N° 2291 - Proposition de résolution de M. Gaëtan Gorce tendant à inciter le Gouvernement français à remplir les obligations que lui donnent les recommandations de la commission d'enquête tchadienne concernant les événements du 28 janvier au 8 février 2008 afin de connaître la situation de M. Ibni Oumar Mahamat Saleh disparu à N'Djamena, capitale du Tchad, le 3 février 2008



Document
mis en distribution

le 15 février 2010


N° 2291

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 février 2010.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à inciter le gouvernement français à remplir les obligations que lui donnent les recommandations de la commission d’enquête tchadienne concernant les événements du 28 janvier au 8 février 2008 afin de connaître la situation de M. Ibni Oumar Mahamat Saleh disparu à N’Djamena, capitale du Tchad le 3 février 2008,

présentée par Mesdames et Messieurs

Gaëtan GORCE, Jean-Marc AYRAULT, Serge JANQUIN, François LONCLE, Jean-Yves LE DÉAUT, Hervé FÉRON, Michel LIEBGOTT, Jean-Jacques URVOAS, Christian ECKERT, Marcel ROGEMONT, Gilles COCQUEMPOT et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (1) et apparentés (2),

députés.

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(1)  Ce groupe est composé de Mesdames et Messieurs : Patricia Adam, Sylvie Andrieux, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Delphine Batho, Jean-Louis Bianco, Gisèle Biémouret, Serge Blisko, Patrick Bloche, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Jean-Michel Boucheron, Marie-Odile Bouillé, Christophe Bouillon, Monique Boulestin, Pierre Bourguignon, Danielle Bousquet, François Brottes, Alain Cacheux, Jérôme Cahuzac, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Martine Carrillon-Couvreur, Laurent Cathala, Bernard Cazeneuve, Jean-Paul Chanteguet, Alain Claeys, Jean-Michel Clément, Marie-Françoise Clergeau, Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Catherine Coutelle, Pascale Crozon, Frédéric Cuvillier, Claude Darciaux, Pascal Deguilhem, Michèle Delaunay, Guy Delcourt, Michel Delebarre, François Deluga, Bernard Derosier, Michel Destot, Julien Dray, Tony Dreyfus, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Laurence Dumont, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Odette Duriez, Philippe Duron, Olivier Dussopt, Christian Eckert, Henri Emmanuelli, Corinne Erhel, Laurent Fabius, Albert Facon, Martine Faure, Hervé Féron, Aurélie Filippetti, Geneviève Fioraso, Pierre Forgues, Valérie Fourneyron, Michel Françaix, Jean-Claude Fruteau, Jean-Louis Gagnaire, Geneviève Gaillard, Guillaume Garot, Jean Gaubert, Catherine Génisson, Jean-Patrick Gille, Jean Glavany, Daniel Goldberg, Gaëtan Gorce, Pascale Got, Marc Goua, Jean Grellier, Élisabeth Guigou, David Habib, Danièle Hoffman-Rispal, François Hollande, Sandrine Hurel, Monique Iborra, Jean-Louis Idiart, Françoise Imbert, Michel Issindou, Éric Jalton, Serge Janquin, Henri Jibrayel, Régis Juanico, Armand Jung, Marietta Karamanli, Jean-Pierre Kucheida, Conchita Lacuey, Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Colette Langlade, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Marylise Lebranchu, Patrick Lebreton, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Michel Lefait, Jean-Marie Le Guen, Annick Le Loch, Patrick Lemasle, Catherine Lemorton, Annick Lepetit, Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Bernard Lesterlin, Michel Liebgott, Martine Lignières-Cassou, François Loncle, Victorin Lurel, Jean Mallot, Louis-Joseph Manscour, Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, Jean-René Marsac, Philippe Martin, Martine Martinel, Frédérique Massat, Gilbert Mathon, Didier Mathus, Sandrine Mazetier, Michel Ménard, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Arnaud Montebourg, Pierre Moscovici, Pierre-Alain Muet, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Marie-Renée Oget, Françoise Olivier-Coupeau, Michel Pajon, George Pau-Langevin, Christian Paul, Germinal Peiro, Jean-Luc Pérat, Jean-Claude Perez, Marie-Françoise Pérol-Dumont, Martine Pinville, Philippe Plisson, François Pupponi, Catherine Quéré, Jean-Jack Queyranne, Dominique Raimbourg, Marie-Line Reynaud, Alain Rodet, Marcel Rogemont, Bernard Roman, René Rouquet, Alain Rousset, Patrick Roy, Michel Sainte-Marie, Michel Sapin, Odile Saugues, Christophe Sirugue, Pascal Terrasse, Jean-Louis Touraine, Marisol Touraine, Philippe Tourtelier, Jean-Jacques Urvoas, Daniel Vaillant, Jacques Valax, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vauzelle, Michel Vergnier, André Vézinhet, Alain Vidalies, Jean-Michel Villaumé, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.

