Pierre Ceyrac

1946 - 2018

Informations générales
  • Né le 18 septembre 1946 à Douai (Nord - France)
  • Décédé le 21 avril 2018 à Bondues (Nord - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
VIIIe législature
Mandat
Du 2 avril 1986 au 14 mai 1988
Département
Nord
Groupe
Front national

Biographies

Biographie de la Ve République

CEYRAC (Pierre)
Né le 18 septembre 1946 à Douai (Nord)
Décédé le 21 avril 2018, à Bondues (Nord)

Député du Nord de 1986 à 1988

Né le 18 septembre 1946 à Douai, Pierre Ceyrac est le fils d’Annie Defline (dont le père dirigea les Mines de Courrières dans les années 1930) et de Bernard Ceyrac, chef d’entreprise. Par son père, il est le neveu de Pierre Ceyrac (célèbre père jésuite missionnaire en Inde qui aida les réfugiés cambodgiens fuyant la dictature khmère rouge à la fin des années 1970), de Charles Ceyrac (député gaulliste de la Corrèze de 1972 à 1978) et surtout de François Ceyrac (chef d’entreprise et président du Conseil national du patronat français de 1972 à 1981). Il suit des études de droit et obtient un diplôme de l’Institut des hautes études européennes.

Ce cadre de direction rejoint le Front national au moment de l’émergence politique et électoral de ce parti au milieu des années 1980. Certes, Pierre Ceyrac est très anticommuniste, à un moment où, depuis la fin des années 1970, dans le cadre de la « Guerre fraîche », le bloc de l’Est se montre de nouveau menaçant. Mais ce n’est pas pour cette raison que Pierre Ceyrac a intégré la formation d’extrême droite, très en pointe dans ce combat anticommuniste, même si cette convergence idéologique a pu faciliter certains rapprochements. Pierre Ceyrac est en réalité en service commandé pour le compte du docteur Moon, fondateur et directeur de l’Église de l’unification, plus connue sous le nom de la secte Moon (célèbre aussi pour son engagement anticommuniste). Présenté dans les médias français des années 1980 et par l’ADEFI (Association pour la défense de la famille et de l’individu) comme l’un des représentants de cette secte en France (ce que l’intéressé dément en se posant comme « fidèle sans être responsable »), Pierre Ceyrac est de fait le président de la section française et délégué exécutif pour l’Europe de Causa international (Conférence des associations pour l’unification des sociétés américaines), organisation anticommuniste créée, en 1980, à New York par des membres de la secte et qui sert de branche politique discrète aux moonistes pour recruter et diffuser leur propagande. Il est également responsable de la Fondation pour la paix internationale, une officine anticommuniste.

Lors des législatives de 1986, que le président François Mitterrand a voulu au scrutin proportionnel départemental de liste de façon à limiter la victoire annoncée de la droite républicaine, Pierre Ceyrac figure sur la liste du Front national (FN) dans le département du Nord. L'Église de l'Unification avait noué des liens avec le FN juste avant ce scrutin, lors d'une rencontre organisée à Saint-Cloud entre le colonel coréen Bo Hi Pak (chef politique de l’Église de l’Unification), le révérend Moon et Henri Blanchard (président français de la secte). En échange d’un soutien financier (que le FN a toujours nié), le parti d’extrême droite place Pierre Ceyrac en position éligible (3e place) sur sa liste des législatives (la secte comptait déjà un de ses membres, le franco-roumain Gustave Pordea, sur la liste FN pour les élections européennes en 1984). Le chef d’entreprise nordiste, qui a publié pour l’occasion aux éditions Albatros un ouvrage intitulé A droite, pour la France, pour le Nord, est élu aux côtés de Christian Baeckroot (ancien responsable du FNJ et trésorier du FN) et de Bruno Chauvière (transfuge du RPR dont il dirigeait la fédération départementale dans le Nord). Pierre Ceyrac rejoint donc le groupe parlementaire du FN qui compte 35 élus et siège dans la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Le député du Nord se montre relativement peu actif durant cette législature. En 1986, il participe à l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant réforme du régime juridique de la presse. Lors de la discussion générale en première lecture, il déplore le 12 juin les monopoles pesant sur la presse (monopole de l’embauche des ouvriers de la presse et du livre, monopole de la distribution, monopole de la fourniture de papier par la Société nationale des entreprises de presse-SNEP), la dépendance financière de la presse vis-à-vis de l’État, le contrôle politique des médias. Soucieux d’illustrer ce qu’il présente comme une « désinformation d’État », il cite « l’affaire montée » contre Jean-Marie Le Pen à propos de la torture en Algérie. Il présente ensuite de nombreux amendements à propos des différents articles du texte de loi, mais qui sont rejetés. Il prend également la parole, le 8 août 1986, lors du dépôt d’une motion de censure par le socialiste Pierre Joxe. C’est l’occasion pour lui de critiquer le comportement des « autorités morales naturelles de la France et notamment des plus hautes autorités politiques » avant d’appeler à une « révolution morale et culturelle ». Il s’abstient, comme le reste du groupe FN, lors du vote le 9 septembre 1986 de la loi relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France. En avril 1987, en tant que vice-président du groupe parlementaire chargé d’évaluer les perspectives et les implications du futur lien Transmanche, il participe au débat sur le projet de loi portant approbation, en tant que besoin, de la concession concernant la conception, le financement, la construction et l’exploitation d’une liaison fixe à travers la Manche. Tout en reconnaissant l’importance du traité pour l’Europe et sa région Nord-Pas-de-Calais, il déplore l’absence de clause relative à la préférence nationale ou européenne en matière d’emploi sur le futur chantier. Lors de l’examen en mai 1987, du projet de loi relatif à la durée et à l’aménagement du temps de travail, il souhaiterait une plus grande flexibilité en matière de modulation des heures de travail. Le 22 mai 1987, il soutient comme ses collègues du FN le projet de loi modifiant le Code du travail et relatif à la prévention de la lutte contre le chômage de longue durée. Ce chef d’entreprise acquis aux idées libérales déplore toutefois sur ces questions sociales et économiques la « persistance de l’influence du socialisme ». Il intervient enfin, en octobre 1987, lors de l’examen du budget de la Coopération dans le cadre du projet de loi de finances pour 1988, sur le statut des coopérations et la question des bourses d’études des étudiants étrangers (dont il souhaite le retour au pays d’un certain nombre d’entre eux).

