N° 3365 tome XI - Avis de M. Jean Gaubert sur le projet de loi de finances pour 2007 (n°3341)



N
° 3365

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2006

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES, DE L’ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2007 (n° 3341),

TOME XI

SÉCURITÉ SANITAIRE

SÉCURITÉ ET QUALITÉ SANITAIRES DE L’ALIMENTATION

PAR M. JEAN GAUBERT,

Député.

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Voir le numéro : 3363 (annexe 32).

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

I.— UN PROGRAMME « SÉCURITÉ ET QUALITÉ SANITAIRES DE L’ALIMENTATION » POUR 2007 DANS LA LIGNÉE DE CELUI DE 2006 9

A.— L’EXÉCUTION DE LA LOI DE FINANCES POUR 2006 SOULIGNE LES FAIBLESSES DU PROJET DE LOI PRÉSENTÉ À L’AUTOMNE DERNIER 9

1. La mission Sécurité sanitaire dans le projet de loi de finances et dans la loi de finances initiale pour 2006 9

2. La gestion des crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » 10

a) L’application d’un taux de gel des crédits fortement pénalisant 10

b) Des ouvertures de crédits pour financer des actions prévisibles dès le projet de loi de finances 11

B.— LES GRANDES LIGNES DU PROGRAMME POUR 2007 CONFIRMENT LES RÉSERVES ÉMISES EN 2006 12

1. Une architecture du programme encore perfectible 12

a) Les crédits retracés au sein du programme 206 13

b) Les fonds de concours 15

c) Les objectifs et les indicateurs 17

2. Un budget toujours en hausse mais qui connaît en son sein des évolutions contrastées 18

a) Situation du programme 206 dans la mission Sécurité sanitaire et dans le budget de l’agriculture 18

b) Principales évolutions internes 20

II.— ENTRE PRIORITÉS AFFIRMÉES ET ACTIONS NON FINANCÉES, UNE GESTION DE LA SECURITÉ SANITAIRE A COURTE VUE 24

A.— DES HAUSSES DE CRÉDITS INDÉNIABLES, SUR CERTAINES ACTIONS 24

1. Alors que la politique de surveillance des denrées alimentaires continue d’enregistrer une des plus fortes hausses du programme… 24

2. … et que la lutte contre les maladies animales et la protection des animaux bénéficient d’un effet de rattrapage,… 25

3. … les moyens consacrés à la protection des végétaux et aux services vétérinaires stagnent 28

B.— UNE IMPRÉVOYANCE REGRETTABLE SUR DES POSTES DE DÉPENSES PRIORITAIRES 30

1. La situation de l’AFSSA n’a cessé de se dégrader depuis 2002 30

a) L’effet des mesures de régulation prises en 2006 30

b) L’évolution de la dotation du MAP pour 2007 31

c) La situation financière de l’Agence 36

2. Le dossier du service public de l’équarrissage et des farines animales n’a toujours pas trouvé de solution pérenne 38

a) Un dossier complexe 38

b) Un coût important pour les finances publiques 39

c) Quelle volonté de faire évoluer le système ? 42

III.— EN 2007, QUELLE POLITIQUE POUR LES OGM AUX NIVEAUX NATIONAL ET COMMUNAUTAIRE ? 44

A.– UNE RÉGLEMENTATION LACUNAIRE 44

1. Le contenu de la réglementation actuelle 44

2. Les questions en suspens 45

a) La question des semences 45

b) La question des règles de coexistence 46

c) La question de la présence d’OGM dans la filière biologique 47

3. Des processus décisionnels défaillants 49

a) L’articulation des expertises nationale et communautaire : le rôle de l’Autorité européenne de sécurité alimentaire 49

b) Le fonctionnement des mécanismes institutionnels : la prépondérance de la Commission européenne 50

B.— DES CONTRÔLES À RENFORCER 52

1. La répartition des compétences entre les différents services de l’Etat 52

a) Les services de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes 52

b) Les services régionaux de la protection des végétaux 53

2. Le bilan des contrôles réalisés 54

a) Pour les semences 54

b) Pour les denrées alimentaires 54

EXAMEN EN COMMISSION 57

MESDAMES, MESSIEURS,

La présentation des perspectives mondiales sur l’alimentation et l’agriculture par la FAO (1) mi-octobre a dévoilé un certain nombre de faits majeurs pour les décennies à venir. Alors que la population mondiale va continuer à croître pour atteindre les 9 milliards d’individus à l’horizon 2050, le nombre de personnes sous-alimentées va, lui, continuer à baisser. Par ailleurs, cette croissance démographique sera à 100 % urbaine et à 100 % située dans les pays en voie de développement (PVD), ce qui constituera une importante opportunité d’ouverture de nouveaux marchés pour l’agriculture. En effet, la croissance du PIB qui accompagne la croissance de la part de la population en âge de travailler et donc d’acheter des biens alimentaires induira des changements de modèles de consommation, entraînant par exemple une augmentation de la part des produits transformés et importés (2).

Dans cette perspective, le défi à relever pour l’Europe est la préservation de ses terres arables et de ses ressources en eau, alors que dans d’autres parties du globe, les marges de manœuvre sont déjà quasi inexistantes. Dans cette compétition mondiale, les avantages de l’Union européenne reposent en effet sur une gestion écologique et saine de l’agriculture ainsi que sur le maintien de standards élevés de sécurité sanitaire. Il faudra sans doute encore un long chemin aux pays émergents pour parvenir au degré de conscience, que nous avons développé en Europe au fil des crises, de la nécessité de respecter un certain nombre d’impératifs sanitaires et environnementaux. Ici aussi, la vigilance doit néanmoins rester de mise, comme en témoigne la multiplication des alertes sanitaires en Europe en 2005 (3).

En France, cependant, la sécurité alimentaire est entrée dans les mœurs. Transparence et information du public sont les vertus cardinales de notre système de sécurité alimentaire. À cet égard, la « banalisation » des avis de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) – notamment lors des différents épisodes d’influenza aviaire en 2006 – apparaît comme un gage de la normalisation de ses relations avec les consommateurs et les professionnels. La confiance du public dans les institutions et les mécanismes de gestion des crises semble ainsi progresser, notamment grâce à la mobilisation sans faille des personnels de l’Agence, et tout particulièrement cette année de son équipe du laboratoire de Ploufragan auquel il convient de rendre un juste hommage, à la fois pour sa réactivité, la qualité de ses travaux et son dévouement.

On ne peut donc que regretter qu’une fois de plus, les moyens consacrés par le ministère de l’agriculture et de la pêche (MAP) à l’AFSSA ne soient pas à la hauteur des responsabilités qui lui sont confiées. En effet, si la taxe fiscale qui lui sera affectée pour mener à bien l’évaluation des produits phytosanitaires devrait lui permettre de remplir ses nouvelles missions, l’essentiel de la hausse de la dotation du MAP correspond en réalité à des transferts et des augmentations inéluctables de charges. Aucune mesure nouvelle n’est prévue, aucun investissement pour l’avenir. C’est là une situation inacceptable.

Plus généralement, si les crédits du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » pour 2007 augmentent de 3,5 % – soit une hausse moitié moindre par rapport à l’année dernière – c’est presque contraint et forcé, que ce soit par l’entrée en vigueur de réglementations communautaires imposant de nouvelles normes sanitaires (surveillance accrue des salmonelles, dépistage de la trichine du porc) ou par l’augmentation inévitable de certaines charges (loyers, GVT).

Derrière cette hausse globale des crédits, se cachent par ailleurs un certain nombre de baisses inquiétantes. Ainsi, alors que nous sommes encore en pleine adaptation aux règles du Paquet Hygiène (4), notamment en termes de surveillance et de contrôle, les moyens des directions départementales des services vétérinaires (DDSV) et des services régionaux de la protection des végétaux (SRPV) sont en diminution. En dépit de l’application d’un taux de gel de 4,5 % sur l’exercice 2006, qui avait déjà largement amputé les moyens des DDSV, la hausse annoncée de leurs crédits pour 2007 n’est que de 0,69 %…

Quel bilan laisse l’actuel gouvernement en matière de sécurité sanitaire ? Si les dispositifs de lutte contre les maladies animales et de surveillance des denrées alimentaires apparaissent opérationnels, les crédits ne sont pas toujours au rendez-vous sur des postes de dépenses importants et la gestion de ces crédits continue parfois de se faire à vue. Un certain nombre de sujets n’ont par ailleurs pas trouvé de solutions satisfaisantes, tel le dossier du service public de l’équarrissage et des farines animales. Enfin, faute d’un engagement politique fort et responsable, la question des OGM a été laissée en suspens, aussi bien au niveau national que dans le cadre des instances communautaires.

Il y a des secteurs où les coupes budgétaires et le manque de vision d’avenir peuvent coûter très cher. La sécurité sanitaire ne peut pas faire les frais d’un désengagement de l’État, notamment en matière de contrôle et après les efforts qui ont été nécessaires pour arriver là où nous en sommes aujourd’hui. Considérant que les crédits pour 2007 figurant au sein du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » ne seront pas à la hauteur de ces enjeux, votre rapporteur ne peut inviter la représentation nationale à y apporter son soutien.

I.— UN PROGRAMME « SÉCURITÉ ET QUALITÉ SANITAIRES DE L’ALIMENTATION » POUR 2007 DANS LA LIGNÉE DE CELUI DE 2006

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2006 à l’Assemblée nationale, les autorisations d'engagement et crédits de paiement de la mission Sécurité sanitaire ont dans un premier temps été majorés d'un montant global de 14 500 euros destinés aux actions 02 « Lutte contre les maladies animales et protection des animaux » et 04 « Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires »du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » (5).

Toutefois, à l'initiative du gouvernement et afin de gager les dépenses au titre du plan d'urgence pour les banlieues, l'Assemblée nationale a, lors d’une deuxième délibération, réduit les crédits de la mission d'un montant de 2 142 697 euros, ainsi répartis :

– 550 672 euros sur le programme « Veille et sécurité sanitaires » ;

– 1 592 025 euros sur le programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation ».

Le Sénat ayant adopté sans modification les crédits de la mission Sécurité sanitaire, le solde de l'ensemble des modifications introduites lors de la discussion budgétaire est donc négatif pour la mission à hauteur de 2 128 197 euros. S’agissant du seul programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », celui-ci s’est trouvé réduit de 1 577 525 euros (0,3 % des crédits).

Dès l’adoption de loi de finances pour 2006, un taux de gel uniforme a été appliqué de manière transversale à l’ensemble des crédits du programme 206, comme le prévoit la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Ce taux de gel a été fixé à 4,5 % des crédits (fonctionnement, investissement et intervention), à l’exception des crédits de personnel pour lesquels le taux était de 0,1 %.

Il a ainsi résulté de l’application de ce taux fixe un montant de mise en réserve globalement supérieur aux montants des gestions précédentes (6), mais surtout un niveau de régulation anormalement élevé pour certaines actions du programme, qui contraste avec la relative préservation des crédits affectés à la politique de sécurité sanitaire par la loi de finances. En effet, comme cela a été indiqué à votre rapporteur par le Directeur général de l’alimentation (responsable du programme), il s’est révélé d’emblée impossible de geler 4,5 % des crédits de l’action 04 (7). Celle-ci est constituée à près de 96 % de la subvention pour charges de service public de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) et contribue donc en grande partie à financer les rémunérations des 994 ETPT employés par l’Agence. Ainsi, d’autres actions du programme 206 ont dû subir un taux de gel supérieur à 4,5 %, de manière à limiter le taux applicable à l’action 04, sans toutefois que cela ait des effets extrêmement probants sur la dotation de l’AFSSA dont le taux de gel est estimé entre 2 et 3 %, ce qui demeure très élevé, nous y reviendrons.

La répercussion sur les autres actions du programme varie de manière notable ; notons seulement que le taux de gel appliqué aux directions départementales des services vétérinaires (DDSV) a atteint 5,8 % (action 06 « Mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation »). Or il convient de remarquer que déjà, lors des exercices 2004 et 2005, les crédits reportés pour cause de non engagement avant la date de clôture de la gestion ont été partiellement gelés puis annulés, et que ces crédits concernaient principalement les moyens de fonctionnement des directions départementales des services vétérinaires.

D’après la Direction générale de l’alimentation (DGAL), cela s’est traduit essentiellement par la diminution des vacations au sein des DDSV. Or, il convient de signaler que les vacataires des DDSV sont généralement des techniciens de haut niveau (vétérinaires par exemple) chargés, notamment, de missions de surveillance et de contrôle. La réduction de leur nombre se traduit de facto par l’abandon de certaines missions, telles que les actions de prophylaxie ou les opérations de contrôle en abattoir. Toutefois, la DGAL estime que cette évolution est naturelle et s’inscrit dans une triple logique : économique (diminution du nombre d’abattoirs, nécessité que les contrôles ne freinent pas leur productivité), technique (réforme des modalités d’inspection : transition d’une méthode basée sur la palpation et l’incision à une méthode visuelle (8), renforcement de la surveillance ante mortem) et culturelle (la réglementation communautaire – via le « Paquet hygiène » – posant désormais un principe général de responsabilité des acteurs économiques, c'est-à-dire, d’une part, des éleveurs, qui ont l’obligation de faire remonter les informations sur l’état sanitaire des troupeaux (9), et, d’autre part, des abattoirs qui pourraient désormais créer en leur sein des postes de contrôle sous supervision des services de l’Etat). Des exemples de jurisprudence ont cependant encore récemment démontré, si cela était nécessaire, le rôle crucial que les contrôles des vacataires des DDSV jouent dans les abattoirs et, plus généralement, dans notre dispositif de surveillance de la chaîne alimentaire de la fourche à la fourchette ou plutôt, en l’occurrence, de l’étable à l’assiette (10). Votre rapporteur réfute donc l’argumentation développée par la DGAL, notamment en ce qu’elle fait fi des leçons tirées de la crise de la vache folle, dont la première est la nécessité pour les pouvoirs publics de disposer de réseaux de surveillance et de contrôle opérationnels. Sans nier les évolutions en cours et tout en reconnaissant la nécessité de responsabiliser les filières, il estime qu’un désengagement rapide de l’Etat risquerait de coûter cher aux consommateurs comme aux professionnels.

Le programme 206 a bénéficié d’ouvertures de crédits sur trois postes de dépense, qui démontrent bien un certain état d’imprévision dans la préparation du budget de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation pour 2006. Ces ouvertures de crédits ont porté sur trois dispositifs :

– le service public de l’équarrissage, dont les dépenses ont été supérieures aux recettes, constituées par la dotation de l’Etat, le produit de la taxe d’abattage et la participation des éleveurs de porcs et de volailles, a fait l’objet d’abondements en loi de finances rectificative : en 2004, pour un montant de 56 millions d’euros, et, en 2005, pour un montant de 45 millions d’euros ; 

– la lutte contre l’EST ovine (11) : suite à la découverte d’un cas chez une chèvre en 2005, le Gouvernement a décidé de mettre en place des tests systématiques à l’abattoir et à l’équarrissage chez les ovins et les caprins de plus de 18 mois. Le financement de ce plan, non prévu lors de la construction du PLF 2006, a nécessité l’ouverture de 33 millions d’euros de crédits supplémentaires (3 millions d’euros en loi de finances rectificative et 30 millions d’euros par décret d’avance (12)) ;

– la lutte contre l’influenza aviaire, qui a conduit à l’ouverture de 23 millions d’euros supplémentaires sur l’action 02 du programme 206 (7 millions d’euros par la loi de finances rectificative du 30 décembre 2005 et 16 millions d’euros par décret d’avance (13)).

