Antoine Guitton
1901 - 1977
Né le 8 février 1901 à La Verrie (Vendée)
Décédé le 27 juin 1977 à La Verrie
Député de la Vendée de 1951 à 1958
Antoine Guitton, vendéen d'origine, père de six enfants, est un petit propriétaire exploitant d'une ferme d'une vingtaine d'hectares à La Verrie. Très actif dans les organismes corporatifs de la paysannerie, il a été vice-président du syndicat d'adduction d'eau du Haut-Bocage, de l'Union départementale de la Confédération générale agricole (CGA), président de la Fédération des planteurs de tabac de la Vendée et vice-président national de cette dernière formation.
Cet ancien combattant de la seconde guerre mondiale a soutenu le gouvernement de Vichy et a exercé les fonctions de délégué cantonal à l'Information. Fidèle à la mémoire du maréchal Pétain, il assiste tous les ans aux cérémonies commémoratives de l'Ile d'Yeu. Antoine Guitton, militant catholique et homme de droite, jouit d'une audience certaine dans le Haut-Bocage et dans les milieux ruraux du département. Conseiller municipal de sa commune natale, Antoine Guitton se présente aux suffrages de ses concitoyens aux élections législatives du 17 juin 1951. Troisième sur la Liste vendéenne d'Union nationale, présentée par l'Union des Indépendants Paysans et des Républicains Nationaux et par le RPF, Antoine Guitton représente les Indépendants Paysans. Cette liste, conduite par Armand de Baudry d'Asson, a conclu un apparentement avec la liste du Mouvement républicain populaire. Pour autant, le MRP est vivement combattu par Antoine Guitton et ses colistiers pour être responsable du « scrutin truqué » et de « l'exploitation » de la France. Malgré tout, la liste vendéenne d'Union nationale justifie son apparentement avec le MRP par son désir de faire barrage à Georges Gorse, député socialiste sortant, « adversaire déclaré de la liberté de l'enseignement ». Dans cette France de l'Ouest, la liste d'Antoine Guitton se présente sans ambiguïté comme « catholique » et opposé aux « communistes, agents de Moscou, ennemis jurés de notre belle civilisation chrétienne ». Elle propose une réforme de la Constitution, le rétablissement de « l'ordre partout », une aide accrue aux « combattants d'Indochine qui luttent et meurent pour défendre la civilisation chrétienne contre l'impérialisme moscoutaire », la liberté de l'enseignement, la diminution des dépenses de l'Etat, la liberté de l'entreprise « contre l'étatisme odieux ». Par ses thèmes et sa rhétorique, cette profession de foi n'est pas sans annoncer le poujadisme.
Le 17 juin, les 5 sièges à pourvoir sont répartis entre les listes républicaine populaire et indépendante au titre de l'apparentement qu'elles avaient conclu. Avec 85 519 voix sur 195 103 suffrages exprimés, la liste conduite par Armand de Baudry d'Asson arrive très largement en tête. Trois sièges lui sont attribués.
Au Palais-Bourbon, Antoine Guitton s'inscrit au groupe Paysan et d'Union sociale (PUS) puis au groupe Indépendant Paysan. Le nouveau député de Vendée est nommé membre des commissions des affaires économiques et de l'éducation nationale ainsi que des commissions de l'agriculture et du travail et de la sécurité sociale à partir de 1953 et de 1954. Le 9 janvier 1952, il est nommé Secrétaire de l'Assemblée nationale. Le 17 janvier, il vote l'investiture d'Edgar Faure et, le 6 mars, celle d'Antoine Pinay. Mais, il s'abstient pour René Mayer le 6 janvier 1953. Il soutient l'investiture de Joseph Laniel le 26 mars 1953 et s'oppose à celle de Pierre Mendès-France le 17 juin 1954. Il s'abstient lors de la ratification des accords de Genève. S'il a voté contre la ratification du traité instituant la CECA, le 13 décembre 1951, il s'oppose, le 30 août 1954, à l'adoption de la question préalable sur la Communauté européenne de défense, autrement dit en faveur de la CED. Lors de l'important débat sur la politique européenne qui avait eu lieu du 17 au 27 novembre 1953, Antoine Guitton avait apporté au gouvernement Laniel l'appui de la quasi-totalité des paysans. En 1957, il devait voter en faveur de la ratification des traités de Rome. Il approuve, en octobre et décembre 1954, les accords de Londres et de Paris et s'abstient le 4 février 1955 lors du vote qui provoque la chute du gouvernement Mendès-France.