Comme il le reconnaît lui-même, « sa mission n’est pas de faire des lois mais d’ouvrir Le Pen à l’international ». De fait, en février 1987, Pierre Ceyrac, nommé responsable « propagande » pour l’organisation de la campagne présidentielle de Jean-Marie Le Pen, se rend avec ce dernier à Washington. Il parvient à faire se rencontrer à la sortie d’un banquet le président américain Ronald Reagan et le chef du FN, une photo sera même prise des deux hommes se serrant la main, qui sera utilisée par la suite par le FN pour consolider la stature internationale du candidat à la présidentielle. Les relations se tendent toutefois entre Pierre Ceyrac et Jean-Marie Le Pen après les propos de ce dernier en mai 1987 sur les chambres à gaz. Le député nordiste, qui évoque en interne « les dangers d’une dérive raciste et antisémite », a d’autant moins apprécié ce dérapage qu’il s’était efforcé, avec Charles de Chambrun, d’opérer un rapprochement entre Jean-Marie Le Pen et la communauté juive,
rapprochement concrétisé par un discours du leader du FN devant le Congrès juif mondial durant le séjour aux États-Unis. Cette brouille ne l’empêche pas toutefois d’être nommé en mai 1987 secrétaire national à la coopération au FN puis d’entrer en 1989 au Parlement européen dans le groupe « technique » des Droites européennes présidé par Jean-Marie Le Pen. Membre du comité central du parti, il siège en 1992 au Conseil régional du Nord-Pas-de-Calais sous l’étiquette FN.

Début 1992, les tensions s’accentuent entre Pierre Ceyrac et le FN. Le 27 avril 1992, l’ancien député qualifie dans le Figaro de « surenchère » et « d’erreur chèrement payée » les cinquante propositions du FN contre l’immigration que Bruno Mégret avait présentées à Marseille en novembre 1991. Pierre Ceyrac proteste contre « une approche du problème de l’immigration dénuée de toute générosité ». Début 1994, celui qui ne sollicite pas le renouvellement de son mandat de membre du comité central du FN lors du IXe congrès du parti au Port-Marly les 4-6 février 1994, accentue son réquisitoire, le 14 février, dans les colonnes du même Figaro où il signe un article intitulé « Pour un renouveau des valeurs ». Après avoir selon lui « œuvré depuis des années pour infléchir les positions » de son parti et constaté que « ses efforts n’avaient pas été suivis d’effets », il annonce « prendre congé d’un mouvement qui ne lui permet plus de mener le combat » qu’il « estime être le bon ». Le divorce prononcé, Pierre Ceyrac quitte le parti lepéniste et son groupe parlementaire à Bruxelles. Il justifie sa décision en mettant en avant son « combat pour le renouveau des valeurs » et « la reconstitution du tissu social et spirituel de la nation ». Le FN préfère évoquer l’échec de la « stratégie d’entrisme » de la secte Moon « en France et au Front national ».

Pierre Ceyrac, qui quitte la secte Moon en 1997, se concentre alors sur ses activités professionnelles en lien avec les États-Unis. La montée en puissance de Marine Le Pen au sein du FN au début des années 2000 ramène vers le parti d’extrême droite l’ancien député. À l’automne 2003, Pierre Ceyrac fait profiter la conseillère régionale FN du Nord-Pas-de-Calais de ses réseaux américains. On l’aperçoit cette année aux États-Unis avec Marine Le Pen, Louis Aliot, Eric Lorio et l’homme d’affaires italo-américain George dit Guido Lombardi (membre de la Ligue du Nord). Le même Pierre Ceyrac accompagne de nouveau Marine Le Pen à Washington en janvier 2017. Des journalistes les aperçoivent dans la Trump Tower en compagnie de Louis Aliot et de Guido Lombardi, qui travaille alors au rapprochement des droites radicales européennes et américaines.

Pierre Ceyrac meurt le 21 avril 2018. Il avait épousé Franziska Winklehner. Ils ont eu trois enfants.