S’agissant du service public de l’équarrissage (SPE), votre rapporteur estime qu’il y a une sous-estimation chronique et volontaire des besoins de financement du SPE par l’Etat qui conduit à minorer la dotation inscrite à l’action 05 du programme 206. Ainsi, en 2005, le coût total du SPE s’est élevé à 187 millions d’euros, alors que le produit la taxe d’abattage a été de 107 millions d’euros, que les éleveurs de porcs ont apporté une contribution de 1 million d’euros et que la loi de finances initiale avait prévu une participation de l’Etat à hauteur de 34 millions d’euros : le différentiel qui a été couvert par le collectif budgétaire – 45 millions d’euros – était donc supérieur au montant inscrit en loi de finances par le gouvernement.

En ce qui concerne les deux autres dispositifs, qui relèvent de l’action 02 « Lutte contre les maladies animales et protection des animaux », rappelons que votre rapporteur avait estimé dans son précédent avis que la lutte contre les maladies animales faisait l’objet dans le PLF 2006 de « sous-dotations inquiétantes » : s’appuyant sur l’exemple de la tremblante ovine et caprine et surtout sur celui de la grippe aviaire, l’avis mettait notamment en doute les hypothèses de travail retenues par le ministère, considérant qu’elles conduisaient à minorer les risques. Au final, la somme totale des ouvertures de crédits sur ce poste de dépenses – 56 millions d’euros – ne représente pas moins de 56 % de la dotation de l’action 02 dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2006.

Origine ou destination

Impact pour le programme « Sécurité et qualité sanitaires
de l’alimentation »

En provenance du programme « Gestion durable de l’agriculture, de la pêche et développement rural » (mission agriculture, pêche, forêt et affaires rurales)

+ 7 420 781 euros

En provenance du programme « Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture » (mission agriculture, pêche, forêt et affaires rurales)

+ 84 709 645 euros

En provenance du programme « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés » (mission agriculture, pêche, forêt et affaires rurales)

+ 58 841 euros

En provenance du programme « Gestion des milieux et biodiversité » (mission écologie et développement durable)

- 4 012 101 euros

En provenance du programme « Prévention des risques et lutte contre les pollutions » (mission écologie et développement durable)

- 11 516 771 euros

Source : Projet annuel de performance, PLF 2007.

En premier lieu, le programme est destinataire d’importants flux financiers en provenance de la mission Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales (Apfar), puisque, rapportés au montant total des crédits affectés au programme 206, ils en représentent un peu plus de 16,5 % (14). La mission Apfar regroupe en effet au sein de ses programmes 154 « Gestion durable, de l’agriculture, de la pêche et du développement rural » et 215 « Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture » les crédits affectés :

– d’une part, aux moyens humains et de fonctionnement de la Direction générale de l’alimentation (DGAL), dont le directeur n’est autre que le responsable du programme 206 (15) ;

– et, d’autre part, aux directions départementales et régionales de l’agriculture et de la forêt (DDAF et DRAF) qui abritent en leur sein les services régionaux de la protection des plantes – SRPV – qui participent à la réalisation de l’action 01 « Prévention et gestion des risques inhérents à la production de végétaux » du programme 206.

À cet égard, le seul effort de rationalisation opéré dans le projet de loi de finances pour 2007 a consisté à transférer aux dits programmes 154 et 215 les crédits de fonctionnement liés à l’activité courante des SRPV qui étaient précédemment retracés au sein de l’action 01. Toutefois, c’est plus pour des raisons de simplification de la gestion des crédits au niveau local qu’en réponse à un impératif de clarté budgétaire que cette modification a été introduite : la suppression du « préfléchage » de ces moyens de fonctionnement en direction des SRPV devrait en effet permettre aux DRAF de gérer leurs crédits de manière globale et donc de bénéficier d’une plus grande marge de manœuvre dans leur affectation (16). Le montant des crédits concernés est de l’ordre de 1,34 million d’euros (1,03 million d’euros pour le programme 215 et 310 000 euros pour le programme 154 dans les départements, territoires et collectivités d’outre-mer).

A contrario, le projet de loi de finances pour 2007 voit un nouveau flux financier en provenance de la mission Apfar concourir à la réalisation du programme 206 et plus précisément de son action 05 « Elimination des farines et des coproduits animaux ». Celle-ci bénéficie en effet désormais des moyens de fonctionnement de l’Office de l’élevage, auquel a été confiée la gestion du service public de l’équarrissage (moyens estimés à 58 841 euros pour 2007).

Parallèlement, on rappellera que le programme 206 concourt lui-même à la réalisation d’autres programmes, en l’occurrence des programmes 153 « Gestion des milieux et biodiversité » et 181 « Prévention des risques et lutte contre les pollutions » de la mission Ecologie et développement durable. Les directions départementales des services vétérinaires sont en effet chargées par le ministère de l’écologie et du développement durable de réaliser des inspections des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) dans les domaines de l’élevage et de l’agroalimentaire, ainsi que des missions de protection de la faune sauvage.

Enfin, on notera que le projet annuel de performances de la mission Sécurité sanitaire pour 2007 précise que le programme « Régulation et sécurisation des échanges de biens et de services » (mission Développement et régulation économiques) et le programme « Veille et sécurité sanitaires » participent également à la réalisation du programme 206. Le premier regroupe en effet les moyens affectés aux services de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes qui participent à la surveillance et au contrôle de la chaîne alimentaire, parfois conjointement avec les services du ministère de l’agriculture (17). Quant au second, il constitue l’autre volet de la mission « Sécurité sanitaire » et lui est donc complémentaire dans ses missions (sur la grippe aviaire par exemple) comme dans ses fonctions (co-tutelle de l’AFSSA). Toutefois, comme l’indique le PAP, cette participation ne donne pas « lieu, à ce stade, à déversement en analyse de coûts ».

Numéro et intitulé de l’action

Total des crédits de paiement en 2006

Fonds de concours attendus en 2006

Total des crédits de paiement pour 2007

Fonds de concours attendus pour 2006

01

Prévention et gestion des risques inhérents à la production végétale

17 417 197

2 520 000

16 077 196

604 000

02

Lutte contre les maladies animales et protection des animaux

99 258 020

33 070 000

108 885 520

30 551 920

03

Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires

19 534 476

150 000

26 934 476

370 535

04

Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires

46 979 049

 

51 219 566

 

05

Élimination des farines et des coproduits animaux

98 473 300

 

95 473 300

 

06

Mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation

255 143 045

42 000

256 902 112

42 000

07

Mise en œuvre des politiques pour le compte du ministère de l’écologie et du développement durable

       

Totaux

536 805 087

35 782 000

555 492 170

31 568 455

Source : Projet annuel de performance, PLF 2007.

En ce qui concerne l’action 01, les sommes retracées correspondent à la participation de la Communauté européenne aux programmes d’actions phytosanitaires dans les départements d’Outre-mer. Quant à la diminution constatée, elle est imputable à l’affectation des fonds de concours relatifs aux avertissements agricoles au programme 215, parallèlement au transfert des moyens de fonctionnement des services régionaux de la protection des végétaux au sein de ce programme.

Les fonds de concours abondant l’action 02, dont le montant représente près de 97 % du montant total des quatre fonds de concours (30,5 millions d’euros attendus pour 2007), correspondent à la participation du FEOGA aux dépenses de lutte contre les maladies animales. Ils comprennent notamment le cofinancement par la Communauté européenne de l’achat des tests et réactifs de l’ESB (encéphalite spongiforme bovine) ainsi que le remboursement de certaines actions de police sanitaire. La diminution provient, d’une part, d’une réévaluation du nombre de test réalisés (principalement sur les ovins) et d’autre part, d’une diminution du coût forfaitaire remboursé par test réalisé (-1 euro).

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2006, le nombre d'objectifs du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » avait déjà été réduit de neuf (dans les avant-projets) à sept et la définition des objectifs rationalisée, à la demande des commissions des finances et des affaires économiques des assemblées. En outre, de nombreux indicateurs, considérés comme non pertinents ou prêtant à confusion, avaient été supprimés. Toutefois, à cette occasion, le seul objectif relatif à l'unique opérateur du programme, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), avait lui aussi disparu, dans l’attente d’être « réintégré » dans le contrat d’objectifs et de moyens (COM) que l’Agence doit signer avec ses trois ministères de tutelle.

Cette année, la mise en œuvre du programme 206 a été resserrée autour de cinq objectifs (18) et le nombre d’indicateurs a été ramené de 9 (13 dans les avant-projets) à 7 grâce à la suppression des indicateurs les plus complexes. Par ailleurs, dans le projet annuel de performance (PAP) pour 2007, tous les indicateurs sont renseignés. Certains manquent néanmoins de précision et d’autres d’ambition. On peut ainsi faire remarquer s’agissant de l’objectif 2, qu’un seul indicateur, faisant référence aux résultats de la lutte contre l’ESB, concerne les maladies animales. Bien que l’éradication de cette maladie puisse être considérée comme un objectif prioritaire de la politique de sécurité sanitaire, notamment en raison de ses éventuelles répercussions sur la santé humaine, il convient néanmoins de noter que d’autres maladies constituant de sérieux dangers pour le cheptel, telles l’influenza aviaire, la tremblante ovine et caprine ou encore la peste porcine et la maladie d’Aujeski du porc, devraient être prises en compte. Par ailleurs, cet indicateur est, quoi qu’il arrive, voué à diminuer dans la mesure où le nombre de bovins dépistés et nés avant 2001 diminue au fil du temps (19) : il doit tendre vers un palier correspondant aux cas sporadiques dont le nombre sera incompressible par les méthodes de prophylaxie.

En revanche, on ne peut que se féliciter de la volonté d’étendre à l’avenir l’unique indicateur proposé pour l’objectif 4 aux autres affections que celles à la salmonella enteriditis, en l’élargissant par exemple aux 2 ou 3 zoonoses alimentaires qui font l’objet de mesures de lutte rendues obligatoires au niveau communautaire. Il en va de même pour l’indicateur de l’objectif 5 qui mesure le taux d’élevages ne respectant pas les normes de santé publique vétérinaire dans les domaines de l’identification et de la traçabilité des bovins, des résidus d’activateurs de croissance chez les veaux de boucherie et jeunes bovins et des résidus d’antibiotiques chez les porcins, qui devrait être étendu dans le PAP 2008 au domaine du bien-être animal.

Les chiffres du projet de loi de finances pour 2007 confirment les grandes tendances du budget 2006, confortant la politique de sécurité sanitaire comme composante essentielle de la mission Sécurité sanitaire et comme priorité d’action du ministère de l’agriculture.

S’agissant du premier point, le déséquilibre structurel de la mission Sécurité sanitaire en faveur du programme 206 est toujours aussi évident, mais reste stable : celui-ci continue en effet de canaliser 84 % des crédits affectés à la mission. Le programme « Veille et sécurité sanitaires » est ainsi doté d’un peu plus de 105 millions d’euros en crédits de paiement (CP) pour 2007 (en hausse de 1,5 % seulement) contre près de 555,5 millions d’euros (CP) pour le programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » (en hausse de 3,5 %).

En ce qui concerne l’importance relative des crédits de la politique de sécurité sanitaire dans le budget du ministère de l’agriculture et de la pêche (MAP), il convient de noter que la part consacrée au programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » augmente de près d’un point en 2007, passant de 10 à 10,9 % des crédits de paiements de l’ensemble des programmes gérés par le ministère.

PART DANS LE BUDGET DE L’AGRICULTURE DES DIFFÉRENTS
PROGRAMMES RELEVANT DU MAP

(répartition des crédits de paiement pour 2007)

Les crédits du programme 206 progressent donc plus que les autres, ce que confirme le tableau ci-dessous. Les crédits de la mission Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales n’augmentent en effet que très faiblement, à hauteur de 0,8 % en euros courants, ce qui signifie en réalité une baisse en euros constants, compte tenu de l’inflation. Quant à la dotation du programme « Enseignement technique agricole », en légère progression l’année passée, elle connaît cette année une diminution de 0,6 %. Comme en 2006, les deux seuls programmes à progresser sont le programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » (3,5 %) et le programme « Enseignement supérieur et recherche agricoles (5,7 %). Notons que dans son ensemble, le budget de l’agriculture n’augmente que 1 %, contre 2,5 % en 2006.

BUDGET DE L’AGRICULTURE EN 2007

 

LFI 2006 en M€

PLF 2007 en M€

% Evolution
PLF 2007/LFI 2006

 

AE

AE nouv.

CP

AE

CP

AE

CP

Mission ministérielle
« Agriculture, pêche et affaires rurales »

 

Gestion durable de l’agriculture, de la pêche et du développement durable

2 365,1

1 319,3

1 457,5

1 505,8

1 489,3

14,1 %

2,2 %

Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés

1 188,3

717,0

738,4

693,8

711,0

- 3,2 %

- 3,7 %

Forêt

293,0

288,8

301,8

303,2

312,1

5,0 %

3,4 %

Soutien des politiques de l’agriculture

461,0

434,4

431,4

473,6

441,1

9,0 %

2,3 %

TOTAL

4 307,3

2 759,5

2 929,1

2 976,4

2 953,6

7,9 %

0,8 %

Mission interministérielle
« Enseignement scolaire »

 

Enseignement technique agricole

1 287,9

1 285,4

1 288,2

1 585,6*

1 280,1

23,4 %

- 0,6 %

* La dotation 2007 de l’enseignement technique comprend 305 M€ d’AE de régularisation comptable pour couvrir l’année scolaire 2007/2008. Ces crédits ne doivent pas être considérés comme des moyens nouveaux.

 

Mission interministérielle
« Recherche et enseignement supérieur »

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

260,0

260,0

261,7

273,2

276,6

5,1 %

5,7 %

Mission interministérielle
« Sécurité sanitaire »

 

Sécurité et qualité sanitaire de l’alimentation

835,8

482,1

536,8

502,6

555,5

4,2 %

3,5 %

TOTAL

6 691,0

4 787,0

5 015,9

5 337,7

5 065,8

11,5 %

1,0 %

Source : Ministère de l’agriculture et de la pêche.

Si, visuellement, la composition du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » reste sensiblement la même que l’année dernière, avec une prédominance de l’action 06 « Mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation » (46,3 % des crédits de paiement du programme), suivie de l’action 02 « Lutte contre les maladies animales et protection des animaux » (19,6 %) et de l’action 05 « Elimination des farines et des coproduits animaux » (17,2 %), les lignes de partage se sont néanmoins déplacées.

COMPOSITION DU PROGRAMME SÉCURITÉ
ET QUALITÉ SANITAIRES DE L’ALIMENTATION

(crédits de paiement par action pour 2007)

Rappelons à cet égard que dans le projet de loi de finances pour 2006, les crédits de paiement du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » étaient en hausse de 7 % et que la plupart des actions du programme bénéficiaient de hausses de plus de 10 % (20), à l’exception notable de la dotation de l’action 02 « Lutte contre les maladies animales et protection des animaux » qui régressait de 4,22 % et de l’action 04 « Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires » qui ne progressait que de manière limitée, comparée aux autres actions du programme (3,23 %).

