génisson, MM. Jean Glavany, Gaëtan Gorce, Alain Gouriou, Mmes Elisabeth Guigou, Paulette Guinchard, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Eric Jalton, Serge Janquin, Armand Jung, Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Yves Le Drian, Michel Lefait, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Patrick Lemasle, Guy Lengagne, Mme Annick Lepetit, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Bernard Madrelle, Louis-Joseph Manscour, Philippe Martin (Gers), Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Arnaud Montebourg, Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget,
MM. Michel Pajon, Christian Paul, Christophe Payet, Germinal Peiro, Jean-Claude Perez, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, MM. Jean-Jack Queyranne, Paul Quilès, Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mme Ségolène Royal, M. Michel Sainte-Marie, Mme Odile Saugues, MM.  Henri Sicre, Dominique Strauss-Kahn, Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet, Philippe Vuilque.

2 () MM. Jean-Pierre Defontaine, Paul Giacobbi, Joël Giraud, François Huwart, Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Roger-Gérard Schwartzenberg, Mme Christiane Taubira.


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