Le 22 juillet 1954, Antoine Guitton dépose une proposition de résolution tendant à réviser l'article 46 de la Constitution qui dispose que le Président du Conseil et les ministres sont nommés par décret du Président de la République et le 1er avril 1955, un rapport au nom de la Commission de l'agriculture sur une proposition de loi tendant à étendre aux jeunes artisans ruraux le bénéfice des articles 55 à 62 du décret du 29 avril 1940 relatifs aux prêts d'installation aux jeunes agriculteurs. Au cours de la législature, ses interventions en séance publique, en sa double qualité de paysan et de catholique vendéen, sont nombreuses. Le 13 novembre 1953, lors du débat sur la politique agricole du gouvernement, il demande au gouvernement de soutenir le prix de la viande. Le 19 juillet 1955, au cours du débat sur le projet de loi relatif au budget des prestations familiales agricoles, il propose, au nom de son groupe, que le financement des allocations familiales soit pris en charge par la nation et celui des assurances sociales par la profession car le risque est professionnel. Le 2 novembre 1955, lors de la discussion du projet de loi relatif au renouvellement de l'Assemblée, il s'oppose avec ses amis à la reconduction du scrutin de 1951 qu'il présente comme un décalque de la loi soviétique au motif que les candidats et les élus sont soumis au bon vouloir de leur parti. Il propose un scrutin de liste sans ordre préférentiel avec liberté de panachage bien qu'il fut, un an plus tôt, l'un des membres fondateurs du Comité national pour le retour au scrutin d'arrondissement placé sous la présidence de François Mitterrand. Le 29 novembre 1955, il contribue à la chute du gouvernement Edgar Faure.
Lors des élections législatives du 2 janvier 1956, Antoine Guitton, qui avait été élu maire de La Verrie en 1953, est à nouveau inscrit en troisième position sur la Liste d'Union des Indépendants et Paysans de Vendée présentée par le Centre national des Indépendants Paysans et d'Action républicaine et sociale et par le Groupement national des Indépendants d'action démocratique et paysanne. En recul par rapport à 1951 pour cause d'accroissement du nombre de listes, celle-ci obtient 67 770 voix sur 210 841 suffrages exprimés et trois sièges au titre de l'apparentement qu'elle a conclu avec la liste MRP de Lionel de Tinguy du Pouet.
Antoine Guitton retrouve la Commission de l'agriculture et en 1957 est élu secrétaire de cette commission ainsi que de celle de la marine marchande et des pêches. Au cours de la législature, il intervient pour l'essentiel sur les questions agricole et pour défendre ses mandants. Ainsi, le 15 mars 1956, demande-t-il l'indemnisation des planteurs de tabac sinistrés par le froid. En 1956, il vote les pouvoir spéciaux en Algérie le 12 mars et s'oppose à la loi-cadre Defferre le 19 juin. Le 1er juin 1958, il vote l'investiture du général de Gaulle et le lendemain les pleins pouvoirs et la loi constitutionnelle.
Le 23 novembre 1958, Antoine Guitton est réélu député dès le premier tour dans la quatrième circonscription de Montaigu les Herbiers. Le 28 janvier 1959, il fut désigné membre de l'Assemblée du Conseil de l'Europe. En 1962, le gaulliste Vincent Ansquer occupe son siège de député.
GUITTON (Joseph, Louis, Marie, Antoine)
Né le 8 février 1901 à La Verrie (Vendée)
Décédé le 27 juin 1977 à La Verrie
Député de la Vendée de 1951 à 1962
En novembre 1958, le Centre national des indépendants et paysans (CNIP) accorde sans hésitation à Antoine Guitton, député sortant et maire de La Verrie, son investiture dans la 4ème circonscription de Vendée, formée par les cantons du Nord du département : Les Essarts, Les Herbiers, Montaigu, Mortagne-sur-Sèvre, Palluau, Le Poiré-sur-Vie, Rocheservière et Saint-Fulgent. Opposé à deux candidats seulement (le maçon communiste Louis Le Viquel, 2 356 voix, et le poujadiste Alexis Garreau, 6 426 contre près de 9 000 en 1956), Antoine Guitton recueille 41 020 voix (82,35% des 49 802 suffrages exprimés) et est le seul élu dès le premier tour dans le département avec, qui plus est, le meilleur score national. Il a choisi comme suppléant le docteur Marie-Joseph Mignen, conseiller général et maire des Essarts. Il se réinscrit au groupe Indépendant et paysan d’action sociale (IPAS), désormais présidé par Henry Bergasse, et en devient l’un des deux trésoriers.