PRESENTATION ET EVOLUTION PAR ACTION
DES CREDITS DE PAIEMENT DU PROGRAMME
« Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation »

 

Numéro et intitulé de l’action

Crédits de paiement
LFI 2006

Crédits de paiement
PLF 2007

Evolution

01

Prévention et gestion des risques inhérents à la production végétale

17 417 197

16 077 196

-7,69%

02

Lutte contre les maladies animales et protection des animaux

99 258 020

108 885 520

9,70%

03

Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires

19 534 476

26 934 476

37,88%

04

Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires

46 979 049

51 219 566

9,03%

05

Élimination des farines et des coproduits animaux

98 473 300

95 473 300

-3,05%

06

Mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaire de l’alimentation

255 143 045

256 902 112

0,69%

07

Mise en œuvre des politiques pour le compte du ministère de l’écologie et du développement durable

___

___

___

 

Totaux

536 805 087

555 492 171

3,48%

Source : Projet annuel de performance, PLF 2007.

Or, cette année, la tendance semble s’être totalement inversée, dans la mesure où l’action 02 progresse de 9,7 % et l’action 04 de plus de 9 %. En réalité, votre rapporteur considère, s’agissant de la hausse des crédits de l’action 02, qu’elle ne constitue qu’un rattrapage lié au sous-dimensionnement de la dotation de cette action en 2006 (voir supra) et signale que l’augmentation des crédits de l’action 04 ne correspond à aucune mesure nouvelle, comme nous le verrons plus loin.

Les évolutions les plus notables concernent l’action 03 « Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires » dont les crédits progressent de près de 38 % et qui gagne ainsi plus d’un point dans la répartition du programme 206, passant de 3,6 % à 4,8 %. En sens inverse, l’action 01 connaît une chute de près de 7,7 % et sa part dans le programme descend sous la barre des 3 %.

Enfin, les crédits de l’action 05 diminuent également de l’ordre de 3 %, ce qui ne semble pas raisonnable, comme nous verrons plus loin, étant donné les prévisions sur l’évolution du service public de l’équarrissage et les « leçons » que l’on peut tirer des gestions précédentes. Quant à l’action 06, elle ne progresse que de 0,69 %, ce qui en réalité constitue une régression : elle représentait l’année dernière 47,4 % des crédits du programme contre 46,3 % seulement cette année. Voilà qui ne va pas contribuer au renforcement des directions départementales des services vétérinaires en 2007, déjà largement amputées de leur budget en 2006.

Dans un premier temps, il semble malaisé de se faire une opinion sur les crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » pour 2007. Au niveau des agrégats et de l’architecture globale, ainsi que de certaines actions – telle la politique de surveillance des denrées alimentaires – celui-ci s’inscrit bien dans la continuité de la loi de finances pour 2006. On peut par ailleurs se féliciter de la hausse des crédits des actions les moins bien dotées l’année dernière et qui ont nécessité des ouvertures de crédits en cours d’année, signe que des leçons ont été tirées. Néanmoins, on constate également que ces hausses vont de pair avec des baisses ponctuelles de crédits et des sous-dotations sur d’autres actions. Enfin, lorsque l’on étudie précisément la situation de deux postes de dépenses majeurs – l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments et le service public de l’équarrissage – et que l’on s’aperçoit qu’en fin de législature, la situation s’est dégradée ou n’a pas reçu de règlement approprié et qu’aucune politique propre à assurer l’avenir n’a été mise en œuvre, on ne peut finalement que s’alarmer de l’état actuel de ce programme.

II.— ENTRE PRIORITÉS AFFIRMÉES ET ACTIONS NON FINANCÉES, UNE GESTION DE LA SECURITÉ SANITAIRE A COURTE VUE

En augmentation de plus de 13 % dans le projet de loi de finances pour 2006, les crédits de l’action 03 font de nouveau un bond spectaculaire en bénéficiant d’une hausse de près de 38 % pour 2007. De même que l’année passée, cette revalorisation devrait concerner principalement la lutte contre les salmonelles sous l’effet du renforcement progressif de la réglementation communautaire en la matière.

Rappelons à cet égard que le règlement (CE) n° 2160/2003 du Parlement européen et du Conseil du 17 novembre 2003 sur le contrôle des salmonelles et d'autres agents zoonotiques spécifiques présents dans la chaîne alimentaire a rendu obligatoire la mise en œuvre d’actions de prophylaxie dans les élevages afin de répondre aux objectifs communautaires de réduction des salmonelles dans les populations animales. La Commission européenne fixe ces objectifs, en consultation avec les États membres et, après une période transitoire, sur la base d'une analyse coûts/avantages. Définis de manière progressive dans le temps (entre décembre 2004 et décembre 2008) et en fonction de chaque production concernée (d’abord les cheptels reproducteurs de Gallus gallus, puis les poules pondeuses, les poulets de chair, les dindes, les troupeaux de porcs de boucherie et les troupeaux reproducteurs de porcins), les objectifs communautaires doivent s’appliquer dans les Etats membres 18 mois après leur définition par Bruxelles. Pour les réaliser, les États membres établissent des programmes nationaux de contrôle d'une durée de trois ans pour chacune des zoonoses à contrôler ; ils définissent les mesures à mettre en œuvre et soumettent leurs programmes nationaux à la Commission qui doit les valider.

Les crédits en faveur de la lutte contre les salmonelles en élevage passent ainsi de 600 000 euros en crédits de paiement dans le PLF 2006 à 824 182 euros dans le PLF 2007. Et les crédits finançant le dispositif d’indemnisation des éleveurs de poules pondeuses dont les troupeaux font l’objet d’un abattage sanitaire sur ordre de l’administration suite à la mise en évidence de salmonelles passent de 9,5 à 10,25 millions d’euros en crédits de paiement entre 2006 et 2007.

Ainsi, les augmentations de crédits sur l’action 03 sont-elles inéluctables pour se mettre en conformité avec la réglementation communautaire. À cet égard, il convient de signaler que la mise en œuvre du « Paquet hygiène » imposera également un certain nombre de mises à niveau de notre système d’inspections et de contrôles. Un nouveau poste de dépenses relatif au contrôle de la présence de la trichine du porc dans les carcasses d’animaux est ainsi créé cette année au sein de l’action 01 en application du règlement (CE) n° 2075/2005 de la Commission du 5 décembre 2005 fixant les règles spécifiques applicables aux contrôles officiels concernant la présence de Trichinella dans les viandes (21). Les crédits consacrés aux inspections sanitaires dans les abattoirs et les criées sont ainsi quasiment multipliés par trois, passant de 3,5 millions d’euros en crédits de paiement dans le PLF 2006 à 9,3 millions d’euros dans le PLF 2007. Des visites sanitaires dans les élevages porcins (80 000 élevages) doivent en effet être mises en place à partir de 2007 afin de procéder à des tests systématiques. La France prévoit toutefois d’élaborer un dispositif alternatif moins coûteux basé sur une qualification des élevages et permettant de réserver les actions de dépistage aux seuls animaux à risque (porcins élevés en plein air notamment). 5,1 millions d’euros en crédits de paiement devraient néanmoins être affectés à ces nouvelles actions de prévention en 2007. Enfin, on notera que le PAP 2007 identifie désormais un poste de dépenses jusque-là globalement intégré dans la sous-action relative à l’inspection sanitaire des abattoirs et des criées, correspondant aux frais de blanchissage des DDSV et dont le montant est loin d’être négligeable : 900 000 euros en CP pour 2007.

La hausse des crédits de l’action 02 est directement liée aux sous-estimations dont avaient fait l’objet certains postes de dépenses en 2006 et sur lesquels des besoins plus importants se sont fait jour en cours d’année : il s’agit principalement des mesures de surveillance de la tremblante ovine et caprine, d’une part, et de l’influenza aviaire, d’autre part (voir supra).

Ainsi, bien que les crédits consacrés à la lutte contre les EST (encéphalopathies spongiformes transmissibles) continuent globalement de diminuer en raison de la réduction des moyens affectés à la surveillance de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) rendue possible grâce aux progrès réalisés en la matière (22), ceux affectés à la surveillance de la tremblante ovine et caprine bénéficient d’une hausse (23) résultant notamment de la généralisation des tests de dépistage en équarrissage et à l’abattoir sur les ovins et caprins de plus de 18 mois. Rappelons que ce plan, décidé à la fin de l’année 2005, a fait l’objet en 2006 d’un financement par décret d’avance à hauteur de 30 millions d’euros. Pour 2007, 9,5 millions d’euros sont prévus dans le projet de loi de finances pour mettre en œuvre les actions de surveillance et de dépistage de cette maladie. S’y ajoutent par ailleurs le financement de tests sur les cervidés en élevage et sauvages correspondant à un programme de dépistage communautaire réalisé pour une durée initiale d’un an à partir de 2007 (141 300 euros en AE et en CP).

Toutefois, l’augmentation des crédits de l’action 02 reste essentiellement imputable à la très forte majoration des moyens consacrés aux actions de prévention et de lutte contre l’influenza aviaire, qui avaient été largement sous-estimés dans le précédent budget. Ceux-ci atteignent en effet cette année 10 millions d’euros en crédits de paiement, contre à peine plus de 1 million d’euros inscrits dans le projet de loi de finances pour 2006, auxquels il convient néanmoins d’ajouter les 16 millions d’euros ouverts par décret d’avance en cours d’année.

Le projet annuel de performances (PAP) rattaché au programme 206 a par ailleurs été modifié pour donner une présentation plus claire et plus étoffée des prévisions de dépenses liées à la gestion de l’influenza aviaire. Celles-ci sont désormais reportées dans les « plans d’urgence contre les épizooties » et réparties sur de nouveaux postes budgétaires détaillés ci-dessous. Notons que dans le PAP du PLF 2006, étaient uniquement prévus un dispositif de surveillance (474 470 euros en CP), des frais d’abattage d’animaux infectés correspondant à la destruction de 2 foyers de maladie – dispositif qui a curieusement disparu cette année – (350 000 euros en CP) et la mise en œuvre d’un plan d’euthanasie des volailles en cas d’épizootie se déclarant sur le territoire national (250 000 euros en CP).

PLANS D’URGENCE CONTRE LES ÉPIZOOTIES

LUTTE CONTRE L’INFLUENZA AVIAIRE – PLF 2007

(en euros)

 

AE

CP

Surveillance de l’influenza aviaire sur l’avifaune sauvage (analyses, enquêtes vétérinaires)

316 000

316 000

Enquêtes sérologiques-virologiques Influenza aviaire dans les élevages

410 590

410 590

Alertes 100 suspicions

60 000

60 000

Protocole d’évaluation de la contamination et de la dissémination de l’influenza au sein des élevages

550 000

550 000

Mise en oeuvre d’un plan d’euthanasie des volailles dans le cadre de la lutte contre l’influenza aviaire (marché pluriannuel notifié en 2005)

258 480

258 480

Formation de 1 000 vétérinaires sanitaires au diagnostic et à la mise en œuvre des mesures d’urgence vis-à-vis de l’influenza aviaire

300 000

300 000

Visites sanitaires dans les élevages de volailles au titre de l’influenza aviaire

9 221 895

7 221 895

Vaccination des volailles et suivi post vaccination

981 676

981 676

Source : Projet annuel de performances, PLF 2007.

S’agissant des progrès de la maladie, signalons que selon un avis de l’AFSSA publié le 5 octobre 2006, le risque d’introduction en France du virus H5N1 hautement pathogène par les oiseaux migrateurs est aujourd’hui négligeable. L’Agence rappelle néanmoins que l’apparition du virus sur notre territoire peut avoir d’autre origine qu’une introduction par la faune sauvage et qu’il est donc « difficile de prévoir a priori la totalité des situations épidémiologiques pouvant constituer une menace dans le cadre de l’actuelle panzootie d’influenzia aviaire ». Aucune volaille n’a été infectée par le virus en Europe depuis le mois de juin 2006 où sa présence avait été confirmé en Hongrie et en Roumanie (24).

En ce qui concerne les autres évolutions internes de l’action 02, il convient également de signaler :

– le doublement des moyens consacrés à l’identification des animaux, en raison de la mise en place d’une base de données ovine et caprine (gestion des mouvements, conception de système de traçabilité, réseau de formateurs) pour un montant de 2,5 millions d’euros ;

– l’augmentation des transferts aux collectivités territoriales : la subvention accordée par l’État aux établissements départementaux de l’élevage (EDE) pour l’identification des animaux passe ainsi de 40 000 à 499 800 euros en autorisations d’engagement en vue du recensement et de l’immatriculation des élevages avicoles et de leurs bâtiments.

Enfin, on remarquera que la gestion des maladies hors EST bénéficie également d’une hausse de ses moyens en crédits de paiement, ceux-ci demeurant toutefois stables en autorisations d’engagement. À cet égard, en dépit de l’impossibilité d’analyser l’évolution exacte des crédits de paiement – qui n’étaient pas retracés dans le PAP 2006, on constate qu’en autorisations d’engagement, les crédits affectés à la lutte contre la fièvre catarrhale sont identiques à ceux de l’année dernière s’agissant de la surveillance de la maladie (1,45 million d’euros) et en régression s’agissant des indemnités susceptibles d’être versées aux éleveurs dont les animaux sont abattus (27 300 euros contre 45 500 euros en 2006)  (25). On ne peut que s’étonner de ce choix budgétaire au moment où la Commission européenne a décidé d’étendre les zones de surveillance de la maladie en France et en Allemagne. Rappelons à cet égard que depuis la fin de l’été, 5 foyers de fièvre catarrhale ont été détectés dans le nord de la France, suite à l’apparition de la maladie en Belgique (109 foyers), en Allemagne (100) et aux Pays-Bas (76). Des zones de sécurité, assorties de restriction, voire d’interdiction de transporter des ruminants, ont été mises en place dans 16 départements, entraînant par ailleurs des protestations des professionnels de l’élevage (26) estimant que ces précautions étaient disproportionnées et empêchaient la poursuite de toute activité normale (problèmes pour l’envoi des animaux à l’abattage et pour la commercialisation des produits). L’absence de toute revalorisation de crédits sur ce poste est d’autant plus surprenante que l’apparition de cette maladie au nord de l’Europe impose la prudence : non seulement cela n’était jamais arrivé jusqu’alors mais, en dépit des prévisions des scientifiques qui pronostiquaient un repli de la maladie avec les premières baisses de température, celui-ci ne s’est pas produit. La Direction générale de l’alimentation du ministère de l’agriculture estime cependant que les actions en cours et à venir devraient « passer sous le volant de sécurité » dont celle-ci dispose pour gérer les crises sanitaires.

L’action 06, qui constitue la fonction support du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », regroupe essentiellement les crédits de personnel et de fonctionnement des directions départementales des services vétérinaires (DDSV). Rappelons à cet égard que les services régionaux de la protection des végétaux (SRPV) intégrés au sein des directions régionales et départementales de l’agriculture et de la forêt et les services centraux de la Direction générale de l’alimentation (DGAL) relèvent d’autres programmes gérés par le ministère de l’agriculture.

Les DDSV, qui comptabilisent 5 159 ETPT en 2006 (4 045 personnels titulaires et 1 114 agents contractuels) ne verront en 2007 leurs moyens revaloriser qu’à hauteur de 0,69 %. Alors que les loyers et charges locatives augmentent de près de 40 %, les dépenses de fonctionnement courant diminuent globalement de 2,88 % par rapport à 2006 où elles subissaient déjà une baisse de 3,4 %. Enfin s’agissant des seules dépenses de personnel (titre 2), la hausse des crédits est inférieure à 0,5 %.

Comme indiqué précédemment, la Direction générale de l’alimentation considère que l’entrée en vigueur du « Paquet hygiène » n’aura qu’une incidence négligeable en termes budgétaires sur l’administration française. Selon elle, la réglementation communautaire n’imposerait qu’une adaptation des méthodes de ses services aux nouvelles modalités de contrôle prévues par Bruxelles – ce qui n’implique pourtant pas nécessairement que celle-ci se fasse à moyens constants (27).