(2)  Chantal Berthelot, Guy Chambefort, Gérard Charasse, René Dosière, Paul Giacobbi, Annick Girardin, Joël Giraud, Christian Hutin, Serge Letchimy, Albert Likuvalu, Jeanny Marc, Dominique Orliac, Sylvia Pinel, Simon Renucci, Chantal Robin-Rodrigo et Christiane Taubira.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

M. Ibni Oumar Mahamat Saleh, éminent mathématicien engagé en politique a disparu au cours de la semaine de violences ayant affecté la capitale du Tchad N’Djamena du 28 janvier au 8 février 2008.

M. Ibni Oumar Mahamat Saleh tentait à la veille de ces événements de donner corps à une opposition non violente respectueuse des institutions.

Depuis le 11 août 1960, date de son indépendance le Tchad a été gouverné sur des bases minimales, claniques et non collectives. Ce choix, alors que le pays bénéficiait d’une stabilité territoriale remontant au XVIe siècle, est à l’origine des problèmes actuels. Faute d’avoir su et voulu construire une citoyenneté nationale, les autorités en place ont accaparé un pouvoir qui a été contesté de façon violente. L’histoire du Tchad est ainsi depuis 50 ans celle d’une longue guerre civile opposant des groupes régionaux, ethniques, claniques et parfois familiaux les uns aux autres.

Ces fractures ont été amplifiées par l’environnement régional. La Libye hier et le Soudan aujourd’hui ont joué un rôle d’accélérateur des conflits internes au Tchad. Le Tchad occupe en Afrique centrale une place géostratégique particulière. Pays pétrolier il est entouré de voisins eux-mêmes producteurs, le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée Équatoriale, la Libye, le Nigéria, le Soudan. Tandis que la Centrafrique au sud dispose d’uranium.

C’est dans ce contexte que sont survenus les événements de février 2008, la tentative de prise de N’Djamena, la capitale, par des opposants armés venus de l’est du pays et du Darfour. Les combats ont fait des centaines de victimes, parmi les belligérants, la population et l’opposition non violente. Plusieurs leaders de partis politiques d’opposition ont été molestés. L’un d’entre eux est encore à ce jour porté disparu, M. Ibni Oumar Mahamat Saleh. À la suite de la mobilisation de la communauté internationale le président Deby a, le 2 avril 2008, signé trois décrets. L’un porte « création d’une commission d’enquête sur les événements survenus en République du Tchad du 28 janvier au 8 février 2008 et leurs conséquences » (décret n°525/PR/2008). Le décret 526 de la Présidence de la République tchadienne a défini la composition de ladite commission, formée de personnalités tchadiennes assistées d’experts extérieurs, de la Commission européenne, de la Commission de l’Union africaine, de l’OIF. L’un d’entre eux, M. Philippe Lancelin, a été désigné par le gouvernement français. Le décret 527 créé une commission technique.

La commission d’enquête a remis ses conclusions le 28 septembre 2008. Elles ont été portées in extenso sur le site de la Présidence de la République du Tchad, qui en a ainsi validé le contenu et les recommandations. La Commission au terme d’un travail rigoureux et argumenté a émis 13 recommandations.

Vu que concernant la disparition de M. Ibni Oumar Mahamat Saleh, elle a proposé dans le point 1 de ses recommandations la poursuite de l’enquête en responsabilité de l’État tchadien dans les termes suivants :

Point 1. Considérant le fait que les disparitions forcées des personnalités civiles dont particulièrement Ibni Oumar Mahamat Saleh et celui de prisonniers de guerre ont eu lieu pendant les événements du 28 janvier au 8 février 2008 et que, ces disparitions sont survenues au moment où l’armée gouvernementale avait repris le contrôle de la situation dans la ville de N’Djamena. Par conséquent, d’une part ces actes sont imputables à l’État tchadien et qu’il en est de même d’autre part des arrestations et détentions arbitraires et d’enlèvements des personnalités politiques dont il est question dans le rapport. La Commission recommande au Gouvernement :

(..)

b – de poursuivre impérativement les recherches et de donner une suite judiciaire en vue de faire définitivement la lumière sur le cas de la disparition forcée de Ibni Oumar Mahamat Saleh.

Vu que la même commission dans le point 11 de ses recommandations propose la constitution d’un comité du suivi incluant la participation de représentants étrangers, formulée dans les termes suivants :

Point 11. Aux fins de veiller à l’application des présentes recommandations, le Gouvernement est prié d’instituer un Comité restreint de Suivi au sein duquel la représentation de la Communauté internationale sera assurée.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

Conformément aux dispositions prévues par le point 11 des recommandations de la commission d’enquête tchadienne la France est en droit d’exercer en liaison éventuellement avec l’OIF (Organisation internationale de la francophonie) et l’Union européenne, qui ont participé aux travaux de la commission, de pressantes démarches auprès des autorités tchadiennes afin qu’elles se conforment à la lettre des obligations signalées par la Commission d’enquête, à savoir la mise en place dans les délais les plus brefs d’un Comité restreint de suivi « aux fins de veiller à l’application des recommandations » émises.


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