Pierre, Matthieu Joubert
1748 - 1815
Député en 1789, né à Angoulême (Généralité de Limoges, France), le 16 novembre 1748, mort à Paris (Seine), le 26 avril 1815, fils d'un médecin d'Angoulême, il entra dans les ordres.
Il était curé de Saint-Martin d'Angoulême, lorsqu'il fut élu, le 28 mars 1789, député du clergé du bailliage de cette ville aux Etats-Généraux. Il prit une part importante aux débats de cette assemblée, et, dans les discussions préliminaires de la chambre de son ordre, soutint, contre son évêque, que « les pouvoirs qui lui ont été donnés, qui lui sont communs avec M. l'évêque et qui ont paru à ce dernier impératifs pour le vote par ordre, ne sont purement qu'indicatifs; que leur cahier leur prescrit formellement le vote par tête dans les questions d'intérêt général ». Le 16 juin 1789, il se réunit au tiers, et prononça à cette occasion le discours suivant:
« Messieurs, pénétrés de la grandeur de notre caractère, connaissant toute l'étendue des obligations qu'il nous impose, nous n'avions pas besoin d'être entraînés par l'exemple de ceux de nos confrères qui nous ont précédés dans la noble carrière du patriotisme; intimement persuadés que la force de la raison, la solidité des principes, et surtout l'intérêt de la nation exigeaient que la vérification des pouvoirs fût faite en commun, soyez persuadés, Messieurs, que l'espèce de délai que nous avons apporté à notre démarche a été le sacrifice le plus douloureux à notre cœur et n'a été motivé que par l'espérance de réunir à notre opinion tous ceux que nous avons vus avec la plus amère douleur faire les plus grands efforts pour consacrer d'iniques usages qui perpétueront les abus que nous sommes venus détruire. Pressés par les mouvements de notre conscience, altérés du bonheur public, effrayés des funestes conséquences que produiraient infailliblement les irrésolutions perpétuelles de la chambre du clergé, honorés ainsi que vous, Messieurs, du titre glorieux de députés de la nation française à ses Etats-Généraux, nous vous apportons nos titres, nous soumettons nos pouvoirs à votre vérification en vous priant de nous donner également connaissance des vôtres, et d'être intimement convaincus que notre seule ambition, le désir le plus cher à notre cœur, est de coopérer efficacement avec vous au grand œuvre de la félicité de la nation. »
Le 4 juillet, il attaqua la protestation de l'évêque d'Angoulême contre le vote par tête : « Notre cahier, dit-il, est pour le vote par tête. Ce vœu a été exprimé par le clergé d'Angoulême de la manière la plus formelle. A l'instant où la question du vote par ordre ou par tête fut agitée, plus de trois cents personnes de notre assemblée se levèrent et déclarèrent qu'elles étaient prêtes à voter par tête. Il est donc bien étonnant que M. l'évêque l'ait regardé comme impératif. A la vérité on a ensuite voté par ordre, mais cela n'est pas un mandat impératif; ce n'est pas une condition sine qua non. » L'évêque ne répondit pas.
Le 11 août 1790, Joubert fit décréter l'approvisionnement du duché de Bouillon; le 19, il présenta un rapport sur les troubles de Tarascon. Il prêta le serment civique le 27 décembre, fit admettre (17 mars 1791) le serment des ecclésiastiques non remplacés, et demanda (21 août) l'arrestation de Fauchet, évêque du Calvados. Il avait été élu, le 8 mars précédent, évêque constitutionnel de la Charente.
Sacré à N.-D. de Paris le 27 mars, il fit son entrée à Angoulême le 3 avril, présida, le 9, la Société des Amis de la Constitution, où il fit un pompeux éloge de Mirabeau qui venait de mourir, et prit le lendemain possession de la cathédrale, à la porte de laquelle il fut harangué par le maire, Perrier de Gurat. Après avoir prête le serment exigé par la loi du 15 juin 1790, il dit la messe, et lut un mandement qui n'était que l'apologie de la constitution civile du clergé, et qui débutait ainsi : « P. M. Joubert, par la miséricorde divine et le choix du peuple dans la communion du Saint-Siège apostolique, évêque du département de la Charente, etc. »
M. Joubert se sécularisa en 1793, prit femme, et entra dans l'administration, au coup d'Etat de brumaire, comme préfet du Nord (11 ventôse an VIII). Le 8 ventôse an IX, il devint membre du conseil de préfecture de la Seine, fonctions qu'il exerça presque jusqu'à sa mort.