Ainsi, l’axe principal de cette adaptation reste la mise sous assurance qualité des 122 services déconcentrés de la DGAL, par l’obtention d’une accréditation COFRAC destinée à faire reconnaître hors de nos frontières la fiabilité des contrôles opérés par les services régionaux de la protection des végétaux (SRPV) et les directions départementales des services vétérinaires (DDSV), notamment lors de leurs interventions dans le cadre de nos postes d’inspection frontaliers (PIF). Cette procédure fait d’ailleurs l’objet d’un indicateur spécifique au sein de l’objectif 5 du programme (« S’assurer de la fiabilité des systèmes d’inspection dans le cadre d’une organisation efficiente ») visant à mesurer le taux de services déconcentrés de la DGAL ayant été soumis à une évaluation favorable au titre de la norme EN 17020 relative aux organismes d’inspection. Fin 2008, 100 % des services devront avoir ainsi été accrédités (28) pour un coût total de 226 millions d’euros. À cette somme, s’ajoutent également des programmes de formation des agents, un certain nombre d’audits internes, ainsi qu’une mise à jour des réseaux informatiques afin de les rendre compatibles avec les systèmes d’information mis en place au niveau communautaire.

Il n’en demeure pas moins qu’avec une hausse de crédits inférieure à l’inflation, les services vétérinaires supportent l’essentiel de la rigueur budgétaire appliquée au programme 206 pour 2007, alors même que sur l’exercice 2006, elles ont été l’objet de mesures de régulation budgétaire déjà fortement pénalisantes (voir supra).

D’un strict point de vue comptable, l’action 01 se trouve cette année dans la même configuration que l’action 06. Rappelons tout d’abord qu’après avoir connu une hausse de près de 11 % en crédits paiement dans le PLF 2006, la politique de protection des végétaux subit dans le PLF 2007 une diminution de ses moyens de l’ordre de 7,7 %. Toutefois, cette baisse est essentiellement due à un effet d’optique. Pour des raisons de présentation et de clarté budgétaires, il a en effet été décidé de transférer l’ensemble des dépenses de fonctionnement liées à l’activité courante des services régionaux de la protection des végétaux (SRPV) aux programmes 215 et 154 de la mission Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales, au sein desquels sont déjà inscrits les moyens en personnel des SRPV. D’après la DGAL, ces sommes représentent 1,34 million d’euros, ce qui ramène la dotation de l’action 01 au niveau exact qui était le sien l’année dernière et la place donc à peu près dans la même situation que l’action 06.

On signalera néanmoins que les évolutions au sein de cette action sont un peu plus complexes qu’il n’y paraît dans la mesure où les dépenses d’intervention qu’elle comptabilise (indemnisation des producteurs en cas de contamination impliquant notamment des campagnes d’arrachage) diminuent elles aussi fortement, passant de 2,73 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2006 à 1 million d’euros dans l’actuel PLF. Cette diminution s’explique vraisemblablement par la régression du nombre de foyers de contamination et la volonté du ministère de l’agriculture et de la pêche, conforme à l’esprit du « Paquet hygiène », de privilégier les actions de prévention et de responsabilisation des professionnels. Dans le même ordre d’idée, on notera également la baisse de plus de 70 % des crédits consacrés au traitement des foyers parasitaires, qui passent ainsi de 1,5 million d’euros dans le PLF 2006 à 400 000 euros dans le PLF 2007, somme correspondant au traitement de 4 000 hectares de foyers de chrysomèles du maïs (contre 15 000 hectares en 2006). À cet égard, le projet annuel de performances (PAP) rappelle que les obligations prévues dans le cadre de l’arrêté national de lutte contre les chrysomèles des racines du maïs du 2 février 2006 privilégient désormais la prévention, notamment via la rotation des cultures, afin de diminuer le nombre de foyers et les traitements afférents. A contrario, parmi les postes de dépenses qui bénéficient de revalorisations, citons les actions de surveillance du territoire, qui passent notamment par la mise en œuvre de plans de surveillance des nuisibles comme la sharka ou la chrysomèle (+ 47 % en crédits de paiement en 2007). Il est ainsi démontré que les évolutions internes à l’action 01 suivent une certaine logique, même si votre rapporteur n’est pas totalement convaincu du bien-fondé de la diminution des crédits consacrés à la lutte et à la destruction des foyers parasitaires et du passage au « tout préventif ».

Enfin, s’agissant des crédits affectés aux services régionaux de la protection des plantes (SRPV), dont on rappellera qu’ils sont retracés au sein de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », leur évolution est semblable à celle des DDSV, puisque l’on constate au sein de cette mission une diminution globale des moyens de personnel et de fonctionnement pour 2007 qui, d’après les calculs du ministère, devrait se traduire sur la quote-part ventilée sur le programme de 206 par une baisse de crédits de l’ordre de 3,4 millions d’euros pour les SRPV.

Comme indiqué précédemment, le taux de gel de 4,5 % appliqué par le ministère de l’agriculture en 2006 a eu des répercussions sur l’ensemble des actions du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », y compris sur la subvention pour charges de service public de l’AFSSA, et alors même que celle-ci contribue en grande partie à financer les 994 ETPT de l’Agence (29). En dépit des efforts opérés pour limiter l’impact de cette mise en réserve sur la dotation de l’établissement public en la répercutant à la hausse sur d’autres actions du programme, celle-ci a néanmoins concerné 2 % des crédits, amputant les moyens de l’Agence de près 830 000 euros. Or, d’après les indications fournies l’année dernière à votre rapporteur par l’AFSSA, il manquait déjà pas moins de 400 000 euros dans le projet de loi de finances pour 2006 pour assurer un financement correct à l’Agence (30).

Les conséquences de la régulation budgétaire ont été immédiatement perceptibles : alors que la capacité d’autofinancement de l’AFSSA était estimée à 1 million d’euros pour 2006, après application du gel, elle s’est retrouvée quasi-nulle.

L’élargissement des missions de l’AFSSA

à l’évaluation des produits phytosanitaires

En application de l’article 70 de la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d’orientation agricole, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments est désormais « chargée de l’évaluation des produits phytopharmaceutiques, des adjuvants, des matières fertilisantes et des supports de culture » (article L. 1323-1 du code de la santé publique), dans le cadre de la procédure d’autorisation de mise sur le marché (AMM) de ces produits qui continue cependant de relever de la compétence du ministre chargé de l’agriculture.

Aux termes de l’article R. 253-3 du code rural, les avis formulés par l'AFSSA comprendront :

1° L'évaluation des risques que l'utilisation des produits peut présenter pour l'homme, l'animal ou l'environnement ;

2° L'évaluation de leur efficacité et de l'absence d'effets inacceptables sur les végétaux et produits végétaux ainsi que celle de leurs autres bénéfices éventuels ;

3° Une synthèse de ces évaluations assortie de recommandations portant notamment sur leurs conditions d'emploi.

Ce transfert de compétences de la ComTox* (instance relevant du ministère de l’agriculture) à l’AFSSA permettra d’appliquer pleinement au secteur des produits phytosanitaires le principe de séparation de l’évaluation et de la gestion du risque qui prévaut dans notre système de sécurité sanitaire. Rappelons à cet égard que l’exposé des motifs du projet de loi d’orientation agricole soulignait « la difficulté croissante pour le ministère de l’agriculture d’exercer ses prérogatives en intégrant l’approche nécessaire bénéfice/risque dans le domaine des intrants sans s’exposer à une suspicion de privilégier les intérêts socio-économiques au détriment de la santé publique ». Le manque de moyens de la ComTox pour mener à bien son expertise face à un nombre de demandes exponentiel n’est sans doute pas non plus étranger aux critiques dont l’ancien système a pu faire l’objet.

Pour remplir sa nouvelle mission, l’Agence française de sécurité sanitaire bénéficiera quant à elle du produit d’une taxe fiscale affectée, créée par l’article 52 du projet de loi de finances pour 2007 (plus précisément 86,5 % du produit de cette taxe). Cette taxe sera due par le demandeur et versée dans son intégralité lors du dépôt de la demande (d’inscription d’une nouvelle substance active sur la liste communautaire, d’AMM, de renouvellement d’AMM, d’homologation, d’autorisation de distribution pour expérimentation etc.). Le tarif de la taxe, fixé par arrêté, doit tenir compte de la nature de la demande et de la complexité de l’évaluation mais est encadré au niveau législatif (entre 4500 et 100 000 euros). Le produit de la taxe est évalué à 7,4 millions d’euros pour 2007. Par ailleurs, d’après le projet annuel de performances, 3,2 millions d’euros devraient être versés à l’Agence au cours du 2nd semestre 2006 afin de lui permettre de financer les 90 ETPT nécessaires dans le cadre de ses nouvelles compétences, transférées à compter de juillet 2006. Enfin, le décret n° 2006-1177 du 22 septembre 2006 a prévu que les biens meubles affectés jusqu’alors à l'évaluation des produits phytopharmaceutiques, de leurs adjuvants, des matières fertilisantes et des supports de culture étaient désormais dévolus à l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments.

L’AFSSA estime à cet égard que les conditions sont réunies pour lui permettre d’accomplir sa mission. Toutefois il n’est pas exclu que certaines difficultés apparaissent dans le traitement du stock des demandes d’autorisation de mise sur le marché. La gestion de ce stock a fait l’objet d’une convention tripartite Etat/AFSSA/professionnels prévoyant l’étalement sur trois ans maximum de l’apurement par l’Agence de ces dossiers. 5 millions d’euros annuels devraient être consacrés à cette tâche dont la directrice générale de l’AFSSA espère néanmoins qu’elle pourrait s’avérer moins lourde que prévu si certains industriels avaient l’heur de ne pas maintenir certaines demandes anciennes pouvant être considérées comme obsolètes au regard des progrès de la recherche dans ce domaine. Notons toutefois que si le décret du 22 septembre 2006 a fixé entre cinq et dix mois les délais laissés à l’Agence pour rendre son avis au ministre (article R. 253-3 du code rural), pour les demandes enregistrées avant le 31 décembre 2008, ceux-ci sont portés à quinze ou trente mois.

Enfin, s’agissant des modalités selon lesquelles l’AFSSA sera amenée à remplir ses nouvelles missions en lien avec le ministère de l’agriculture et de la pêche, il convient de rappeler que si les Parlementaires de tous bords ont apporté leur soutien au renforcement de la procédure d’évaluation et de contrôle des produits phytosanitaires, l’objectif recherché visait avant tout à mieux encadrer les conditions de mise sur le marché de produits chimiques potentiellement dangereux pour la santé. Il est à cet égard regrettable qu’une polémique se soit fait jour sur l’utilisation de produits naturels – tel le purin d’ortie – dans le traitement des plantes, suite à une inspection conjointe des services de la protection des végétaux et des fraudes chez un paysagiste de l’Ain pratiquant et diffusant des méthodes de lutte biologique. Il n’était sûrement pas dans l’intention du législateur de soumettre ce type de produits aux mêmes contraintes législatives et réglementaires que les produits chimiques, alors que par ailleurs, au niveau communautaire, un groupe de travail a été mis en place afin d’élaborer un cadre permettant l’homologation des produits traditionnels de protection des plantes.

* Commission d’étude de la toxicité des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés, des matières fertilisantes et des supports de culture.

L’action 04 « Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires » est constituée à près de 96 % de la subvention pour charges de service public de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments. Mathématiquement, celle-ci augmente cette année de 6,52 millions d’euros, ce qui correspond à une hausse de plus de 15 %. Toutefois, comme l’a démontré à votre rapporteur le secrétaire général de l’AFSSA (31), cette augmentation de moyens relève essentiellement d’un effet d’optique et ne permet en réalité le financement d’aucune mesure nouvelle.

La hausse des crédits résulte en effet en premier lieu de l’intégration dans la masse salariale de l’Agence de personnels mis à disposition par le ministère de l’agriculture et de la pêche (MAP). Ce transfert de charges permet de régulariser la situation d’agents dont certains étaient mis à disposition depuis la création de l’AFSSA, sans changement de situation ni de statut pour ces derniers. Effective depuis le 1er juillet 2006, cette opération se monte en année pleine à 3,72 millions d’euros : elle absorbe donc plus de la moitié de l’augmentation de la subvention pour charges de service public qui sera versée par le MAP en 2007.

Ensuite il faut noter que cette subvention connaît un changement de périmètre puisqu’elle intègre désormais le financement de trois laboratoires nationaux de référence (LNR) de l’AFSSA pour leurs travaux sur les encéphalopathies spongiformes transmissibles (laboratoire d’études et de recherches en pathologie bovine et hygiène des viandes de Lyon), la rage (laboratoire d’études et de recherches sur la rage et la pathologie des animaux sauvages de Nancy) et l’antibiorésistance (laboratoire d’études et de recherches sur les médicaments vétérinaires et les désinfectants de Fougères). Les activités de ces laboratoires faisaient en effet jusqu’à présent l’objet de conventions avec l’État, conventions retracées dans les dépenses de fonctionnement de l’action 04 (appui scientifique et technique à la gestion des risques – maintien de la fiabilité des réseaux de laboratoires d’analyse officielle). Le transfert au sein du budget de l’AFSSA des moyens relatifs à ces activités pérennes de recherche, financées depuis plus de 10 ans par voie de conventions, permettra de mettre fin à la situation précaire de 22 agents. On ne peut toutefois considérer les 1,1 million d’euros représentés par ce transfert comme des moyens nouveaux pour l’Agence.

Enfin, le reste de la hausse de la subvention pour charges de service public de l’AFSSA – soit 1,7 million d’euros – correspond à l’évolution normale des traitements (GVT – glissement vieillesse technicité) et la prise en compte de l’augmentation des taux de pension de l’Etat pour les agents titulaires, qui constituaient un réel problème budgétaire pour l’Agence jusque-là non financé par l’Etat.

Il n’en demeure pas moins que la totalité de la hausse de la subvention du ministère de l’agriculture et de la pêche à l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments pour 2007 est entièrement absorbée par des transferts ou des augmentations de charges inéluctables et que les moyens accordés à l’AFSSA pour 2007 se situent en réalité exactement au même niveau que l’année dernière.

FINANCEMENT DE L’AFSSA par L’ETAT

(en milliers d’euros)

Action intéressée
ou nature de la dépense

Exécution 2005

LFI 2006

PLF 2007

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action n° 04 : Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires

dont transferts (personnel mis à disposition ou financé par conventions avec l’État) et prise en compte du GVT et de la revalorisation des taux de pension

1 450

30 206

42 575

42 575*

49 096

49 096

         

6520

Subventions pour charges de service public

1 450

30 206

0

0

49 096

49 096

Ex-BCRD

2 818

8 992

0

0

0

0

Subventions pour charges de service public

2 818

8 992

0

0

0

0

Consommation

0

3 772

0

0

0

0

Subventions pour charges de service public

0

3 772

0

0

0

0

Programme n° 206 : sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

4 268

42 970

42 575

42 575

49 096

49 096

Programme n° 228 : veille et sécurité sanitaires

0

5 861

6 012

6 012

6 658

6 658

* Ne sont pas pris en compte dans ce chiffrage :

– les 828 775 euros de gel appliqués à cette dotation ;

– le versement complémentaire prévu en 2006 correspondant au report de crédits d’investissements 2005 sur 2006 ;

– le versement de subventions complémentaires, correspondant au transfert des mises à dispositions du MAP à hauteur d’une demi-année (soit 26 ETPT) à l’AFSSA et au transfert de l’évaluation des intrants pour le végétal en juillet 2006.