D’abord membre de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale le 27 janvier 1959, il passe dès le 30 à la Commission de la défense nationale et des forces armées et y siège jusqu’à la fin de la législature. Il est aussi élu le 29 janvier 1959 représentant titulaire à l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe. Comme sous la IVème République, il intervient à la tribune du Palais-Bourbon sur les questions agricoles. Le 23 novembre 1959 dans la discussion de la loi de finances pour 1960 ; le 11 juillet 1960 sur la réglementation des abattoirs au cours du débat sur le projet de loi d’orientation agricole ; le 9 novembre 1960 sur le budget annexe des prestations sociales agricoles ; le 6 décembre 1960 lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1961, sur les cotisations versées au Centre technique de la salaison ; le 29 octobre 1961 lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1962 contre les cotisations imposées aux planteurs de tabac. Antoine Guitton, fervent partisan de la construction européenne, pose deux questions orales au ministre des affaires étrangères – les 2 et 15 décembre 1961 – relative à la ratification de la Convention européenne des droits de l’homme. Le 6 décembre 1960, il prend part aux questions orales posées par Maurice Faure relatives à l’organisation du Service d’exploitation industrielle du tabac (SEITA) et aux aides aux planteurs de tabac. Enfin, le 1er décembre 1961, il est entendu pour un fait personnel (injures adressées par un collègue à un autre collègue).
Comme pour nombre de députés IPAS, le discours du 16 septembre 1959 dans lequel le chef de l’État annonce la future « autodétermination » de l’Algérie provoque la rupture d’Antoine Guitton avec le nouveau régime. Le 15 octobre, lors du vote sur l’approbation du discours de politique générale de Michel Debré, valant approbation de la nouvelle politique algérienne du président de la République, il est l’un des treize IPAS qui votent contre le gouvernement – Henri Caillemer et Michel Crucis, les deux autres députés IPAS de Vendée, font de même. Fidèle à la ligne de conduite du secrétariat général du CNIP, il vote « non » au référendum de janvier 1961. Il n’approuve pas non plus les accords d’Évian. Lorsque le nouveau Premier ministre, Georges Pompidou, expose son programme politique le 27 avril 1962 devant l’Assemblée nationale, comme la grande majorité de ses collègues du groupe IPAS, il s’abstient volontairement. Le 5 juillet, il refuse la levée de l’immunité parlementaire de Georges Bidault et, le 4 octobre, il vote sans hésiter la motion de censure qui débouche sur les élections législatives anticipées de novembre.
Investi par le CNIP dans la 4ème circonscription de Vendée, il doit, avec son suppléant René-Bazin Rémy, propriétaire, conseiller général et maire de Treize-Vents, affronter cette fois des adversaires d’envergure. Outre les candidats communiste Jean Miquel (1 965 voix) et poujadiste Alexis Garreau (1 091 voix), tous deux en net recul par rapport à 1958, Antoine Guitton doit en effet faire face à Raymond Dronneau, agriculteur et maire de Saint-Georges-de-Montaigu investi par le Mouvement républicain populaire (MRP), qui recueille 12 803 voix, et Vincent Ansquer, directeur d’usine, investi par l’Union pour la nouvelle République (UNR), qui en recueille 22 237. Si les électeurs de droite ont en 1958 massivement reporté leurs voix sur le seul candidat de droite en lice, les choses ont donc bien changé quatre ans plus tard. Beaucoup d’électeurs modérés veulent montrer, comme dans la plupart des circonscriptions en France, qu’ils souhaitent que Charles de Gaulle reste au pouvoir. Au second tour, le député IPAS sortant se retire purement et simplement, tout comme le candidat du MRP, laissant Vincent Ansquer seul candidat. Celui-ci est élu le 25 novembre avec 33 794 voix, soit près de 5 000 suffrages exprimés de moins qu’au premier tour. La division des droites vendéennes se manifeste aussi dans le nombre record des bulletins blancs et nuls au second tour : presque 5 000, soit 8% des inscrits.
Antoine Guitton, qui a déjà renoncé à être maire de La Verrie en 1959, ne se représente plus à aucune élection. Il se consacre en revanche jusqu’à sa mort à ses activités syndicales.
C’est dans ce même Haut-Bocage, longtemps fief électoral d’Antoine Guitton, qu’une nouvelle figure politique de la droite catholique conservatrice, héritière indirecte de l’ancien légitimisme, émerge dans les années quatre-vingt en la personne de Philippe de Villiers. Déjà candidat en 1986, mais seulement quatrième de la liste du Rassemblement pour la République et de l’Union pour la démocratie française, il devient député à l’occasion des élections législatives de 1988 dans la circonscription des Herbiers.