Source : Projet annuel de performances, PLF 2007.

D’après les calculs du secrétaire général de l’AFSSA, si l’ensemble des mesures nouvelles et de l’augmentation des dépenses de fonctionnement inévitables de l’Agence avaient été financées par le ministère de l’agriculture et de la pêche, la dotation versée par ce dernier pour 2007 aurait dû augmenter non pas de 6,5 millions d’euros mais de 9,5 millions d’euros. La stagnation de la dotation du ministère revient à demander à l’établissement public de produire un effort à hauteur de 3 millions d’euros, ce que ni ses finances ni sa structure ne lui permettent.

EVOLUTION DES DÉPENSES/RECETTES DE FONCTIONNEMENT DE L’AFSSA

(en milliers d’euros)

Mesures à financer en K euros

MAP

MSS(1)

DGCCRF

GAGE AFSSA

Insuffisance

 

– 304

– 46

– 30

   

Décret / contractuels sur emplois

– 306

– 186

– 108

   

2 emplois PHISP 2002

 

– 140

     

Consolidation 10 emplois hors LFI 02

– 228

– 171

– 171

   

Repyramidage chercheurs 2003

– 132

       

Création 12 emplois 2003

– 388

– 46

– 46

   

Création 5 emplois hors LFI 03

 

– 285

     

Fct associé / 12 créations LF

– 80

– 8

– 8

   

Fct associé / 5 créations hors LF

 

– 40

     

Loyer du siège

– 600

– 600

– 600

   

TOTAL (inverse augmentations attendues)

– 2038

– 1522

– 963

   

Augmentations subventions Etat 03

1024

0

0

   

Solde : augmentat° dépenses – augmentat° subvention

– 1014

– 1522

– 963

 

– 3499

GVT 2004

– 304

– 46

– 30

   

Augmentation 0,5% du point d’indice FP

– 152

– 23

– 15

   

Repyramidage chercheurs 2004

– 140

       

Revalorisation PPR

     

81

 

Repyramidage AFSS corps F et R 2004

     

140

 

Prime exceptionnelle contractuels / non pérenne

     

834

 

TOTAL (inverse augmentations attendues)

– 1610

– 1591

– 1008

   

Augmentations subventions Etat 04

708

1582

651

   

Solde : augmentat° dépenses – augmentat° subvention

– 902

– 9

– 357

 

– 1268

GVT 2005

– 304

– 46

– 30

   

Augmentation 1% point d’indice FP

– 304

– 46

– 30

   

Repyramidage statutaire F et R

– 98

– 15

– 10

   

Repyramidage AFSSA corps F et R 2005

     

93

 

Part patronale complémentaire retraite titulaires

     

80

 

Transfert 2 TFR mis à disposition

– 74

       

TOTAL (inverse augmentations attendues)

– 1682

– 116

– 427

   

Augmentations subventions Etat 05

50

28

0

   

Solde : augmentat° dépenses – augmentat° subvention

– 1632

– 88

– 427

 

– 2147

GVT 2006

– 365

– 56

– 37

   

Augmentation 1,8% du point d’indice

– 547

– 84

– 56

   

Régime indemnitaire (décret et arrêté du 26/11/2004)

     

300

 

Création 1 emploi ORP

 

– 60

     

TOTAL (inverse augmentation attendue PLF 06)

– 2544

– 288

– 520

 

– 3352

Augmentation subventions Etat 06

– 395

122

0

   

Intégration agents agriculture ex mis à disposition

– 3720

       

GVT 2007 + augmentation taux de pension Etat

– 1700

– 171,5

     

Intégration 22 agents conventions DGAI

– 1100

       

Contribution étude alimentation totale

 

– 200

     

LNR eau (1 emploi + 200 K€ invest)

 

– 280

     

TOTAL (inverse augmentation attendue PLF 07)

– 9459

– 817,5

     

Augmentation subventions Etat 07

6520

645

     

Source : AFSSA, document remis lors de l’audition du 18 octobre 2006.

(1) Ministère de la santé et des solidarités.

Déjà dans son avis 2006 sur les crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », votre rapporteur avait souhaité attirer l’attention sur la situation financière délicate dans laquelle se trouvait l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments. Soulignant que celle-ci avait épuisé ses marges de manœuvre, il indiquait qu’elle se trouvait à la fois dans l’impossibilité de redéployer des ressources pour financer l’augmentation structurelle de la masse salariale et de dégager un résultat annuel positif permettant de reconstituer son fonds de roulement. Il a été rejoint dans ses craintes par le conseil d’administration de l’AFSSA qui en 2006, pour la première fois depuis la création de l’établissement public en 1998, n’a voté le budget de l’Agence qu’à une courte majorité.

Aujourd’hui où en est-on ? La subvention de l’AFSSA stagne depuis trois ans. Après avoir tenté de dégager des marges de manœuvre en interne pour retrouver une certaine capacité d’autofinancement(32), l’Agence a vu celle-ci fondre littéralement sous l’effet des mesures de régulation budgétaire imposées par la tutelle. Or, sans augmentation des dotations de l’Etat et sans capacité d’autofinancement, aucun projet d’investissement ne peut être lancé.

Les dépenses d’investissement ont toujours représenté un enjeu majeur pour l’Agence qui, pour que son expertise continue d’être reconnue, doit disposer des moyens nécessaires pour mettre à niveau ses plateaux techniques et ses infrastructures. Depuis sa création, et hormis les premières années de fonctionnement qui ont donné lieu à un audit approfondi de ses besoins, l’AFSSA a dépensé en moyenne 7,5 millions d’euros par an dans cet unique but. Si, comme l’indique le tableau ci-dessous, les années 2004-2005 constituent un pic en termes de paiements, le secrétaire général de l’AFSSA estime que 6 millions d’euros par an sont un minimum pour maintenir en état les équipements de l’AFSSA.

DÉPENSES NETTES D’INVESTISSEMENTS PAR NATURE

(en milliers d’euros)

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

Total

Moyenne

Informatique

988

809

969

2 062

1 399

1 184

7 411

1 235

Matériel scientifique

2 264

1 449

1 422

3 411

2 116

1 790

12 452

2 075

Travaux

1 967

1 611

2 597

3 078

5 864

8 959

24 076

4 013

Divers

591

331

912

349

311

658

3 152

525

Total

5 810

4 200

5 900

8 900

9 690

12 591

47 091

7 849

Source : Comptes financiers AFSSA.

Amputée de sa capacité d’autofinancement, l’Agence n’envisage pas l’avenir sereinement. En effet, l’obtention de cofinancements, notamment au niveau communautaire, dépend directement de la mise de départ. À titre d’exemple, les 24 millions d’euros consacrés au poste « travaux » par l’Agence tout au long de la période 2000-2005 ont en réalité permis de financer des travaux à hauteur de 60 millions d’euros.

S’agissant par ailleurs de l’évolution de la masse salariale de l’Agence, là encore l’AFSSA a besoin de marges de manœuvre suffisantes en termes de fonctionnement afin de pouvoir répondre aux enjeux de la sécurité sanitaire : recrutement de chercheurs de haut niveau, capacité de mobilisation des ressources en cas de crise, production de connaissances nouvelles. Or, aujourd’hui, l’AFSSA s’interroge sur ses capacités à attirer de nouveaux chercheurs. Même si leur nombre doit mécaniquement augmenter en raison de la création d’une nouvelle direction du végétal et de l’environnement compétente pour l’évaluation des produits phytosanitaires, l’Agence doit par ailleurs pouvoir développer une politique de ressources humaines forte et attractive pour contrebalancer l’attrait de la recherche fondamentale. L’évolution des financements qui lui sont accordés par ses ministères de tutelle, qui sont des ministères techniques, intéressés par la « recherche de terrain » (épidémiosurveillance, hygiène alimentaire, recherche clinique), lui fait cependant craindre que les arbitrages ne lui aient déjà été défavorables.

Cette situation est d’autant plus regrettable que lors des différents épisodes sanitaires de 2006, l’Agence a été fortement sollicitée par sa tutelle et n’a réussi à faire face que grâce à la réactivité et à la mobilisation sans faille de ses équipes. D’importants redéploiements ont eu lieu, notamment au sein du laboratoire d’études et de recherches avicoles et porcines de Ploufragan. Certains travaux de recherche ont dû être stoppés pour permettre le renforcement de six postes d’évaluation scientifique et technique sur la grippe aviaire, tous financés par le ministère de la santé. Les moyens supplémentaires débloqués à cette occasion par la tutelle l’ont cependant été à titre provisoire, puisque sur les six postes créés, cinq ont été pourvus en interne et le dernier a fait l’objet d’un contrat d’un an arrivant à échéance en juin 2007. On peut donc s’interroger sur le maintien l’année prochaine de cette activité au sein du laboratoire de Ploufragan en l’absence de personnel.

Notons enfin que le contrat d’objectifs et de moyens, promis à l’Agence depuis maintenant trois ans et qui devait aboutir en 2006, n’a toujours pas formellement été signé. Il s’agit certes d’un document lourd et complexe à élaborer, qui doit recueillir l’assentiment des trois tutelles de l’AFSSA, mais celui-ci contribuerait à réguler les relations, notamment financières, entre l’établissement public et l’Etat. D’après les indications fournies à votre rapporteur par la Direction générale de l’alimentation, le contrat devrait toutefois être finalisé d’ici la fin de l’année 2006.

Lors de la crise de l’ESB, les pouvoirs publics ont dû faire des choix et mettre en œuvre des solutions, assumées par tous les gouvernements successifs, pour faire face à l’obligation de destruction des matériaux à risque spécifié retirés de la chaîne alimentaire (33) et à l’augmentation du stock des farines animales devenues inutilisables (34). S’il serait malvenu de critiquer les options qui ont été alors retenues, dans un contexte à la fois inédit, dangereux et politiquement très sensible, il n’en demeure pas moins que la sortie du dispositif alors mis en place s’avère aujourd’hui délicate et nécessiterait un engagement plus fort des pouvoirs publics pour mettre fin à une situation juridique, économique et financière de plus en plus sujette à caution.

Le service public de l’équarrissage, créé en 1975, reposait initialement sur un « contrat » garantissant aux équarrisseurs, en contrepartie de l’obligation de collecte systématique et gratuite des animaux morts, un monopole du traitement et de la valorisation (notamment sous forme de farines) des sous-produits animaux. Ce « contrat » a de fait été rompu lorsqu’il a été décidé de mettre fin à l’utilisation des farines animales, les sous-produits animaux perdant toute valeur marchande. Le maintien de la gratuité de la collecte et l’extension des missions prises en charge par le SPE ont donc imposé à l’État de prendre financièrement en charge une part de plus en plus importante de la politique d’équarrissage.

Depuis la régression de l’épizootie, un certain nombre de réformes sont intervenues :

– pour réduire le champ du service public de l’équarrissage, tout d’abord en en excluant le traitement des déchets des abattoirs (à partir du 1er octobre 2005) puis les colonnes vertébrales de bovins produites par les boucheries (à partir du 1er janvier 2006) – les deux relevant donc désormais de contrats commerciaux (35) – pour finalement le réduire aux animaux trouvés morts (ATM) en exploitation et aux cadavres d’animaux dont l’élimination est nécessaire dans l’intérêt général et dont la liste est fixée par décret (article L. 226-1 du code rural, issu de l’article 151 de la loi de finances pour 2006) ;

– pour replacer l’exécution du SPE dans un cadre concurrentiel en organisant un marché public national à lots départementaux en lieu et place du système de réquisition fonctionnant jusqu’alors (36).

La réduction du champ du SPE a cependant eu pour effet collatéral de diminuer le produit de la taxe d’abattage et donc de maintenir un niveau élevé de subventions de l’Etat. Quant au lancement du marché public, il est encore trop tôt pour en connaître les effets mais pour l’heure le regain de concurrence est loin d’être notable : de nombreux lots ont été déclarés infructueux (37) et la structure des réponses aux offres montre que le partage du territoire entre les opérateurs sous réquisition s’est globalement maintenu, ne laissant aucune place à la concurrence étrangère et très peu en interne (38). Par ailleurs, à court terme, le lancement de ce marché public aura contribué à renchérir le coût du SPE en entraînant une hausse de 18 millions d’euros des coûts d’élimination des animaux d’élevage (39).

La Cour des comptes estime qu’entre 1996 et 2005, les dépenses publiques nécessaires pour couvrir la charge du service public d’équarrissage ont dépassé les 2,1 milliards d’euros (40).

Le SPE après 1996 a tout d’abord été financé par la taxe sur les achats de viande, faisant ainsi reposer son coût sur le consommateur (41). Toutefois, la contestation de la taxe par les professionnels de la grande distribution ayant conduit la Cour de justice des communautés européennes à qualifier le versement du produit de la taxe aux équarrisseurs d’aide d’État contraire au droit communautaire (42), celle-ci a été supprimée par la loi de finances pour 2004 qui a institué la taxe d’abattage acquittée par les abatteurs et assise pour partie sur le poids des animaux abattus et pour partie sur le poids des déchets d’abattoirs (43).

Si les réformes qui ont eu lieu ces dernières années ont permis une baisse globale du coût du service public de l’équarrissage et donc de son poids sur les finances publiques, celui-ci non seulement reste élevé, mais également mal évalué. Comme en témoigne le tableau ci-dessous, depuis 2004, le SPE nécessite chaque année des abondements complémentaires. Dans ce contexte, votre rapporteur ne peut que s’interroger sur la pertinence des informations budgétaires contenues dans le projet annuel de performances et sur la portée de l’autorisation donnée par le Parlement.

FINANCEMENT DU SERVICE PUBLIC DE L’ÉQUARRISSAGE
DEPUIS L’INSTAURATION DE L TAXE D’ABATTAGE

(en millions d’euros)

 

2004

2005

2006
(prévisions)

2007
(prévisions)

Coût du SPE

219

187

140

154

Recettes de la taxe

129

107

78

90

Contribution de l’État :

90

79

44

44

- dont loi de finances initiale

34

34

44

44

- abondements complémentaires

56

45

Autres contributions :

       

- ONIEP

 

16

16

- éleveurs de porcs

1

1

2

- éleveur de volailles

 

1

2

On soulignera néanmoins qu’en 2006, l’État n’a pas souhaité augmenter sa participation au financement du service public de l’équarrissage au-delà de ce qui était prévu dans la loi de finances, mais a reporté la charge des ajustements nécessaires – soit 16 millions d’eurossur l’Office national interprofessionnel de l’élevage et de ses productions (44). Par ailleurs, les taux de la taxe d’abattage ont été relevés par un arrêté du 17 juillet 2006 pour les bovins (45) et la participation des éleveurs de porcs, volailles, lapins et gibiers d’élevage non ruminants a été fixée à 20 euros par tonne de cadavres enlevés dans le cadre du SPE  (46).

On ne peut donc s’empêcher de s’interroger sur ce que le service public de l’équarrissage va réellement coûter l’année prochaine, et ce d’autant plus que les estimations ont été revues à la hausse : la somme désormais retenue n’est plus de 132 millions d’euros (PLF pour 2006) ou même de 140 millions d’euros (prévisions révisées pour 2006) mais de 154 millions d’euros par an. Une chose est sûre, la contribution de l’Etat fixée par la loi de finances devrait rester stable puisque le PLF 2007 la laisse au même niveau que l’année dernière (47). Le produit de la taxe attendu pour 2007 – avec les taux fixés en juillet 2006 – est de 90 millions d’euros, auquel il faut ajouter 4 millions d’euros au titre de la participation des éleveurs de porcs et de volailles. Le calcul est simple : un différentiel de 16 millions d’euros entre recettes et dépenses est d’ores et déjà prévisible pour 2007.

L’Office national interprofessionnel de l’élevage (ONIEP) sera-t-il à nouveau sollicité ? Cette hypothèse apparaît difficilement acceptable étant donné la faiblesse des marges de manœuvre dont devraient disposer les offices agricoles l’année prochaine. Ces derniers servent en effet cette année de variable d’ajustement dans le projet de budget de la mission Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales, en subissant une baisse de leurs moyens estimés à 30 millions d’euros en crédits de paiement pour 2007. On se demande donc comment l’ONIEP pourra continuer à exercer ses missions d’animation de la filière conformément aux dispositions adoptées dans le cadre de la loi d’orientation agricole. Enfin, le procédé en lui-même ne serait qu’une manière détournée d’obliger la filière à réévaluer sa contribution au financement du SPE.

Quant à la participation des éleveurs de porcs et de volailles, on rappellera que la loi de finances pour 2006 prévoyait initialement une contribution – certes révisable – à hauteur de 8 millions d’euros. 2 millions d’euros seulement ont finalement été récoltés. Qu’en sera-t-il en 2007 ? Cette question est d’autant plus importante que la Commission européenne, lorsqu’elle a validé le système mis en place par la France à partir de 2004, a imposé que les éleveurs des espèces non susceptibles d’être victimes de l’ESB (essentiellement porc et volaille) participent directement à hauteur de 25 % au moins des coûts de transformation et d’incinération des cadavres d’animaux. Or, ces dispositions sont restées pour l’heure partiellement inappliquées (48).

Le point sur le déstockage des farines animales

À la mi-2006, sur les 24 sites en France entreposant 780 000 tonnes de farines, 10 petits sites, correspondant à environ 44 000 tonnes de farines, avaient été déstockés et 7 étaient en cours de déstockage. Le gros du stock correspond à 7 autres sites qui totalisent plus de 570 000 tonnes de farines. Le rythme du déstockage reste fortement contraint par les capacités d’élimination des cimentiers (450 000 tonnes par an) et les nuisances entraînées par ces opérations pour les riverains.

Dans la loi de finances initiale pour 2006, 55 millions d’euros (en AE nouvelles et en CP) avaient été prévus afin de couvrir les besoins en termes de loyers des entrepôts (30 millions) et de lancement d’une première tranche de déstockage portant sur l’élimination de 200 000 tonnes de farines (pour un coût de 120 euros la tonne pour des farines de catégorie 3 dites « bas risque ») et sur le nettoyage des locaux (1 million d’euros).

Pour 2007, le montant demandé en AE (49 millions d’euros) couvre le renouvellement des loyers des entrepôts (10 millions d’euros) et la passation de nouveaux marchés de déstockage pour 300 000 tonnes de farines (39 millions d’euros). Notons à cet égard qu’un récent avis de l’AFSSA impliquant le reclassement de l’ensemble des farines animales en catégorie 1 dite « haut risque » a entraîné un accroissement du coût des opérations d’élimination, à hauteur de 130 euros en moyenne par tonne. La dotation en CP doit permettre de payer les loyers pour un montant de 24 millions d’euros, en baisse par rapport à 2006 en raison du déstockage déjà effectué, et la poursuite du déstockage à hauteur de 27,7 millions d’euros.

* Source : Projet annuel de performances ; audition du chef du bureau des ovins, bovins et de l’industrie des viandes, DGPEI, ministère de l’agriculture (18 octobre 2006).

Les principales questions sur l’avenir du SPE pour la Cour des comptes* :

- le risque financier lié au contentieux résultant du refus de l’État de rembourser les sommes perçues entre 2001 et 2003 au titre de la taxe sur les achats de viande (le produit de la taxe sur l’ensemble de la période 1997-2003 se monte à 1,7 milliard d’euros) ;

- les modalités du transfert du SPE à l’ONIEP ;

- le résultat de la nouvelle procédure de passation des marchés publics d’équarrissage : outre le fait que celle-ci semble avoir fait l’objet de concertation entre les opérateurs et qu’elle n’a pas permis de susciter de concurrence en attirant des sociétés européennes, elle se traduit pour le moment par une augmentation du coût du SPE ;

- les conditions de l’équilibre financier ne semblent toujours pas réunies : la réduction du périmètre du SPE n’a pas permis de diminuer significativement son coût pour les finances publiques, de même le principe d’une participation des éleveurs semble loin d’être acquis dans les faits, alors même qu’elle a été fixée au niveau des minima requis en droit communautaire.

* Source : Audition du 28 juin 2006 par la Commission des finances du Sénat.

Pour 2007, le gouvernement semble de nouveau s’orienter vers des solutions à court terme consistant soit à augmenter les taux de la taxe d’abattage soit à utiliser son « droit de tirage » sur le budget de l’État ou sur celui de l’ONIEP. Il semblerait toutefois qu’une mission interministérielle doive être mise en place afin d’explorer des pistes alternatives, mais aucune annonce officielle n’a pour l’heure été faite à ce sujet. Cette mission aurait notamment pour objectif d’étudier la possibilité – techniquement réalisable car déjà expérimentée dans la filière porcine par l’INRA – d’organiser la destruction de certains cadavres d’animaux sur place, de façon mutualisée.

S’agissant d’une privatisation totale du SPE, évoquée cet été dans la presse spécialisée (49), celle-ci reviendrait à reporter la totalité du coût du SPE sur les éleveurs, ce qui n’apparaît pas acceptable.

Quant à la recherche d’une meilleure application des règles de concurrence et donc in fine d’une fixation plus juste des tarifs, il convient de ne pas se leurrer : il sera difficile de trouver une solution à une situation suscitée par les pouvoirs publics en échange d’exigences élevés dans la fiabilité du réseau de l’équarrissage, situation qui a abouti à la création d’un solide duopole – constituée par les sociétés Saria et Caillaud (50). Une plus grande transparence du marché est cependant souhaitable. Elle pourrait notamment passer par une déconnexion du poste « collecte », qui connaît des coûts croissants en raison de la hausse des tarifs de l’énergie, du poste « équarrissage » proprement dit. Cette option serait à l’étude du côté des abatteurs qui, en assurant la collecte au profit des équarrisseurs, se poseraient en intermédiaires entre éleveurs et équarrisseurs.

Enfin, la piste la plus sérieuse reste la réouverture de certains marchés pour les farines animales : l’assouplissement de la réglementation communautaire, grâce à l’amélioration de la situation sanitaire sur le territoire de l’Union, est aujourd’hui envisageable et une partie des farines pourrait désormais être à nouveau valorisée au lieu d’être détruite. À cet égard, notons que la réutilisation des farines animales dans les engrais et les aliments pour animaux de compagnie est déjà à l’ordre du jour.

III.— EN 2007, QUELLE POLITIQUE POUR LES OGM AUX NIVEAUX NATIONAL ET COMMUNAUTAIRE ?

Alors que la France n’a toujours pas transposé en droit interne les directives 98/81/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés et 2001/18/CE relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement (51), le débat reste vif aux niveaux national et communautaire sur l’utilisation des OGM. Les multiples rapports parus sur le sujet ces dernières années n’ont pas réussi à apaiser les controverses et à rassurer l’opinion publique. Au niveau communautaire, la politique volontariste menée par la Commission européenne se heurte désormais aux initiatives des États membres pour contourner ou adapter la réglementation en vigueur. Il apparaît donc impossible à l’avenir de faire l’économie d’un grand débat public sur cette question, ne serait-ce que pour ne pas laisser le champ libre aux seuls groupes de pression, quels qu’ils soient, environnementalistes ou lobbyistes à la solde des grands groupes semenciers internationaux. Le propos qui sera développé ici n’a pas pour objet de lancer ce débat mais simplement de dresser l’inventaire des failles de la réglementation en vigueur et d’indiquer les points sur lesquels il conviendrait impérativement d’intervenir.

La législation communautaire dans le domaine des OGM a été peu à peu enrichie depuis le début des années 1990 dans la perspective de créer un marché unifié des biotechnologies, tout en garantissant un niveau élevé de protection des consommateurs et de l'environnement.

La réglementation régissant l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés dans la recherche et l'industrie ne fait pas vraiment débat, contrairement à la réglementation autorisant la dissémination des OGM à titre expérimental et en vue de leur mise sur le marché. Autorisée dans la Communauté jusqu'au 17 octobre 2002 par la directive 90/220/CEE (52), celle-ci relève désormais des dispositions de la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l’environnement.

La directive 2001/18/CE a mis en place une procédure d'autorisation, étape par étape, fondée sur une évaluation au cas par cas des risques pour la santé humaine et l'environnement avant toute dissémination dans l'environnement (expérimentation) ou mise sur le marché d'OGM ou de produits composés d'OGM ou qui en contiennent. Elle a notamment contribué à renforcer :

– la définition des principes applicables à l'évaluation des risques ;

– les exigences en matière de surveillance postérieure à la commercialisation, y compris en ce qui concerne les effets à long terme liés à l'interaction avec d'autres OGM et avec l'environnement ;

– l'obligation d'informer le public ;

– l'obligation, pour les États membres, de garantir l'étiquetage et la traçabilité à toutes les étapes de la mise sur le marché.

Cette directive a été complétée par deux règlements. Le règlement (CE) n° 1829/2003 concernant les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés, entré en application le 18 avril 2004, d’une part, prévoit des procédures d’autorisation de mise sur le marché centralisées pour les OGM et leurs produits dérivés destinés à l’alimentation humaine ou animale (53) et, d’autre part, définit les règles d’étiquetage des aliments contenant des OGM ou leurs dérivés. Quant au règlement (CE) n° 1830/2003 relatif à la traçabilité et l’étiquetage des OGM et la traçabilité des produits destinés à l’alimentation humaine ou animale produits à partir d’OGM, il prévoit un certain nombre d’obligations en matière de suivi des organismes génétiquement modifiés et d’information du consommateur (54).

Les seuils légaux de présence fortuite d’OGM au-dessus desquels l'étiquetage des produits est obligatoire ont fait l’objet d’un compromis politique et ne constituent en rien des seuils scientifiquement définis. Ainsi, entre les partisans d’une tolérance zéro et les défenseurs des semenciers, la balance s’est arrêtée sur 0,9 %. Ce chiffre n’a cependant pas été choisi au hasard : en effet, la fixation d’un seuil supérieur à 1 % aurait en lui-même remis en cause l’aspect fortuit de la présence d’OGM aux yeux du public, tandis qu’un seuil se rapprochant du seuil de détection aurait eu des conséquences financières telles qu’il aurait simplement signifié une interdiction des OGM.

Toutefois cette réglementation demeure lacunaire, dans la mesure où elle ne définit pas de seuil spécifique par types de production ou de produits, et en particulier pour les semences (55). Ainsi, à l’heure actuelle, s’il est clair que les variétés de semences dérivées d'organismes génétiquement modifiés doivent bien être autorisées conformément à la directive 2001/18/CE, un certain nombre d’interrogations demeurent sur des aspects majeurs de la production de semences tels que les conditions de culture, les exigences de pureté (quelle tolérance pour la présence de semences génétiquement modifiées dans des lots de semences de variétés traditionnelles ?) et les règles d'étiquetage.

Les professionnels des semences et de la protection des plantes réclament ainsi la fixation de seuils de présence fortuite d’OGM dans les semences conventionnelles, qu’ils voudraient voir défini, par exemple pour le maïs, autour de 0,5 %, seuil réputé permettre la production de récoltes respectant le seuil de 0,9 % sans nécessiter de changements significatifs dans les pratiques agricoles.

Après avoir évoqué la possibilité d’un seuil à 0,5 %, la Commission européenne n’a toujours pas formulé de proposition de décision en ce sens. Le commissaire européen à l’environnement, Stravros Dimas a même déclaré à plusieurs reprises être satisfait du « seuil implicite » aujourd’hui applicable (c’est-à-dire le seuil de détection), estimant qu’il n’y avait pas de vide juridique.

Le principe de coexistence, tel que défini au niveau communautaire, désigne la capacité des agriculteurs à pouvoir choisir librement entre une agriculture utilisant des organismes génétiquement modifiés, une agriculture biologique et une agriculture conventionnelle, dans le respect des obligations légales en matière d'étiquetage et/ou de normes de pureté des semences. Ainsi, d’emblée, la question de la coexistence se trouve ramenée dans la conception communautaire à la possibilité pour les agriculteurs de produire en dessous du seuil de 0,9 % et, le cas échéant, d’obtenir réparation pour le préjudice économique pouvant résulter d’une « contamination » accidentelle par des OGM.

Cette conception est réfutée par une grande partie des agriculteurs, notamment dans la filière biologique, qui considèrent que tout doit être mis en œuvre pour garantir à ceux qui le souhaitent le choix de produire « sans OGM », c'est-à-dire sans aucune trace d’OGM.

La Commission européenne a élaboré en juillet 2003 une recommandation établissant des lignes directrices pour la coexistence des filières dont la mise en œuvre relève du principe de subsidiarité. Si cette approche peut se justifier, en raison des différences de climats et de cultures sur le territoire de l’Union, les mêmes causes produisant les mêmes effets, il eût été souhaitable qu’un corpus minimal de règles soit défini pour tous. Au lieu de cela, les mesures visant à garantir la coexistence des cultures varient d’un Etat membre à un autre, parfois dans des proportions notables.

Les lignes directrices indiquent certes que les solutions en matière de coexistence doivent être élaborées dans la transparence, sur la base d’arguments techniques et en coopération avec les parties intéressées, qu’elles s’appuient sur l’expérience acquise avec les pratiques actuelles et assurent un juste équilibre entre les intérêts des agriculteurs des différentes filières de production. Les lignes directrices précisent également que les mesures de gestion destinées à assurer la coexistence doivent être spécifiques aux différents types de culture et être de préférence adoptées à l’échelle des exploitations agricoles et en coordination avec les exploitations limitrophes. Enfin, si les mesures mises en œuvre doivent être efficaces et d’un bon rapport coût/efficacité, elles ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour se conformer aux seuils fixés pour l’étiquetage des OGM.

Manifestement, tous les Etats membres de l’Union européenne n’adhèrent pas à cette conception de la coexistence, comme en témoignent les divergences qui se sont encore récemment fait jour lors de la conférence organisée par la Présidence autrichienne sur le thème « Coexistence entre cultures génétiquement modifiées, conventionnelles et bio : liberté de choix » (56). L’Autriche fait d’ailleurs partie de ceux qui ont pris des mesures au niveau national allant au-delà des prescriptions de la Commission (au même titre par exemple que l’Allemagne, le Luxembourg, la Hongrie et plus récemment la Pologne). Les distances imposées entre cultures bio et conventionnelles et cultures d’organismes génétiquement modifiés varient ainsi aujourd’hui entre 25 et 300 mètres. Par ailleurs, de plus en plus d’Etats membres font appel aux clauses de sauvegarde pour interdire certains OGM sur leur territoire (57).

Un réseau des régions sans OGM, qui compte aujourd’hui 39 membres, s’est même constitué, auquel s’ajoutent des initiatives tous azimuts qui portent à 172 le nombre de régions ou entités régionales qui se sont déclarées « sans OGM » (58). La plupart de ces régions ne se sont pas prononcées pour ou contre les OGM mais réclament « la possibilité de les refuser dans les cas où il est démontré que les autres cultures, qui constituent la base de [leur] économie, ne peuvent être protégées » (59).

La Commission européenne a indiqué, dans sa recommandation en matière de coexistence des filières publiée en juillet 2003, qu'en l'absence de seuil spécifique pour la filière biologique, le seuil de présence fortuite défini pour la filière conventionnelle s'appliquait également à elle. En conséquence, si un produit biologique ne peut être élaboré volontairement avec des OGM, il peut en revanche en contenir des traces, de façon fortuite, jusqu'à 0,9 % (cas d'une contamination au champ par exemple). Il en est de même pour les aliments pour animaux biologiques.

Ainsi, comme l’indique clairement la « fiche pratique consommation » de la Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) relative à l’étiquetage des OGM disponible sur le site internet du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, « compte tenu de ces précisions, les produits issus de la filière de l'agriculture biologique ne peuvent être qualifiés de ‘sans OGM’ du seul fait de leur mode de production. Les opérateurs qui souhaitent alléguer sur l'absence d'OGM doivent donc s'assurer que leurs produits issus de la filière biologique ne contiennent effectivement pas d'OGM au seuil de détection ».

Il est cependant prévu qu’un nouveau règlement relatif à l’agriculture biologique entre en vigueur au 1er janvier 2009 qui, d’après la proposition formulée par la Commission européenne, devrait permettre de clarifier les règles applicables aux OGM, notamment :

– en spécifiant les seuils généraux applicables en la matière,

– en précisant que les produits contenant des OGM ne peuvent pas être étiquetés comme produits issus de l’agriculture biologique,

– et en autorisant l’application de seuils spécifiques pour les semences.

Si l’on ne peut que se féliciter de cette annonce de la Commission, il est cependant difficile de s’empêcher de penser que, si les cultures d’organismes génétiquement modifiés étaient amenées à se développer de manière exponentielle sur le territoire de l’Union ces prochaines années, elles compromettraient de facto la réalisation de ces objectifs avant même que le nouveau règlement n’entre en vigueur. Par ailleurs, ce dernier laisse entière la question du coût subi par les producteurs biologiques pour se prémunir des OGM, question indissociable de celle des règles de coexistence.

L’Autorité européenne de sécurité alimentaire (AESA) fait l’objet de nombreuses critiques de la part des Etats membres pour sa gestion du dossier des autorisations de mise sur le marché d’OGM ou de produits alimentaires en contenant, aussi bien au niveau des méthodes d’évaluation employées que de la prise en compte des avis des agences nationales ou encore de la transparence de ses décisions. Certains Etats membres ont été jusqu’à demander une modification du panel OGM de l’Autorité européenne et le renforcement des dispositions relatives aux déclarations d’intérêt des experts, accusant indirectement ces derniers de collusion avec les entreprises semencières (60).

S’agissant plus particulièrement de la France, deux dossiers relatifs aux OGM ont notamment fait l’objet de divergences entre évaluateurs communautaire et national, relevés dans le rapport conjoint du COPERCI (61) et de l’IGAS (62) relatif à l’articulation entre expertises nationale et européenne en matière de sécurité alimentaire (décembre 2004). Il s’agit du dossier du maïs doux Bt11 qui oppose un avis du comité scientifique de l’alimentation (structure antérieure à l’AESA) à deux avis de l’AFSSA et du dossier du maïs MON863 qui oppose un avis de l’AESA à un avis de la CGB (Commission du génie biomoléculaire). Dans les deux cas, la France a dû arbitrer entre ces avis divergents pour définir sa position au niveau communautaire. Toutefois, le rapport note que les divergences relèvent plus d’une absence de dialogue que d’un désaccord scientifique profond.

L’AESA dispose cependant des outils institutionnels lui permettant de recueillir les avis des agences nationales et de dialoguer avec elles, notamment au travers du Forum consultatif, et conformément aux dispositions du règlement de 2002 dont elle-même est issue qui prévoit expressément son rôle d’animation du réseau européen des organismes actifs dans son domaine de compétence.

Outre que la nomination d’un directeur général français à la tête de l’Agence européenne de sécurité des aliments fait espérer que les pratiques changent (63) et que s’instaure une véritable coopération entre l’AESA et les agences nationales, en particulier l’AFSSA, la Commission européenne a proposé lors du Conseil européen de Luxembourg du 27 juin 2006 sept actions clés afin d’améliorer la légitimité des avis scientifiques formulés par l’Agence européenne. Sont notamment prévues une meilleure prise en compte des effets à long terme et des conséquences pour la biodiversité des biotechnologies ainsi que la possibilité de suspendre la procédure d’autorisation d’un OGM lorsqu’un Etat membre soulève de nouvelles questions scientifiques jusque là insuffisamment prises en considération par l’AESA.

Procédure d'autorisation de la mise sur le marché d'OGM

La procédure d'autorisation de mise sur le marché d'un OGM fait intervenir tous les États membres. Conformément à la directive 2001/18/CE, la demande doit être présentée à l'autorité nationale compétente d'un des États membres de l'Union, qui émet un avis sous la forme d’un « rapport d'évaluation ». Ce rapport d'évaluation peut être soit favorable, soit défavorable à la mise sur le marché. Dans le cas d'un avis défavorable, l'entreprise peut introduire une nouvelle demande pour le même OGM auprès de l'autorité nationale compétente d'un autre État membre. Celle-ci peut éventuellement émettre un rapport différent.

En cas d'avis favorable à la mise sur le marché de l'OGM concerné, l'État membre qui a reçu la demande et établi le rapport d'évaluation informe les autres États membres par l'intermédiaire de la Commission européenne. Les autres États membres et la Commission examinent le rapport d'évaluation et peuvent émettre des observations et objections.

En l'absence d'objections d'autres États membres ou de la Commission européenne, l'autorité compétente qui a réalisé l'évaluation initiale doit accorder l'autorisation de mise sur le marché du produit. Le produit autorisé peut alors être mis sur le marché dans l'ensemble de l'Union européenne, dans le respect des conditions éventuelles imposées par l'autorisation. L'autorisation a une durée maximale de dix ans et peut être renouvelée sous certaines conditions (par exemple sur la base des résultats du programme de surveillance postérieur à la commercialisation).

Si des objections sont soulevées, la procédure prévoit une phase de conciliation entre les États membres, la Commission et le notifiant. Cette phase a pour objectif de résoudre les questions en suspens.

Si, au terme de la phase de conciliation, des objections sont maintenues, une décision doit être prise au niveau européen. La Commission sollicite en premier lieu l'avis de l'Autorité européenne de sécurité des aliments.

La Commission soumet ensuite un projet de décision à l'avis du comité de réglementation, composé de représentants des États membres. Lorsque ce comité émet un avis favorable à la majorité qualifiée, la Commission adopte la décision.

Dans le cas contraire, le projet de décision est transmis au Conseil des ministres pour adoption ou rejet à la majorité qualifiée. Si le Conseil n'agit pas dans un délai de trois mois ou ne parvient pas à établir une majorité qualifiée, la Commission adopte la décision.

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Mise sur le marché d’OGM destinés à l’alimentation humaine ou animale ou de denrées alimentaires en contenant

Conformément à la procédure définie par le règlement (CE) n° 1829/2003, l'autorisation, valable dans l'ensemble de l'Union européenne, est accordée sur la base d'une évaluation unique des risques effectuée sous la responsabilité de l'Autorité européenne de sécurité des aliments et d'une procédure unique de gestion des risques faisant intervenir la Commission et les États membres par l'intermédiaire d'un comité de réglementation.

Les demandes sont, tout d'abord, soumises à l'autorité compétente de l'État membre où le produit doit être commercialisé en premier lieu. L'autorité nationale doit accuser réception de la demande par écrit dans un délai de 14 jours et informer l'AESA. La demande et toute information complémentaire fournie par le demandeur doivent être mises à la disposition de l'AESA, qui est responsable de l'évaluation scientifique des risques pour l'environnement et pour la santé humaine et animale. Son avis sera communiqué au public, qui aura la possibilité de le commenter.

En général, un délai de six mois est accordé à l'AESA pour rendre son avis. Ce délai peut être prolongé si l'AESA doit demander des informations complémentaires au demandeur.

Dans les trois mois suivant la réception de l'avis de l'AESA, la Commission rédige une proposition accordant ou refusant l'autorisation. La Commission peut s'écarter de l'avis de l'AESA, mais doit alors justifier sa position. La proposition de la Commission doit être approuvée à la majorité qualifiée des États membres au sein du Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale, composé de représentants des États membres.

Si ce Comité donne un avis favorable, la Commission adopte la décision. Si le Comité ne donne pas d'avis favorable ou rejette à la majorité qualifiée la proposition de la Commission, le projet de décision est soumis au Conseil des ministres pour adoption ou rejet à la majorité qualifiée. Si le Conseil n'agit pas dans un délai de trois mois ou ne parvient pas à une majorité qualifiée pour l'adoption ou le rejet de la proposition de la Commission, la Commission adopte la décision.

Ainsi, comme pour tous les dossiers précédemment examinés depuis l’entrée en vigueur du nouveau corpus législatif communautaire, le Conseil agriculture qui s’est réuni le 18 septembre 2006 a constaté l’absence de majorité qualifiée pour ou contre la proposition de décision de la Commission européenne relative à l’autorisation de deux colzas génétiquement modifiés (Ms8 et Rf3) et d’un hybride de ces deux variétés (Ms8xRf3) pour toute utilisation autre que l’alimentation humaine et la mise en culture. Les votes au sein du Conseil ont reproduit les avis émis par les experts nationaux et seuls 14 pays se sont prononcés en faveur d’une autorisation de mise sur le marché de ces trois colzas. Il reviendra donc à la Commission d’adopter seule sa décision (64).

Cette situation n’est pas satisfaisante. Certains Etats membres, tels l’Italie, la Hongrie, la Grèce, le Luxembourg, l’Autriche et le Danemark, réclament d’ailleurs le passage d’une majorité qualifiée à une majorité simple, pensant pour certains faire plus facilement barrage aux OGM, et pour d’autres en favoriser le développement ! La Commission est en outre pour l’heure opposée à cette réforme, bien que la procédure de comitologie en elle-même fasse actuellement l’objet d’un réexamen. En tout état de cause, là encore, un renforcement de l’expertise en amont ou plutôt la mise en place d’une véritable expertise conjointe permettrait peut-être aux Etats membres de rapprocher leurs positions et de prendre des décisions communes.

Les services de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes, qui disposent d’une compétence générale en matière de contrôle des denrées alimentaires, sont chargés de vérifier la conformité des produits à leur étiquetage. Rappelons à cet égard que le seuil de tolérance concernant la présence fortuite d’OGM dans un produit non étiqueté comme tel est fixé à 0,9 % par la réglementation communautaire (65). Ainsi le sort d’un produit alimentaire contenant des OGM mais non étiqueté comme tel dépendra de la nature des OGM le composant : si ces derniers ne sont pas autorisés dans l’Union européenne, le produit est en principe interdit (66) ; s’ils sont autorisés, l’étiquetage du produit doit simplement être modifié.

Les investigations menées par les agents de la DGCCRF consistent en des contrôles documentaires sur la nature et la validité des moyens mis en œuvre par les opérateurs pour s’assurer de la conformité des produits (factures, documents commerciaux, cahier des charges, rapports d'analyses internes, attestations des fournisseurs, vérification des autocontrôles…) assortis, le cas échéant, de prélèvements afin de détecter et quantifier la présence éventuelle d’OGM ou de dérivés. Chaque année, près de 500 établissements font l’objet de contrôles donnant lieu à l’analyse de près de 300 prélèvements.

Par ailleurs, on peut noter que dans le cadre d’une inspection de l’Office Alimentaire et Vétérinaire (OAV) concernant les contrôles sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés effectuée en mai 2006, le système de contrôle des OGM mis en place par la France a été jugé satisfaisant.

Les services régionaux de la protection des végétaux (SRPV) sont chargés du contrôle des semences (67), en collaboration avec les services des douanes (conformité de l’étiquetage à l’importation) et les directions départementales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (contrôles en commercialisation). Les services de la protection des végétaux interviennent exclusivement sur les lots de semences importés de pays tiers alors que les services des fraudes interviennent sur les lots de semences commercialisés en se concentrant sur les lots produits sur le territoire national et les autres pays de l’Union européenne.

Sur la réglementation appliquée, la DGAL a indiqué à votre rapporteur qu’il est considéré qu’il n’y pas infraction à la législation si la présence fortuite d’OGM dans les semences traditionnelles est inférieure à 0,5 % pour un OGM autorisé à la mise en marché y compris à la culture, et à 0,1 % pour un OGM autorisé à la mise en marché à des fins alimentaires, mais non autorisé pour la mise en culture. Les lots présentant des traces (taux supérieur au seuil de détection de 0,01 %) d’OGM non autorisés sont consignés, refoulés ou détruits.

S’agissant de l’application d’un seuil de tolérance de 0,5 %, on ne peut que constater que, contrairement au seuil de 0,9 % pour les produits alimentaires, ce seuil n’est pas un seuil réglementaire officiel. À cet égard, le site internet de la Commission européenne indique que les seuils de présence de semences génétiquement modifiées dans des lots de semences traditionnelles peuvent être définis « conformément à la directive 2001/18/CE et aux directives particulières relatives à la commercialisation des semences », tout en précisant que « ces seuils n’ont pas encore été fixés et sont toujours en cours de discussion ». La conclusion qui s’impose est donc « qu’actuellement, tous les lots contenant des traces décelables de semences génétiquement modifiées doivent être étiquetés comme génétiquement modifiés » (68).

En ce qui concerne les méthodes employées, le contrôle des semences importées de pays tiers fait l’objet de « plans de contrôle » annuels. Ainsi, le plan de contrôle 2005 prévoyait 222 prélèvements sur des lots de semences de maïs. Seulement 168 prélèvements ont pu finalement être réalisés, officiellement en raison de l’importance des flux d’importation des semences originaires de pays tiers aux premiers points d’entrée communautaire français, mais peut-être aussi en raison de l’insuffisance des moyens alloués aux SRPV.

Les résultats des analyses ont montré tout d’abord que les semences commerciales de maïs génétiquement modifiées prélevées étaient toutes en conformité avec la législation en vigueur en ce qui concerne leur étiquetage (taux de présence fortuite inférieur à 0,5 %). Sur les lots de semences de maïs conventionnel analysés, les services de la protection des végétaux ont en outre pu observer, comparativement à 2004, une réduction du nombre de lots positifs pour la présence fortuite d’OGM à 24,2 % contre 35 % l’année précédente, les taux de présence fortuite se situant, dans l’ensemble, en dessous du seuil de 0,1 % (le taux de présence fortuite observé est inférieur ou égal à 0,1 % dans 89,7 %). D’après la DGAL, les semenciers américains redirigeraient ou détruiraient en effet un quart de leurs lots de semences de maïs non OGM destinés à l’Europe pour cause de présence trop importante… d’OGM !

Selon le bilan des contrôles réalisés en 2005 par les services de la DGCCRF, dans le secteur de l’alimentation humaine, ceux-ci sont intervenus dans 281 établissements. Le contrôle documentaire a été assorti de prélèvements officiels dans 55 entreprises, donnant lieu à l’analyse de 69 échantillons. Sur ces 69 échantillons, tous les produits étaient conformes à la réglementation communautaire : la présence d’OGM était inférieure à 0,9 % et les opérateurs ont démontré qu’ils avaient pris des mesures appropriées pour éviter d’utiliser des OGM ou leurs dérivés, justifiant ainsi le caractère fortuit des traces mises en évidence (69). S’agissant de l’étiquetage des produits, les contrôles montrent que les opérateurs respectent globalement bien les nouvelles dispositions issues du règlement (CE) n°1829/2003 applicables depuis avril 2004 : sur 281 établissements contrôlés, 232 ne présentaient aucune anomalie.

En alimentation animale en revanche, les résultats des contrôles sont beaucoup plus mitigés. En 2005, 84 établissements ont été inspectés afin de s’assurer de la conformité de l’étiquetage des produits. Ces investigations ont donné lieu à l’analyse de 102 prélèvements réalisés à la fois sur des matières premières et des aliments composés. Sur les 102 échantillons analysés, 70 contenaient des OGM dont 46 sous la forme de traces inférieures au seuil d’étiquetage de 0,9 % ; 24 échantillons contenaient des OGM en quantité comprise entre 0,9 et 20 %, principalement du soja Roundup Ready.

Si les OGM mis en évidence étaient tous autorisés, l’application de la réglementation relative à l’étiquetage s’est cependant avérée insuffisante. Sur les 102 échantillons analysés, 22 étaient non conformes : 15 étaient non conformes à l’obligation communautaire d’étiquetage, la présence d’OGM supérieure à 0,9 % n’étant pas mentionnée, et 7 étaient non conformes aux exigences pour alléguer l’absence d’OGM. À cet égard, les services de la DGCCRF signalent qu’en alimentation animale comme en alimentation humaine, des mentions du type « sans OGM » continuent d’être employées de façon abusive sans que l’absence d’OGM soit effective.

Comme en témoigne la récente affaire du riz transgénique LL601 (voir encadré ci-dessous), les « accidents » demeurent fréquents et, quelle que soit la qualité des contrôles mis en œuvre en aval, conduisent à s’interroger sur les précautions prises par l’industrie agroalimentaire et la fiabilité des mesures de détection mises en place tout au long de la chaîne alimentaire.

Le point sur la présence de riz OGM LL 601 non autorisé

dans du riz importé des États-Unis

Rappel

La Commission européenne a déclenché le 23 août 2006 une alerte après avoir été informée, par les autorités américaines, d’une contamination possible de lots de riz importés des Etats-Unis par du riz génétiquement modifié LL RICE 601, non autorisé à la mise sur le marché communautaire.

Dans une décision du même jour, la Commission a demandé que tout lot de riz importé des Etats-Unis à compter de cette date fasse l’objet d’une analyse afin de s’assurer de l’absence de riz transgénique LL RICE 601 et a également demandé aux Etats membres de prendre des mesures appropriées pour les produits déjà présents sur le marché.

Elle a également exigé que le riz à grains longs en provenance des Etats-Unis soit désormais certifié exempt de ce riz génétiquement modifié non autorisé.

Les mesures prises sur le territoire français

Dès l’annonce de cette suspicion par la Commission européenne, la DGCCRF a diligenté une enquête auprès des importateurs français de riz américain et fait procéder par ses services de contrôle à des prélèvements sur les lots de riz en stock ou en cours de conditionnement. La DGCCRF a en outre demandé aux divers opérateurs détenteurs de stocks de riz provenant des Etats-Unis de bloquer leur commercialisation dans l'attente d'un résultat d'analyse (officiel ou laboratoire privé) garantissant la conformité du produit.

Bilan

Au 10 octobre 2006, 44 prélèvements ont été réalisés par la DGCCRF. Sur les 39 résultats disponibles (les 5 prélèvements restants sont en cours d’analyse) :

- 28 échantillons ne comportent pas de riz transgénique ;

- 10 échantillons ont mis en évidence la présence de riz LL 601 ;

- 1 échantillon a mis en évidence la présence de riz LL 62, autorisé aux États-Unis mais pas encore en Europe (un dossier de demande d’autorisation a été déposé en 2004).

Les importateurs et opérateurs de la filière riz ont procédé au retrait des lots en stock contenant du riz génétiquement modifié.

Suites

Les contrôles officiels réalisés par les autorités néerlandaises sur des lots récemment importés des États-Unis par bateau ont montré la présence du riz LL RICE 601 alors que les autocontrôles américains réalisés sur ces mêmes lots faisaient état d'une absence d'OGM.

* Source : Point de situation des contrôles de la DGCCRF au 10 octobre 2006.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du 25 octobre 2006, la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire a examiné pour avis les crédits de la mission « Sécurité sanitaire » pour 2007 consacrés au programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », sur le rapport de M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert, rapporteur pour avis, a indiqué que le programme Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation constituait l’un des deux programmes de la Mission interministérielle « Sécurité sanitaire », l’autre programme, consacré à la veille et à la sécurité sanitaires, faisant l’objet d’un avis de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

En France, la sécurité alimentaire est entrée dans les mœurs, comme en témoignent les réactions positives aux différents avis produits par l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) sur l’influenza aviaire en 2006. Après sa création en 1998, l’Agence a été contestée dans sa gestion des crises, y compris au niveau politique. Ce n’est plus le cas aujourd’hui où chacun reconnaît que son travail a permis de redonner du crédit à la politique de sécurité alimentaire aux yeux de nos concitoyens. La confiance du public dans les institutions et les mécanismes de gestion des crises est désormais acquise grâce notamment à une mobilisation sans faille des personnels de l’AFSSA et du ministère de l’agriculture pour produire une expertise et des contrôles de qualité et contribuer à la fluidité de l’information sur la situation sanitaire.

C’est pourquoi il est regrettable qu’une fois de plus, les dotations du programme Sécurité et qualité sanitaires pour 2007 ne soient pas à la hauteur des responsabilités et des attentes dans ce domaine.

Si la priorité donnée à la politique de sécurité sanitaire dans l’action du ministère de l’agriculture et de la pêche est confirmée, avec une hausse de crédits de 3,5 %, la vigilance reste de mise avec le maintien d’un risque sur la grippe aviaire, l’existence de foyers de fièvre catarrhale sur notre territoire et, en parallèle, le renforcement de la réglementation communautaire en matière de sécurité sanitaire à l’occasion de l’entrée en vigueur du Paquet hygiène au 1er octobre. Il convient à cet égard de signaler que de nombreuses hausses de crédits au sein du programme – comme la lutte contre les salmonelles et la trichine du porc dans l’action 03 – résultent en fait d’obligations communautaires.

Par ailleurs, la hausse des crédits de 3,5 % pour 2007 est moitié moindre que l’année dernière, et lorsque l’on sait qu’au cours de l’exercice 2006, le programme a fait l’objet d’un gel de crédits de 4,5 %, on ne peut que s’interroger sur ce qu’il restera de cette hausse après régulation. S’agissant des mises en réserve de crédits pour 2006, celles-ci ont en tout cas eu des répercussions importantes, notamment sur les crédits de fonctionnement des directions départementales des services vétérinaires, pourtant fortement sollicitées, et sur le budget de l’AFSSA, déjà très contraint.

En ce qui concerne les hausses de crédits au sein du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », un certain effet de rattrapage sur les moyens consacrés de la lutte contre les maladies animales (action 02) peut être relevé. L’année dernière, l’existence de sous-dotations dans ce domaine avait d’ailleurs été dénoncée dans le rapport pour avis, notamment sur la grippe aviaire et la tremblante du mouton, deux postes de dépenses qui ont ensuite dû faire l’objet d’importantes ouvertures de crédits en cours d’année.

S’agissant des baisses de crédits, elles concernent essentiellement les moyens des services déconcentrés de la Direction générale de l’alimentation (DGAL) et ceux de l’AFSSA, qui continuent de stagner. La situation de l’action 01 est quelque peu différente, puisque la diminution des crédits résulte d’un transfert de charges sur un autre programme du ministère de l’agriculture et de la pêche.

L’évolution des moyens des directions départementales des services vétérinaires (DDSV) et de l’AFSSA est pour le moins contradictoire avec les objectifs affichés en matière de contrôle et d’expertise. Les DDSV bénéficient ainsi d’une hausse quasi nulle de l’action 06 à hauteur de 0,69 %, au sujet de laquelle les responsables de la DGAL ont admis lors de leur audition qu’elle entraînerait l’abandon de certaines missions, notamment des missions de contrôle des viandes dans les abattoirs actuellement assurées par des vacataires. Si cette évolution s’inscrit dans une logique de renforcement des autocontrôles et de développement des contrôles en amont des abattoirs, expérimentée en 2007, elle ne peut justifier de baisse de crédits dès cette année, tant que l’expérimentation n’a pas été menée à son terme et prouvé sa pertinence.

Pour l’AFSSA, la hausse affichée de 9 % de l’action 04 correspond en réalité à des transferts et des augmentations inéluctables de charges : la dotation du ministère de l’agriculture se situe donc exactement au même niveau qu’en 2006 et ne permet pas à l’Agence de financer des mesures nouvelles ou de retrouver des capacités d’autofinancement pour investir sur l’avenir. En 2005, le niveau des réserves prudentielles était déjà atteint et si l’Agence a pu bénéficier de moyens supplémentaires en cours d’année dans le cadre des avis qui lui ont été demandés sur la grippe aviaire, ceux-ci se sont limités à une création de poste correspondant à l’embauche, pendant un an, d’un chercheur sur le site de Ploufragan.

Enfin, il faut également signaler la baisse des crédits consacrés à l’élimination des farines animales et au service public de l’équarrissage (action 05), dossiers qui, au-delà de leurs aspects financiers, n’ont toujours pas trouvé de solutions durables. En effet, en 2006, la seule porte de sortie imaginée par le gouvernement a consisté à reporter le financement du déficit du service public de l’équarrissage (SPE) sur l’Office de l’élevage, qui a ainsi vu son budget ponctionné à hauteur de 16 millions d’euros. Or, dans le projet de loi de finances pour 2007, ce sont encore les offices agricoles qui subissent l’essentiel de l’ajustement budgétaire imposé au ministère de l’agriculture et de la pêche. Il apparaît donc désormais difficile de reporter à nouveau la charge du SPE sur ces offices, dont on peut se demander par ailleurs comment ils vont réussir à mener à bien en 2007 les missions qui leur ont été confiées par la loi d’orientation agricole.

La création en 1998 d’une véritable politique de sécurité alimentaire, axée autour de l’expertise de l’AFSSA, était une initiative consensuelle. La diminution des moyens affectés à l’Agence ne peut donc qu’être unanimement dénoncée en ce qu’elle met en danger l’ensemble de notre dispositif de sécurité sanitaire. Quant aux contrôles opérés par les directions départementales des services vétérinaires, on connaît leur importance et on sait que toute restriction des moyens des services de l’État aura des conséquences sur le terrain.

Estimant en conséquence que les crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » pour 2007 n’étaient pas à la hauteur des enjeux de la politique de sécurité alimentaire mise en œuvre par la France, le rapporteur a conclu en invitant la commission à émettre un avis défavorable à l’adoption de ces crédits.

M. Antoine Herth, s’exprimant au nom du groupe UMP, a jugé que les crédits affectés au programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » confortaient l’importance de l’AFSSA, importance par ailleurs consacrée dans la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d’orientation agricole, qui confie désormais à l’Agence l’évaluation des produits phytosanitaires préalable à leur mise sur le marché. Il convient donc de se féliciter de la hausse de ces crédits.

S’agissant de la grippe aviaire, le dernier rapport consacré à ce sujet par l’AFSSA en septembre 2006 souligne la forte réduction des risques liés à la contamination des volailles domestiques par les oiseaux migrateurs. On constate un certain recul de l’épidémie de H5N1, aussi le dispositif de surveillance peut-il être allégé. L’action de la l’AFSSA doit en effet être adaptée à l’évolution des risques.

En ce qui concerne le service public de l’équarrissage, et plus particulièrement le sort réservé aux matériaux à risque spécifiés, supprimés de la chaîne alimentaire depuis 1996, la filière ovine notamment exprime une certaine inquiétude en raison du coût élevé d’intervention sur les carcasses. Peut-être faudrait-il réévaluer les mesures de précaution prises par le passé et examiner leur adéquation avec le degré de risque que présentent aujourd’hui ces matériaux.

On peut enfin s’interroger sur l’évolution du rôle des offices agricoles, dont les missions ont été redéfinies par la loi d’orientation agricole, missions qui devraient par ailleurs sans doute encore évoluer sous l’effet de la création de l’Agence unique de paiement des aides (AUP).

Concluant son propos, M. Antoine Herth a indiqué que le groupe UMP émettrait un avis favorable à l’adoption des crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaire de l’alimentation ».

Mme Geneviève Gaillard, pour le groupe socialiste, a souligné l’importance des enjeux liés à la sécurité sanitaire et à la surveillance de la qualité de l’alimentation.

Il s’agit d’un problème qui prend de l’ampleur, sans doute parce que les modes de production de la filière alimentaire laissent subsister des risques importants.

Le dispositif de surveillance et de recherche doit s’adapter à l’évolution des risques, mais il convient néanmoins de maintenir à tout moment une capacité d’intervention optimale, car de nouveaux risques sont susceptibles de survenir à tout instant. La mobilisation immédiate de l’AFSSA et des laboratoires de recherche spécialisés a ainsi permis de circonscrire le risque lié à la grippe aviaire. Or, les crédits augmentent faiblement et permettent à peine de combler les retards accumulés au cours des dernières années.

Il convient en outre de souligner la nécessité absolue de doter les services vétérinaires de moyens suffisants afin de maintenir leur capacité d’action sur le terrain.

Par ailleurs, il est regrettable de constater que sur certains sujets, la réflexion semble bloquée, comme sur les farines animales ou les risques liés aux morsures de chien, pour lesquels des mesures d’interdiction générale et sans réelle portée ne suffisent pas, ou bien encore sur l’amélioration des conditions d’élevage des animaux, dont on sait qu’elles contribuent largement à garantir la qualité sanitaire des aliments.

M. Léonce Deprez a regretté que le programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » ne puisse faire consensus alors que ses crédits connaissent une hausse sensible de 3,5%, de nature à permettre le renforcement de la prévention et des capacités de recherche.

M. Jean Gaubert, rapporteur pour avis, a estimé que c’était en raison de l’importance attachée aux questions de sécurité sanitaire qu’il convenait d’être attentif aux moyens qui y sont alloués et d’être vigilant quant à leur évolution.

La directrice de l’AFSSA, Mme Pascale Briand, a ainsi souligné, au cours de son audition, que 3 millions d’euros allaient manquer à l’Agence pour boucler son budget. Les crédits affectés à l’AFSSA pour 2007 ne peuvent donc qu’être jugés insuffisants. S’il va de soi que les moyens doivent être adaptés à l’évolution des risques, on peut s’interroger sur les méthodes de gestion consistant à créer des pôles d’expertise, comme à Ploufragan sur la grippe aviaire, qui constituent un investissement lourd, sans toutefois les doter d’un effectif minimal pérenne faute de crédits pour les rémunérer.

S’agissant des services vétérinaires et des réseaux de vétérinaires sanitaires, on constate déjà une certaine désaffection sur ces missions liées à des difficultés de rémunération, comme l’impossibilité de se faire rembourser les frais de transport. Si l’on n’y prend garde, on risque de se trouver rapidement confronté à une pénurie de personnels qualifiés, ces derniers préférant s’orienter vers la pratique en cabinet en milieu urbain.

Contrairement aux conclusions du rapporteur pour avis, la Commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation ».

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